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Le processus électoral au Cameroun

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par Mbassi BEDJOKO
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master droit de l'Homme et Action Humanitaire 2004
  

Disponible en mode multipage

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A mon épouse et mes enfants

REMERCIEMENTS

Les travaux de recherche sont par essence difficiles. Nous l'avons, heureusement moins ressenti, grâce au Dr Olinga Alain Didier qui en a assurés la direction et à qui nous adressons nos remerciements.

Nous adressons également notre profonde gratitude aux :

- Pr. Jean Didier Boukongou

- Dr Jean Claude Tcheuwa

- Dr Jean Claude Kamdem

- A M. Emmanuel Bayeni, etc.

Pour l'attention soutenue et constante qu'ils nous ont témoignée de bout en bout de par leurs précieux conseils et leur encadrement.

Nous disons enfin notre remerciement à tout le personnel de l'Apdhac dont la disponibilité a constitué un atout considérable à la conduite de nos travaux.

ABREVIATIONS

APDHAC : Association pour la promotion des droits de l'homme en Afrique centrale

Art. : article

Cab : Cabinet

CC : Conseil constitutionnel

CEAN : Centre d'études d'Afrique noire

CNSC : Commission nationale de supervision de couverture médiatique de la campagne

électorale

CNC : Conseil national de la communication

CRTV : Cameroon Radio Television

CSE : Conseil supérieur d'Etat

FSJP : Faculté de sciences juridiques et politiques

ONEL : Observatoire national des élections

MINCOM : Ministère de la communication

MINAT : Ministère de l'administration territoriale et de la décentralisation

RDPC : Rassemblement démocratique du peuple camerounais

SDF : Social democratic front

UDC : Union démocratique camerounaise

UFDC : Union des forces démocratiques camerounaises

UNC : Union nationale camerounaise

UNDP : Union national pour le développement et le progrès

URSS : Union des républiques socialistes soviétiques

SOMMAIRE

Remerciements............................................................................................2

Abréviations................................................................................................3

SOMMAIRE...............................................................................................4

RESUME/MOTS CLES.......................................................................................................6

SUMMURY/KEYWORDS....................................................................................................7

INTRODUCTION GENERALE......................................................................8

PREMIERE PARTIE

LE PROCESSUS ELECTORAL CAMEROUNAIS : DES PROGRES ETHIQUES CONSIDERABLES....................................................................................21

Chapitre 1. La dynamique de progrès du processus électoral a travers la phase pré-électorale..................................................................................................22

Section 1. Les opérations préliminaires du processus électoral....................................22

Section 2. Les opérations électorales et post-électorales............................................30

Chapitre 2. La dynamique du processus électoral a travers les phases électorale et post-électorale..................................................................................................37

Section 1. La phase électorale...........................................................................37

Section 2. La phase post-électorale.....................................................................43

DEUXIEME PARTIE

PARTIE. LES LIMITES DU PROCESSUS ELECTORAL CAMEROUNAIS............54

Chapitre 3. Les obstacles émanant de l'Administration........................................55
Section 1. La nature des obstacles a l'exercice du droit de vote....................................55

Section 2. L'épineux problème des inscriptions et de la distribution des cartes électorales...70

Chapitre 4. Les entraves à l'exercice du droit de vote non imputable à l'Administration.........................................................................................80

Section 1. Les entraves inhérentes aux citoyens et aux partis politiques..........................80

Section 2. Les entraves émanant de la société........................................................90

CONCLUSION GENERALE.......................................................................100
BIBLIOGRAPHIE....................................................................................104

ANNEXES...............................................................................................108

TABLE DES MATIÈRES...........................................................................136

RESUME

Le processus électoral au Cameroun a enregistré depuis le retour du multipartisme en 1992, des progrès considérables. Les changements intervenus dans l'infrastructure normative et institutionnelle qui ont conduit à ce résultat sont le fait, à la fois, de la dynamique des données factuelles de l'environnement international et celui du contexte socio-politique interne de la décennie 90.

Au niveau international, on peut considérer les événements de Berlin et de l'Urss ainsi que le discours de l'ancien président français, François Mitterrand au sommet de la Baule qui ont servi de détonateur à l'accouchement au forceps de la démocratie dans le pays, comme d'ailleurs un peu partout en Afrique au cours de la même période. Mais on ne saurait non plus négliger, au niveau interne, d'un coté, les discours démocratiques de M. Paul Biya, durant les années qui ont suivi son accession à la Magistrature suprême le 06 novembre 1982, et de l'autre, les revendications populaires ainsi que la poussée de la société civile en quête de liberté et de démocratie.

Malheureusement il n'est pas encore envisageable de classer le Cameroun au rang des pays dits démocratiques. En effet, le processus électoral qui pouvait servir comme l'étalon à partir duquel la démocratie et l'Etat de droit sont appréciés, est traversé par de nombreuses entraves qui limitent le plein exercice du droit de vote de bon nombre de citoyens. Il s'agit, d'une part, des obstacles émanant de l'administration et, d'autre part, des entraves inhérentes à la société et aux citoyens eux-mêmes.

MOTS-CLES

Administration - démocratie - droit de vote - Etat de droit - infrastructure normative et institutionnelle - liberté - multipartisme - processus électoral - société civile.

SUMMURY

Since the advent of multipartism in 1992 in Cameroon, the electoral process has considerably progressed. Changes have taken place in both the normative and institutional aspects, which led to this progress, are a result of changes in the international environment and the national socio-political context of the 90s.

At the international level, we can consider the events in Berlin, and the USSR, not forgetting the speech of former French President François Mitterand at the Baule summit, which sparked the democratitisation propcess in many countries, specially in Africa at this same period.

At the internal level we cannot neglect the speeches of M. Paul Biya when he came to power on the 6th of november 1982. On the other and we sould not neglect the popular revendications of the civil society for liberty and democraty.

Unfortunately, we cannot envisage Cameroon being classed amongst the so called democratic countries. In reality the lectoral process which could serve as a stepping stone for democracy and human rigths state in Cameroon, has in many obstacles that hinders the rigth to vote for the Cameroonian citizen.

These obstacles on one hand include the administration and on the other hand, obstacles put in place by the society and the citizens themselves.

KEYWORDS

Administration - civil society -democracy - electoral process - human rights states - liberty - multipartism - normative and institutional aspects- rigth to vote - INTRODUCTION GENERALE

Depuis 1992, les élections politiques multipartites sont remises au goût du jour au Cameroun, après une longue période d'interruption marquée par le régime du parti unique instauré en 1972.

L'histoire politique du pays montre, en effet, que l'idée qu'on puisse choisir les gouvernants et représentants n'est pas récente ; elle remonte bien loin dans la période coloniale au cours de laquelle, sous l'empire du multipartisme, le fédéralisme fut largement éprouvé.

Cette navette du multipartisme au parti unique et du parti unique au multipartisme traduit sans doute les propos de Samuel Nkaifon Pefura selon lesquels : «le Cameroun indépendant est parti du multipartisme pour revenir au multipartisme(...) après une dure période de parti unique »1(*).

On peut donc, aujourd'hui à la faveur de ce retour au multipartisme, dénombrer près de 180 partis politiques qui prennent régulièrement part aux divers scrutins.

Ces scrutins concernent non seulement l'élection du président de la République, mais aussi celle des députés à l'Assemblée nationale, des Conseillers municipaux et bientôt des Sénateurs et des Conseillers régionaux2(*).

Plus que les partis politiques, la question relative aux élections nous intéresse au plus haut point car elle se situe au coeur même du processus électoral, c'est-à-dire, l'ensemble des opérations qui concourent au choix des élus.

Appliquée au Cameroun, la crédibilité du processus électoral laisse apparaître dans l'opinion publique de profondes controverses.

Pour le pouvoir en place, les mécanismes qui conduisent au choix des gouvernants sont peu critiquables. Ils réunissent les conditions de transparence et garantissent la tenue d'élections libres et démocratiques. En ce sens, déclare le Professeur Jacques Fame Ndongo : « Depuis son accession à la magistrature suprême, le président Paul Biya a engagé son pays dans un processus démocratique qu'il poursuit avec méthode et détermination. Dans cette perspective les élections se déroulent au Cameroun dans la transparence et le respect des règles de la saine compétition entre les partis »3(*).

Cette position est très combattue par les autres acteurs politiques, en particulier ceux de l'opposition, qui y voient de graves lacunes préjudiciables à l'exercice du droit électoral reconnu aux citoyens. A ce propos affirme Pierre Flambeau Ngayap : « Au moment où le peuple camerounais s'attendait (...) à une amélioration dans le respect de la liberté de vote des citoyens et dans la transparence des élections, l'Undp constate que les fraudes et les entraves à l'exercice du droit de vote qui ont caractérisé le double scrutin du 30 juin 2002 ont atteint un niveau jamais atteint auparavant »4(*).

Le thème de notre recherche intitulé : «le processus électoral au Cameroun » garde ainsi toute son importance car il permet de vérifier la pertinence de ces points de vue contradictoires.

C'est au travers d'une série de textes qu'il peut être mieux décrit et présenté afin de valider ou infirmer toutes les thèses qui font sa crédibilité. Il en va ainsi de :

- la loi n°91/20 du 18 décembre 1991 fixant les conditions d'élection des députés à l'Assemblée Nationale, modifiée par celle n°97/13 du 19 mars 1997 ;

- la loi n°92/002 du 14 août 1992 fixant les conditions d'élection des Conseillers Municipaux ;

- la loi n°92/10 du 17 septembre 1992 fixant les conditions d'élection et de suppléance à la Présidence de la République, modifiée par celle n°97/020 du 9 septembre 1997 ;

- la loi n°97/006 du 16 janvier 1997 fixant la période de révision et de refonte des listes électorales ;

- la loi n°2000/015 du 19 décembre 2000 relative au financement public des partis politiques et des campagnes électorales ;

- la loi n°2000/016 du 19 décembre 2000 portant création d'un Observatoire national des élections (Onel).

La dynamique des modifications des lois susvisées et l'adoption régulière de nouvelles lois électorales ont montré le souci des autorités au pouvoir de perfectionner le processus électoral camerounais. Cela a été possible grâce au vent de la démocratie qui a soufflé sur le continent africain dès 1990 à la suite, d'une part, de l'effondrement du mur de Berlin et de l'Empire soviétique, d'autre part, devant les conditionnalités démocratiques imposées par la France à la Baule et par les Institutions financières internationales. On remarquera surtout au plan socio-politique interne, une intense activité de la société civile et une mobilisation tous azimuts des citoyens autour des revendications en faveur d'une démocratie intégrale et de l'instauration de l'Etat de droit au Cameroun.

Il n'est donc pas question de s'interroger longuement sur la valeur de ce processus car, si on lui reconnaît de grands progrès et une dose formelle de maturité, les problèmes récurrents liés aux inscriptions sur les listes et la distribution des cartes électorales, l'accès des partis politiques et des candidats aux médias de service public, etc. apparaissent comme ses principales faiblesses auxquelles nous apporterons des esquisses de solution dans le cadre de cette recherche.

I. INTERET SCIENTIFIQUE ET SOCIAL DU SUJET

L'étude du processus électoral au Cameroun permet de saisir les rapports qui unissent les principaux acteurs qui prennent part aux élections, en particulier l'Administration, les partis politiques, les électeurs puis les observateurs tant nationaux qu'internationaux.

Les rapports réciproques entre ces acteurs laissent le plus souvent apparaître de nombreux conflits surtout en période électorale, impliquant le rejet et la contestation des résultats par les perdants. Qu'est-ce qui peut justifier ce type de conflit ? Comment y remédier ?

Ces questions trouvent une bonne partie de leurs réponses dans l'intérêt scientifique et social de la présente étude.

1. 1. Intérêt scientifique

L'électorat camerounais révèle bien de curiosités pour bon nombre d'observateurs. Celles-ci procèdent non seulement de la timidité de nombreux citoyens à l'exercice de leur droit de vote, mais aussi et surtout de leur ignorance des règles fondamentales qui gouvernent le processus électoral de leur pays. On se demande donc comment est-il possible de revendiquer un droit qu'on ignore ?

Le droit électoral et d'une manière générale les droits politiques, font malheureusement partie de cet ensemble d'instruments encore mal connus de la majorité des acteurs politiques camerounais. Il s'en suit une double conséquence : la limitation de leur exercice ainsi que leur manipulation par les acteurs avisés. Cela justifie assurément l'une des causes de rejet des résultats des élections par une frange de l'opposition au cours des dix dernières années. Il faut aussi surtout considérer que cette double conséquence s'imprègne du déficit actuel de publications dans le domaine étudié.

Le processus électoral au Cameroun emprunte, en effet, un champ encore vierge dont la tentative de «dépucelage » s'est timidement opérée grâce aux lois électorales successives et aux articles de journaux à l'occasion des élections.

L'intérêt scientifique de notre recherche essaie par conséquent de combler ce vide en donnant une photographie suffisamment saisissante des différents axes qui fondent le système électoral actuel, contribue à son analyse et fixe les perspectives d'amélioration qui l'interpellent au regard des exigences de la démocratie et de l'Etat de droit.

1. 2. Intérêt social

L'une des causes de violences, voire de guerres civiles sur le continent africain est liée à la mauvaise gestion des élections dont l'organisation n'intègre pas toujours ou peu l'essentiel des acteurs directement concernés.

On peut se demander si le calme qui semble caractériser le Cameroun n'est pas dû au fait que ce pays a entrepris au travers de sa législation électorale, de ne point confisquer le processus électoral ?

Cette question appelle en tout cas, une réponse affirmative même si, par ailleurs, la maturité politique des Camerounais y tient une place non négligeable.

Au demeurant, l'intérêt social de notre étude vient renforcer les moyens du pouvoir de maintenir et de garantir la stabilité et la paix sociale.

2. REVUE DE LITTERATURE

L'étude du processus électoral au Cameroun nous a permis de lire certains auteurs et d'analyser leurs différents points de vue sur les questions électorales notamment Samuel Nkaifon Pefura, le Service Humanus, Jacques Philibert Nguemegné et Alain Didier Olinga.

En 1996, Samuel Nkaifon Pefura a publié un ouvrage intitulé Le Cameroun du multipartisme au multipartisme. Il démontre que le Cameroun n'est pas à sa première expérience démocratique, dans la mesure où l'intervalle entre la période coloniale et 1972 était largement dominée par le fédéralisme. Ce régime politique avait en effet permis au Cameroun d'avoir plusieurs partis politiques.

Bien que le caractère pluriel de ces formations politiques ait été abandonné de fait, à l'instigation de l'ancien président Ahidjo, la Constitution de 1972 reconnaissait de jure le multipartisme que le nouveau régime de Paul Biya n'a fait que réactiver.

Cette démonstration aurait pu être complète si, l'auteur en parlant du retour au multipartisme, avait expliqué le contexte de ce changement, en mettant en exergue les circonstances qui l'ont dictées.

Le Service oecuménique pour la Paix et la promotion humaine dans son Rapport sur Les élections Camerounaises de 1997, est arrivé à la conclusion que les élections considérées ont été globalement mal organisées, d'une part, à cause du cafouillage généralisé relatif aux opérations pré-électorales et en particulier l'inscription sur les listes et la distribution des cartes électorales ramenées de facto sous la responsabilité des autorités administratives au détriment des Commissions mixtes comme le prévoit la loi, d'autre part, en raison du retard observé dans l'acheminement du matériel de vote ainsi que leur insuffisance le jour du scrutin.

Ces observations restent encore d'actualité et semblent se perpétuer puisque les récentes consultations électorales du 30 juin 2002, n'ont pas déroger à la règle. C'est dire que ce rapport nous guidera quant à la réalité du processus électoral et quant aux difficultés rencontrées.

Le Service Humanus aurait pu néanmoins mentionner la maturité politique qui caractérise les Camerounais plus préoccupés à sauvegarder la paix dans le pays, qu'à la mettre en péril sous le prétexte de dénoncer les irrégularités. C'est l'idée que le représentant de l'Union africaine à ces dernières élections, M. Abdelatif Ben Hadj, exprime au cours d'une interview dans les colonnes du journal La Nouvelle Expression : « à mon avis, même si l'opposition a perdu dans toutes les zones, elle doit s'estimer heureux de se remercier parce qu'il y a la paix et le calme »5(*).

En 2000, Dr. Jacques Philibert Nguemegné a publié, dans les Annales de la Faculté des sciences juridiques et politiques de l'université de Dschang consacrés aux droits de l'homme, une intéressante «Réflexion sur l'usage et le respect des droits de l'homme au Cameroun : le droit de vote depuis 1990 ».

Parmi ces droits, il s'est davantage intéressé au droit de vote confronté à de multiples limitations. On note cependant dans cette analyse un ton très passionné de l'auteur qui a feint d'ignorer les progrès certains réalisés dans la reconnaissance de ce droit, progrès qui vont s'affirmant au fur et à mesure que la démocratie s'enracine au Cameroun.

Au cours de la même année, Dr Alain Didier Olinga a publié une brochure consacré à L'Onel (Réflexion sur la loi camerounaise du 19 décembre 2000 portant création d'un Observatoire national des élections). L'auteur décrit non seulement le contexte dans lequel cet organe est né, caractérisé par de nombreuses tractations entre le pouvoir et certains partis politiques, en particulier le Sdf et l'Undp, mais aussi dégage un constat avant d'émettre un souhait. Il fait remarquer que l'Onel n'est autre chose qu'un habillage institutionnel supplémentaire dont l'influence au plan politique reste très limité du moment que son rapport final emprunte une direction unique, celle du président de la République. Ce constat est intéressant à plus d'un titre et peut être pris au sérieux ; mais les dernières élections du 30 juin 2002, au cours desquelles l'Onel s'est montré engagé et ferme dans ses prises de positions, avec à la clé l'annulation des élections dans certaines circonscriptions comme celle de la Sanaga maritime à Edéa, suite à son rapport à la Commission départementale de supervision et au Conseil constitutionnel, viennent jeter un bémol sur les craintes qui ont succédé sa naissance et qui ont poussé M. Olinga à un jugement à priori.

Le «espérons que l'Onel ne viendra pas grossir la cargaison camerounaise des institutions morts-nés, parce que créées (...) dans une logique essentiellement symbolique et instrumentale »6(*) lancé par l'auteur doit par conséquent être nuancé.

3. CLARIFICATION DES CONCEPTS

L'étude de clarification des concepts sera abordée sous deux angles : les concepts inhérents au sujet à traiter et ceux dont le recours est nécessaire pour mieux appréhender l'objet de notre recherche.

3. 1. Processus

Le mot processus vient du latin «progression » qui veut dire, selon le dictionnaire Le Petit Larousse, «un enchaînement ordonné de faits ou de phénomènes, répondant à un certain schéma et aboutissant à un résultat déterminé »7(*).

3. 2. Electoral

L'adjectif électoral signifie «qui se rapporte à une élection, aux élections ».

Certains termes d'usage courant sont inévitables dans une étude comme celle d'un processus électoral. Ils peuvent cependant entraîner de graves confusions de compréhension qu'il convient d'écarter dorénavant :

- Election

Par élection, on entend le mode de désignation des titulaires des rôles politiques octroyant aux membres de la collectivité concernée le droit de choisir leurs représentants8(*).

L'élection s'impose ainsi en même temps comme principe et comme technique de gouvernement.

Comme principe de gouvernement, elle constitue le fondement même de la démocratie représentative, postulant que le pouvoir politique n'est légitime que s'il est exercé par le peuple par l'intermédiaire de ses représentants dûment désignés. Aussi, la démocratie représentative a-t-elle supposé la lente extension du droit de suffrage et une élection n'est-elle tenue pour pleinement démocratique que si elle s'exerce au suffrage universel sans restriction de nature sociale, économique, éducative ou sexuelle.

Comme technique de gouvernement, l'élection devient sujet de débat et de contestation. La manière de désigner les gouvernants influe de façon déterminante sur le résultat des élections et constitue à ce titre un enjeu décisif pour la classe politique.

Les modalités d'exercice du droit de suffrage se révèlent extrêmement diverses, tant dans l'espace que dans le temps, laissant la place à quantité de formules convertissant de façon toujours contestable et insatisfaisante l'expression d'un suffrage en mode de désignation d'un représentant.

- Le contentieux électoral

Le contentieux électoral est perçu comme « le moyen le plus visible de concrétisation et d'effectivité d'un système normatif »9(*). Il désigne les recours introduits contre les résultats du scrutin. Ceux-ci sont examinés soit par les commissions communales et départementales de supervision (au Cameroun, pour les élections locales) soit par la Cour suprême, Conseil constitutionnel plus tard (pour les élections législative et présidentielle).

4. PROBLEMATIQUE

Selon Michel Beaud, la problématique est l'ensemble construit autour d'une question principale, des hypothèses de recherche et des lignes d'analyse qui permettent de traiter le sujet.10(*) Aussi envisageons-nous cette étude autour de la question suivante : au regard de l'exercice du droit de vote, à travers tout le processus électoral actuel, le Cameroun évolue t-il vers à une société véritablement démocratique ? Si oui quels sont les traits caractéristiques de cette évolution ? Cette dernière n'est- elle pas retardée par des obstacles de divers ordres ?

5. HYPOTHESE

Notre problématique induit une hypothèse principale, à savoir : La dynamique de progrès de la démocratie au Cameroun s'affirme davantage à travers le processus électoral qui consacre formellement le droit de vote, mais la pleine jouissance de celui-ci par les citoyens rencontre encore de nombreuses entraves imputables, d'une part, à l'Administration, d'autre part, aux citoyens eux-mêmes.

6. DEMARCHE METHODOLOGIQUE

Pour vérifier notre hypothèse, nous avons eu recours à tout un ensemble de méthodes et de techniques.

6. 1. Méthode

Selon Le dictionnaire Le Robert, la méthode dans son sens le plus large est « l'ensemble des démarches que suit l'esprit pour découvrir et démontrer la vérité »11(*).

L'analyse de notre sujet en exige trois : la méthode comparative, l'approche systémique d'Easton et la méthode descriptive.

- La méthode comparative

La politique comparée est un mode de questionnement de l'ensemble des phénomènes politiques, une manière de faire progresser l'analyse empirique. Elle se veut un rapprochement raisonné d'objets de nature analogue afin de mieux identifier leurs caractéristiques et s'impose comme une nécessité dans toute science12(*).

Comparer signifie alors relativiser et se libérer des pièges de l'uniformisme en montrant la pluralité et la diversité. L'approche comparative apparaît nécessaire dans notre travail car, comme l'affirme Grosser, « il est bon, il est utile de comparer pour progresser vers une connaissance plus générale »13(*). Ainsi cette méthode permettra d'appréhender de manière satisfaisante le phénomène de processus électoral que nous étudions. Ce le sera davantage, en expliquant le mécanisme tel qu'il est vécu dans les autres pays, notamment en France afin de s'en inspirer si possible.

- L'approche systémique d'Easton.

David Easton applique la théorie générale des systèmes à l'analyse politique. Il propose de considérer les systèmes politiques comme une « boîte noire », en négligeant ce qui se passe à l'intérieur de cette boîte étant donné que l'analyse systémique porte socialement et essentiellement sur les relations du système avec son environnement.

Selon l'auteur, les rapports que le système politique entretient avec son environnement sont constitués par deux types d'éléments : `'les inputs'' et les `'outputs''.

Grâce aux inputs, il nous est possible, affirme-t-il, de saisir les effets de la grande variété d'évènements et de situations de l'environnement dans la mesure où ils affectent la persistance d'un système politique.

Les `'outputs'' quant à eux sont produits par le système politique en réponse aux `'inputs'' reçus par lui, ce sont des décisions et des actions.

Dans le cadre de notre recherche, le recours à ce système est indispensable en ce sens qu'il nous permet d'expliquer les relations qu'entretient le système politique Camerounais avec les différents acteurs politiques.

Les inputs seront alors les revendications, les propositions émanant de ces acteurs et susceptibles d'améliorer le processus électoral, existant. Les outputs sont quant à eux la réponse de l'Etat face à ces revendications.

6. 2. Technique

La rhétorique ne permet pas toujours d'appréhender et de rendre compte, de manière précise un phénomène. Cette difficulté sera encore plus grande dans une question comme celle que nous étudions où la démarche a posteriori revêt une importance capitale. Pour pallier les limites découlant de la rhétorique, nous avons choisi de recourir à la technique d'enquête au moyen d'entretien et de questionnaire afin de rassembler et d'analyser les différentes opinions sur les questions fondamentales de notre sujet. Pour cela, nous avons sélectionné une population de 39 personnes toute catégorie sociale et professionnelle confondue14(*).

