ANNEXES
Table des annexes
Annexe 1 : Guide d'entretien 83
Annexe 2 : Entretien 1 : Ahmed 84
Annexe 3 : Entretien 2 : Cheikh 86
Annexe 4 : Entretien 3 : Hassan 88
Annexe 5 : Entretien 4 : Djiby 89
Annexe 6 : Entretien 5 : Tarik 91
Annexe 7 : Entretien 6 : Mohamed 94
Annexe 8 : Entretien 7 : Papis 95
Annexe 9 : Entretien 8 : Aly 96
Annexe 10 : Entretien 9 : Mame 97
Annexe 11 : Entretien 10 : Mamadou 98
Annexe 1 : Guide d'entretien
Informations à donner à la personne
interrogée avant l'entretien, en réponse aux questions
suivantes : Qui suis-je ? Ce que je cherche ? Pourquoi toi ?
Confidentialité ? Durée ? par quoi on commence ?
Contexte Date/Heure :
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Durée :
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Lieux :
Autres infos sur le contexte de l'entretien :
Identité
Nom / Prénom :
Age :
Origine :
Durée dans la rue : La carrière
Thèmes abordés
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Questions pour approfondir
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Contexte avant l'arrivée
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Où habitais-tu ? Quel(s) élément(s)
déclencheur du départ ? Activité(s) à
l'époque ?
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Arrivée dans la rue
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Comment s'est passé ton arrivée-intégration
? Des choses nouvelles à apprendre ? Adaptation ?
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Trajectoire
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Y-a-t il eu des changements dans le quotidien ? Tu as
changé de façon de voir les choses ? D'activités ? De
relations ? De groupe ? As-tu sentis que par moment, tu changeais ?
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Relations, Groupe, amitié
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Avais-tu des amis ? Des liens avec des adultes ? De quelle nature
? Comment se passait la vie de groupe ?
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Activités (travail, mendicité, jeux)
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Que faisais-tu pendant la journée ? Comment gagnais-tu ta
vie ? Quels jeux ? Quels petits boulot ?
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Sortie de la rue
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Qu'est ce qui t'a décidé à sortir ?
Où es-tu allé ensuite ?
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A la fin, dernière question : demander à
l'enfant s'il veut rajouter quelques choses (par rapport à ce qui s'est
dit, ou sur autre chose), compléter ou corriger s'il pense que nous
avons mal compris/interprété ses propos, etc.
Annexe 2 : Entretien 1 : Ahmed
- Au début j'étais au village à N., chez la
grand-mère, ma mère est décédée, en 2005 et
moi j'étais chez ma grand-mère. Et mon père, que je
n'avais pas connu... Depuis le jour où ma
mère est décédée, après
j'étais en troisième à l'école secondaire à
Podor. En faisant la troisième, récemment, mon père a
voulu intervenir dans ma vie, bon, pour me reconnaître, à
l'âge de 17 ans. Il a voulu me reconnaître. Il m'a
téléphoné pour me dire qu'il est mon père,
et bon, moi, ça m'a perturbé et moi j'ai
découragé jusqu'à aller même à échouer
mon examen, et bon je suis resté là-bas au village.
[C-AM(i)][C-AP(l)] J'ai traîné, je me battais
avec les jeunes, les enfants qui me disaient des calomnies tout ça bon.
