Aujourd'hui, la microfinance et de manière plus
générale la micro intermédiation apparaît de plus en
plus comme un palliatif au sous développement financier dans les PED. On
observe une expansion du secteur de la microfinance qui jouant ici le
rôle de réponse à l'exclusion financière
essentiellement, mais également de solution au
dysfonctionnement du système financier officiel.
Dans les PED, comme nous l'avons déjà souligné, on note un
rôle de plus en plus important de la finance informelle. A cet effet, les
institutions communautaires reposant sur les appartenances culturelles telles
que les clans, les lignages, les religions, les organisations
tontinières ou les associations de crédit, reposent sur
l'adhésion. Hugon [1996] explique que ces circuits sont
caractérisés par des transactions où prédominent
les espèces, avec une faiblesse ou une absence d'enregistrement et des
réglementations, l'échange des actifs se faisant le plus souvent
hors des cadres juridiques avec un fort rôle pour les relations
personnelles et des solidarités communautaires d'appartenance ou
d'adhésion.28
À coté de la finance informelle, la
microfinance joue un rôle économique et social de plus en plus
croissant dans les PED. Ce rôle découle de l'appui
extérieur dont bénéficie la microfinance
bénéficie vis-à-vis des bailleurs de fonds, bien que
s'appuyant cependant sur des dynamiques
endogènes.
28 (Voir les travaux de Lelart M. 2005 qui traite de
cette question)
1- Situations en Afrique subsaharienne
On a une évolution économique marquée
par l'application des PAS entre les années 80 et 90 par un nombre
croissant de pays. Ayant pour résultante une
dégradation de la situation économique de ces pays
(déséquilibre du budget, de la balance des paiements,
ralentissements de l'activité etc.). Comme conséquence la plus
grave se situe au niveau social avec des licenciements qui consistent à
la réduction des effectifs dans les administrations, causant ainsi la
baisse des revenus. Le développement du secteur informel doit être
considéré comme une réponse endogène des agents qui
réagissent pour faire face à cette précarité.
Ainsi, l'extension et l'adaptation des activités
informelles pourraient s'expliquer par la faillite du système
bancaire29.Cela s'est entre autre matérialisé par la
fermeture de certains établissements bancaires en général
étatiques, avec la désertion des guichets des banques encore en
activités et la régression des opérations
dépôts comme crédits. On a eu aussi un
phénomène d'éviction des microentreprises et PME du
crédit bancaire qui constituent les principaux signaux de cette
faillite.
C'est dans cet environnement que la dynamique de
la finance informelle et son succès dans la mobilisation de
l'épargne informelle a contribué à une amélioration
du financement des microentreprises.
2- La microfinance et la promotion de l'activité
entrepreneuriale
Du point de vue de l'activité entrepreneuriat, les PED
dans leur coopération au niveau étatique avec les pays
du nord n'ont pas été des partenaires efficaces.
On a un constat d'échec des états du tiers
monde dans le financement de l'entrepreneuriat, d'où la
nécessité de substituer l'aide extérieure30
à un effort national de mobilisation de l'épargne. De ce point de
vue, la microfinance s'avère être un partenaire efficace et
essentiel de mobilisation et de l'allocation des crédits aux
investisseurs.
La microfinance constitue un soutien majeur aux petites et
moyennes entreprises (PME). Cela nous conduit à
analyser la PME dans son approche fonctionnelle pour mieux
appréhender ces besoins en financement. Dans la littérature
économique, on a une variété de définition de la
PME. Cependant, elle s'appuie sur un certain nombre de critères communs
qu'on peut qualifier d'objectifs tels que: le nombre de personnes
employées, le chiffre d'affaires réalisé, le
capital,
29 (cf. Lelart M.2000 sur le cas du Bénin)
30 Voir en annexe une schématisation de l'aide
au développement et théories du développement dans
l'histoire.
l'organisation du travail, le niveau d'investissement
réalisé etc. Pour le volet financement de la microentreprise ou
de la PME, nous allons pouvoir avec Lelart M [1995,445] identifier les
spécificités du financement des microentreprises.
Mais, au préalable nous tenons à préciser
que nous assimilons la microentreprise à l'entreprise informelle et
à la petite entreprise.
Donc avec la faillite des entreprises publiques, il faut dire
que dans les pays d'Afrique notamment, la plupart des entrepreneurs
locaux sont des «petits » et leurs demandes financières, bien
que souvent minimes, ne sont pas satisfaites par les banques officielles. Pour
leur financement il est essentiellement assuré par la micro finance.
Prescot [1997] souligne à ce propos que la microfinance est «la
fourniture des services financiers aux démunis ». Selon sa
conception, la microfinance recouvre bien l'aspect de financement alternatif
qui consiste à proposer une solution alternative face à la
rigidité des systèmes bancaires dans la
problématique de création d'entreprise comme le fait remarquer
Pierrard M.., [1998].
La problématique de la création d'entreprise
nécessite des investissements et des prêts. Or dans les PED, le
constat est que les promoteurs d'entreprises ne sont pas crédibles
auprès des organismes financiers formel notamment bancaire, d'où
ils se tournent vers le secteur de la micro finance qui se trouve etre
l'intermédiaire entre le secteur formel et informel.
De fait la microfinance devient alors l'instrument par lequel
se réalise la réinsertion des exclus. Si nous considérons
par exemple la zone UEMOA, on constate qu'elle est caractérisée
par l'existence d'une forte proportion de microentreprises notamment
artisanales, ainsi que de petites et moyennes entreprises
industrielles et de service. On constate aussi que l'ensemble de ses acteurs
économiques éprouve d'énormes difficultés pour le
financement de leur activité. Pour ce qui concerne le crédit
bancaire il leur est pratiquement inaccessible. De fait, ces entrepreneurs
comptent sur leurs propres ressources et ceux de leurs proches ainsi que les
techniques de la finance traditionnelle. Tel que la tontine ou les associations
rotatives d'épargne et de crédit qui constituent des alternatives
de financements de ces opérateurs économiques (Cf. Lelart (1
990,1 999 et 2000).
Dans cette zone les problèmes
d'asymétries d'information sont encore plus critiques dans la
mesure où l'économie informelle prédomine. Ainsi, on
constate que les entreprises de ces PED ne sont pas capables pour la plupart de
fournir ou même de produire des informations compatibles avec leur
standard en matière d'analyse de dossier, mais surtout de
contractualisation et de contrôle. Donc l'aspect de la microfinance en
tant qu'appui de l'activité entrepreneuriale
nous parait intéressant en référence
à la théorie autrichienne31 de la croissance qui situe
l'activité entrepreneuriale au coeur du processus de création de
richesse. En effet, cette théorie met l'accent sur l'entrepreneur et le
capital32 qui ont un rôle primordial dans le processus de
croissance et de développement. Alors, nous pouvons préciser que
cette dimension économique prend plus de poids dans les PED où
les économies sont marquées par l'absence de redistribution ni
protection sociale où prédominent le plus souvent les
mécanismes de solidarité due aux aspects culturels et
traditionnels. Ces mécanismes de solidarité sont basés sur
des réseaux tels que la famille notamment élargi, le village ou
la communauté. La microfinance vient dynamiser tout ce
processus en constituant une alternative crédible en termes de
financement alternatif aux ressources du secteur structuré.