6. 3. Délimitation du sujet

L'étude du processus électoral au Cameroun couvre un champ très vaste, qui tient compte non seulement de la période qui intéresse son examen mais aussi des circonscriptions dans lesquelles se déroulent les différentes opérations électorales. Il serait par conséquent fastidieux d'aborder ces différents points sans y opérer une délimitation claire et précise.

Ceci étant, la première préoccupation liée à la période de notre étude prend comme point de départ 1992. Elle permet d'écarter les différents processus issus de l'ordre ancien, successivement de l'ordre fédéral et monopartisan qui rendraient notre travail anormalement long.

La seconde préoccupation relative au travail de terrain écarte la tentative de parcourir l'ensemble du territoire national. Elle ne concernera donc que les localités de Douala, Yaoundé et Edéa.

Le choix de Douala tient au fait que cette ville est considérée depuis 1990 comme un fief où l'opposition compte de très nombreux partisans, généralement très critiques à l'égard du pouvoir. Le choix de Yaoundé traduit une approche contraire et apparaît comme le meilleur terrain où les actes du pouvoir de quelque nature qu'ils soient, sont justifiés au nom de l'intérêt supérieur de la Nation. Enfin, le choix d'Edéa est justifié par le fait que cette localité a connu, comme dans neuf autres circonscriptions au lendemain du 30 juin 2002, l'annulation des élections.

7. JUSTIFICATION DU PLAN

Le présent travail s'articule autour de deux parties : la première analyse les progrès réalisés dans la modernisation du processus électoral au Cameroun. Pour ce faire, une étude est consacrée à la dynamique de progrès du processus électoral à travers la phase pré-électorale ainsi que celle à travers les phases électorale et post-électorale.

La deuxième partie, quant à elle, dégage les limites du processus électoral camerounais au regard de l'exercice du droit de vote. A cet égard, seront tour à tour abordés, les obstacles émanant de l'Administration et les entraves inhérentes aux autres acteurs du processus électoral.

PREMIERE PARTIE

LE PROCESSUS ELECTORAL CAMEROUNAIS : DES PROGRES ETHIQUES CONSIDERABLES AU REGARD DE L'EXERCICE DU DROIT DE VOTE

___

L'exercice du droit de vote et l'implantation graduelle de la démocratie et de l'Etat de droit au Cameroun sont sortis du cadre de la fiction où ils ont été enfermés pendant plusieurs décennies pour devenir une réalité. Ce n'est qu'en étudiant la dynamique de progrès du processus électoral de ce pays à travers les différentes phases dans lesquelles celui-ci puise sa substance que cette évolution remarquable peut être mieux comprise.

Aussi, sera-t-il question d'une part d'analyser la dynamique de progrès de ce processus à travers la phase pré-électorale et, d'autre part, d'examiner cette même dynamique à travers la phase électorale et post-électorale.

CHAPITRE 1

LA DYNAMIQUE DE PROGRES DU PROCESSUS ELECTORAL A TRAVERS LA PHASE PRE-ELECTORALE

La préparation des élections comporte deux grands aspects. Un certain nombre d'opérations préliminaires doivent d'abord êtres accomplies. D'autre part, la campagne électorale, phénomène de nature essentiellement politique, comporte un encadrement juridique.

Section 1. LES OPERATIONS PRELIMINAIRES DU PROCESSUS ELECTORAL

Les opérations préliminaires se subdivisent en deux. Il y a d'un côté, les opérations dites permanentes et, de l'autre, celles dites conjoncturelles.

Paragraphe 1. Les opérations préliminaires permanentes

Ce sont des opérations qui interviennent entre le 1er janvier et le 31 décembre de chaque année, indépendamment de la tenue ou non des élections. Elles comprennent, d'une part, l'inscription sur les listes électorales et, d'autre part, la distribution des cartes électorales.

A. L'inscription sur les listes électorales

Tout citoyen en âge de voter doit s'assurer que son nom est inscrit sur les listes électorales pendant la période normale d'inscription et/ou de révision ainsi que lors des réunions de routine de la Commission de révision des listes qui ont lieu chaque année à l'initiative de la Commission mixte électorale.

Au terme de l'article 28 alinéa 7 de la loi concernant l'élection des députés, les travaux de la Commission de révision peuvent être valablement conduits par un seul de ses membres, à condition que tous les autres membres soient mis au courant des travaux avant leur clôture.

Il importe cependant de ressortir la différence qui existe entre la révision et la refonte des listes électorales. En effet, on parle de refonte dans l'hypothèse des inscriptions générales. On fait alors comme si les citoyens s'inscrivaient sur les listes pour la première fois.

Tandis que la révision consiste à modifier simplement les listes déjà existantes selon plusieurs cas de figures :

- La Commission de révision ajoute sur ces anciennes listes les citoyens qu'elle reconnaît avoir acquis les qualités exigées par la loi15(*) ;

- Elle retranche par la même occasion : les personnes décédées, celles dont la radiation a été ordonnée par l'autorité compétente16(*), celles qui ont perdues les qualités requises par la loi, même si leur inscription n'a pas été attaquée, celles qu'elle reconnaît avoir été indûment inscrites.

Les opérations électorales visées sont annuelles, elles commencent le 1er janvier et se terminent le 31 décembre17(*).

Au regard de la composition des membres qui conduisent ces opérations, on peut penser que les conditions de transparence, d'égalité et d'équité sont réunies. C'est pour cette raison que le rôle de cette Commission mixte apparaît primordial en matière de garantie du droit de vote. Mais l'expérience montre que ce rôle n'est pas toujours correctement rempli. A cet égard il faut considérer l'inaction de ses membres en dehors des périodes électorales malgré le caractère permanent des inscriptions prévues par la législation électorale18(*). Situation voulue ou non, la réalité est que de nombreux citoyens sont privés de la possibilité légal de se faire inscrire sans pression, ni bousculade. Ils sont surtout privés d'une occasion exceptionnelle d'introduire un recours si leurs noms n'apparaissent pas dans les registres électoraux.

La conduite des opérations de révision visée à l'article 28 al. 7 ci-dessus est une limitation au travail des Commissions considérées puisqu'il admet que les activités de la Commission de révision peuvent être conduites par un seul membre. Même si ce dernier bénéficiait de la confiance des autres, le degré élevé de suspicion ajouté à l'absence de culture politique de nombreux Camerounais, font qu'on ne peut être sûr de la qualité du travail. L'idée de contrôle qui sous-tend le caractère mixte de la Commission est ainsi battue en brèche.

En ce moment les problèmes d'inscription sont loin d'être réglés et constituent la pomme de discorde entre les différentes parties aux élections. Ils seront largement analysés plus loin dans le souci de suggérer quelques pistes à même d'être expérimentées pour les élections avenirs. Il en est de même pour le problème de la distribution des cartes électorales.

B. La distribution des cartes électorales

Tout électeur conscient doit s'assurer que les autorités compétentes - les agents de l'Administration ou les Commissions19(*) - lui délivrent une carte d'électeur comme l'indique l'article 65 de la loi concernant l'élection des députés20(*).

Cette carte est permanente. Elle peut être conservée par l'électeur ou remise en dépôt à la sous-préfecture en dehors des périodes de scrutin. L'expérience des élections au Cameroun montre cependant que ces dispositions ne sont pas toujours respectées. Le renouvellement des cartes électorales est régulier ; presque à chaque élection, l'Administration confectionne de nouvelles cartes. Cela entraîne une double conséquence au niveau de l'Etat et au niveau des citoyens.

Au niveau de l'Etat, la conséquence est plus économique et financière car la confection des cartes génère d'importantes dépenses pour le trésor public. Au niveau des citoyens, il entraîne un gaspillage de temps inutile et les tracasseries administratives, dès lors que obtenir une carte dans le contexte camerounais relève parfois de l'exploit. Il y a lieu de penser simplement à la « mauvaise foi démocratique » de l'Administration qui y trouve une occasion idéale d'exclusion politique de nombre de citoyens à l'exercice du droit de vote.

Cette mauvaise foi se traduit également dans les opérations préliminaires conjoncturelles.

Paragraphe 2. Les opérations préliminaires conjoncturelles

On dénombre parmi les opérations préliminaires conjoncturelles, les opérations liées à la fixation de la date des élections, celles relatives au dépôt de candidature, enfin celles se rapportant à la consultation des listes électorales et des bureaux de vote, ainsi que de la convocation du corps électoral.

A. La fixation de la date des élections et la convocation du corps électoral

La fixation de la date des élections constitue en apparence une opération purement matérielle et donc neutre par rapport aux grands principes. Le choix de la date du scrutin appartient au président de la République dans une fourchette légale prédéfinie et diffère selon la nature de l'élection.

Pour l'élection présidentielle, la Constitution camerounaise du 18 janvier 1996, prévoit que ce délai est de vingt jours au moins et cinquante jours au plus avant l'expiration des pouvoirs du président de la République en exercice. C'est le même principe posé par l'article 1er alinéa 3 du code électoral21(*).

S'agissant des élections législatives, les délais sont précisés par l'article 15 alinéa 4 de la Constitution qui dit que : « En cas de crise grave, le président de la République peut, après consultation du président du Conseil constitutionnel et des bureaux de l'Assemblée nationale et du Sénat22(*), demander à l'Assemblée nationale de décider par une loi de proroger ou d'abréger son mandat. Dans ce cas, l'élection d'une nouvelle Assemblée a lieu quarante jours au moins et soixante jours au plus après l'expiration du délai de prorogation ou d'abrègement de mandat ».

En l'absence de cas de force majeure tel que décrit ci-dessus, l'article 1 alinéa 4 du code électoral énonce que : « l'élection a lieu au plus tard le dernier dimanche qui précède l'expiration des pouvoirs de l'Assemblée ».

Dans le cas des élections locales, le délai est celui qui vient d'être énoncé par l'article 1er alinéa 4 ci-dessus qui proclame que : « les dispositions de la loi no 91/020 du 16 décembre 1991 fixant les conditions d'élection des députés à l'Assemblée nationale sont applicables mutatis mutandis à l'élection des Conseillers municipaux, sous réserve de celles particulières fixées par la présente loi. »

Dans la pratique, les limites imposées par le législateur dans la fixation de cette date ne lient pas toujours l'exécutif.

A cet égard, le non-respect des délais constitue une usurpation dont le pouvoir au Cameroun est à chaque consultation accusé. Il fait partie d'un des multiples aspects de la répression électorale au Cameroun selon M. Abel Eyinga qui l'exprime en ces termes : « Chez nous, le chef de l'état, président du parti au pouvoir, s'est arrogé le droit d'être seul à fixer la date du scrutin. Il le fait, naturellement, en fonction de son intérêt personnel et des convenances de son parti. Depuis 1982 (...), peu de consultations électorales ont eu lieu à la date prévue par les institutions. Elles ont souvent été soit retardées, parfois de plusieurs années, soit anticipé »23(*).

L'incertitude qui entoure la fixation de la date du scrutin apparaît plus comme une tactique. L'observation montre que l'autorité investie du pouvoir de fixation, choisit la date en fonction de la période qui lui est favorable. Il ressort de l'observation que ces dates correspondent le plus souvent à la période de saison des pluies. A cet égard, seuls les partis nantis peuvent parcourir les pistes des villages impraticables puisqu'ils justifient de véhicules adaptés. Cette date est souvent aussi fixée en tenant compte de l'état d'esprit des populations et de leurs opinions vis-à-vis du gouvernement. Aussi, cette date sera-t-elle fixée si l'opinion est favorable.

B. Le dépôt de candidature

Qu'il s `agisse des élections des députés à l'Assemblée nationale ou de celles des Conseillers municipaux, le principe général est que les candidats sont désignés par un parti politique.

S'agissant des élections municipales, les conditions de la déclaration sont exposées par les articles 18, 19, 20 et 21 de la loi qui fixe leur organisation.

Les candidatures font l'objet auprès du sous-préfet compétent au plus tard quarante jours avant le jour du scrutin, et avant l'heure normale de fermeture des bureaux, d'une déclaration en triple exemplaire, revêtue des signatures légalisées des candidats. Cette déclaration est déposée contre récépissé aux conditions prévues par la législation électorale en vigueur24(*).

Cette déclaration de candidature peut être soit acceptée soit rejetée par le préfet. Dans la première hypothèse, le mandataire est alors appelé à verser au trésor un cautionnement dont le montant est fixé à 25.000f CFA par candidat. Si elle est refusée le rejet de la déclaration de candidature doit être motivé par l'autorité compétente25(*).

Pour les élections législatives, la constitution du dossier est régie par les mêmes conditions générales que celles prévues pour les municipales.

Contrairement à l'élection des Conseillers municipaux, le cautionnement demandé pour être candidat à l'élection des députés à l'Assemblée nationale est fixé à 50.000f CFA par candidat titulaire.

Enfin, pour l'élection du président de la République, les candidats sont tenus de faire une déclaration revêtue de leur signature légalisée.

A la différence des élections municipales et législatives, l'élection présidentielle prévoit que les candidats peuvent être investis soit par un parti politique, soit se présenter à titre indépendant, à condition de bénéficier du soutien de trois cents personnalités au moins originaires de toutes les provinces, à raison de 30 par province et possédant la qualité soit de membre de l'Assemblée nationale, ou d'une chambre consulaire, soit du Conseiller municipal, soit des chefs traditionnels de premier degré.

Ces personnalités doivent apposer leurs signatures légalisées par les autorités administratives26(*) territorialement compétentes sur les lettres de présentation ; une seule signature par personnalité et pour un seul candidat est requise.

Il en est de même de la liste de trois cents signatures des personnalités requises, d'un extrait d'acte de naissance du candidat datant de moins de trois mois, d'une lettre de présentation et d'investiture du parti cautionnant la candidature du postulant, le cas échéant, d'une déclaration sur l'honneur par laquelle le candidat s'engage à respecter la Constitution, d'un bulletin numéro trois de cassier judiciaire datant de moins de trois mois, d'un certificat d'imposition, d'un certificat de nationalité, et d'un original du certificat de versement de cautionnement fixé à 1.500.000f CFA.

L'intention du législateur d'ouvrir la compétition aux candidats indépendants, comme aux Etats Unis, marque un grand progrès dans la consolidation de la démocratie mais « la porte de cette ouverture » paraît trop étroite pour bon nombre de candidats à cause des conditions liées aux trois cents signatures et à leur légalisation par les autorités administratives. L'observation montre que les chances pour les potentiels candidats d'obtenir ces signatures apparaissent très réduites en raison de l'aggravation du tribalisme et de l'inféodation des dépositaires des signatures requises, au pouvoir. Est-ce pour cette raison que depuis l'introduction de cette disposition dans le Code électoral, aucune candidature indépendante ne s'est jusqu'ici manifestée ? D'autre part, les autorités administratives qui doivent valider les signatures n'ont pas une marge de manoeuvre suffisante pour satisfaire à une telle exigence, à cause de leur extrême subordination hiérarchique.

Ces opinions sont très proches de la réalité et correspondent au point de vue que nous avons sur la question. Il faut simplement remarquer la réticence dont ont fait montre ces autorités à déférer à l'entretien concernant notre étude. De même, la loi n'a prévu aucun recours en cas de refus des autorités administratives de valider les signatures des trois cents personnalités.

C. La consultation des listes électorales et des bureaux de vote.

Pour être sûr de voter, tout électeur inscrit doit consulter les listes électorales dans le but de s'assurer que son nom, correctement s'y trouve.

Pendant la révision des listes, un exemplaire de celles-ci est déposé à la Commune, à la Sous-Préfecture ou au district et peut être consulté par toute personne27(*). Cela permet aux électeurs de corriger toute erreur survenue pendant l'inscription.

De même, les électeurs doivent à l'avance vérifier et reconnaître leurs bureaux de vote dont la liste doit être affichée aux chefs-lieux des circonscriptions administratives au moins cinq jours avant le scrutin28(*).

Section 2. LA CAMPAGNE ELECTORALE

La campagne électorale constitue un moyen sûr par lequel l'exercice du droit de vote peut être vérifié dans une démocratie. C'est pour cela que les règles qui la régissent énoncent deux catégories de procédés : des procédés anti-démocratiques et des procédés démocratiques.

Paragraphe 1. Les procédés anti-démocratiques.

Certains procédés sont anti-démocratiques en raison de leur caractère intrinsèquement prohibé. D'autres le sont en raison des ambiguïtés que leur emploi pourrait susciter.

A. Les procédés prohibés.

Ce sont des actes illicites et réprimés comme tels, injures, violences, atteinte à l'honneur ou à la considération d'un autre candidat par quelque moyen que ce soit dans un lieu ouvert au public.

La victime des faits diffamatoires peut par voie de requête déposée contre récépissé et sans préjudice des sanctions civiles et/ou pénales contre l`auteur et/ou ses complices, conformément à la législation en vigueur, en saisir le Conseil constitutionnel, lequel statue dans un délai maximum de quinze jours à compter de la date de saisine29(*).

Mais il faut prendre en considération deux types de nuances. Premièrement les juges tiennent compte de la passion inhérente à l'élection et font généralement preuve d'une indulgence plus grande qu'à l'ordinaire. Deuxièmement, le recours à ces procédés n'entraîne la disqualification du candidat comme le prévoit le 3e alinéa de l'article 94 de la loi se rapportant à l'élection du président de la République, que si les preuves contraires à leur usage n'a pu être apportées. Les cas d'annulation sont donc peu abondants à ce jour pour des raisons invoquées ci-dessus mais aussi et surtout parce que les Camerounais n'ont pas encore suffisamment développé en ce domaine la culture du prétoire. C'est ce qui ressort de l'enquête au terme de laquelle plusieurs personnes ont affirmé qu'en cas de non obtention de la carte de vote elles se résigneraient (Cf. graphique, p. 32).

Graphique n°1 illustrant l'attitude des enquêtés en cas de non obtention de la carte d'électeur

(Source : graphique établi par l'auteur)

A côté des procédés prohibés, il convient aussi de considérer comme élément entravant à l'exercice du droit de vote, les procédés condamnables.

B. Les procédés condamnables.

Dans la plupart des cas une compétition électorale oppose les représentants du pouvoir en place à ceux de l'opposition. Les premiers sont évidemment tentés d'abuser de leur situation. On peut remarquer qu'au Cameroun le Code électoral n'a pas inscrit dans ses dispositions les interdictions qui doivent peser sur les agents publics, comme c'est le cas dans certains pays. En France par exemple, la législation30(*) interdit tout procédé qui paraît ressusciter une « candidature officielle »31(*). Cela signifie qu'il est interdit à tout agent de l'autorité publique ou municipale de distribuer des bulletins de vote, professions de foi et circulaires des candidats.

Dans la pratique, c'est l'Administration territoriale qui s'occupe de cette tâche. Généralement, les agents publics ne doivent pas intervenir dans les campagnes électorales. Les pressions exercées par les projets sur les candidats sont évidemment condamnables mais elles sont généralement difficiles à établir, le secret étant bien sûr la loi du genre.

L'intervention des hommes politiques est en revanche normale. Mais quelle règle appliquer aux individus qui cumulent les deux fonctions, membre du gouvernement ou maire par exemple. J.-M. Denquin répond à cette question en disant que : « en théorie ceux-ci prennent position à condition de ne pas intervenir en tant que détenteur de fonctions officielles » 32(*).

Paragraphe 2. Les procédés démocratiques.

Les textes qui régissent les campagnes électorales paraissent imposer des règles à la fois précises et rigoureuses. Ils couvrent dans le contexte camerounais, deux domaines essentiels : Les moyens de propagande classique et les moyens audiovisuels.

A. Les moyens classiques.

Dans la conception classique de la campagne électorale, fidèlement reflétée par le Code électoral camerounais, celle-ci est une période relativement brève. La campagne électorale est en effet, ouverte à partir du quinzième jour qui précède le scrutin. Elle prend fin la veille du scrutin à minuit.

A cet égard, les forces politiques rivalisent pour convaincre les électeurs en utilisant des procédés définis et réglementés par les textes. Ces procédés sont d'abord des réunions publiques. Pendant toute la durée de la campagne électorale elles peuvent être organisées, sans autorisation préalable, sous réserve des dispositions relatives au maintien de l'ordre public. La législation électorale met dès lors à la charge de tout candidat ou électeur ayant l'intention d'organiser les dites réunions, l'obligation d'informer les autorités administratives de son programme de conférence pour leur permettre d'assurer le maintien de l'ordre.

Le second procédé est constitué par l'affichage électoral. A ce titre, des emplacements sont réservés par l'Administration pour l'apposition des affiches et du matériel de campagne de chaque candidat ou liste de candidats, d'une part, à coté de chacun des bureaux de vote, d'autre part, à proximité des bureaux des arrondissements, districts et communes. Sur chacun de ces emplacements, une surface égale est attribuée à chaque candidat.

L'enquête menée à Douala, Yaoundé et Edéa a montré que ces emplacements n'ont pas existés au cours des précédentes élections malgré les stipulations du Code électoral. Les justifications avancées sont internes à l'Administration dont les moyens restent limités. Les candidats et les partis politiques ont alors pris pour habitude d'apposer les affiches où bon leur semble, ceci au mépris des interdictions imposées par la loi33(*).

B. Les moyens audiovisuels.

Les problèmes posés par la propagande audiovisuelle sont très différents. Sous la première et le début de la deuxième République, le gouvernement utilisait des moyens de communication, en particulier la radio, à son profit34(*). La notion de campagne officielle radio diffusée et télévisée s'est ensuite imposée. Elle permet aux diverses forces politiques de s'exprimer sur un même pied d'égalité dans un cadre déterminé. Il a donc fallu mettre au point des normes, ou du moins des principes de bonne conduite, réglementant les émissions politiques durant la période électorale sur les chaînes publiques35(*). La question des chaînes privées ne sera pas abordée ici puisque leur implication est apparue le 30 juin 2002 moins décisive, à cause de leur faible capacité à réunir les moyens que nécessite la couverture d'un tel événement. De même, il est intéressant de signaler que la plupart de ces chaînes privées36(*), radios et télévisions confondues, sont limités essentiellement à Yaoundé et à Douala.

Les chaînes publiques peuvent aussi être accusées de faible capacité, mais seulement sur le plan de la couverture générale du pays.

Regarder une émission télé constitue en tout cas un privilège pour certains, notamment ceux qui habitent en milieux urbains. Dans la plupart des zones rurales, ni la télévision ni la radio ne sont accessibles à tous. L'électeur se trouvant dans cette dernière hypothèse, est-il déterminé ou influencé par elles ? La réponse à cette question n'est pas simple. Elle nous permettra plus loin de voir clair lorsque seront abordées les questions concernant les inégalités entre candidats ou partis politiques dans le cadre du financement public des campagnes électorales.

Deux observations sur l'évolution de la réglementation en matière de propagande électorale peuvent être présentées à titre de conclusion sur ce point.

D'une part on constate que le principe de la liberté d'expression est volontier sacrifié à l'autel des considérations d'un autre ordre. Il serait concevable qu'aucune restriction ne soit apportée à la liberté des candidats, des personnes qui les soutiennent et des médias. Au terme d'une confrontation générale, où tous les arguments pourraient être développés par tous les moyens, l'électeur demeure juge. Le droit camerounais, fidèle à ses traditions, effectue un choix inverse, qui est celui de la réglementation. Le principe de l'égalité entre les candidats est privilégié selon l'assise populaire du parti37(*).

Le principe d'égalité trouve néanmoins ses limites, d'une part dans la nature des choses - un sortant se trouve, pour le meilleur ou pour le pire, dans une situation objectivement différente de celle des autres candidats - d'autre part dans la volonté des formations politiques dominantes de limiter autant que possible la montée en puissance de nouvelles forces politiques.

De plus, on observe que les développements des techniques en matière de communication ont déclenché une véritable course entre le droit et le fait. Dans ce genre de situation, l'idée dominante est en général que le droit ne peut que sortir vaincu de la confrontation.

La mise en oeuvre de ces moyens a été, il est vrai, facilitée par la réglementation du financement public.

CHAPITRE 2

LA DYNAMIQUE DE PROGRES DU PROCESSUS ELECTORAL A TRAVERS LES PHASES ELECTORALE ET POST-ELECTORALE

Pour cerner l'évolution du processus électoral et les différentes atteintes auxquelles il fait face, il est important d'examiner l'exercice du droit électoral à travers les phases électorale proprement dite et post-électorale.

Section 1. LA PHASE ELECTORALE

La phase du scrutin comporte deux grands aspects. Le premier concerne l'opération matérielle de vote ; le second, la publication des résultats.

