1.6.4.2. Actions des acteurs et réactions des
spectateurs.
Dans cette section, W. Sauter tente de répondre aux
spectateurs qui cherchent à décrire et analyser ce que l'acteur
« fait » sur la scène. W. Sauter propose de distinguer trois
types d'actions : actions d'exhibition, actions encodées et actions
incarnées qui entraînent des réactions de la part des
spectateurs. Celles-ci sont principalement de deux ordres : cognitives ou
émotionnelles. Ces réactions constituent la base du jugement de
valeur porté par le spectateur, sur l'artiste et sur le spectacle vivant
dans son intégralité ; ces réactions sont issues des
réactions cognitives et émotionnelles du spectateur durant toute
la durée du spectacle et même après. Le jugement de valeur
peut être mesuré mais pas toujours expliqué, puisque des
éléments inconscients se mélangent à
l'argumentation rationnelle. Dans ce sens, Pierre Bourdieu explique que la
distinction entre l'amateur et le professionnel consiste justement pour ce
dernier, en sa capacité à expliciter son jugement.
(1) actions d'exhibition
L'acteur entre dans l'espace de jeu, la scène, et se
présente lui-même au spectateur. Il s'agit du « showing off
» de l'acteur qui domine la scène grâce à sa
personnalité et à ses compétences. Ces actions
décrivent l'acteur (et non le personnage qu'il joue), son apparence
personnelle, son tempérament, son charisme... Le spectateur
réagit à cette exhibition de manière émotionnelle
et cognitive : affection, attente, reconnaissance... mais aussi
curiosité, attention, excitation ou d'un point de vue négatif :
répulsion, indifférence, fatigue.
Ce premier niveau est le plus important par rapport aux autres
niveaux de communication. Car évidemment, sans intérêt pour
la personne qui veut communiquer, il n'y aura pas assez d'attention pour
réaliser les autres niveaux de communication.
(2) les actions encodées
Ces actions caractérisent tous les domaines de
spectacle théâtral et sont régulées par des normes
et des conventions plus ou moins strictes, quelques-unes d'entres elles
étant constitutives de certains genres. Elles caractérisent le
genre, le style et les compétences. A l'intérieur de chaque
genre, il existe un nombre de styles plus ou moins distincts, en fonction des
traditions historiques, géographiques et personnelles. De plus ces
caractéristiques de genre et de style peuvent être
présentées différemment en fonction des compétences
et de la manière personnelle de les considérer et de les
interpréter pour l'acteur en tant qu'individu. Ce dernier aspect est
fortement en relation avec le niveau sensoriel.
De plus, le spectateur doit posséder une certaine
connaissance des actions encodées pour être capable d'y
réagir. À l'intérieur de ce niveau de communication, il
faut distinguer les réactions intuitives et cognitives. Le plaisir
esthétique du spectateur et son jugement sur l'artiste de spectacle
vivant se situent également à ce niveau.
(3) Actions incarnées
Le niveau symbolique de communication est le plus facile
à comprendre étant donné qu'il a toujours
été au centre des études théâtrales. En
revanche, il est plus complexe de distinguer les actions encodées qui
ont une fonction performative et qui deviennent ainsi des actions
incarnées, et celles qui ne le sont pas. Les actions incarnées
désignent les activités de l'artiste qui impliquent la
présentation d'images fictionnelles. Toutes les actions que nous
percevons comme des activités arbitraires d'un personnage fictif sont en
réalité le résultat d'actions performatives
calculées minutieusement. Dans chaque spectacle, par exemple, l'acteur
doit être sûr de se trouver à un moment donné dans
une position déterminée et de dire certains mots. Nous devons
souligner que le personnage fictionnel est toujours créé à
la fois par le spectateur et l'artiste.
Le spectateur réagit de manière émotionnelle
et intellectuelle, en interprétant les actions de la scène.
Dans la dernière partie, consacrée à
l'analyse de la réception dans les articles de la presse écrite,
nous verrons si ces composantes de la perception se retrouvent dans les
arguments du journaliste quant à son appréciation du
spectacle.
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