2.2. Organisation et
fonctionnement du sous-commissariat Kafubu
A titre de rappel, le sous commissariat de Kafubu est un poste
de police. Il relève du commissariat de Kampemba. Celui-ci est l'un des
sept commissariats du commandement ville appelé autrement District
police ville de Lubumbashi qui est le Bataillon. C'est la police territoriale.
Le commandement ville dépend directement de l'Inspection provinciale du
Katanga ainsi que toutes les unités spécialisées de la
Police. L'inspection du Katanga représente l'Inspection
Générale qui collabore directement avec le Ministère de
l'intérieur duquel elle relève.
Les sous-commissariats sont implantés dans les
communes, au niveau de chaque quartier. Faute d'effectifs et de moyens,
certains en sont dépourvus et d'autres sont inopérationnels.
En principe le sous-commissariat est dirigé par un
commandant qui a la qualité d'OPJ et le rang de chef peloton. Le peloton
organique est de 48 éléments tandis que le sous-commissariat ne
dispose au plus que 16 éléments et d'autres n'en disposent que
quatre avec toutes les difficultés que le moindre effectif pèse
sur le fonctionnement. Ce poste compte 4 OPJ en son sein et 2 stagiaires
pratiques.
Si dans le commissariat, les différents OPJ se
relèvent pour assurer la permanence nocturne et diurne les jours
fériés, samedi et dimanche, par contre dans le sous-commissariat,
elle est assurée par le chef de poste qui est un APJ. Pendant la nuit,
c'est lui qui coiffe le sous-commissariat. Présentement, le poste de
police de Kafubu dispose d'un effectif de 16 éléments sous la
disposition du Gradé d'élite chargé de contrôler
leur présence et de repartir les tâches journalières. Il
joue le rôle de mère du poste et c'est lui qui introduit les APJ
au commandant pour le rapport lorsqu'ils ont un problème. Ceci pour dire
que la police suit la logique militaire. Il est à la fois avocat et
accusateur des policiers.
Le sous-commissariat dispose de 16 éléments dont
4 sont détachés. Ces éléments sont organisés
en 3 équipes de 4 éléments. Quand la première
assure la garde, la seconde est chargée de la patrouille et la
dernière assure le piquet d'intervention. La relève s'effectue
après 48 heures pour toutes les équipes. L'effectif est moindre
et l'on constatera qu'il manque une équipe de réserve
destinée à faire la tournée ou renforcer l'équipe
de piquet en cas d'éventualité. L'équipe de garde fait 24
h/24 pendant deux jours, celle de piquet reste sur place de 7 heures à
18 heures.
Il sied de remarquer que le commandant sous-commissariat et
ses OPJ n'assurent ni la garde, ni le piquet, ni la réserve.
Néanmoins, ils assurent la permanence et supervisent la patrouille au
niveau du commissariat selon le rôle mensuel établi pour cette
fin.
Le chef de poste est responsable de la garde. Il est
épaulé par le caporal de poste qui est le gardien de l'Amigo ou
cachot. Il assure la relève en suivant le rôle de veille. Il tient
également à la propreté du bureau, de l'Amigo et de
l'espace extérieur en donnant la corvée aux personnes en
détention. Les autres sont les sentinelles responsables des points
à surveiller. Elles se communiquent les consignes et ne peuvent utiliser
les armes que dans les cas prévus par les dispositions
réglementaires (cas de légitime défense, cas de
nécessité absolue). A l'approche d'une autorité ayant
droit aux honneurs, la sentinelle qui est à l'entrée
prévoit la garde.
Le gardien intervient la nuit en cas de
nécessité, acte les plaintes qui viennent et fait le rapport le
matin au commandant sous-commissariat. La garde est une occasion pour le chef
de poste de faire la pratique de l'OPJ debout. D'ailleurs, pendant la nuit, la
police en tant que service d'intérêt public, tous ceux qui
viennent l'appellent commandant, à moins que la personne connaisse le
rouage de la police. A titre indicatif, deux rivales s'étaient battues
pendant la nuit. La première femme a porté plainte contre sa
rivale. Après avoir payé les frais, la rivale a été
arrêtée et acheminée au sous-commissariat. Le chef de poste
qui assiste souvent au déroulement des différentes auditions a
assez l'expérience pour entendre verbalement les deux parties. Leur mari
étant intervenu et un terrain d'entente a été
trouvé. C'est ainsi que le chef de poste va recourir au principe
d'Archimède qui dit qu'un corps plongé dans l'eau, remonte
verticalement. « Anesha kwangukiya mu mayi, atatokamo wa
kukauka » (elle est déjà tombé dans l'eau,
elle ne va pas en sortir séchée.) Par manque d'argent, le mari a
laissé en gage sa radio cassette à retirer le matin après
avoir payé 10.000 FC d'amende transactionnelle. Comme le chef de poste
s'était déplacé, ledit mari est venu avec ladite somme
pour récupérer sa radio. Il nous demandait de lui indiquer le
commandant qui a fait la permanence la nuit pour lui verser l'argent et
récupérer sa radio. Nous lui avons dit d'attendre le chef de
poste en vue de régler son problème. C'est de cette façon
que nous avons su que le chef de poste a fait la pratique de l'OPJ debout
à notre insu et pendant la nuit.