Paragraphe 1. Les opérations matérielles de vote

Pour que le droit subjectif des citoyens soit respecté, il est indispensable que le scrutin se déroule de façon régulière. Ceci implique l'exigence de sécurité et l'absence de fraude.

A - L'exigence de sécurité

On ne peut concevoir une élection sans un minimum de sécurité. Car, le risque encouru est soit le faible taux de participation, soit l'invalidation des résultats. D'où la nécessité d'élections se déroulant dans la tranquillité ainsi que l'identification des personnes qui y prennent part, en particulier des électeurs.

En effet, l'expression du suffrage doit se faire dans le calme, tout désordre risquant de dissuader les électeurs ou de faire pression sur eux. C'est pourquoi le Code électoral interdit « l'entrée dans l'assemblée électorale avec les armes »38(*). La même interdiction concerne aussi tous ceux qui, par attroupement, clameurs ou démonstration menaçantes, troublent les opérations électorales ou portent atteinte à l'exercice du droit ou à la liberté du vote.

L'exigence de tranquillité est garantie par le Code pénal camerounais39(*) qui punit les auteurs des manquements ci-dessus, d'une peine d'amende de 25.000f CFA et d'un emprisonnement de dix jours à deux mois ou de l'une de ces deux peines seulement. Cette peine est doublée, quatre mois, d'emprisonnement et/ou 500.000f CFA d'amende si l'arme détenue par l'auteur de l'infraction est cachée.

Le Code électoral reste également ferme à l'égard des personnes40(*) qui détournent les suffrages ou faussent les résultat du scrutin en recourant à la corruption active ou passive ou par toutes formes de violences.  

S'agissant de l'exigence d'identification, la nécessité pour l'électeur de faire constater son identité, est posée par l'article 81 de la loi relative à l'élection des députés. Elle est réaffirmée par l'article 100 de la loi ayant trait à l'élection du président de la République. Il est en effet indispensable de constater que la personne présente est bien celle que mentionne la liste car l'absence d'une telle vérification serait de nature à multiplier les risques de fraudes et à porter atteinte au secret du vote.

Après avoir voté, chaque électeur signe lui-même la feuille d'émargement, c'est-à-dire une copie de la liste électorale.

L'article 81 de la loi relative à l'élection du président de la République stipule que : « A son entrée dans le bureau de vote l'électeur, après avoir été identifié par la Commission de vote suivant les règles et usages établis, présente sa carte électorale » ; l'article 100 qui règle les conditions d'élection aux fonctions de député à l'Assemblée nationale, est plus explicite : «A son entrée dans le bureau de vote, l'électeur doit présenter sa carte électorale. Il doit, s'il en est requis par la Commission locale de vote, prouver de son identité suivant les règles et usages établis ». Dans la pratique, l'identification n'est pas automatique. L'émargement permet de vérifier, lors du dépouillement si le nombre de signatures et le nombre des bulletins trouvés dans l'urne est identique.

En outre, il est prévu qu'un assesseur estampille au moyen d'un timbre portant la date de scrutin la carte de l'électeur. Cela vise à éviter qu'un électeur vote deux fois.

B. La mise entre parenthèse de la fraude

Pour lutter contre la fraude électorale, certaines obligations sont mises à la charge des acteurs aux scrutins, parmi lesquelles l'exigence d'impartialité et l'exigence de secret.

Pour assumer l'impartialité des opérations matérielles de vote il est prévu, d'une part, la constitution d'un bureau de vote où les divers candidats sont représentés, d'autre part, la présence des délégués des candidats et de celle des membres de l'Onel, qui ne font pas partie du bureau mais sont habilités à surveiller le déroulement du scrutin.

Quant au secret du vote qui est l'une des bases de la démocratie, il est constitutionnellement posé à l'article 2, al. 3 et réaffirmé par le Code électoral. En pratique le respect du secret est garanti par un certain nombre de dispositions techniques : usage de l'enveloppe, de l'isoloir, de l'urne, etc.

L'urne électorale est une véritable garantie de secret en ce qu'elle évite que l'enveloppe passe par les mains du président de la Commission ou de tout autre membre. D'autre part, l'urne doit être fermée avant le commencement du scrutin, par deux serrures dont les clés sont confiées au président de la Commission. Ces dispositions constituent d'importants moyens de lutte contre la fraude.

Le principe du secret implique enfin que les bulletins placés dans l'urne ne puissent être identifiés au cours du dépouillement. Dans le cas contraire, en effet, des candidats pourraient acheter les votes et vérifier que les promesses obtenues des électeurs qui accepteraient de se laisser corrompre ont été tenues.

En matière de secret de vote, le législateur camerounais n'a pas réglementé certaines situations où l'électeur serait incapable de voter pour diverses raisons. En effet, certains électeurs peuvent être affectés d'un handicap physique tel qu'ils se trouvent dans l'impossibilité de poser personnellement l'acte de vote.

En droit comparé, la solution au problème soulevé est réglée en France de deux manières. Premièrement, tout électeur atteint d'infirmité certaine et le mettant dans l'impossibilité d'introduire son bulletin dans l'enveloppe et de glisser celle-ci dans l'urne est autorisé à se faire assister par un électeur de son choix41(*). Deuxièmement on admet le vote par procuration pour les catégories de personnes42(*) dont l'indisponibilité est dûment constatée.

Les avantages tirés de ces exceptions permettent de lutter contre l'abstentionnisme et la baisse du taux de participation.

Paragraphe 2. Les opérations de dépouillement

A partir de dix huit heures, les opérations de vote cessent, sauf pour les personnes qui se trouvaient déjà dans le bureau de vote à la fin du scrutin à l'attente de leur tour.

La loi électorale prévoit que le décompte des voix peut se dérouler soit au bureau de vote, soit à la sous-préfecture. Cette dernière hypothèse est admise lorsqu'il y a un nombre insuffisant des membres de la Commission locale de vote sachant lire et écrire le français ou l'anglais.

Dans ce cas, le président de la Commission de vote ferme l'urne sous le contrôle des autres membres et en présence des électeurs présents au moment de la clôture du scrutin. Le décompte se fera alors en présence du sous-préfet ou de son représentant et des membres de la Commission locale de vote.

Immédiatement après le décompte, les résultats obtenus dans le bureau de vote sont déclarés séance tenante43(*). La préparation et la transmission du procès-verbal du bureau de vote se font selon les étapes suivantes, selon qu'on se situe à l'échelon local ou selon qu'on se trouve à l'échelon national.

A. La préparation de la transmission du procès-verbal à l'échelon local

Cette première étape permet d'opérer une distinction entre les opérations au niveau de l'arrondissement et de district et celles au niveau du département.

Dans le premier cas, les résultats du scrutin sont proprement consignés dans un procès verbal44(*) établi en autant d'exemplaires qu'il y a des partis politiques. Il est signé par tous les membres de la Commission locale de vote puis remis au sous-préfet qui en vérifie la régularité.

En cas de simple vice de forme, il peut en demander la régularisation aux membres de la Commission locale de vote. Il en dresse un procès-verbal, qui est joint à celui de la Commission, transmet un exemplaire des procès-verbaux au préfet et conserve un autre dans les archives de l'arrondissement.

Dans le second cas, c'est-à-dire la préparation et la transmission du procès verbal du bureau de vote à l'échelon du département, le préfet à son tour le transmet par la voie la plus rapide à la Commission départementale de supervision. Celle-ci s'assure de la bonne tenue des opérations électorales, consigne le procès-verbal de ses travaux dans un rapport signé de tous les membres, et fait parvenir les procès-verbaux avec les rapports et les documents des Commissions locales à la Commission nationale de recensement général des votes (cas de l'élection présidentiel). Un exemplaire de son rapport est remis au ministre de l'Administration territoriale et de la décentralisation ainsi qu'à chaque représentant des différents candidats en listes.

B. La préparation de la transmission du procès-verbal à l'échelon national

La Commission nationale du recensement général des votes procède au décompte final des voix en public dans l'enceinte du Conseil constitutionnel.

Pour ce faire la Commission :

- procède à l'examen des rapports des Commissions départementales de supervision ;

- consigne toutes les observations sur le déroulement du scrutin, mais ne peut les annuler ;

- prend en compte les bulletins irrégulièrement annulés ;

- redresse toutes les erreurs de décompte de voix ;

- dresse un rapport de toutes les opérations et transmet avec tous les autres rapports, procès verbaux et documents des Commissions départementales de supervision au Conseil constitutionnel. Un exemplaire du rapport est envoyé au ministre chargé de l'Administration territoriale et de la décentralisation.

Les résultats définitifs du scrutin sont proclamés par la Commission communale de supervision45(*) en ce qui concerne les élections municipales et par le Conseil constitutionnel pour ce qui est des élections législatives et présidentielles46(*)

Il arrive cependant que ces résultats soient remis en question et soulèvent le problème du contentieux électoral

Section 2. LA PHASE POST-ELECTORALE

L'engagement et parfois la passion qui caractérisent le comportement des candidats à une élection, rendent inévitable la survenance des contestations.

Les élections au Cameroun, depuis 1992, ne dérogent pas à cette réalité ; elles offrent un champ d'analyse intéressant pour appréhender le contentieux électoral. Celui-ci est défini par le professeur Maurice Kamto comme « l'ensemble des contestations ou de litiges liés à l'organisation, au déroulement, et aux résultats des élections, ainsi que de l'ensemble des règles régissant la solution de ces litiges par le juge »47(*).

A partir de cette définition deux points doivent être considérés : le contentieux relatif aux opérations préparatoires aux élections et celui concernant l'élection elle-même.

Paragraphe 1. Le contentieux des opérations préparatoires à l'élection

Le contentieux électoral au Cameroun couvre un domaine très vaste qu'on peut regrouper dans trois principales rubriques : Le contentieux de l'électorat, le contentieux des candidatures et le contentieux des couleurs , signes et symboles des candidats et / ou des partis

A. Le contentieux de l'électorat

Pour analyser le contentieux de l'électorat48(*), il est intéressant de répondre à deux questions : la première concerne la nature de ce contentieux, la seconde est relative à la compétence du juge.

Au Cameroun, on a constaté que ce contentieux porte respectivement sur le droit de vote, les listes et les cartes électorales.

L'un des problèmes à résoudre dans le contentieux du droit de vote est lié à la capacité électorale. L'âge légal pour voter au Cameroun est de vingt ans révolus49(*), tant que l'électeur n'est pas frappé d'une incapacité prévue par la loi.

Il peut arriver qu'un citoyen remplisse toutes les conditions requises pour exercer son droit de vote, mais que ce droit lui soit refusé. Le professeur Maurice Kamto dit à ce sujet que : « dans la mesure où la capacité électorale s'analyse en la jouissance d'un droit en même temps qu'elle pose le problème d'état, des personnes (...) aspirant à la jouissance de ce droit, le contentieux y relatif tombe dans le régime de droit commun de la capacité et de l'état des personnes . Il s'agit, conclut-il, d'un contentieux civil régit conséquemment par le Code civil et dont la compétence appartient au juge judiciaire, plus précisément au juge d'instance »50(*).

En ce qui concerne le contentieux des listes et des cartes électorales, les instances chargées de régler les problèmes soulevés diffèrent selon le type de scrutin.

Tandis que le contentieux des élections municipales relève de la Commission communale de supervision dont les attributions ont été définies à l'article 12 al. 2 de la loi fixant les conditions d'élection des conseillers municipaux51(*), celui des élections législative et présidentielle relève de la compétence de la Commission départementale de supervision chargée de veiller à la régularité, à l'impartialité et à l'objectivité des élections dans le département conformément aux articles 39 et 24 des lois relatives respectivement aux élections des députés à l'Assemblée nationale52(*) et à l'élection du président de la République53(*).

Lorsque les listes et cartes électorales sont établies par ces différentes Commissions en violation de la loi, leur annulation doit être prononcée par l'autorité compétente. On peut cependant se demander, de quelle autorité ou de quelle instance s'agit-il, au regard du silence de la loi ?

Mais à regarder le signataire de l'acte désignant les membres de ces Commissions, l'embarras cesse et la confusion disparaît. En effet, c'est le préfet qui constate la composition de la Commission par arrêté, lequel arrêté est un acte administratif. Ceci revient à dire que tout contentieux né dans ce cadre n'est autre qu'un contentieux administratif dont la compétence relève du juge administratif.

Le juge administratif sera aussi compétent pour statuer sur les irrégularités constatées en matière d'établissement des listes, des cartes électorales et de leur distribution lorsque la Commission compétente n'a pas donné satisfaction au recourant. Ceci a été affirmé dans la jurisprudence Kago Lélé54(*) dont le refus d'inscription sur les listes électorales à Bafoussam par la Commission mixte puis entériné par une décision de la Commission communale de supervision fut infirmée par la Cour d'Appel de l'Ouest.

Les choses sont cependant différentes en matière de distribution de cartes et d'inscription sur les listes électorales dont la compétence contentieuse appartient au juge judiciaire. On peut penser à une confusion de compétence entre les deux autorités statuant sur la même question. Mais, le juge administratif n'intervient que dans le cadre du recours pour excès de pouvoir pour connaître des questions liées à la liste électorale. Il examine non les décisions individuelles, mais la constitution de la Commission et la régularité de la procédure suivie par elle.

B. Le contentieux des candidatures

Les règles qui régissent le contentieux des candidatures révèlent quelques nuances selon qu'il s'agit des élections législative et municipale ou de l'élection présidentielle.

S'agissant des élections municipale et législative, la loi dispose dans les mêmes termes que « la décision d'acceptation ou de rejet d'une candidature ou d'une liste de candidats peut être attaquée par le candidat, le mandataire de la liste intéressé ou de toute autre liste, et par tout électeur inscrit sur les listes électorales »55(*).

Dans l'hypothèse des élections législatives, le délai légal pour former le recours est de cinq jours suivant la notification devant la Commission départementale de supervision qui doit statuer définitivement dans les trois jours au plus tard. La décision doit ensuite être portée à la connaissance du préfet à la diligence du président de la Commission conformément à la loi électorale56(*).

Pour les municipales, le recours est porté dans un délai de cinq jours suivant la notification devant la Commission communale de supervision qui a aussi trois jours pour statuer selon l'article 27 de la loi57(*). A la différence des législatives, il n'est pas fait obligation à la Commission communale de supervision de porter la décision à la connaissance du préfet.

Qu'il s'agisse de la Commission communale de supervision ou de la Commission départementale de supervision, toutes deux disposent de pouvoirs importants qui laissent perplexes, à défaut d'être problématique à l'exercice par les citoyens de leur droit de vote ainsi que nous l'analyserons plus loin.

En ce qui concerne l'élection présidentielle, la loi n° 92/010 modifiée dispose que le ministre de l'Administration territoriale « est seul juge de la recevabilité des déclarations des candidatures ». Le Minat n'est cependant pas le « juge » ultime. La décision de rejet ou d'acceptation peut, en effet, faire l'objet d'un recours dans les conditions fixées aux articles 61 et 62 de la loi58(*). Le contentieux relève alors de la compétence du juge administratif.

La Cour statue en premier et dernier ressort, conformément à l'article 97 de la loi. C'est pour quoi, par exemple, elle déclare non fondé le recours d'un candidat qui ne fournit pas la preuve des faits allégués. Elle a statué en ce sens dans l'affaire Undp c/Etat du Cameroun dans l'arrêt n°58/CE/01-02 du 17 juillet 2002 consécutif au recours n°57/CE/01-02 du 4 juillet 200259(*).

C. Le contentieux des couleurs, sigles et symboles

Ce contentieux est réglementé par la loi n° 92/010 modifiée relative à l'élection du président de la République. Elle attribue la compétence contentieuse en la matière au Conseil constitutionnel. L'article 63 alinéa 2 dispose en effet : « en cas de recours concernant la couleur, le sigle ou le symbole adopté par un candidat, la Cour suprême attribue par priorité à chaque candidat sa couleur, son sigle ou son symbole traditionnel par ordre d'ancienneté du parti qui l'a investi et, pour les candidats indépendants, suivant la date du dépôt de candidature, étant entendu que les partis politiques sont prioritaires ».

Le contentieux de la Cour n'oppose pas seulement deux candidats ou partis politiques. Il arrive que au moment du vote, la couleur du bulletin utilisé par un candidat pendant la campagne électorale ne soit plus la même. Les électeurs ne sachant lire, mais appartenant au parti en question seront par conséquent déroutés.

Le Conseil constitutionnel a contribué à élargir le champ du contentieux en cette matière de couleur en comblant ainsi le vide juridique laissée par la loi n° 92/010 précitée dans l'affaire Action Pour la Méritocratie et l'Egalité des Chances (Amec)c/Etat du Cameroun (Minat)60(*) dans l'Arrêt n°37/CE/01-02 du 17 juillet 2002 consécutif au recours n°07/CE/01-02 du 3 juillet 2002 dans lequel les bulletins de vote du parti en cause le jour du scrutin avaient une couleur différente de celle de la campagne électorale.

Paragraphe 2. Le contentieux de l'élection

D'une manière générale, la phase de l'élection comprend la campagne électorale et les opérations électorales. Chacune de ces étapes peut donner lieu à contentieux.

A. Le contentieux de la campagne électorale.

On peut considérer à cet égard le contentieux de l'accès aux médias de service public par les candidats et le contentieux des faits de la campagne électorale.

Sur le premier point, l'égalité de traitement des candidats par les médias lors de la campagne électorale est l'une des conditions essentielles propres à garantir la liberté de choix des élections ainsi que l'égalité de chance des candidats.

A chaque scrutin, le ministre de la Communication, prend un arrêté qui détermine l'organe compétent pour connaître de toutes les contestations découlant de cette matière. On constate d'ailleurs que cet organe change constamment.

En 1992, l'arrêté n°005 du 24 septembre 1992 fixant les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions relatives à la campagne en vue de l'élection présidentielles du 11 octobre 1992 , confiait cette compétence au Conseil national de la communication. D'après l'article 14 de cet arrêté : « les candidats ou les partis politiques peuvent saisir sans délais le Conseil national de la communication (Cnc) de tout différend sur l'interprétation ou l'application dudit arrêté ».

Aux dernières élections couplées (municipales et législatives) du 30 juin 2002, cette question est réglée par l'article 25 de l'Arrêté n° 012 / Mincom/ Cab du 7 juin 2002 fixant les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions relatives à la campagne électorale en vue de l'élection des députés à l'Assemblée nationale et des Conseillers municipaux du 23 juin 200261(*). C'est donc la Cnsc qui est compétente en matière contentieuse d'accès aux médias officiels.

Sur le second point, à savoir le contentieux des faits de la campagne, celle-ci peut donner lieu, d'une part, à contentieux lié à l'établissement et la diffusion des documents de campagne, d'autre part, à contentieux de la diffamation, de la publicité et de la publication des sondages.

Dans la première hypothèse, les documents de campagne sont constitués des circulaires, professions de foi et des affiches. Ils peuvent être saisis par l'autorité administrative s'ils ont été établis et distribués en contravention aux dispositions de la loi, et sans préjudice des poursuites pénales engagées contre l'auteur de cette distribution.

Dans la deuxième hypothèse relative à la diffamation, la victime des faits diffamatoires peut, par voie de requête déposer contre récépissé et sans préjudice des sanctions civiles et /ou pénales contre l'auteur et /ou ses complices conformément à la législation en vigueur, saisir le Conseil constitutionnel, lequel statue dans un délai maximum de quinze jours à compter de la date de saisine.

Enfin, dans la troisième hypothèse, ce contentieux est prévu par la loi n°91/020. Elle interdit en son article 93 al. 1er pendant les deux mois qui précèdent le scrutin, et pendant le déroulement de celui-ci, la publication, la diffusion et le commentaire par quelque moyen que ce soit, de tout sondage d'opinion ayant un rapport direct ou indirect avec ledit scrutin.

L'alinéa 2è du même article interdit toutes publicités commerciales véhiculant un message politique par voie de médias et d'affichage, de nature à influencer le vote d'un ou de plusieurs électeurs. C'est le juge judiciaire qui est compétent pour connaître de ce type de contentieux.

B. Le contentieux des opérations électorales et de la proclamation des résultats

Ce contentieux concerne les opérations qui concourent directement à l'expression du suffrage des électeurs. Son domaine couvre : le fonctionnement des bureaux de vote, le déroulement et le dépouillement du scrutin. En dehors de quelques uns de ses aspects, en particulier les dispositions pénales, communes aux trois élections, il révèle bien des spécificités selon qu'il s'agit des élections municipales, législatives et de l'élection présidentielle. Alors que le contentieux des élections municipales relève du juge administratif, le contentieux des élections législative et présidentielle ressorti au juge constitutionnel.

S'agissant des élections municipales, le contentieux est régi par le chapitre IX de la loi n°92/002 du 14 août 1992. L'article 33 de cette loi reconnaît à tout électeur et tout candidat, le droit d'arguer de nullité les opérations électorales de la Commune devant le juge administratif.

La procédure prévue à cet égard est dérogatoire à l'article 12 de l'ordonnance n°72/6 du 26 août 1972 fixant l'organisation de la Cour suprême. Ceci étant, l'art. 34 de cette loi, dispense le requérant du recours gracieux préalable : les contestations font, dit cette loi, l'objet d'une « simple requête devant la juridiction administrative ». Toute saisine du juge constitutionnel est par conséquent irrecevable. Cela a été affirmé dans l'affaire Sdf c/Etat du Cameroun par l'Arrêt n°15/CE/01-02 du 17 juillet 2002 consécutif au recours n°39/CE/01-02 du 4 juillet 2002 dans laquelle le Conseil constitutionnel s'est déclaré incompétent pour connaître du contentieux relatif aux élections municipales62(*). Par contre, sa compétence est affirmée en matière d'élections législative et présidentielle. Dans la première hypothèse, l'article 120 stipule que : « le Conseil constitutionnel statue sur l'inéligibilité des députés à l'Assemblée nationale, sauf dans les cas prévus par la loi ».

A cet égard le Conseil constitutionnel est seul compétent pour prononcer l'annulation, de tout ou partie des opérations électorales ; il est alors organisé de nouvelles élections dans un délai de soixante jours à compter de la date de l'annulation, pour la ou les circonscriptions(s) électorale (s) concernées .

C'est en ce sens que le Conseil constitutionnel a prononcé l'annulation partielle des élections du 30 juin 2002 dans 9 circonscriptions63(*).

De plus, le Conseil constitutionnel est seul juge du contentieux de l'élection présidentielle. A ce titre, l'article 93 de la loi relative à l'élection du président de la République stipule que : « le Conseil constitutionnel statue sur toute requête en annulation totale ou partielle des opérations électorales introduite par tout candidat, tout parti politique ayant pris part à l'élection, ou par toute personne ayant qualité d'agent du gouvernement pour cette élection ». Ceci revient à dire que le défaut de qualité du recourant entraîne l'irrecevabilité de son action devant cette haute juridiction. Cela a été affirmé dans l'affaire Ufdc c/Etat du Cameroun (Minat) par l'Arrêt n°48/CE du 17 juillet 2002 consécutif au recours n°08/CE du 2 juillet 2002 dans laquelle l'Ufdc sans avoir qualité a demandé l'annulation des élections dans la province de l'Ouest.

Quant à la procédure, elle est précisée par l'art. 94 de cette même loi qui met à la charge du recourant l'obligation de faire parvenir au Conseil constitutionnel dans un délai maximum de soixante-douze heures, sa requête à compter de la date de clôture du scrutin, sous peine d'irrecevabilité. C'est en statuant sur le non respect des conditions de forme que le Conseil constitutionnel a rejeté l'affaire Undp c/ Etat du Cameroun dans l'Arrêt n°18/CE/01-02 du 17 juillet 2002 concernant le recours n°126/CE/01-02 du 10 juillet 2002 par lequel le Conseil constitutionnel a déclaré ledit recours irrecevable pour non respect de délais64(*).

La procédure devant le Conseil constitutionnel exige aussi que les requêtes précisent les faits et les moyens allégués sous peine d'irrecevabilité.

En tout cas, lorsque la haute juridiction reçoit la requête, elle affiche celle-ci dans les vingt-quatre heures à compter de son dépôt et la communique aux parties intéressées qui disposent d'un délai de quarante-huit heures pour déposer, contre récépissé, leur mémoire en réponse.

Les efforts de modernisation du processus électoral camerounais depuis une décennie sont certes remarquables. Cependant, celui-ci est loin d'atteindre la perfection car confronté à des limites d'origines diverses qu'il conviendra d'analyser.

