2-2-1 : Les Principales fonctions des systèmes
financiers
Levine (1996) récence cinq arguments qui peuvent fonder
théoriquement l'existence d'une liaison positive et forte entre le
système financier et la croissance :
- Le système financier faciliterait la protection
contre le risque et le partage de celui-ci ;
- Il permettrait une acquisition de l'information et une
allocation optimale des ressources ;
- Il permettrait un meilleur contrôle des dirigeants et
de l'entreprise par les actionnaires ;
- Il faciliterait la mobilisation de l'épargne
domestique ;
- Enfin, la présence d'un système financier
suffisamment développé faciliterait l'échange de biens et
services.
2-2-1-1 : La facilitation de la protection contre
le risque et son partage
Les institutions financières naissent du fait qu'elles
devraient faciliter la gestion du risque lié aux coûts
d'information et de transaction spécifique. Nous allons ici distinguer
deux types de risques. Le risque de liquidité et le risque de
diversification du portefeuille.
Levine définit la liquidité comme la
facilité avec laquelle les agents économiques peuvent convertir
leurs actifs non liquides en actifs liquides, notamment la monnaie. Le risque
de liquidité naît donc à cause des incertitudes
associées à la conversation des actifs. Ces incertitudes sont
liées aux asymétries d'information et aux coûts de
transactions.
Le lien entre la liquidité et le développement
économique provient du fait que certains projets à rendement
élevé nécessitent des financements de long terme. Or un
tel comportement est incompatible a priori avec les intérêts des
épargnants. Par conséquent, si les systèmes financiers
n'augmentent pas la liquidité pour les investissements de long terme, il
y aurait moins de projets à haut rendement qui apparaîtront.
Levine soutient que cette gestion du risque de liquidité peut être
faite en plus des marchés financiers par les banques. S'agissant de ces
dernières, Diamond et Dybvig (1983) dans leur modèle montrent
qu'il est excessivement coûteux d'observer les chocs qui affectent les
individus, et par conséquent, il est impossible de passer des contrats
financiers contingents (où tous les états de l'économie
sont prévus). Sous de telles conditions, les banques peuvent offrir des
dépôts liquides aux épargnants et entreprendre un mixage
des investissements liquides et à faibles rendement pour satisfaire les
besoins de liquidité des épargnants, et des investissements
illiquides et à rendement élevé. En fournissant la demande
de dépôt et en choisissant un mixage approprié des
investissements liquides, les banques fournissent une assurance complète
aux épargnants contre le risque de liquidité, pendant que
simultanément elles facilitent les investissements de long terme
à travers le financement des projets à rendement
élevé. Ainsi, en éliminant le risque de liquidité,
les banques peuvent accroître l'investissement en actifs illiquides,
à haut rendement et accélérer la croissance
économique (Bencivenga et Smith, 1991).
Cependant Pagano (1994) montrent dans un modèle avec un
capital physique et externalité, qu'une liquidité accrue peut
diminuer le taux d'épargne et la croissance économique.
En plus de la réduction du risque de liquidité,
les systèmes financiers devraient aussi atténuer le risque de
diversification du portefeuille. L'habileté des systèmes
financiers à fournir des services de diversification du risque peut
affecter la croissance économique de long terme en modifiant
l'allocation des ressources et les taux d'épargne. Lorsque les
épargnants sont généralement averses au risque, les
projets à haut rendement deviennent plus risqués que ceux
à faible rendement. Par conséquent, les systèmes
financiers qui facilitent la diversification du risque tentent d'induire une
modification du portefeuille vers des projets dont le rendement attendu est
élevé (Saint-Paul, 1992). En plus du lien de la diversification
et de l'accumulation du capital, elle peut également affecter le taux de
changement technologique. L'habileté à détenir un
portefeuille diversifié en projets innovateurs réduit le risque
et encourage l'investissement en activités innovatrices porteuses de
croissance. Par conséquent, tout système financier qui facilite
la diversification du risque peut accélérer l'innovation
technologique et la croissance économique (King et Levine, 1993a).
2-2-1-2 Acquisition de l'information et l'allocation
des ressources
D'une part, les banques, à partir des informations
recueillies sur la nature des chocs auxquels s'expose une économie,
répartissent au mieux l'épargne collectée lorsqu'elles
sont parties prenantes des projets d'investissements. Tant qu'il y a
séparation nette entre actifs monétaires et actifs financiers,
les banques continueront à remplir la fonction d'intermédiation
financière. En atténuant les risques par la mobilisation de
l'épargne, le système financier incite les épargnants
à investir dans les projets à taux de rentabilité interne
élevé (Saint Paul, 1992) et contribue à
accélérer les changements technologiques. L'orientation des
investissements est facilitée par l'existence d'un système
financier qui est l'agent dont les coûts de transaction et d'information
concernant un projet précis sont les plus faibles (information relative
aux dirigeants, aux débouchés des produits, à la
capacité technologique, etc...). Les intermédiaires financiers
suppléent aux frictions du marché et rendent l'information,
assimilable à un bien public (Stiglitz, 1985).
Par ailleurs, l'intérêt majeur d'un
système financier est de rendre compatible dans le temps des projets qui
ne le sont pas à une date donnée, et de réduire les
risques et les asymétries informationnelles afin de favoriser
l'investissement et donc la croissance (Laroche et al, 1995). A ce titre,
Diamond (1984) montre que les coûts d'acquisition d'information
créent des incitations à l'émergence des
intermédiaires financiers. Pour illustrer cette idée, supposons
qu'il existe un coût d'acquisition d'information à propos d'une
production technologique.
En l'absence d'intermédiaires financiers,
chaque investisseur doit payer ce coût fixe. En réponse à
cette structure de coût d'information, les groupes d'individus pourraient
se constituer en intermédiaires financiers afin d'économiser les
couts de Traitement et d'acquisition d'information à propos
d'investissement. Au lieu que chaque individu supporte seul ce coût, un
intermédiaire peut le faire sur tous ses membres. Il en résulte
donc une économie des coûts d'acquisition d'information qui
facilite l'obtention d'information à propos des opportunités
d'investissement, et par là, améliore l'allocation des
ressources.
L'habileté avec laquelle les intermédiaires
financiers acquièrent et traitent l'information devrait alors avoir
d'importantes implications sur la croissance économique. Car plusieurs
firmes sollicitent ce financement à travers les intermédiaires
financiers et les marchés qui assurent mieux la sélection
d'entreprises et des firmes prometteuses. Ainsi, ils induiront une allocation
efficiente du capital et une croissance rapide (Greenwood et Jovanovic,
1990).
En dehors de l'identification de la meilleure production
technologique, les intermédiaires financiers devraient aussi stimuler le
taux d'innovation technologique en identifiant les entrepreneurs qui ont de
bonnes chances d'initier avec succès de nouveaux processus de production
des biens (King et Levine, 1993a).
|