IV.2.3 La méthode de simulation du maximum de
vraisemblance (SML)
La fonction de vraisemblance (fonction de distribution
cumulative normale trivariée) pour N observations est
donnée par :
L ? ( ; )
où est la fonction de densité d'une loi normale
multivariée (à trois variables) avec les
arguments et :
Note : ( ) avec k ~ k - , pour chaque i.
La matrice est constituée par les éléments
( ) tels que :
p 4 ;
;
La résolution du système S (de trois
équations) se fait donc à travers la maximisation de la fonction
de vraisemblance définie ci-dessous. Cette maximisation se fait suivant
une méthode de simulation des distributions normales
multivariées.
La présente étude optera pour le simulateur
Geweke-Hajivassiliou-Keane (GHK) 56 , programmé par
Cappellari et Jenkins (2003)57. Par ailleurs, le principe du
simulateur GHK est basé sur la possibilité d'exprimer la fonction
de densité d'une distribution normale multivariée comme un
produit séquentiel de probabilités conditionnelles
univariées (d'une distribution normale).
Dans ce cas précis (trois variables dépendantes),
il sera obtenu huit (08) probabilités conjointes (
possibilités) correspondant aux différentes combinaisons
possibles de
"réussite" (Y ) et d'"échec" (Y ) pour les
trois activités dont l'étude veut estimer la probabilité
du choix de participation. En effet, sachant que la combinaison des trois (03)
possibilités d'allocation de leur temps de travail par les enfants
génère sept (07) stratégies possibles et une option
supplémentaire consistant à n'exercer aucune de ces trois (03)
activités (enfant "oisif"), il sera nécessaire de
déterminer huit58 (08) contributions à la
vraisemblance. Il faut noter que les résultats obtenus sont
dépendants du nombre de tirages aléatoires (random
draws) utilisé pour le calcul de la fonction simulée de
vraisemblance. Ce nombre doit être au moins égal à la
racine carrée de la taille de l'échantillon étudié
(Cappellari & Jenkins, 2003).
56 Cf. Borsch et al. (1992), Borsch
& Hajivassiliou (1993), Keane (1994), et Hajivassiliou & Ruud
(1994).
57 Programme mvprobit de Stata
10.0.
58 Voir Tableau
37.
Aussi, le choix d'une cinquantaine (50) de tirages
aléatoires pour les trois (03) pays faisant l'objet de la
présente étude permettra d'avoir une estimation fiable des
paramètres.
IV.2.4 Interprétation et discussion des
résultats d'estimations
Les résultats de l'estimation (Tableau
34, Tableau 35 Tableau 36 en annexe
; Tableau 24) confirment et justifient l'utilisation d'un
modèle multivarié.
En effet, les tests du ratio de vraisemblance (LR tests)
indiquent que les différents coefficients de corrélation entre
les termes d'erreurs de chacune des équations estimées, sont
significativement non nuls dans les trois (03) pays, ce qui montre que les
décisions de participation aux trois (03) différentes
activités sont dépendantes les unes des autres. Aussi, les choix
de participation à une des trois (03) activités ne
dépendent pas uniquement des attributs propres à chacune d'elles,
mais aussi de l'existence d'autres options (activités)59. En
clair, les décisions de participation et les différentes
combinaisons provenant de ces décisions, relèvent d'une
procédure sélective.
Par ailleurs, ces coefficients sont tous positifs, ce qui
montre que les variables inobservées influençant la participation
de l'enfant aux activités agricoles sont positivement
corrélées avec les caractéristiques inobservées qui
influencent de leur côté, la participation aux activités
économiques de méme qu'aux activités domestiques.
Par ailleurs, le signe positif des coefficients de
corrélation entre les résidus des équations
estimées pour les trois (03) pays, indique que quel que soit le pays
considéré, la probabilité pour un enfant de participer aux
activités agricoles influence positivement celle qu'un enfant a de
travailler dans le secteur des activités économiques de
même que la probabilité de participation de l'enfant aux
activités domestiques. La transitivité étant de mise (les
raisonnements inverse prévalent également), il est donc possible
de conclure à liens de complémentarité entre ces trois
(03) types d'activité.