DEUXIEME PARTIE

LES LIMITES DU PROCESSUS ELECTORAL CAMEROUNAIS

Lorsqu'on parle du processus électoral, on voit immédiatement apparaître deux droits fondamentaux essentiels : le droit de voter et celui de se porter candidat. Ces droits revêtant une importance particulière et font partie des droits dits de la première génération : « droits civils et politiques qui sont apparus à partir du siècle des lumières, comme des droits naturels appartenant à l'homme en tant qu'homme, inaliénables et imprescriptibles ».65(*)

Au regard de l'évolution constitutionnelle, normative et institutionnelle du pays, leur reconnaissance ne fait plus de doute, elle est même consacrée. Mais des réserves ne manquent pas en ce qui concerne leur effectivité, c'est-à-dire leur mise en pratique, tant les obstacles dans ce domaine sont encore nombreux.

Il convient dès lors de distinguer dans cette étude deux grandes catégories d'obstacles selon qu'il sont inhérents à l'Administration ou qui sont imputables aux autres acteurs du processus électoral.

CHAPITRE 3

LES OBSTACLES EMANANT DE L'ADMINISTRATION

Les entraves à l'exercice du droit de vote imputables à l'Administration seront étudiées sur une double approche. Il sera question, premièrement, de déterminer leur nature puis, deuxièmement, d'opérer une profonde analyse sur les problèmes liés aux inscriptions sur les listes et ceux liés la distribution des cartes électorales.

Section 1. LES OBSTACLES A L'EXERCICE DU DROIT DE VOTE INHERENTE A L'ADMINISTRATION

On peut regrouper les obstacles dont il est question, d'une part, dans l'ordre institutionnel et, d'autre part, dans l'ordre conjoncturel.

Paragraphe 1. Les limites institutionnelles

La législation camerounaise a prévu plusieurs organes chargés, soit d'administrer les élections, soit d'en assurer la direction. Cette double tâche est répartie entre l'Administration territoriale et les organismes de contrôle de régularité des élections, notamment les Commissions mixtes électorales et l'Onel.

A - Le rôle prépondérant de l'Administration territoriale.

L'Administration territoriale regroupe l'ensemble des services centraux et extérieurs. Chacun d'eux exécute des missions bien déterminées dans le processus d'une élection qu'il convient d'examiner.

Au niveau des services centraux on peut, sans risque de se tromper, affirmer que l'impulsion électorale est ordonnée par le ministre chargé de l'Administration territoriale. A cet égard, la responsabilité de son personnel à ce niveau de la hiérarchie apparaît très grande car toute mauvaise organisation influe automatiquement sur la bonne tenue du scrutin et dans une large mesure sur l'exercice du droit de vote par les citoyens.

Au Cameroun, l'expérience montre que la responsabilité de l'Administration territoriale dans la limitation de ce droit est indéniable. Il suffit pour s'en convaincre, de noter les retards66(*) dans l'acheminement du matériel électoral auprès des autorités administratives, en particulier les imprimés des listes électorales et des cartes de vote. C'est, en effet, lorsque les élections sont annoncées que des mesures de mise à disposition de ce matériel aux autorités concernées sont souvent prises. Il s'en suit au moment de l'inscription sur les listes de nombreuses erreurs, voire des omissions dues à la pression ainsi qu'au volume élevé du travail. L'Administration territoriale contribue-t-elle ainsi de façon évidente à limiter l'exercice du droit de vote à de nombreux citoyens qui ne peuvent ni s'inscrire sur les listes ni obtenir sereinement leur carte de vote ?

Même comme ce ministère peut justifier son inertie en faisant valoir l'argument selon lequel il n'est pas l'ordonnateur principal du budget électoral, il reste que des élections peuvent intervenir, à tout moment en cas de crise grave67(*) . Il est par conséquent indiqué que chaque année un budget en cette matière soit voté pour lui permettre non seulement d'être prêt à agir, mais aussi d'avoir des moyens nécessaires, de façon permanente, pour faire fonctionner les Commissions mixtes dans leurs tâches d'inscription des électeurs et de distributions des cartes électorales. C'est le moyen le plus sûr qui peut permettre à cet organe d'administrer sereinement le processus électoral et d'éviter que les services extérieurs ne soient directement affectés par l'inorganisation due aux retards dans la mise à disposition du matériel électoral.

Dans les services extérieurs, la préparation du scrutin est en grande partie l'oeuvre des sous-préfets et des chefs de district. Cette lourde responsabilité requiert en conséquence de leur part, une plus grande neutralité vis-à-vis des autres acteurs du jeu politique, notamment des partis politiques. Le problème relatif à leur neutralité et à leur impartialité divise cependant l'opinion publique. Sur ces deux points précisément, des doutes subsistent et placent ces autorités au banc de la communauté nationale. En ce sens, le vice président de l'Undp, Célestin Bedzigui, au lendemain des élections du 30 juin 2002, affirme que : « si on laisse aux sous-préfets la possibilité de continuer à perpétrer les actes de banditisme administratif comme ils le font à l'heure actuelle, on va arriver, tôt ou tard, à la guerre civile »68(*).

A partir de cette menace qui, à l'analyse, enlève aux autorités administratives tout crédit, on est en droit de se demander si les récriminations portées à leur endroit sont des actes volontaires ou si elles sont dictées par d'autres considérations ?

Jacques philibert Nguemegné apporte une réponse à cette question : « le processus électoral est organisé et dirigé en grande partie par les autorités administratives déconcentrées. Déjà, de par le principe hiérarchique, celles-ci doivent obéissance et soumission à leurs supérieurs et à l'autorité hiérarchique suprême qu'est le président de la République. Ce dernier les nomme et les révoque. Il jouit par conséquent d'une très grande influence sur elles »69(*). Et d'ajouter : « depuis 1990, on a vu certaines autorités administratives gérer le processus électoral avec un parti pris flagrant »70(*).

C'est le professeur Eboussi Boulaga qui donne une réponse plus nette sur la question relative au parti pris des autorités administratives : « le Chef de l'Etat, chef du parti majoritaire semble avoir prise sur la machinerie électorale grâce à l'Administration territoriale, avec ses gouverneurs, ses préfets, et ses sous-préfets... » 71(*)  Et d'ajouter : « on comprend pourquoi le pouvoir majoritaire peut procéder, à la veille des élections ou quelque temps avant, à des nominations dans le commandement, des autorités administratives. Celles-ci n'étant que des nominations à des fins électoralistes des « hommes de mains » dans les circonscriptions où la majorité gouvernementale se sent menacer. Ces « chargés de mission » électorale  ont pour but de « faire le résultat » même en faussant les calculs de voix »72(*).

Quoi qu'il en soit, les autorités administratives seront utiles à la société toute entière et garantiront le droit électoral des citoyens en étant plus libre vis-à-vis de leurs supérieurs hiérarchiques. Dans ces conditions, elles doivent concilier les impératifs d'intérêt général et le respect des autorités détentrices du pouvoir de nomination ; en alliant sagesse et délicatesse pour agir avec fermeté, loyauté, neutralité et impartialité, seules conditions pour ne pas tordre le coup à l'exercice du droit de vote et entraver le fonctionnement régulier des Commissions mixtes au sein desquelles elles siègent.

B - Le fonctionnement des organismes de contrôle des élections : les Commissions mixtes et l'Onel.

Le fonctionnement des Commissions ne s'est pas toujours fait de manière régulière. Celles-ci souffrent, tantôt de la main mise des autorités administratives, tantôt de l'insuffisance des moyens logistiques.

La loi électorale prévoit, en effet, que les Commissions de révision des listes électorales et de contrôle de l'établissement et de distribution des cartes électorales73(*), sont présidées par un représentant de l'Administration désigné par le préfet. Dans la pratique, ce sont les sous-préfets, leurs adjoints et les chefs de district qui assument cette responsabilité. Ils l'exercent selon un calendrier élaboré unilatéralement et donc l'exécution dépend entièrement de leur volonté. C'est donc un processus extrêmement contrôlé dont l'orientation dépend en définitive des autorités concernées.

Synonyme de confiscation des attributions de la Commission, la concentration des tâches électorales par ces autorités n'écarte pas les possibilités d'erreurs caractérisées par des omissions, volontaires ou non, des inscriptions des citoyens sur les listes électorales. Comment peut-on remédier à une telle main mise ? Il revient en effet aux préfets d'être plus attentifs au comportement de leurs subordonnés en prenant chaque fois des sanctions appropriées contre les actions que ceux-ci posent dès lors qu'elles annihilent l'exercice du droit de vote. Cela est d'autant nécessaire qu'ils doivent concentrer leurs efforts à un autre problème crucial : celui de l'insuffisance des moyens logistiques. Ces moyens concernent en particulier le transport des membres de la Commission ainsi que leur motivation.

D'une part, toutes les autorités administratives ne disposent pas d'un moyen de locomotion pouvant servir aux besoins de la Commission. Et même pour celles dont la question relative au transport a été réglée, la difficulté n'est pas complètement apurée en raison de la faible capacité de ces moyens de transport à recevoir à bord tous les membres de la Commission.

D'autre part, le caractère bénévole74(*) qui caractérise les travaux des Commissions électorales est source de démotivation, s'agissant d'un travail d'intérêt général. D'où leur absence d'engagement et la restitution totale, de fait, de tous les pouvoirs aux autorités administratives.

La solution à ces deux problèmes réside dans la mise à disposition aux autorités administratives des véhicules appropriés aux nécessités que commandent leurs différentes fonctions. Par ailleurs, la disposition qui proclame le bénévolat des membres des Commissions dans leurs tâches électorales doit disparaître au profit d'une approche rétribuée du personnel en cause. Cela garantirait non seulement la motivation recherchée mais surtout le droit à l'inscription des électeurs du fait de leur présence permanente au sein du groupe.

Peut-on penser que les insuffisances des Commissions mixtes électorales en matière de garantie du droit de vote telles qu'elles viennent d'être exposées justifient en partie la création par la loi n°2000/16 du 19 décembre 2000 d'un Observatoire national des élections (Onel) au Cameroun ?

On peut être tenté, au regard de ses attributions75(*), de répondre par l'affirmative. Mais les bonnes intentions du législateur camerounais sont très vite remises en question lorsqu'on considère le statut de cet organe dont l'ambiguïté nous conduit à analyser sa nature juridique, son inscription dans le temps76(*) et la question relative à son indépendance.

La création de l'Onel est apparue comme une surprise au regard de ses attributions qui se confondent de manière saisissante à celles dévolues aux différentes Commissions électorales. En somme, la différence fondamentale entre les deux structures tient plus à leur composition. Alors que les Commissions électorales sont mixtes, formées des représentants de l'Administration, de la société civile et des partis politiques, l'Onel est essentiellement constitué des personnalités indépendantes.

C'est en ce sens que la confusion des rôles sert de repère pour reconnaître que l'Onel est une institution de trop en matière de contrôle de régularité des élections dans un cadre électoral à l'intérieur duquel les acteurs électoraux, en particulier les partis politiques, peuvent mieux que quiconque, contrôler le processus électoral et lutter contre toutes formes d'abus qui pourraient naître par le fait de l'Administration, pour préserver leurs intérêts. D'où d'ailleurs son influence assez limitée. D'un autre côté, l'Onel n'est qu'un simple observatoire. Il lui revient donc « de rassembler l'information utile à transmettre aux décideurs, à l'effet d'éclairer leurs décisions et démarches futures. (...) C'est une structure consultative et les auteurs du projet de loi n'ont pas entendu faire autre chose, susceptible par exemple d'influencer l'aboutissement du processus électoral »77(*).

A cet égard les frontières dans lesquelles le législateur l'a enfermé ne lui permettent pas, en raison de son inscription dans le temps, de garantir convenablement le droit électoral.

L'article 3 de la loi du 19 décembre 2000 stipule, en effet, que : « l'Onel est mis en place en année électorale dès le début du processus électoral (...) son mandat prend fin dès que le processus électoral est arrivé à son terme ».

Nous n'allons pas revenir ici sur la controverse autour de la question de savoir quand l'Onel commence réellement ses activités et quand est-ce qu'il les achève. Les dernières élections du 30 juin 2002 viennent clore ce débat. On sait depuis lors que le véritable travail de l'Onel débute dès la convocation du corps électoral et s'arrête une fois les résultats proclamés, soit par la Commission communale de supervision, pour les élections locales, soit par le Conseil constitutionnel, en ce qui concerne les élections nationales. Ceci est d'autant vrai que les bureaux de l'Onel, exception faite du secrétariat permanent, sont en ce moment fermés sur l'ensemble du territoire national. Le véritable problème qui se pose donc est celui de la formation de ses membres. On conçoit difficilement l'effectivité de cet organe à aborder les élections en s'attachant les services des citoyens cooptés hâtivement à quelques semaines de l'élection, sans test de moralité ni de niveau, absolument nécessaires pour satisfaire à l'exécution des tâches qu'ils doivent assumer.

L'Onel doit pouvoir être une structure permanente, dotée de moyens propres en vertu d'une loi votée par le parlement. Une telle autonomie le conduirait non seulement à être indépendant vis-à-vis du pouvoir, mais à intégrer dans son programme, la formation des cadres électoraux indépendants et du personnel de soutien, immédiatement opérationnels, une fois que les circonstances l'exigent. Cette approche implique une réforme de la loi sur l'Onel sinon son influence en matière de garantie du droit de vote au Cameroun restera encore limitée pour bien longtemps et son indépendance, une fiction. Il ne contribuera pas à faire face aux limites dites conjoncturelles qui entravent l'exercice du droit de vote.

Paragraphe 2. Les limites conjoncturelles.

L'étude des limites conjoncturelles à l'exercice du droit de vote au Cameroun sera axée sur deux paramètres : l'analyse du financement de la vie politique et celle de l'accès aux médias publics.

A. Le financement de la vie politique

Le financement des partis politiques et des campagnes électorales est réglementé par la loi n° 2000/015 du 19 décembre 2000. Selon son article 3 : « il est inscrit chaque année dans la loi des finances une subvention destinée à contribuer à certaines dépenses de fonctionnement des partis politiques légalement reconnus ». Il s'agit d'une subvention78(*) servie par l'Etat pour concourir aux dépenses79(*) diverses de ces partis selon les modalités de répartition prévues par la loi précitée80(*). A ce titre, la subvention est repartie en deux tranches d'égale montant : une première tranche destinée aux partis politiques représentés à l'Assemblée nationale ; une deuxième tranche destinée aux partis politiques en fonction de leurs résultats à la dernière élection législative. Par ailleurs, la tranche destinée au financement des partis politiques représentés à l'Assemblée nationale leur est allouée proportionnellement à leur nombre de sièges respectifs. Quant à la tranche destinée au financement des partis en fonction de leur résultat aux élections à l'Assemblée nationale, elle leur est servie à condition qu'ils aient obtenu au moins 5% des suffrages dans au moins une circonscription au cours de la dernière élection législative.

A bien lire ces dispositions, on constate quelles posent des limitations à l'exercice du droit de vote car elles ne favorisent pas l'égalité de chance des partis politiques et des candidats, comme l'illustre les différentes opinions des personnes enquêtées contenues dans le graphique suivant :

Graphique n°2 illustrant l'équité dans la répartition des fonds alloués aux partis politiques

(Source : graphique établi par l'auteur)

On peut comprendre que le législateur a posé ces balises pour empêcher l'émergence des micro-partis, sans véritable assise populaire et éviter à l'Etat d'engager des dépenses excessives. Mais, poser de telles conditions aux partis et aux candidats revient à légitimer les inégalités et la discrimination.

D'une part, tous les partis politiques n'ont pas été créés au même moment ni ne bénéficient des mêmes avantages. Il va donc sans dire que certains partis ont eu tout le temps nécessaire pour assurer leur implantation sur la majeure partie du territoire national. C'est le cas du Rdpc né des cendres de l'Unc. C'est aussi celui de l'Undp, du Sdf, de l'Udc ou encore de l'Upc à forte coloration régionale.

A l'exception du Sdf, ces partis ont à leur tête, d'anciens membres du gouvernement, ce qui implique leur moindre degré de vulnérabilité au plan matériel et financier.

D'autre part, les subventions dont il est question ne proviennent-elles pas du trésor public alimenté par l'effort collectif des citoyens, au titre des contributions directes ou indirectes. La juste distribution pourrait aussi bien se manifester par une répartition équitable des fonds concernés à l'ensemble des personnes engagées dans le domaine politique, sans quoi celle-ci est vidée de son sens.

Ce faisant l'accent devra être mis énergiquement sur le contrôle de leur utilisation pour décourager toute tentative de détournement qui hanterait certains présidents de partis. C'est pour cette raison que l'article 4 alinéa 2 du décret n° 2001/305 du 8 novembre 2001 confie le contrôle de l'utilisation des fonds destinés au financement public des partis politiques et des campagnes électorales à une Commission81(*).

Cette Commission est chargée de contrôler l'utilisation des fonds publics alloués aux partis politiques pour concourir aux dépenses couvrant leurs activités permanentes ou celles consacrées à l'organisation des campagnes électorales. Au terme de son travail, elle adopte un rapport annuel qu'il adresse ensuite au président de la République82(*).

A la première lecture, ce décret soulève deux principaux problèmes : la composition de la Commission ainsi que son indépendance.

Le premier point laisse en effet apparaître que le composition de la Commission de contrôle n'intègre pas dans ses rangs les représentants des partis politiques. De même, en parlant des représentants du parlement, le décret n'indique pas clairement les partis que ces députés représentent au sein de la Commission.

L'efficacité et la transparence de la Commission seraient en tout cas garanties si ces imprécisions sont levées afin de privilégier le principe du contradictoire dans la prise des décisions au moment d'arrêter le rapport final.

Il serait en tout cas profitable que les partis politiques et les personnalités indépendantes de la société civile siègent dans la Commission pour éviter l'arbitraire qui peut naître des décisions d'une structure au sein de laquelle l'Administration est sur-représentée.

En dépit de ses pouvoirs d'action83(*), le second élément qui hypothèque l'efficacité de cette structure est son absence d'indépendance. Ses membres sont nommés par le président de la République. Il s'en suit que ceux-ci lui doivent soumission et obéissance. N'est-ce pas d'ailleurs à cette haute autorité qu'ils adressent leur rapport annuel ? N'est-ce pas elle, également qui peut les démettre de leur fonction à tout moment puisque le décret qui constate leur existence n'indique pas la durée de leur mandat ?

Cette absence d'autonomie fonctionnelle est aggravée par la dépendance matérielle et financière. Non seulement les fonctions de ces membres sont gratuites comme le rappelle l'article 12 du décret, mais ceux-ci ne disposent ni des locaux propres, ni des autres moyens logistiques pouvant faciliter leur travail.

D'une manière générale, seule est prévue pour eux une indemnité de session et des frais de mission . On peut donc convenir, au regard de ces deux constatations, que l'efficacité de cette Commission est très limitée enfermée, qu'elle est, dans les fourches caudines du texte qui lui a donné le jour.

La première solution en vue de l'efficacité étant l'ouverture de la Commission, pas seulement aux partis politiques, objet du contrôle, mais aussi aux autres formations politiques suivant les critères de représentativité84(*) ainsi qu'à la société civile. La seconde commande que le rapport de la Commission soit publié. Le contrôle de l'utilisation des fonds qui est à sa base représente, en tout cas, les contributions des citoyens et doit faire l'objet d'un compte rendu à la Nation toute entière.

L'article 11 qui détermine le destinataire du rapport apparaît alors dangereux dès lors qu'il transforme celui-ci en une sorte « d'arme » à la disposition du président de la République dont l'exploitation dépendra du comportement du parti politique mis en cause par le détournement des fonds. Si le détournement des fonds est démontré, le destinataire du rapport peut décider de garder le silence. Dans ce cas, le parti en cause sera à sa merci et ne pourra plus jouer efficacement le rôle assigné à un parti politique d'opposition ; malgré tout, le parti contrôlé peut choisir de passer outre la menace présidentielle et mener ses activités normalement en refusant de se plier à toute forme de chantage, à ce moment il s'engage à affronter les rigueurs de la loi pénale et de la justice.

En outre, le travail de la Commission a un caractère permanent. Cela implique la nécessité d'un budget autonome dont le vote doit s'effectuer au sein du parlement, car l'activité de contrôle requiert beaucoup de temps ; en raison des enquêtes qui peuvent être menées et peut être le nombre de partis à contrôler, le délai d'un an peut s'avérer insuffisant.

L'autonomie financière peut par conséquent permettre à la Commission, en cas de nécessité, de s'attacher les services d'experts compétents pour faire aboutir rapidement ses travaux.

En dernier lieu, le problème de sanctions contre les membres de cette Commission reste imprécis. Dans l'exercice de leurs fonctions, ils peuvent poser des actes qui font griefs aux partis contrôlés à travers par exemple, l'inobservation des exigences de neutralité et d'impartialité. Dans ce cas, quelles sanctions encourent-ils ? Devant quelle autorité doivent-ils en répondre ? Cette imprécision réglementaire en matière répressive sur les actes des membres de la Commission constitue à ce point une limite supplémentaire qui vide cette structure de son efficacité.

B. L'accès aux médias

Les atteintes au droit électoral dans la gestion de l'accès des partis politiques aux médias publics sont plus subtiles.

Faut-il rappeler que le temps d'antenne réparti entre les candidats s'est toujours fait sur une base inégalitaire ? L'espace réservé à la propagande partisane est en effet accordé en fonction du nombre de candidats présentés85(*) par chaque formation politique et de celui des circonscriptions dans lesquelles celle-ci présente des candidats. Il en résulte que les plus grands partis s'en tirent avec la part du lion. C'est ce qui ressort des tableaux en annexe l'un concernant l'ordre de passage, l'autre se rapportant à la répartition du temps d'antenne à la télévision et à la radio86(*) lors du scrutin du 30 juin 2002.

A titre d'exemple, le Rdpc et le Sdf ont eu droit à un temps d'antenne journalier (Radio et TV) de 63 minutes 8 secondes et 23 minutes 9 secondes et 34 minutes 29 secondes et 12 minutes 8 secondes contre 0.14 à 5.6 et 0.05 à 2 minutes 10 secondes respectivement pour certains partis plus petits.

On peut reconnaître les efforts réalisés dans le sens de l'ouverture des médias publics à toutes les formations politiques. Les partis ont accès aux médias par rapport à leur poids politique. Sur cette question, l'idée d'inégalité précédemment développée trouve application dans les résultats de notre enquête. La majorité des enquêtés, soit 66,66%, ont affirmé que le mode de répartition actuel ne répond pas au souci d'équité et d'égalité ( voir graphique ci-dessous)

Graphique n°3 illustrant l'équité et l'égalité dans l'accès aux médias publics selon les enquêtés

(Source : graphique établi par l'auteur)

Ce point de vue doit être pris avec respect et nécessite que le Code électoral en cette matière soit complété par une loi qui fixe, une fois pour tout, cette répartition dans des conditions de parfaite égalité , de temps alloué à chaque candidat ainsi que, de programmation dont la mauvaise gestion préjudicie certains. De plus le ministre de la Communication qui doit à chaque élection prendre un arrêté d'application relative à cette loi ne peut justifier d'un maximum de liberté d'action, de neutralité, et d'impartialité. Il aura comme premier souci de favoriser le parti auquel il appartient. Le législateur est en ce sens l'une des meilleures garanties pour fixer la durée de propagande et la programmation des émissions des candidats et des partis politiques en périodes des élections.

Les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions relatives à la campagne électorale obéissent, à cet égard, théoriquement aux principes de liberté, de gratuité, de disponibilité et d'impartialité.

L'Arrêté n°012/Mincom/Cab du 7 juin 2002 portant sur cette question pour les élections du 30 juin 2002 prévoyait en son article 20 que les émissions produites sont diffusées à la télévision de 21 h à 22 h 30 dans un laps de temps n'excédant pas soixante minutes et de 20 h à 22 h 30 à la radio dans un laps de temps n'excédant pas 120 minutes.

Cela étant, la démarche précédemment développée en faveur du transfert dans l'espace parlementaire de toutes les questions soulevées trouve sa justification. En effet, de l'observation de l'ordre de passage dans les tableaux en annexe, on se rend compte que celui-ci est figé. Ainsi le parti au pouvoir est classé chaque jour avant les autres formations politiques.

Des études de psychologie sociale, parmi les plus sérieuses ont montré comment les premières informations reçues influencent notre jugement. La première impression qui nous arrive détermine notre impression d'ensemble. C'est ce que l'on entend par effet de primauté attribué généralement à une diminution de l'attention par rapport à l'information tardive87(*).

Autrement dit, le parti qui est programmé à 20 heures a plus de chance d'être suivi. N'est-ce pas l'heure où les gens sont habitués à suivre le journal parlé ? Alors que 22h30 ne correspond t- elle pas à celle où la fatigue de la journée se fait pesante et celle où dans les campagnes les populations sont déjà endormies ?

