Résumé
Ce travail est consacré à une étude sur
la dynamique de l'occupation des sols dans la région de Niamey et sa
périphérie, zone située dans l'Ouest nigérien.
L'étude est basée sur l'utilisation des images satellitales afin
d'appréhender l'évolution de la ville de Niamey et ce qu'elle
entraîne en terme de dynamique environnementale dans les alentours.
L'analyse diachronique des images satellitales des
années 1989, 1999 et 2009 a permis de réaliser des cartes
géodynamiques et des cartes d'occupation des sols. Ces dernières
ont servi à l'étude de l'évolution de l'occupation des
sols. Celle-ci est caractérisée par une extension
démesurée de la ville de Niamey aux dépens de zones des
cultures due essentiellement à une croissance démographique
très forte. Les conséquences sur les ressources naturelles ne
sont pas des moindres.
Mots clés : Niamey,
dynamique environnementale, occupation des sols, évolution,
extension.
Introduction
générale
La ville de Niamey connaît une forte extension
spatiale ; sa superficie avoisine aujourd'hui les 260km2.
L'une des causes de cette extension est la croissance démographique qui
crée de nouveaux besoins en sol pour les populations. C'est ainsi que
les autochtones perdent leur terre au profit de la ville. Au cours de cette
transformation, l'érosion prend de plus en plus de l'ampleur. L'analyse
de cette nouvelle dynamique constitue l'objet de la présente
étude.
Pour AMINATA (2006), citant MERLIN (2000) :
« l'extension des villes s'est faite « de façon
spontanée et précaire avec le développement de bidonvilles
sur des terrains appartenant à l'Etat ou achetés à des
lotisseurs privés et vers les périphéries et autres
espaces qui naguère étaient plus ou moins naturels ou à
vocation agricole. Dans ce contexte d'explosion démographique et
d'intensification des activités économiques, les espaces naturels
jouent un rôle essentiel dans l'espace urbain, leur existence est
nécessaire à la production de l'oxygène et au recyclage
des rejets gazeux afin d'assurer un équilibre écologique. Ils ont
cependant subi de fortes mutations. Ce sont généralement des
phases de dégradation qui se manifestent par leur régression
spatiale et leur altération qualitative sous l'influence de facteurs
naturels mais surtout à cause d'une urbanisation galopante. C'est ainsi
que Niang et al. (2004) soulignent la tendance à l'artificialisation des
milieux naturels à Dakar. Cette tendance aboutit à la
« conversion des zones de végétation naturelle en zone
de cultures ou la conversion des zones de cultures en zone
d'habitation ». Cette évolution a fait qu'à partir de
1999, il n'y a plus d'espaces couverts par une végétation
naturelle urbaine excepté le domaine classé ».
Notre étude s'inscrit dans une analyse du changement
d'usage du sol et du processus de l'érosion hydrique. Elle porte sur un
espace assez vaste, le site de la Capitale faisant parti. Or la plupart des
recherches jusque là menées dans ce domaine se sont
limitées à des espaces réduits (échelle de petites
parcelles d'expérimentation) ou dans une vision panoramique peu
étendue et rares d'entre elles arrivent à faire le lien que fait
la présente étude. Elle met en relation l'extension de la ville
de Niamey et la dynamique environnementale dans les alentours à savoir
sa périphérie en rive gauche et droite.
Un tel travail nécessite le recours aux nouvelles
technologies de l'information et de la communication combinées avec le
traitement de l'image en aménagement du territoire, en un mot le recours
aux Système d'Information Géographiques (SIG) même si par
ailleurs les méthodes (acquisition et traitement des images)
employées pour la compréhension de ce phénomène de
l'espace sont lourdes à mettre en oeuvre et parfois très
onéreuses.
Les SIG sont de très bons outils d'analyse car ils
permettent de recueillir et d'analyser les informations provenant de plusieurs
sources.
Le présent travail réalisé à
partir de l'interprétation des images satellitales est organisé
en trois chapitres :
ü le premier chapitre intitulé Cadre
théorique traite de la problématique, des objectifs, de
l'hypothèse et de la méthodologie ;
ü le second chapitre, Présentation de la zone
d'étude donne la localisation, les grands traits physiques (à
savoir la géomorphologie, l'hydrologie et le climat) et
humains ;
ü enfin, le troisième chapitre présente les
résultats de ce travail et les discussions. Il s'agit essentiellement
des résultats cartographiques et de leurs commentaires.
