C/Structure financière et développement
Toute la réflexion sur les déterminants du
développement des systèmes financiers prend tout son
sens dans les PED, où, précisément, ils sont souvent
« rudimentaires ». Ceci s'explique par le fait,que dans la plupart
des PED, il y a une absence de cadre légal suffisamment
établi, par conséquent le financement s'organise localement et
cela autour de pratiques et coutumes que la littérature
économique qualifie de secteur informel. Elles coexistent avec un
système formel qui se compose le plus souvent d'une banque
centrale, de banques commerciales, et d'un trésor public, dans la
plupart des PED. On a un dualisme financier dans lequel les
intermédiaires financiers informels et les institutions formelles jouent
souvent un rôle complémentaire en fournissant des services
financiers différents à des groupes socioéconomiques
différents. Dans ce dualisme financier, les intermédiaires
informels disposent d'un avantage comparatif dans l'acquisition de
l'information concernant les «petits » emprunteurs qui sont
vulnérable aux chocs de revenu qui sont difficilement
observable21. Alors que, le secteur formel lui s'appuie sur un
système légal et institutionnel qui fait défaut
au premier.
Un développement financier basé uniquement sur
le secteur formel ne prendrait pas en compte l'ensemble du
système financier des PED d'où l'importance
d'y associer le secteur informel. Toutefois, le secteur informel qui
constitue une réponse endogène aux problèmes d'information
n'est pas à même lui seul de déclencher un processus de
croissance durable reposant sur l'entreprise et le financement de l'innovation.
Le sous développement financier se traduit par un accès
compliqué et coûteux aux financements. À ce stade il faut
souligner les progrès notables réalisés par le
développement de la microfinance pour répondre aux besoins des
ménages notamment ceux à faible revenu. Le constat est que
plusieurs activités financer par la microfinance grâce aux
soutiens des bailleurs de fonds deviennent viables et permettent à
leur
21 (Cf. Jacquet et Pollin [2007]).
promoteur d'accéder au secteur bancaire. En ce sens
où la microfinance contribue au développement financier des
PED.
D/Microfinance et développement financier
Les institutions de microfinance composée
essentiellement des coopératives d'épargne et de crédit,
ainsi que les mutuelles de crédit se situent dans la catégorie
institution financière que nous pouvons classer dans le secteur semi
« semi formel ». Cela dans la mesure où parfois dans certains
PED, sauf des exceptions, ces organismes ne peuvent être
considérés comme faisant partie du secteur formel parce qu'ils ne
sont pas soumis ni à la législation de l'État ni à
la tutelle des autorités réglementaires [Ledgerwood, 1999]. Mais
il faut dire qu'ils ne font pas partie aussi du secteur informel et ces
mutuelles de crédit qui contribuent énormément aux
développements de l'intermédiation financière sont une
sorte d'intermédiaire entre le secteur formel et informel, combinant les
certains aspects des deux secteurs: comme l'idée de se regrouper pour
s'ouvrir l'accès à certains services financiers ce qui trouve son
origine dans les pratiques traditionnelles de solidarité22.
Ces groupements ainsi constitués sont progressivement
entraînés dans le courant des circuits plus «officiels »
ou plutôt «semi officiel ». Ces IMF permettent comme le dit
Doligez [2002]23la «densification » du
système financier, sa profondeur financière, ainsi que
la porté (oufreach)en termes démographique. Ces
coopératives jouent un rôle important dans la fourniture de
services bancaires de proximité notamment en milieu rural, ainsi
assurent la couverture bien que partielle des territoires.
Pour mesurer l'impact sur le développement financier,
nous nous appuyons sur trois études de cas menés
auprès de trois réseaux de Microfinance rurale au Bénin,
en Guinée et au Nicaragua. Ce travail a été mené de
1992 à1 999 dans le cadre du travail de thèse de Doligez [2002]
sur trois réseaux de microfinance rurale : la FECECAM-Bénin, le
Crédit rural de Guinée et le fond de développement local
de Nitlapan au Nicaragua. Les trois institutions couvrent la diversité
des grandes familles existantes au sein de la microfinance : les
coopératives d'épargne et de crédit
(FECECAM-Bénin), crédit solidaire inspiré de la Grameen
Bank (Crédit rural de Guinée), et des caisses villageoises
(Nitlapan au Nicaragua). Il ressort de cette étude que, la microfinance
grâce à sa proximité aux populations permet la fourniture
de services bancaires,
22 Cf. Soulama .S (2000) «Economie des
organismes coopératives et de type coopératif»,
Publications du CEDRES, Université de Ouagadougou, séries
«théories économiques et manuels de cours»
CEDRES;
23 Cf. Doligez. (2002) «
Microfinance et dynamiques économiques:
quels effets après dix ans d'innovations financières ?
