De la décentralisation territoriale en RDC: regard sur l'autonomie organique et financière des Entités Territoriales Décentralisées.Cas de la commune d'Ibanda( Télécharger le fichier original )par Mushagalusa BALEGANA Université catholique de Bukavu - Licence en droit 2010 |
Section 2 : Le statut juridique de la commune en RDCDans cette section, nous allons tout d'abord parler de la commune comme ETD (§1), ensuite nous nous attellerons sur la question d'autonomie de la commune (§2) pour finir avec un regard sur les rapports entre la commune et la province ainsi que le pouvoir central (§3). §1 La commune comme entité territoriale décentraliséeDans ce premier paragraphe nous parlerons d'abord de la notion d'entité territoriale décentralisée (A) pour finir avec la question des entités territoriales décentralisées en RDC (B) A. Notion d'Entité territoriale décentralisée On peut définir les entités territoriales comme des entités de droit public correspondant à des groupements humains géographiquement localisés sur une portion déterminée du territoire national, auquel l'Etat a conféré la personnalité juridique et le pouvoir de s'administrer par des autorités élues19(*). C'est cette personnalité juridique qui confère aux ETD leur autonomie sur le plan organique, juridique et financier. Cette autonomie se mesure donc à trois niveaux : - L'élection des responsables des entités ; - L'étendue de leur pouvoir juridique ; - L'importance des moyens matériels et notamment financiers dont elles disposent20(*).
Définie comme entité de base de l'organisation territoriale de l'Etat, toute collectivité ou entité territoriale réfère aux éléments constitutifs suivants : un territoire, un nom, une communauté humaine et des organes administratifs. L'expression Entité Territoriale est ici employée comme élément d'identification du régime local. Cette appellation est forgée par l'histoire ou par la géographie, parfois par les initiateurs de la collectivité. Chaque entité dispose d'une étendue de terre sur laquelle l'autorité locale exerce une politique locale. On distingue sur ce territoire le chef-lieu qui est le centre administratif de la collectivité. Il est à remarquer que, par la suite, ce territoire peut subir des modifications qui apportent soit une fusion ou une amputation de l'ancienne collectivité pour en ériger une nouvelle. Par population ou communauté humaine, on entend un ensemble d'habitants qui ont leur demeure, leur résidence en un espace bien déterminé. C'est ce groupement de gens qu'on appelle actuellement peuple ou population. Le dernier trait constitutif, sur le plan concret d'une entité locale, est une organisation politique locale qui représente un élément essentiel de la vie locale. Suivant son niveau dans la hiérarchie et les orientations fondamentales de la collectivité, cette organisation politique locale, une fois établie, donne naissance à un gouvernement local. Trois principales fonctions sont remplies par ce gouvernement. Une fonction politique quand il joue le rôle de représentant des habitants de l'entité. Une fonction administrative quand il règle par ses délibérations les affaires de l'entité avec l'Etat. Et enfin, une fonction économique quand il intervient pour orienter le développement de la collectivité. D'un pays à l'autre, ces quatre éléments constitutifs d'une collectivité se retrouvent partout, quelle que soit la tradition juridique de ces pays, sauf peut-être une variation de dénomination. Les éléments caractéristiques des entités territoriales résident dans le contenu de l'autonomie à la fois administrative et financière qui leur est accordée. L'autonomie locale est le pouvoir d'un groupe politique ou d'une entité publique de s'organiser et de s'administrer lui-même du moins sous certaines conditions et dans certaines limites22(*). Les dispositions constitutionnelles de divers pays illustrent clairement cette conception lorsqu'elles reconnaissent, conformément aux principes de la décentralisation territoriale, l'existence des collectivités locales et