A chaque fois je me battais, je me battais, et je ne voulais plus rester dans
le village. [S-IC] Et j'ai écris une lettre à mon oncle
pour qu'il m'aide à faire quelque chose, pour qu'il m'aide à
sortir du village. [C-SA] Il m'a envoyé ici à St-Louis
pour faire de l'électricité à l'école formation de
St-Louis. Et après, trois mois après, chaque mois il m'a
proposé de payer la location pour moi et ma nourriture, tout. Mais tout
ce qu'il a fait c'est trois mois. Il m'a envoyé de l'argent et lorsque
j'ai trouvé le centre, je lui ai téléphoné, «
maintenant je ne paye pas de location, je ne paye pas l'école », et
dès que je lui ai parlé de ça, il m'a laissé, il
n'a plus payé, alors j'ai
parlé à B., et elle a pris ses engagements pour
payer l'école et m'héberger au centre, et jusqu'à
maintenant. J'ai eu quelques examens à faire par exemple ici à
l'Institut Culturel Français, le DELF, le diplôme d'étude
sur la langue française, et j'ai réussi. Après j'ai
réussi, après j'ai retourné au village, et j'ai
trouvé là-bas quelque chose qui n'allait pas. Quelque chose qui
n'allait pas bien, parce que là-bas il y avait la discorde. Parce que
chez nous la tradition fait que, comme il y a des gens qu'on traite comme des
nègres, comme les noirs. Il y a des gens qui sont les rois. Il y a des
gens qui disent que ce sont eux qui sont les rois, et les autres doivent les
obéir, et ça a amené des bagarres. Parce que ça a
commencé par moi, car quand mon père a voulu me
reconnaître, on l'a traité de nègre, on l'a traité
de vaurien, tout ça. Et ça a failli amener une petite bagarre, on
l'a réglé, mais ces temps ci, encore, ils ont repris les bagarres
et sont allés au commissariat. Il y a des gens qu'on a laissé, et
il y a
des gens qu'on a amené à la police. Bon, j'ai
été pendant 15 jours et je suis revenu ici. Depuis que je suis
revenu, avant hier on m'a téléphoné, on m'a dit, que il y
a encore des gens qu'on a emmené à la police. Jusque maintenant,
ils n'ont pas arrêté. Mais, je me suis dit que moi, en tout cas je
ne suis pas là-bas. Je n'y peux rien. Bon, en ce moment, là, tout
ce que je vise c'est mon avenir. Au village ils se disputent, ils se battent
encore.
- Donc quand tu étais au village, tu logeais chez ta
grand-mère...
- Oui, chez ma grand-mère
- Et après, quand tu es venu à Saint-Louis, tu
étais dans un logement ?
- Oui, dans une location à Sor.
- Donc en fait, la période où tu étais dans
la rue, c'était au village ?
- Oui, au village. Ici j'ai failli traîner dans la rue mais
heureusement il y avait le centre. C'est lorsque j'ai trouver le centre que mon
oncle m'a abandonné.
- En fait, tu as trouvé le centre, puis tu l'as dit
à ton oncle, et c'est là que tu n'as plus eu de nouvelles.
- Oui. B. l'avait appelé et lui avait demandé de
payer l'école. Il a dit qu'il n'avait rien, mais
qu'il ferait tout pour envoyer de l'argent et payer des
études, mais ça il ne l'a pas fait.
- On va plus revenir sur la période où tu
étais dans la rue, où tu « traînais », comme tu
dis. Tu
étais seul ? Tu avais des amis dans la rue ?
- Oui, [S-IG] j'avais un ami, mais il a finalement fini
par aller en Italie. Son père l'a amené en Italie. Mais
lorsque j'étais au village, que je traînais, je n'allais pas
à l'école, lui aussi n'allait pas à l'école, il
avait abandonné les études. Mais lui, ce n'était pas
à cause des
problèmes. Il avait abandonné parce qu'il ne
voulait pas. Moi je ne suis plus allé à l'école parce que
je ne pouvais plus supporter, avec les problèmes que j'ai, je n'arrivais
pas à apprendre mes leçons, et j'avais peur même d'aller en
classe, qu'on m'humilie parce que je n'apprenais pas mes leçons, et
[I-IC] je ne veux pas avoir des mauvaises notes sur mes devoirs. Donc
je suis allé dans la rue. Avec lui, on traînait, on ne
faisait qu'écouter de la musique, fumer, aller de gauche à
droite. Je parlais de mes problèmes, parfois il me conseillait, parfois
moi aussi je le conseillais, mais ça a fini, malheureusement ça
n'a pas duré. Son père l'a amené en Italie et je suis
resté seul. [C-R] C'est à ce moment j'ai réagi je
me suis dit que j'appelle mon oncle pour que je lui propose... que je sorte du
village. [ISI] Je me considérais sans patrie, c'est comme si je n'avais
pas de patrie. Je me considérais sans famille, sans patrie dans le
village. J'étais seul. Ma grand-mère seule ne me
suffisait pas. Je vivais seul.
- Donc, c'est au moment où ton ami est parti que tu as
voulu voir avec ton oncle alors...
