Sacerdoce du Christ comme sacrement de la miséricorde divine( Télécharger le fichier original )par Joseph TEMGA Grand Séminaire de Maroua - Fin cycle deThéologie 2006 |
CHAPITRE I :CONSIDERATIONS PRELIMINAIRESI.1. L'homme dans l'aventure religieuseDès les temps les plus reculés, l'être humain s'est toujours rendu compte que sa pleine réalisation dépendait d'une autre force extérieure et supérieure à lui. Il a en lui, comme un primat du non-être qui limite le déploiement plénier de son être, de son intelligence. Il s'est employé à concilier les forces qui le dépassaient et intervenaient efficacement dans son existence. Il a découvert qu'en lui, il y a une force centrifuge qui le porte vers l'autre. Et, c'est dans la rencontre avec l'autre que sa personne humaine s'éveille et grandit1(*). Parmi toutes ses relations interpersonnelles, une est fondamentale. En elle, prend source toutes les autres : la relation avec Dieu. En effet, créé à l'image de Dieu, l'être humain est appelé à entrer en relation avec Dieu et rien n'est plus important pour lui que la réponse qu'il donne à cette vocation. C'est pourquoi les anciens sont arrivés à se faire des divinités. Car, " il y a en l'homme un instinct spirituel qui porte le coeur de l'homme et incline son intelligence vers Dieu qui seul peut le garder, le défendre "2(*). Et c'est ainsi que St Augustin est arrivé à dire : " Tu nous as faits pour toi Seigneur et notre coeur est sans repos tant qu'il ne repose en toi "3(*). Toutefois, l'être humain a été créé libre et capable de poser des choix responsables. On peut ainsi enregistrer trois attitudes possibles dans la réponse de l'homme face à son appel à entrer en relation avec Dieu. La première complètement négative consiste au refus de la dimension religieuse de l'existence. Un refus qui parfois va jusqu'à nier l'existence de Dieu. L'homme vivant cette situation est comme un errant vagabond qui ne sait où il va et d'où il vient. Il s'est laissé accaparer et séduire par les biens sensibles, par les désirs de gloire et de puissance. Ainsi, au lieu de s'ordonner vers Dieu, il se replie sur lui-même en cherchant à satisfaire ses intérêts égoïstes. C'est le cas d'Adam et Ève, trompés au Jardin par le Serpent (cf. Gn 3, 6). La conséquence de ce repliement sont l'éloignement, la peur de Dieu et la recherche d'un refuge. « Quand ils entendirent les pas de Yahvé qui se promenait dans le jardin à la brise du jour, l'homme et sa femme se cachèrent devant Yahvé parmi les arbres du jardin » (Gn 3, 8). Ils se sentent diminués, " nus ". Ils ont perdu leur noblesse et la vraie image de Dieu : Dieu devient terrifiant, vengeur, jaloux et prêt à les châtier (cf. Gn 3, 8). La deuxième attitude apparemment positive mais qui en réalité est un autre genre de refus. Il s'agit de l'individualisme religieux : on s'ouvre théoriquement à la relation avec Dieu, mais on prétend la confiner dans les limites de la vie psychologique individuelle et lui interdire de déborder sur les autres secteurs de l'existence. La religion devient dès lors une affaire privée, secrète intimité entre l'âme et Dieu. Comme la Samaritaine au bord du puits, Dieu est maintenu à l'écart des autres relations (cf. Jn 4, 20). Il s'agit ici d'un Dieu personnel, apprivoisé, enfermé dans un carcan. Ce qui trahit complètement l'authenticité du rapport avec Dieu. La troisième est la solution qui corresponde pleinement à la vocation humaine en ouvrant l'existence entière des hommes à la relation vivifiante avec Dieu. Il s'agit d'une attitude d'accueil, d'une oblation de soi dans la relation transparente de Dieu. En elle, se greffe toutes les autres relations interpersonnelles. Et pour garder la relation authentique avec Dieu, qui est saint, l'homme a besoin d'une transformation radicale. D'où l'exigence d'une institution sacerdotale dont le prêtre sera chargé des relations avec Dieu pour le bénéfice du peuple. I.1.1. L'idée du sacerdoce dans l'Ancien TestamentL'Ancien Testament nous révèle que Dieu sans cesse cherche l'homme afin que celui-ci reconnaisse en Lui, l'unique et ultime bien pour se réaliser. Cette quête de l'homme doit être accueillie dans un acte d'adoration, un acte volontaire et libre par lequel la créature reconnaît totalement, librement et effectivement tous les droits de Dieu Créateur sur elle4(*). C'est par l'adoration que l'homme éprouve un vif désir de rencontrer Dieu, de nouer avec lui une relation personnelle. Elle creuse en lui le désir de connaître Dieu profondément et le pousse à poser des actes concrets d'intimité avec Dieu. Dans l'Ancien Testament, les gestes d'intimité à Dieu, acte de reconnaissance officielle des droits divins, sont nombreux. Ève après la naissance de Caïn reconnaît la suprématie de Dieu : " J'ai acquis un homme par Yahvé "(Gn4,1). Ainsi de manière graduelle, la Bible nous montre divers actes d'adoration. Caïn et Abel offrent en sacrifice les fruits de leur travail (Gn4,1-4) pour connaître les droits absolus de Dieu sur les biens. Noé, après la sortie de l'arche, construit un autel et offre en holocauste à Dieu les meilleurs des animaux et des oiseaux de l'arche, ceux qui sont " purs "(cf. Gn8,20) et " Yahvé respira l'agréable odeur "(Gn8,21) de ce sacrifice . C'est dire que ces gestes sont des lieux par excellence de rencontre avec Dieu. Les patriarches vont perpétuer ces gestes par des constructions d'autels (cf. Gn12, 7s ; 13,9 ; 26, 25...) l'offrande des sacrifices (Gn 22 ; 31,54 ; 46,1...) pour exprimer à Dieu leur reconnaissance, leurs actions de grâce et leurs supplications. Et Dieu n'est pas resté insensible à ces actes concrets d'adoration. Ainsi, les sacrifices sont des moyens efficaces pour entrer en relation avec Dieu. Avec Moïse, le sacrifice de la pâque est une très grande preuve d'intervention de Dieu dans l'histoire humaine. Et Israël a mieux conscience d'être un peuple élu du milieu des nations et donc doit vivre de la parole de Dieu. Telle fut l'Alliance conclue sur le mont Sinaï. Israël a conscience de la sainteté de Dieu et de sa responsabilité personnelle pour s'approcher de lui. Il sait que sans Dieu, son avenir devient obscur et jonché ça et là d'épreuves et de soumission par l'ennemi. C'est ainsi qu'il fut nécessaire pour Israël de garder la proximité de Dieu. Et pour cela, la tribu de Lévi, à cause de son zèle intransigeant pour les affaires religieuses, a été établie pour les fonctions sacerdotales ( cf. Ex 32,26-29 ) Les lévites étaient donc séparés du peuple et consacrés pour le service de Dieu et à garder la proximité de Dieu pour le bénéfice du peuple. Tel fut dès le départ, l'objectif du choix d'Aaron pour exercer le sacerdoce même de Dieu (Ex 28,1) * 1Cf. PHILIPPE M.- D., Un seul Dieu, tu adoreras, Coll. je sais et je crois, n°16, Paris, Librairie Arthème Fayard, 1958, p. 11 * 2 PHILIPPE M.- D., op. cit., p. 11 * 3 AUGUSTIN, confessions, Livre I, 1-2, Paris, Libriolle, 1969, P. 3 * 4 Cf. PHILIPPE M.-D., Op. cit., p. 9 |
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