1. INTRODUCTION GENERALE ET PROBLEMATIQUE
La constitution étant une charte des pouvoirs publics, qui
détermine les modes de désignation et les compétences
respectives des institutions de l'Etat ainsi que leurs rapports
juridiques1, chaque Etat doit en avoir de son choix. Actuellement,
le principe de l'autonomie constitutionnelle des Etats leur permet d'avoir des
constitutions écrites, contenues dans un document écrit, officiel
et unique. Mais, parmi les Etats dotés de constitutions, il ya ceux
-là qui manifestent une remarquable continuité constitutionnelle
en ce sens qu'ils continuent d'être régis, jusqu'à nos
jours par leur constitution d'origine et il y a ceux-là qui modifient
les leurs au fil du temps. La constitution avec ses règles, encadre les
comportements sociaux tout en privilégiant la satisfaction de
l'intérêt général ; ainsi pour y parvenir, elle doit
s'adapter aux nouvelles situations. Quand elle manifeste des inadaptations
conjoncturelles, elle doit être révisée ; car une loi est
vertueuse ou dangereuse, si elle ne parvient pas à s'adapter à
des réalités qu'elle va pourtant réglementer ; elle
devient automatiquement inutile. Jean PORTALIS avertissait déjà
depuis les années 1801 qu'il ne faut point des lois inutiles car elles
affaiblissent les lois nécessaires, compromettent la certitude et la
majesté de la législation; d'où la nécessité
de leur révision. Une constitution doit être
considérée comme un accélérateur plutôt que
comme un frein, à cet égard elle doit se conformer aux
évolutions socio-économiques, culturelles, scientifiques et
politiques. Le roi du Maroc Hassan II, déclara en 1963 que : << le
but de la constitution est de faciliter et d'accélérer le
développement de la nation sur tous les plans, ce qui est d'ailleurs
l'objectif supérieur qu'elle doit atteindre ; une constitution qui ne
permet pas à atteindre cet objectif, doit être
révisée, ou abrogée
carrément.>>2.
Par ailleurs, toute oeuvre humaine est perfectible et la
constitution n'est pas à l'abri de cette perfection.
Depuis son accession à l'indépendance, le 30
juin 1960, la république démocratique du Congo a
déjà connu plusieurs constitutions mais toutes étaient
pleines des lacunes :
· La loi fondamentale élaborée par le
parlement Belge et la constitution de Luluabourg élaborée par les
nationaux n'étaient pas claires sur la forme de l'Etat et sur le
régime politique ;
· La constitution révolutionnaire pourtant bien
conçue va au fur des révisions intempestives plonger le pays dans
la dictature ;
· L'acte constitutionnel harmonisé et l'acte
constitutionnel de la transition seront à l'origine des crises
institutionnelles au sein du gouvernement ; Le décret loi
constitutionnel ira à son tour plus loin jusqu'à concentrer tout
le pouvoir au sein du chef de l'Etat ;
· La constitution de la transition va mettre en place un
régime mixte qualifié de << sui generis >>, ne
correspondant à aucun modèle théorique où on
trouvait facilement un président et quatre vice- présidents, tous
non élus ni par le parlement ni par le peuple et où les ministres
n'étaient responsables que devant leurs composantes alors qu'ils
étaient contrôlés par le parlement qui lui-même
n'était élu et ne pouvait être dissout.
Face à ces désordres politiques et
instabilités institutionnelles favorisés d'une part, par la
non révision des dispositions constitutionnelles et pourtant
les constitutions sont une matière vivante qui naissent, vivent,
subissent des
2 MAURICE-PIERRE ROY, <<Les régimes
politiques du tiers monde>>, L.G.D.J. Paris, 1997, P.13.
déformations de la vie politique et sont l'objet des
révisions plus ou moins importantes3 ; et d'autre part, par
des révisions intempestives. Les délègues de la classe
politique et de la société civile, force vive, réunis au
dialogue inter- congolais, ont convenu dans l'accord global et inclusif, de
mettre en place un nouvel ordre politique fondé sur une nouvelle
constitution susceptible des révisions importantes et opportunes. A
l'effet de matérialiser la volonté politique ainsi
exprimée par les participants au dialogue inter-congolais
précité, le sénat issu de l'accord global et inclusif, a
déposé conformément à l'article 104 de la
constitution de la transition, un avant projet de la constitution à
l'assemblée nationale qui après des débats et
modifications, sera adopté le 16 mai 2005, soumis au
référendum du 18 au 19 décembre 2005 et enfin
promulgué comme constitution de la République Démocratique
du Congo le 18 février 20064 .
Pour bien analyser ce que notre constituant a prévu en
matière de révision constitutionnelle, il sera impérieux
de savoir si la commission sénatoriale chargée de la
rédaction de l'avant projet de constitution, en admettant la
possibilité d'une éventuelle révision constitutionnelle,
a-t- elle prévu sa procédure et ses limites ?
C'est à cette question que se propose de
répondre notre modeste travail, mais pour l'instant contentons-nous de
dire que la réponse à cette question qui constitue la toile de
fond de cet ouvrage transparaîtra clairement tout au long de notre
cheminement, malgré l'anticipation d'une réponse provisoire.
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