Faire cesser les inégalités sur cette question consiste, d'une part, à programmer les émissions des partis, au moins deux heures de temps plus tôt, d'autre part à établir l'ordre de passage des partis de façon aléatoire. Les réformes en ce domaine sont en tout cas nécessaires, comme le sont aussi celles qui doivent tendre à régler le problème épineux des inscriptions et de la distribution des cartes électorales.

SECTION 2. L'EPINEUX PROBLEME DES INSCRIPTIONS ET DE LA DISTRIBUTION DES CARTES ELECTORALES

Pour de nombreuses raisons, des entraves à l'exercice du droit de vote peuvent être occasionnées au moment des inscriptions sur les listes électorales. Elles peuvent aussi se produire à partir de la distribution des cartes électorales.

Paragraphe 1. La limitation à l'exercice du droit de vote imposée par l'inscription sur les listes électorales

Les limites à l'exercice du droit de vote à travers les inscriptions sur les listes électorales sont à mettre au passif, d'une part, du caractère discriminatoire desdites inscriptions, d'autre part, du non respect de l'esprit de la loi.

A. Le caractère discriminatoire des inscriptions.

Les inscriptions sur les listes électorales peuvent rencontrer deux sortes de limitations : des restrictions légales et des restrictions illégales.

La première catégorie ne nous intéresse pas dans la mesure où on la retrouve dans la plupart des législations électorales de par le monde. La seconde catégorie retient l'attention car, elle est le fait des comportements volontaires malveillants des personnes chargées de la conduire. Elle est fondée non seulement sur des considération partisanes mais aussi et sur des considérations tribales88(*).

C'est en principe aux Commissions mixtes, que revient la responsabilité de la révision des listes électorales. Malheureusement pour des raisons que nous avons évoquées plus haut, et devant la démission des autres membres qui forment cette Commission, les autorités administratives se sont retrouvées entrain d'accomplir, seules, l'essentiel des tâches.

L'accomplissent-elles normalement ? C'est-à-dire, en toute neutralité et impartialité ?

Depuis 1992, les autorités administratives n'ont cessé de perdre la confiance d'une frange importante des citoyens, accusées qu'elles sont, de favoriser des inscriptions discriminatoires. Cette accusation, considérée en l'état, peut paraître comme une des plus graves dans une jeune démocratie. L'analyse des événements électoraux dans le pays montre cependant que le nombre des personnes inscrites sur les listes électorales diminue d'une année électorale à une autre . Cette diminution a atteint son niveau le plus élevé au cours des dernières élections avec seulement environ cinq millions d'inscrits sur une population évaluée à plus de quinze millions d'habitants et un taux de participation inférieur à 40%. Il n'y a donc aucune difficulté à admettre que des problèmes subsistent en cette matière pour laquelle les autorités administratives portent une lourde responsabilité.

Le premier soupçon qui pèse sur ces autorités est dû au fait qu'elles conduisent seules les opérations de révision des listes électorales. Deux situations peuvent alors se présenter, soit que le défaut d'inscription est involontaire, soit qu'il est intentionnel.

Le second soupçon est, lui, justifié par le fait que les autorités administratives ont pris l'habitude de confier les inscriptions aux chefs traditionnels. En le faisant, elles hypothèquent l'impartialité et la neutralité qui doivent entourer cette opération. Les chefs en question ne sont pas toujours neutres et impartiaux, non pas parce qu'ils sont auxiliaires de l'Administration, mais parce qu'ils sont très nombreux qui se réclament du parti au pouvoir. De plus, ils doivent leur désignation à l'autorité administrative qui peut pour des raisons diverses, précipiter leur chute. Aussi assiste t-on aux inscriptions sélectives sur les listes électorales ?

L'expression consacrée à Douala89(*) est « l'inscription à tête chercheuse ». Elle consiste, d'une part, à confier les inscriptions à des individus bien déterminés pour lesquels l'appartenance au parti que l'autorité administrative entend favoriser, ne fait pas de doute. Ceux-ci se chargent alors de relever dans leur entourage, en particulier les Comités de bases, les noms de leurs militants qu'ils déposent à la sous-préfecture en vue de l'établissement des cartes électorales ; d'autre part, à identifier au préalable les bureaux de vote dans lesquels le parti que l'autorité administrative entend favoriser a obtenu de mauvais résultats au cours de précédentes élections. Ce sont à ces endroits précisément que l'inscription est plus rigoureuse. On peut comprendre d'ailleurs pourquoi le 30 juin 2002, une confusion a régné entre l'opération de révision et celle de refonte. Les autorités ont fait recours aux deux types d'opérations, la révision dans les bureaux de vote où leur parti favoris avait un bon score en 1997 et la refonte là où les résultats étaient mauvais.

La troisième technique a consisté à demander individuellement aux responsables des partis politiques membres de la Commission, compte tenu des courts délais avant la fermeture des inscriptions, de produire les listes de leurs militants en vue de l'inscription de ces derniers. Cette technique, fondée sur la mauvaise foi des autorités s'est révélée particulièrement efficace. Elle constitue la forme la plus achevée des techniques restrictives illégales d'inscription sur les listes électorales car plusieurs personnes recensées dans ces conditions se sont retrouvées sans leur carte le jour du scrutin. Sur ces observations, les personnes interrogées, sur la question relative aux inscriptions ont affirmé majoritairement, soit 74,35% contre 23,07% que les inscriptions au Cameroun sont essentiellement discriminatoires (Cf. graphique, p. 73).

Graphique n°4 illustrant la discrimination dans les inscriptions sur les listes selon les enquêtés

(Source : graphique établi par l'auteur)

Il convient cependant de noter que les actes posés par les autorités administratives les engagent personnellement; ils ne s'inscrivent pas nécessairement dans l'optique de favoriser uniquement le parti au pouvoir ou les partis d'opposition. De nombreux exemples montrent que chaque autorité a avec elle un parti qu'elle soutient dans le silence et la discrétion. Autant certaines sont accusées d'avoir un parti pris pour le Rdpc au pouvoir, autant d'autres le sont pour leur intelligence avec l'opposition.

Mais quel que soit le côté où se trouve la réalité, la vérité est que certaines autorités administratives limitent l'exercice du droit de vote des citoyens en procédant aux inscriptions discriminatoires sur base tribale, c'est-à-dire, à partir du nom on peut, non seulement rattacher un individu à une région, à une tribu mais surtout à un parti politique. On entendra par exemple : le parti "des béti " parlant du Rdpc, le parti "des Bassa", pour qualifier l'Upc, le parti "des anglophones" pour désigner le Sdf, "des nordistes", des Bamoun pour singulariser respectivement l'Undp, l'Udc, etc.

Il suffit donc que le nom de celui qui sollicite l'inscription renvoie à l'une de ces réalités pour que son sort soit décidé. Il pourra selon le cas après inscription, sur un papier volant, obtenir ou non sa carte électorales. Tout ceci est aggravé par le non respect de l'esprit de la loi.

B. Le non respect de l'esprit de la loi.

Les entraves à l'exercice du droit de vote peuvent être consécutives au non respect des délais d'inscription ainsi qu'aux difficultés liées à la consultation et à l'affichage des listes électorales.

En matière d'inscription sur les listes électorales, le délai légal court chaque année du premier janvier au 31 décembre. Ce délai n'est pas respecté, pour autant par l'Administration. C'est en effet, lorsque l'année électorale s'annonce et que les élections sont décidées par le chef de l'Etat, qu'elle s'organise pour répondre à cette exigence. Il s'en suit des débordements qui obligent ses agents à poursuivre en catimini, l'opération d'inscription jusqu'à la veille du scrutin et rendant ainsi problématique la consultation et l'affichage des listes électorales.

la loi prévoit que les listes électorales sont mises à la disposition de tout électeur qui peut les consulter à la sous-préfecture, au district ou à la mairie. Ces mêmes listes doivent être affichées dans des emplacements prévus à cet effet dans les abords de la sous-préfecture ou du district, trois jours avant le scrutin, ceci pour permettre aux électeurs de connaître définitivement leur situation. Ces dispositions se heurtent cependant à quelques difficultés pratiques. D'abord que signifie le terme « mettre les listes électorales à la disposition des électeurs qui peuvent les consulter... » ?

Pour les autorités administratives, ce terme doit revêtir une interprétation restrictive. En ce sens, tout électeur désireux de connaître sa situation a la possibilité de se présenter à la sous-préfecture ou au district consulter les listes sur place aux heures ouvrables des bureaux.

Pour le commun des citoyens, la meilleure interprétation à donner est celle qui consiste à restituer les listes électorales au grand public par voie d'affichage. Même si les représentants de l'Administration territoriale affirment les difficultés techniques de cette seconde approche liée au manque d'espace et surtout au vandalisme qui menacent ces listes, ils sont loin de convaincre. l'organisation des élections étant confiée au Minat90(*), il appartient à ce ministère de dégager les moyens adéquats pour satisfaire un tel besoin. De plus, les sous-préfectures et les districts sont des services publics supposés être gardés. Et si tel n'est pas le cas, pour diverses raisons, des mesures spéciales pour couvrir la période électorale (moins de deux mois), devraient être prises en vue de faire face au vandalisme.

La seconde interprétation est par conséquent celle qui correspond mieux à la notre et au souci du législateur de garantir une plus grande participation des citoyens aux élections.

Les arguments qu'on peut opposer à la thèse d'une consultation sur place des listes sont d'ordre pratique. Elle se heurte, en premier lieu, au problème de distance. De nombreuses localités, parfois très enclavées, sur l'étendue du territoire sont très éloignés des chefs-lieux d'arrondissements ou de districts. Faute de véhicules, il faut parfois aux populations concernées deux, voire trois jours de marche pour parcourir de longues distances, souvent supérieures à cinquante kilomètres qui les séparent du lieu de consultation des listes électorales91(*). Si par bonheur, ces localités sont reliées aux endroits considérés par des routes praticables et qu'y circulent des véhicules en tout temps, les personnes concernées par les inscriptions doivent débourser d'importantes sommes d'argent pour couvrir leurs besoins de transport et de séjour. Sauf accélération brusque de leur culture politique, faire face à ces deux difficultés constitue encore un véritable sacrifice, à la limite, surprenant pour des populations qui ploient sous le poids de la pauvreté et dont l'urgence est ailleurs : celle de satisfaire les besoins vitaux.

En second lieu, il est difficile à concevoir qu'une unité administrative accueille à la fois plusieurs milliers de personnes qui viennent vérifier si leurs noms figurent bien sur la liste. Même dans les unités de petite taille, ce pari est insurmontable. Rien à dire cependant pour les grandes métropoles telles Yaoundé, Douala, Bafoussam, etc. où on atteint facilement deux cents à trois cents mille électeurs dans un seul arrondissement. Il se dégage de ces quelques difficultés d'ordre technique que l'affichage reste l'interprétation que le législateur camerounais a voulu donner à l'expression « mettre à la disposition... » dont la non application affecte durement l'exercice par les citoyens de leur droit de vote. Pour circonscrire ces différentes atteintes, il est intéressant de lier les autorités administratives dans une procédure d'inscription et de distribution des cartes électorales dont l'esquisse de solution sera donnée dans notre conclusion.

Paragraphe 2. La limitation à l'exercice du droit de vote imposée par la distribution des cartes électorale et l'emplacement des bureaux de vote

La limitation du droit de vote liée à la distribution des cartes électorales est un fait courant de même que celui des changements des emplacements des bureaux de vote.

A. La limitation liée à la distribution des cartes électorales.

La pratique de distribution des cartes électorale révèle de sérieuses discriminations fondées sur des motifs ethniques. Les dernières élections organisées le 30 juin 2002 ont confirmé cette inquiétude. Il en a résulté un faible taux de participation jamais enregistré par le Cameroun depuis le retour des élections multipartites92(*).

Comme les inscriptions, la distribution des cartes électorales est en grande partie confiée au chef de quartier et de village, mais aussi aux responsables politiques des partis. Elles sont ensuite distribuées suivant les critères d'appartenance à une tribu dont toute liaison avec un parti politique déterminé bénéficie de forte présomption. La distribution des cartes ne se fait donc pas comme l'exige la loi. Ce phénomène s'est observé un peu partout au point où 92,30% des personnes interrogées au cour de notre enquête trouvent cette distribution non satisfaisante.

Graphique n°5 illustrant l'appréciation des enquêtés au sujet de la distribution des cartes d'électeurs (Source : graphique établi par l'auteur)

Sans doute doit-on reprocher à l'administration d'avoir parfois agi de manière à nuire à certains électeurs ? C'est ainsi qu'on a souvent constaté au niveau des sous-préfets et des chefs de district des « tripatouillages » ou des déformations des noms ou des informations sur les cartes, qui les ont rendues inutilisables. De même il arrive que des lots de cartes confectionnés pour un quartier ou un village soit de manière tactique envoyés dans un quartier ou un village autre. Parfois aussi, les citoyens ne sont pas informés, d'une part, du calendrier de distribution des cartes et ne se présentent pas pour le retrait à la date prévue, d'autre part, ils constatent ahuris que les autorités administratives éliminent volontairement leurs noms des listes électorales. Pour les empêcher de vérifier que leurs noms figurent sur les dites listes, ces autorités leur délivrent les cartes électorales portant des numéros fictifs. C'est le jour du scrutin qu'ils s'aperçoivent, au moment de voter qu'ils n'ont jamais été inscrits. Ils doivent alors s'incliner devant la loi qui donne l'autorisation de voter aux seuls inscrits. Ces dérives sont aggravées par les limitations consécutives à l'emplacement des bureaux de vote.

B. L'emplacement des bureaux de vote.

L'emplacement des bureaux de vote doit être précisé dans chaque circonscription. Ils doivent surtout être situés à l'intérieur des édifices publics selon des critères géographiques de répartition qui évitent à l'électeur de longs déplacements. Par ailleurs ils doivent occuper des endroits qui, en plus d'être accessibles, favorisent la liberté de choix dans un contexte idéologiquement neutre. Malheureusement, l'Administration ne respecte pas toujours ces principes. Il s'ensuit de nombreuses dérives : celles concernant le délai de publication des lieux de vote, celles concernant la localisation même de ces lieux, enfin celles de leur imputation aux électeurs.

S'agissant du premier point, la loi prévoit que la liste des bureaux de vote doit être affichée aux chefs-lieu des circonscriptions administratives au moins cinq jours avant le scrutin. Ce délai est rarement respecté et encourage la prolifération des bureaux fictifs.

Le second point soulève la question des distances. Il sera en tout cas impossible pour un citoyen de parcourir plus de cinquante kilomètres pour aller vérifier au chef- lieu de son arrondissement ou de son district si le bureau de vote qui lui a été affecté est bien le même qui est porté sur sa carte électorale. L'expérience de ces dernières élections a montré que le bureau de vote mentionné sur la carte électorale n'était pas toujours celui dans lequel étaient inscrits certains électeurs. On rencontre alors le jour du scrutin de nombreux citoyens à la recherche d'un éventuel bureau de vote sur la liste duquel figureraient leurs noms.

Enfin, le troisième point pose la difficulté liée au lieu du vote. L'Administration ne respecte pas, en effet, la loi qui affirme que les bureaux de vote doivent êtres choisis au sein des édifices publics. Ceux-ci se retrouvent couramment dans les maisons d'habitation appartenant tantôt aux chefs traditionnels, tantôt à certains responsables de parti, tantôt à certaines élites, militantes des divers partis politiques. De tels emplacements ne favorisent pas la liberté de choix de l'électeur et porte un coup à l'exercice du droit de vote. Mais faut-il rappeler que les atteintes à ce droit n'est pas l'exclusivité de l'Administration ? Les comportements des citoyens eux-mêmes et de la société constituent autant d'obstacles à ce droit qu'il convient d'analyser.

CHAPITRE 4

LES ENTRAVES SOCIOLOGIQUES A L'EXERCICE DU DROIT DE VOTE

L'élimination de toutes les formes de discrimination en matière d'exercice du droit de vote doit être inscrit comme le principal objectif des citoyens et des formations politiques ainsi que de la société entière. Mais pour de diverses raisons cela n'a pas toujours été le cas.

Section 1. LES ENTRAVES INHERENTES AUX CITOYENS ET AUX FORMATIONS POLITIQUES

La responsabilité des citoyens en matière de limitation de leur droit électoral s'affirme à toutes les élections. Il en est de même de celle des formations politiques.

Paragraphe1. La responsabilité des citoyens.

Les entraves au droit de vote par les citoyens eux-mêmes se lisent à travers l'attitude qu'ils affichent individuellement ou collectivement, attitude caractérisée par la résignation et l'illettrisme.

A. La résignation .

La résignation est une attitude de renonciation à quelque chose, à un droit. Appliquée en matière électorale, c'est la décision prise par un citoyen de renoncer à exercer son droit de vote. Cette décision est, dans nombre des cas, provoquée par les difficultés qui émaillent la mise en oeuvre du droit électoral, elle même consécutive des abus de d'Administration, de la justice et de l'idée selon laquelle le droit de vote est un droit superflu.

De nombreux citoyens interrogés ont donné à l'Administration et à la justice Camerounaise une image plutôt négative. En posant la question à plusieurs personnes de savoir ce qu`elles font lorsqu'elles se rendent compte que leurs noms ne figurent pas sur la liste électorale ou qu'elles n'ont pas reçu leur carte de vote, 28,20% contre 2,56% ont répondu qu'elles se résignaient car toute réclamation n'avait aucune chance d'aboutir, ni devant les autorités administratives, ni devant le juge (Cf. graphique ci-dessous).

Graphique n°6 illustrant l'absence de neutralité de la justice en matière électorale selon les enquêtés

(Source : graphique établi par l'auteur)

Mais il n'est pas utile de tirer aveuglément sur les autorités judiciaires dont le travail au cours des élections du 30 juin 2002 est apparu au fond remarquable. Il n'y a qu'à considérer d'une part, l' annulation des élections dans neuf circonscriptions qui illustre que les recours introduits dans le strict respect des conditions de forme et de fond n'ont eu aucune peine d'aboutir et qu'aucune raison ne saurait justifier les manquements du juge constitutionnel de dire le droit. Il convient de relever que 51,28% des enquêtés n'ont pas confiance à la justice contre seulement 28,20%. Pour les premiers, la justice n'est pas indépendante et ne saurait l'être en matière électorale. A l'opposé la minorité pense que le juge statue sur la base des documents qui lui sont présentés. Cette deuxième position est celle qui se rapproche de notre vue. Il serait par conséquent juste de chercher l'échec des recours chez les recourants eux-mêmes. C'est davantage dans leur infantilisme juridique qu'il faut situer le problème. Qu'on se souvienne des multiples recours rejetés par le Conseil constitutionnel lors des élections du 30 juin 2002. Comme dans les Affaires Undp c/ Etat du Cameroun (Minat)93(*), Ufdc c/ Etat du Cameroun (Minat)94(*), Undp c/ Etat du Cameroun (Minat)95(*). Dans cette dernière affaire, le Conseil constitutionnel a rejeté le recours tendant à l'annulation des élections municipales dans le Mbam et Inoubou car il n'est pas compétent pour connaître du contentieux des listes qui relève des Commissions mixtes statuant en premier ressort et des Cours d'Appel statuant en second ressort en cas de non satisfaction du recourant devant la Commission. Le Conseil constitutionnel est demeuré constant, en tout cas sur cette question . Il l'avait déjà affirmée dans l'espèce Kago Lélé rappelée plus haut96(*).

Quoiqu'il en soit, le prestige du juge Constitutionnel s'est renforcé aux lendemains du 30 juin 2002 en annulant, entre autres résultats, les élections dans la circonscription de la Sanaga Maritime pour fraudes dans l'Affaire Sdf et Undp c/ Etat du Cameroun.97(*) Cela n'a pour autant pas dissipé le manque de confiance que lui témoignent bon nombre de citoyens. Ce sentiment n'est pas nouveau. Il s'est plutôt renforcé face aux multiples atteintes au droit de vote, en tant que droit de l'homme, dont la protection n'est pas pleinement garantie. Un sondage publié par L'Effort Camerounais  remarquait déjà que « les jeunes Camerounais des classes de première et terminale ne croient pas en l'existence des droits de l'homme » 98(*). Selon ces jeunes «  les droits de l'homme s'attribuent à certains et sont indéfiniment bafoués par d'autres donc, ils n'existent pas... »99(*).

Il est cependant exagéré de penser que les droits de l'homme en général, et le droit de vote en particulier n'existent pas au Cameroun. Ces droits sont reconnus par la Constitution révisée de 1996 à tous sans discrimination. Mais il serait plus élégant et honnête de poser le problème de leur mise en oeuvre effective au regard des écueils qui jonchent leurs parcours.

Au-delà de la résignation qui est une réponse à ces questions, l'illettrisme et l'analphabétisme apparaissent aussi comme deux causes qui empêchent aux citoyens d'exercer leur droit de suffrage.

B. L'illettrisme et l'analphabétisme.

L'exercice du droit de suffrage est plus facile pour les personnes dont les ressources intellectuelles sont suffisantes. Ce n'est pas le cas pour les personnes analphabètes ou de celles frappées d'illettrisme. Tandis que l'analphabétisme se définit comme l'état d'une personne, d'une population analphabète, c'est-à-dire qui ne sait ni lire ni écrire100(*), l'illettrisme est l'état des personnes qui, ayant appris à lire et à écrire, en ont perdu complètement la pratique101(*).

Notre propos n'étant pas de faire le rapport entre ces deux notions, c'est l'impact que l'une ou l'autre, fait peser sur le droit électoral qui nous intéresse.

Il importe à cet égard de mentionner que de nombreuses régions au Cameroun, comme les provinces de l'Extrême nord, du Nord, de l'Adamaoua ou encore de l'Est tiennent le record de sous-scolarisation102(*). On y rencontre un nombre encore très élevé d'analphabètes. Ailleurs, dans les autres provinces où ce phénomène a reculé, l'illettrisme reste présent.

Pourtant l'exercice d'un droit présente de réelles difficultés pour toutes les personnes se trouvant dans l'un ou l'autre de ces deux cas. Seuls les initiés ont accès à la connaissance, donc au droit, et donc aux droits de l'homme d'une manière générale et en particulier au droit de vote.

Le préambule de la déclaration des droits de l'homme et des citoyens du 26 août 1789 ne dispose-t-il pas que «  l'ignorance, l'oubli ou le mépris des droits de l'homme sont les seules causes des malheurs publics (...) » ? Ignorance qui justifie que des personnes lésées dans leur droit refusent d'intégrer des recours ?

Quand un citoyen choisit délibérément la résignation lorsque son nom ne figure pas, sur une liste électorale ou lorsque les autorités administratives ne lui ont pas délivré sa carte de vote, cela traduit une grosse ignorance des voies de recours prévues par la loi électorale. C'est vrai que cette ignorance n'est pas la seule caractéristique des personnes frappées d'illettrisme ou d'analphabétisme ; c'est aussi le fait de nombreux autres Camerounais, d'un niveau d'étude satisfaisant qui n'ont jamais pris le soin de lire le Code électoral. Un entretien avec les étudiants de l'université de Yaoundé II à Soa, a révélé des réponses de résignation identiques. On se demande alors à quoi servent les Commissions communales et départementales de supervision ou encore l'Onel chargés concurremment de connaître de toutes les réclamations ou contestations concernant les listes et les cartes électorales ?

Le législateur Camerounais a donné à ces institutions d'importants pouvoirs en vertu desquels, elles ordonnent toutes les rectifications rendues nécessaires à la suite de l'examen, par elles, des réclamations ou contestations dirigées contre les actes de l'autorité administrative concernant les listes et les cartes électorales.

La responsabilité des camerounais eux-mêmes est donc générale en matière de limitation de leur droit de suffrage. Mais on ne saurait négliger celle des partis politiques.

Paragraphe 2. La responsabilité des partis politiques

« Un parti est une réunion d'hommes qui professent la même doctrine politique » écrivait Benjamin Constant en 1816. Ainsi considéré il doit dans son objectif d'accéder au pouvoir, assurer l'encadrement des personnes qui se réclament idéologiquement de lui.

Le Cameroun donne cependant l'exemple type d'un pays où les partis s'illustrent par un déficit d'encadrement de leurs membres et partant des électeurs. Ils donnent surtout l'image des formations très dépendantes en proie à une absence de cohésion qui aurait pu constituer leur force s'ils la faisaient cesser.

A. Le déficit d'encadrement des membres et des électeurs.

L'observateur étranger estime généralement que le trait original qui caractérise la vie politique camerounaise, c'est la multiplicité des partis. Ceux-ci sont dans la plupart des cas dirigés par des personnes peu expérimentées.