- Oui, je vais essayer de voir avec mon oncle [I-SP] pour
pouvoir moi aussi évoluer. Lui est parti pour apprendre et
travailler. Lui il a réussi, et moi aussi je vais faire quelque chose
pour mon avenir. Si je ne le fais pas, personne le fera pour moi. Je suis seul
: je n'ai pas de frère, ni de mère, ni de père. Ma
grand-mère n'a pas de moyen, pour faire quelque chose pour moi.
- A part ton ami qui est parti en Italie, tu n'as pas
rencontré d'autres gens de ton âge, ou un adulte qui t'as
aidé dans la rue ?
- A part lui, [S-IC] c'est ma grand-mère qui me
conseillait de ne pas écouter ce que disent les jeunes. Je me
battais avec les jeunes, ils me traitaient toujours comme un bâtard.
Toujours j'entends ces mots- là. Je reviens, je lui di et elle me
conseille. Elle m'a demandé de savoir supporter, et que c'est la vie,
que ça passera. [S-IC] Y'a son frère aussi, qui me disait
qu'il faut tout faire pour sortir du village, car c'était pas
ma place là-bas. Lui c'était mon ami, le frère de ma
grand-mère.
- Donc les activités, tu étais surtout avec ton ami
? Tu faisais des petits travaux ?
- Non, on ne faisait qu'écouter la musique. On avait une
petite place, près de chez ma grand-
mère où à chaque nuit on venait
là-bas faire du thé, écouter la musique. On ne savait
plus
quoi faire. Et mon ami est parti, et j'ai réagi un peu
pour sortir du village.
- Donc après tu es arrivé à St-Louis et ton
oncle t'a aidé... Quels étaient tes réactions face aux
autres jeunes quand ton ami est parti ?
- Quand il est parti je ne sortais plus de chez moi.
[S-IC] Il y avait même une personne qui était
venue de Kaolak pour travailler au village et qui est devenue mon
ami. Je m'enfermais, et il venait là-bas tout le temps.
Il venait pour me soulager, discuter parce que c'est ma
grand-mère qui avait dit ça. Lui il enseignait le karaté,
et un jour je suis allé làbas pour assister à son cours,
et on est devenu des amis. Comme il n'était pas du village, il ne
connaissait rien, et tout. Je l'ai laissé là-bas, et quand je
suis rentré au village, je ne l'ai pas trouvé là-bas.
- C'est donc surtout ton ami qui t'a aidé, avec qui tu
étais très proche.
- Oui
- Est-ce qu'il y avait autre chose à ce moment là
qui a fait que tu es resté à traîner, ou c'est juste
à cause de ton ami ?
- Ce qui m'a fait rester c'est que je n'avais pas de
moyens. Je ne travaillais pas, je n'avais pas d'argent pour me déplacer.
Et mon oncle, pour qu'il me donne de l'argent, c'est trop difficile.
En venant, je lui avais dit que c'est comme ça, moi je vais me
débrouiller, et après il m'a laissé.
- Est-ce que tu veux rajouter des choses ? Que tu as
oublié de dire ?
- Oui. Moi, je suis allé dans la rue parce que
c'est mon père qui est intervenu dans ma vie et je ne l'ai jamais
connu depuis ma naissance. Il m'a laissé depuis ma naissance,
et en
faisant ma troisième, il est intervenu. Il a voulu
s'approcher sur moi pour qu'on devienne des amis, des parents, comme
père et fils. Et moi ça m'a bouleversé parce que ma
mère ne m'a jamais parlé de lui et on était dans le
même village. Moi je ne vais pas... ça me choque, ça me
fait mal de l'entendre comme ça, au moment ou ma mère
disparaît pour venir me parler de ces choses là, ça m'a
fait mal. Et j'ai échoué à l'école pour aller dans
la rue. C'est comme s'il voulait m'acheter, il m'a montrer de l'argent, «
moi j'ai de l'argent, j'ai tout ça, j'ai tout ça, il faut
m'accepter comme père ». Alors que non, [I-IC] moi c'est ma
personnalité, je ne
peux pas vendre ma dignité comme
ça. Parce que lui il est en Espagne, il travaille. Il croyait
que si j'avais vu son argent, j'allais le suivre.
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