3.1.5. Comment les paysages
ont-ils évolués entre 1989 et 1999?
Tableau 5: Superficie des unités d'occupation
des sols des années 1989 et 1999
Unités d'occupation des sols en 1989
|
Superficie (ha)
|
Proportion par rapport à la superficie totale
(%)
|
1989
|
1999
|
1989
|
1999
|
Broussailles
|
4938,7
|
6716,6
|
4,6
|
6,3
|
Brousse tigrée régulière
|
14945,0
|
14775,4
|
13,9
|
13,8
|
Brousse tigrée dégradée
|
9806,6
|
8348,7
|
9,1
|
7,8
|
Brousse tigrée très dégradée
|
5572,9
|
5145,9
|
5,2
|
4,8
|
Ceinture verte
|
1649,1
|
1550,1
|
1,5
|
1,4
|
Cultures irriguées
|
3908,7
|
4071,7
|
3,6
|
3,8
|
Cordon ripicole
|
1573,3
|
2069,7
|
1,5
|
1,9
|
Cultures pluviales
|
41665,5
|
42190,2
|
38,8
|
39,3
|
Fleuve
|
2463,8
|
2698,6
|
2,3
|
2,5
|
Jachère
|
934,1
|
1100,2
|
0,9
|
1,0
|
Kori
|
716,7
|
154,0
|
0,7
|
0,1
|
Lit sableux des koris
|
887,4
|
1116,7
|
0,8
|
1,0
|
Mares
|
625,1
|
717,4
|
0,6
|
0,7
|
Mosaïque cultures-jachères
|
1360,0
|
428,1
|
1,3
|
0,4
|
Ville de Niamey
|
6687,8
|
9296,6
|
6,2
|
8,7
|
Terrains rocheux
|
9376,6
|
6833,5
|
8,7
|
6,4
|
Villages
|
213,1
|
111,1
|
0,2
|
0,1
|
Total
|
107324,5
|
107324,5
|
100
|
100
|
La carte des changements intervenus entre 1989 et 1999 (Figure
13) est issue du croisement automatique réalisé entre les deux
couches, chacune d'elles décrivant une situation. Il faut noter que le
changement s'est opéré dans toutes les unités. Certaines
ont augmenté, d'autres au contraire ont diminué. Mais nous avons
retenu dans cette analyse les changements dont l'ampleur est significative,
ceux là qui apparaissent clairs sur la figure 13. Cette discrimination
est due au fait que nous travaillons avec une image Landsat dont la
résolution (28,5m) ne nous permet pas de voir tous les changements
surtout ceux qui sont de moindre importance.
Il apparaît de la lecture de la figure 13 et surtout
du tableau 5 que l'évolution de la ville de Niamey est l'une des plus
spectaculaires. Cette ville a connu un accroissement important. Elle s'est
étendu aussi bien sur les zones de cultures que sur les brousses
tigrées et a « annexé » certains villages
très proches du centre urbain. Il s'agit 2112,83ha soit 5,07% de la
superficie des zones de cultures, 654,37ha soit 11,73% de la superficie de la
brousse tigrée très dégradée et 40,05ha soit 18,79%
de la superficie occupée par les villages qui sont transformées
en ville de Niamey. Cette extension de Niamey est le fait de plusieurs
facteurs. On peut citer sur le plan du mouvement démographique,
l'accroissement naturel élevé de la population et l'exode massifs
des populations rurales; sur le plan de l'aménagement urbain, on a le
Schéma Directeur de Développement Urbain SDDU (1954) et le
Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme (1984) et sur le
plan institutionnel le décret n° 88-392/PCMS/MI du 24 novembre 1988
qui crée les trois communes, le décret n° 88-393/PCMS/MI du
24 novembre 1988 qui érige Niamey en Communauté Urbaine et la loi
2002-015 du 11 juin 2002 qui crée la nouvelle Communauté Urbaine
de Niamey en redimensionnant le nombre des communes passant à cinq. De
tous ces facteurs, le mouvement démographique est le plus expressif.