Analyse des variables d'influence sur les participations
sectorielles
Les différentes variables significatives
précédemment identifiées n'agissent pas de la même
façon selon le secteur considéré et le pays
concerné. En effet, du point de vue des déterminants du travail
des enfants dans chaque secteur, les résultats du modèle global
sont, en général, retrouvés. Toutefois, il faut noter
certaines différences significatives qui font ressortir une certaine
spécificité pour chaque pays.
59 L'hypothèse
d'indépendance des alternatives non pertinentes (IANP) est ainsi
levée.
Burkina Faso
L'analyse sectorielle montre qu'au Burkina Faso
(Tableau 24), le sexe de l'enfant ne détermine pas sa
propension à travailler dans le secteur agricole alors qu'il influence
la probabilité de travail de l'enfant dans les secteurs
économiques et domestiques. Dans ces deux (02) derniers secteurs, les
jeunes garçons ont moins de chance d'être actifs, comparativement
à leurs jeunes soeurs. Par ailleurs, la structure familiale est quelque
peu déterminante dans les secteurs agricoles et domestiques, mais sans
grande influence dans le secteur des activités économiques.
Enfin, la localisation géographique ne semble jouer un rôle que
dans le secteur agricole. En effet, à l'image des résultats
obtenus dans l'analyse intersectorielle, les enfants habitant les zones de
faible ou moyenne intensité d'émigration ont plus de chance de
travailler que ceux vivant dans les zones de forte émigration. Les
caractéristiques de l'enfant sont peu déterminantes dans sa
propension à s'adonner à une activité agricole, ce qui
n'est pas le cas concernant le secteur des activités économiques
et celui des activités domestiques.
Tableau 24 : Estimations
simultanées des probabilités de participations : cas du Burkina
Faso
|
Activités agricoles
|
Activités économiques
|
Activités domestiques
|
|
Coefficient
|
ET
|
Coefficient
|
ET
|
Coefficient
|
ET
|
Caractéristiques de l'enfant
|
|
|
|
|
|
|
Sexe - Garçon1
|
|
|
-0,38289954***
|
0,1214
|
-0,74573837***
|
|
Environnement familial
|
|
|
|
|
|
|
Effectif 0 - 5 ans
|
0,02244777
|
0,0384
|
-0,03290655
|
0,0519
|
0,01376145
|
0,0703
|
Effectif 6 - 14 ans
|
-0,02567761
|
0,0303
|
0,04979837
|
0,0397
|
0,03206008
|
0,0416
|
Effectif 15 - 17 ans
|
-0,10251695*
|
0,0557
|
0,01641181
|
0,0812
|
-0,13573402**
|
0,0315
|
Effectif 18 - 54 ans
|
0,00896765
|
0,0333
|
-0,02190073
|
0,0447
|
-0,03942107
|
0,0604
|
Effectif 55 ans et plus
|
-0,01133745
|
0,0545
|
-0,08475594
|
0,0776
|
0,01752499
|
0,0342
|
Enfants vivant seulement avec son père
|
-0,02717956
|
0,2020
|
-0,44997152
|
0,3428
|
-0,15982065
|
0,0563
|
Enfants vivant seulement avec sa mère
|
0,15270338
|
0,1558
|
0,10208101
|
0,1999
|
0,12077887
|
0,2136
|
Enfants ne vivant ni avec le père ni avec la
mère
|
-0,3276692**
|
0,1479
|
-0,03156096
|
0,2129
|
-0,31789571**
|
0,1606
|
Caractéristiques du chef de
ménage
|
|
|
|
|
|
|
Agriculture
|
-0,08111871
|
0,1759
|
-,3731268
|
0,2373
|
-0,04350627
|
0,1494
|
Salarié1
|
0,06571765
|
0,4504
|
-3,5573133***
|
0,2475
|
0,43930779
|
0,1735
|
Profession libérale1
|
-0,13835839
|
0,1115
|
-0,04084934
|
0,1452
|
-0,19024885
|
0,4807
|
Autres emplois 1
|
-0,04395662
|
0,1869
|
-0,01689091
|
0,2736
|
-0,1957326
|
0,1166
|
Chômeur/Inactifs1
|
-0,2070314
|
0,1386
|
0,01297843
|
0,1931
|
-0,22193613
|
0,2014
|
Caractéristiques
géographiques
|
|
|
|
|
|
|
Strate (1) 1
|
0,3667059***
|
0,1405
|
-0,13141987
|
0,1787
|
0,07045748
|
0,1430
|
Strate (2) 1
|
0,31127917**
|
0,1494
|
-0,21585697