Chapitre I. Cadre
théorique de l'étude
Ce chapitre présente la problématique, le
matériel et la méthodologie adoptée pour mener à
bien cette étude. Il constitue la partie centrale à partir de
laquelle découlera tout le travail.
1.1. Problématique
1.1.1. Contexte et
justification
Les questions environnementales préoccupent aujourd'hui
la communauté internationale. De graves menaces pèsent sur les
ressources naturelles soumises d'une part à l'effet des changements
climatiques et d'autre part aux impacts des actions de l'homme.
Ces menaces se ressentent encore plus au Niger, pays
sahélien où les conditions climatiques sont des plus
défavorables. L'une des caractéristiques de ce pays est la
désertification qui engendre la perte des ressources naturelles (terre,
eau). Ces calamités font beaucoup parler d'elles surtout ces
dernières décennies. La menace de la désertification qui
plane à travers tout le pays n'épargne pas la zone Ouest comprise
entre 0.06° et 4.64° de longitude Est et 11.70° et 15.76°
latitude Nord. C'est dans cette partie du pays que se situe le secteur de la
présente étude.
Cette zone subit l'influence du climat sahélien dont la
caractéristique principale est l'alternance d'une courte saison de
pluie (3-4 mois) qui s'étale de Juin à Septembre et d'une longue
saison sèche (8-9 mois). Le rythme des vents traduit l'opposition entre
les deux saisons : l'harmattan chaud et sec qui souffle d'Est en Ouest et
la mousson provenant du Sud-Ouest ou Ouest et qui est à l'origine de la
pluie. La rencontre entre ces deux masses d'air forme le FIT.
Les précipitations connaissent ces dernières
années une sensible augmentation (fig.2). Même si Moussa (2006)
souligne qu'il y a une régression très sensible des
isohyètes vers le Sud. Cette situation a un impact sur la
répartition des ressources naturelles notamment les terres en cultures
et la couverture végétale.
Le relief est marqué par la présence des bas
plateaux et importantes buttes résiduelles entaillés par des
vallées sèches et la vallée du fleuve.
Quant à la végétation, on en distingue en
général la brousse tigrée sur les plateaux, les
broussailles, les cordons ripicoles le long des cours d'eau et la ceinture
verte de la Communauté urbaine de Niamey. Selon (Mamadou, 2005), on
constate dans la région de Niamey : « une modification
importante de la couverture végétale dont les principaux traits
sont d'une part la forte progression des terres cultivées :
d'environ 6 % en 1950, les cultures passent à 57 % en 1992
(Seguis et al, 2003) et d'autre part une importante diminution des
jachères et des steppes naturelles (D'Herbes et al, 1992 ; Loireau,
1998 ; Loireau et al, 2000) et des modifications d'usage des
sols » et l'extension du bâti s'étend au dépens
des terres cultivables.
Cette partie ouest du pays est aussi l'une des plus
peuplées du pays. Abdou (2005), décrit les
caractéristiques de la population de l'Ouest nigérien. Selon lui,
elle est estimée à 4 millions d'habitants concentrés
principalement le long du fleuve et composée de plusieurs groupes
ethnolinguistiques. Le taux de natalité est supérieur à
60 %. Le taux brut de mortalité lui est de l'ordre de 20 %. Le
taux de croissance tourne autour de 4 % dans la vallée du fleuve
(urbanisation croissante) et un peu moins plus qu'on s'éloigne mais dans
tous les cas supérieurs à 3 % (caractéristique des
pays en développement). Cette population est jeune car plus de 55 %
de celle-ci a moins de 15 ans.
Cette pression démographique combinée aux
contraintes climatiques citées plus haut et aux changements
socioéconomiques est à l'origine de la dégradation du
milieu.
Pour faire face aux risques de dégradation auxquels
sont exposées les ressources naturelles en général et les
terres agricoles en particulier par le développement de la ville, il
faudrait nécessairement connaître la distribution spatiale des
ressources et leur dynamique de changement. Cela permettrait une meilleure
gestion des sols qui est entravée par un manque de données
fiables et récentes.
