Nous présenterons dans le cadre du matériel,
l'exploitation, le pâturage et les parcours, le troupeau et sa conduite
enfin, les données disponibles.
2.1.1. L'exploitation
Située au coeur de la zone préalpine
(vallée de la Bléone, zone de moyenne montagne
méditerranéenne à 584 m d'altitude), à une dizaine
de kilomètres de Digne-les-Bains, la ferme expérimentale de
Carmejane a trois principales missions : la production ovine, la formation et
l'expérimentation. Unique station expérimentale ovine des zones
de montagne méditerranéenne, elle est liée au Lycée
d'Enseignement Général et Technologique Agricole (LEGTA) et au
Centre de Formation Professionnelle et de Promotion Agricole (CFPPA) de
Carmejane pour lesquels elle est un outil pédagogique. Elle est aussi au
service de la profession pour répondre au questionnement du secteur
agricole formulé par les techniciens d'élevage et les
équipes de recherches pastorales. La main d'oeuvre est de 5
Unités de Travail Humain (UTH) partagée entre activités de
production, d'expérimentation et de pédagogie. La logique de
production est restée celle du cas type « sédentaire
spécialisé » avec un usage maximal des parcours jusqu'en
2004 (Mary et al., 2004).
2.1.2. Le pâturage et les parcours
Les parcours fournissent 40 à 50 % des journées
d'alimentation brebis. Les périodes d'entretien et de gestation se font
en parcs, la lutte se passe sur prairies et la lactation en bergerie ou sur
prairie.
2.1.2.1. Les parcs
Compris entre 600 et 1000 m d'altitude avec des
dénivelés allant de 50 à 250 mètres, la taille des
parcs varie de 3 à plus de 50 ha. Les parcs de Carmejane sont
très hétérogènes par leur végétation,
leur relief, leur exposition... Ces parcs sont le plus souvent composés
de bois et de landes. Toutefois, les espèces les plus couramment
rencontrées sont :
> Pour les herbacées : l'Aphyllante de Montpellier
(Aphyllantes monspeliensis), le
Brachypode penné (Brachypodium pinnatum), le
Carex humble (Carex humilis), la
Fétuque ovine (Festuca ovina)...
> Pour les espèces arbustives : l'Amélanchier
à feuilles ovales (Amelanchier ovalis),
le Genêt cendré (Genista cinerea) , ainsi
que le Genévrier (Juniperus sp.) et le Thym (Thymus
vulgaris).
> Pour les espèces arborées : le Chêne
blanc (Quercus pubescens) et le Pin noir (Pinus nigra)
principalement.
2.1.2.2. Les modes d'exploitation des parcours
Chaque parc (prairie ou parcours) clôturé et
électrifié connaît une utilisation saisonnière :
> Spécialisés « hiver » : les mieux exposés
au soleil et riches en Aphyllante de Montpellier ;
> Spécialisés printemps - automne : landes
ouvertes ;
> Spécialisés « été » :
parcs ombragés (arboré), avec une végétation plus
tardive (décalage de la pousse de l'herbe) ;
> Moins spécialisés permettant d'effectuer les
soudures entre saisons ;
> Adaptés à la distribution de
concentrés lors du flushing ou du steaming. 2.1.3. Le troupeau et la
conduite
2.1.3.1. Le troupeau
Le cheptel comporte 600 brebis de race Préalpes du Sud
inscrites à l'Unité de Promotion de la Race (UPRA). Le troupeau
est conduit en race pure et en deux lots, le premier agnelant en fin d'hiver,
le second à l'automne 750 agneaux de bergerie sont produits chaque
année et la plupart sont valorisés sous les Signes Officiels de
Label Rouge César, Indication Géographique Protégé
(IGP) « Agneau de Sisteron ».
Appelée autrefois race de Savournon, de Sahune ou de
Quint, la race ovine « Préalpes du sud » est la réunion
de ces trois populations et porte aujourd'hui le nom de la région dans
laquelle elle est implantée, située aux confins de la
Drôme, des Hautes-Alpes, des Alpes de Haute Provence et du Vaucluse.
