- J'ai été amené à Thies chez mon
oncle pour apprendre là-bas avec mon oncle dans des écoles
franco-arabe. Mais, il y avait un daara où il n'y avait personne, et j'y
suis allé. Dans le daara, au fur et à mesure, d'autres
talibés arrivent... Je devais faire le café le matin. Un jour, on
a oublié de me réveiller pour le café à 5h du
matin. J'ai cru qu'il allait me frapper, alors [C-AM(i)][C-AP(l)] j'ai
fugué au garage deux jours. Ensuite, on cotise avec un ami
pour aller à Dakar. J'ai pris l'argent, j'ai
appelé ma maman pour lui dire que je suis au garage et ça a
coupé... La nuit, je vois le chauffeur de Dakar qui me demande d'avancer
l'argent du voyage pour se payer à manger. mais le lendemain rien. Mes
amis interviennent
avec les apprentis pour me mettre dans la voiture. En cours de
route, on me menace de m'emmener à la police. Tard la nuit, on me
dépose à la porte de Pikine. Je suis ensuite parti chez ma
mère et je suis resté là-bas... Puis je suis
allé dans la rue. Ensuite le Samu Social m'a orienté à la
liane.
- Ta journée au daara se passait comment ?
- Au daara externe, le matin, c'était les cours de Coran,
puis je mangeais chez moi. L'aprèsmidi, j'installais les nattes puis
j'allais jouer le soir.
- Pourquoi es-tu parti de chez ta mère ?
-
...
- Ça se passait bien avec elle ? Tu es revenu la voir,
non ?
-
...
- Et à Dakar, dans la rue ?
- J'étais beaucoup place de l'Indépendance
où je recevais des denrées pour la
cuisine.
L'après-midi, j'allais attraper des moules et des coquillage
pour manger le soir.
- Comment s'est passée la sortie de la rue ?
- La nuit, j'étais allongé, et la voiture du Samu
Social est venue et croyait que je dormais. [C-
SA] Ils m'ont écouté, j'ai parlé.
Ensuite ils m'ont parlé, et j'ai suivi tout de suite. -
Pourquoi ?
- Ils m'ont convaincu.
- Tu faisais partie de groupes ? tu avais des contacts avec des
amis, des adultes ?
- [S-IG] J'étais avec quelqu'un que je connaissais depuis
longtemps, il connaissait un groupe quand je suis arrivé dans la rue.
- Comment ça s'est passé avec le groupe ?
-
...
- [C-AM(i)][C-AP(l)][C-AP(f)] Lors de ma fuite [du
daara], j'ai fugué de Touba, j'ai marché jusque Darou
où j'ai fait des petits travaux pour avoir un peu d'
argent. et de Darou, je suis venu comme
ça jusque Louga, et de Louga je suis venu à St-Louis à la
gare routière. Arrivé à la gare routière, j'ai
mendié pour avoir de quoi trouver à manger. J'ai fait deux jours
à la gare routière, ensuite j'ai vu des voitures qui venaient
vers Guet Ndar, des voitures qui passent de la gare routière pour venir
à Guet Ndar, j'ai payé 100 francs pour venir, et c'est comme
ça que je suis venu dans le quartier des pêcheurs. Arrivé
au quartier des pêcheurs, j'ai rencontré un enfant que je
connaissais déjà, il habitait Touba, la même ville que moi.
[S-AI(p)] Il m'a emmené alors au quartier des pêcheurs,
là, à l'endroit où les pirogues partent en mer, pour
chercher le poisson qu'on va vendre après pour avoir
de l'argent. C'est comme ça que
j'arrivais avoir de l'argent pour me faire à manger. Pendant plus d'une
semaine, chaque matin, je partais le matin aux poissons pour avoir de l'argent,
et un jour, j'ai entendu parler du centre, j'ai demandé. Ensuite je suis
venu pour voir. J'ai vu les jeunes du centre en train de jouer, il m'ont
invité à venir jouer avec eux.
Après, ils m'ont dit de venir avec eux au niveau du
centre, c'est comme ça que je suis arrivé.
- Quels sont les difficultés que tu as rencontrées
dans ton séjour dans la rue ?