Pour Alou (2008) : « l'urbanisation s'est
traduite par une demande de plus en plus croissante en sol urbain. Ceci a pour
conséquence la croissance rapide de la ville de Niamey. La production
foncière excessive par la systématisation des lotissements et le
manque de mise en valeur du fait d'une gestion foncière peu
cohérente ont contribué à accélérer
l'extension spatiale de la ville ».
L'occupation humaine est responsable de la mise en valeur des
terres. En effet, l'homme utilise la terre soit pour son habitation, soit pour
sa production. Ces différentes activités ne sont pas sans
conséquences sur les ressources naturelles notamment la
dégradation. Les multiples besoins en terre de l'homme le pousse
à la défricher. Il met alors le sol à nu et l'expose du
coup aux agents de l'érosion et à l'agressivité du climat.
La superficie des sols nus sableux est passée de 887,42ha en 1989
à 1116,73ha en 1999. Ainsi, ce sont quelques 668,95ha soit 1,6% des
zones de cultures pluviales et 38,78ha équivalent à 5,41% des
lits des koris qui sont transformés en dépôts sableux. Les
sols nus apparaissent aussi sur les brousses tigrées avec 133,61ha soit
0,9% des brousses tigrées régulières, 109,18ha soit 1,11%
des brousses tigrées dégradées, 774,33ha soit 13,89% des
brousses tigrées très dégradées et 390,98ha soit
7,91% des broussailles. Cette situation favorise l'érosion des sols et
donc la modification du ruissellement. D'après l'analyse des images le
nombre des ravines a qualitativement augmenté. Il y a donc extension du
réseau de drainage et la progression du nombre de cône de
déjection sableux dans le lit du fleuve notamment sur la rive droite
(figure 6 et 9).
La mise en culture s'effectue dans pratiquement toutes les
unités. On évalue à 841,94ha soit 61,68% de la
mosaïque cultures-jachères, 2421,75ha soit 25,82% des terrains
dénudés (majoritairement les dépôts sableux),
158,85ha soit 9,63% de la ceinture verte et 104,55ha soit 14,58% des lits des
koris qui se transformés en zones de cultures. Ce besoin en terres de
cultures sans cesse croissant pourrait s'expliquer par l'accroissement des
populations citadines et d'autres venues d'ailleurs pour s'installer.
Malgré tous les apports des autres unités dont elles font
l'objet, la superficie des zones de cultures n'a augmenté que de
519,68ha. Elle a varié entre 41670,56ha en 1989 et 42190,24ha en 1999.
Ceci s'explique par le fait que les zones habituellement sous cultures sont de
plus en plus en train d'être occupées par la ville de Niamey, peut
être parce qu'elles se localisent autour de celle-ci. L'accroissement de
la population et son corollaire le besoin en sol urbain fait que quelque soit
l'augmentation dont ils font l'objet chaque année, les zones de cultures
se retrouvent occupé par les habitations. La ville s'accroît alors
plus vite que les zones de cultures. L'urbanisation fait que les hommes ont
plus besoins des terres pour leurs habitations que pour leurs cultures. Mais
les zones de cultures ne se transforment pas seulement en habitation. Les
pratiques culturales provoquent par l'action de l'érosion la perte en
terres en les transformant en espaces nus notamment les dépôts
sableux. De ces zones de cultures pluviales, 54,96ha soit 0,13% de leur
superficie sont devenues lit du kori et 668,95ha soit 1,6%, des
dépôts sableux.
Les cultures irriguées ont occupé 165,50ha soit
6,71% du fleuve et comme s'ils chevauchent entre eux, le fleuve a à son
tour occupé 323,11ha soit 8,26% de la superficie des cultures
irriguées. Et pourtant la superficie qu'occupe le fleuve a
augmenté. Elle a passé de 2463,81ha en 1989 à 2698,64ha en
1999. Ceci est du au fait que la date (mois) de la prise de vue n'est pas la
même. Celle de 1989 est prise le 20 novembre et l'autre le 02
décembre. Bien que la crue soit en cours en novembre, on pouvait
espérer un débit plus important en décembre et plus d'eau
dans le lit du fleuve. Aussi, les années de 1994 à 1999 ont
été beaucoup plus pluvieuses que les années
antérieures surtout avec l'année exceptionnelle de 1998 qui a
enregistré un cumul de 816,60mm (Fig. 2). L'une des conséquences
est l'inondation qui engendre de gros dégâts comme c'est le cas en
août 2010 où le fleuve a quitté son lit habituel et a
envahi les espaces sur lesquels se pratiquent les cultures maraichères
tout en causant en plus l'effondrement de plusieurs maisons.
