Les implications juridiques du transfert des affaires du tribunal pénal international pour le Rwanda devant les juridictions rwandaises (article 11bis rpp-tpir)( Télécharger le fichier original )par Jean Maurice MUGABONABANDI Université Nationale du Rwanda - Licence en Droit 2008 |
§II. Les conditions de détentionsLes conditions de détentions avant et après procès touchent sur l'équité de la justice pénale214(*). Dans l'exécution des jugements, les conditions de détentions des personnes transférées par le TPIR vers le Rwanda, devraient être conformes aux standards internationaux. À la vérité, le Rwanda n'a pas les moyens financiers pour adapter toutes ses prisons aux standards internationaux. Cependant, dans sa mission de renforcer la capacité de la justice rwandaise, le TPIR avait demandé à l'ONU de financer certains aménagements dans la prison de Mpanga au Rwanda, qui pourra accueillir les accusés transférés par le TPIR. Mpanga se trouve au sud du pays, à huit kilomètres de la petite ville de Nyanza, ancienne capitale du royaume du Rwanda, à environ deux heures de Kigali. La prison se compose de blocs, de corridors et de jardins. La prison de Mpanga a été construite en 2004 sur financement du gouvernement néerlandais. De source officielle, elle a coûté plus de sept millions de dollars215(*). Le bloc de l'ONU destiné à accueillir les détenus transférés par le TPIR au Rwanda sera isolé des autres blocs de prisonniers, tout en restant dans la même enceinte. Pendant les audiences, les détenus en provenance du TPIR seront transférés temporairement à la prison centrale de Kigali qui est proche de la Haute Cour de la République et de la Cour suprême. La dite prison contient 12 cellules et six toilettes. Chaque chambre est équipée d'un lit et ses accessoires, d'une table de lecture, et d'une chaise216(*). La législation rwandaise prévoit un régime spécial de détention en faveur des détenus en provenance du TPIR217(*). Les conditions de détentions de toutes personnes dont l'affaire a été transférées seront conformes aux conditions minimales de détention prévues dans l'ensembles des principes pour la protection de toutes personne les personnes soumises à une formes quelconques de détentions ou d'emprisonnement adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 43/173 du 9 décembre 1998218(*). Malgré ces avancées, Human Rights Watch et l'Association des avocats de la défense, ont manifesté des inquiétudes. Les deux amis de la cour mettent en cause la façon dont les conditions de détentions avant, pendant et après procès seront conformes aux exigences du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et autres conditions de détentions internationalement reconnues219(*). L'inquiétude est basée en outre sur la surpopulation des prisons, l'insuffisance alimentaire, et les conditions sanitaires220(*). Pour le procureur du TPIR et le Rwanda, les accusés transférés au Rwanda seront détenus dans la prison de Mpanga dont les conditions de détentions sont conformes au standard international et supervisées par les observateurs internationaux221(*). Les juges de la chambre désignées dans l'affaire Hategekimana ne sont pas persuadés par les facilités de détention dans la prison de Mpanga. Selon la chambre désignée dans cette affaire, les travaux de construction de cette prison sont encore en cours222(*) et peuvent s'arrêter à n'importe quel moment avant le transfert. S'il y a lieu de transférer l'accusé au Rwanda, il serait transféré sous condition que les travaux de construction de s'achèvent223(*). Ce qui est crucial pour garantir aux détenus les conditions de détention adéquates, c'est la surveillance du déroulement des procès des accusés transférés224(*) et l'inspection des conditions de détention en vertu de la loi organique relative au transfert225(*).Cette loi donne le pouvoir au CICR ou un observateur nommé par le président du TPIR, de vérifier les conditions de détentions des accusés transférés au Rwanda par le TPIR et de remettre un rapport au Ministre ayant la justice dans ses attributions au Rwanda et au Président du TPIR, un rapport confidentiel fondé sur les conclusions de ces vérifications226(*). Sous l'empire de ces provisions, les chambres désignées dans les affaires Hategekimana et Kanyarukiga trouvent que l'accusé transféré ne risque pas de torture, de traitements cruels, inhumains ou dégradants. Dans le cas contraire, la responsabilité appartiendra aux observateurs envoyés par le procureur en son nom en application de l'article 11 bis (D) (iv). Signalons enfin que l'annulation d'une ordonnance de renvoi peut s'ensuivre227(*). * 214 Procureur c. Radovan Stankovic, op.cit., note 137, Par.34. * 215 E. KINETZ, Mpanga, un Château -fort pour le Rwanda, op.cit., note 52. * 216Procureur c. Gaspard Kanyarukiga, op.cit., note. 66, pars. 89 - 91. * 217 Idem, par. 91. * 218Voy. Résolution 43/173 du 9 décembre 1998 de l'Assemblée Générale des Nations Unies : les conditions de détentions prévues en ce sens sont les droits au traitements humains des détenus, l'arrestations et détentions conformément au lois et par les autorités compétentes, les mesures de protection du détenus seront ordonnées par le juge, la prohibition de la discrimination au moment de la détention, la prohibition de la torture pendant le temps de détention, le droit d'avoir accès au monde extérieur, le droit de communiquer avec les autorités diplomatiques et consulaires du pays natal de l'accusé, le droit au traitement médicale, le droit d'avoir les matériaux de l'éducation, de la culture et de l'information, le droit de ne pas être forcée de plaider coupable ou de témoigner contre une autre personne, la surveillance des conditions de détentions par un organe international indépendant, et la nécessité d'une enquête indépendante en cas de la mort ou de la disparition du détenu. * 219 Procureur c Ildelphonse Hategekimana,op.cit., note 6, par. 55. * 220Procureur c.Gaspard Kanyarukiga, op.cit., note 6, par. 89. * 221 Procuureur c. Gaspard Kanyarukiga, op.cit., note 123, par. 89- 90. * 222 Procureur c. Hategekimana, op.cit., note 6, par.77. * 223 Ibid. * 224 Ibid.. * 225 Id. par. 92 * 226 Voy. art.23 Article de la loi Organique no 11/2007 du 16/03/2007 déjà citée. * 227 Id.., article 11 bis F) : « À tout moment après qu'une ordonnance soit rendue en application du présent article et avant que l'accusé ne soit déclaré coupable ou acquitté par une juridiction interne, la Chambre de première instance peut, à la demande du Procureur et après avoir donné aux autorités de l'Etat concerné la possibilité d'être entendues, annuler l'ordonnance et demander officiellement le dessaisissement aux termes de l'article 10, G) ; Ainsi, si une ordonnance rendue en vertu du présent article est annulée par la Chambre, celle-ci peut demander officiellement à l'Etat concerné de transférer l'accusé au siège du Tribunal et l'Etat accède à cette demande sans retard, conformément à l'article 28 du Statut. La Chambre de première instance ou un juge peut également émettre un mandat d'arrêt contre l'accusé », |
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