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CAMPUS NUMERIQUE
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« Campus Ouvert Droit, Ethique et
Société »
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UNIVERSITE DE NANTES - UNIVERSITE PARIS II PANTHEON ASSAS -
UNIVERSITE PARIS X NANTERRE -
UNIVERSITE PARIS XII VAL DE MARNE - AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA
FRANCOPHONIE
__________________________
ANNEE UNIVERSITAIRE 2006-2007
Droit à la Santé et Développement
MEMOIRE DE RECHERCHE
POUR L'OBTENTION DU DIPLÔME D'UNIVERSITÉ DE
3e CYCLE
"DROITS FONDAMENTAUX"
Présenté par :
Rachid ABOUTAIEB
Tuteur :
Eric MONDIELLI
Professeur
UFR de Droit et Sciences Politiques-Université de
Nantes
Sommaire
Introduction
Chapitre 1- les contours du droit a la santé
A- Les sources du droit à la
santé
1- Les instruments universels de droits de
l'homme
a- Les instruments contraignants
b- les instruments non contraignants
2- Les instruments régionaux de droits de
l'homme
3- Les dispositions nationales
B- Le contenu du droit à la
santé
1-les principes généraux de droits
humains
a-La dignité, élément central du droit
à la santé
b-Le principe de non discrimination
2- Le droit aux soins de santé fait partie du
droit à la santé
3- La jouissance des autres droits est essentielle
pour l'exercice du droit à la santé
a- Le droit à la participation
b- L'exercice des autres droits de l'homme
4- La protection de l'environnement
C- Les obligations des états
Chapitre 2- les interactions du droit à la
santé avec le développement
I- L'état de santé des populations et le
développement économique
A-La corrélation entre l'état de
santé de la population et le niveau de développement
économique
1- Les comparaisons entre pays
développés et pays en développement montrent des
différences flagrantes en matière de santé
2- Les grands problèmes de santé dans
les pays du Sud sont un frein au développement
économique
a- La santé maternelle
b- La santé infantile
c- L'épidémie du VIH/SIDA
d- Le fléau paludéen
B- les politiques de développement s'appuyant
uniquement sur la croissance économique n'assurent pas
l'amélioration du niveau de santé
C-La méconnaissance du droit à la
santé dans les politiques de développement explique les mauvais
résultats sanitaires
1-Le droit de l'accès aux soins
et les politiques de développement économique
2- La garantie des droits humains
dans les politiques de développement économique
3- La protection de l'environnement
dans les politiques de développement économique
II- Les obstacles à l'application du droit
à la santé lors de la mise en oeuvre des politiques de
développement ont des causes multiples
A-Les obstacles financiers à la mise en
application du droit à la santé dans les politiques de
développement
1- Les réductions budgétaires dans le
secteur de la santé
2- Les obstacles à l'accès aux
médicaments
B-Les obstacles d'origine politique à
l'application du droit à la santé
1- L'inefficacité du système
judiciaire
2-Les comportements sociaux
C-Les contraintes commerciales
internationales
Chapitre 3- Concilier le droit à la
santé et les politiques de développement
I- Elaborer des politiques de santé efficaces dans
le cadre des projets de développement
II- Renforcer les budgets alloués aux services
publics de santé
a- Les dépenses publiques de santé
améliorent l'état de santé des pauvres
b- Modifier les relations avec les institutions
financières internationales
c- Utiliser l'aide internationale pour améliorer le
secteur de la santé
d- Bénéficier des fonds dans le cadre de
programmes de santé
III- Respecter et protéger les droits de
l'homme
IV- Impliquer les organisations non gouvernementales
dans les stratégies de développement
V-Elaborer et appliquer des programmes de protection
de l'environnement
VI- Améliorer la gouvernance locale est un
facteur important dans la mise en oeuvre du droit à la
santé
VII-Concilier les doits humains et le droit
commercial
Conclusion
Tableau
Bibliographie
INTRODUCTION
Une revue de l'état de santé des populations
dans le monde dévoile des chiffres inquiétants. Citons à
titre d'exemple la mortalité infantile qui s'élève
à 12 millions de décès par année, dont la
moitié de meurent de causes liées à la malnutrition, et un
grand nombre de maladies faciles à prévenir. Le paludisme et la
tuberculose continuent de sévir. Nous assistons à
l'émergence de maladies nouvelles, la pire menace de santé qui
pèse sur l'humanité est représentée par la menace
du VIH/SIDA. Cette situation est d'autant plus dramatique qu'elle frappe avec
plus d'intensité les pays pauvres, dans lesquelles,
l'inaccessibilité de la population aux services de santé
s'associe à la pauvreté, à la malnutrition, aux mauvaises
conditions de logement, et à l'absence d'application des droits de
l'homme. Toutes conditions pour créer la mauvaise santé. En
effet, l'OMS a bien défini la santé comme étant
« état de bien-être complet physique, mental et
social et qui ne consiste pas seulement en l'absence de maladie ».
Cette définition montre bien que la santé n'est pas un
élément indépendant mais qu'elle est inséparable de
son contexte social. Elle met en évidence le fait que la santé
dépend de plusieurs déterminants au delà de l'aspect
médical et technique. L'OMS a également été la
première à considérer la santé comme un droit
fondamental de l'homme. C'est une étape essentielle dans la
transformation de cet objectif social. La santé est haussée au
rang de droit de l'homme. Il s'agit là d'une percée potentielle
dans le domaine du droit à la santé. Malgré cela,
l'application du droit à la santé à l'échelle
nationale n'est pas encore garantie partout dans le monde. Cela s'explique en
partie par le fait que le droit à la santé faisant partie des
droits économique, sociaux et culturels, partage le même sort que
ceux-ci, à savoir qu'ils sont reconnus comme des droits de seconde
catégorie. Or, les droits de l'homme représentent un même
corps, qui se fonde sur la charte internationale des droits de l'homme
constituée par la déclaration universelle des droits de l'homme
(DUDH), le pacte international des droits civils et politiques (PIDCP), et le
pacte international des droits économiques, sociaux et culturels
(PIDESC). La confrontation idéologique Est Ouest qui a suivi la
2ème guerre mondiale a produit une dichotomie dans les
dispositions de la DUDH. Les droits énoncés dans le PIDCP ont
bénéficié d'une plus grande reconnaissance par rapports
aux droits économiques, sociaux et culturels. La jurisprudence relative
aux droits civils et politiques est beaucoup plus développée que
celle qui touche aux droits économique, sociaux et culturels. Par
ailleurs, de nombreux gouvernements occidentaux se sont montrés
méfiants vis-à-vis des droits économiques et sociaux, et
se sont mêmes opposés à l'idée de les
considérer comme des droits, arguant que les droits économiques,
sociaux et culturels n'étaient que des principes généraux.
Ils prétendaient que ces droits, contrairement aux droits civils et
politiques, ne pouvaient être invoqués devant les tribunaux. La
conférence de Vienne est venu pour conforter que tous les droits de
l'homme sont des droits indivisibles, inter reliés et
interdépendants.
Le droit à la santé est actuellement reconnu
comme un droit fondamental de l'homme faisant partie des droits
économique, sociaux et culturels.
Comme ceux-ci, il est influencé par les politiques
économiques de chaque pays. En effet, le droit à la santé
est dépendant de la redistribution des richesses. Il faut souligner que
le PIDESC reconnaissant le lien entre droits sociaux et niveau de richesse du
pays, a énoncé dans l'article 2 que « chacun des
états parties au présent pacte s'engage à agir... au
maximum de ses ressources disponibles en vue d'assurer progressivement le plein
exercice des droits reconnus dans le présent pacte... ».
L'imprécision et la permissivité de ce discours n'ont pas pour
objectif de soustraire les gouvernements à leurs obligations. Cependant,
les gouvernements soucieux d'assurer des chiffres de plus en plus
élevés de croissance économique, se détournent des
obligations sociales pour favoriser des secteurs plus
« rentables » économiquement. Le droit des
populations au bien être complet peut sembler être en contradiction
avec le développement économique. Les politiques de
développement économique mises en oeuvre dans les pays en
développement, sont tournées vers l'encouragement de
l'exportation, et la réduction des budgets des services sociaux allant
jusqu'à des réductions de moitié. Les services publics de
santé sont devenus plus coûteux, et inégalement
répartis. La carence touche aussi bien les équipements que les
ressources humaines. Le secteur privé, largement encouragé, s'est
rapidement développé. Les soins de santé sont
considérés comme n'importe quel bien de consommation, et non
comme un droit fondamental. Cette situation est le fruit des politiques
néolibérales qui créent des richesses pour une
minorité, favorisent la privatisation, et l'entrée de capitaux
étrangers qui vont investir les hôpitaux et les laboratoires. La
réforme du secteur de santé imposée par le FMI et la
banque mondiale a favorisé les privatisations. Nous avons assisté
au fil des années à la détérioration de la
santé des populations des pays du tiers monde. L'état de
santé de milliers de pauvres s'est aggravé par l'application de
ces politiques. Les souffrances et les décès de millions de
personnes dans le monde sont une situation rendue possible par l'ordre
international actuel. Les interventions du G8 en Afrique ont
échoué dans l'amélioration de la santé des
africains car elles doivent être mises en relation avec les
intérêts qu'elles défendent et les intentions
cachées qu'elles sous tendent (2). Ces institutions tentent
d'améliorer le niveau de santé par des programmes de lutte contre
la pauvreté, pensant que la pauvreté étant le
déterminant le plus important de la santé. Même si la
primauté des déterminants économiques dans la maladie et
la mauvaise santé est reconnue, les autres déterminants
constitués par l'endettement, les réductions des budgets sociaux,
l'absence de participation des populations, sont autant de facteurs qui
entravent l'application du droit à la santé.
Dans le but de dégager les causes et les perspectives
pour améliorer l'exercice du droit à la santé, une revue
des sources et du contenu du droit à la santé est revue dans le
1er chapitre pour dégager une définition claire de ce
droit et déterminer les obligations des états.
En raison de l'influence des politiques de
développement sur les paramètres liés à la
santé, le deuxième chapitre se propose de dégager les
interactions entre politiques de développement économiques et
exercice du droit à la santé, pour essayer d'appréhender
tous les facteurs liés aux politiques de développement qui
peuvent influencer positivement sur ce droit et pour comprendre les actions
comprises dans les stratégies de développement qui peuvent porter
atteinte à ce droit.
Enfin, dans le 3ème chapitre, il est
dégagé un certain nombre d'idées qui tentent de concilier
droit à la santé et politiques de développement humain
afin de proposer une approche de la santé reposant sur la justice
sociale et le respect des droits humains.
CHAPITRE 1- LES CONTOURS DU DROIT A LA SANTE
La reconnaissance du droit à la santé comme un
droit de l'homme, attribue une importance exceptionnelle à cet objectif.
Le fait de caractériser un objectif spécifique de droit humain
l'élève au dessus des autres objectifs sociétaux,
l'immunise conte toute éventuelle contestation et le nimbe
généralement d'une aura d'intemporalité, d'absolu, et de
validité universelle » (1). Il reste à cerner les
contours de ce droit en le définissant, en établissant les normes
le constituant, et les obligations des parties.
L'expression « droit à la
santé » a été critiquée car elle
laisserait entendre l'obligation des états de garantir la bonne
santé aux citoyens. Certains ont préconisé de la changer
par l'expression « droit à la protection de la
santé » et dans ce cas, elle va englober le droit aux soins de
santé, et le droit à des conditions de vie saine (3). En fait, la
signification du droit à la santé s'est clarifiée
progressivement avec le temps et travers l'interprétation de situations
concrètes.
Il y a deux conceptions du droit à la santé. Une
conception restrictive qui assimile le droit à la santé au droit
aux soins de santé, et une conception plus extensive associant le droit
aux soins aux autres droits humains. Dans la conception restrictive, le droit
à la santé est assimilé au droit aux soins de
santé. L'expression droit aux soins de santé implique
l'obligation de l'Etat d'assurer les soins de santé à tous les
citoyens à travers une redistribution des ressources. Cette conception
ne tient pas compte des déterminants multiples de la santé. En
effet, assurer les soins de santé n'est pas suffisant pour atteindre la
santé dans son aspect de complet bien être physique, mental et
social. Par conséquent, assurer uniquement les soins de santé
à une population, ne peut améliorer son état de
santé.
La conception large du droit à la santé
découle de la définition même de la santé comme
étant « le complet bien-être physique, mental et
social». Dans son préambule, la constitution de l'OMS
réserve une disposition spécifique à la santé et
les droits humains. Ainsi, pour cette organisation, le droit à la
santé est l'abréviation de l'expression « Le droit
au meilleur niveau de santé qu'il est possible
d'atteindre ». Cette conception extensive du droit à la
santé c'est-à-dire le « Droit au complet
bien-être physique, mental et social » a été
également critiquée, car elle est idéaliste. Elle n'est
pas adaptée aux besoins immédiats des populations et donc non
fonctionnelle. Elle reste cependant applicable sur le long terme et surtout,
elle demeure opérationnelle dans la lutte contre la violence et la
protection de la santé des femmes.
Le droit à la santé étant le droit pour
un individu de jouir du meilleur état de santé qu'il est possible
d'atteindre. C'est un ensemble d'arrangements correspondant à des
normes, des institutions et des dispositions légales ayant pour
objectif d'assurer la jouissance de ce droit.
Il ne fait pas l'objet d'une reconnaissance
générale, car il n'est pas présent dans toutes les
constitutions nationales, ni dans toutes les chartes des organisations
internationales. Il reste néanmoins un droit supérieur car c'est
le droit à la vie, c'est un droit capital, un droit carrefour,
rassembleur, attractif qui regroupe de nombreux autres droits (4).
A- Les sources du droit à la santé
Le droit international des droits de l'homme a
évolué depuis la 2ème guerre mondiale pour
inclure les droits économiques, sociaux et culturels. Ceux-ci
n'étaient pas considérés comme droits essentiels par
rapport aux droits civils et politiques, ils étaient
considérés comme des droits de deuxième catégorie.
Certains états les considéraient comme des objectifs à
atteindre mais non des droits justiciables. La conférence mondiale sur
les droits de l'homme (Vienne 1993) a modifié la perception des droits
de l'homme. Tous les droits sont interdépendants. Le droit à la
santé est un droit social, c'est un droit fondamental de l'homme. Il
figure dans un ensemble de textes à portée juridique. Ces textes
relatifs aux droits de l'homme ont des valeurs légales
différentes. Sont considérés comme textes
contraignants les pactes, les traités, les conventions, les
protocoles internationaux et régionaux, les constitutions nationales et
les textes législatifs nationaux. Les instruments non contraignants,
résultent d'un consensus international on d'accords et servent de guide
pratique pour les états. Il s'agit des déclarations
internationales, les principes, les directives, les recommandations.
L'observation générale adoptée par le comité des
droits économiques sociaux et culturels pour interpréter le droit
à la santé, ainsi que les documents des conférences
mondiales des Nations Unies sont tous des textes non contraignants.
A côté de ces textes qui traitent directement du
droit à la santé, il faudrait ajouter certains textes se
rapportant aux autres déterminants de la santé. Il s'agit des
dispositions traitant de l'intégrité physique, du droit à
l'information, le droit au logement, l'alimentation, la liberté
d'association et le droit de l'environnement.
Le 1er texte dans lequel est apparu le droit
à la santé est le préambule de la constitution de l'OMS
(adopté par la conférence internationale de la santé
à New York du 19 Juin au 22 Juillet 1946). Dans ce texte, il est
clairement mentionné que la santé n'est pas l'absence da maladie.
Ce texte a véritablement associé la santé à
d'autres déterminants qui sont tout aussi essentiels. En effet, selon
l'OMS : « La santé est un état de complet
bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une
absence de maladie ou d'infirmité. La possession du meilleur état
de santé qu'il est capable d'atteindre constitue l'un des droits
fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa
religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou
sociale ». L'innovation de ce texte est qu'il assimile la
santé à un droit fondamental de tout être humain, et il
garantit l'élimination de toute discrimination dans l'application de ce
droit. La DUDH source de tous les droits humains, et dont les dispositions sont
considérées comme relevant du droit international coutumier.
Bien que celle-ci ne rapporte pas explicitement le droit à la
santé, elle mentionne cependant dans l'article 25 une série de
droits économiques, sociaux et culturels :
« Toute personne a droit à un niveau de
vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa
famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins
médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires, elle a
droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie,
d'invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte
de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de
sa volonté. La maternité et l'enfance ont droit à une aide
et à une assistance spéciales. Tous les enfants qu'ils soient
nés dans le mariage ou hors mariage, jouissent de la même
protection sociale ».
Par la suite, de nombreuses dispositions relatives au droit
à la santé, de portée différente, ont
été établies dans des instruments universels ou nationaux.
1- Les instruments universels de droits de l'homme
a- Les instruments contraignants
- Le pacte international des droits économiques,
sociaux et culturels reconnaît que le droit à la santé est
un droit individuel et inaliénable. Dans son article 12, il
reconnaît : « Le droit qu'a toute personne de jouir du
meilleur état de santé physique et mentale qu'elle soit capable
d'atteindre ». Le paragraphe 2 de l'article 12 contient une
énumération d'un certain nombre de mesures que les états
parties devront adopter :
« Les mesures que les Etats parties au
présent pacte prendront en vue d'assurer le plein exercice de ce droit
devront comprendre les mesures nécessaires pour assurer :
a. la diminution de la mortinatalité et de la
mortalité infantile, ainsi que le développement sain de
l'enfant ;
b. l'amélioration de tous les aspects de
l'hygiène du milieu et de l'hygiène industrielle ;
c. la prophylaxie et le traitement des maladies
épidémiques, endémiques, professionnelles et autres, ainsi
que la lutte contre ces maladies ;
d. la création de conditions propres à
assurer à tous des services médicaux et une aide médicale
en cas de maladie ».
