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L'enquête des juridictions pénales internationales.

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par José Tasoki Manzele
Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Docteur en droit 2011
  

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Paragraphe IV. La motivation des décisions prises dans le cadre des enquêtes

Contenu.- La motivation est une exigence de nature constitutionnelle que les Etats modernes ont prévue et imposée à toutes les autorités judiciaires519(*). Elle est pour le justiciable « (...) [u]n rempart contre l'arbitraire : elle fournit la preuve que le juge a sérieusement examiné les prétentions des parties et les moyens qu'elles invoquent ; elle permet aux plaideurs de connaître les raisons pour lesquelles ils sont déboutés et de les critiquer en formant un recours (...) »520(*). La motivation est donc l'indication des raisons de fait ou de droit qui ont déterminé une autorité judiciaire à prendre telle décision précise. Il lui est donc demandé de soutenir par la « ratio »521(*) l'argumentation qu'elle a pu développer pour aboutir à une décision judiciaire522(*), en rencontrant des moyens pertinents, lesquels ont exercé sur elle une influence suffisamment grande dans le cadre de sa décision523(*). L'autorité judiciaire doit « (...) Non seulement bien décider, mais encore expliquer en toute clarté le pourquoi de sa décision (...) »524(*). Toute décision prise en matière judiciaire mérite une justification, de laquelle découlent éventuellement un droit à contestation par la voie contentieuse525(*) et un contrôle par une autorité judiciaire compétente, susceptible de cimenter dorénavant la jurisprudence.

La motivation en droit international pénal.- Dans le cadre de la justice pénale internationale, la question de la motivation se pose également. Cette question est beaucoup plus posée en ce qui concerne les juges qui sont appelés à dire le droit. A cet égard, les Statuts des juridictions pénales internationales en font une obligation526(*). Il ressort de l'article 23, § 2 du Statut du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie que la sentence, c'est-à-dire le jugement ou l'arrêt, est établie par écrit et motivée. Les opinions individuelles ou dissidentes des juges peuvent y être jointes. L'article 22, § 2 du Statut du Tribunal pénal international pour le Rwanda reprend identiquement la même disposition. Ces deux dispositions sont corroborées par l'article 98 ter (C) du Règlement de procédure et de preuve qui impose que le jugement adopté à la majorité soit motivé par écrit dans les meilleurs délais possibles527(*). Cela sous-entend la possibilité d'une décision orale, qui sera par la suite articulée dans un écrit avec toute sa motivation. En ce qui concerne la Cour pénale internationale, le Statut dispose que « (...) [l]a décision du juge est présentée par écrit et contient l'exposé complet et motivé des constatations de la Chambre de première instance sur les preuves et les conclusions. Il n'est prononcé qu'une seule décision. S'il n'y pas unanimité, la décision contient les vues de la majorité et de la minorité (...)528(*). Pour la Cour pénale internationale, la décision du juge est écrite mais ne s'accompagne pas d'opinions individuelles ou dissidentes529(*). Néanmoins, dans les deux catégories de juridictions la décision du juge est motivée et « (...) [l]a longueur de la motivation varie en fonction du type de décision (...) »530(*).

Le Procureur se trouve aussi dans l'obligation de motiver ses décisions ou même ses requêtes qu'il adresse au juge. Il s'agit principalement des décisions du Procureur qui requièrent l'aval ou le contrôle du Juge ou celles qui peuvent donner lieu à contestation par les autres parties en l'instance. C'est le cas de la décision de dresser un acte d'accusation à l'encontre d'une personne dont il suspecte la participation à la commission d'un crime de la compétence du juge international. Il doit à cet effet établir l'existence des éléments de preuve suffisants qui soutiennent raisonnablement qu'un suspect a commis un crime, en prenant soin de joindre à cette décision tous les éléments justificatifs531(*). Le juge chargé de la sanction de la décision du Procureur peut en décider, selon les cas, la confirmation, le rejet ou le sursis en vue de sa modification532(*). De même, le Procureur est obligé de motiver sa décision lorsqu'il sollicite par voie de requête l'accomplissement d'un devoir judiciaire du juge. Il en est ainsi par exemple de la requête en vue du mandat d'arrêt533(*) ou de comparution534(*), la décision d'ouvrir une enquête sur base de l'article 15, § 4 du Statut de Rome535(*) ou celle tendant à ouvrir une enquête sur le territoire d'un Etat déterminé536(*).

