II-Les échecs relatifs des politiques de
libéralisation financière
Sous l'égide des grandes institutions internationales,
les pays de l'UEMOA ont entrepris des programmes de libéralisation
financière à partir de 1989. S'appuyant sur les
thèses néolibérales de McKinnon (1973) et Shaw (1973)
selon lesquelles, dans le cadre d'une
économie financièrement réprimée,
la fixation des taux d'intérêt en dessous de leur valeur
d'équilibre : i) réduit l'épargne au profit de la
consommation courante; ii) fixe l'investissement en dessous de son niveau
optimal; iii) détériore la qualité des investissements
réalisés dans la mesure où les banques seront
obligées de financer des projets liés à des secteurs
à faibles rendements tels que le secteur agricole ou encore
l'immobilier, etc. De méme, la libéralisation du secteur
financier peut accroître l'intermédiation bancaire. Cet
accroissement de l'activité bancaire peut entraîner la
réduction des frais d'intermédiation entre prêteurs et
emprunteurs grace à la réalisation d'économies
d'échelle, la facilité de l'accès des emprunteurs aux
fonds prêtables et enfin la diversification du risque.
Après plus de deux décennies d'ajustement et de
réformes, les résultats restent en deçà des
attentes théoriques. Les échecs relatifs aux réformes
financières en zone UEMOA qui se traduisent par la faiblesse de
l'épargne mobilisée, le problème de la surliquidité
du système bancaire et la volatilité des spreads des taux
bancaires sont présentés dans ce point.
II-1- La faiblesse de l'épargne
mobilisée
Les defenseurs de la libéralisation financière
ont prévu que la déréglementation et la
libéralisation financière entraineraient une augmentation
significative de l'épargne nationale grace à l'augmentation
conséquente du nombre d'institutions financières, de la gamme des
instruments financiers et de la qualité de la réglementation et
de la supervision bancaire. Ainsi, la libéralisation financière
entamée par les gouvernements des pays de l'UEMOA depuis les
années 1989, avait pour ambition d'augmenter l'épargne.
Malgré ces réformes, le taux moyen d'épargne nationale de
la région est resté faible par rapport aux autres régions
économiques du monde en développement. Le tableau 1 illustre
l'évolution du taux d'épargne de la zone UEMOA comparativement
aux autres régions des pays en développement.
Tableau 1 Taux moyens d'épargne en
1985, 1995,2000 et 2005(en % du PIB).
Année
|
1989
|
1995
|
2000
|
2005
|
UEMOA
|
5,825
|
9,618
|
7,004
|
9,732
|
Afrique subsaharienne
|
19,810
|
16,047
|
19,398
|
18,259
|
Asie du sud
|
19,810
|
22,962
|
22,266
|
26,888
|
Asie orientale et les pays du pacifique
|
33,959
|
39,634
|
35,815
|
43,002
|
Amérique Latine et Caribéen
|
24,922
|
19,120
|
18,968
|
22,264
|
Source: WDI, 2008
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En observant le tableau ci-dessus, on constate que la
libéralisation financière n'a pas permis une évolution
significative de l'épargne nationale de la zone UEMOA. Le taux
d'épargne
de la zone est resté en dessous de 10% et inferieur
à ceux du reste de l'Afrique subsaharienne, d'Asie du sud, d'Asie
orientale et d'Amérique Latine (tableau 1). Cette faiblesse de
l'épargne intérieure semble être à l'origine du
retard de développement économique de la zone par rapport aux
autres régions en développement. L'épargne
intérieure reste pour toute économie un élément
important au moins pour deux raisons : D'une part elle permet de réduire
la dépendance vis-à-vis de l'extérieur, et d'assurer
croissance durable au moyen d'investissements continus. En effet, la
création et le développement des entreprises nécessitent
un investissement. Toutefois, celui-ci ne pourra guère se faire sans une
mobilisation des ressources. Cette faiblesse de l'épargne
intérieure explique les faibles progrès économiques de la
zone UEMOA et la rendant davantage extravertie.
En plus la faiblesse de l'épargne est associée
à une surliquidité du système bancaire, qui est devenue
une préoccupation majeure dans l'UEMOA, à un moment où la
demande de crédits est loin d'être satisfaite.
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