II-2-2. Travaux sur l'implication au travail
En rapport avec l'implication au travail, nous
présenterons principalement deux travaux. « L'implication au
travail des femmes cadres » de Dominique Peyrat-Guillard
(2003) et « Implication et Émotions au travail : une
étude empirique » de Olivier Herrbach et Jérôme
Lerat-pytalk (2004).
Travaux de Dominique
Peyrat-Guillard
Ces recherches ont porté essentiellement sur la
compréhension du phénomène d'implication chez les femmes
cadres.
Cette étude sur l'implication cherchait à
comprendre la nature du lien qui attache ces femmes cadres à leur
travail. Elle a été menée sur un échantillon de 22
femmes. Son étude a porté sur des entretiens semi-directifs
réalisés auprès des femmes cadres diplômées
de l'enseignement supérieur.
Cette recherche avait été
présentée comme portant sur « les conditions de
travail, les comportements au travail ». Les premières
questions contenues dans le guide d'entretien étaient très
générales, en vue d'explorer toutes les facettes de
l'implication, sans pour autant utiliser le mot implication. La durée
d"une interview a été en moyenne d'une heure et à chaque
fois enregistrée puis retranscrite dans son
intégralité.
Les résultats des entretiens ont été
analysés a l'aide du logiciel de traitements de données
textuelles « Alceste ».
Cette étude a abouti aux conclusions suivantes :
« les femmes interrogées aiment leur emploi et s'y
investissent, tout en recherchant un certain équilibre »
et « le fait de ne pas pouvoir ou ne pas vouloir consacrer un
temps important à l'activité professionnelle ne devrait pas
être considéré comme un signe d'un manque
d'intérêt du travailleur vis-à-vis de son
emploi ».
Les données obtenues nous suggèrent aussi un
ensemble de réflexions d'ordre plus conceptuel. Tout d'abord, nous
référant de façon immédiate aux résultats de
l'analyse, nous sommes à même de confirmer l'extrême
imbrication des dimensions affectives et calculées et des
différents objets de l'implication, ce qui milite pour la mesure de
l'ensemble de ces dimensions et objets à l'aide d'un seul et même
questionnaire, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Dans la conclusion de l'étude nous
lisons aussi : « L'avantage de cette étude
semble être d'apprécier la notion d'implication en des termes
nouveaux. L'éclatement de motivations personnelles ne devient ainsi
qu'apparent (Neveu et Peyrat-Guillard, 1998), dans la mesure où
existerait une cohérence sous-jacente fondatrice du concept
d'implication. L'implication conserve ainsi toute sa pertinence analytique
comme lien privilégié entre d'un côté les dynamiques
propres aux individus et, d'un autre côté, les diverses
contingences de renforcement organisationnelles dont le gestionnaire reste le
maître d'oeuvre ».
Travaux de Herrbach et
Lérat-Pytlak (2004)
Cette recherche s'est intéressée à une
population de cadres d'entreprise français (N=798). Dans cette
étude, ils citent Thévenet (2000, p.32) « l'expression
des sentiments est un des symptômes qui signalent les salariés
impliqués ». L'objectif de cette recherche était
d'apporter une confirmation empirique à cette idée, de
vérifier que la configuration des formes d'implication des individus est
reliée au fait de ressentir certains états affectifs au travail
plutôt que d'autres. Ce qui se traduisait en deux
hypothèses :
Hypothèse 1 : l'implication
organisationnelle affective est marquée par un état d'esprit
caractérisé par le désir. Un niveau élevé de
cette forme d'implication sera donc relié à davantage
d'activation affective, et ce au-delà de l'influence dispositionnelle
liée à l'affectivité positive des individus.
Hypothèse 2 : l'implication
organisationnelle calculée est marquée par un état
d'esprit de contrainte. Elle aura donc tendance à engendre davantage
d'activation affective aversive, et ce au-delà de l'influence
dispositionnelle liée à l'affectivité négative des
individus.
Les résultats de l'analyse des coefficients de
corrélation partielle ont aboutit selon eux aux conclusions suivantes
sur les hypothèses de la recherche :
- l'implication organisationnelle affective reste fortement
corrélée avec l'activation positive (r = 0,40) et, dans une
moindre mesure, corrélée négativement avec l'activation
négative (r = - 0,24). Les coefficients sont quasiment les mêmes
que ceux obtenus pour les corrélations simples, ce qui permet de
valider l'hypothèse 1 : l'implication affective est
corrélée avec l'activation positive, et ce au-delà de
l'influence de la personnalité. En outre, elle est également
reliée à une moindre activation négative ;
- l'implication organisationnelle calculée reste
corrélée avec l'activation négative, même si le lien
est moins fort par comparaison avec la corrélation simple (r = 0,19
contre r = 0,27). Ceci permet de valider partiellement
l'hypothèse 2 : l'implication calculée est
corrélée avec l'activation négative. On remarque, en
outre, que la corrélation négative de l'implication
calculée avec l'activation positive n'est plus significative (r = -
0,06 contre r = - 0,16).
Cette étude a aboutit aux conclusions suivante
: « l'implication est un phénomène que l'on peut
interpréter sous l'angle émotionnel et proposé un cadre
conceptuel pour cette interprétation. Ceci est important, car la nature
même de la notion d'implication est au coeur des réflexions sur le
sujet (Meyer et Herscovitch, 2001). L'implication est un moyen de comprendre le
comportement organisationnel indépendamment des intérêts ou
de l'idéologie personnelle des individus et il est essentiel de mieux la
cerner théoriquement et empiriquement.
Les ouvertures sont donc nombreuses pour des travaux de
recherche futurs sur la construction de l'implication des salariés,
ainsi que sur l'interrelation dynamique entre les formes et les cibles
d'implication et les états affectifs ressentis par rapport à
différentes cibles. À cet égard, deux points semblent
importants.
D'une part, il convient d'être sensible à la
question du sens des relations étudiées : il n'existe
probablement pas une relation causale simple entre environnement de travail,
états affectifs et implication. Dans le modèle de la
Théorie des événements affectifs (Weiss et Cropanzano,
1996), ce sont les événements intervenus dans le cadre du travail
qui ont des conséquences affectives, qui elles-mêmes
entraînent certaines conséquences attitudinales et
comportementales. Mais il y a clairement une possibilité de
rétroaction et on se trouve donc probablement dans une logique de
cooccurrence ou de codétermination et non de détermination des
états affectifs et des formes d'implication.
D'autre part, la prise en compte dans cette recherche de la
dimension situationnelle et de la dimension dispositionnelle permet de
souligner l'importance de chacune d'entre elles pour susciter l'implication des
salariés. La dimension dispositionnelle permet de nuancer l'impact des
considérations situationnelles : on ne peut pas impliquer quelqu'un en
dépit, ou au-delà, de ses caractéristiques personnelles.
Mais, inversement, la mise en place d'un environnement organisationnel propice
à l'émergence d'une implication affective permet de nuancer,
atténuer ou utiliser les dispositions individuelles. Toute étude
de l'implication devrait prendre en compte les deux ordres de
phénomènes.
Chapitre III :
Problématique, identification des variables
et hypothèses de la
recherche.
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