Le processus électoral au Cameroun( Télécharger le fichier original )par Mbassi BEDJOKO Université Catholique d'Afrique Centrale - Master droit de l'Homme et Action Humanitaire 2004 |
Section 2. LA CAMPAGNE ELECTORALELa campagne électorale constitue un moyen sûr par lequel l'exercice du droit de vote peut être vérifié dans une démocratie. C'est pour cela que les règles qui la régissent énoncent deux catégories de procédés : des procédés anti-démocratiques et des procédés démocratiques. Paragraphe 1. Les procédés anti-démocratiques.Certains procédés sont anti-démocratiques en raison de leur caractère intrinsèquement prohibé. D'autres le sont en raison des ambiguïtés que leur emploi pourrait susciter. A. Les procédés prohibés.Ce sont des actes illicites et réprimés comme tels, injures, violences, atteinte à l'honneur ou à la considération d'un autre candidat par quelque moyen que ce soit dans un lieu ouvert au public. La victime des faits diffamatoires peut par voie de requête déposée contre récépissé et sans préjudice des sanctions civiles et/ou pénales contre l`auteur et/ou ses complices, conformément à la législation en vigueur, en saisir le Conseil constitutionnel, lequel statue dans un délai maximum de quinze jours à compter de la date de saisine29(*). Mais il faut prendre en considération deux types de nuances. Premièrement les juges tiennent compte de la passion inhérente à l'élection et font généralement preuve d'une indulgence plus grande qu'à l'ordinaire. Deuxièmement, le recours à ces procédés n'entraîne la disqualification du candidat comme le prévoit le 3e alinéa de l'article 94 de la loi se rapportant à l'élection du président de la République, que si les preuves contraires à leur usage n'a pu être apportées. Les cas d'annulation sont donc peu abondants à ce jour pour des raisons invoquées ci-dessus mais aussi et surtout parce que les Camerounais n'ont pas encore suffisamment développé en ce domaine la culture du prétoire. C'est ce qui ressort de l'enquête au terme de laquelle plusieurs personnes ont affirmé qu'en cas de non obtention de la carte de vote elles se résigneraient (Cf. graphique, p. 32). Graphique n°1 illustrant l'attitude des enquêtés en cas de non obtention de la carte d'électeur (Source : graphique établi par l'auteur) A côté des procédés prohibés, il convient aussi de considérer comme élément entravant à l'exercice du droit de vote, les procédés condamnables.
B. Les procédés condamnables.Dans la plupart des cas une compétition électorale oppose les représentants du pouvoir en place à ceux de l'opposition. Les premiers sont évidemment tentés d'abuser de leur situation. On peut remarquer qu'au Cameroun le Code électoral n'a pas inscrit dans ses dispositions les interdictions qui doivent peser sur les agents publics, comme c'est le cas dans certains pays. En France par exemple, la législation30(*) interdit tout procédé qui paraît ressusciter une « candidature officielle »31(*). Cela signifie qu'il est interdit à tout agent de l'autorité publique ou municipale de distribuer des bulletins de vote, professions de foi et circulaires des candidats. Dans la pratique, c'est l'Administration territoriale qui s'occupe de cette tâche. Généralement, les agents publics ne doivent pas intervenir dans les campagnes électorales. Les pressions exercées par les projets sur les candidats sont évidemment condamnables mais elles sont généralement difficiles à établir, le secret étant bien sûr la loi du genre. L'intervention des hommes politiques est en revanche normale. Mais quelle règle appliquer aux individus qui cumulent les deux fonctions, membre du gouvernement ou maire par exemple. J.-M. Denquin répond à cette question en disant que : « en théorie ceux-ci prennent position à condition de ne pas intervenir en tant que détenteur de fonctions officielles » 32(*). * 29 Cf. l'article 94. al 2 de la loi relative aux élections des députés à l'Assemblée nationale. * 30 Cf. article L.50 du Code électoral. * 31 Selon J.-M. Denquin, cette expression est demeurée attachée au souvenir du second empire mais la pratique s'est étendue au-delà (Cf. J. M. Denquin, Les droits politiques (Libertés et droits fondamentaux), Paris, Montchretien, 1996, p. 163). * 32 Idem, p. 164. |
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