- La convention relative aux droits de l'enfant rapporte dans
son article 24 : « Les états parties reconnaissent le
droit de l'enfant de jouir du meilleur état de santé possible et
de bénéficier des services médicaux et de
rééducation. Ils s'efforcent de garantir qu'aucun enfant ne soit
privé du droit d'avoir accès à ces
services ».
Elle demande aux états parties de prendre des mesures
en vue de : « Luter contre la maladie et la malnutrition, y
compris dans le cadre des soins de santé primaires, grâce
notamment à l'utilisation des techniques aisément disponibles et
à la fourniture d'aliments nutritifs et d'eau potable, compte tenu des
dangers et des risques de pollution du milieu naturel »
(32-c).
- La convention internationale sur l'élimination de
toutes les formes de discrimination raciale a inclus le droit à la
santé en précisant dans l'article 11 : « Les
états parties s'engagent à garantir le droit de chacun...
à la jouissance du droit... à la santé, aux soins
médicaux, à la sécurité sociale et aux services
sociaux ».
- La convention sur l'élimination de toutes les formes
de discrimination à l'égard des femmes insiste sur
l'égalité entre hommes et femmes vis-à-vis du droit
à la santé : « Les états parties
s'engagent à prendre toutes les mesures appropriées afin
d'assurer sur la base de l'égalité... le droit à la
protection de la santé... » (Article 11. 1.f).
La même convention indique dans l'article 12 :
« Les états parties prennent toutes les mesures
appropriées pour éliminer la discrimination à
l'égard des femmes dans le domaine des soins de
santé ».
b- les instruments non contraignants
- La déclaration d'Alma Ata adoptée par la
conférence internationale sur la santé primaire en 1978 affirme
que : « la santé est un droit fondamental de l'homme,
et que l'accomplissement du niveau le plus élevé possible de la
santé est un but social mondial dont la réalisation exige
l'action de beaucoup d'autres secteurs de santé ». Ce
texte de portée universelle a insisté sur l'intérêt
d'un ordre économique mondial qui cherche à donner à tous,
le niveau de santé le plus élevé possible pour combler le
fossé entre les pays. Ce texte stipule que le progrès
économique et social est lié à la protection de la
santé.
- La déclaration de Vienne adoptée par la
conférence Mondiale sur les droits de l'homme (1993) se
réfère au droit à la santé :
L'article 11 : « La conférence
mondiale sur les droits reconnaît que le déversement illicite de
substances et de déchets toxiques et nocifs peut constituer une grave
menace pour les droits de chacun à la vie et à la
santé ».
L'article 18 : consacré à
l'élimination des violences qui s'exercent en fonction du sexe, et des
mesures juridiques pour y parvenir : « ... grâce
à une action nationale et à la coopération internationale
dans divers domaines comme le développement économique et social,
l'éducation, la protection de la maternité, les soins de
santé et l'aide sociale ».
L'article 41 : « La conférence
mondiale sur les droits reconnaît qu'il importe que les femmes jouissent
tout au long de leur vie du niveau de santé physique et mental le
meilleur possible. ... réaffirme, en se fondant sur le principe de
l'égalité de l'homme et de la femme, le droit de la femme
à des soins de santé accessibles et suffisants et à la
gamme la plus large possible de services de planification familiale ainsi
qu'à l'égalité d'accès à l'éducation
à tous les niveaux ».
- La déclaration et le programme d'action de la
4ème conférence mondiale sur les femmes (Beijing
1995) contiennent des définitions concernant respectivement la
santé générale et la santé des femmes.
- L'assemblée générale de l'ONU a
adopté 4 textes concernant spécifiquement les droits des
personnes handicapées. La déclaration des droits du
déficient mental (Résolution de l'AG 2856, XXVI, 1971) ; la
déclaration des droits des personnes handicapées
(Résolution de l'AG 46/119, 1975) ; les principes pour la
protection des personnes atteintes de maladie mentale et pour
l'amélioration des soins de santé mentale (Résolution de
l'AG 3447, XXX, 1971) ; les règles pour l'égalisation des
chances des personnes handicapées (Résolution de l'AG 48/96,
1993).
- L'observation générale N°14 sur le droit
à la santé, élaborée en 2000 par le comité
des droits économiques sociaux et culturels, a permis de clarifier
l'article 12 du pacte international des droits économiques, sociaux et
culturels. Ce document est très important car il a analysé le
contenu normatif du droit à la santé en termes de
disponibilité, d'accessibilité (divisée en
non-discrimination, accessibilité physique, accessibilité
économique ou abordabilité, accessibilité de
l'information), d'acceptabilité sur le plan culturel, et de
qualité de soins. Le Comité y a précisé les
tâches qui incombent à l'Etat afin qu'il respecte, protège
et assure le droit à la santé. Dans cette observation, le
comité a aussi énuméré 14 droits humains
considérés comme faisant partie intégrante du droit
à la santé, tel que le droit à une alimentation
adéquate, à l'éducation, à la non-discrimination,
à la vie privée, à l'information et le droit
d'association. Ces droits définissent les déterminants sociaux de
la santé. En effet, le respect des droits liés à la
santé a des implications directes sur le droit à la santé,
dans la mesure où ces droits concernent les facteurs sociaux
sous-jacents à une vie saine. Différentes études ont mis
au point les corrélations entre la discrimination basée sur la
race, la classe et le genre, le déni d'éducation et des
conditions décentes de travail, avec l'augmentation des taux de
morbidité et de mortalité.
2- Les instruments régionaux de droits de
l'homme
Plusieurs instruments régionaux relatifs aux droits de
l'homme reconnaissent le droit à la santé.
- La charte sociale Européenne prévoit dans
l'article 11 le droit à la protection de la santé :
« en vue d'assurer l'exercice effectif du droit à la
protection de la santé, les parties contractantes s'engagent à
prendre, soit directement, soit en coopération avec les organisations
publiques et privées, des mesures appropriées tendant
notamment :
- A éliminer dans la mesure du possible les causes
d'une santé déficiente,
- A prévoir les services de consultation et
d'éducation pour ce qui concerne l'amélioration de la
santé et le développement du sens de la responsabilité
individuelle en matière de santé,
- A prévenir, dans la mesure du possible, les
maladies épidémiques, endémiques et autres ».
- La charte Africaine des droits de l'homme et des peuples
stipule dans l'article 16 :
- Toute personne a le droit de jouir du meilleur
état de santé physique et mentale qu'elle soit capable
d'atteindre.
- Les Etats parties à la présente charte
s'engagent à prendre les mesures nécessaires en vue de
protéger la santé de leur population et de leur assurer
l'assistance médicale en cas de maladie.
- Au niveau du continent Américain, le protocole de San
Salvador précise sur l'article 10 le droit à la
santé :
1- Toute personne a droit à la santé qui est
considérée comme le droit de jouir du meilleur état de
santé physique, mentale et sociale.
2- Afin d'assurer le plein exercice du droit à la
santé, les Etats parties s'engagent à reconnaître ce droit
comme un bienfait public et notamment à adopter pour garantir l'exercice
de ce droit les mesures suivantes :
a- L'action de soins primaires
de santé, autrement dits, la mise à la disposition de tous les
individus et de toutes les familles de la communauté de l'aide
médicale essentielle.
b- L'extension des services de
santé à tous les individus relevant de la juridiction de
l'Etat.
c- L'immunisation
complète contre les principales maladies infectieuses.
d- La prophylaxie et le
traitement des maladies endémiques, professionnelles et autres.
e- L'information de la
population sur la prévention et le traitement des problèmes de
santé.
f- La solution des
problèmes de santé des groupes à plus haut risque et qui
sont plus vulnérables à cause de leur pauvreté.
- La déclaration Américaine des droits et
devoirs de l'homme contient une disposition sur la préservation de la
santé et du bien-être à l'article 11 :
« Toute personne a droit à ce que sa
santé soit préservée par des mesures sanitaires et
sociales, en ce qui concerne l'alimentation, l'habillement, le logement et les
soins médicaux, qui seront établies proportionnellement aux
ressources publiques et à celles de la
communauté ».
3- Les dispositions nationales
Le droit à la santé n'est pas inclus dans les
constitutions de tous les états. Mais selon une étude faite par
l'OMS, plus de 60 dispositions constitutionnelles mentionnent le droit à
la santé, ou le droit aux soins de santé. Plus de 40
constitutions se réfèrent à des droits liés
à la santé tels que le droit à des soins de santé
génésique, le droit des handicapés à une aide
matérielle, le droit à un environnement sain.
Dans l'étude rapportée par la PAHO (3), en
Amérique latine, plus de 20 états incluent dans leur constitution
une disposition sur le droit à la santé, ou mentionnent le devoir
de l'état en vue de protéger la santé de la nation. Cinq
constitutions proclament le droit à la santé. En revanche, les
pays qui sont sous forte influence politique par les Etats-Unis ne font pas
référence aux droits sociaux dans leur constitution.
B- Le contenu du droit à la
santé
En tant que droit fondamental de l'homme, le droit à la
santé englobe l'ensemble des normes visant à satisfaire les
besoins de santé, ainsi que l'ensemble des moyens pour les mettre en
application.
Si l'on retient son concept extensif, le droit à la
santé englobe d'une part les moyens utilisés par l'état en
vue d'une redistribution des ressources dans le but d'assurer les soins de
santé pour tous, en respectant les principes de non discrimination et
d'équité dans la fourniture de ces soins. D'autre part ce concept
englobe la prévention sanitaire, l'éducation et la formation en
santé, la protection de l'environnement ainsi que la garantie des autres
droits humains (droit à la nourriture, au logement, droit d'association
et de participation).
Dans le but de clarifier le contenu du droit à la
santé, il est nécessaire d'appliquer à la santé une
approche basée sur les droits humains. Cette approche donne à la
santé une importance sociale exceptionnelle et permet d'analyser chaque
situation en tenant compte des principes de droits humains à savoir la
dignité humaine, l'égalité, la non discrimination, la
participation des individus aux problèmes de santé les affectant.
Partant de cette approche, le droit à la santé est entendu comme
un droit individuel et interdépendant avec les autres droits. Cette
approche permet également de concevoir la santé comme un bien
social et non pas seulement comme un problème médical, technique
ou économique. Le droit à la santé est donc le droit de
recevoir des soins dans la dignité et sans discrimination, le droit
à toutes les conditions qui préservent la santé comme
l'alimentation saine, le logement salubre, les conditions d'hygiène et
de sécurité au travail, et un environnement sain.
1- les principes généraux de droits
humains
a- La dignité, élément central du
droit à la santé
La dignité inhérente à l'homme est
reconnue dans le préambule de la DUDH. Elle est à la base de la
liberté, de la justice et de la paix, c'est le principe de base de tous
les droits de l'homme. La dignité humaine est l'élément
central du droit à la santé garantissant ainsi non seulement le
droit aux soins de santé mais également le respect de la
liberté, la non discrimination, le droit à un environnement sain,
le droit à la nourriture, au logement et à l'éducation.
Chaque individu a une dignité qui doit être respectée
quelle que soit sa race, sa langue, son niveau social ou économique.
b- Le principe de non discrimination
C'est un principe fondamental des droits de l'homme. L'article
2 de la DUDH prévoit : « chacun peut se
prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés
proclamés dans la présente déclaration, sans distinction
aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion,
d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale,
de fortune, de naissance ou de toute autre situation ».
La DUDH rejette la discrimination pour toute raison, et en
particulier pour raison économique. Elle rejette donc toute approche de
politique de la santé basée sur une conception purement
économique. Si l'état considère les soins de santé
en terme de dépenses et de bénéfices lors de la
réalisation des choix politiques, il va défavoriser les personnes
économiquement faibles. Or, les personnes défavorisées
économiquement, sont plus vulnérables à la maladie, et en
plus mauvaise santé par rapport à l'ensemble de la population. La
discrimination va les rendre encore plus vulnérables à la maladie
et à la mauvaise santé. Il en découle donc que le principe
de non discrimination est essentiel pour la protection du droit à la
santé des pauvres et des personnes vulnérables ayant beaucoup de
problèmes de santé.
La DUDH rejette également la discrimination
basée sur le sexe ou la race. Dans beaucoup de pays, l'état de
santé des femmes est amoindri par rapport à celui des hommes,
certaines pratiques culturelles font même appel à des mutilations
corporelles sur cette population.
2- Le droit aux soins de santé fait partie du droit
à la santé
Mettre un système de santé à la
disposition de la population suppose la fourniture d'un service de soins
disponible, accessible, et adapté. Cela suppose également un
financement de soins adapté à travers un système
d'assurance santé abordable pour tous.
L'observation générale N°14 a
clarifié et précisé le droit aux soins, en
précisant que « la création de conditions propres
à assurer à tous les services médicaux et une aide
médicale en cas de maladie tant physique que mentale suppose
l'accès rapide dans des conditions d'égalité, aux services
essentiels de prévention, de traitement et de réadaptation ainsi
qu'à l'éducation en matière de
santé... ». Dans cette observation, il est
précisé que la disponibilité signifie qu'il doit exister
dans l'état partie des installations, biens et services ainsi que des
programmes fonctionnels en matière de santé publique et de soins
de santé. L'accessibilité signifie que les installations, biens
et services doivent être accessibles à tous sans discrimination,
et accessibles à tous physiquement sans danger, en particulier les
groupes vulnérables on marginalisés. L'accessibilité est
aussi économique, les services doivent être d'un coût
abordable, et obéissant au principe de l'équité de sorte
qu'ils soient abordables pour tous y compris les groupes socialement
défavorisés. Ces services biens et installations doivent
obéir aux principes de respect de la dignité et de
l'équité.
La déclaration d'Alma Ata vise la santé pour
tous à travers une approche basée sur les soins de santé
primaire. Cette déclaration insiste sur l'importance des mesures
préventives (vaccination, planification familiale), sur la participation
des individus à la planification et l'exécution des soins de
santé, sur les soins maternels et infantiles, sur l'éducation
à la santé.
Parmi les priorités de santé, le droit à la
santé maternelle, infantile et génésique vise la
diminution de la mortalité infantile, de la mortalité maternelle,
et l'accès à la planification familiale. La mortalité
maternelle reste en effet très élevée dans les pays du
tiers monde, parce que les accouchements se font en dehors des milieux
médicalisés, à distance des centres d'accouchement sans
possibilité de transfert d'urgence et sans prendre les
précautions d'hygiène nécessaires. La mortalité
maternelle est dramatique pour les foyers qui perdent un élément
important de la famille habitué à effectuer des tâches
essentielles pour les enfants. La mortalité maternelle est un indicateur
du niveau de développement de l'état de santé d'une
population. C'est aussi l'un des objectifs du millénaire pour le
développement, qui vise à réduire les taux de
mortalité maternelle. La mortalité infantile est un fléau
des pays pauvres. La réduction de la mortalité infantile est un
objectif de développement du millénaire. Le droit à la
prophylaxie et au traitement du VIH/SIDA sera fait selon une approche qui fait
participer toutes les parties prenantes et tous les secteurs, en tenant compte
des spécificités hommes-femme, et en mettant à la
disposition de tous les citoyens les moyens et les connaissances pour
prévenir l'infection.
3- La jouissance des autres droits est essentielle pour
l'exercice du droit à la santé
a- Le droit à la participation
La participation des individus à tous les sujets qui
les affectent est essentielle pour la protection de tous les droits de l'homme.
Le droit de participation aux décisions est un principe de droit humain,
et c'est aussi un principe de démocratie. Le pacte relatif aux
droits civils et politiques stipule dans son article 25.a :
« Tout citoyen a le droit et la possibilité sans aucune
des discriminations visées à l'article 2 et sans
restrictions déraisonnables : a- de prendre part à
la direction des affaires publiques, soit directement soit par
l'intermédiaire de représentants librement
choisis... ».
La déclaration d'Alma Ata précise bien que
« Tout être humain a le droit et le devoir de participer
individuellement et collectivement à la planification et à la
mise en oeuvre des soins de santé qui lui sont
destinés ».
Pour pouvoir participer aux affaires de santé les
concernant, les individus doivent d'abord recevoir l'information
adéquate nécessaire. La participation de la population va se
matérialiser dans la conception des politiques, des programmes et des
stratégies, dans le choix de l'arrangement des priorités, dans
l'évaluation des programmes gouvernementaux et des politiques, dans
l'allocation des budgets et l'application des législations relatives au
droit à la santé. L'objectif final étant de subvenir
réellement aux besoins de la population. C'est en effet grâce
à la participation, que mêmes les plus faibles individus peuvent
faire entendre leur voix pour soumettre leurs demandes légitimes. Ils ne
seront plus de simples spectateurs dans l'attente du recevoir la charité
de la part du gouvernement.
b- L'exercice des autres droits de l'homme
Les droits de l'homme sont interdépendants et
indivisibles. Chaque droit dépend pour sa réalisation des autres
droits. Ainsi, la réalisation du droit à la santé est
étroitement liée aux autres droits comme l'a bien
clarifiée l'observation N°14 du comité des droits
économiques, sociaux et culturels : « le droit
à la santé est étroitement lié à d'autres
droits de l'homme et dépend de leur réalisation : il s'agit
des droits énoncés dans la charte internationale des droits de
l'homme, à savoir les droits à l'alimentation , au logement,
au travail, à l'éducation, à la dignité humaine,
à la vie, à la non discrimination et à
l'égalité, le droit de ne pas être soumis à la
torture, le droit au respect de la vie privée, le droit d'accès
à l'information et les droits à la liberté d'association,
de réunion et de mouvement. Ces droits et libertés, notamment,
sont des composantes intrinsèques du droit à la
santé ». ().
