Les défis de la protection de l'eau et le droit international de l'environnement( Télécharger le fichier original )par Dossa Hyppolite DANSOU Université de Limoges - Master droit Internaional et comparé de l'environnement 2008 |
Chapitre II- LES LIMITES A L'EXERCICE DU DROIT DE L'EAUMalgré le foisonnement de règles environnementales et surtout de conventions qui protègent, les cours d'eau, lacs rivières et océans. Le droit de l'eau ne peut malheureusement pas encore se traduire aisément partout. L'état actuel de l'environnement mondial et celui des ressources en eaux atteste bien que le bilan de la mise en oeuvre du droit international de l'environnement, et donc des éléments de l'environnement telle l'eau, en vigueur est bien modeste par rapport aux attentes créées par les discours, les programmes, les Déclarations, les conventions, les protocoles et autres sources du droit international de l'environnement. N'entend-on pas dire que la prochaine guerre mondiale serait celle de l'or bleu ? Tellement l'eau, cette ressource naturelle est devenue rare et inaccessible. Ce constat semble souligner que malgré l'arsenal juridique en matière de protection des ressources en eaux, le combat n'est pas encore gagné. Des pesanteurs subsistent encore qui freinent le libre exercice de ce droit. Avant toute chose, il importe donc de lever ces obstacles à l'application du droit de l'environnement et par ricochet du droit de l'eau au en vigueur à l'échelon national (Section 1) et ensuite à l'échelon international (Section 2) Section 1- Les obstacles à l'effectivité de la protection au plan nationalLe droit international de l'environnement et partant celui de l'eau en vigueur est élaboré au niveau international par les Etats. Cependant, il s'applique dans le territoire de chaque Etat ayant souscrit à ce droit. Ces Etats deviennent de ce fait, les gardiens de la bonne application du droit de l'eau. Et si ce droit connaît actuellement des difficultés quant à son réel exercice c'est, entre autres, dû aux freins que constituent l'insuffisance de contrôle (paragraphe 1) et les obstacles juridico institutionnels et socio économiques (paragraphe 2). Paragraphe 1 : L'insuffisance du contrôle de la mise en oeuvreL'un des constat que l'on fait souvent dans les pays et qui fragilisent l'application du droit en général et celui de l'environnement et partant de l'eau en particulier, est l'absence de renforcement du rôle des acteurs du contrôle (A) et la faiblesses des sanctions qu'elles soient administratives ou judiciaires (B). A. Le manque de renforcement du rôle des acteurs des acteurs de contrôle La pratique interne, surtout celle des pays en voie de développement a souvent démontré une inefficacité des organes publics impliqués dans le contrôle de la mise en oeuvre du droit international de l'environnement dont le droit de l'eau est une branche. Le constat fait état du manque de moyens matériels, techniques et financiers. Mais aussi et surtout du manque de ressources humaines qualifiées. C'est pourquoi, les organes de contrôle doivent être spécialisés et s'équiper pour pouvoir mesurer l'état de l'environnement et spécifiquement l'état des ressources en eaux indépendamment de l'autocontrôle des entreprises. Aussi, pour prévenir toute complaisance et toute corruption, le contrôle ne doit pas être exercé par des services liés à l'entrepreneur ou par des administrations chargées de promouvoir le développement53(*). Même s'il est vrai que l'Etat est le principal acteur dans la création du droit international de l'environnement, il n'en demeure pas moins vrai que l'Etat seul ne peut valablement assurer le contrôle de l'application effective du droit de l'eau. En effet, bien que les organes publics de contrôle exercent, de leur mandat, une fonction de contrôle, ce dernier est presque exclusivement fondé sur des données étatiques .Or, celles-ci sont souvent incomplètes ou biaisées. D'où la nécessité d'ouvrir le système de contrôle aux autres acteurs qui, tout en ayant accès aux informations environnementales, n'ont pas de lien de dépendance avec l'Etat. C'est par exemple le cas des ONG qui pourraient convenablement veiller à l'application du droit de l'eau si elles avaient suffisamment de moyens pour affirmer leur indépendance vis-à-vis des pouvoirs publics. Malheureusement ces ONG malgré leur volonté de jouer aux côtés des organes de l'Etat ce rôle, se retrouvent limiter dans leurs efforts. Cette situation est souvent renforcée par leur non maîtrise des nombreuses conventions internationaux et textes de lois nationaux qui régissent le droit de l'environnement, en l'occurrence le droit de l'eau. La corruption faisant rage, il est possible que ces acteurs soient obligés de produire des rapports incomplets et erronés. Pour cela les ONG doivent conserver leur autonomie si elles souhaitent garder la liberté de porter un jugement critique sur les conséquences pour l'environnement des politiques et des projets adoptés par les pouvoirs publics. Par conséquent, les ONG internationales pourvues de moyens ont un rôle potentiel de premier plan à jouer dans le financement et le soutien d'ONG nationales. Dans cette même logique, on remarque souvent dans les pays en voie de développement une absence des populations dans le suivi de l'application de ce droit, alors que leur participation active est un gage de l'enracinement de la démocratie à la base. Le défi de renforcer l'application du droit international de l'environnement en vigueur passe aussi par le renforcement de la participation des citoyens à l'élaboration et à la mise en oeuvre de ce droit. Cette participation active est garante d'une meilleure adaptation des règlements aux réalités et d'un meilleur respect des textes54(*) . Aussi, pour reprendre l'expression de Michel Prieur, il s'agit du défi de perfectionner la démocratie là ou elle existe déjà, l'établir là où elle n'a pas encore été instituée. Par conséquent,l'accès à l'information en matière d'environnement détenue par les autorités publiques est une condition primordiale permettant de renforcer l'application et le contrôle du droit international de l'environnement et particulièrement du droit de l'eau en vigueur au niveau local et national. A ces pesanteurs évoquées s'ajoute la faiblesse des sanctions. B. La faiblesse des sanctions administratives et judiciaires L'administration recourt souvent aux sanctions administratives qui vont des mesures de fermetures provisoires ou définitives aux amendes administratives. Toutefois, certaines difficultés sont à noter au niveau de cette procédure. Ces difficultés résultent de la faculté laissée à l'Administration de transiger avec les pollueurs. Malheureusement, dans la plupart des cas, cette faculté est souvent préférée aux mesures répressives en raison de ce qu'elle évite aux pollueurs une condamnation pénale. On reproche souvent à cette méthode son caractère secret et le "marchandage" qui pourrait en résulter surtout, quant on connaît les "négoces" qu'il y a souvent dans les administrations des pays en voie de développement. L'idéal serait de voir ces pratiques cesser au profit de véritables sanctions et amendes frappant non seulement les « faibles » mais aussi les « forts ». La justice interne est aussi appelée à apporter sa contribution dans cette entreprise de la mise en oeuvre du droit de l'eau au niveau interne .Ainsi, des sanctions exemplaires à l'encontre des délinquants environnementaux sont indispensables pour dissuader et même persuader les éventuels récidivistes ou fautifs. Malheureusement cette justice voit ses sanctions fragilisées du fait de sa dépendance. Cette dépendance ne lui permet pas de jouer pleinement son rôle de gardien du temple du droit de l'eau en matière de répression. C'est pourquoi, le renforcement de capacités des magistrats et autres est indispensable pour permettre aux juges de mieux jouer leur rôle de dernier rempart contre les violations des normes environnementales. * 53 Déclaration de Limoges, Recommandations 2, Novembre 1990. * 54 Prieur (M.), Le droit à l'environnement et les citoyens : la participation, R.J.E. 1984-4, P.397 |
|