A la différence du «  two party system » qu'on retrouve dans certains pays103(*), le Cameroun a opté pour un système illimité des partis politiques. L'article 2 de la loi n° 90-56 du 19 décembre 1990 relative aux partis politiques stipule en ce sens que : «les partis politiques se créent et exercent librement leurs activités dans le cadre de la Constitution... »

De plus l'article 11 en déterminant les conditions à remplir pour créer un parti passe sous silence la question relative à la formation de base des candidats ; la loi électorale exige simplement qu'ils sachent lire et écrire en français ou en anglais du moment où ils postulent à un poste électif. Cette dispense de justifier d'une expertise éprouvée encourage l'aventure politique d'un nombre important d'individus sans envergures, incapables d'assurer à leurs militants et sympathisants l'encadrement dont ils ont besoin pour renforcer les capacités de leur parti. A cet égard, il n'est pas étonnant de voir que certains citoyens ignorent tout de leurs droits, des procédures à suivre pour les faire respecter, prévues par la législation électorale.

A cause des phénomène d'analphabétisme et de l'illettrisme évoqués, les partis devaient servir, de relais, si leurs leaders avaient l'expertise nécessaire, pour former, informer et enseigner les citoyens, certes dans le but d'atteindre les objectifs du parti, mais aussi pour participer, aux côtés des autres acteurs politiques, à l'oeuvre de construction de la culture politique qui fait encore défaut au Cameroun. Le déficit d'encadrement des citoyens réside aussi dans l'insuffisance des moyens matériels et financiers des partis.

Créer un parti politique au Cameroun est la chose la plus facile à obtenir. Toute la difficulté réside cependant dans son organisation ainsi que son fonctionnement qui requièrent de ressources suffisantes. Autrement le parti se désintègre, à défaut de se limiter dans le cadre du village de son géniteur ou plus simplement de sa famille.

Sans exagération, trois-quarts des partis politiques actuels se trouvent dans cette situation de vulnérabilité matérielle et financière et ne peuvent se déployer facilement à travers le territoire national pour faire connaître leurs programmes politiques.

Fort de ce constat, le principe d'égale chance a conduit l'Assemblée nationale à voter une loi pour soutenir l'effort des partis politiques. Au terme de l'article 4 de la loi considérée, une subvention est servie par l'Etat à chaque formation politique. Cette disposition illustre les bonnes intentions du législateur de sortir les partis de la mendicité politique. Mais elle est trahie à cause de son imprécision. Si elle énumère les modalités de répartition de la subvention, elle ne dit rien de la période, encore moins de la date à partir de laquelle doit intervenir cette répartition.

La pratique récente montre en effet que la manne électorale est distribuée en période électorale. Elle ne peut dont servir à couvrir véritablement tous les objectifs visés par la loi.

Au contraire, elle court le risque de distraire de nombreux partis, à la veille d'une élection, à se concentrer dans la bataille électorale, d'atténuer l'activisme de leurs leaders partagés entre la tentation de garder l'enveloppe pour soi- même et la nécessité de consacrer celle-ci au besoin immédiat et pressant du parti. La distribution de la subvention politique aux partis, à quelques semaines de l'échéance électorale, apparaît en outre comme une sorte de corruption politique, ne permet pas aux autres membres du parti bénéficiaire de s'assurer que l'allocation servie par l'Etat sert véritablement leurs intérêts et qu'elle n'a pas été détournée.

De même, la participation des partis aux différentes Commissions électorales est l'une des plus médiocres. Il n'est pas rare de constater que les Commissions locales ne renferment pas toujours tous les représentants des partis politiques, l'une des principales raisons étant le manque d'assistance qu'ils sont en droit d'attendre de ces partis très dépendants, par ailleurs, à cause de leur absence de cohésion interne.

B. L'extrême dépendance et le manque de cohésion des partis

Quelque soit leur taille ou leur envergure, tous les partis politiques laissent apparaître leur dépendance à l'égard des intérêts divers.

Le Rdpc, parti au pouvoir, fournit le meilleur exemple de ce type de dépendance qui prend deux formes : la dépendance à l'égard des intérêts économiques et celle à l'égard des chefferies traditionnelles.

S'agissant de la première forme de dépendance, le Rdpc a toujours été lié, assez étroitement aux milieux d'affaires. L'ancien Premier Ministre Simon Achidi Achu, militant de ce parti n'avait-il pas comparé la politique au « Ndjangui » C'est-à-dire, à la tontine ? Autrement dit, ne peut recevoir du pouvoir que celui qui est utile au pouvoir, soit en apportant les suffrages au parti qui l'exerce, soit en fournissant à ce parti les moyens matériels et financiers dont il a besoin pour mener ses activités et son programme. Depuis lors, on assiste à un véritable chassé-croisée d'hommes d'affaires camerounais mobilisés autour du Rdpc et occupant de hautes responsabilités au sein du parti104(*) qui, membre du bureau politique ou du Comité central, qui député ou maire, etc. Il s'agit donc d'une organisation dont la puissance financière est à la base de l'implantation du Rdpc dans toutes les régions du pays où se recrutent en masse de nombreux sympathisants et adhérents.

La dépendance à l'égard des groupes d'intérêt financier s'accompagne de la dépendance à l'égard des chefferies traditionnelles plus proches des populations.

On connaît à peu près l'influence que les chefs dans certaines régions ont sur leurs populations. Généralement celles-ci expriment la volonté des autorités traditionnelles dont elles dépendent. Les consignes de vote sont de ce fait courantes et nécessitent un contrôle de la part du parti au pouvoir.

La chefferie traditionnelle de Rey-bouba dans le Nord a fait l'objet de nombreux écrits sur ce plan, car en période de vote, le secret ( de vote) n'existe pas. Les bureaux de vote sont placés sous le contrôle des hommes du lamido105(*) qui s'assurent minutieusement que les électeurs ont voté selon les prescriptions du monarque. Après avoir accompli leur devoir civique, les citoyens ramènent les bulletins des autres partis pour démontrer qu'ils ont effectivement voté pour le parti de leur leader coutumier. De plus, les chefs traditionnels sont des auxiliaires de l'Administration ; Ils sont désignés par elle et peuvent être démis de leur fonction en toute circonstance. D'où leur soumission qui heurte de front la neutralité que commande l'exercice de leur fonction. Car le chef traditionnel doit se placer au-dessus des partis politiques, il ne saurait faire de distinction de manière ostentatoire entre ses sujets, sinon il risque le discrédit et devient un citoyen ordinaire.

Le respect voué aux « gardiens » de la tradition procède également de l'attachement excessive des populations à certaines croyances. Rencontré à Yaoundé au quartier dit Nkomkana, un ressortissant de la province de l'Ouest nous a affirmé que les chefs utilisent parfois les pouvoirs que leur confère leur position pour détourner le choix des électeurs. Aussi a-t-il fait la révélation suivante : «  à Bafoussam lors des municipales de janvier 1996, le chef Njitack Ngompé Pélé, membre du Rdpc, avait transporté une urne dans la forêt sacrée , (où il a seul accès avec quelques rares notables) pour faire le dépouillement des résultats au profit de son parti »106(*).    

Le Rdpc n'est pas seul à connaître les diverses formes de dépendance, les autres partis sont encore plus dépendants, en particulier ceux de l'opposition.

L'opposition au Cameroun a , en effet, du mal à accomplir ses missions à cause de sa dépendance à l'égard du parti au pouvoir et de son extrême hétérogénéité.

Le souci de tout parti au pouvoir est de se maintenir. Par conséquent, on aura du mal à concevoir l'aménagement d'un cadre législatif qui met véritablement tous les partis politiques au même pied d'égalité et bénéficiant des avantages identiques.

La dépendance des partis d'opposition à l'égard du Rdpc résulte en partie, comme nous l'avons souligné, du fonctionnement de la Commission de contrôle des fonds alloués aux partis politiques dont le rapport a pour unique destinataire le chef de l'Etat. Mais elle résulte aussi des faveurs exceptionnelles de ce dernier à l'endroit des partis de la majorité dont le rôle consiste à déstabiliser l'unité de l'opposition à son profit.

Cette frange de l'opposition ne peut alors justifier d'une quelconque autonomie. Il en résulte un affaiblissement de l'opposition dans son ensemble, qui ne peut intégrer des actions communes cohérentes. Avant chaque scrutin, les partis politiques dits d'opposition tiennent toujours des réunions de concertation dans la perspective d'aborder les élections en rangs serrés. Mais jamais, depuis une décennie ils n'ont parvenu à le faire. C'est le témoignage que livre Abel Eyinga dans le journal Aurore plus : « un jour, j'ai eu l'honneur d'être invité à assister à une réunion de l'opposition à Yaoundé, au quartier Essos. Samuel Eboua m'avait assuré au téléphone que tout le monde serait présent : Les petits leaders, les grands et même les super-grands. Mais je n'ai vu ni Adamou Ndam Njoya, ni Garga, ni Fru ndi, ni Bello Bouba... »107(*). Et d'ajouter, une autre réunion de l `opposition à laquelle j'avais été invité peu après chez Garga, il y avait encore beaucoup moins de monde.... »108(*).

On peut constater que cette absence de discipline interne de l'opposition ne peut pas faire son jeu et contribue ni plus ni moins à son affaiblissement qui justifie les entraves à l'exercice de droit électoral. C'est d'ailleurs ce qui fait dire à Manga Kuoh que « l'opposition camerounaise donne la preuve de son insuffisante acclimatation au pluralisme. Les multiples dissensions et rivalités personnelles au sein des différentes formations politiques ne reflètent-elles pas une culture politique autocratique dans laquelle la pensés et l'action du chef omnipotent ne souffrent pas la moindre interrogation  ? »109(*) Les entraves à l'exercice du droit de vote ont une autre source : la société.

Section 2. LES ENTRAVES EMANANT DE LA SOCIETE

La société camerounaise est traversée par un courant de réformes dont la mise en oeuvre se heurte à des difficultés de toutes sortes. Il en va ainsi, par exemple, de la diversité culturelle qui puise son essence dans les trois cents et poussières de tribus disséminées çà et là à travers le pays, et dont certaines s'accommodent péniblement aux valeurs universelles de la démocratie et de l'état de droit. Il en va de même aussi de la corruption politique, véritable obstacle aux choix sincères des gouvernants et des élus.

Paragraphe 1. La culture, la pauvreté et le « réalisme » comme causes de limitation du droit au vote

La société camerounaise ploie sous le poids d'une multitude de cultures et de réalités sociales réfractaires aux valeurs démocratiques. C'est bien l'une des raisons qui limitent le droit de vote. Quelles en sont les causes ? On les regroupera sous deux rubriques. D'une part, le poids des us et coutumes et, d'autre part, la pauvreté et le « réalisme ».

A. Le poids des us et coutumes

Certaines régions au Cameroun110(*) ont développé pendant longtemps une conception essentialiste111(*) de la culture, une culture comme réalité morte, incapable de s'ouvrir aux autres cultures et de s'adapter en conséquence. Le libre choix des dirigeants étant l'expression d'une culture démocratique importée d'Occident en 1990, il apparaît comme un leurre ; il bute de plein fouet contre d'une part, les interdits d'autre part, le tribalisme.

Le phénomène d'interdits est plus présent dans les sociétés traditionnelles des régions sus-évoquées. Les habitudes y sont plus ou moins figées et ne correspondent nullement à la vision de l'interculturel proclamé par Sélim Abou selon laquelle « les modèles de culture s'ajustent aux données nouvelles et se modifient en conséquence ; ils se modifient à partir de ce qu'ils sont en s'enrichissant de combinaisons inattendues et partant des possibilités inédites »112(*).

L'obéissance et la soumission dépassent, en ce point, les limites de l'acceptable et se transforment en une sorte de tyrannie qui refuse de prendre en compte la volonté de chacun. Cela est vérifiable au sein de nombreuses familles, notamment sur les questions liées aux élections ou le choix du chef de famille s'impose généralement aux autres membres.

L'expérience vécue dans ces sociétés montre, en tout cas, que le choix est dicté à partir du haut, suivant une hiérarchisation pyramidale. Au sommet se trouve le Lamido113(*) puis au milieu ses démembrements constitués des Djaoros114(*) placés à la tête des villages et des quartiers ; enfin les chefs des familles. Une fois la décision prise au sommet, elle est répercutée à chaque échelon. Toute contestation est alors mal perçue et peut entraîner des représailles, voire une exclusion avec toute la famille de son auteur. Mais il y a mieux que les représailles. A côté de la peur du Lamido, les populations de ces régions ont la très forte conviction que tout pouvoir vient de Dieu. Donc, le pouvoir du Lamido venant de Dieu, toute désobéissance à sa personne vaut désobéissance à Dieu. Ses ordres, demandes et autres orientations ont en conséquence un fondement divin insusceptible d'être remis en question.

D'autre part, les femmes qui forment le gros de l'électorat sont entièrement soumises à leur époux. Comme elles ne sont liées par aucun contrat de mariage formel, la séparation est généralement décidée de façon unilatérale par le mari en cas d'insoumission. Il s'en suit que leur volonté, leur choix politique se confondent avec ceux du mari.

Le tribalisme constitue autant que les interdits, sinon plus, une entrave au droit électoral et mérite une plus grande attention, car il pervertit le phénomène électoral et toutes les règles démocratiques.

On a l'impression que le vote de la plupart des citoyens a pour but non pas de défendre une idée ou une idéologie mais de sauvegarder les intérêts de son groupe ethnique. Chacun sera donc plus ou moins porté à voter pour le candidat avec lequel il a le plus d'affinité ethnique. C'est ainsi que depuis 1992, même dans les régions comme la province de l'Est, où l'enjeu électoral est plus situé au sein d'un même parti, le Rdpc, le phénomène tribal oppose plusieurs groupes ethniques. Le cas le plus patent est celui de l'arrondissement de Doumé qui compte un minimum de trois groupes ethniques : les Maka, les Bakoum et les Pôl. Le premier groupe, majoritaire a fait sien tous les postes électifs notamment ceux des députés à l'Assemblée nationale. La compétition oppose ainsi les groupes ethniques entre eux, chaque entité s'alignant toujours derrière la liste des candidats dont elle partage la même filiation tribale.

Mais le tribalisme se manifeste aussi, non pas à l'intérieur d'une même région, mais au plan national comme le relève Jacques Philibert Nguémégné. Il affirme en effet qu'en 1996 lors des municipales dans les provinces du Centre et du Sud, dans les bureaux de vote, on disait aux villageois : « prenez le bulletin blanc, c'est celui de votre frère (...), prenez pour votre frère»115(*). Pareille attitude s'est également exprimée dans le grand nord. On demandait alors aux populations : « il faut que le pouvoir revienne au nord car on a perdu tous les privilèges que nous avions au temps de notre frère Ahidjo »116(*). Cette fois, ce n'est plus le bulletin blanc du Rdpc qui était recommandé, mais le bulletin vert de l'Undp. Un autre exemple plus subtile, cette fois, s'est produit lors de la présidentielle de 1996 dans certains villages de l'Ouest. Le mot d'ordre qui circulait était qu'il ne fallait pas voté Paul Biya. Le motif pour les villageois en était simplement que ce nouveau « Ahidjo » n'avait pas « lavé la veuve de son père (Ahidjo). Il ne pouvait donc qu'échouer dans tout ce qu'il entreprendrait »117(*).

Enfin n'a t-on pas l'habitude d'entendre un peu partout dans les villages des provinces du Centre, du Sud et de l'Est des « discours » du type « ne laissons pas les Bamiléké prendre notre pouvoir »118(*) ?

L'excessive tribalisation du jeu politique, remet à la surface, l'opposition allogènes - autochtones surtout dans les grandes métropoles. Ceci implique que les « allogènes » vivant dans une circonscription ont certes le droit de voter, mais pas davantage celui de prétendre au poste électif, sauf à accepter exceptionnellement de jouer les seconds rôles, c'est-à-dire être suppléant au député ou simple conseiller municipal. C'est un principe qui admet très peu d'exception119(*). A ce propos, Fred Eboko n'a-t-il pas raison d'affirmer que « les élites au pouvoir stimulent une diatribe tribaliste au sein de laquelle se précisent de nouvelles frontières « tribales », du politique »120(*) ?

A côté du tribalisme, la pauvreté et le « réalisme » constituent autant de menaces au droit de suffrage.

B - La pauvreté et le «réalisme »

La pauvreté au Cameroun est d'abord financière et matérielle. Elle limite l'exercice du droit de vote en ce sens que le citoyen ou le paysan démuni ne peut se déplacer sur de longues distances pour aller mettre un bulletin dans l'urne.

L'autre frein au droit de vote vient du « réalisme » des citoyens qui n'y voient pas toujours un gain personnel, précis et immédiat et ne comprennent pas pourquoi tant de mobilisation autour d'une question qui n'a, à leur égard, qu'un caractère accessoire. C'est en ce sens qu'un commerçant rencontré à Douala et un pêcheur interviewé à Edéa répondent : « ce n'est pas le vote qui fait fonctionner ma boutique. Puisque la loi nous oblige à fermer, je préfère rester chez moi et attendre la clôture des bureaux de vote pour relancer mes activités »121(*). Et le pêcheur de renchérir, « pourquoi aller voter, le temps d'y aller combien de poissons aurais-je manqué »122(*) ? Certainement beaucoup !

Ainsi, le temps mis pour aller voter apparaît encore pour bon nombre de citoyens comme du temps perdu.

Paragraphe 2. La corruption politique et la fraude électorale

Deux situations peuvent expliquer le désintérêt pour ce droit fondamental : la corruption et la fraude électorale.

A. La corruption politique

Le Cameroun a été classé plus d'une fois en tête des pays les plus corrompus de la planète123(*). Aucun secteur de la vie publique n'est épargné. C'est dans ce cadre que s'inscrit le phénomène de la corruption politique.

Il n'est pas rare de voir les électeurs corrompus qui bradent leur droit de vote contre de l'argent et/ou des substances alimentaires124(*). Ce phénomène s'est malheureusement accentué et s'est étendu aux partis politiques. On peut facilement classifier la corruption sous deux formes : la corruption alimentaire selon qu'elle concerne les électeurs et les partis politiques puis la corruption par la promesse selon qu'elle touche l'intelligentsia et la société civile.

Aux termes de notre enquête, les personnes interrogées sur l'existence de la corruption au Cameroun, ont répondu presque unanimement, soit 87, 17%, que celle-ci existe bel et bien et qu'aux dernières élections elle s'est manifestée de la même manière que lors des précédentes. L'exemple qui suit est édifiant à ce titre car il reste d'actualité selon une autre enquête menée à Bayangam en 1994125(*). Lors de la présidentielle de 1992 à l'Ouest Cameroun, à Bayangam, M. André Sohaing, baron du Rdpc distribuait argent, nourriture, pagnes, tricots, etc. aux citoyens. Chaque personne qui se présentait au lieu du partage recevait de deux à cinq litres d'huile de palme, cinq à dix kilogrammes de viande de boeuf, un à cinq kilogrammes de riz, un à trois savons de deux cent cinquante grammes (...) ; on en distribuait dans toutes les associations, etc.

Il convient cependant de prendre cet exemple avec précaution dans la mesure où il y a risque de confusion entre la campagne électorale à « l'africaine » où ce type de comportement, encore que les bénéficiaires de ces dons ne sont liés par aucune obligation de voter pour Sohaing ou son parti, et la corruption qui réclame un résultat immédiat et précis, avec les garde- fous pour en garantir la réalisation.

Plus intéressante sera donc la distribution des billets d'argent le jour du scrutin après vote en faveur du parti ou du candidat corrupteur.

Lors des élections couplées du 30 juin 2002, à Douala, des responsables des partis politiques toutes tendances confondues se sont prêtés à ce jeu.

Un électeur de Deido raconte : « le jour des élections, un billet de banque de 5 000f CFA était offert à quiconque, après son passage dans l'urne venait présenter les bulletins de vote des autres candidats ». Et un autre d'ajouter : « c'était devenu pour tous les jeunes du quartier, en particulier les désoeuvrés un business surtout que l'encre utilisée était non indélébile nous permettant de voter plusieurs fois... »126(*).

La corruption des acteurs électoraux touche aussi bien les responsables des partis politiques que les membres formant l'intelligentsia camerounaise et la société civile. Elle se manifeste notamment par les promesses faites aux uns et aux autres soit pour leur entrée dans le gouvernement soit pour leur promotion à d'autres hautes fonctions de l'Etat ; recteur d'Université par exemple. Il s'en suit que les concernés perdent leur liberté d'esprit et leur indépendance vis-à-vis du pouvoir politique.

Si on s'attarde sur les partis politiques, il ressort qu'au lendemain des dernières élections, les membres de l'opposition réunis autour de John Fru Ndi du Sdf avaient pris la ferme résolution de boycotter leur entrée à l'Assemblée nationale et de ne point siéger dans les municipalités qu'ils avaient gagnées. Tous criaient alors à la fraude généralisée avec un doigt accusateur pointé en direction du parti au pouvoir. Mais très vite l'Upc de F. Augustin Kodock prit tout le monde de court annonçant sur les ondes de la CRTV que son parti allait siéger à l'Assemblée nationale. Cette prise de position lui a valu dans les jours qui ont suivi, sa nomination comme ministre d'Etat chargé de l'Agriculture à la faveur du remaniement ministériel post-électoral. Selon un rapport de Gerddes-Cameroun, la corruption politique est également très courante dans les bureaux de vote. A ce titre, «les mandats des représentants des partis politiques dans les bureaux de vote sont régulièrement échangés contre de l'argent, à des responsables de partis politiques concurrents ». Et de préciser, «il a été fait cas de la corruption des membres des commissions électorales par le versement des sommes d'argent sans reçu »127(*).

Ainsi, vénalité et corruption transforment le droit de vote en une marchandise, en un vote alimentaire et non en un choix libre conscient et désintéressé. Elles consacrent la politique du « ventre ». Au-delà de la corruption, la fraude électorale vide le droit de suffrage de toute sa substance, dénature les résultats des élections et donnent au droit de vote un caractère purement fictif.

B. La fraude électorale

Parler de la fraude électorale au Cameroun apparaît comme un exercice bien simple. Elle se manifeste sous plusieurs formes et emporte des conséquences incalculables.

Comme pour la corruption, les enquêtés de Douala, Edéa, et Yaoundé n'ont pas hésité à nous affirmer lors de nos entretiens que la fraude électorale est la chose la plus partagée au Cameroun. Ainsi, 79,48% ont soutenu l'existence de ce fléau comme l'indique le graphique ci-dessous.

Graphique n°7 illustrant l'existence de la corruption politique au Cameroun

(Source : graphique établi par l'auteur)

L'un d'entre eux a déclaré : « c'est comme si l'Administration savait ce qu'elle faisait. C'est à dessein qu'elle a autorisé l'utilisation de l'encre non indélébile car, cela a favorisé de nombreux citoyens détenteurs de plusieurs cartes de vote, de voter plusieurs fois ». Un autre plus précis a ajouté que : « parmi les cas de votes multiples par le même électeur, le cas le plus frappant a été celui de M. Blaise Sama, président du centre de vote `'Ecole privée petit monde''. Cet électeur a voté quatre fois dans le bureau dont il avait la supervision, notamment les bureaux de vote n°285 b, 286 c, 284 a, et 292 i situés dans l'enceinte de l'école précitée à Douala ». De tels exemples sont légion. Ils sont si nombreux qu'il est difficile dans le cadre d'un travail comme celui qui nous intéresse de s'y étendre abondamment. Ce serait en tout cas risquer de traiter de la fraude électorale au Cameroun.

Il convient simplement de relever que ce fléau constitue une véritable préoccupation tant les conséquences qu'il génère sont dommageables pour la société toute entière. Empêcher la fraude devient ainsi un objectif fondamental de tout système de réglementation des partis politiques et des candidats. Lorsqu'elle est généralisée, elle jette le doute sur le sérieux du processus électoral et terni la démocratie elle-même. Elle est d'autant plus dangereuse que si l'on n'y prend garde, elle s'intègre dans les habitudes des citoyens, traverse le cadre électoral pour affecter tout le tissus social. Le Cameroun faut-il le souligner, en souffre très profondément. Il n'y a qu'à voir ce qui se passe aujourd'hui dans les lycées et les universités. Le mérite a cédé la place à la médiocrité qui se nourrit abondamment de la sève que lui sert gracieusement la fraude.