La fonction essentielle du Procureur pendant l'enquête est celle de rassembler toutes les informations et tous les éléments de preuve des crimes allégués qui sont portés à la connaissance du juge pénal international. C'est l'objet de ce premier chapitre. Pour atteindre son objectif, le Procureur s'assure que les conditions exigées en vue de l'ouverture d'une enquête ont été réunies. Le présent chapitre a examiné dans la profondeur le travail d'évaluation des informations recueillies par le Procureur. Pour ce faire, le Procureur emploie des méthodes et techniques d'enquête qui lui sont propres dans le respect des règles de procédure liées tout à la fois à l'exercice de son pouvoir et aux droits des personnes qui prennent part à cette procédure d'enquête. L'observance de toutes ces conditions encadre l'activité du Procureur, non sans lui reconnaître en dernière analyse une liberté d'apprécier l'opportunité d'ouvrir ou non les enquêtes et d'engager ou non les poursuites.

* 519 Art. 21, constitution de la R.D.C. ; art. 149, constitution belge ; art. 120, §3, constitution espagnole ; art. 6, §1, Convention européenne des droits de l'homme.

* 520 FRISERO Nathalie, Dalloz, 1996, sommaires commentés, p. 202 ; Lire aussi dans ce sens SUDRE Frédéric, « La motivation des décisions de la Cour européenne des droits de l'homme », RUIZ FABRI Hélène et SOREL Jean-Marc (dir.), La motivation des décisions des juridictions internationales, Paris, Pedone, 2008, pp. 172-173 ; Cour Eur. D.H., 19 avril 1994, aff. VAN HURK c/ Pays-Bas, Publications de la Cour européenne des droits de l'homme, série A, 1994, n° 288.

* 521 ASCENSIO Hervé, « La motivation des décisions des juridictions pénales internationales », RUIZ FABRI Hélène et SOREL Jean-Marc (dir.), op. cit., p. 211 : « (...) [l]a motivation des décisions des juridictions pénales internationales révèle une conception de la rationalité très liée à la procédure, au droit de la preuve, aux méthodes de raisonnement du juge (...) ».

* 522 BOSLY Henri et VANDERMEERSCH Damien, op. cit., p. 758.

* 523 FRISERO Nathalie, loc. cit.

* 524 RIVERO Jean, « Le Conseil d'Etat, cour régulatrice », Dalloz, 1954, Chroniques, p. 157.

* 525 ASCENSIO Hervé, « La motivation des décisions des juridictions pénales internationales », RUIZ FABRI Hélène et SOREL Jean-Marc (dir.), op. cit., p. 213.

* 526 ASCENSIO Hervé, « La motivation des décisions des juridictions pénales internationales », RUIZ FABRI Hélène et SOREL Jean-Marc (dir.), op. cit., p. 208.

* 527 Voir aussi, en ce qui concerne les arrêts, l'article 117 (B) du même Règlement de procédure et de preuve.

* 528 Art. 74, § 5, Statut de Rome.

* 529 ASCENSIO Hervé, « La motivation des décisions des juridictions pénales internationales », RUIZ FABRI Hélène et SOREL Jean-Marc (dir.), op. cit., p. 208.

* 530 ASCENSIO Hervé, « La motivation des décisions des juridictions pénales internationales », RUIZ FABRI Hélène et SOREL Jean-Marc (dir.), op. cit., p. 209.

* 531 Art. 47 (B), Règlement de procédure et de preuve des juridictions ad hoc.

* 532 Art. 47 (F), Règlement de procédure et de preuve des juridictions ad hoc.

* 533 Art. 58, § 2 (b), Statut de Rome.

* 534 Art. 58, § 7, Statut de Rome.

* 535 Règle 50, Règlement de procédure et de preuve de la Cour pénale internationale.

* 536 Art. 57, § 3 (d), Statut de Rome.

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