La réalisation du droit à la santé
dépend ainsi de facteurs ne relevant pas directement des services de
santé mais de la réalisation d'autres droits civils et politiques
aussi bien que les droits économiques sociaux et culturels.
- La liberté d'association et la liberté
d'expression, leur atteinte compromet la participation de la
population aux prises de décisions en matière de santé,
les voix des personnes marginalisées et faibles sont automatiquement
bridées.
- Le droit à l'alimentation est
destiné à permettre à tout être humain d'avoir un
accès régulier, permanent et libre, directement ou par achat,
à une nourriture quantitativement adéquate et suffisante et qui
corresponde aux traditions culturelles locales. L'accès à la
nourriture est essentiel pour l'accomplissement du droit à la
santé. On ne peut jouir du meilleur état de santé en
vivant dans le manque de nourriture et d'eau potable. La malnutrition cause
beaucoup de maladies en particulier dans les pays pauvres où elle est
aussi une cause de mortalité infantile. Le manque de certains
éléments présents dans les denrées alimentaires,
tels que les minéraux et les vitamines, peut limiter le droit d'un
individu à avoir une santé optimale, un droit humain fondamental.
A titre d'exemple, une déficience alimentaire en fer qui est très
fréquente puisqu'elle touche près d'un milliard d'individu dans
le monde, peut conduire à une diminution très importante de la
capacité mentale et physique. Cela a des conséquences sur le
travail, la santé, et par là la survie.
- Le droit au logement s'entend en terme de
logement salubre doté d'eau courante et de moyens d'assainissement
adéquats. Privées de ces équipements, les personnes sont
exposées à la mauvaise santé et à
différentes maladies. Le logement est un facteur déterminant du
droit à la santé.
- Le droit à l'éducation permet
à l'individu d'acquérir les possibilités de participation
aux affaires publiques, d'adhérer aux programmes de prévention
des maladies. Une enquête effectuée par l'OCDE au Pérou a
montré que le développement statural de l'enfant est
étroitement corrélé au niveau d'éducation des
parents. En effet, les parents éduqués ont accès à
l'information, aux conseils médicaux, adhérent à la
prévention des risques et à la politique de régulation des
naissances. Les mères scolarisées surveillent mieux leur
grossesse, et leurs nouveau-nés, ce qui permet de réduire les
risques de handicap à la naissance et de mortalité infantile.
- Le droit à l'information est
essentiel pour rester en bonne santé. L'objectif de l'information est de
transmettre à la population les connaissances nécessaires pour
éviter la propagation des épidémies, pour prévenir
différentes maladies en agissant sur les facteurs de risque, pour
changer de comportements exposants à différents dangers. Le droit
à l'information c'est aussi le droit à l'information juste, qui
prémunit les individus de toutes les informations mensongères et
de la désinformation. L'atteinte au droit à l'information est
observée dans certaines pratiques commerciales qui font appel à
la publicité mensongère pour augmenter les profits commerciaux,
en étant conscient de vendre des produits dangereux pour la
santé. Parfois, l'atteinte à ce droit est le fait de
gouvernements soucieux de préserver l'ordre et craignant des mouvements
de panique de la population. Ces gouvernements s'abstiennent d'informer les
populations sur les éléments exacts d'un événement
ayant des conséquences graves sur la santé des citoyens.
Rappelons la catastrophe de Tchernobyl, lorsque les autorités
soviétiques ont manqué d'informer les citoyens exposés sur
l'ampleur de cet événement et des mesures de
sécurité à prendre. Le discours officiel avait tendance
à minimiser cet événement dramatique. Les
conséquences sur la santé des citoyens se sont ressenties sur des
milliers de personnes et ont duré plusieurs années.
- Le droit au travail permet à tout
individu adulte d'avoir un revenu convenable pour subvenir à ses propres
besoins et à ceux de sa famille, et d'accomplir ses devoirs envers la
société. Le droit au travail fait référence au
travail décent respectueux des droits humains et des mesures de
sécurité et d'hygiène. Certaines entreprises, dans le seul
but d'augmenter leur profit évitent d'informer le travailleur sur les
dangers des produits aux quels il s'expose, s'abstiennent de lui fournir la
protection nécessaire, le laissant manipuler des produits dangereux ou
des machines sans aucune protection, mettant ainsi sa santé et sa vie en
danger.
4- La protection de l'environnement
Bien que l'article 12 n'ait pas spécifié la
protection de l'environnement dans ses dispositions, il a cependant
exprimé dans son deuxième paragraphe la nécessité
de « l'amélioration de tous les aspects de
l'hygiène du milieu et de l'hygiène
industrielle ». L'observation N°14 a été plus
explicite en développant cet aspect, elle considère qu'il ressort
du processus de l'élaboration et du libellé spécifique du
paragraphe 2 de l'article 12 que « le droit à la
santé englobe une grande diversité de facteurs
socioéconomiques de nature à promouvoir des conditions dans
lesquelles les êtres humains peuvent mener une vie saine et
s'étend aux facteurs fondamentaux déterminants de la santé
tels que l'alimentation et la nutrition, le logement, l'accès à
l'eau salubre et potable et à un système adéquat
d'assainissement, des conditions de travail sûres et hygiéniques
et un environnement sain ».
Les dégradations de l'environnement sont en effet
à l'origine d'un ensemble de maladies. La pollution de l'environnement
affecte directement la santé des populations. Les déchets
chimiques issus des activités industrielles sont toxiques pour les
humains. Des accidents de fuites de déchets industriels
enregistrés au cours de l'histoire ont laissé des souvenirs
indélébiles dans les annales. Le cas de l'explosion de l'usine
de pesticides d'Union Carbile à Bhopal en Inde en 1984 est
particulièrement choquant. Cet accident a fait des milliers de morts et
a été à l'origine d'affections morbides chez des centaines
de milliers des personnes. En 2005, l'explosion de l'usine Jilin Petrochemical
en Chine a pollué avec des produits cancérigènes le fleuve
Soghua. La catastrophe de Tchernobyl en 1986 dans une centrale nucléaire
en Ukraine a fait plus de 25 000 morts, 200 000 invalides et a
été à l'origine d'une augmentation des cas de cancer dans
les populations exposées. Les estimations parlent de 40 000
à 560 000 morts par cancer, plus autant de cancers non mortels,
sans parler de malformations d'enfants et du bétail (5).
L'observation Générale N°14 du CODESC
explique le contenu du paragraphe 2 de l'article 12 comme le droit à un
environnement naturel et professionnel sain. Les mesures citées dans cet
article concernant l'hygiène du milieu et l'hygiène industrielle
correspondent aux mesures de prévention contre les accidents de travail
et les maladies professionnelles, les mesures visant à empêcher et
réduire l'exposition de la population à certains dangers tels que
les radiations ou produits chimiques ou toxiques et autres facteurs nocifs
ayant une incidence directe sur la santé des individus. Le comité
prend note à cet égard du principe 1 de la déclaration de
Stockholm de 1972, selon lequel « L'homme a un droit fondamental
à la liberté, à l'égalité et à des
conditions de vie satisfaisantes, dans un environnement dont la qualité
lui permette de vivre dans la dignité et le bien être »,
ainsi que des faits nouveaux survenus récemment dans le domaine du droit
international, en particulier de la résolution 45/94 de
l'Assemblée générale des Nations unies sur la
nécessité d'assurer un environnement salubre pour le
bien-être de chacun ; il note également le principe 1 de la
déclaration de Rio et les dispositions des instruments régionaux
relatifs aux droits de l'homme, notamment l'article 10 du protocole additionnel
à la Convention américaine relative aux droits de l'homme.
La protection de l'environnement, directement liée
à l'exercice des droits de l'homme, est mentionnée dans de
nombreuses conventions relatives au droit à l'environnement. Le
1er sommet mondial sur l'environnement a eu lieu en 1972, suivi par
la création du programme des Nations Unis pour l'environnement (PNUE).
Par la suite, de nombreuses recommandations et conventions ont
été émises. Le protocole de Kyoto a fixé un
calendrier pour la réduction de l'émission de gaz à effet
de serre. Les directives du comité des droits économiques,
sociaux et culturels énoncent que les états devraient :
« s'abstenir de polluer de façon illicite l'air, l'eau et
le sol, du fait par exemple d'émissions de déchets industriels
par des installations appartenant à des entreprises publiques,
d'employer des armes nucléaires, biologiques ou chimiques ou d'effectuer
des essais à l'aide de telles armes si ces essais aboutissent au rejet
de substances présentant un danger pour la santé humaine, et de
restreindre à titre punitif l'accès aux services de santé,
par exemple en temps de conflit armé, ce en violation du droit
international humanitaire » (Observation Générale
N°14 du CODESC).
C- Les obligations des états
Le droit à la santé crée des obligations
pour les gouvernements. Celles-ci ont été bien
précisées par l'observation générale N°14. Ces
obligations découlent des principes de dignité,
d'équité, de non discrimination et de participation à la
prise de décision. Elles englobent les composantes de base à
savoir les soins de santé (installation, biens et services) et les
déterminants de santé tels que le droit à l'alimentation,
à un logement salubre, à l'éducation, à
l'information et à un environnement sain.
Les obligations sont crées par la ratification des
états parties aux pactes, traités et conventions, qui imposent
aux états l'obligation de faire on de ne pas faire, d'accepter la
supervision des organes de surveillance, et d'adresser des rapports
réguliers. Le mécanisme de surveillance du pacte repose sur le
travail du comité de surveillance qui observe jusqu'à quel point
l'état se conforme aux dispositions du pacte, il examine les violations,
les rapports de l'état et des ONG et enfin émet des suggestions
ou des recommandations. L'état en ratifiant le pacte devient responsable
devant la communauté internationale et devant la population. Chaque
état est tenu d'adopter des mesures législatives qui incluent les
dispositions internationales du droit à la santé, afin de
permettre à la population d'accéder au droit à la
santé et d'avoir des recours en cas de violation de ce droit. Ces
mesures législatives seront concrétisées par la mise en
oeuvre de politique, de programmes et de stratégies, qui tracent les
priorités, allouent les ressources, évaluent les
résultats.
En raison de la différence importante entre les pays du
point de vue social et économique, l'application du droit à la
santé ne peut se faire partout de manière identique. C'est la
raison pour laquelle les obligations ne sont pas appliquées
uniformément à tous les états. Pour certaines obligations,
l'état devra démontrer une adhésion immédiate, pour
d'autres obligations la réalisation se fera progressivement selon le
niveau économique du pays. Les textes montrent bien que la
disparité économique entre les pays a été prise en
considération. D'abord, en définissant le droit à la
santé par l'expression : « le niveau de
santé le plus élevé qu'il est possible
d'atteindre », il est sous entendu une certaine
flexibilité pour la réalisation du droit à la santé
en fonction du niveau de développement économique de chaque pays,
de ses ressources financières et des conditions sociales. Ensuite, comme
pour tous les droits sociaux et économiques, le pacte des droits
économiques, sociaux et culturels a mis en place le principe
réalisation progressive. Ce principe autorise les pays à
réaliser le droit à la santé de manière
progressive. Il est admis que la réalisation du droit à la
santé de manière intégrale est difficile et
nécessite des processus compliqués, requérant la
mobilisation de ressources importantes. C'est la raison pour laquelle le
principe de réalisation progressive est appliqué pour mettre en
oeuvre ce droit. Il s'agit d'une certaine flexibilité vis-à-vis
des pays en voie de développement qui disposent de ressources rares.
Cette flexibilité n'autorise pas les états à
se détourner de leurs obligations internationales. La
réalisation progressive du droit à la santé doit
s'entendre comme la réalisation aussi rapide que possible. Il est utile
dans ce sens de dégager les obligations immédiates qui sont
appliquées sans tenir compte du manque de ressources car elles sont peu
consommatrices en termes financiers. Un noyau des obligations minimum est
dégagé comprenant l'obligation d'éliminer toute
discrimination dans l'accès au système de soins
particulièrement vis-à-vis des personnes vulnérables et
désavantagées, d'assurer la participation de la population aux
prises de décisions affectant leur santé. Figure également
parmi les obligations immédiates, l'abstention de la part de
l'état d'accomplir des actions empêchant les populations de jouir
du droit à la santé. C'est l'obligation de respecter le droit
à la santé lors de l'élaboration des lois et des
politiques nationales. Il s'agit par exemple d'empêcher la
publicité de produits dangereux pour la santé, d'empêcher
la diffusion d'informations médicales erronées. Il s'agit
également de prendre les mesures législatives,
financières, et administratives pour faciliter la réalisation du
droit à la santé, et assurer l'accès au recours en cas de
violation des droits de l'homme. L'état pourra ainsi mettre en place une
stratégie nationale et un plan d'action afin de réaliser
progressivement ces obligations (7). On peut ainsi dégager les
obligations des gouvernements qui peuvent être soit des obligations
négatives, soit des obligations positives. Il s'agit de l'abstention de
discrimination, de l'application du principe de participation du droit à
la santé et de la mobilisation des ressources pour réaliser le
droit à la santé. Même les pays à faible budget, et
ne pouvant mobiliser beaucoup de ressources, devront assurer une distribution
des ressources de manière plus équitable afin d'améliorer
l'accès des services aux populations vulnérables, pauvres et
désavantagées. Ces mesures légales et politiques ne
demandent pas des coûts élevés, mais une volonté
politique.
L'observation générale N°14 stipule la mise
en oeuvre à l'échelon national d'une législation cadre,
définie à partir des principes relatifs aux droits de l'homme, la
définition d'une politique et d'indicateurs permettant de mesurer
l'exercice du droit à la santé. La stratégie nationale
définit les ressources dont l'état dispose ainsi que le mode
d'utilisation de ces ressources ayant le meilleur rapport coût
efficacité. Cette stratégie nationale devait reposer sur les
principes de la responsabilité, de la transparence et de
l'indépendance de la magistrature. La mise en train de la
stratégie nationale sera assurée grâce à une loi
cadre qui va instituer les mécanismes de contrôle de la mise en
oeuvre de la stratégie et du plan d'action national en matière de
santé. Pour surveiller comment l'état s'acquitte des obligations
lui incombant, il est nécessaire de définir des indicateurs et
des critères relatifs à l'exercice du droit à la
santé.
CHAPITRE 2- LES INTERACTIONS DU DROIT A LA SANTE AVEC
LE DEVELOPPEMENT
On a pensé au cours des années soixante dix que
le développement était une affaire de croissance
économique, celle-ci jouera le rôle de moteur pour assurer une
meilleure santé aux populations. Mais les événements
historiques ont montré que la croissance seule ne suffit pas à
assurer le bien être des individus.
I- L'état de santé des populations et le
développement économique
A- La corrélation entre l'état de
santé de la population et le niveau de développement
économique
1- Les comparaisons entre pays développés et
pays en développement montrent des différences flagrantes en
matière de santé
En occident, tout on long du siècle dernier,
l'état de santé des populations a affiché des
améliorations notables. En un siècle, une maladie comme la
variole a été complètement éradiquée ;
la rougeole qui a décimé au 19ème siècle
des communautés entières a pratiquement disparue.
L'espérance de vie qui avoisinait la quarantaine au
17ème siècle a doublé aujourd'hui. Ces
améliorations spectaculaires dans l'état de santé se sont
produites de façon concomitante avec le développement
économique. Le développement économique en occident s'est
accompagné d'une amélioration des mesures d'hygiènes, des
conditions de logement, d'assainissement, de l'alimentation, et des conditions
de travail, ce qui a été à l'origine de
l'amélioration de l'état de santé des populations.
Cela n'a pas été le cas dans les pays en
développement. La comparaison entre pays développés et
pays en voie de développement montre des différences flagrantes
en matière de niveau de santé. Les indicateurs de santé,
relatifs à l'espérance de vie, la prévalence du HIV/SIDA,
les taux des maladies infectieuses et parasitaires montrent de grandes
différences. Ainsi dans les pays les moins avancés,
l'espérance de vie est inférieure à 45 ans. Le taux de
mortalité maternelle avoisine 300 pour 100000 naissances vivantes alors
que ce taux est au dessous de 10 dans les pays développés. La
mortalité infantile s'élève à 84.3%o dans les pays
en développement alors qu'elle est inférieure à 10%o dans
les pays riches. La mortalité et la morbidité dans les pays du
sud est due essentiellement aux maladies transmissibles : tuberculose,
paludisme, diarrhées. La mortalité annuelle due à la
tuberculose et au paludisme est de 3 millions de décès par an. La
majorité a lieu dans les pays pauvres avec une particulière
gravité en Afrique subsaharienne. L'infection au VIH prend elle aussi
une ampleur mondiale. Au cours de l'année 2001, 3 millions de personnes
sont mortes du SIDA et 5 millions ont contracté le virus dont la
moitié dans la tranche d'âge 15 à 24 ans.