Adaptée aux parcours, aux garrigues et aux montagnes du sud-est de la
France et à des conditions de climat et d'alimentation difficiles, cette
brebis rustique est de taille assez ramassée (de 60 à 65 cm au
garrot chez la femelle pour 50 à 70 kg, 70 cm chez le mâle pour 75
à 100 kg), et se caractérise par une couverture de laine moyenne
à faible (peau et laine blanches) qui s'arrêtent parfois à
mi-flanc. Comparée à d'autres races françaises (taux de
prolificité proche de 200 % aujourd'hui), la Préalpes du sud est
moyennement prolifique (140 %) mais elle présente
un bon développement musculaire, qui lui permet de
produire de bons agneaux en race pure (Emilie Blaise, 2006).
2.1.3.2. La conduite
Le pâturage libre en parcs avec, selon la phase
physiologique, une complémentation minérale et
céréalière ainsi que l'alimentation à l'auge (de
quelques jours avant la mise bas à la fin de la lactation) constituent
l'essentiel du mode de conduite (figure 1 ; Annexes A, B et C). Par manque de
surfaces pastorales locales, l'exploitation pratique la transhumance depuis
2004 pour les deux mois d'été.
La nature des ressources utilisées est choisie de
manière à répondre aux besoins des stades physiologiques
clefs (lutte, gestation, lactation). Ainsi :
> La préparation à la lutte, se fait en parcs
avec complémentation selon l'état des brebis (flushing : 3-4
semaines) ;
> La lutte, se fait sur prairies principalement avec flushing
jusqu'à la fin (5 semaines) ;
> La fin de gestation, se passe sur parcours avec
complémentation
(steaming : 6-8 semaines), surtout pour le lot
d'hiver, qui pâture en tri ;
> La lactation, se passe en bergerie avec distribution de
foin et d'aliments concentrés à base de céréales
(8-10 semaines) ;
> L'entretien se passe sur parc d'été et/ou
d'hivers (24-33 semaines).
L'état des animaux est suivi par l'attribution, avant
et après ces stades, d'une note d'état corporel (NEC) qui permet
de suivre l'efficacité de la stratégie d'alimentation en
vérifiant l'augmentation des réserves corporelles au moment de la
lutte et de la mise bas. L'objectif est d'atteindre une NEC moyenne de 2.5
à ces stades.
La reproduction se fait essentiellement par lutte naturelle :
Carmejane dispose de 10 béliers Préalpes, 3
béliers Berrichons (afin de répondre aux expérimentations
menées sur les performances des agneaux) et de 4 béliers
vasectomisés pour l' « effet bélier ».
La reproduction qui s'étale sur 35 jours, utilisant deux
modes :
· L'insémination artificielle : Dans le cadre
de l'UPRA et de son schéma de sélection de la race
Préalpes, quelques brebis (une cinquantaine) sont en insémination
artificielle
· La lutte naturelle :
> Lots de paternité connue : Deux lots
constitués des brebis de meilleure valeur génétique
(mères à béliers ou mères à agnelles) sont
mises en lutte en contrôle de paternité (valeur
génétique du père, connue).
> Lots de paternité inconnue.
Des deux périodes initiales (lutte de printemps et
lutte d'automne), avec la lutte d'automne comme lutte principale, Carmejane
fonctionne actuellement avec quatre périodes de luttes (deux lutte
principales et deux luttes de rattrapage).
2.1.4. Les données disponibles
Le jeu de données disponible sur Carmejane sous forme de
feuilles de calcul Microsoft Excel, est constitué de carnets de conduite
(agnelage, lutte, notation d'état corporel, performances des agneaux).
De ces données, nous avons exploité celles de la période
fin de campagne 1999 à fin de campagne 2006 retenant pour nos
investigations les enregistrements suivant :
> Note d'état corporel (début flushing,
début de lutte, fin de lutte, fin de gestation, mise bas et sevrage)
> Performances de reproduction (date de mise bas, taille de
portée, poids de portée)
> Age à la lutte et mode de lutte.