Dans son fonctionnement, le sous-commissariat se bute à
beaucoup de difficultés. A titre purement illustratif, nous en
indiquerons quelques unes relatives à la logistique, infrastructure,
personnel et équipement.
- Carence des fournitures de bureau, ce qui donne l'occasion
aux OPJ de demander les frais de papiers ou bics au plaignant ou
prévenu.
- Effectif des APJ sensiblement réduit et qui rend
difficile le service de garde, de piquet de patrouille et d'organiser
l'équipe de réserve.
L'effectif réduit surtout par le détachement
augmente le surplus des tâches et prive les repos aux policiers. Il
affaiblit l'autorité et réduit le contrôle en limitant les
punitions au besoin de service ; Pour échapper à la
contrainte des tâches, les policiers créent la rubrique malade ou
congé des circonstances.
- Le détachement rend aussi difficile le service
normal. La plupart de nos agents sont détachés dans les
entreprises minières. C'est un handicape sérieux au
fonctionnement du sous-commissariat.
- Manque d'appareil de communication, le chef de poste est
obligé d'avoir un appareil cellulaire et des unités pour
communiquer chaque 5 heures du matin, la situation de garde et du quartier
Kafubu au commandant sous-commissariat. Celui-ci informe à son tour le
commandant commissariat qui la répercute au commandant ville qui
contacte l'inspecteur provincial qui communique à ses
supérieurs.
- Manque de frais de fonctionnement qui fait que les OPJ
demandent les frais d'instruction, de plainte et de transfert du dossier.
- Manque de véhicule de transport. Les policiers sont
obligés de recourir aux particuliers, ce qui rend difficile et illusoire
toute forme d'intervention en cas d'appel urgent. Lorsqu'ils arrivent en retard
sur le lieu d'appel, ils sont reçus sous le jet des cailloux et de cris
de moquerie « quelle police d'intervention
retardée ?» Les APJ sont obligés d'effectuer de longues
distances à pied, à leurs risques et périls, parfois avec
des détenus qui guettent une occasion pour s'évader. En effet, il
faut passer au commissariat en payant deux trajets pour avoir le numéro
du procès-verbal en vue de se rendre au Parquet pour le transfert.
- Insuffisance d'armes et munitions pour différents
services.
- Affluence des injonctions émanant du Parquet de
Grande Instance, d'Auditorat militaire, le trafic d'influence,
« intimidation » des OPJ dans l'exercice de leurs
fonctions.
- Manque de bureau approprié. C'est l'habitation
privée qui est transformée en bureau. Il se trouve dans un
état de détérioration plus ou moins avancé avec les
mobiliers qui ne permettent pas de travailler à l'aise. Certains
« clients » de la police se mettent debout durant
l'audition par manque de chaises.
- L'inexistence des documents d'identité pour citoyen,
ce qui rend incertains les renseignements fournis par les
« justiciables ». D'aucuns ne disposent que de la carte
d'électeur. Cependant, plusieurs viennent au bureau sans en être
munis.
- Manque d'uniforme pour certains policiers. La plupart
d'entre-eux se débrouillent tant bien que mal dans la friperie où
ils achètent des pantalons bleu marine et des chemises bleu-ciel ainsi
que des bottines de fortune qu'ils peuvent trouver par occasion.
Il y a une certaine discrimination dans la dotation, ce qui
fait que la minorité reçoit la dotation et les autres sont
abandonnés à leur triste sort et doivent se débrouiller.
Dans l'entre-temps, les uniformes de la police sont vendues dans le couloir et
en privé.
Il y a lieu aussi d'indiquer les différents documents
que doit avoir un OPJ conformément aux Articles 2 et 3 de l'Ordonnance
régissant la police judiciaire.
Parmi les documents existants, nous pouvons citer :
- registre de consignation ;
- carnet de convocation ;
- carnet de transmission ;
- registre d'écrou ;
- registre de correspondance ;
- registre des plaintes.
Ces documents ci-après de nature obligatoires n'y
existent pas :
- registre des procès-verbaux ;
- registre général d'officier de Police
Judiciaire (ROS) ;
- registre de dépôt (R.D) ;
- livre de caisse auxiliaire ;
- registre de dommages-intérêts ;
- quittancier de dommages-intérêts et un registre
individuel d'officier de Police Judiciaire.
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