2.2.2 LE PROCESSUS DE FORMATION
Pairform@nce propose un modèle général de
formation pour produire ses effets globaux d'augmentation des
compétences et des pratiques. Le principe unique de formation est
d'amener le stagiaire à « produire » pratiquement un artefact
informationnel à l'aide d'une ou plusieurs techniques. Plusieurs outils
de la société numérique peuvent être
sollicités et assemblés pour effectuer cette production. Afin de
renforcer le caractère impératif de l'objectif de production, une
« obligation » est faite de soumettre l'artefact à la «
cible », en l'occurrence ici, les élèves eux-mêmes. Le
processus se découpe alors en sept phases de travail.
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Figure 1: Les 7 étapes de la démarche
formative. (Source : FREMAUX, V. « Mise en oeuvre d'une
application à grande envergure sous Moodle À Le projet
Pairform@nce (SDTICE) »)
1. L'entrée dans la formation : c'est
une phase introductive de découverte du parcours de formation et de ses
objectifs. Le stagiaire est amené à comprendre la nature du
« produit » que le parcours propose d'accomplir.
2. La sélection des contenus et formation des
équipes : cette étape permet de choisir les
matériaux de base (matières premières) du «
produit » à fabriquer. En effet, le programme Pairform@nce vise
plus à démontrer des processus qu'à demander la
reproduction à l'identique d'un cas préfabriqué et
pré-arrangé. Pour sortir du cas d'école, la production de
chaque équipe devra s'appliquer sur un champ de manoeuvre qui lui est
propre, avec des matériaux de départ adaptés au projet
réel de chaque équipe. Ainsi, par exemple, si la production
consiste à publier un document hypermédia informationnel, le
thème, les textes, les ressources graphiques appropriées font
partie de ces matériaux de départ. Il faut noter que c'est
également pendant cette phase que le programme propose la constitution
d'équipe. Ce qui permet
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de diluer les éventuelles difficultés
d'apprentissage.
3. Autoformation et co-formation en présence et
à distance : cette phase consiste précisément
à se former à l'usage des outils du monde
numérique, soit dans leur pratique, soit à travers les concepts
sous-jacents qu'ils outillent, afin d'être en mesure d'accomplir les
actes métiers nécessaires à la production proprement dite.
Cette formation peut prendre plusieurs formes, soit la forme d'une
autoformation à l'aide de tutoriaux et de cas pratiques, soit
organisée de manière collective par échange de points de
vue et d'expérience, ou encore organisée selon un schéma
plus traditionnel d'apprentissage encadré.
4. Production collective d'une situation
pédagogique : à cette étape précise on
effectue la production proprement dite de l'artefact. Ce dernier doit, au
préalable, avoir été bien spécifié, afin de
réduire au maximum les risques d'échec sur l'objet à
produire. Comme cette production vise à une utilisation
pédagogique « sur le terrain », elle est toujours
encadrée par les tuteurs afin de ne pas perdre de vue l'objectif. Il ne
s'agit pas en effet de « produire pour soi », mais de concevoir un
dispositif à vocation pédagogique qui utilise les TIC et d'en
tirer parti pour améliorer le point de contact entre
l'élève et le savoir.
5. Mise en oeuvre de la séquence ou de
l'activité : une fois l'objet produit, sa seule validation
consiste à le mettre à l'épreuve sur le terrain
réel auquel il est destiné. C'est donc dans un cadre
expérimental et en face des élèves que l'artefact devra
être exploité. Cette expérimentation constitue un acte
délicat, car sa seule valeur réside dans les observations qui
peuvent être faites, et l'apprentissage que l'auteur de l'artefact peut
tirer de cette confrontation. Ce sont ici des attitudes - d'observation
participante - qui sont attendues, afin que l'expérimentateur puisse
simultanément être acteur de la situation pédagogique qui
met en scène l'artefact, et un observateur. Les parcours ont pour
mission de fournir aux stagiaires les éléments
méthodologiques et les outils de collecte d'observation qui leur
permettront de
constituer cette attitude.
6. Retour réflexif sur la mise en oeuvre
: de retour de l'expérimentation, les informations
collectées sont mises en commun, et constituent un nouveau pas vers la
compréhension de la thématique développée par le
parcours. Retours négatifs et positifs sont d'égale importance
dans l'apprentissage. Toute pratique numérique se heurte aux limites qui
existent entre une réalité infiniment continue et fine, et une
représentation numérique discontinue, discrète et
incomplète. Les retours d'expérience négatifs permettent
de mieux cerner les limites pragmatiques des promesses ouvertes par les
feedbacks positifs. Les parcours doivent également tenter de proposer
des façons et des outils permettant que cette analyse à
posteriori soit une source d'enseignement au groupe et non un simple moyen de
renforcement de ses impressions premières.
7. Evaluation de la formation : enfin, comme
tout dispositif ouvert et dynamique, le système est plus enclin aux
erreurs ou aux imprécisions. La réduction de ces erreurs
dépend de la remontée d'appréciations sur le programme lui
même et son processus d'apprentissage.
2.2.3 LES CONCEPTS CLES DE PAIRFORM@NCE
Le programme Pairform@nce s'appuie sur les concepts
proposés par l'Université de Dillingen (Munich) qui ont
présidé à la première version de Pairform@nce. Ces
concepts peuvent être résumés en trois points essentiels
:
- Encadrer le processus de formation dans un modèle
constant et compréhensible ;
- Favoriser l'engagement - par équipes - dans le
programme de formation, l'essentiel du programme ayant pour but de diffuser et
promouvoir les nouvelles formes de travail collectives et collaboratives ;
- Permettre de construire les programmes de formation de
façon collaborative à partir des initiatives de la population qui
est elle-même la cible du programme.