1.1.2. Revue de la
littérature
Il s'agit d'un certain nombre de travaux relatifs à
notre problématique et/ou à notre zone d'étude. Ces
études, parfois similaires à celle que nous entreprenons touchent
à beaucoup d'aspects que nous voulons mettre en évidence. Mais,
vu leur nombre pléthorique, nous ne pouvons les citer tous. C'est ainsi
que nous avons sélectionné ceux qui nous paraissent les plus
importants.
L'ouest du Niger est un véritable laboratoire pour les
recherches en sciences humaines et agronomiques. Beaucoup de travaux y ont
été réalisés dans ce cadre. Cette zone a fait
l'objet de nombreux travaux notamment en ce qui concerne l'environnement,
l'évolution démographique et ses conséquences sur la
dégradation du milieu, la gestion des ressources naturelles, etc.
Ces recherches même si elles ne traitent pas de notre
thématique nous donnent beaucoup d'informations sur la pression que
subit la zone suite à l'évolution démographique et ou aux
conditions climatiques.
Ainsi, dans le degré carré de Niamey (bassin
versant du Kori Goubé), (MOUSSA, 2006) a mis en place un système
d'information géographique (SIG) pour le suivi et la gestion de cet
espace ainsi que la dynamique du paysage et quelques actions de
l'érosion hydrique. Il conclut que ce bas-fond est fortement
marqué par la dégradation du couvert végétal
résultant du climat et surtout de l'action anthropique et est fortement
soumis à l'action de l'érosion hydrique.
La même méthode a été
utilisée par IDRISSA (2006) le long de la vallée du Fleuve Niger
(de Karma à Say). Il montre clairement une expansion des surfaces
cultivées aux dépens des zones à couvert
végétal naturel et une tendance à la dégradation de
l'espace.
Yahaya (2000) énumère toutes les
potentialités que regorge la vallée du fleuve Niger. Son
étude a porté sur la nécessité de les
protéger et de les exploiter de façon rationnelle. Elle met en
évidence les risques de dégradation sur le capital foncier, en
déduit les conséquences sur les capacités productives de
la vallée et propose quelques mesures pour faire face à ce
phénomène. Pour cela, il détermine d'abord la limite
administrative de la vallée. Il énumère ensuite les
facteurs qui influent sur la dégradation du capital foncier. Il s'agit
des facteurs physiques notamment la végétation naturelle et la
pluviométrie dont elle dépend. Leur dégradation se fait du
sud au nord. Quant aux facteurs humains, il y a le régime de la
propriété foncière du type
« coutumier », les caractéristiques
démographiques dont les taux d'accroissements et les densités
sont parmi les plus élevés du pays et du mode d'exploitation des
ressources naturelles qui fait ressortir une agriculture et un élevage
plutôt extensif et du coup consommateurs de beaucoup d'espace. La
combinaison de ces facteurs crée une dynamique de dégradation du
capital foncier qui se traduit sur le terrain par le phénomène
d'érosion. L'auteur pense que cette dynamique peut provoquer à
terme une rupture d'équilibre. Il conclut que les potentialités
agricoles de la vallée, une fois exploitées conduiraient à
réaliser l'autosuffisance alimentaire mais la dégradation
à laquelle elles sont exposées peut compromettre cette
attente.
En dehors du Niger, AMINATA (2006) atteste que l'urbanisation
galopante de la région de Dakar a modifié la
quasi-totalité des espaces naturels. L'étude présente une
analyse de la dynamique de l'occupation du sol dans la Grande Niaye de Pikine
et dans la Niaye de Yeumbeul de 1954 à 2003. Elle montre que les
changements d'occupation du sol sont marqués par l'avancée du
front d'urbanisation et posent de nombreux problèmes tels que les
inondations, l'inexistence ou la déficience du système
d'assainissement. Ces contraintes ont un impact négatif sur la
santé des populations. Elles affectent aussi l'image de la capitale.