Un ensemble de paramètres expliquent les
inégalités dans le niveau de santé entre les populations
des pays en développement et les populations occidentales. D'abord, le
développement économique produit de la richesse qui est
utilisée pour améliorer les conditions d'hygiène, de
logement, d'alimentation, de travail. Les fruits de la croissance
économique sont investis pour l'amélioration de l'état de
santé. L'amélioration des niveaux de vie renforce la demande de
bien être, la planification familiale réduit la
démographie. Autant de facteurs qui améliorent l'état de
santé des populations grâce à l'accroissement de la
productivité, à l'urbanisation, à l'augmentation des
ressources vivrières, aux avancés scientifiques médicales,
et à l'assainissement de l'environnement. Les investissements dans le
domaine de santé sont plus importants. Dans les pays riches, les
dépenses de santé par habitant s'élèvent à
3100 Dollars (11% du PIB), ceux ci ne représentent que 81 dollars pour
les pays en voie de développement et 37 dollars en Afrique (6% du PIB).
Ces dépenses faibles autorisent des installations de soins de
santé en quantité et en qualité insuffisantes. Aussi, le
nombre de lits d'hôpitaux qui est de 7.15 par mille habitants dans les
pays développés, n'est que de 2.7 par mille dans les pays en voie
de développement, et de 1.2 pour l'Afrique subsaharienne. Le nombre de
médecins par 25 000 habitants est de 50 dans les pays
développés et de 1 dans les pays les plus pauvres. Le
système de soins en occident efficace en terme de disponibilité,
accessibilité et acceptabilité se traduit par des indicateurs de
santé satisfaisants, et un niveau de santé de la population
décent.
2- Les grands problèmes de santé dans les
pays du Sud sont un frein au développement économique
a- La santé maternelle
Des milliers de femmes meurent chaque année dans les
pays pauvres à la suite d'accouchements ou d'avortements. Cette
mortalité prive de nombreux foyers d'un élément
indispensable pour l'éducation des enfants, pour toutes les charges de
travail à domicile et pour la stabilité du foyer. Le
décès précoce de la mère est source d'abandon des
enfants avec toutes les conséquences qui en découlent.
A l'heure actuelle, l'OMS estime la mortalité
maternelle à 1000 décès pour 100 000 naissances vivantes.
La mortalité maternelle traduit le manque d'accès à un
personnel qualifié pendant la grossesse, l'accouchement et le
post-partum. À l'heure actuelle, seuls 43 % des accouchements sont
assistés par un personnel de santé qualifié contre 40 % en
1990. Les taux élevés de fécondité, les
maternités précoces et la faiblesse des systèmes nationaux
de santé augmentent le risque de décès maternel en
Afrique, où ce taux est estimé à 1/16, contre 1/2000 en
Europe et 1/3500 en Amérique du Nord. Les facteurs à l'origine de
cette situation sont représentées par une situation
socio-économique déplorable, le rôle de mineure que joue
la femme dans la prise des décisions et le contrôle des
ressources, et les retards enregistrés dans l'accès aux soins de
santé appropriés.
L'OMS estime que près de 19 millions d'avortements se
font dans des conditions à risque. L'avortement volontaire
représente pour une femme la seule solution à une grossesse non
désirée ou forcée. Même si l'avortement est
socialement réprimé, condamné moralement, il reste la
solution pour la grossesse non désirée. Les raison d'une telle
grossesse sont multiples, irresponsabilité, violence sexuelle, manque
d'accès aux services de santé reproductive, carence des
programmes d'éducation sexuelle, méconnaissance des
méthodes contraceptives, échec des moyens contraceptifs. Les
femmes porteuses de grossesse non désirée sont vulnérables
du fait du contexte social désavantageux : manque d'accès
à la sécurité sociale, violation des droits du travail,
discrimination, pauvreté, violence dans le couple, dépendance
économique. Pour éviter la mortalité
prématurée de ces femmes, il est essentiel de cerner le
problème dans sa globalité, c'est-à-dire assurer la
justice sociale, lutter contre la pauvreté, assurer les méthodes
contraceptives, assurer les droits humains dont la liberté de la femme
à l'autonomie. Assurer un système économique où la
femme joue pleinement son rôle ; où elle peut être
indépendante économiquement (17).
b- La santé infantile : Entre
1990 et 2001, la mortalité infantile a augmenté dans neuf pays.
Globalement, dans 14 pays africains, la mortalité infantile est plus
élevée aujourd'hui qu'en 1990, et plus de 35 % des enfants sont
exposés à un plus grand risque de décès qu'il y a
10 ans. En 2002, l'Afrique subsaharienne représentait 42 % du total des
décès d'enfants de moins de 5 ans dans le monde. Actuellement,
trois des six pays qui représentent 50 % du total des
décès d'enfants de moins de 5 ans dans le monde se trouvent dans
la Région africaine. Le taux de mortalité néonatale
estimé à 45 décès pour 1000 naissances vivantes
reste également élevé, et la proportion de ceux qui sont
vaccinés contre la rougeole était de 57 % en 1990 et de 61 % en
2003.
c- L'épidémie du VIH/SIDA
L'épidémie du VIH/SIDA a fait des ravages dans
les populations d'Afrique. La morbidité et la mortalité
liées à cette maladie affecte directement le monde du travail et
par la l'économie du pays. Cette maladie touche
préférentiellement les populations jeunes et actives. Les
entreprises sont ainsi privées d'une main d'oeuvre qualifiée et
jeune. Par ailleurs, les foyers qui perdent un père ou une mère
qui sont parfois la seule source de revenu, sont voués à la
misère et vont faire grossir les rangs des pauvres et des sans abris.
Les pays en voie de développement comptent 90% des infections et
l'Afrique subsaharienne près des 2/3 et on y dénombre 75% des
décès. Les foyers africains sont en général pris
dans un cycle de pauvreté caractérisé par une faible
production de nourriture, des revenus bas, une mauvaise santé, la
malnutrition, le mauvais environnement sanitaire et les maladies
infectieuses.
En 2003, on a estimé que 3,2 millions de personnes
avaient été infectées par le VIH, et que 2,3 millions de
personnes étaient mortes du SIDA. En Afrique australe, on a
signalé un taux de prévalence de 20 % chez des femmes enceintes
âgées de 15 à 24 ans. La prévalence du VIH/SIDA dans
les pays de l'Afrique atteint 6.9% pour les femmes âgées entre 15
et 24 ans. Les femmes enceintes ont des taux élevés : 25% en
Afrique du Sud, 39% au Swaziland et 32.9% au Botswana (Programme des Nations
Unies pour le SIDA). Mais le VIH/SIDA est plus répandu dans les
régions les plus pauvres. Les pauvres sont plus vulnérables
à une infection au VIH que les riches. La prévalence du VIH
manifeste peu ou pas de signes de recul. Des systèmes de santé
peu satisfaisants et le manque de ressources financières et humaines
nécessaires pour intensifier les programmes de lutte contre le VIH/SIDA
sont les principaux problèmes qui entravent l'accès aux services
de prévention, au traitement et aux soins.
d- Le fléau paludéen : Il
s'agit d'un grave problème de santé en Afrique subsaharienne. Il
touche tout particulièrement les jeunes enfants et les femmes enceintes,
surtout dans les zones rurales, où l'accès aux services de soins
est limité. L'Afrique représente plus de 90 % de la charge
mondiale de morbidité paludéenne. L'emploi de moustiquaires
imprégnées d'insecticide varie actuellement entre 0,1 % et 63 %
dans les pays qui l'ont adopté pour les enfants de moins de cinq ans.
Seuls 13 % des pays pratiquent pleinement le traitement préventif
intermittent pour les femmes enceintes.
B- les politiques de développement s'appuyant
uniquement sur la croissance économique n'assurent pas
l'amélioration du niveau de santé
Le modèle de croissance associé à la
conception libérale de l'économie, privilégiant
l'accroissement du PIB et la maximisation des profits, néglige
l'investissement social. Ce modèle est à l'origine de
discrimination envers les personnes vulnérables et marginalisées,
en matière d'accès aux soins, à l'eau et à
l'alimentation saine, aux conditions de vie décentes, et aboutit par
conséquent à des indicateurs de santé peu satisfaisants.
La croissance économique qui ne tient pas compte des droits
fondamentaux, prive la population de nourriture et d'eau, oriente les
ressources vers les secteurs rentables au détriment des secteurs sociaux
et détruit l'environnement.
Un exemple frappant est celui de l'Irlande qui a connu des
avancées économiques remarquables, avec des hauts niveaux
d'exportations et l'attraction sur son sol de nombreuses sociétés
transnationales. Le revenu moyen de la population Irlandaise a doublé
entre 1989 et 2002, le taux de chômage a sensiblement diminué. Ces
résultats économiques satisfaisants contrastent avec la
détérioration de la qualité de vie. Les gens sont plus
stressés, boivent plus d'alcool, travaillent plus, voient moins souvent
leurs familles et leurs amis. Le salaire moyen a doublé ce qui a
réduit le nombre de personnes vivant dans les conditions de privation.
En revanche, la pauvreté relative a augmenté. On considère
que des personnes vivent dans la pauvreté relative quand leurs revenus
les empêchent d'avoir un niveau de vie considéré comme la
norme de la société. La pauvreté relative est
passée de 6% (en 1994) à 12.9% (en 2001). Elle indique que tout
le monde n'a pas tiré profit de la croissance économique. Les
indicateurs de santé en Irlande ne sont pas au niveau de ceux des autres
pays occidentaux. En 2001, l'espérance de vie est la plus basse de toute
l'union Européenne. Les taux de mortalité par maladie sont plus
élevés que la moyenne Européenne. L'Irlande a opté
pour la réduction des impôts afin de maintenir le taux de
croissance économique. Cette politique réduit les dépenses
de l'état en particulier pour les services sociaux, augmentant par
conséquent le nombre de personnes condamnés à l'exclusion
sociale, et ceux vivant avec une mauvaise qualité de vie (8).
Le Chili affiche des taux de croissance jugés dignes de
ceux des "tigres" asiatiques, et a même cessé ses demandes de
nouveaux crédits à la Banque interaméricaine de
développement. Mais les performances économiques de ce pays
qualifiés de "miracle" chilien ne parviennent pas à
améliorer l'accès aux soins à toute la population. Au
contraire, même si le budget de la santé publique a doublé,
et si les indicateurs de santé en particulier la mortalité
infantile sont nettement meilleurs que ceux des autres pays de la
région, le fossé des inégalités en matière
d'accès aux services de santé demeure discriminatoire pour les
pauvres. L'Etat se désengage du secteur de la santé notamment
avec le projet d'hôpitaux publics autonomes mettant en avant
l'autofinancement. Une nouvelle culture dans le milieu de santé voit le
jour et s'accompagne d'un mercantilisme effréné qu'illustrent les
choix de la profession médicale. Sur 16 400 médecins que compte
le pays, près de 45 % exercent exclusivement dans le secteur
privé. (GUILLOU BENOÎT, Une croissance sans dividendes sociaux. Le
Chili malade de la santé Le monde diplomatique Mars 1997, page 18)
Les Etats Unis pays développé et riche, bien
qu'il affiche des indicateurs de santé globaux convenables, est un pays
où les disparités en matière de santé sont les plus
flagrantes. Certaines couches de la population, ne disposant d'aucune
couverture sociale, sont délaissés par un système de soins
qui s'occupe uniquement des personnes riches ou disposant d'assurance
santé. La frange de population défavorisée présente
un état de santé voisin de celui des populations des pays en
développement. A titre d'exemple, le taux de mortalité infantile
aux états unis est de 9%o naissances vivantes, alors que ce taux est
à 5 pour le Japon et la Suisse.
Le cas de la Russie est également éloquent,
malgré une croissance économique, les indicateurs de santé
ont connu une régression notable, sur toutes les franges de la
population. La politique de cet état qui favorise le retrait des
services publics du secteur de la santé en est une des causes
évidentes.
C-La méconnaissance du droit à la
santé dans les politiques de développement explique les mauvais
résultats sanitaires
En analysant les raisons à l'origine des mauvaises
performances de santé, on retrouve des politiques de
développement tournées essentiellement vers la croissance
économique et méconnaissant le droit à la santé, le
droit à l'environnement sain, à l'alimentation, au logement, au
travail et à l'éducation. Une croissance économique
effrénée qui n'est pas soucieuse de la protection de
l'environnement entraîne des conséquences néfastes sur
la santé. On assiste ainsi dans les pays en voie de développement
à l'émergence de maladies engendrées par les modifications
de l'environnement (cancers, asthme...). Les politiques basées sur la
croissance économique seule créent des inégalités
entre les groupes sociaux et une destruction de la cohésion sociale. Les
inégalités sociales se répercutent directement sur
l'état de santé. L'espérance de vie diffère de 10
ans entre la classe dominante et celle des ouvriers en Union Européenne
(9). Les pays ayant des syndicats puissants (Suède par exemple) et ayant
mis en oeuvre des politiques de redistribution visant à réduire
les inégalités, ont de meilleurs indicateurs de santé. La
raison en est que la cohésion sociale est plus forte, le sens du pouvoir
et de la participation est plus élevé et le sentiment de distance
sociale est plus réduit. (9).
Le développement économique et la croissance du
revenu sont certainement des facteurs qui contribuent à expliquer les
remarquables améliorations de la santé au 20ème
siècle, mais pris comme unique paramètre, la croissance du revenu
ne peut pas expliquer les améliorations spectaculaires
enregistrées dans le domaine de la santé au cours du
siècle dernier. En effet, les expériences réalisées
à Cuba et au Sri Lanka démontrent que des améliorations
spectaculaires peuvent survenir dans le domaine de la santé sans que le
revenu ne soit élevé en croissance rapide. En 1991, les citoyens
du Sri Lanka ont une espérance de vie de 71 ans, soit la même que
celle de pays à revenu plus élevé. Les citoyens de la
Chine ont une espérance de vie à la naissance à 71 ans,
plus élevée que celle des pays à faible revenu. Ceci
traduit que les ressources d'un état ne représentent pas l'unique
facteur qui agit sur l'amélioration du niveau de santé.
Les choix et les stratégies politiques de
développement d'un pays ont une influence directe sur le niveau de
santé de sa population. Un état qui impose des politiques
d'austérité économique à sa population, en
réduisant les dépenses publiques, en renchérissant les
produits alimentaires, en baissant les salaires, crée toutes les
conditions qui entravent l'exercice du droit à la santé. les
états qui optent pour des politiques de développement qui
réduisent les budgets des services de santé, qui privatisent les
services de santé, qui entravent les droits des citoyens à
l'élaboration des stratégies de santé, affectent
négativement les services de santé et par là le droit des
citoyens à l'accès aux soins. Les pays en voie de
développement qui ont fait le choix des politiques
néolibérales, ne respectent plus les droits sociaux des
travailleurs, ne portent pas de considération pour leur santé et
leur sécurité au travail. Ces politiques sont soucieuses
uniquement de faire le maximum de chiffres, et ne s'inquiètent
guère de la dégradation de la santé de la population, la
dégradation de l'environnement et ses conséquences. La croissance
du revenu ne doit pas servir de stratégie unique pour accomplir des
progrès en matière de santé.
1- Le droit de l'accès aux soins et les
politiques de développement économique
Comme précisé sur l'observation
générale N°14, le droit à la santé s'entend
comme le droit d'accès à un système de protection de la
santé qui garantit à chacun sur un pied d'égalité
la possibilité de jouir du meilleur état de santé
possible. Le système de protection de la santé comprend les
installations, les biens et les services, ainsi que les programmes en
matières de santé publique et de soins de santé. Ce
système de soins doit être disponible, accessible sans
discrimination, acceptable culturellement et de qualité.
Or, les réductions des dépenses publiques de
santé dans les pays en développement, aggravent la situation du
secteur de santé. Le secteur de la santé dans ces pays est devenu
déficient en matière d'équipements et de ressources
humaines. Les installations sont par ailleurs inégalement
réparties. Certaines populations vivent à plus de 30
kilomètres du premier dispensaire de soins. Les hôpitaux sont
vétustes, leurs équipements anciens et souvent hors d'usage. Le
personnel de santé, sous payé est démotivé.
Beaucoup d'entre eux émigrent vers les pays occidentaux où les
conditions de travail et de salaire sont plus alléchantes. Cette
situation se répercute sur l'état de santé de la
population et en particulier les personnes vulnérables. Les femmes n'ont
pas accès aux soins de santé génésiques, elles ne
contrôlent pas leurs grossesses, et la mortalité dans les suites
d'un accouchement est souvent élevée. Les enfants souffrent de
malnutrition, la mortalité infantile est élevée du fait de
maladies infectieuses. Alors que cette mortalité est évitable par
des mesures simples. Mais faute d'informations, faute de personnel
formé disponibles, les enfants paient un lourd tribut.
Le retrait de l'état des services publics de soins
favorise une privatisation rapide de ce secteur. Mais, les services de soins
privés se concentrent dans les grandes métropoles et
délaissent les zones rurales, éloignées et
enclavées. Ce service privé est rarement à la
portée de tous les citoyens. Les populations nanties y ont accès
avec une durée d'attente réduite, un accueil correct, des
équipements en bon état et parfois relevant des dernières
innovations techniques. Malheureusement, la plus grande partie de la population
n'a pas accès à ces soins, et doit se contenter des modestes
prestations du secteur public. Cette médecine à deux vitesse
traduit une véritable discrimination envers les couches pauvres et
défavorisées.