Au-delà, l'institutionnalisation de la fraude pousse à choisir des dirigeants moins doués, des gouvernants peu expérimentés au grand dam des objectifs globaux que la Nation s'est fixés et qui requièrent aux hommes appelés à les réaliser une bonne dose d'expertise et de savoir-faire. La fraude tue ni plus ni moins l'ensemble de la société et peut aboutir à la fracture sociale, aux revendications de toutes sortes, à l'instabilité voire à la guerre civile à cause du profond décalage entre les gouvernants et les gouvernés.

CONCLUSION GENERALE

Les progrès réalisés par le Cameroun sur la voie du perfectionnement de son processus électoral sont encourageants depuis l'instauration de la démocratie et le retour du multipartisme au début de la décennie 90.

Des changements intervenus dans l'infrastructure normative et institutionnelle du cadre électoral ont en effet permis à ce pays de ne pas rester à la remorque de la modernisation du chantier politique. Peu importe la manière dont ces changements sont intervenus et le rythme qui les ont caractérisé. Au bout du compte, les populations du nord au sud, de l'est à l'ouest s'en tirent à bon compte. Le climat de paix, chère à la dynamique de toute démocratie en construction existe bel et bien et traduit sans doute l'acceptation, par une frange importante de la société, que l'évolution démocratique est en bonne voie. C'est bien pour cette raison que les réformes sus-indiquées, plus que par le passé, ont mis l'accent sur la participation qui se traduit par l'implication de toutes les forces politiques et sociales au processus électoral camerounais qui est notre objet - que ce soit dans les travaux au sein des Commissions chargées des tâches électorales, de l'inscription à la proclamation des résultats, que ce soit dans le contrôle même - à tous les différents stades de ce processus, des opérations électorales.

Mais il ne faut pas cependant croire que tout est pour le mieux. Le Cameroun n'est pas encore un pays démocratique au sens strict du terme. Au-delà de l'inflation juridique qui caractérise son système électoral, lequel est respectueux d'un certain nombre de principes directeurs128(*) qui constituent la force et la fierté des pays dits modernes, il manque encore au Cameroun la culture politique de ses membres. De la sorte, l'Administration garde une responsabilité importante dans ce déficit de culture démocratique, car son action en dix années d'apprentissage de la démocratie est restée plus qu'entravante à l'exercice des droits politiques au Cameroun, en particulier le droit de vote en tant que droit de l'homme incarné en chaque citoyen.

L'Administration s'est en effet discréditée dans le domaine des inscriptions des citoyens sur les listes et la distribution des cartes électorales, opérations considérées comme l'unique voie sans laquelle personne ne peut exprimer son droit électoral. D'où notre attention sur l'importance de cette question qui affecte sérieusement la communauté nationale.

Avec un taux de participation qui est passé de 89% aux élections de 1992 à 39% aux élections de 2002129(*), il y a fort à parier qu'un travail minutieux reste à faire pour garantir et restituer aux citoyens leur droit de vote.

Dans cette perspective, il nous est apparu utile de conduire la réflexion sous deux angles.

D'une part, l'automatisation du système d'inscription sur les listes électorales apparaît comme une première solution. Non seulement, elle rend le travail moins pénible, accroît la vitesse d'exécution des tâches électorales, mais facilite en même temps le contrôle, la vérification puis le redressement de multiples erreurs qui peuvent se présenter.

Le Cameroun reste sur ce point un nain politique au moment où l'informatisation du fichier électoral ne constitue plus ailleurs une préoccupation. En tout cas, l'introduction de l'outil informatique dans le système électoral camerounais comporte sans doute de nombreux avantages. Il reste que ce sont les mêmes personnes qui vont le manipuler et que les erreurs voulues ou non ne sont pas à exclure.

La France, en recourant à ce système depuis fort longtemps a cependant confié la tâche relative aux inscriptions et à la distribution des cartes électorales, aux maires qui détiennent l'état civil de tous les citoyens. En conséquence, le maire, chaque année, établit une carte électorale pour tout électeur nouvellement inscrit sur les listes électorales des bureaux de vote de la Commune130(*). On voit sans doute le souci du législateur français de faciliter la procédure d'inscription sur la base de supports pré-existants que sont les souches d'actes de naissances des candidats à une inscription ; ce qui limite aussi le vote des étrangers.

Ce système, intéressant à plus d'un titre, ne peut malheureusement fonctionner comme tel au Cameroun au point de s'en inspirer à cause du cafouillage ambiant qui caractérise la tenue d'actes de naissance dans la presque totalité des municipalités. En 1990, plusieurs bâtiments abritant les mairies ont été, pendant la dure période des villes mortes, soit saccagés soit simplement incendiés. C'est le cas par exemple de la Commune urbaine de Foumban.

Au Cameroun il convient donc, tout en laissant aux autorités administratives le soin de continuer à assumer les tâches d'inscription sur les listes ainsi que la distribution des cartes électorales, de les lier de façon que les « tripatouillages » et toutes les autres formes d'exclusion des citoyens dont elles sont accusées à tort ou à raison soient inutiles.

Ainsi à côté de l'informatisation du fichier électoral, l'urgence commande que le ministère de l'Administration territoriale et de la décentralisation, maître d'oeuvre des élections au Cameroun, conçoive désormais des carnets à souche tenant lieu de récépissés suivant le modèles en annexe131(*), les remet ensuite aux présidents des Cours et tribunaux qui les paraphent avant leur mise à disposition aux autorités administratives en charge des inscriptions. Une fois qu'un citoyen sollicite son enregistrement dans le fichier électoral, il lui sera remis un récépissé dont le numéro sera celui qui devra figurer sur sa carte électorale. A ce niveau, deux situations doivent être considérées : l'établissement immédiat de la carte électorale et sa remise à l'intéressé au moment de l'inscription. Cette hypothèse est avantageuse parce qu'elle limite les discriminations liées à la distribution des cartes électorales post-inscriptions. Mais dans une circonscription qui compte des centaines de milliers d'électeurs, il sera bien difficile de satisfaire tout le monde au même moment. C'est ce qui justifie ici l'importance de la deuxième hypothèse relative à la délivrance du récépissé en tant que garantie de l'inscription et du vote. En ce sens, la loi électorale devra nécessiter une révision profonde faisant clairement apparaître que le récépissé en question tient lieu de carte électorale au cas où celle-ci, pour une raison ou une autre, n'aura pas été établie puis délivrée à l'électeur dans les délais impartis par la loi. Sur cette base, le vote le jour du scrutin sera alors ouvert à ce dernier sans autre forme de procédure.

Ainsi entendu, le récépissé devra contenir les mentions suivantes : outre les noms, prénoms, l'âge et la résidence de l'électeur, mais aussi les indications précises concernant son bureau de vote, en particulier l'appellation de celui-ci et son lieu d'implantation.

A partir de ce moment, le Cameroun pourra enfin franchir un grand pas vers la modernisation et la démocratisation de son processus électoral puis conforter les acquis de paix et de stabilité qui caractérisent encore ses institutions.

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TITI NWEL, Pierre (dir.), De la corruption au Cameroun, Gerddes-Cameroun, Yaoundé

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VAN DE WALLE, Nicolas et SMIDDY, Kimberly, «Partis politiques et systèmes de partis

dans les démocraties "non libérales" africaines », in L'Afrique politique 2000,

Karthala, Paris, 2000, pp. 41-57.

B - Articles de journaux

BATONGUE, Alain Blaise, «Célestin Bedzingui : arrêtons de jouer avec le feu », in

Mutations, N°693 du vendredi 5 juillet 2002, p. 4.

EKWE, Henriette, «Douala, vaste théâtre de la fraude », in La Nouvelle Expresse, N°982 du

lundi 1er juillet 2002, p. 5.

KALA LOBE, Suzanne, « La fracture », in La Nouvelle Expresse, N°982 du

lundi 1er juillet 2002, p. 5.

MEYANGA, Simon, « Système électoral : le tournant de la modernisation », L'Action,

N°247 du 6 au 12 novembre 2001, p. 15.

NGADOU, Gabriel, «Fraude électorale : Jean Jacques Ekindi saisit la Cour suprême », La

Nouvelle Expression, N°984 du vendredi 5 juillet 2002, p. 6.

III - Mémoire

TOULOU, Fidel Lucien, La pensée politique de l'opposition camerounaise (Discours des

leaders et perspectives de changement), Mémoire de maîtrise en sciences sociales,

Ucac, Yaoundé, 1998, 134 p.

IV - Textes juridiques et autres documents

A - Textes juridiques

Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948, in LAGELEE, Guy

et MANCERON, Gilles, La conquête mondiale des droits de l'homme, Le cherche

de midi/Ed. Unesco, s. l., 1998, pp. 144-150.

B - Autres documents

MINEDUC, Stratégie du secteur de l'Education, S. éd., Yaoundé, juin 2001, 77 p.

OLINGA, Alain Didier, L'Onel (Réflexion sur la loi camerounaise du 19 décembre 2000
portant création d'un Observatoire national des élections, PUCAC, Yaoundé, 2002,
74 p.

ANNEXES

Annexe 1.
QUESTIONNAIRE

I - IDENTIFICATION DU SUJET

1a - Age :

1b - Sexe :

1c - Province d'origine :

1d - Ethnie :

1e - Quartier de résidence :

1f-Niveau scolaire ............................................................................................. 

1g - Situation familiale :Marié(e) Divorcé(e) Célibataire Concubin(e) Veuf(ve)

1h - Nombre d'enfants :

I. Le taux de participation

1. 1. Le taux de participation des élections au Cameroun depuis 1992 est-il en hausse ? Oui Non

§ Autres (à préciser)--------------------------------------------------------------------------------

Si oui, pourquoi ? (justifiez votre réponse )------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Comment faire pour y remédier ? ------------------------------------------------------------------------2. Les inscriptions sur les listes électorales

2. 1. les inscriptions sur les listes électorales vous paraissent-elles discriminatoires ? Oui Non

Si oui, comment se manifeste cette discrimination ? Et qu'y a-t-il lieu de faire pour la faire cesser ?--------------------------------------------------------------------------------------------------------

2. 2. lorsque vous éprouvez des difficultés à obtenir votre inscription sur les listes électorales ou simplement qu'on vous la refuse, que faites-vous ?----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

3. La distribution et la confection des cartes électorales

3. 1. qui est chargé de la confection des cartes électorales ?---------------------------------

3. 2. Qui en assure la distribution ? Où ?-------------------------------------------------------- 3. 3. Cette distribution vous paraît-elle satisfaisante ? Oui Non

Si non, comment faire pour remédier à la situation ? --------------------------------------------------

3. 4. les opérations de distribution et de confection des cartes électorales sont-elles permanentes comme le sont les inscriptions ? Oui Non

Si non, que suggérez-vous ?------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

3. 5. Quelle attitude adoptez-vous lorsque vous avez pas reçu votre carte de vote ?-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

4. Le financement public des partis politiques et de la campagne électorale

4. 1. La répartition des fonds alloués aux partis politiques vous paraît-elle équitable ? Oui Non

Quel est le mode de répartition qui vous semble juste ? Pourquoi ?-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Savez-vous d'où proviennent ces fonds et leur montant ? Oui Non

A précisez---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

4. 2. la répartition des fonds de campagne est-elle équitable ? Oui Non

Justifiez votre réponse--------------------------------------------------------------------------------------5. L'accès aux médias

5. 1. Le traitement des partis politiques est des candidats dans l'accès aux médias officiels respecte-t-il les exigences d'équité et d'égalité ? Oui Non

Si non, que proposez-vous ?------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

5. 2. Selon vous, les médias de la presse privée s'implique-t-il sérieusement dans la couverture des élections ? Oui Non

Quel jugement portez-vous sur leur travail ?------------------------------------------------------------ 6. Les partis politiques

6. 1. Combien de partis politiques existe-t-il à l'heure actuelle au Cameroun ?-----------

(NB. donnez le nombre)

6. 2. Quel est le rôle d'un parti politique ?-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

D'après le rôle ainsi défini, pensez-vous que les partis politiques remplissent pleinement leurs missions ? Oui Non

Si non, quelles peuvent en être les causes ?------------------------------------------------------------- Quelles peuvent en être les conséquences ?-------------------------------------------------------------

6. 3. Faut-il limiter le nombre de partis politiques au Cameroun ? Oui Non

Pourquoi ?---------------------------------------------------------------------------------------------------- 7. La justice et le processus électoral

7. 1. au Cameroun la justice est-elle neutre en matière électorale ? Oui Non

Qu'en savez-vous ? (donnez quelques exemples)------------------------------------------------------

7. 2. la justice doit-elle prononcer l'annulation d'une élection sur la base du caractère non-indélébile de l'encre ? Oui Non

Quels sont les arguments qui soutiennent votre choix ?----------------------------------------------- 8. Les fraudes électorales

8. 1. Y a-t-il eu selon vous fraudes électorales au Cameroun au cours des élections du 30 juin 2002 ? Oui Non

Si oui, sous quelles formes se sont-elles manifestées ?(énumérez-les)------------------------------

8. 2. Comment définissez-vous la fraude ?----------------------------------------------------- 8. 3. La répression de la fraude électorale existe-t-elle au Cameroun ? Oui Non

Si oui, cette répression vous paraît-elle satisfaisante ? (justifiez votre réponse)------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Si non, quels sont les moyens de lutte qui vous paraissent efficaces ?------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------ 9. La corruption électorale

9. 1. Comment définissez-vous la corruption électorale ?-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

9. 2. La corruption électorale existe-t-elle au Cameroun ? Oui Non

Si oui, comment se manifeste-t-elle ?(citez quelques exemples si vous en connaissez et les lieux où elles se sont produites)-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Comment peut-on faire pour combattre la fraude électorale au Cameroun ?----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

10. Le droit de vote

10 .1. Qu'entendez-vous par droit de vote ?---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

10 2. Le droit de vote est-il reconnu au Cameroun ? Oui Non

10.3. Le droit de vote est-il garanti au Cameroun ? Oui Non

Justifiez votre réponse-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------11. Avez-vous voté lors des dernières élections ? Oui Non

Justifiez votre réponse--------------------------------------------------------------------------------------

12. Le processus électoral se définit comme un ensemble d'opérations électorales qui concourent au choix des élus, voyez-vous à partir de cette définition une différence notable entre le processus électoral actuel et celui qui a eu cours avant 1992 ? Oui Non

Si oui, qu'est-ce qui a fondamentalement changé à vos yeux ? Au plan normatif ? au plan institutionnel ?---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- (NB. relevez au besoin les avantages les plus significatifs)

Si non, cela veut dire que le processus électoral actuel est à parfaire et qu'il existe des entraves à combattre ; quels sont ces entraves ?(les énumérer)-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Comment faire pour garantir l'exercice du droit de vote au Cameroun ?--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Avez-vous une suggestion d'ordre général a émettre à l'attention des pouvoirs publics en vue de moderniser le processus électoral au Cameroun au regard des valeurs attachées à la démocratie et à l'état de droit ?---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Annexe 2.

Annexe n°3.

Annexe 4.
Annexe n°5.
Modèle d'attestation d'inscription tenant lieu de carte électorale

______________

[Paraphe président du Tribunal]
Nom : .........................................................................................................
Prénoms : ...................................................................................................
Né le : .........................................................................................................
Domicile ou résidence : ...................................................................................
A déclaré avoir perdu la carte électorale qui lui avait été délivrée.
Le sous-préfet ..............................................................................................
(indication du nom de la circonscription)
atteste que l'intéressé est inscrit sur la liste électorale du bureau de vote n° ..................
sous le n° ..................................... et que ce bureau de vote est situé à l'adresse suivante :
....................................................................................................................................................................................................................................
A, ..............................le ..................................

(Cachet de la Sous-préfecture ou du District.) Le sous-préfet, TABLE DES MATIERES

Remerciements............................................................................................2

Abréviations................................................................................................3

SOMMAIRE...............................................................................................4

RESUME/MOTS CLES.......................................................................................................6

SUMMURY/KEYWORDS....................................................................................................7

INTRODUCTION GENERALE......................................................................8

PREMIERE PARTIE.

LE PROCESSUS ELECTORAL CAMEROUNAIS : DES PROGRES ETHIQUES CONSIDERABLES....................................................................................21

Chapitre 1. La dynamique de progrès du processus électoral à travers la phase pré-électorale.................................................................................................22

Section . Les opérations préliminaires du processus électoral......................................22

Paragraphe I. Les opérations préliminaires permanentes...........................................22

A. L'inscription sur les listes électorales..............................................................22

B. La distribution des cartes électorales...............................................................24

Paragraphe 2. Les opérations préliminaires conjoncturelles.......................................25
A. La fixation de la date des élections et la convocation du corps électoral.....................25
B. Le dépôt de candidature..............................................................................27

C. La consultation des listes électorales et des bureaux de vote....................................30

Section 2. La campagne électorale......................................................................30

Paragraphe I. Les procédés anti-démocratiques.......................................................31

A. Les procédés prohibés................................................................................31

B. Les procédés condamnables.........................................................................32

Paragraphe 2. Les procédés démocratiques...........................................................33

A. Les moyens classiques...............................................................................33

B. Les moyens audiovisuels.............................................................................34

Chapitre 2. la dynamique du processus électoral a travers les phases électorale et post-électorale..................................................................................................37

Section 1. La phase électorale...........................................................................37

Paragraphe 1. Les opérations matérielles de vote....................................................37

A. L'exigence de sécurité................................................................................37

B. La mise entre parenthèses de la fraude.............................................................39

Paragraphe 2. Les opérations de dépouillement......................................................40
A. La préparation et la transmission du procès verbal de dépouillement à l'échelon local.....41
B. La préparation et la transmission du procès verbal de dépouillement à l'échelon national.42
Section 2. la phase post-électorale.....................................................................43

Paragraphe 1. Le contentieux des opérations préparatoires à élection............................43

A. Le contentieux de l'électorat........................................................................44

B. Le contentieux des candidatures.....................................................................46

C. Le contentieux des couleurs, sigles et symboles..................................................48

Paragraphe 2. Le contentieux de l'élection............................................................49

A. Le contentieux de la campagne électorale.........................................................49

B. Le contentieux des opérations électorales et de la proclamation des résultats...............51

DEUXIEME PARTIE

LES LIMITES DU PROCESSUS ELECTORAL CAMEROUNAIS.........................54

Chapitre 3. Les obstacles émanant de l'Administration........................................55
Section 1. La nature des obstacles a l'exercice du droit de vote inhérentes a l'Administration..........................................................................................55
Paragraphe 1. Les limites institutionnelles............................................................55

A. Le rôle prépondérant de l'Administration territorial.............................................55

B. Le fonctionnement des organismes de contrôle des élections : les Commissions mixtes et l'Onel......................................................................................................59

Paragraphe 2. Les limites conjoncturelles............................................................62

A. Le financement de la vie politique..................................................................62

B. L'accès aux médias...................................................................................67

Section 2. L'épineux problème des inscriptions et de la distribution des cartes électorales...70

Paragraphe 1. La limitation à l'exercice du droit de vote imposée par l'inscription sur les listes électorales..................................................................................................70

A. Le caractère discriminatoire des inscriptions......................................................70

B. Le non respect de l'esprit de la loi..................................................................74

Paragraphe 2. La limitation à l'exercice du droit de vote imposée par la distribution des cartes électorales et l'emplacement des bureaux de vote...................................................76

A. La limitation liée à la distribution des cartes électorales........................................76

B. L'emplacement des bureaux de vote...............................................................78

Chapitre 4. les entraves sociologiques à l'exercice du droit de vote...........................80

Section 1. Les entraves inhérentes aux citoyens et aux formations politiques...................80

Paragraphe 1. La responsabilité des citoyens.........................................................80

A. La résignation..........................................................................................80

B. L'illettrisme et l'analphabétisme....................................................................83

Paragraphe 2. La responsabilité des partis politiques................................................85

A. Le déficit d'encadrement des membres et des électeurs.........................................85

B. L'extrême dépendance et le manque de cohésion des partis....................................87

Section 2. Les entraves émanant de la société........................................................90

Paragraphe 1. La culture, la pauvreté et le « réalisme » comme causes de limitation du droit de vote.........................................................................................................91

A. Le poids des us et coutumes.........................................................................91

B. La pauvreté et le « réalisme »........................................................................94

Paragraphe 2. La corruption politique et la fraude électorale.......................................95

A. La corruption politique...............................................................................95

B. La fraude électorale...................................................................................97

CONCLUSION GENERALE.......................................................................100

BIBLIOGRAPHIE....................................................................................104

ANNEXES..............................................................................................108

Questionnaire............................................................................................108

Loi n°2000/015 du 19 décembre 2000 relative au financement public des partis politiques et des campagnes électorales.............................................................................113

Loi n°2000/016 du 19 décembre 2000 portant création d'un Observatoire national des élections..................................................................................................117

Arrêté n°013/Mincom/Cab du 11 juin 2002 déterminant l'ordre de passage et fixant le temps d'antenne imparti aux partis politiques dans le cadre des émissions relatives à la campagne électorale en vue de l'élection des députés à l'Assemblée nationale et des Conseillers municipaux du 23 juin 2002...........................................................................124

Modèle d'Attestation d'inscription tenant lieu de carte électorale...............................132

TABLE DES MATIERES...........................................................................133

* 1 S. Nkaifon Pefura, Le Cameroun, du multipartisme au multipartisme, L'Harmattan, 1996, quatrième de couverture.

* 2 La Constitution du 18 janvier 1996 prévoit les élections des sénateurs et des Conseillers régionaux. Jusqu'ici celles-ci n'ont pas encore été organisées au Cameroun.

* 3 Cf. Communiqué de presse publié par le quotidien Cameroon Tribune, n°7626/3915 du 27 juin 2002, p.4.

* 4 Cf. Communiqué du Secrétaire général de l'Undp, in Cameroon Tribune, n°7632/3921 du 5 juillet 2002, p.4.

* 5 Cf. La Nouvelle Expression, n°984 du 5 juillet 2002, p. 9.

* 6 A. D. Olinga, L'Onel (Réflexion sur la loi camerounaise du 19 décembre 2000 portant création d'un Observatoire national des élection), Pucac, 2002, 4ème de couverture.

* 7 Dictionnaire encyclopédique Petit Larousse illustré, Larousse, 1993, p. 824.

* 8 Dictionnaire de la science politique et des institutions politiques, Colin, pp. 93-94.

* 9 A. D. Olinga, « Contentieux électoral et état de droit au Cameroun », in Juridis Périodique, n°41, 2000, p. 35.

* 10 M. Beaud, L'art de la thèse, La Découverte, 1997, p.32.

* 11 Le Robert, Dictionnaire alphabétique et analytique de la langue française, SNL Le Robert, 1988, p. 650

* 12 Sur la question, lire M. Grawitz, Méthodes des sciences sociales, Dalloz, 1996, p. 380.

* 13 A. Grosser, L'explication politique, Editions complexe, 1984, p. 37.

* 14 Soit 9 personnes à Edéa, 15 à Douala et 15 à Yaoundé. Il va sans dire qu nous avons opté pour une enquête de qualité et non de quantité pour justifier la taille de notre population d'étude. De même, il s'est dégagé au cours de cette enquête un effet de saturation, c'est-à-dire les réponses aux questions étaient quasi-identiques. Sur cette base, il n'était plus utile d'agrandir notre échantillon.

* 15 Les qualités requises par la loi concernent la capacité électorale, les conditions de résidence, l'inscription au rôle des contributions directes dans la circonscription pour la cinquième année consécutive, etc.

* 16 La loi électorale apporte très peu de précisions sur l'autorité qui décide de la question sur la radiation. Mais dans la pratique, ce sont les sous-préfets, les chefs de districts qui assument ce rôle.

* 17Cf. loi n°97/006 du 10 janvier 1997 fixant la période de révision et de refonte des listes électorales. L'art. 1er de cette loi stipule que : «la révision annuelle ou, le cas échéant, la refonte des listes électorales, commence le 1er janvier et s'achève le 31 décembre de chaque année sur l'ensemble du territoire national ». Quant à l'article 2, al. 1 et 2, il stipule que : « par dérogation aux dispositions de l'article 1er ci-dessus, la révision annuelle ou la refonte des listes électorales est suspendue à compter de la date de convocation du corps électoral ; dans ce cas la révision ou la refonte des listes électorale est reprise le jour suivant immédiatement après la date de tenue du scrutin concerné ».

* 18 Cf. art. 1 et 2 loi n°97/006 du 10 janvier 1997 fixant la période de révision et de refonte des listes électorales.

* 19 Cette Commission comprend :

Président : un représentant de l'Administration, désigné par le Préfet

Membres : le maire, un adjoint au maire ou un conseiller municipal désigné par le maire ; un représentant de chaque parti politique présent sur le territoire de la circonscription électorale. Elle est valable aux trois élections.