leur autonomie. C'est en vertu de ce principe que les autorités locales élues sont habilitées à administrer librement les biens propres des collectivités et, le cas échéant, ester en justice pour en défendre les intérêts23(*). Elle traduit la capacité d'une personne physique ou morale à générer, à disposer des ressources financières suffisantes et à les administrer en toute liberté de manière à faire face à ses besoins. Elle est la véritable mesure de la décentralisation. Les collectivités territoriales possèdent leur patrimoine et leurs finances propres24(*). B. Les Entités territoriales décentralisées en RDC L'article 3 al.2 de la constitution de 2006 a limitativement énumérée les entités territoriales décentralisées de la République. Ce sont : la ville, la commune, la chefferie et le secteur. Le constituant a, par ailleurs, laissé le soin de fixer la composition, l'organisation et le fonctionnement des ces ETD à une loi organique. C'est la loi organique N°08/016 du 07 octobre 2008 portant composition, organisation et fonctionnement des entités territoriales décentralisées et leurs rapports avec l'Etat et les provinces qui est intervenue pour ce faire. Il s'agira donc d'analyser dans ce point B la consécration de ces ETD (ville, communes, chefferies et secteur) par la loi organique N°08/016 du 07 octobre 2008. Selon l'article 6 de la loi sous examen, il faut entendre par ville : * Tout chef lieu de province, * toute agglomération d'au moins 100.000 habitants disposant des équipements collectifs et des infrastructures économiques et sociales à laquelle un décret du premier ministre aura confié le statut de ville. C'est ainsi que CORNU l'appelle « agglomération urbaine ne résultant pas de l'extension d'agglomération existante mais d'une création autonome, décidée par décret »25(*). L'article 7 énumère le conseil urbain et le collège exécutif urbain comme organes de la ville. Le conseil urbain est l'organe délibérant de la
ville. Ses membres sont appelés conseillers urbains. Ils sont
élus suivant les conditions fixées par la loi électorale.
Le conseil urbain est chargé de délibérer sur les matières d'intérêt urbain fixés à l'article 11. Il élit le Maire et Maire adjoint sous les conditions fixées par la loi électorale. En plus, le conseil urbain approuve le programme élaboré par le collège exécutif urbain. Le collège exécutif urbain, quant à lui, est l'organe de gestion de la ville et d'exécution des décisions du conseil urbain (Article 28). Il est composé du Maire, du Maire adjoint et de trois echevins urbains qui sont désignés par le Maire en tenant compte des critères de compétence, de crédibilité et de représentativité communale. Leur désignation est soumise à l'approbation du conseil urbain. Le Maire et Maire adjoint sont investis par le ministre de l'intérieur. Pour le collège exécutif urbain signalons que le Maire en est le chef. C'est lui l'autorité urbaine. A ce titre : - Il assure la responsabilité de la bonne marche de l'administration de sa juridiction ; - Il est officier de Police Judiciaire en compétence générale ; - Il est officier d'Etat civil ; - Il est ordonnateur principal du budget de la ville ; - Il représente la ville en justice et vis-à-vis de tiers (article 41). Il statue par voie d'arrêté urbain (article 43). En cas d'absence ou d'empêchement du Maire, l'intérim est assumé par le maire adjoint. En cas d'absence ou d'empêchement du Maire et du Maire adjoint, l'intérim du Maire est assuré par des Echevins urbains selon leur préséance. Les Echevins exécutent les tâches qui leur sont confiées par l'arrêté portant organisation et fonctionnement du collège exécutif urbain. La répartition des tâches entre Echevins porte sur les secteurs de bonne gouvernance, de promotion de l'économie, de la croissance, de la lutte contre le VIH/SIDA, etc. Il sied de rappeler que c'est la commune qui nous intéressera tout au long de notre travail de recherche. C'est la raison pour laquelle nous allons juste faire une brève présentation de la commune dans ce point avant