2- La garantie des droits humains dans les politiques
de développement économique
Lors de l'élaboration des politiques de
développement économique, la limitation des droits de l'homme
dans le but de favoriser e développement économique est une
source de privation du droit à la santé. L'absence de
participation de la population, le non respect des normes de
sécurité et d'hygiène au travail, la limitation des
services sociaux de base sont autant de facteurs déterminants qui
entravant le droit à la santé.
a- La déclaration d'Alma Ata stipule dans son article
IV que « tout être humain a le droit et le devoir de
participer individuellement et collectivement à la planification et
à la mise en oeuvre des soins de santé qui lui sont
destinés ». L'observation générale
N°14 a aussi précisé que l'encouragement de la participation
de la population à la mise en place des services de prévention et
de soins de santé est un aspect important dans le droit d'accès
aux installations, biens et services en matière de santé. Faire
participer les populations dans les choix de santé traduit un engagement
de l'état dans les processus démocratiques. Mais, les
états, dans un souci de restrictions budgétaires, marginalisent
les populations dans l'élaboration des politiques et des
stratégies de santé, et ne laissent aucune possibilité de
participation des citoyens ou de leurs représentants aux politiques de
santé.
b- Les gouvernements intéressés uniquement par
la satisfaction des profits des entreprises privées, ne veillent pas au
respect des normes de travail universellement reconnues, telles que
l'élimination de l'exploitation de la main d'oeuvre enfantine,
l'interdiction du travail forcé, la liberté d'association, le
droit d'organisation et le droit de négociation collective et la non
discrimination en matière d'emploi. Il est notoire de constater dans
certains pays, la tolérance qu'affichent les gouvernements
vis-à-vis de l'exploitation de la main d'oeuvre enfantine, de
l'exploitation des travailleurs sous payés et ne disposant d'aucune
couverture. Ces pays, dont l'objectif est d'attirer l'investissement
étranger direct, illustrent une laxité dans l'application des
normes du travail, réduisent les coûts salariaux
alléchants, annulent ou modifient leur législation du travail et
leur législation sociale afin de créer des zones franches
industrielles. Ces zones de libre échange sont des paradis pour les
investisseurs occidentaux, où l'infrastructure est subventionnée
par l'état, et où le recours à la main d'oeuvre enfantine
et féminine est une pratique largement répandue. Aux
philippines, les entreprises étrangères sont installées
dans des zones franches sont cernées de murs et de fils barbelés
qui ressemblent à des camps de travail où les libertés
syndicales, les libertés de circulation sont très
réduites. Les multinationales recherchent une main d'oeuvre peu
chère ne réclamant aucun droit social (syndicat, logement,
sécurité social) (10).
Les politiques de développement dans les pays du tiers
monde visent à attirer l'investissement étranger direct, et pour
cela affichent une volonté délibérée de maintenir
les salaires à un bas niveau. Les bas salaires entraînent une
baisse considérable du pouvoir d'achat des pauvres, et se
répercutent sur leur état alimentaire et leur état de
santé. Selon l'OIT, dans la plupart des pays d'Afrique, les salaires
réels ont baissé de 50 à 60% depuis le début des
années 80.
La doctrine néolibérale explique la haute
prévalence du VIH/SIDA en Afrique subsaharienne. La pauvreté
aggravée par ces politiques entraîne la malnutrition et
l'affaiblissement des systèmes immunitaires. L'immigration
imposée par les facteurs économiques et sociaux, la prostitution
comme seul moyen de survie, les inégalités de genre et les
mouvements de populations ont été identifiés comme des
vecteurs contribuant à la vulnérabilité à cette
maladie. Les travailleurs immigrants, les professionnelles du sexe qui vendent
leur corps pour pouvoir nourrir leurs enfants sont autant de
phénomènes sociaux à l'origine de l'extension du VIH/SIDA.
c- La suppression des subventions alimentaires appuyée
par les politiques de développement économique, touche au droit
à l'alimentation. Elle entraîne une baisse du niveau nutritionnel
dans les couches défavorisées de la population, accroissant les
taux de malnutrition. Les politiques de développement
économique mettent au point des réformes des politiques agricoles
qui touchent même à la nature des productions. Ces réformes
remplacent les productions vivrières destinées à la
consommation intérieure, par des cultures de café, de tabac ou de
coton destinées à l'exportation afin de générer
des ressources en devises. Ces politiques réduisent les
disponibilités alimentaires, et créent une baisse des niveaux
nutritionnels et la malnutrition. En Afrique subsaharienne, les taux moyens de
croissance annuelle de la production vivrière par habitant ont
été négatifs entre 1979 et 1997. Les agriculteurs ont
renoncé aux cultures traditionnelles. L'état n'offre le
crédit et l'assistance technique qu'aux cultures destinées
à l'exportation, alors que les cultures de subsistances ne sont pas
concernées. C'est une source d'insécurité alimentaire et
de malnutrition.
d- Au même titre que les autres services sociaux, les
dépenses consacrées à l'éducation sont
gelées. Ces restrictions touchent principalement l'enseignement
primaire. En Afrique subsaharienne, le pourcentage des enfants de 6 à 11
ans scolarisés est tombé de 55% en 1979 à 45% en 1995
(UNESCO). Face à l'augmentation des frais se scolarité, les
familles choisissent de ne plus envoyer leurs filles à
l'école.
e- Le droit au logement est également
sérieusement atteint lorsque les salaires sont bas, ou le chômage
élevé, les citoyens n'ont pas assez de ressources pour satisfaire
leurs besoins fondamentaux. L'état cesse de fournir directement des
logements ou des allocations de logement aux pauvres. L'acquisition du logement
est difficile du fait du renchérissement des matériaux de
construction. La location de logement absorbe une grande partie des ressources,
les pauvres n'ont ainsi pas droit à un logement décent. Dans les
pays en développement, les trois cinquième n'ont pas accès
aux équipements sanitaires de base, prés d'un tiers sont
privés d'eau potable, un quart ne disposent pas d'un logement
décent, un cinquième n'ont aucun contact avec un service de
santé moderne, un cinquième des enfants ne vont pas
au-delà de l'avant dernière année d'enseignement primaire
et un cinquième sont sous alimentés (PNUD).
3- La protection de l'environnement dans les politiques de
développement économique
Les politiques de développement économique les
pays du tiers monde, encouragent l'exportation des matières
premières. Or, des situations vécues à travers le monde,
montrent qu'une telle attitude peut entraîner des répercussions
importantes de l'environnement avec toutes ses conséquences sur la
santé. L'exemple de l'extraction du pétrole dans certains pays
corrobore ce fait. Dans les lieux où il est extrait, le pétrole
est responsable de la pollution et de la destruction des
écosystèmes. Sur les lieux de l'extraction ou de transformation
pétrolière, des maladies comme le cancer et la leucémie
sont plus fréquentes. On enregistre des indices élevés de
mortalité infantile et de différentes maladies. Cette
activité provoque la pollution des fleuves, la destruction des
forêts, des dommages permanents et cumulatifs. Les pays du sud, soucieux
d'exporter plus pour avoir les ressources nécessaires ne prennent pas en
considération les désastres locaux. L'extraction du
pétrole et son exportation n'a pas amélioré les conditions
de vie des populations mais a provoqué la dégradation de la
situation sanitaire des personnes vivants en contact avec les installations
pétrolières. Une étude effectuée en Equateur
auprès des familles vivant près des installations
pétrolières a montré que 82,4% des gens interrogés
ont été malades au moins une fois à cause de la
pollution ; 96% connaissent des problèmes de peau et 75% des
problèmes respiratoires. La principale cause de mortalité est le
cancer qui a une moyenne trois fois supérieure à la moyenne
nationale (12).
Les extractions effrénées de différentes
matières premières dans le but de diversifier les exportations
et se procurer les devises, ont des conséquences catastrophiques sur les
ressources naturelles. Les pays s'engagent dans les exportations de ressources
naturelles de biens tropicaux notamment, sans tenir compte des
conséquences écologiques (13). Les 14 pays les plus
endettés (plus de 10 millions de dollars) sont aussi ceux où la
déforestation atteint des rythmes sans précédent (14).
L'exemple du Ghana est éloquent. Ce pays a relancé l'industrie du
bois, faisant passer la production de 147 000 à 413 000
mètres cubes entre 1984 et 1987 (15). Cette politique a
accéléré la destruction des forêts ghanéennes
dont la surface a été considérablement réduite par
plusieurs de décennies de conversion des superficies boisées en
espaces agricoles. Cette déforestation a plongé le Ghana dans une
situation désastreuse caractérisée par la chute de la
production vivrière, une baisse de fertilité des sols et des
problèmes d'approvisionnement en eau (16). Les politiques de
développement se font au détriment des ressources naturelles
créant des ravages écologiques.
L'implantation des entreprises industrielles, bien que source
d'embauche pour les pays en difficultés économiques, n'est pas
sans danger. Les activités industrielles sont sources de déchets
chimiques toxiques ayant un effet néfaste direct sur la santé des
hommes et un effet dévastateur sur l'environnement. Les déchets
rejetés par l'activité industrielle, sont sources de pollution de
l'environnement, de dégradation de la nature, de déboisement, de
l'émission de gaz à effet de serre, de pollution des sources
d'eau, de pertes de terres arables et de dommages aux zones de pêche
sources de malnutrition et de maladies. Les conséquences sont
représentées par la survenue d'inondations et de
sécheresses, d'un changement climatique et de catastrophe naturelles
menaçantes pour la vie et la santé des populations. Les
entreprises pollueuses contournent les obligations contenues dans le protocole
de Kyoto en achetant les droits d'émission de CO2 à
celles qui polluent le moins (6). En Europe, 100 000 substances chimiques
sont enregistrées. Selon l'OMS, l'exposition à ces produits
même à faible dose peut suivre gravement à la santé
(Rapport du rapporteur spécial de la commission des droits de l'homme
sur les conséquences néfastes des mouvements et
déversements illicites de produits et déchets toxiques et nocifs
pour la jouissance des droits de l'homme, E/CN.4/2006/42).
Un autre aspect de la mise en danger de la santé des
populations des pays pauvres par des motifs économiques a
été enregistré lorsque des navires contaminés par
l'amiante ont été envoyés en direction de pays du tiers
monde pour démontage.
Il ressort que l'amélioration de l'état de
santé des populations est intimement liée au respect des droits
de l'homme. La protection de la santé de la population exige que tout
développement économique doive se faire de façon synchrone
avec le développement social. La déclaration d'Alma Ata a
insisté sur la nécessité d'un développement
économique et social, fondé sur un nouvel ordre économique
international, afin de donner à tous le niveau de santé le plus
élevé possible et combler le fossé qui sépare sur
le plan sanitaire les pays en développement des pays
développés. Cette déclaration a également
relié protection de la santé et développement
économique en exhortant que la promotion et la protection de la
santé des peuples est la condition sine qua non d'un progrès
économique et social soutenu.
II- Les obstacles à l'application du droit
à la santé lors de la mise en oeuvre des politiques de
développement ont des causes multiples
Pourquoi les pays n'obéissent pas à leurs
obligations de mise en oeuvre du droit à la santé lors de
l'élaboration des politiques de développement. De nombreux
obstacles se dressent devant eux. Certains sont d'ordre financiers auxquels ils
ne peuvent se soustraire en raison des exigences internationales. D'autres
enfin le fait de contraintes commerciales. Enfin certains obstacles sont
structurels ayant des origines sociales et aboutissant à la corruption
et l'inefficacité du système judiciaire.
A-Les obstacles financiers à la mise en application
du droit à la santé dans les politiques de
développement
Les obstacles financiers au développement des secteurs
de santé sont réels. Les choix des gouvernements dans les
allocations budgétaires aux secteurs sociaux sont souvent dictés
par les institutions financières internationales dans le cadre de
programmes d'ajustement structurel. Ces programmes ont tendance à
réduire au maximum les dépenses publiques de santé.
1- Les réductions budgétaires dans le secteur
de la santé
a- Les réductions des budgets sociaux dans le cadre
des programmes d'ajustement structurels
Les politiques de développement imposent de faire des
choix lors des allocations budgétaires. Ces choix ne sont pas
délibérés. Les gouvernements sont obligés de se
soumettre à des recommandations issues d'organismes extérieurs.
En effet, les institutions financières internationales sont
impliquées dans toutes les décisions d'ordre économique
des pays débiteurs. Le FMI et la banque mondiale imposent des
réformes néolibérales qui tournent le dos à la
vision intégrale et progressiste de la santé annoncée
à Alma Ata. Les budgets de santé publique sont fortement
réduits, le secteur privé est encouragé, de même que
le recouvrement des coûts de santé. (36).
Ces institutions imposent des réductions
budgétaires dans les services sociaux des pays en développement
dans le but d'aider ces pays à pouvoir honorer leur dette
extérieure. Le FMI et la banque mondiale affirment que les dettes
extérieures des pays doivent être remboursées. Or les
valeurs de la dette atteignent des chiffres très importants. Le
transfert de capitaux du tiers monde vers les pays développés est
estimé à 189 milliards de dollars en 1995. Pour s'acquitter de
leur dette, les pays adoptent des stratégies de développement
axées sur une croissance induite par l'exportation des produits
agricoles et des produits miniers, ils fournissent les matières
premières aux pays industriels et se cantonnent au rôle
d'importateur de produits finis beaucoup plus chers. Ces politiques de
développement créent la récession économique qui
s'accompagne de revenus insuffisants et de malnutrition, et par
conséquent de vulnérabilité face à la maladie.
Des programmes économiques rigoureux sont
imposés par les institutions financières aux pays
débiteurs. Ils ont pour objectif d'entraîner une croissance
dynamique et permettre aux pays du tiers monde de sortir de l'endettement.
L'adhésion des pays du tiers monde aux programmes d'ajustement
structurel est une condition exigée par ces institutions pour que ces
pays puissent bénéficier du rééchelonnement de la
dette. Le PAS est ainsi considéré comme le seul modèle de
développement capable de transformer les économies des pays dans
les plus brefs délais possibles et les aider à tirer partie des
possibilités offertes par la mondialisation rapide de l'économie
planétaire. Les gouvernements sont encouragés à changer
leur politique de développement en passant de la planification du
développement, à une politique de dévaluation, de
déréglementation, de libéralisation et de privatisation.
L'ajustement structurel vise à restructurer les capacités
productives pour accroître l'efficience et contribuer à
rétablir la croissance, et s'inscrit par conséquent dans le moyen
terme et le long terme. Il implique une réforme du marché, la
privatisation et la libéralisation. L'objectif des programmes
d'ajustement structurel est de réduire la consommation de biens et de
services.
Le FMI et la Banque mondiale imposent la réduction du
rôle de l'état non seulement dans l'économie, mais aussi
pour la fourniture de services sociaux comme la santé,
l'éducation et la sécurité sociale. L'objectif est de
réduire l'enveloppe budgétaire en éliminant les services
gratuits, en instituant les redevances d'utilisation pour les services
d'éducation et les soins de santé. Les coupes budgétaires
sont opérées sans discrimination avec des effets négatifs
sur les services de base d'une importance cruciale pour le développement
humain. Le FMI exige des réductions des subventions et des financements
alloués à des secteurs comme l'éducation de base, la
santé de base et l'infrastructure rurale atteignant 60% (20).
Mais, ces institutions financières ne prennent pas en
considération le développement humain. En effet, une croissance
forte du PNB ne débouche sur le développement que si elle
s'accompagne de changements dans la répartition du revenu, de
manière à permettre à une plus large proportion de la
population de jouir effectivement de ses droits économiques, sociaux et
culturels. Or le remboursement de la dette absorbe entre le quart et le tiers
des recettes publiques des pays en développement, ce qui entraîne
un effet d'éviction sur les investissements publics nécessaires
au développement humain. L'endettement élargit le fossé
entre riches et pauvres, augmente le nombre des affamés, des sans abri,
dégrade la situation des femmes, aggrave la situation sanitaire en
particulier des groupes sociaux vulnérables (19). Si les PAS ont permis
d'enregistrer des taux de croissance dynamiques du PIB, d'accroître les
exportations et d'améliorer la balance des paiements, ils n'ont pas
atteint les objectifs essentiels tels que l'auto approvisionnement alimentaire,
la réduction de la pauvreté, et l'amélioration des
indicateurs de santé. Les performances économiques positives et
une croissance positive du PIB ne sont pas synonymes de
développement.
Par ailleurs, l'ajustement structurel et la
libéralisation ont été imposés aux africains dans
une conjoncture caractérisée par la baisse des prix de produits
de base, le recul de l'aide publique au développement, le tarissement
des prêts de source privée, l'aggravation des mesures
protectionnistes prises par le nord contre les produits africains, et des
niveaux d'endettement insoutenables. Ainsi, s'explique que les pays africains
soient peu nombreux à avoir réalisé des progrès
appréciables sur la base des indicateurs qui donnent la mesure du
développement réel et à dimension humaine. La plupart ont
au contraire replongé dans des inégalités croissantes, la
dégradation écologique, la désindustrialisation et la
misère. Un groupe consultatif de l'ONU a signalé que dans toute
l'Afrique subsaharienne, les systèmes de santé s'effondrent faute
de médicaments, que les écoles manquent de livres et que les
universités souffrent d'une pénurie paralysante de
bibliothèques et de laboratoires. Une malnutrition sévère
frappe les campagnes, ouvrant la voie à une répétition de
l'épidémie de choléra qui a dévasté Lima
à la fin des années 80 (19).