|
0,1922
|
0,18377327
|
0,1468
|
Constante
|
0,00912378
|
0,2476
|
-0,63332093*
|
0,3293
|
0,36437125
|
0,1552
|
Coefficients de corrélations (LR
test)
|
P21 = 0,6812153***
|
|
|
|
|
|
P31 = 0,9313532***
|
P32 = 0,5796522***
|
|
|
|
(i) LR Test X2(3) : 451,865 (0,000) ; (ii) AIC =
1930,727 ; (iii) BIC = 2173,132
Indications : ET : Ecart-type ; ***
Significatif à 1% ; ** Significatif à 5% ; * Significatif
à 10% ; (iv) variables binaires,
Source : TULANE-ENSEA, 2009, Enquêtes sur les
conditions de vie et de migration des enfants, estimation sous Stata
Côte d'Ivoire
S'agissant de la Côte d'Ivoire, l'analyse du Tableau
34 (en annexe) montre l'ensemble des variables
influençant le comportement des enfants en termes de participation aux
différentes activités étudiées. Le sexe et
l'âge de l'enfant influencent de la méme façon (méme
signe méme si ce n'est pas la méme intensité) leur
propension à travailler dans les trois (03) secteurs. Ainsi, les
garçons (respectivement les 10-14 ans) ont-ils moins de chance de
travailler que les filles (respectivement le 15-17 ans). La pauvreté
semble influencer positivement la prévalence du travail des enfants dans
les trois (03) secteurs, mais seul le secteur agricole semble impacté
significativement par cet indicateur de bien-être. Par ailleurs, les
enfants habitant les zones de moyenne intensité de production
cacaoyère ont moins de chance de travailler, comparativement aux enfants
vivant dans les zones de forte production de cacao, et ceci, dans les trois
(03) secteurs.
Mali
Au Mali (Tableau 35 en annexe), le sexe de
l'enfant joue un rôle important dans sa propension à participer
aux activités économiques contrairement aux autres types
d'activités, à l'image du Burkina Faso. Les enfants
âgés de 10 à 14 ans ont moins de chance de travailler que
ceux ayant plus de 14 ans, et ce, dans les trois (03) secteurs
étudiés. Par ailleurs, la scolarisation ne semble n'avoir aucun
rôle dans la détermination de la probabilité de
participation des enfants aux différentes activités. Ce
résultat qui semble contradictoire peut s'expliquer : en effet, la
significativité de cette variable dans le modèle global est assez
limitée (10% de seuil d'erreur). Il en est de méme pour la
localisation géographique qui ne semble influer significativement (au
moins à 5%) la propension des enfants à travailler que dans le
secteur agricole. En effet, le fait pour un enfant d'habiter dans une zone de
faible ou de moyenne intensité d'émigration augmente ses chances
de travailler dans le secteur agricole.
Synthèse : Il apparait que
l'âge (Côte d'Ivoire, Mali), le sexe et la localisation
géographique sont les facteurs qui semblent les plus déterminants
quant à la participation au secteur d'activités dans les trois
(03) pays. La pauvreté n'est décisive, par contre, qu'en
Côte d'Ivoire.
Analyse des probabilités marginales de
participation
Le Tableau 36 (en annexe) indique les
différentes propensions marginales de participation aux trois (03)
activités. Les enfants ont à peu près une chance sur deux
de travailler dans les secteurs agricoles et domestiques au Mali, la propension
marginale à travailler dans le secteur économique n'étant
que de 0,12. En Côte d'Ivoire, c'est à peu près la
méme chose qui est
observée, avec toutefois, des degrés (de
probabilité) plus faibles en ce qui concerne les secteurs agricole et
domestique (près de 0,36). Ainsi, un enfant ivoirien a en particulier
une chance sur trois de travailler dans les secteurs agricoles et domestiques.