d'approfondir la notion au paragraphe deuxième. Il faut entendre par commune : * Tout chef lieu de territoire ; * toute subdivision de la ville ou toute agglomération ayant une population d'au moins 20.000 habitants à laquelle un décret du premier ministre aura conféré le statut de commune. Ce décret est pris sur proposition du Ministre de la République ayant les affaires intérieures dans ses attributions, après avis conforme de l'Assemblée provinciale. Elle est subdivisée en quartiers ou en groupements incorporés (article 46). Ses organes sont le conseil communal et le collège exécutif communal. Le conseil communal est l'organe délibérant de la commune. Ses membres sont appelés conseillers communaux. Il délibère sur les matières d'intérêt communal fixées à l'article 50. Les dispositions des articles 14 à 27 de la loi organique sur les ETD relatives au fonctionnement du conseil urbain s'appliquent mutatis mutandis, au conseil communal. Le collège exécutif communal est l'organe de gestion de la commune et d'exécution des décisions du conseil communal. Il est composé : du Bourgmestre, du Bourgmestre adjoint et de deux autres membres appelés Echevins communaux. Le Bourgmestre et Bourgmestre adjoint sont élus par le conseil communal et sont investis par arrêté du Gouverneur de province. Les attributions du collège exécutif communal sont fixées par l'article 59. Le Bourgmestre statue par voie d'arrêté communal après délibération du collège exécutif communal (Article 62). 3. Le secteur et la chefferie.
Le secteur ou la chefferie est une subdivision du territoire (Art. 65). Le secteur est un ensemble de communautés traditionnelles organisées sur base de la coutume avec à la tête un chef élu et investi par un le pouvoir public (Art. 66). Pour sa part, la chefferie est un ensemble de communautés traditionnelles organisées sur base de la coutume et ayant à sa tête un chef désigné par la coutume, reconnu et investi par le pouvoir public (Art. 67). Les organes du secteur ou de chefferie sont : le conseil de secteur ou de chefferie et le collège exécutif de secteur ou de chefferie. Le conseil de secteur ou de chefferie est l'organe délibérant du secteur ou de chefferie. Il délibère sur les matières d'intérêt local fixées à l'article 73. Il élit le chef de secteur et le chef de secteur adjoint dans les conditions fixées par la loi électorale. Ce conseil est dirigé par un bureau composé d'un président, d'un vice-président et du rapporteur. Le collège exécutif du secteur ou de chefferie est l'organe de gestion du secteur ou de chefferie et d'exécution de décisions de son conseil. Il est composé du chef de secteur, du chef de secteur adjoint, et de deux Echevins. Le collège exécutif de chefferie est composé du chef de chefferie désigné selon la coutume et de trois Echevins désignés par le chef de chefferie. Le chef de chefferie ne répond pas de ses actes devant le conseil de chefferie. Aucun de ses actes ne peut produire d'effets s'il n'est contresigné par un Echevin qui, par cela, s'en rend seul responsable devant le conseil de chefferie (Article 82). Les attributions du collège exécutif de secteur ou de chefferie sont fixées par l'article 84. Le chef de secteur ou de chefferie statue par voie d'arrêté de secteur ou de chefferie après délibération du collège exécutif de secteur ou de chefferie. * 19 GUILLIEN R. et VINCENT J., Op.Cit., pp.108 à 109 * 20 KAIMBI J., Le découpage territorial de la RDC et ses effets sur la viabilité de nouvelles provinces (cas du district du haut-Katanga ), travail de memoire, UNILU,2007-2008. * 21 FANFAN E., Les enjeux de l'autonomie des Collectivités Territoriales au regard de la Constitution de 29 Mars 1987, travail de mémoire, Faculté de Droit et des Sciences Economiques des Gonaives, HAITI. * 22 Alain DELCAMP, Les collectivités décentralisées de l'Union Européenne, Paris, 1995, p. 239. * 23 FANFAN E.,Op.Cit. * 24 FANFAN E.,Op.Cit. * 25 CORNU, Vocabulaire juridique, Edition PUF, Paris, 1987, p. 905. |
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