Le rapport international établi par M. Danito Turk,
rapporteur spécial de la sous commission de la lutte contre les mesures
discriminatoires et de la protection des minorités, sur la
réalisation des droits économiques, sociaux et culturels (E.CN.
4/sub.2/1991/17) porte sur la relation entre les mesures d'ajustement
structurel et la réalisation des droits économiques, sociaux et
culturels. Les données recueillies montraient que les PAS compromettent
le droit au travail, à l'alimentation, au logement, à la
santé, à l'éducation et au développement.
Les compressions budgétaires imposées par les
PAS ont été opérées sans discrimination, portant un
coup sévère aux services de santé. L'ampleur de la crise
sociale et économique des pays en transition d'Europe centrale et
orientale s'accompagne d'une baisse significative des indicateurs de la
santé et de l'éducation (21). L'application aveugle des PAS a
remis en cause le droit à l'alimentation, le droit à
l'éducation, le droit au logement, le droit à la santé.
FMI et Banque mondiale n'ont pas réussi à épargner les
budgets de santé lors de l'application de PAS. Dans le but d'amasser des
fonds pour rembourser leurs créanciers, les états du tiers monde
imposent des politiques d'austérité économique à
leur population. Les mesures ont pour conséquence le
renchérissement des produits alimentaires, la baisse des salaires et
l'augmentation du chômage, la réduction des programmes de
santé, de nutrition et d'alphabétisation. Les personnes les plus
affectées par le PAS sont les femmes, les enfants, les familles, les
jeunes, les paysans et ouvriers agricoles, les travailleurs urbains.
b- Les obstacles à l'accès aux
médicaments
La production des médicaments est
réglementée par des législations internationales.
L'avènement de la mondialisation promue par l'OMC a durci les mesures de
protection des brevets de productions. Le brevetage accroît
considérablement les prix des médicaments et institue des
obstacles de caractère économique à l'accès aux
médicaments. Les accords sur les aspects des droits de
propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC)
défendent les droits sur la propriété intellectuelle sur
les médicaments. Ces accords nuisent à la santé publique
des pays en développement. D'abord, ils incitent à l'abandon des
recherches sur les maladies oubliées (lèpre, leishmaniose) qui
sont considérées comme non rentables par les laboratoires de
recherche. Ensuite, ces accords établissent des droits de
propriété intellectuelle sur les médicaments accordant aux
industries pharmaceutiques qui les fabriquent un droit de production exclusive
pour 20 ans. Aucune fabrication sous forme de médicament
générique, sans accord du propriétaire du brevet n'est
autorisée. Cet aspect du commerce des médicaments a
engendré beaucoup de difficultés. En effet, les
médicaments antirétroviraux nécessaires au traitement du
VIH/SIDA sont brevetés et coûtent 12 000 Dollars
américains par année, alors que les mêmes
médicaments génériques ne coûtent que 420 Dollars
américains par année. Les accords de libre échange
donnent des avantages supplémentaires au détenteur du brevet,
puisqu'ils prévoient même des brevets de second usage lorsqu'une
nouvelle propriété du médicament est découverte, et
même des brevets illégitimes par modification de la forme de
présentation du médicament par exemple (23).
Les droits de propriété intellectuelle sont les
premiers droits privés à être protégés par le
régime de l'OMC. L'accord sur les ADPIC a été accueilli
avec de fortes réticences par les pays en développement. Ceux-ci
craignent qu'une protection stricte de la propriété
intellectuelle ne nuise aux transferts de technologie ou à d'autres
objectif de nature sociale comme l'accessibilité aux médicaments
essentiels à prix abordable. On peut voir dans la
propriété intellectuelle une forme de droit de monopole, qui
renforce l'autonomie individuelle, et encourage le travail de création.
Dans cette optique, permettre que l'on s'approprie le travail des autres sans
leur verser de rétribution est frauduleux. Mais est il possible de
déterminer un montant qui constitue une juste rétribution du
créateur. Dans certains cas, les droits de propriété
intellectuelle peuvent aboutir à des abus de pouvoir en donnant à
leurs détenteurs le droit de fixer le prix à payer pour avoir
accès aux fruits de leur travail. Cette attitude relève d'un
individualisme extrémiste. Les dispositions des ADPIC reflètent
le point de vue et les revendications de pays où de
puissants lobbies industriels font pression en faveur d'une protection
très stricte des droits de propriété intellectuelle
(24).
On peut citer l'exemple du litige récent entre les
Etats Unis et l'Afrique du Sud. L'Afrique du Sud a eu recours aux
médicaments génériques indispensables pour enrayer
l'épidémie du Sida sans se soucier des détenteurs du
brevet. Les hommes d'affaires américains relevant du secteur de
l'industrie pharmaceutique ont ressenti là une atteinte à leurs
intérêts. Plutôt que d'engager une action contre l'Afrique
du sud devant l'OMC, les Etats-Unis ont préféré exercer
des pressions dans le cadre de leurs relations bilatérales. Soucieux de
préserver leur image publique, ils ont finalement autorisé
l'Afrique du Sud à recourir aux licences obligatoires dans les limites
permises par la législation sur les ADPIC. L'accès aux
médicaments est sans nul doute une affaire de droits humains, et il
aurait été inadmissible que les Etats-Unis empêchent
l'Afrique du Sud de fournir à ses citoyens victimes de la maladie les
traitements nécessaires. Malgré ce dénouement heureux, il
devient nécessaire de réviser l'instrument juridique pour y
inclure une approche plus équilibrée, condition préalable
à toutes formulations de droits de propriétés
intellectuelles dans le cadre de l'OMC (24).
B-Les obstacles d'origine politique à l'application
du droit à la santé
1- L'inefficacité du système judiciaire
L'application du droit à la
santé nécessite des garanties judiciaires qui autorisent aux
populations des recours en cas de violation. Or dans les pays en
développement, le système judiciaire présente de nombreux
maux. Il ne bénéficie pas d'une réelle indépendance
vis-à-vis du gouvernement, il est gangrené par la corruption, et
il souffre de nombreuses insuffisances qui l'empêchent de prendre des
décisions convenables en matière de droit à la
santé. Les gouvernements sont surtout occupés par des chiffres de
croissance élevés, et ne se soucient guère des violations
du droit à la santé qui peuvent être causées par les
entreprises privées par exemple, du moment que ces dernières
soutiennent l'économie nationale. L'ambition d'attirer des
sociétés transnationales sur leur sol pousse même les
gouvernements à fermer les yeux sur des violations parfois graves. Les
entreprises privées peuvent être à l'origine de pollutions
environnementales et de violations des droits du travail. Les activités
des sociétés transnationales peuvent être
considérées comme des obstacles à l'exercice du droit
à la santé. Il est en effet difficile d'appliquer les lois et
règlements des droits humains au secteur privé.
Au Nigeria, depuis une dizaine d'années, les
sociétés pétrolières étrangères ont
pollué de vastes superficies de terre dans les zones
pétrolifères. Les autorités ont réagi avec une
effroyable brutalité quand les populations autochtones ont voulu
défendre leurs droits fondamentaux. Les forces de sécurité
nationales sont utilisées pour réprimer les protestations des
populations locales contre les activités de Shell et d'autres compagnies
pétrolières dans le delta du fleuve Niger.
En Birmanie, la compagnie pétrolière et
gazière d'état, est accusée de graves violations des
droits de l'homme perpétrées par les forces de
sécurité birmanes pour déblayer le terrain et recourir au
travail forcé afin de construire un gazoduc (25).
Lors du procès porté devant la justice par des
communautés indigènes et paysannes contre la
société Texaco en 2003, le coût économique des
dommages environnementaux a été estimé à 6 600
millions de dollars pour nettoyer les plaques de déchets
pétroliers et les fleuves. Chevron Texaco a calculé que les
dégâts environnementaux coûteraient 40 millions de dollars
américains et les a réparti sur différents secteurs afin
de calmer les revendications gouvernementales, organisations indigènes,
Eglise, UNICEF. Chevron Texaco n'a pas investi dans le nettoyage et a
préféré investir dans les relations publiques (11).
Les dégradations environnementales avec leurs
conséquences sur la santé sont rarement prises en
considération par les autorités publiques des pays en
développement. Au cours de ces dernières années, plusieurs
jugements importants ont été prononcés en faveur des
demandeurs, mais ils restent très rares par rapport au nombre de cas
où les sociétés s'en sont tirées à bon
compte et par rapport au nombre encore plus important de violations
dénoncées auprès des organisations de défense des
droits de l'homme, des syndicats et des organisations de protection de
l'environnement. Par ailleurs, bon nombre d'instruments internationaux
existants, conçus pour réglementer les activités des
entreprises transnationales, sont inapplicables et donc largement inefficaces
en pratique. Ces instruments sont très nombreux, mais peu, voire aucun
d'entre eux n'est contraignant et les entreprises n'ont aucun scrupule à
les ignorer, surtout dans les pays du Sud où les mécanismes
nationaux de responsabilisation sont rares, où l'accès à
la justice pour les simples citoyens est difficile, et où les
gouvernements sont prêts à s'entendre avec les entreprises pour
préserver les bénéfices que ces dernières apportent
à leur économie. Face à cette situation, les avocats, les
syndicats et les organisations de défense des droits de l'homme qui
militent en faveur des travailleurs ou de toute autre personne dont les droits
sont bafoués, se retrouvent dans une impasse (25).
2-Les comportements sociaux
La corruption a une implication directe sur l'exercice du
droit à la santé. En affectant chacune des composantes de la
gouvernance, la corruption peut avoir des effets sur l'état de
santé et surtout sur l'exercice du droit à la santé des
populations. La corruption se définit comme l'abus d'une charge publique
à des fins de profits privés personnels ou catégoriels
(32). La corruption concerne le comportement de tous ceux qui ont un pouvoir
dans les affaires publiques, qu'ils s'agissent de politiciens,
d'employés du secteur public ou des militaires. La corruption conduit,
à une atteinte du droit à la santé. Dans l'étude
intéressante rapportée par Audibert (32), les relations entre
corruption et secteur de la santé sont dégagées :
- Les régimes ou les sociétés où
la corruption est forte manifestent vraisemblablement un intérêt
limité pour la santé des personnes.
- La corruption entraîne un moindre niveau de
prélèvement public, donc toutes choses égales par
ailleurs, il en résulte un moindre niveau de dépenses publiques
de santé.
- Elle engendre des surcoûts pour le secteur public, et
favorise le gaspillage de ressources
- Pour les décideurs et les agents en position de
responsabilité élevée, il est certainement plus difficile
de capter une rente importante dans le domaine de la santé que dans
d'autres secteurs, ce qui n'incite pas à un effort en faveur des
dépenses publiques de santé.
- Il est important que la corruption puisse rester
relativement discrète, il est donc, du point de vue de la recherche
d'une rente, plus intéressant d'orienter les dépenses publiques
vers des grands contrats ; or la santé offre relativement peu
d'opportunité en la matière.
- Le personnel de santé peut assez facilement pratiquer
des tarifications occultes pour augmenter son revenu, ce qui émousse les
revendications catégorielles pour obtenir des crédits de la part
de l'Etat.
C-les contraintes commerciales internationales
L'ordre économique mondial actuel, privilégie la
libéralisation commerciale et la mondialisation de l'économie.
L'objectif central de la mondialisation consiste à générer
à l'échelle mondiale un grand marché qui permet la libre
circulation des marchandises avec comme seules règles, celles de l'offre
et de la demande. L'état est marginalisé et devient un simple
régulateur du marché. L'impact est négatif sur la garantie
du droit à la santé, du fait de la multiplication des
privatisations, du transfert du patrimoine public vers le secteur privé,
de l'annulation de tous les services gratuits, de la privatisation de l'eau, et
de l'établissement des brevets sur les médicaments essentiels. La
mondialisation encourage des réformes basées sur l'impôt
indirect et la diminution des dépenses publiques sociales,
l'élimination des barrières pour l'investissement
extérieur, la privatisation des entreprises de l'état, la
dérégulation du marché, les garanties pour le droit
à la propriété. Toutes ces politiques visent à
favoriser l'élargissement du marché des multinationales. La
déréglementation du marché du travail garantit une main
d'oeuvre bon marché.
La mondialisation est renforcée par les accords de
libre échange entre les états. Les accords de libre
échange renforcent la privatisation du secteur de la santé. La
santé est alors considérée comme un bien privé qui
s'obtient dans le cadre des services de santé. La santé n'est pas
considérée comme un droit humain et un bien public, mais comme
tout bien marchand obéissant aux règles commerciales. Les accords
de libre échange offrent des possibilités d'affaires dans la
vente des services de santé, la commercialisation des biens et des
technologies de santé, la production et la distribution de
médicaments, le marché de l'assurance, la commercialisation de l
`eau et des aliments transgéniques. Les accords ont des
conséquences négatives sur la garantie du droit à la
santé notamment à cause des privatisations des services de
santé et de l'établissement des brevets sur les
médicaments essentiels. La mondialisation prive des millions de
personnes du droit à l'accès à des soins de base
gratuits.
La mondialisation considère de plus en plus les droits
des travailleurs et les principes de protection de l'environnement comme des
barrières au libre échange, et confère aux entreprises
multinationales un pouvoir extraordinaire tout en leur permettant d'ignorer
toute responsabilité. Alors que dans les années 60 et 70, on
craignait surtout, de la part de ces multinationales, une ingérence
excessive dans les affaires des pays en voie de développement, on
constate aujourd'hui qu'elles ne parviennent même pas à
contrôler les pratiques répréhensibles de leurs filiales
à l'étranger. Bien qu'elles soient souvent plus puissantes et
plus riches que bon nombre de gouvernements, elles ne reconnaissent pas
l'obligation morale d'employer cette puissance et ces richesses à
participer à l'amélioration des conditions de vie des populations
des pays où elles développent leurs activités, même
lorsqu'il s'agit de personnes directement touchées par ces
activités, comme leurs employés ou leurs consommateurs. D'autre
part, la marge de manoeuvre dont disposent les gouvernements pour
réglementer les activités des entreprises multinationales ne
cesse de se réduire. La répartition des responsabilités
entre les états et les multinationales est souvent confuse, ce qui
crée un vide dont chacun tire profit pour éluder ses
responsabilités (25).
CHAPITRE 3- CONCILIER LE DROIT A LA SANTE ET LES
POLITIQUES DE DEVELOPPEMENT
Même en étant un droit fondamental, le droit
à la santé est souvent transgressé, au cours de la mise en
oeuvre des politiques et stratégies de développement. Le
développement est aussi un droit de l'homme dont on ne saurait se
passer. Aussi, est il souhaitable de concilier politiques de
développement et respect des normes du droit à la santé,
en assurant l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes,
l'éducation primaire pour tous, des politiques en matière
d'environnement.
Les états doivent développer des politiques
publiques qui matérialisent la réalisation des droits de l'homme.
Le droit à la santé doit guider les politiques et les
activités des gouvernements.
Le rapporteur spécial sur le droit de la santé
des Nations Unies a énoncé la nécessité
d'identifier les bonnes pratiques pour la mise en oeuvre du droit à la
santé au niveau des communautés et aux niveaux national et
international. Les dispositions juridiques du droit à la santé
doivent trouver une expression pratique, et passer de normes nationales et
internationales à des politiques, à des programmes et à
des projets concrets. Les normes internationales de droits humains devraient
s'appliquer de manière cohérente et systématique dans tous
les processus de formulation des politiques sur le plan national et
international. Les actions des états ne doivent pas enfreindre le droit
de toute personne de bénéficier du niveau le plus
élevé possible de santé physique et mentale. Ainsi, tout
traité ou convention internationale doit impliquer la promulgation de
politique de santé publique garantissant l'accès
généralisé aux produits pharmaceutiques et à des
technologies médicales de prévention, de soins efficaces et
accessibles (49). L'approche de la justice sociale de la santé exige
donc une refonte du système international. Les états seront tenus
d'élaborer des politiques de santé efficaces, d'améliorer
la gouvernance locale, de défendre les droits de l'homme et de prendre
les mesures pour respecter l'environnement.
I- Elaborer des politiques de santé efficaces
dans le cadre des projets de développement
Le respect des droits de l'homme, l'accès universel aux
services sociaux, la répartition équitable des revenus, et la
bonne gouvernance et la gestion responsable du processus du
développement sont essentiels pour la réalisation du droit
à la santé. La mise en oeuvre plus efficace des politiques
existantes ou nouvelles, en tenant compte des conventions et accords
internationaux est essentielle pour la réalisation du droit à la
santé. Les soins de santé de base devront être
incorporés dans les initiatives nationales de développement.
Les autorités nationales devraient assurer des choix
qui oeuvrent vers la mise en oeuvre des stratégies et des interventions
dans les services de soins qui mettent l'accent sur les soins de santé
primaires. Ils devraient adopter une approche pluridisciplinaire et
multisectorielle fondée sur les droits de l'homme afin de dispenser les
soins de santé à tous. Dans le but d'assurer les besoins
sanitaires de toute la population, les choix se feront vers la mobilisation des
ressources pour l'achat des médicaments et des équipements
nécessaires; le développement et gestion des ressources humaines;
la mise en place d'un système d'assurance sociale, et l'orientation
vers les soins de santé de base. Pour renforcer les systèmes de
santé, il est indispensable d'évaluer les besoins pour identifier
le volume des investissements nécessaires, et dresser des plans
stratégiques qui permettront de mobiliser les ressources
nécessaires.