La situation du Burkina est un peu plus déséquilibrée en
faveur du secteur agricole pour lequel les enfants ont plus d'une chance sur
deux de travailler. Ce secteur est suivi par les activités domestiques
(0,42), les activités économiques autres qu'agricoles venant en
troisième position (0,09).
Analyse des probabilités prédites de
participation
S'agissant des interrelations entre les différentes
activités effectuées par les enfants, il s'avère, en
analysant les probabilités prédites (ou jointes) (Tableau
37 en annexe), que les dépendances et les
interrelations constatées entre les décisions de participation
à l'aide des tests du ratio de vraisemblance se justifient dans les
trois (03) pays, mais aussi, que des dissemblances significatives existent
entre eux. En effet, au Burkina Faso, un enfant a plus de chance de travailler
exclusivement dans le secteur agricole (0,43) et domestique (0,34). Les chances
pour qu'il participe à la fois à des activités agricoles
et domestiques sont de 0,30. Il a très peu de chance de participer
exclusivement à des activités économiques (0,02) ou encore
de juguler activités économiques et agricoles seules (0,009).
S'agissant d'une participation concomitante aux trois (03) types
d'activités, ses chances sont seulement de 0,074. Quant à la
Côte d'Ivoire et au Mali, c'est dans le travail domestique que les
chances d'une participation exclusive sont les plus grandes (0,26 en Côte
d'Ivoire, 0,38 au Mali). Ensuite vient le secteur des activités
agricoles et une participation concomitante aux travaux agricoles et
domestiques.
S'agissant d'une participation simultanée aux trois
(03) types d'activités, il apparait que les chances sont bien plus
grandes pour les enfants de ces deux pays, comparativement au cas des enfants
Burkinabés (0,07). Elles sont en effet, de 0,11 pour ces deux (02) pays
(Côte d'Ivoire et Mali). Pour ce dernier pays (Mali), les enfants n'ont
aucune chance de travailler exclusivement dans les secteurs agricoles et
économiques. Enfin, la probabilité pour les enfants de ne
participer à aucune des trois (03) activités est plus forte en
Côte d'Ivoire (0,55). Ce pays est suivi par le Mali (0,48) et le Burkina
Faso (0,43). Ces résultats sont conformes à ceux attendus, la
prévalence du travail des enfants étant plus élevée
au Burkina Faso, suivi du Mali et de la Côte d'Ivoire.
Analyse des probabilités conditionnelles de
participation
Dans cette section, l'analyse s'établira dans une
optique comparative entre le groupe des activités économiques
(agricultures et activités économiques autres qu'agricoles) et le
travail
domestique (Tableau 38 en annexe). Au
Burkina Faso et en Côte d'Ivoire, la probabilité pour un enfant
d'être actif dans le secteur des activités domestiques sachant
qu'il s'adonne a priori à une activité agricole ou
économique (autre qu'agricole) est de 0,73 (Burkina Faso) et de 0,78
(Côte d'Ivoire). Au Mali, cette probabilité est bien plus
élevée. En effet, dans ce dernier pays, la chance pour un enfant
d'être occupé dans les activités domestiques alors qu'il
l'est déjà dans une activité économique est de
0,95. A l'inverse, les propensions pour les enfants d'être occupés
dans le groupe des activités économiques sachant qu'ils sont
déjà actifs dans les activités domestiques sont beaucoup
plus équilibrées dans les trois (03) pays. Toutefois, le groupe
Burkina Faso - Mali se distingue quelque peu de la Côte d'Ivoire. Cette
probabilité conditionnelle est, en effet, de 0,94 pour le Mali et de
0,92 pour le Burkina Faso alors que les enfants ivoiriens ont à ce
niveau des chances relativement moindres (0,86).
En général, les distributions conditionnelles
font ressortir des propensions conditionnelles assez élevées, ce
qui montre que des effets d'entrainement existent bel et bien du point de vue
de la participation aux activités inhérentes aux
différents secteurs. Cela confirme et renforce l'hypothèse de
dépendance entre les décisions de participation à chacune
de ces activités en même temps qu'il certifie les liens de
complémentarité entre celles-ci.
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