- La première difficulté, c'est au niveau de la
gare routière, j'ai passé la nuit dans une voiture en
réparation, et à chaque fois, si la voiture est
réparée, je change de voiture pour passer la nuit dans une autre
voiture. Avant de quitter la gare routière pour le quartier des
pêcheurs, il fréquentait deux jeunes dans une salle de jeux, et
dans la salle de jeux là, il y a des gens si je joue avec eux et que je
gagne, ils me tapent. J'ai subi ça dans la rue.
- A partir de ton arrivée, est-ce que tu peux essayer de
dire comment tu t'es adaptés ? As-tu dû apprendre des choses
nouvelles que tu ne faisais pas avant ?
- Quand je suis venu à la gare routière, j'ai
passé la nuit. [S-IC] Je suis allé voir le gardien qui
m'a dit que je pouvais passer la nuit là et qu'il allait essayer de voir
pour m'aider
demain. Mais le lendemain, je n'ai pas attendu,
j'ai cherché directement à manger, et ensuite, j'ai vu
les jeunes. J'ai voulu me rapprocher d'eux, mais ces jeunes là m'ont
écarté. J'ai passé une autre nuit à la
gare routière avant d'aller au quartier des pêcheurs. Mais quand
je suis venu au quartier des pêcheurs, aussitôt je suis
tombé sur le gars que je connaissais à Touba. Mais ce jeune
là a été récupéré par son
père.
- Pourquoi ne pas avoir attendu l'aide du gardien ?
- Rien, quand je me suis levé, je suis parti.
- Et les jeunes qui t'ont écarté ?
- Je ne les connaissais pas, quand j'ai voulu les rattacher, ils
n'ont pas voulu. - C'étaient qui ? Des talibés ?
- Je pense que c'étaient des talibés.
- A part ce jeune que tu connaissais, tu as eu d'autres contacts
avec des jeunes de ton âge ? plus vieux ? avec des adultes ?
- En dehors ce jeune là, [S-IG] j'ai connu
d'autres jeunes en face de la salle de jeux, mais
ce ne sont pas des jeunes qui sont dans la rue,
mais qui habitaient au quartier des pêcheurs. Mais ils m'ont
rencontré à la salle de jeu. Et parfois invité parfois
à manger. Ce
sont ces jeunes là qui m'invite chez eux en me donnant du
riz et autres. Mon activité principale à part le poisson,
c'était la salle de jeux.
- Et à part ce travail et la salle de jeux, tu avais
d'autres activités ? Est-ce que tu mendiais par exemple ?
- Depuis que j'ai quitté la gare routière pour
le quartier des pêcheurs, je ne mendiais plus. Je passais aux poissons le
matin et à la fin de la journée à la salle de jeux et pour
manger et je donnais parfois un peu à manger aux talibés.
- Qu'est qui t'as incité à venir au centre ? Tu
n'as pas continué à vendre du poisson ?
- Je ne connaissais pas l'existence du centre. Quand j'ai vu les
jeunes après le marché, ils m'ont proposé. Quand j'ai
discuté avec eux, quand je suis venu au centre, [S-IC] que
j'ai
trouvé l'éducateur et j'ai
discuté avec lui, ce que l'éducateur m'a dit, ça ma fait
réfléchir et ça m'a motivé à rester. [C-SA]
Je lui ai dit ce que je voulais et il m'a rassuré pour
rester.
- Qu'est ce que tu voulais ?
- Si je peux rester ici, et ne pas retourner dans ma maison.
L'éducateur m'a rassuré en me disant que présentement, pas
tout de suite tout de suite, mais peut-être au futur voir. Et c'est la
raison pour laquelle je suis resté.
- Est-ce que tu veux rajouter quelque chose ? Compléter ?
Quelque chose que tu n'as pas pu dire ?
- Ce qui m'a marqué dans la rue, c'est lorsque je suis
allé vers Mbaqué, voir un grand qui travaillait en
mécanique, je suis resté avec ce jeune là. J'étais
dans sa maison, le matin je partais avec lui à l'atelier, et c'est ma
mère qui m'a trouvé là-bas pour m'emmener encore au daara.
Là-bas, on m'a attaché les pieds avec une chaîne, dans une
chambre, où c'est làbas que j'apprenais mes leçons
coraniques. A chaque fois que je ne récitais pas le verset que je
devais, mon maître coranique me tapait. Un jour mercredi, mon
maître coranique devait revenir le jeudi, et pour me donner une
leçon, et j'ai réussi à faire sauter le cadenas, avec
l'aide des autres enfants du daara, et j'ai marché, c'est comme
ça que j'ai marché à Darou.