Il faut attirer l'attention que en matière de
ressources humaines, les pays pauvres subissent une pénurie des
professionnels de la santé. Les professionnels de santé
formés dans les pays pauvres sont activement recrutés par les
pays riches. Cette opération aggrave le déficit en ressources
humaines dans les pays pauvres qui souffrent déjà d'une basse
densité de professionnels de santé provoquant par là
davantage de pression sur les services de santé. La fuite des
professionnels de santé aggrave la pénurie dans des pays qui ont
à supporter de nombreux défis de santé (VIH/SIDA). Les
pays exportateurs de ces professionnels sont perdants à plusieurs
niveaux : la pénurie en professionnel de santé s'accentue,
ils perdent des savoirs, des compétences et une mémoire
institutionnelle, endossant le prix de la formation au bénéfice
des pays développés. Les facteurs qui poussent les gens à
émigrer sont représentés par la rémunération
essentiellement, associée à une charge de travail intense et des
conditions de travail et de sécurité mauvaises. D'un autre
côté, les stratégies agressives de recrutement par les pays
riches constituent un facteur important à l'immigration. Les pays
doivent appliquer des politiques de santé qui leur permet de favoriser
le maintien des professionnels sur le sol national, en promouvant les
incitations financières et non financières, en concevant des
solutions locales pour les ressources humaines, pour assurer la satisfaction
des besoins. Les pays riches ayant des besoins accentués par le
vieillissement de la population font appel à ces professionnels
insuffisamment payés, ils arrivent à satisfaire les besoins de
leur population en effectuant une économie sur des coûts de
formations. Les pays riches devraient indemniser les PVD desquels les
professionnels sont issus.
Les politiques de santé doivent s'orienter vers les
priorités énoncées dans les objectifs du millénaire
pour le développement. Ces OMD s'inspirent également de concepts
antérieurs, tels que l'approche des soins de santé primaires, les
soins de santé de base, et l'Initiative Santé pour tous en l'an
2000. L'analyse des objectifs du millénaire pour le
développement montre qu'ils restent modestes par rapport aux besoins en
santé qui sont de plus en plus importants et de plus en plus urgents.
Ils contiennent même une régression importante par rapport aux
buts établis par la santé pour tous lors de la déclaration
d'Alma Ata (Tableau 1). Ils ont l'avantage cependant de concevoir l'approche de
la santé en tenant compte des droits de l'homme. Ainsi, les solutions au
problème du VIH englobent la nourriture, l'eau, les systèmes
d'assainissement, l'éducation élémentaire, les soins de
santé, la sécurité, le travail décent qui permet de
ne pas être exploité et être utile à la
communauté. Les objectifs du millénaire pour le
développement ont été adoptés lors du Sommet du
Millénaire par 189 pays. La Déclaration du Millénaire
propose huit objectifs dont trois sont directement en rapport avec la
santé (Réduire la mortalité infantile; Améliorer la
santé maternelle; Combattre le VIH/SIDA, le paludisme et d'autres
maladies) et cinq liés à la santé (Réduire
l'extrême pauvreté et la faim; Assurer l'éducation primaire
pour tous; Promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des
femmes; Assurer un environnement durable; Mettre en place un partenariat
mondial pour le développement).
II- Renforcer les budgets alloués aux services
publics de santé
Il est démontré que l'augmentation des
dépenses publiques de santé améliore l'état de
santé de la population en particulier des couches
défavorisées. La proportion du budget à consacrer à
la santé a été fixée à (Abuja en 2001).
Mais, cela nécessite de mobiliser des ressources financières qui
ne doivent pas amputer les budgets alloués aux autres secteurs dans le
cadre du développement. C'est pour cela que les états doivent
tirer le meilleur parti des aides internationales, des programmes de
développement de la santé, et réformer leurs relations
avec les institutions financières internationales de manière
à alléger le poids de la dette ou à transformer une partie
en aide publique pour le secteur de la santé.
a- Les dépenses publiques de santé
améliorent l'état de santé des pauvres
Il semble que les dépenses publiques de santé
sont généralement insuffisantes dans les pays en
développement, notamment dans les pays à faible revenu. Une
question se pose, est ce que l'augmentation des dépenses publiques va
améliorer l'état de santé de la population. Certaines
études mettent en évidence que les dépenses publiques de
santé, prises globalement, n'ont pas dans l'ensemble d'effets
statistiquement significatifs sur l'état de santé des
populations. L'impact des dépenses publiques sur la santé
dépend de la nature et du volume de l'offre de soins que ces ressources
financent, de l'efficience et de la qualité des programmes et des
systèmes de santé, de la réaction du secteur privé
face à l'augmentation de l'offre publique de soins, et enfin du
comportement des individus en matière de demande de soins, à
savoir dans quelle mesure ils recourent aux différents types de soins
publics et privés existants (26). D'autres analyses rapportent les
bienfaits d'une augmentation des dépenses publiques de santé.
L'impact des dépenses publiques de santé sur l'état de
santé est plus important dans les pays à faible revenu que dans
les autres (27), et il est plus élevé sur l'état de
santé des pauvres que des non pauvres. Des résultats qui
suggèrent de plus que « le bénéfice marginal de la
dépense publique de santé est plus élevé pour les
pauvres, quelle que soit la part de la dépense publique de santé
reçue par les différents groupes de revenus » (28).
Cela veut dire que même avec une répartition uniforme des
dépenses publiques de santé entre les différents groupes
de revenus, l'impact de la dépense publique sur l'état de
santé sera malgré tout plus important pour les pauvres. (27).
Toutes choses égales par ailleurs, l'augmentation des ressources
publiques consacrées à la santé améliorera donc la
santé des pauvres.
b- Modifier les relations avec les institutions
financières internationales
Pour améliorer l'état de santé des
populations des pays pauvres, l'appui des institutions financières est
nécessaire. Leur implication pour le respect du droit à la
santé peut se manifester par la réduction de la dette en faveur
des pays pauvres. Les créances publiques peuvent être
transformées en dons. Les gouvernements créanciers ont certes
pris des certaines mesures, pour réduire le prix de la dette (condition
de Toronto). En septembre 1988, la banque mondiale a annoncé un
allégement des paiements d'intérêts pour 13 pays africains
à faible revenu. L'Allemagne, la France et la Suède ont
annulé des crédits à l'exportation. La France a
effacé en 1989, la dette publique de tous les pays africains à
faible revenu. Les conditions de Naples sont conçues pour réduire
67% de l'encours de la dette des pays à faible revenu. Si les
coûts de la dette du tiers monde (1500 milliards de dollar) doivent
être assumées, il convient d'en libérer les
majorités démunies. La dette doit être
répartie équitablement entre les pays et les banques
transnationales qui ont consenti des prêts. Pour de nombreux pays
pauvres, la réduction de la dette va réamorcer et doper la
croissance. Même pour les pays qui ne sont pas surendettés,
l'accumulation de la dette hypothèque la croissance.
La conditionnalité est un élément de
grande importance bien qu'elle soulève des questions sur la
souveraineté nationale. Mais elle est souhaitable si elle repose sur des
critères liés au développement humain et aux
différents aspects des droits humains. Toute lettre d'intention
adressée au FMI doit faire état de l'effet prévu des
politiques d'ajustement sur la santé. La conditionnalité
permettra de veiller à ce que les ressources libérées par
l'allégement de la dette soient efficacement mises à profit
notamment dans le secteur de la santé. Chaque pays mettra en place un
groupe de surveillance (représentants des pouvoirs publics et de la
société civile) afin d'observer la façon dont les
gouvernements respectent ces conditions.
Les pays pauvres doivent avoir plus d'influence au niveau des
institutions financières internationales. Ces dernières
dominées par les pays riches, doivent être
démocratisées. Le mode de représentation dans les
organismes financiers repose actuellement sur la puissance économique.
Les pays riches exercent une influence prédominante sur les
décisions de ces institutions, alors que les pays pauvres ne disposant
dans leur grande majorité d'aucun pouvoir réel. De ce fait les
organisations en question continuent d'appliquer leur propre définition
du développement dans le monde. Ces institutions doivent être
réorganisées bien qu'il soit très difficile de modifier
les processus décisionnels de ces institutions.
c- Utiliser l'aide internationale pour améliorer le
secteur de la santé
L'aide internationale est un outil de politique
extérieure. Cette aide doit être conditionnelle pour influencer
les politiques de développement nationales. L'aide internationale doit
favoriser l'amélioration de l'état de santé. Elle doit
imposer des clauses concernant l'augmentation des dépenses publiques
dans le secteur de la santé, l'investissement dans ce secteur. Tout
affranchissement de la dette doit se répercuter sur les besoins en
santé.
La banque mondiale répondant aux critiques qui
l'accusent d'avoir aggravé la pauvreté, a proposé des
programmes de protection sociale et des filets de sécurité
qualifiés de « dimensions sociales de
l'ajustement » destinées à protéger les
pauvres des effets néfastes des PAS. Cependant ces programmes sont trop
modestes et trop tardifs pour pouvoir remédier sensiblement aux causes
fondamentales de la misère. Les programmes à dimension sociale
sont essentiellement des mesures palliatives, considérés par
certains comme une tentative de la part de la banque mondiale d'apaiser les
populations démunies qui s'organisent de façon à remettre
en cause les politiques en question. La banque mondiale a lancé son
programme de lutte contre la pauvreté. Les pauvres sont selon la banque
mondiale, les laissés pour compte de la croissance, les victimes de la
géographie et de la discrimination.
d- Bénéficier des fonds dans le cadre de
programmes de santé
Un ensemble de programme sanitaires sont
développés dans les pays pauvres : programme de vaccination
universelle, programme global antisida, programme de contrôle de la
tuberculose, éradication de la lèpre. Des ressources sont
proposées par les initiatives mondiales telles que la Commission pour
l'Afrique lancée par le Royaume-Uni; le Fonds mondial de lutte contre le
VIH/SIDA, la tuberculose et le paludisme; le Compte du Millénaire
initié par les États-Unis; l'Initiative PPTE; le Consensus de
Monterrey; et les accords de Doha. Les ressources issues de l'Initiative PPTE
et de celles issues des nouvelles annulations de dette doivent être
consacrées au secteur de la santé. Par ailleurs, les partenaires
internationaux devraient honorer leurs engagements en allouant aux pays les
moins avancés une part du PIB comme cela a été
confirmé à la Troisième conférence des Nations
Unies sur les pays les moins avancés qui s'est tenue à Bruxelles
en 2001. Ils devraient également simplifier et rationaliser leurs
règlements et exigences, de même que les conditions à
remplir pour bénéficier des mécanismes internationaux de
financement de manière à ce que les pays africains puissent
«absorber» ces fonds plus rapidement.
III- Respecter et protéger les droits de
l'homme
Les droits de l'homme sont indivisibles. Le respect de tous
les doits de l'homme lors de l'élaboration des politiques de
développement est une condition essentielle pour l'amélioration
de l'exercice du droit à la santé. La garantie des
libertés fondamentales, l'éducation et l'autonomisation des
femmes et des filles permettront de réaliser d'autres objectifs tels que
la sécurité alimentaire et la nutrition et la santé. Pour
atteindre la sécurité alimentaire, les politiques nationales de
développement doivent aussi entamer des réformes agraires, lutte
contre la pauvreté, sauvegarder les ressources naturelles, assurer un
travail décent. Ces actions permettront d'améliorer la situation
nutritionnelle et sanitaire. On devrait prendre en considération les
droits aussi bien individuels que collectifs. Le droit à un niveau de
vie adéquat et le droit à l'alimentation proclamés par la
conférence mondiale sur les droits de l'homme de Vienne en 1993. Cette
approche insiste sur le respect du droit à la santé à
travers l'application des principes définis de l'observation
générale n° 14.
La protection des droits de l'homme passe par la surveillance
des conduites de tous les acteurs susceptibles de violer les dispositions du
droit à la santé. Les gouvernements soucieux de maintenir les
sociétés multinationales sur leur sol ferment les yeux sur des
violations de droits de l'homme.
Les gouvernements doivent réglementer les
activités des entreprises officiellement établies ou
opérant dans leur juridiction. Il est donc important de ne pas perdre de
vue la responsabilité des états lorsque l'on s'attaque
directement aux multinationales. Les gouvernements doivent formuler et mettre
en oeuvre des lois et des mécanismes de réglementation, de
contrôle et de surveillance qui leur garantissent la possibilité
de contrôler et de réglementer les activités des
multinationales dans leur juridiction chaque fois que le droit à la
santé risque d'être atteint. Il faudrait au préalable
s'attaquer aux complicités pouvant exister entre les gouvernements et
les entreprises multinationales. Des instruments internationaux directement
contraignants pour les multinationales devront être
développés, ainsi que des mécanismes institutionnels
internationaux efficaces permettant de les faire respecter. Dans le contexte
actuel d'affaiblissement de l'état et de privatisation des services
publics, les états tentent de plus en plus de se défaire de leurs
responsabilités. Dans de nombreux pays, le gouvernement modifie ou
ignore sa propre législation du travail ou ses lois protégeant
l'environnement pour donner carte blanche aux multinationales, soit ferme les
yeux sur les violations commises. A titre d'exemple, le Sri Lanka a
créé des zones de libre-échange, au sein desquelles il
permet l'instauration d'un système juridique distinct ou des
dérogations aux lois nationales. Il est impératif d'obliger les
états à rendre des comptes de leurs responsabilités et
à faire pression sur les entreprises. Il faudrait user de toutes les
pressions pour imposer aux pays de garantir un comportement responsable des
sociétés transnationales. Ils doivent formuler et mettre en
oeuvre une législation adéquate réglementant les
activités commerciales dans leur juridiction, et d'éviter toute
collusion avec les multinationales. Les multinationales disposent cependant de
moyens pour éviter les pressions exercées par le biais des
gouvernements : elles peuvent aller établir leur siège dans un
état plus accommodant ou utiliser le flou relatif à leur
identité nationale pour déclarer ne pas être soumises aux
lois des pays dans lesquels elles opèrent. Il faudrait également
contraindre directement les entreprises multinationales à rendre des
comptes Bien qu'une telle approche éclipse quelque peu la
responsabilité des états de fournir un cadre réglementaire
approprié pour les activités des multinationales, axer son action
sur les entreprises plutôt que sur les états et demander
directement à celles-ci d'assumer leurs responsabilités augmente
les chances d'obtenir réparation pour les victimes de violations du
droit à la santé commis par les entreprises multinationales ( 25
).
IV- Impliquer les organisations non gouvernementales
dans les stratégies de développement
Les organisations non gouvernementales ont joué un
grand rôle dans la promotion et la défense des droits de l'homme
à travers le monde. Elles ont oeuvré pour l'amélioration
des conditions économiques en luttant contre le chômage et les bas
salaires. Elles ont été à l'origine d'un ensemble
d'actions dans le domaine social, dans le domaine de la défense des
libertés publiques. Elles possèdent une expérience riche
et une excellente connaissance du terrain local, et peuvent apporter beaucoup
de soutien à tous les programmes visant à mettre en oeuvre le
droit à la santé. Dans leur élan pour
l'amélioration des conditions de vie, les organisations non
gouvernementales internationales et locales agissent directement ou
indirectement pour améliorer l'état de santé. Le
développement et la politique de développement sont deux domaines
dans lesquels les organisations non gouvernementales jouent un rôle
important. Ce des partenaires permanents de l'aide au développement en
tant qu'organisateurs de projets, chargés de mettre en oeuvre des
programmes et d'apporter l'aide là où elle est nécessaire.
Les organisations de la société civile participent de plus en
plus activement au débat sur la politique concernant les
échanges, les droits de l'homme, l'aide classique au
développement et les secours d'urgence, ainsi que, plus
généralement, les relations mutuelles entre les droits
économiques, sociaux et culturels. La mondialisation, ses bienfaits
potentiels et les risques qu'une expansion économique
incontrôlée fait courir aux pays en développement ont
attiré une attention croissante de la société civile, y
compris des ONG spécialisées dans le développement.
Une ONG internationale, People's Health Movement (PHM) veut se
réapproprier le concept de santé pour tous tel qu'il fut
promulgué lors de la conférence d'Alma Ata en 1978. Cette
volonté de réappropriation de la santé pour tous, est un
mouvement de résistance mondiale qui s'élève contre
l'imposition de politiques néolibérales à tous les aspects
de la vie et essentiellement à la santé des populations :
nourriture, eau, réseaux d'assainissement, éducation, emploi,
sécurité sociale, logement, sécurité environnement
et physique. L'amélioration de la pauvreté, des
inégalités, de la privation et de la misère qui
résultent des politiques néolibérales, efface les causes
premières et directes de nombreuses maladies et de la mortalité
parmi les communautés pauvres.
L'exemple de l'ONG Oliwatch qui s'efforce de créer au
niveau global une conscience environnementale en exposant les impacts de
l'activité pétrolière dans les forêts tropicales et
sur les populations locales, en établissant la relation entre ces
activités et la destruction de la biodiversité, le changement
climatique et la violation des droits de l'homme.
Les ONG sont devenues des acteurs indispensables pour
l'accès aux soins dans les pays pauvres, auxquels elles apportent une
assistance médicale d'urgence dans les contextes de catastrophes
naturelles, de crise ou de conflits, ou un appui aux structures sanitaires
déficientes. Leur proximité du terrain et leur connaissance des
populations les plus vulnérables leur permettent souvent de proposer des
actions plus adaptées. Les ONG devraient être mieux
intégrées dans les stratégies de développement,
aussi bien au niveau de l'élaboration des politiques qu'au niveau de
leur mise en oeuvre, alors qu'elles sont très souvent encore
perçues comme des concurrentes de la coopération
institutionnelle. Cette intégration nécessite au préalable
de s'assurer de la qualité de leurs interventions et de
développer l'évaluation de leur activité.