* 20 Tout électeur inscrit reçoit une carte d'électeur sur laquelle figurent obligatoirement ses noms, prénoms, date de naissance, filiation, profession, domicile ou résidence.

* 21 Cet article indique que si le président de la République est décédé, a démissionné ou en cas d'empêchement définitif constaté par le Conseil Constitutionnel, le scrutin pour l'élection du nouveau président de la République doit impérativement avoir lieu vingt jours au moins et cinquante au plus avant l'expiration des pouvoirs du président en exercice.

* 22 L'article 14 al. 1 de la Constitution révisée du 18 janvier 1996 a doté le Cameroun d'un parlement bicaméral constitué de l'Assemblée nationale et du Sénat. Cette dernière structure n'est malheureusement pas encore fonctionnelle.

* 23 Voir lettre mensuelle de réflexion et de promotion no 84 publiée par le Secrétariat d'A. Eyinga en décembre 1998.

* 24 Le dossier de la déclaration de candidature comporte pour les trois élections les mêmes conditions générales. La déclaration doit mentionner : les noms, prénoms, date et lieu de naissance, filiation, profession, domicile des candidats, le titre de la liste et les partis politiques auquel il se rattache, le signe choisi pour l'impression du bulletin de vote, ou pour identifier le parti, le nom du mandataire, candidat ou non et l'indication de son domicile. Cette liste des pièces doit s'accompagner d'un extrait d'acte de naissance datant de moins de trois mois, d'une déclaration par laquelle l'intéressé certifie sur l'honneur qu'il n'est candidat que sur cette liste et qu'il ne se trouve dans aucun des cas d'inéligibilité prévue par la loi. En fin, le candidat doit présenter un extrait de cassier judiciaire et un certificat d'imposition.

* 25 Il s'agit du préfet, sur la base du caractère incomplet du dossier du candidat prévu à l'article 22 (b) de la loi ayant trait aux élections municipales. Le préfet garde cette plénitude de compétence sur toutes autres élections, exceptées celles sénatoriales et des conseillers régionaux dont les textes d'application sont encore attendus.

* 26 La loi électorale reste imprécise sur cette question. On peut cependant appréhender l'autorité administrative compétente dans le sens restreint du terme généralement attribué aux chefs de circonscriptions administratives que sont les préfets, sous-préfets, les chefs de districts. On est ainsi fondé sur la pratique camerounaise.

* 27 Cf. article 55 alinéa 1 de la loi fixant les conditions d'élection des députés et article 39 alinéa 1 de la loi fixant les conditions de l'élection présidentielle

* 28 Cinq jours pour les élections municipales et législatives et huit jours pour ce qui est de l'élection présidentielle

* 29 Cf. l'article 94. al 2 de la loi relative aux élections des députés à l'Assemblée nationale.

* 30 Cf. article L.50 du Code électoral.

* 31 Selon J.-M. Denquin, cette expression est demeurée attachée au souvenir du second empire mais la pratique s'est étendue au-delà (Cf. J. M. Denquin, Les droits politiques (Libertés et droits fondamentaux), Paris, Montchretien, 1996, p. 163).

* 32 Idem, p. 164.

* 33 L'article 70 de la loi fixant les conditions d'élection et de suppléance à la présidence de la république interdit tout affichage public, même par affiche timbrée, relatif à l'élection en dehors de ces emplacements, aussi bien pour les candidats que pour toute autre personne ou groupement. Il en est de même pour les affiches ou inscriptions apposées dans un lieu ouvert au public ou bien dans un local privé si elles n'y sont pas placées par le propriétaire du local.

* 34 Cf. F. Toulou, La pensée politique de l'opposition camerounaise (Discours des leaders et perspectives de changement), Mémoire de maîtrise en sciences sociales, Ucac, 1998, p. 20.

* 35 Cf. Arrêté n°012/Mincom/Cab/ du 7 juin 2002 fixant les conditions de production, de programmation et de diffusion des émissions relatives à la campagne électorale en vue de l'élection des députés à l'Assemblée nationale et des Conseillers municipaux du 23 juin 2002. Il convient de préciser que cette réglementation intervient à l'annonce de chaque élection dans les cadres définis par la loi n°2000/015 du 19 décembre 2000 relative aux financement public des partis politiques et des campagnes électorales.

* 36 On peut citer le cas de TV Max et Canal 2 à Douala, les Radios Lumière, RTS, Reine, Magic FM, etc. à Yaoundé.

* 37 L'assise populaire ici, intègre le nombre de circonscriptions dans lesquelles les partis en compétition présentent les candidats, la représentation de ces partis à l'Assemblée nationale aux termes des dernières consultations électorales est dans une large mesure de leur implantation territoriale.

* 38 Cf. article 117 de la loi sur les élections législatives. Article 112 de la loi relative à l'élection du président de la République.

* 39 Voir article 123 du Code pénal camerounais.

* 40 Il s'agit de : ceux qui, par dons, libéralités, faveurs, promesses d'octroi d'emplois publics ou privés ou d'autres avantages particuliers faits en vue d'influencer le vote de l`un ou de plusieurs électeurs obtiennent leur suffrage soit directement, soit par l'entremise d'un tiers ; ceux qui, directement ou par l'entremise d'un tiers, acceptent, ou sollicitent des candidats des dons, libéralités, faveurs ou avantages cités ci-dessus ; ceux qui, par voies de fait, violences ou menaces contre un électeur, soit en lui faisant craindre de perdre son emploi, d'exposer à un dommage sa personne, sa famille ou sa fortune, influencent son vote.

* 41 Cf. art. L.64. du Code électoral français.

* 42 Cf. art. L 71 du Code électoral français qui autorise l'usage de la procuration aux conditions suivantes . les électeurs qui établissent que des obligations dûment constatées les placent dans l'impossibilité d'être présent dans leur Commune d'inscription le jour du scrutin ; ceux qui appartiennent à la catégorie des personnes qui ne peuvent se déplacer pour des raisons médicales, professionnelles (gardiens de phare) ou parce qu'ils sont incarcérés sans pour autant être privés de leur droit de vote ; ceux qui ont quitté leur résidence habituelle pour prendre des vacantes.

* 43 Cf. article 110 de la loi fixant l'organisation des élections législatives.

* 44 Ce procès verbal intègre les documents suivants : les bulletins nuls et leur nombre ; les feuilles de décompte ; les objections soulevées lors du décompte des voix et la décision prise par la Commission locale de vote.

* 45 Cf. art. 12 al. 2 de la loi relative aux élections municipales.

* 46 Cf. art. 48 al. 1 de la Constitution du 18 janvier 1996.

* 47 M. Kamto, «Le contentieux électoral au Cameroun », in Lex Lata, n°20, novembre 1995, p. 3.

* 48 Le terme électorat désigne d'une manière générale le corps électoral, qu'il s'agisse de l'ensemble des électeurs sur l'ensemble territoire national ou seulement ceux d'une circonscription déterminée ( M. Kamto, op. cit. p. 3).

* 49 Cf. article 2 al. 3 de la Constitution du 18 janvier 1996 et l'article 11 de la loi sur les élections des députés à l'Assemblée nationale.

* 50 M. Kamto, op. cit., p. 3.

* 51 Au terme de cet article, cette Commission : contrôle les opérations d'établissement, de conservation et de révision des listes électorale, connaît toutes les réclamations ou contestations concernant les listes et les cartes électorales, assure le contrôle de la distribution des cartes électorales, ordonne toutes rectifications rendues nécessaires à la suite de l'examen, par elle, des réclamations ou contestations dirigées contre les actes de l'autorité administrative concernant les listes et les cartes électorales. Elle connaît aussi des contestations et du contentieux portant sur les candidatures et le comportement des candidats ou leurs représentants en période électorale, centralise et vérifie les opérations de décompte des votes effectuées par les Commissions locales, proclame les résultats des élections au niveau de la circonscription électorale.

* 52 La Commission départementale de supervision poursuit les mêmes missions que la Commission communale de supervision. Sauf qu'au contraire de cette dernière elle ne proclame pas les résultats des élections.

* 53 Il s'agit des mêmes attributions que celles que nous venons d'énoncées. Il convient à cet égard d'obser4ver que la Commission départementale de supervision intervient dans les seules cadres des élections législative et présidentielle et qu'à ce titre, ses travaux son adressés à la Commission nationale de recensement général de vote après avoir obtenu la régularisation par les membres de la Commission locale de vote de toutes ou vice de forme constatés.

* 54 En 1994, Kago Lélé a demandé son inscription sur les listes électorales de Bafoussam. Cette inscription lui ayant été refusée, il a saisi la Commission communale de supervision. Mais celle-ci a rejeté sa requête parce que, disait-elle, l'intéressé vit à Yaoundé. D'où la saisine par ce dernier de la Cour d'Appel de Bafoussam qui a fait droit à sa requête après avoir démêlé la confusion entre les notions de domicile et de résidence. A cet égard, le sieur Kago dont la plupart des activités se trouvent dans cette commune et qui a justifié d'un certificat de domicile dûment établi par l'Administration a été reconnu domicilié, lui et toute sa famille, c'est-à-dire femme et enfants, à Bafoussam.

* 55 Cf. l'article 78 de la loi fixant les conditions d'élection des députés à l'Assemblée nationale et l'article 26 de la loi relative aux élections des Conseillers municipaux disposent, dans les termes similaires.

* 56 Cf. article 79 al. 1 de la loi concernant l'élection des députés.

* 57 Cet article stipule que « le recours est porté, dans un délai de cinq jours suivant la notification devant la Commission communale de supervision ».

* 58 Les contestations ou les réclamations relatives au rejet ou à l'acceptation des candidatures( ...) sont soumises à l'examen du Conseil constitutionnel par tout candidat, tout parti politique ayant pris part à l'élection ou toute personne ayant qualité d'agent du Gouvernement pour ladite élection, dans un délai maximum de deux (02) jours suivant la publication des candidatures.

* 59 Dans cette affaire, l'Undp a demandé l'annulation de l'élection législative du 30 juin 2002 dans la circoncription du Mbam et Inoubou. Le recours introduit devant le Conseil constitutionnel a porté sur l'expulsion et l'interdiction de ses représentants dans les bureaux de vote sur ordre des autorités administratives et des dignitaires du Rdpc, le bourrage des urnes, les votes multiples, la délocalisation des bureaux de vote dans des domiciles privés, etc. Mais, l'Undp n'a pas apporté de preuve ou commencement de preuves à des irrégularités dénoncées. Le Conseil constitutionnel a donc déclaré ce recours non fondé.

* 60 Dans cette affaire, Dr. Tabi Owono Joachim alors Président de l'Amec a saisi le Conseil constitutionnel pour demander l'annulation de l'élection législative du 30 juin 2002 dans la circonscription du Nyong et So'o à Mbalmayo. Il soutenait que le jour du scrutin il a été mis à la disposition des électeurs du Nyong et So'o des bulletins de vote de couleur blanche alors qu'il avait battu campagne avec des bulletins de couleur jaune choisis pour sa liste. Ce changement de couleur intervenu le jour même du scrutin a créé la confusion avec les bulletins de vote du Rdpc traditionnellement de couleur blanche et a de ce fait, désorienté son électorat en majorité illettré. A la suite de cette affaire, la Cour constitutionnelle a annulé les élections dans cette circonscription.

* 61 Au terme de cet article : «  il est crée une Commission nationale de supervision de couverture médiatique de la campagne électorale (Cnsc) ». C'est un organe ad hoc chargé du suivi et du contrôle de la régularité des émissions relatives à la campagne électorale (...). Il veille au respect des principes d'équité et d'égalité d'accès et de traitement des partis politiques (...) assure la prise en charge des recommandations du conseil national de la communication relatives au respect de ces principes ».

* 62 Le 4 juillet 2002, sieur Amougou Alima Clément a saisi le Conseil constitutionnel aux fins d'obtenir l'annulation des élections municipales dans la circonscription du Nyong et So'o pour des raisons suivantes : absence de bulletins du Sdf dans de multiples bureaux de vote, listes électorales non affichées, vote des mineurs, etc. Au terme de l'article 48 al. 1 de la Constitution, le Conseil constitutionnel veille à la régularité de l'élection présidentielle, des élections parlementaires et référendaires. D'où l'incompétence du Conseil constitutionnel pour connaître du contentieux des élections municipales.

* 63 Il s'agit de : la Sanaga maritime, le Mbam et Kim, le Nyong et So'o, la Mefou et Akono, la Benoué Ouest, les bamboutos, le Haut Nkam, la Mifi, et Kumba urbain.

* 64 Le 10 juillet 2002, le parti Undp a saisi le conseil constitutionnel pour demander l'annulation de l'élection législative dans la circonscription de la Boumba et Ngoko. Mais, le scrutin ayant eu lieu le 30 juin 2002, la saisine de la Cour le 10 juillet 2002 s'est opérée hors les délais prévus par la loi. En effet, au terme de l'article 47 al. 2 de la loi n°91/020 du 16 décembre 1991 modifiée par la loi n°97/13 du 19 mars 1997 fixant les condition d'élection des députés à l'Assemblée nationale : « des réclamations ou contestations par tout candidat aux élections peuvent être, dans une délai maximum de quatre jours à compter de la date de clôture du scrutin, directement adressées au conseil constitutionnel ». En l'espèce le parti Undp n'a pas respecté ce délai ; d'où l'irrecevabilité de son recours.

* 65 B. Boumakani, « Démocratie, Droit de l'homme et Etat de Droit » in Annales FSJP, Université de Dschang, Tome1, Volume 2, 1997, P.11

* 66 Sur cette question de retard, on se souvient que les élections prévues le 23 juin 2002 furent reportées sur décision du Chef de l'Etat camerounais Paul Biya le 30 juin 2002 suivies du limogeage du ministre de l'Administration territoriale Ferdinand Koungou Edima reconnu incompétent.

* 67 Cf. article 6 alinéa 4 qui stipule que : « en cas de vacance de présidence de la République pour cause de décès, de démission ou d'empêchement définitif constaté par le Conseil Constitutionnel, le scrutin pour l'élection du nouveau président de la République doit impérativement avoir lieu vingt jours au moins et quarante au plus après l'ouverture de la vacance ». Pour les élections législative, cette question est réglée par l'article 15 al. 4 selon lequel : « en cas de crise grave, le président de la République peut, après consultation du président du Conseil constitutionnel et des bureaux de l'Assemblée nationale et du Sénat, demander à l `Assemblée nationale de décider par une loi de proroger ou d'abréger son mandat. Dans ce cas l'élection d'une nouvelle Assemblée a lieu quarante jours au moins et soixante jours au plus après l'expiration du délai de prorogation ou d'abrègement du mandat ». En ce qui concerne les élections municipales, l'article 5 qui organise cette élection prévoit que : « les élections partielles ont lieu lorsqu'un Conseil municipal a perdu les deux-cinquième de ses membres. Dans ce cas, les promoteurs de la liste ou des listes élus aux élections communales générales sont seuls habilité à présenter une liste complémentaire aux élections partielles ».

* 68 A. B. Batongué, «Célestin Bedzigui: arrêtons de jouer avec le feu », in Mutations, n°693 du vendredi 5 juillet 2002, p. 4.

* 69 J. P. Nguemegné, « la réflexion sur l'usage et le respect des droits de l'homme au Cameroun : le droit de vote depuis 1990 », in Annales de la FSJP, Université de Dschang, PUA, tome 4, 2000, p. 52.

* 70 Idem, p. 53

* 71 F. Eboussi Boulaga cité par J. P. Nguemegné, ibid.

* 72 J. P. Nguemegné, Ibid.

* 73 Cf. art. 13 et 14 de la loi relative à l'élection du président de la République

* 74 Cf. article 13 al. 8 de la loi sur l'élection présidentielle.

* 75 Cf. article 6 de la loi n°2000/16 du 19 décembre 2000 portant création de l'Onel.

* 76 L'expression «inscription dans le temps» est du Dr. A. D. Olinga, in op. cit., p. 15.

* 77 Cf. A. D. Olinga, op. cit., p. 14.

* 78 Cf. la répartition de cette subvention en annexe n°2, p. 109.

* 79 Les dépenses des partis politiques dont il est question concernent : le fonctionnement de leur administration courante ; la diffusion de leur programme politique ; la coordination de l'action politique de leurs membres ; leur préparation aux consultations électorales ; leur participation aux différentes commissions électorales prévues par la législation en vigueur.

* 80 Cf. articles 6, 7 et 8 de la loi n°200/015 du 19 décembre 2000 réglementant le financement des partis politiques et des campagnes électorales.

* 81 C'est une Commission qui comprend les membres suivants :

- président . un représentant de l'Administration chargé du Conseil supérieur de l'Etat ;

- Membres : Un représentant des services du premier ministre, un représentant chargé de l'administration territoriale et de la décentralisation, un représentant du ministère chargé des finances, un représentant ministère chargé de la justice, 4 représentants du parlement.

* 82 Ces dispositions sont affirmées dans les articles 2 et 11 du décret n°2000/301 du 8 novembre 2000 relatif au financement public des partis politiques et des campagnes électorales.

* 83 A ce titre, elle : est habileté à vérifier, sur pièces, que l'utilisation des fonds destinés au financement public des partis politiques est conforme aux fins prévues par la loi n° 2000/015 du 19 décembre 2002 sur le financement des partis ; exige éventuellement, dans l'accomplissement de ses missions, tout document financier et comptable nécessaire à la justification des fonds alloués ; peut en cas de nécessité, faire constater les cas de détournement des fonds publics alloués aux partis politiques.

* 84 Ces critères peuvent être la représentativité au sein du parlement, le niveau d'implantation du parti à travers le territoire national...

* 85 Cf. articles 2,3,4 et 5 de l'arrêté n° 013/Mincom/Cab du 11 juin 2002.

* 86 Cf. annexe n°4, p. 120.

* 87 Les arguments développés dans ce paragraphe s'inspirent largement de : Cours de psyco-social du Dr. J. P Tsala Tsala dispensé à l'Université Catholique d'Afrique Centrale à Yaoundé en 1997 et repris par F. Lucien Toulou, op. cit. p. 20.

* 88 Parmi les personnes interrogées 58,06% pensent que cette discrimination a une justification partisane tandis que 25% accusent le tribalisme.

* 89 Et même à Yaoundé ou ailleurs dans le pays.

* 90 Cf. article 19 du décret n° 98/147 du 17 juillet 1998 portant organisation du ministère de l'Administration territoriale devenu ministère de l'Administration territoriale et de la décentralisation dont le nouvel organigramme est encore attendu.

* 91 C'est le cas du village Adoumri dans l'arrondissement de Pitoa dans le Nord du pays.

* 92 Selon l'enquête, 56,41% des enquêtés contre 25,64% pensent que le taux de participation aux dernières élections a été faible à cause de la distribution des cartes électorales sur fond de discrimination inhérente aux considérations ethnique et partisanes.

* 93 Arrêt n° 18/ CE 01-02 du 17 juillet 2002 dans laquelle la Cour a déclaré le recours irrecevable pour non respect des délais de saisine.

* 94 Cf. Conseil Constitutionnel, Arrêt n°96/CE du 17 juillet 2002

* 95 Cf. Conseil Constitutionnel, Arrêt n° 58/CE 01-02 du 17juillet 2002

* 96 Cf. Supra, p. 44.

* 97 Cf. Conseil Constitutionnel, Arrêt n° 28/ CE 01-02 du 17 juillet 2002

* 98 Cf. L'Effort Camerounais, n°10/1007 du 30 octobre au 12 novembre 1994, p. 7.

* 99 Ibid.

* 100 Cf. Le dictionnaire encyclopédique Le petit Larousse illustré, 1993, p. 64

* 101 Idem, p. 531.

* 102 Selon le ministère de l'Education nationale (Mineduc), « l'analyse de la disparité géographique des élèves relève des disparités très importantes. En 1997/1998, trois provinces (le Centre, le Littoral et l'Ouest) sur dix totalisent plus de 55% des effectifs scolarisés pour une demande potentielle estimée à 35% de la population scolarisable. Par contre, la province de l'Extrême nord, à la même période, avec 17% de la demande potentielle ne scolarise que 10% des effectifs. Les taux de scolarisation de 1999/2000 mettent également en exergue les fortes disparités régionales et ceci pour tous les niveaux d'enseignements. Les provinces du Centre, du Sud, de l'Ouest et du Littoral enregistrent les valeurs les plus élevées ; au contraire les provinces de l'Adamaoua, du Nord et de l'Extrême nord présentent les valeurs les plus faibles » (Cf. Mineduc, Stratégie secteur de l'Education, S. éd., juin 2001, pp. 14-15).

* 103 Cf. les Etats-Unis, la Grande Bretagne, Israël etc.

* 104 On peut cité André Sohaing, Madame Françoise Foning, Fadil Mohamadou Abbo, Issa Balarabé, Thomas Tobbo Eyoum, Ndongo Essomba, Victor Fotso, James Onobiono, etc.

* 105 Voir signification infra, p. 88

* 106 Enquête, Yaoundé, 25 juin 2002.

* 107 Cf. Aurore plus, n° 533 du 21 octobre 2002, pp. 6-7

* 108 Idem, p. 6.

* 109 Manga Kuoh, Cameroun : un nouveau départ, L'Harmattan 1996, p. 96

* 110 Il s'agit plus précisément des provinces de l'Adamaoua, du Nord et de l'Extrême nord.

* 111 Cf. Cours de philosophie des droits de l'homme sur le chapitre II consacré au relativisme culturel et l'universalité des droits de l'homme, du Dr. E.-M. Mbonda, dispensé à l'Université catholique d'Afrique centrale à Yaoundé dans le cadre du Mastère en droits de l'homme et action humanitaire en 2002.

* 112 S. Abou, L'identité culturelle, Anthropos, 1981, p. 14.

* 113 C'est l'équivalent d'un chef supérieur dans les province Centre, Sud, Est, Ouest, et du Littoral ou encore d'un sultan chez les Bamoun à l'Ouest et certaines tribus de l'Extrême Nord. Au Nord Ouest et au Sud Ouest, c'est l'équivalent du Fon.

* 114 Ils sont considérés ailleurs comme les chefs de quartiers ou des villages ne rendant compte qu'au seul Lamido unique et seul interlocuteur direct de l'Administration.

* 115 J. P. Nguémégné, op. cit. p. 61.

* 116 Propos recueillis lors de nos entretiens à Garoua, en 1997, à l'occasion de l'élection présidentielle.

* 117 Enquête, Supra, p. 85.

* 118 Entretien avec un quinquagénaire Beti rencontré au quartier Mvog-Ada à Yaoundé le 25juin 2002.

* 119 Sont élus de leur province d'origine : Madame Françoise Foning, députée maire à Douala, Kamdem, maire sortant de la Commune urbaine d'arrondissement de Yaoundé VI, etc.

* 120 F. Eboko, « Les élites politiques au Cameroun : Le renouvellement sans renouveau ? », in J. P. Dalloz (dir.), Le (non)renouvellement des élites en Afrique sub-saharienne, CEAN, 1999, p. 108.

* 121 Enquête, Douala, 26 novembre 2002.

* 122 Enquête, Edéa, 27 novembre 2002.

* 123 Cf. Le journal Le Messager, n°1436 du 6 novembre 2002, p. 7.

* 124 Sur la question, lire aussi : M. Chemillier-Gendreau, «La démocratie pluraliste en Afrique », , in G. Conac (dir.), L'Afrique en transition vers le pluralisme politique, Economica, 1993, p. 109 ; I. Nguema, « Pratiques et conceptions africaines de la démocratie : expériences vécues », in G. Conac (dir.), op. cit., p. 165 ; P. Dongmo Nguekeu, «Le Cameroun : la démocratie représentative malade du « parachutage politique », Annales de FSJP de l'Université de Dschang, PUA, tome 4, 2000, p. 105.

* 125 Cf. J. P. Nguémégné, op. cit., pp. 58-59.

* 126 Ces deux propos ont été recueillis lors de notre enquête à Douala, le 18 novembre 2002.

* 127 Cf. P. Titi Nwel (dir.), De la corruption au Cameroun, Gerddes-Cameroun, 1999, p. 55.

* 128 Il s'agit de l'égalité de chance, de la liberté d'expression, du contrôle de la fraude et des pratiques déloyales, de la participation à la vie politique, de la démocratie au sein des partis, de l'accessibilité et de la transparence, de l'obligation comptable puis des freins et contre-poids.

* 129 Source : Minat (Ministère de l'Administration territoriale et de la décentralisation).

* 130 Cf. article 107 du Code électoral français de 1989, page 307.

* 131 Cf. annexe n°5, p. 128.






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