Le lit des koris se transforme soit en mares permanentes ou
semi permanentes et cela selon les saisons, soit en dépôts
sableux. 61,04ha soit 8,51% des lits des koris se retrouvent occupés par
des mares et 38,78ha soit 5,41% ensablé. La présence des cordons
ripicoles ne permet pas parfois de les distinguer. Globalement la superficie
des lits des koris a subi de grandes transformations. Elle est passée de
716,79ha en 1989 à 153,98ha. Mis à part les mares et les
dépôts sableux, les cordons ripicoles ont occupé une bonne
partie des lits des koris. Pour des raisons d'échelle (résolution
de l'image 28,5m), leur changement n'a pas été
représenté sur la figure 13 car même s'il est d'une
relative importance, le fait qu'ils longent les lits des koris ne permet pas
d'avoir sa bonne représentation. Les cordons ripicoles se sont
développés sans doute à la faveur des bonnes conditions
climatiques évoquées ci-dessus.
Les mares, dans leur grande majorité, retiennent de
l'eau pendant une bonne période de l'année,
généralement juste après la saison des pluies et peuvent
durer de zéro (0) à douze (12) mois. Elles ont connu un
accroissement de leurs superficies. Celles-ci ont varié de 625,15ha en
1989 à 717,35ha en 1999. Elles ont aussi profité des conditions
climatiques favorables notamment la bonne pluviométrie des années
1994 à 1999 pour se développer.
Les brousses tigrées ont aussi connu des changements.
Ces unités passent généralement de l'état
régulier à dégradé puis à très
dégradé. 133,61ha soit 0,9% de la brousse tigrée
régulière se sont transformés en sols nus. Il faut noter
ici que la transformation de cette unité en brousses tigrées
dégradée et très dégradée n'a pas
été représentée pour toujours les mêmes
problèmes d'échelle. Son changement en ces différentes
unités n'est pas aussi significatif pour figurer sur la figure 13. Une
partie de la brousse tigrée dégradée est passé
à l'état de la brousse tigrée très
dégradée. Il s'agit de 820,43ha soit 8,36%. Une autre partie de
cette unité, 109,18ha soit 1,11% s'est transformée en sols nus.
Pour la brousse tigrée très dégradée quant à
elle, 774,33ha soit 13,89% sont occupés par les sols nus, 654,37ha soit
11,73% par la ville de Niamey (au niveau du plateau de l'aéroport
notamment). Les broussailles ont aussi subi des transformations. 390,98ha soit
7,91% de leurs superficies sont transformés en sols nus.
Il apparaît que ce sont les activités
anthropiques avides de terres qui ont pour l'essentiel détruit la
forêt de brousse tigrée. Les variations climatiques mais aussi et
surtout l'exploitation du bois par les populations entraînent la
dégradation du couvert végétal au niveau des brousses
tigrées et des broussailles. En effet, pour s'approvisionner en bois de
chauffe, les populations de Niamey et ses environs s'adonnent à la coupe
ces forêts. Ce déboisement est un processus irréversible
qui conduit à la dégradation des massifs forestiers. Le taux de
croissance de la population accentue cette pratique néfaste pour
l'environnement.
Globalement, les différents changements intervenus dans
les unités montrent une tendance à la dégradation du
milieu. Certaines ont même atteint la situation
d'irréversibilité telle que les brousses tigrées et les
broussailles transformées en sols nus, les zones de cultures
transformées en lit du kori ou en espace urbanisé.
Figure 13: Carte des changements intervenus dans
l'occupation des sols dans la ville de Niamey et sa périphérie
entre 1989 et 1999
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