V-Elaborer et appliquer des programmes de protection de
l'environnement
La protection de l'environnement dans lequel les gens vivent
peut permettre de prévenir de nombreuses maladies. Par
conséquent, il est nécessaire de mettre en place des programmes
de protection de l'environnement, d'intensifier les interventions et les
initiatives existantes, et de collaborer avec d'autres secteurs comme
l'agriculture et l'industrie pour réduire les risques pour la
santé liés à l'environnement. Les ressources naturelles
seront exploitées et gérées raisonnablement.
Tous les prêts seront subordonnés à une
évaluation de leur incidence sur l'environnement et sur les ressources
dont sont tributaires les populations démunies. Il faudra éviter
de financer de ouvrages ayant pour effet de déplacer d'importants
groupes de population et de détruire l'écologie locale. Des
projets de grande ampleur ne seront envisagés qu'après une
concertation avec les communautés touchées.
VI- Améliorer la gouvernance locale est un
facteur important dans la mise en oeuvre du droit à la santé
La gouvernance peut se définir comme «
l'utilisation de l'autorité politique, l'exercice du contrôle sur
la société et la gestion de ses ressources pour le
développement économique et social » (29). La banque
mondiale la définit comme « la manière dont le pouvoir est
exercé dans la gestion des ressources économiques et sociales
d'un pays pour le développement ». De manière plus large,
c'est « l'ensemble des mécanismes, processus, relations et
institutions à travers lesquels les citoyens et les groupes articulent
leurs intérêts, exercent leurs droits et obligations et
règlent leurs différents. La gouvernance comprend toutes les
méthodes - bonnes et mauvaises - qu'utilisent les sociétés
pour distribuer du pouvoir et gérer les ressources et les
problèmes publics » (30). Pour Kaufman, Kraay et Zoido- Lobaton
(31), la gouvernance se définit comme « les traditions et les
institutions par lesquelles l'autorité est exercée dans un pays.
Cela englobe :
- le processus par lequel les gouvernements sont
sélectionnés, contrôlés et remplacés,
- la capacité d'un gouvernement à formuler et
mettre en oeuvre des politiques appropriées
- et le respect qu'ont les citoyens et l'Etat pour les
institutions qui gouvernent les interactions économiques et sociales qui
existent entre eux ».
Il y a un large consensus pour admettre qu'une bonne
gouvernance repose sur quatre éléments clé :
- la responsabilité de ceux qui exercent un pouvoir,
c'est-à-dire ici la mesure dans laquelle ils doivent effectivement
rendre des comptes,
- la transparence c'est à dire l'accès à
faible coût à une information fiable et pertinente pour juger de
l'action publique,
- la prédictibilité, résultant de lois et
règles claires, connues, uniformément et effectivement
appliquées
- et la participation.
L'amélioration de la gouvernance et de la gestion est
une affaire des autorités nationales qui doivent assurer une gestion
économique et financière responsable des ressources nationales.
L'ensemble des mécanismes de financement de la santé devra
être assainis. Les gouvernements devraient mettre en place un
environnement favorable pour la réalisation des objectifs fixés
dans leur politique de développement. Pour cela, toutes ressource
nationale ou provenant de sources étrangères sera
gérée de manière responsable, les cibles fixées
à Abuja (2001) devront être respectées, aucune
dérogation ne sera autorisée concernant le respect des
dispositions pour que les fonds libérés par l'allègement
de la dette soient entièrement alloués aux services sociaux, et
en particulier à la santé. Des mécanismes de coordination
et d'évaluation seront mis en place pour le suivi des problèmes
liés au financement de la santé.
VII-Concilier les doits humains et le droit
commercial
Pour éviter un conflit entre le régime de droit
commercial et celui des droits humains, le droit du commerce doit être
appliqué en conformité avec les obligations incombant aux
états en matière de droits humains, en respectant les normes du
droit international des droits de l'homme, et en leur donnant la
primauté sur les dispositions de n'importe quel traité. Si l'OMC
est l'institution légale qui surveille le comportement dans le domaine
commercial, elle se trouve parfois confronté à des contradictions
entre un droit fondamental et les dispositions du droit commercial
international. On trouve dans le texte d'accord du GATT une reconnaissance
des valeurs non commerciales qui relèvent de l'intérêt
public et qui sont censées prévaloir en cas de conflit avec les
règles de libre commerce. L'article XX du GATT prévoit que :
« rien dans le présent accord ne sera
interprété comme empêchant l'adoption ou l'application par
toute partie contractante des mesures » entre autres
« nécessaires à la protection de la moralité
publique », « nécessaires à la
protection de la santé et de la vie des personnes ou des animaux ou
à la préservation
des végétaux ». Malheureusement, l'article a
reçu une interprétation restrictive et a fini par être
marginalisé. D'autres clauses de l'OMC créent des obligations
vis-à-vis des parties. Certaines dispositions permettent aux
états de protéger et de promouvoir les droits humains par
l'entreprise du commerce, en permettant certaines mesures contre les
états qui violent les droits humains. La disposition clé à
ce chapitre est l'article XX qui énonce toute une série
d'exceptions en vertu desquelles un membre de l'OMC peut promouvoir et
protéger les droits humains sans contrevenir aux dispositions du
GATT.
La libération des échanges peut être
soumise aux règles de la primauté du droit et être
encadrée par des instances administratives et judiciaires transparentes,
impartiales et rationnelles, devant lesquelles les responsables gouvernementaux
doivent répondre de leurs actes. Les politiques commerciales d'un
gouvernement corrompu, opaque et arbitraire qui encourage le non respect des
lois et la corruption dans le secteur privé ont inévitablement
pour effet de créer un marché dénaturé et
très précaire (24).
l'OMC doit aussi développer des règles qui
favorisent le libre échange tout est encourageant en protégeant
les droits humain. Le comité des droits économiques sociaux et
culturels a déclaré que la libéralisation du commerce doit
être comprise comme un moyen et non pas comme une fin. Le but auquel
celle-ci doit tendre devrait être d'assurer le bien être de
l'homme, objectif qui trouve son expression juridique dans les instruments
internationaux relatif aux droits. (Déclarations du comité des
droits économiques sociaux et culturels à la
3ème conférence ministérielle de l'OMC E/C.
12/1999/9). Le défi serait de trouver le moyen d'influencer le processus
de mondialisation de manière à éliminer les souffrances
humaines, la pauvreté, l'exploitation, l'exclusion et la discrimination.
Puisque le commerce est le moteur de la mondialisation, il est impératif
que les règles qui le gouvernement ne contreviennent pas aux droits
humains fondamentaux et qu'au contraire elles les favorisent et les
protégent. Les règles et procédures de l'OMC doivent
être interprétées de façon à favoriser le
respect des droits, la transparence, la recevabilité et la
représentativité. Le droit commercial doit être
interprété et développé en conformité avec
la hiérarchie des normes établies dans le droit international en
général, dans laquelle de nombreux droits fondamentaux jouissent
du statut de droit coutumier, de principes généraux ou
d'obligations et devraient donc normalement prévaloir sur les
dispositions des traités commerciaux en cas d'incompatibilité.
S'il est correctement interprété et appliqué le droit du
commerce reconnaît que les valeurs humaines associées aux droits
essentielles et passent avant le libre commerce. Il est nécessaire de
procéder à des changements institutionnels au sein du
système multilatéral, de comprendre et de mesurer les effets des
règles et des politiques commerciales à tous les niveaux, et de
développer de nouvelles règles et politiques commerciales de
manière à dépasser le cloisonnement des organismes
voués à la promotion des droits et des institutions
économiques, y compris ceux qui s'occupent du système commercial
multilatéral. L'esprit du DIDH doit encadrer le développement du
droit commercial si l'on veut qu'il atteigne ses buts. La communauté
internationale doit redoubler d'effort pour créer un climat commercial
favorable permettant aux pays débiteurs d'accroît leurs
exportations mobiliser les apport financiers requis pour leur
développement économique. L'application des prix
équitables aux produits de base est primordiale. Il faudrait pour cela
transformer les structures du commerce des produits primaires et faciliter
l'accès des pays du sud aux marchés du Nord (24).
Lors de l'établissement Des accords commerciaux, les
états doivent être confrontés à leurs engagements
sur le droit à la santé pris lors de la ratification des normes
internationales, et veiller à ce que leurs actions tiennent compte du
droit de chaque personne à jouir du niveau le plus élevé
possible de santé physique et mentale. Tout accord doit appuyer la
politique de santé publique et respecter l'accès aux
médicaments et aux technologies médicales, et l'accès aux
soins. Les états avant de signer un accord commercial doivent exiger que
ces accords commerciaux respectent l'ensemble des traités internationaux
de droits de l'homme (exemple du Canada).
CONCLUSION
«Les normes internationales des droits de l'homme, y
compris le droit à la santé, devraient être
appliquées de manière consistante et cohérente à
travers tous les processus adéquats, nationaux et internationaux de
création de politiques. Dans le contexte de création de
politiques internationales, ce principe fondamental est reflété
dans la Déclaration de Vienne et le Programme d'Action » (49).
Toute politique de développement économique doit
reposer sur la justice sociale, et répondre aux besoins de l'être
humain. La déclaration de Copenhague sur le développement
social a invité les gouvernements à veiller à ce que les
programmes d'ajustement structurels tiennent compte des objectifs du
développement social, à faire en sorte que les crédits
affectés aux programmes sociaux de base échappent aux
réduction budgétaires et à examiner les incidences
des PAS de façon à atténuer les effets
préjudiciables de ces programmes et à renforce les effets
positifs.
Les stratégies de développement doivent
s'orienter vers un processus de développement humain, en s'attachant
à donner à chaque citoyen les moyens de prendre en main son
existence, et à conférer aux populations de larges
responsabilités dans les processus de développement. Les
gouvernements doivent être à l'écoute de la population, et
mettant en place des organisations populaires autonomes, qui jouiront de moyens
d'action afin de permettre aux plus défavorisés de participer
pleinement à la prise de décision et de fier les exploiteurs
locaux ou étrangers. Les stratégies de développement vont
favoriser la lutte contre la pauvreté, la satisfaction des besoins
essentiels de la population en particulier dans le domaine de la santé.
Les soins de santé sont une pièce maîtresse de la
stratégie de développement humain. Des personnes incapables de
recevoir des services de santé ne sont pas en mesure d'améliorer
leurs propres conditions de vie ou même d'apporter une contribution
productive à la nation. L'état de santé de la population
devra être pris en charge aussi rapidement que possible. La prise en
compte des besoins en santé des individus doit faire partie
intégrante des stratégies de développement. Aussi, il
faudrait réexaminer d'un oeil critique les modèles existants
reposant essentiellement sur une croissance induite par les exportations que
prônent actuellement les IFI, et qui font des approches de santé
ne protégeant pas les droits de l'homme (Tableau2). Ce modèle de
croissance a eu des effets néfastes sur les besoins
élémentaires de l'être humain.
Toute stratégie de développement devra
encourager la croissance économique et le développement humain.
Pour cela, il faudrait mettre en place un climat politique adéquat. Le
climat politique englobe la stabilité politique un ordre politique
fondé sur des règles et arbitré par un appareil judiciaire
impartial et indépendant, ainsi qu'une bonne gestion des affaires
publiques privilégiant la transparence et la responsabilité. Le
renforcement des principales institutions de l'état est une condition
sine qua non pour créer de nouvelles formes de participation de citoyens
à la vie politique nationale. La démocratisation conjuguée
à une émancipation de la population est la clé de la
croissance économique et sociale généralisée et
soutenue. En faisant obstacle à la corruption et à
l'incompétence, on crée les conditions pour le
développement humain.
La participation est un droit de l'homme et un principe de
démocratie. La participation à la prise de décisions de
manière démocratique, permet à la population d'exprimer
son opinion sur la façon dont les stratégies de
développement sont élaborées. C'est un excellent moyen
pour que les communautés adhèrent aux
programmes. En effet, les collectivités acceptent peu les politiques
imposées de l'extérieur. La population doit avoir le moyen
d'étudier les problèmes qui se posent à elles et
d'exprimer des idées pour les résoudre. C'est seulement à
cette condition que le développement pourra être
considéré comme un processus libérateur permettant aux
individus et aux groupes sociaux, notamment ceux qui sont opprimés et
marginalisés, de définir leur propres besoins en santé.
Les stratégies de développement qui encouragent les processus de
prise de décision contrôlées par les communautés
plutôt que par l'administration centrale, vont mobiliser l'esprit
d'initiative et mettre à profit l'ingéniosité des plus
démunis à des fins productives. Une telle démarche exige
une participation de façon démocratique à la prise de
décision concernant les soins de santé.
Créer le climat favorable à une croissance
économique équitable suppose aussi une coopération entre
l'état et la société civile. Une véritable
stratégie de réduction de la pauvreté doit prévoir
des investissements accours dans les infrastructures rurales et un plus large
accès des groupes défavorisés à la terre et au
crédit. Des mesures d'encouragement par les prix, des initiatives visant
à remédier rapidement au problème des dépenses
publiques improductives, une sélection des projets d'investissements du
secteur public, afin d'allier croissance et équité.
Dans le secteur de la santé, le transfert vers ce
secteur d'une part suffisante des ressources nationales. Il faut accorder la
priorité aux soins de santé de base, à la santé de
la femme et des enfants, veiller à ce que les médicaments de base
soient disponibles. Il convient à cet effet de revoir les accords ADPIC.
Les expériences provenant de Chine et de divers programmes de
santé appliqués dans des petites communautés ont fortement
inspiré l'approche des soins de santé primaires. Le concept de
soins de santé primaire implique explicitement le besoin d'une
stratégie globale de la santé et ne se concentre pas seulement
sur les services de la santé mais aussi sur les causes politiques,
économiques et sociales sous jacentes de la mauvaise santé. La
déclaration d'Alma Ata préconise une stratégie
basée sur la distribution équitable des ressources. Une forte
participation des peuples est essentielle, de même que l'autonomie et la
conscience sociales sont des facteurs clés du développement
humain. Les soins de santé primaires peuvent eux-mêmes contribuer
au développement et sont une arène permettant la prise de
conscience et les actions organisées.
Alma Ata (1978)
|
Déclaration du millénaire (2000)
|
La santé est définie comme un droit humain
|
On doit être pragmatique et tendre à un
progrès « réaliste » dans un certain nombre
d'indicateurs sélectifs.
|
La santé est une question de mise sur pied d'un contre
pouvoir
|
La santé doit permettre de trouver des solutions
techniques et suffisamment d'argent afin de les appliquer à grande
échelle
|
La santé est une question de justice sociale
|
La santé, c'est combattre les maladies, c'est une
question de lutte contre les symptômes.
|
Il convient d'aborder la santé dans le contexte d'un
nouvel ordre économique mondial
|
Il n'est nullement besoin de changer de cours mais de corriger
un peu la trajectoire de la globalisation grâce à un
« partenariat » à grande échelle entre pays
riches et pauvres et le secteur privé.
|
Tableau 1- Alma Ata et objectifs du millénaire
pour le développement
Ce tableau est issu de la brochure « Et une bonne
santé...en 2015 !? », publiée par le Groupe de
travail santé et Objectifs du Millénaire, corrdonée par
Bert de Belder et disponible à INTAL, www.Intal.be et au CNCD,
www.cncd.be
La santé selon le néolibéralisme
|
La santé selon la justice sociale et les droits
humains
|
Hypothèses de base
|
Hypothèses alternatives
|
- la croissance économique, au sein d'un marché
« libre » et mondialisé, est le but poursuivi.
- La santé est ce que l'on obtient à travers un
service de santé.
- L'aide internationale, à condition d'appliquer
certaines politiques, est le seul moyen de financer la santé.
- La démocratie est bien vivante dans le monde
développé et constitue la référence pour les pays
en voie de développement
|
- La distribution juste et l'utilisation durable des
ressources est le but poursuivi.
- A santé est ce que l'on obtient lorsque les besoins
de base sont satisfaits.
- Les Etats souverains et affranchis de leurs dettes doivent
satisfaire les besoins de base de leurs peuples sans aucune autre
ingérence.
- La démocratie est partout en crise.
L'auto-détermination des Etats nations et un système basé
sur es règles de la gouvernance internationale sont
nécessaires.
|
Principaux traits
|
Principaux traits
|
- S'occupe des symptômes ; court terme.
- Promeut les « médicaments
miracles »
- Promeut des interventions délivrées à
travers les services de santé
- Identifie la charité et l'aide internationale comme
seules sources de financement de la santé
- Maintient le statu quo d'extrême concentration des
richesses et de pouvoirs.
- Se base sur le comportement individuel et a tendance
à blâmer la victime.
|
- S'occupe des causes premières ; long terme.
- Promeut la satisfaction des besoins de base.
- Promeut les services publics afin de libérer des
peuples des conditions de vie misérables.
- Identifie la redistribution et la justice économique
comme des sources de financement de la santé.
- Réclame un ordre économique international
juste et rationnel.
- se base sur la pauvreté structurelle et la violence
et a tendance à blâmer le
« système ».
|
Tableau 2- Tiré de « A. Katz. The sachs
report »
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