Le principe même du programme produit plusieurs boucles
systémiques comme autant de cycles vertueux. D'abord une chaîne
simple de relations entre rôles tel qu'il est issu d'un fonctionnement
classique d'une formation.
Figure 2: La chaine de formation. .(Source :
FREMAUX, V. « Mise en oeuvre d'une application à grande
envergure sous Moodle À Le projet Pairform@nce (SDTICE) »)
Les membres Pairform@nce administrent le programme qui
commence par la production d'un certain nombre de volumes pédagogiques,
lesquels sont mis à disposition de formateurs qui animent des
séances dans des sessions de formation. Une première boucle de
<< qualité >> applique un << feedback >> de
contrôle connue dans les dispositifs régulés.
Figure 3: Rebouclage Qualité source :
FREMAUX, V. « Mise en oeuvre d'une application à
grande envergure sous Moodle À Le projet Pairform@nce (SDTICE)
»
Le rebouclage Qualité introduit une
contre-réaction permettant au concepteur de corriger sa conception en
fonction des retours d'usage du matériel pédagogique et du
processus proposé. La correction est possible si les signaux de feedback
sont unanimes, elle est plus difficile à exécuter si les signaux
sont contradictoires ou diffus, ou encore trop marqués par la
subjectivité du terrain. Le programme Pairform@nce demande aux
concepteurs d'imaginer une forme de sollicitation qui amoindrit l'impact de la
subjectivité pour éviter justement ces difficultés.
Au delà d'une simple rétroaction qualité,
c'est la conversion d'un processus classique de construction et de diffusion de
formation qui est revue
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pour l'intégrer dans le nouveau paradigme. Qui sont les
meilleurs experts de l'usage des TICE que ceux qui les ont
expérimentés en avant-gardistes et ont acquis une
expérience pragmatique de terrain ? Les boucles systémiques
supplémentaires réinvestissent les usagers « prosomateur
» du plan de formation comme apporteurs et concepteurs de contenus, des
nouvelles économies dans lequel l'utilisateur est admis à
intervenir sur les choix qui président à la construction du
produit qu'il consomme.
Figure 4: Changement de rôle de l'usager, boucle «
prosomative ». (Source : FREMAUX, V. « Mise en
oeuvre d'une application à grande envergure sous Moodle À Le
projet Pairform@nce
(SDTICE) »)
Dans Pairform@nce, le principe d'une hiérarchie
figée par un ordre institutionnel est aboli. Bien sûr, le
Ministère reste maître de l'administration générale
et de l'établissement des règles, rémunération et
incitations pour que le programme maintienne son activité, mais la
construction du programme et de ses responsabilités fait que toute
personne de l'Education Nationale et ayant un compte authentifié dans le
système peut prétendre participer à plus ou moins de
responsabilités dans le programme. Ceci est une possibilité, mais
le point de départ du programme est bien d'initier et de s'appuyer sur
une dynamique communautaire, tout en fournissant de manière continue
à cette communauté les moyens de maîtriser et de
gérer sa complexité croissante. La dynamique communautaire ne
peut exister qu'en parallèle avec une gestion ouverte, souple et a
priori bienveillante. Le concept de base est la confiance
préalable, qui permet de distribuer des droits relativement
étendus aux personnes, afin de susciter les prises de
responsabilité.
L'une des originalités du programme est de tenter la
cohabitation entre une gestion institutionnelle et administrée d'une
partie du processus de développement professionnel, tout en proposant en
même temps la construction d'une communauté libre des
hiérarchies administratives et capable de s'autonomiser dans une
organisation auto-structurante.1
Enfin, le programme vise à valider une fois de plus
l'efficacité des modèles de production collaborative, et dans la
mesure où le travail avec les pairs est l'un des premiers contournements
de l'écueil de la difficulté ergonomique. Les coopérations
possibles ont été étendues au maximum, et
bénéficient pour cela du modèle très souple de
Moodle.
Figure 5: Principes de coopération et d'interaction des
pairs (Source : FREMAUX, V. « Mise en oeuvre d'une
application à grande envergure sous Moodle À Le projet
Pairform@nce (SDTICE) »)
Initialement tourné vers l'aspect stagiaire, la notion
de << pairs >> a connu un fort développement dans la version
2 de Pairform@nce basé sur Moodle. En effet, chaque
responsabilité étant basé sur un profil de rôle, il
était tout à fait concevable de distribuer collectivement ce type
de responsabilités à tous les étages de la plate-forme,
l'un des travaux de l'équipe conceptrice étant alors de pouvoir
mettre en place et fournir les outils de régulation et de
négociation asynchrone qui permettent à cette collaboration de
produire des résultats cohérents pour chaque << village
>> et dans chaque contexte.2
1 Valéry Frémaux, « Mise en oeuvre
d'une application à grande envergure sous Moodle - Le projet
Pairform@nce (SDTICE) », EISTI, P. 4.
2 Valéry Frémaux, « Mise en oeuvre
d'une application à grande envergure sous Moodle - Le projet
Pairform@nce (SDTICE) », EISTI, P. 4.
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