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Contribution du Bois Energie aux moyens d'existence durables des ménages riverains de la Réserve de Biosphère de la Pendjari


par Abdelaziz LAWANI
Faculté des Sciences Agronomiques de l'Université d'Abomey-Calavi
Traductions: Original: fr Source:

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6-4-2-2- Les terroirs riverains sont-ils loin de la déforestation P

Les pratiques actuelles constituent de sérieuses menaces pour la RBP si les quantités exploitées dépassent les ressources disponibles. La figure nous donne une idée de la quantité de bois exploitée par les ménages riverains de la RBP.

Figure 15 : Quantité de bois énergie exploitée par an par village de la zone d'étude

Source : Enquêtes terrains juillet-octobre 2007

Lorsqu'on considère la quantité totale du bois énergie exploitée par village par an, le village de Dassari est en tête avec 16767,67 stères et Batia en dernière position avec 2517 stères. Ici c'est l'effet de la taille de la population sur la ressource ligneuse utilisée comme combustible qui est mis en exergue. En effet c'est Dassari qui est, parmi les 8 villages d'étude, le plus peuplé et c'est ce qui justifie sa consommation élevée. On note que les ménages des villages riverains ayant une certaine influence sur la RBP exploitent en moyenne 29.100,6 stères par an soit 10.185.210 Kg par an.

Le volume de bois disponible dans la ZOC est de 457.906,81 stères (Moussa Toure, op. cit.). Le temps horizon d'épuisement de la ressource donné par le rapport disponible/exploité est estimé à 15 ans. Donc au bout de 15 ans les ménages commenceront à connaître la crise de bois énergie. Moussa Toure (Moussa Toure, op. cit.) estime quant à lui que c'est au bout de 10 ans que les ménages riverains de la RBP sur l'axe Tanguiéta-Batia connaîtront la crise d'énergie. La différence entre les deux résultats est liée à la prise en compte ici uniquement des villages ayant

une influence sur la réserve pour l'estimation des quantités exploitées et non seulement des villages riverains. La situation devrait donc être plus critique si tous ces villages exploitaient directement le bois de la ZOC. Mais ils ont aussi à leur niveau des ressources qu'ils exploitent comme bois énergie. Mais dans ces deux études, nous n'avons pas tenu compte de la régénération naturelle. Si elle était prise en compte, le temps horizon d'épuisement devrait être plus long. Ce qui importe ici ce sont les corrélations qui se dessinent. Les deux études montrent que la situation du bois énergie va empirer bien plus tôt qu'on ne le pense si rien n'y fit. Il urge donc de trouver des solutions pour anticiper sur la pression qui se fera sur la RBP au bout de ces 15 ans ou 10 ans car n'ayant plus de bois, les ménages vont se rabattre sur la réserve qui sera prise d'assaut de toutes parts. Les actions de surveillance auront plus de mal à être efficaces face à ce nombre important. La commercialisation du bois énergie va s'intensifier car beaucoup prendront conscience du revenu qu'il peut générer. La situation sera plus difficile pour les pauvres car ce sont eux qui dépendent le plus de cette ressource qu'ils ne pourront plus exploiter. Il est probable que des cercles de désertification semblables à ceux constatés dans d'autres régions s'y développent. Car le couvert arborescent sera considérablement réduit, les terres seront rapidement affligées d'une série d'autres maux. Elles deviendront de plus en plus vulnérables à l'érosion, qui peut être due aux vents ou aux fortes pluies saisonnières. Après l'érosion vient la désertification. Les sols érodés à un endroit iront se déposer là où ils ne sont pas désirés, cela pouvant entraîner de graves problèmes d'envasement et d'inondation.

Les femmes ont aussi pris conscience des effets de leurs actions sur le capital naturel. En effet à la question « que pensez-vous de l'état actuel de la dégradation de la forêt qui se trouve dans la RBP suite à l'exploitation du BE », 7% des chefs cuisine enquêtés trouvent que la RBP est dégradée et que son état est inquiétant. Au même moment 60,5% trouvent que la RBP est peu dégradé et que son état n'est pas inquiétant et 32,5% trouvent que la RBP n'est pas dégradé. Des solutions proposées par les chefs de cuisine qui trouvent que l'état de la RBP est dégradé, on peut retenir le renforcement des actions de surveillance, l'application des sanctions pour décourager les pratiques clandestines, le reboisement des terres qui sont proches des villages pour empêcher les femmes d'aller au-delà de la ZOC etc.

Un autre facteur qui explique ces quantités élevées de bois énergie consommées est la nature des équipements utilisés. Les équipements sont rudimentaires dans l'ensemble. Les fosses pour la fabrication du charbon ne donnent pas de bons rendements. Pour les usages domestiques,

57,8% des ménages utilisent le foyer traditionnel à trois pierres et 20,7% ont opté pour le foyer traditionnel fermé. On note que malgré que 20,7% des chefs cuisine des ménages enquêtés aient reçu une formation dans la fabrication des foyers améliorés, la plus-part ne l'ont pas adopté : moins de 5,2% utilisent le foyer amélioré. Les raisons avancées sont liées aux caractéristiques de ces foyers améliorés. Certains affirment que les foyers améliorés sont peu adaptés à leurs conditions (30,4%), d'autres ne notent pas de différence entre le rendement calorifique des foyers améliorés et des foyers traditionnels fermés (17,4%). Enfin la majorité (52,2%) se réfère à sa rentabilité sociale : coût de fabrication (en termes de temps de fabrication) et durée de vie probable.

Pour les femmes, les foyers traditionnels (Photo 12) fermés ont beaucoup plus d'avantages comparativement aux foyers améliorés. Bien que les deux soient fabriqués en matériaux traditionnels (l'argile) disponibles et faciles à trouver, pour les foyers traditionnels on peut noter que :

Ø Le procédé de fabrication est connu de tous, transmis de génération en génération et est incrusté dans leurs habitudes : il n'est pas nécessaire d'aller suivre une formation spécifique pour le construire.

Ø La chambre de combustion est en communication avec un muret de taille et de forme variables qui peut servir à d'autres usages. En effet on peut aménager, pour les murets circulaires, du côté opposé à la chambre de combustion une enceinte pour les animaux d'élevage notamment la volaille. La chaleur, dégagée au moment de la cuisine et celle entretenue par les braises, permet de maintenir les animaux au chaud une bonne partie de la nuit. De plus cette chaleur aide la volaille à mieux couver ses oeufs, augmentant le taux d'éclosion. Il peut être également aménagé dans ces murets circulaires des poches pouvant servir de garde-manger. Ces poches permettent aussi de conserver au chaud les repas. Les murets hauts permettent de soustraire les repas aux attaques des animaux domestiques et de sécher les cultures.

Ø Le refus des bouleversements qu'entraîne l'introduction des foyers améliorés (suppression de la source d'éclairage fournie par le feu libre, insertion du temps de construction et d'entretien dans la division du travail domestique) pousse les femmes à ne pas l'adopter.

On note également d'autres innovations technologiques développées par les populations pour économiser le bois. Au nombre de ces innovations on peut compter la fabrication d'un type de foyer spécifique pour la torréfaction des graines de karité (Photo 13).

 
 

Cliché : Abdelaziz LAWANI

Photo 12 : Adaptation du foyer amélioré et du foyer traditionnel à muret

Cliché : Abdelaziz LAWANI

Photo 13 : Foyer traditionnel spécifique pour la torréfaction des noix de karité

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