SECTION 2 : ANALYSE DES RESULTATS ET ENSEIGNEMENTS
Cette section analyse les résultats obtenus avant d'en
présenter les principales conclusions. Elle s'achève par quelques
recommandations de politique économique.
2-1) analyse des résultats
Les résultats apparaissent intéressants et
montrent l'existence d'un lien négatif mais non significatif entre le
PIB et la masse monétaire d'une part et le crédit domestique
fourni par le secteur bancaire d'autre part. Ceci va à l'encontre des
résultats de Romer (1989) qui souligne qu'une politique monétaire
restrictive déprime l'activité économique ; de Sarr et
Dingui (2000) qui montrent que les impulsions monétaires sont transmises
à la sphère réelle par le taux débiteur réel
des banques. Mais ces résultats vont dans le même sens que ceux de
King (2000) qui aboutit à l'existence d'une corrélation entre
croissance de la quantité de monnaie et inflation et l'inexistence d'un
lien entre croissance monétaire et croissance du produit réel.
L'existence d'un lien négatif et non significatif entre
le PIB et l'inflation est aussi importante à relever ici car elle
corrobore les résultats généralement observés
notamment par Gomme (1993), Jones et Manueli (1995), Gillman et Kejak (2002) ou
encore Drukker et Al (2005). Par contre, nous n'avons pas retrouvé les
résultats de Lévine (1992) pour qui le développement des
intermédiaires financiers, et des banques en particulier, constitue un
facteur de croissance clé.
En général, l'existence d'un lien statistique
entre deux variables ne nous renseigne pas sur la nature et le sens de cette
causalité. Il est tout à fait vraisemblable que la
causalité entre la masse monétaire et le PIB ne soit pas univoque
: l'augmentation de la masse monétaire constituant souvent une
conséquence de la croissance économique. Malheureusement, il
reste difficile d'un point de vue méthodologique d'effectuer la
recherche de causalité en données de panel. Il est seule ment
possible de citer les travaux de Weinhold (1996)31.
31 Weinhold,D., (1996) : « Tests de
causalité sur données de panel : une application à
l'étude de l'investissement et la croissance », Economie et
prévision, n°spécial : Analyse des comportements
économiques à partir de données de panel, n°126-5.
Les résultats de l'estimation de notre équation
de croissance montre que cette équation explique 47% de la variation du
taux de croissance du PIB. Il apparaît que la politique monétaire
axée sur le rôle joué par les agrégats nominaux de
monnaie et de crédit influence négativement le PIB. Ainsi une
augmentation du taux de croissance de la masse monétaire d'une
unité entraîne une diminution du taux de croissance du PIB de
0,020269 de même qu'une augmentation de la part dans le PIB, du
crédit domestique fourni par le secteur bancaire d'une unité
entraîne une baisse du taux de croissance économique de 3,440409
fois cette unité.
Le taux de croissance annuel de la dette publique (en
pourcentage de la masse monétaire au sens M2) influence
négativement la croissance économique. Ceci peut s'expliquer par
le fait que l'endettement public produit un effet d'éviction sur
l'investissement privé qui le moteur de la croissance économique.
Une augmentation du taux de croissance annuel de la dette publique d'une
unité conduit à une baisse du PIB de 0,369357 fois cette
unité.
Le taux d'intérêt débiteur influence
positivement la croissance économique contrairement à nos
attentes. En effet, une hausse de ce taux d'une unité entraîne une
augmentation du PIB de 0,454658 fois cette unité, toutefois, ce
résultat est non significatif. Ceci est contraire à la
théorie économique et est sans doute lié à la
situation de surliquidité des banques de la sousrégion.
L'investissement a un effet positif et significatif sur la
croissance économique. C'est d'ailleurs la variable la plus contributive
à l'explication de la croissance économique en zone CEMAC comme
le montre les tests de significativité individuelle
présentés à l'annexe 4. Une augmentation de la part de
l'investissement dans le PIB d'une unité entraîne une augmentation
de ce dernier de 3,621298 fois cette unité. Pour que la politique
monétaire ait un effet positif sur la croissance économique dans
ces conditions, il faut qu'elle favorise les investissements notamment par la
promotion d'un cadre macroéconomique stable et le maintien des taux
d'intérêt à des niveaux susceptibles d'attirer les
investisseurs.
Le total des réserves en proportion de la dette
extérieure a un effet négatif et significatif sur la croissance
économique. Une augmentation de cette variable d'une unité
entraîne une baisse du PIB de 0,328064 fois cette unité. Ce
résultat bien que contraire à nos attentes peut s'expliquer par
l'impact négatif et significatif de la dette publique sur le PIB.
Les exportations ont un effet positif non significatif sur le
PIB, ceci est en accord avec la théorie économique. Une
augmentation de la part des exportations dans le PIB d'une unité
entraîne une augmentation de ce dernier de 0,050688 fois cette
unité. En effet les pays de la zone CEMAC sont largement
dépendants pour leur revenu, des exportations de matières
premières agricoles et minières.
D'une façon générale, ces
résultats soulèvent plusieurs implications. Concernant la
politique budgétaire (dépenses publiques, taux d'imposition,...),
elle sera menée de façon à favoriser ce qui donne de
l'impulsion à la croissance économique par exemple par des
exonérations fiscales pour encourager les entreprises privées
locales. La convergence des indicateurs macroéconomiques devrait
être effective concernant la dette publique afin de limiter son impact
négatif sur la croissance économique.
Toutefois, il n'est pas possible d'affirmer que le même
taux de croissance entraîne les mêmes bénéfices dans
les six pays de la sous-région. Il faut tenir compte par exemple, des
problèmes de redistribution, de gouvernance, d'effectif de la
population, des critères socioculturels propres à chaque pays,
des aspirations gouvernementales et autres aléas.
Théoriquement, ces résultats présentent
plusieurs perspectives. D'abord c'est une confirmation des résultats
théoriques obtenus par d'autres auteurs, au sujet d'autres pays.
Quelques limites peuvent toutefois être relevées, qui permettront
d'ailleurs de pouvoir mener d'autres études sur ce sujet en modifiant
l'orientation ou la méthode. L'on peut donc noter la présence de
données manquantes qui peuvent avoir une influence sur les
résultats qui restent cependant assez précis si l'on en croit la
méthode d'inférence. D'autres variables peuvent être
ajoutées au modèle ; c'est le cas des données faisant
référence à la formation du capital humain ; à la
population etc...
Une autre optique serait de mener les estimations avec les
nouvelles méthodes qui permettent de déterminer les points de
rupture de la constance des coefficients et de déterminer les dates
d'occurrence desdits points.
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