ABDERRAHMANE et al. (2006) ont analysé la situation de
l'occupation de l'espace dans la commune d'Ain El Hadjar (Algérie). Il
se dégage de cette étude que les fluctuations les plus sensibles
concernent l'espace forestier qui régresse et l'espace du parcours des
troupeaux qui s'accroît au détriment de tous les autres espaces.
Ils ont enfin produit des cartes d'occupation des sols en 1965 et 1995.
Au Burkina Faso, SAWADOGO (2007) a appliqué une
méthode dite du "sondage à la perche" pour mettre en
évidence la sédimentation du barrage n°1 de Ouagadougou. Il
produit de cartes d'occupation des sols de ce site (celles de 1992 et 2002)
ainsi que celle du changement intervenu, quantifie les différentes
unités spatiales cartographiées et propose quelques
méthodes de lutte contre la sédimentation. Il conclu que la
pression humaine combinée avec des pratiques agricoles agressives, des
facteurs climatiques défavorables serait en grande partie responsable de
la sédimentation du barrage.
Ces études sont semblables à la présente
mais cette fois-ci sur un espace assez étendu et l'accent est surtout
mis à l'extension de la ville et les conséquences que cela peut
avoir sur ses alentours.
Différentes méthodes ont été
employées pour étudier la dégradation mais c'est celle
utilisant les SIG qui nous intéresse. En effet, les SIG ont fait l'objet
des plusieurs études. C'est le cas chez OULD (2001) et SALEY (2006) pour
étudier l'évolution des paysages respectivement dans la
région de Torodi et dans le canton de Namaro, localités
situées dans l'ouest du pays.
Au sud-est du pays, c'est KANEMBOU (2006) dans le
département de Gouré (Zinder) et ELHADJI (2007) dans le
département de Maïné Soroa (Diffa) qui se servent du SIG
pour cerner l'évolution de la dégradation des ressources
naturelles et celle des processus d'ensablement.
La même méthode a été
utilisée par FARAN (2005) dans le Zarmaganda et par ALI et al. (2007)
dans la commune de Gabi (Maradi) cette fois-ci pour étudier
l'évolution de la végétation.
Les outils SIG ont permis à BONN (1998) et à El
Garouani et al. (2005) de spatialiser le phénomène
d'érosion sur de grandes étendues, à ABDOU (2005) de
prospecter de nouveaux sites à formation contractée susceptibles
d'accueillir certains troupeaux de girafes et à MOURIMA (2006) de
montrer leur pertinence dans la prévention des conflits causés
par la gestion des ressources naturelles.
Tous ces auteurs sont unanimes que le milieu se dégrade
de façon continuelle. Les différents acteurs qui sont à
l'origine de cette dégradation du milieu sont l'homme par les diverses
activités qu'il exerce et la péjoration climatique. La pression
anthropique est en grande partie responsable du changement dans l'occupation de
l'espace. Mais il ne faut pas cependant perdre de vue les contraintes
climatiques que d'ailleurs tous les auteurs soulignent à travers les
différentes études. Ces contraintes climatiques combinées
aux différentes activités humaines notamment les pratiques
culturales incontrôlées favorisent l'érosion.
Notons aussi que les auteurs se sont beaucoup appesanti sur le
rôle combien important joué par l'utilisation des outils des SIG
et télédétection dans l'inventaire, l'évolution et
même la gestion des ressources naturelles.
Les résultats de ces différentes études
mais surtout la méthode utilisée pour aboutir à ces
derniers nous serviront beaucoup pour réaliser la notre. Nous nous
baserons sur quelques unes d'entre elles que nous trouvons appropriées
à notre thématique.
1.1.3. Pertinence
L'étude permettra de connaître l'extension de la
ville de Niamey entre trois dates : 1989, 1999 et 2009. L'occupation
humaine notamment l'habitation et les activités anthropiques aux quelles
s'adonnent les populations (agriculture) mettent le sol à nu et du
coût expose ce dernier à l'érosion. L'originalité
ici est que l'étude fera le lien entre l'extension de la ville et la
dynamique environnementale qui se passe tout autour. Aussi, toutes les deux
rives sont concernées.
Le choix de ces dates est dicté par la
disponibilité des images. Ainsi, nous avons pu disposer des images de
1989, de 1999 et de 2009, c'est pourquoi nous fondons notre analyse sur
elles.
|