CHAPITRE 2 : RESULTATS SUR LES INSTITUTIONS
2.1 La FPMA, une institution religieuse
En tant qu'institution religieuse, la FPMA regroupe à
travers ses Temples quelques 5000 personnes sur les 25.00091
Malgaches estimés présents sur le sol français. Ces 5.000
Malgaches se rajoutent probablement aux 700.000 protestants comptés en
France92. Selon le statut de la FPMA, ces temples sont quasiment des
nouveaux territoires pour les Malgaches « étrangers » en
France, les Malgaches « Français par acquisition actifs
»93 et les Malgaches en situation irrégulière. La
FPMA a ses propres manières de mettre en avant ses offres pour une
diversité de « fidèles » malgaches. Le but est de faire
naître une communauté formellement institutionnalisée.
Je cite l'article 2.1 du statut de l'association : « La
FPMA est une association cultuelle constituée en France, en
conformité avec les dispositions légales et réglementaires
en vigueurs pour les associations régies par la loi de 1901, et
notamment celles des lois du 29 décembre 1905 et du 07 janvier ».
(2.2) « La création de la FPMA a été publiée
au JORF n°57 du 3 mars 1963, page 2296, sous la déclaration
primitive n°62/1161 ». Cette formalité offre l'aspect
légal de la présence communautaire dans les Temples.
L'association s'est offerte une structure légale qui fonctionne sur
trois niveaux hiérarchiques : niveau FPMA (global,
national/international), niveau Régional et niveau paroissial ou
local.
Dans le statut, les objectifs sont clairs selon l'article 4
intitulé « objectifs- oeuvres ». En paraphrasant je
résume qu'il s'agit de :
- annoncer l'Evangile, en particulier aux Malgaches
« résidents ou de passage en France »
- célébrer des cultes en langue
malgache
- faire la propagation de la foi et de l'éthique
chrétienne
91 Cette estimation est faite par RABENORO lors de son
discours en 200O, le discours intitulé « 40e anniversaire. Un
défi, une attente, une victoire acquise. ». Par ailleurs, on a
remarqué qu'aucune statistique officielle n'a pu offrir le chiffre exact
des Malgaches en France. Pour CRENN (1998), « En quinze ans, le nombre des
Malgaches a doublé. Ils sont passés de 20.000 à 50.000
»
92
- promouvoir la culture et former
spirituellement ses membres
« On dénombre environ 700.000 protestants en France,
une enquête a montré que 1,7 million de personnes se
déclaraient « proches du protestantisme », et parmi elles une
proportion élevée de catholiques qui ne songent pas pour autant,
à abandonner leur confession d'origine mais qui se reconnaissent
spirituellement dans le protestantisme. (Enquête, CSA, La Vie, ARM,
Réforme, Christianisme au Xxe siècle, 1995).
93 Termes utilisés par l'INSEE (Institut
National des Statistiques et des Etudes Economique) dans sa publication de
1991. On compte dans ce rapport, 8863 Malgaches dans la rubrique «
Etrangers par nationalité détaillée », et 4989
Malgaches dans la rubrique « Français par acquisition actifs par
nationalité ».
- sensibiliser les membres au respect et à la
préservation de la culture malgache
- concrétiser des oeuvres sociales et de
développement
- soutenir des efforts pour l'oecuménisme
- s'interdire de prendre parti pour une organisation
politique.
Ces objectifs sont un des moyens - celui ci ayant un ton
très officiel- de présenter les offres de l'institution FPMA en
générale. Les activités connexes pour chaque objectif sont
présentées dans le statut à travers les activités
des petits regroupements par synode, comités, commissions,
départements ou sections.
La présentation de la FPMA insiste sur son aspect
légal. Même au niveau local, la légalité est un
critère réclamé. Le pasteur de l'assemblée de la
rue DANTON précisait « oui, on est reconnu, on a même
déposé notre statut à la préfecture, on est reconnu
par l'Etat, avec un pasteur et quelques dirigeants comme dans toutes les
églises en France »94.
Mais, l'analyse de l'offre institutionnelle ne devrait pas se
limiter à la présentation de ces mises en forme statutaire et
à la reconnaissance légale des regroupements communautaires
malgaches dans les Temples. Ma question est toujours de savoir sur quelle base
est faite la proposition de structuration communautaire de la FPMA et
particulièrement des deux Temples observés. Cette proposition
est-elle sur une base ethnique? Malgacho-malgache? Religieuse? Est-ce une
nouvelle structuration communautaire différente ou hors de toutes autres
structurations communautaires qui puissent exister en France?
Je suppose qu' une part de cette proposition de structuration
communautaire se tient dans sa structure même et en partie dans ses
moeurs et culture. Les rites observés ont leurs propres règles et
leurs propres évocations et vécus. Dans les Temples, la
religiosité est aussi exprimée par ces rites, dans les
comportements des gens et leurs attitudes mais pas uniquement dans les
croyances. Les rites, hérités, inventés ou
représentés constituent une mise en avant de l'identité
religieuse des activités vécues dans les Temples. La proposition
structurelle de la FPMA - considérée ici comme offre
institutionnelle- tient compte de la religiosité pour réguler la
question des origines et de la réalisation des rites. C'est cette
facette de l'offre institutionnelle qui a une teneure religieuse
déterminante que j'appelle ici facette religieuse. Les leaders sont
impliqués dans la formulation et la réalisation de cette
offre.
A travers les temples, j'ai pu aussi observer que les offres
institutionnelles sont marquées par les activités menées
dans ces lieux cultuels. Il s'agit principalement de transmettre l'Evangile,
mais aussi il s'agit de faire vivre et de vivre à travers quelques
activités définies, improvisées ou non
94 Entretien du 3avril 2002.
contrôlées, une expérience communautaire
réelle qui tient compte d'une certaine affinité du groupe dans un
espace communautaire où la filiation communautaire est toujours mise en
avant. Cette facette sociale est sous l'emprise des leaders dont le rôle
est de maintenir une expérience communautaire vivante et de transmettre
ce qui est à vivre dans (et avec) ces Temples.
Le dernier grand rôle des leaders que j'ai
identifié, est la régulation idéologique du croire. C'est
comme si les leaders définissent eux mêmes qui croire et comment
croire. Il s'agit donc de légitimer le croire avec des convictions et
des volontés en façonnant le culturel. Cette facette de l'offre
institutionnelle, je l'ai appelée idéologico politique.
|