»CERED-Forum, Université de Paris X Publications dans la revue du
tiers Monde, n°172, octobre- décembre 2002;
notamment à un maillage plus dense du
territoire24. Les chiffres sont encore plus édifiants pour le
Bénin où les caisses villageoises de petite taille permettent de
satisfaire en milieu rural cinq ou dix fois les agents économiques par
rapport aux banques. Dans les trois pays étudiés, le
nombre de guichets de la microfinance en pourcentage d'habitant est largement
supérieur à celui du secteur bancaire. (cf. Tableau1 à 4,
Doligez 2002).
Comparaison des indicateurs d'impact sur le développement
financier
Tableau 1.1 : Nombre de guichets
Bénin Guinée Nicaragua
Secteur bancaire
|
19 agences Une pour habitant
|
295000
|
9 villes couvertes
Si entre 20 et 40
agences une pour 180 à 360 000 habitants
|
195 Agences Une pour habitants
|
23 750
|
Micro finance
|
270 guichets Un pour habitants
|
20 000
|
137 guichets
Un pour 52 500
habitants
|
234 guichets Un pour habitants
|
19 800
|
Rapport
|
15pourun
|
|
5pourun
|
1,2pourune
|
|
|
Source: Doligez (2002) «Microfinance et
dynamiques économiques: quels effets après dix ans
d'innovations financières »
Tableau 1.2: Profondeur financière et poids de la
microfinance dans les volumes intermédiés
Bénin Guinée Nicaragua
Taux de
monétarisation
|
M2/PIB=24% (1998)
|
M2/PIB< 1 0%(1 994)
|
M2/PIB=1 6%(1 996)
|
Microfinance
|
6%dépôt bancaire et 10% du crédit
à l'économie
|
6% dépôt bancaire et 6% crédit bancaire
|
15% du crédit
bancaire (mais 2/3 en milieu rural)
|
|
Source: Doligez (2002) «Microfinance et
dynamiques économiques: quels effets après dix ans
d'innovations financières »
24 Au Nicaragua, la faible
différence du nombre de guichets dissimule une concentration
très importante des agences bancaires dans les
grandes villes, chefs lieux de département et quelques villes
secondaires.
Tableau1.3: Portée des secteurs financiers par rapport
à la population économique active (PEA)
Bénin Guinée Nicaragua
Secteur bancaire
|
ND
|
<1% de la PEA
|
Autour de 7% de la PEA au niveau national
Moins de 2% des
exploitations agricoles
|
Microfinance
|
10%PEA
(4 à 16% PEA au niveau des caisses FECECAM)
|
4%PEA (10%PEA en moyenne dans
les sous-préfectures touchées par le CRG)
|
Autour de 13% de la PEA
|
|
Source: Doligez (2002) «Microfinance et
dynamiques économiques: quels effets après dix ans
d'innovations financières »
Tableau1.4: Comparaison des niveaux de transaction par rapport
au revenu moyen par habitant (RMH)25
Bénin Guinée Nicaragua
Secteur bancaire
|
Dépôt minimum de 2 foisleRMH
|
ND
|
Prêt moyen bancaire de12,3RMH
|
Microfinance
|
Dépôt moyen de 0,47
|
Dépôt moyen du
|
Prêt moyen des
|
|
RMH (0,3 pour la
|
CRG de 0,18 RMH
|
coopératives de 2,93
|
|
FECECAM)
|
Prêt moyen du CRG
|
RMH
|
|
Prêt moyen de 0,47
|
de 0,1 7RMH (contre
|
Prêt moyen des
|
|
RMH (0,87 pour la FECECAM)
|
1,72 pour le CMG)
|
associations de crédit de 1,08 RMH
|
|
Source: Doligez (2002) «Microfinance et
dynamiques économiques: quels effets après dix ans
d'innovations financières »
25 .Respectivement 408 € au Bénin, 548
€ en Guinée et 462 € au Nicaragua (Banque mondiale,
2001)
Globalement les montants alloués sont modestes dans la
mesure où on a 6% de l'épargne intérieure privée et
autour de 10% du crédit à l'économie. Cependant, si on
considère les zones rurales ou l'agriculture la proportion augmente. Au
niveau des transactions, on observe que le rapport microfinance et le secteur
bancaire varie de 1 à 5 suivant les types d'institutions de
microfinance, ce qui démontre leur diversité. En Guinée,
les coopératives d'épargne crédit ont en
moyenne, des niveaux de transactions supérieurs au
crédit solidaire et cela en proportion très importante comme
l'indique le rapport de 1 à10 du volume des transactions du
Crédit rural et celui du Crédit mutuel de Guinée. Pour ce
qui est du ratio d'endettement, pour la plupart des institutions de
microfinance il est de l'ordre de 20 à 100% ce qui est raisonnable
compte tenu du rapport au revenu moyen par habitant.
|