L'impérialisme culture occidental et devenir de la culture africaine: Défis et perspectives( Télécharger le fichier original )par Bernard ZRA DELI Grand Séminaire Saint Augustin de Maroua - Fin de cycle de Philosophie (Licence) 2008 |
II - 2 Les problèmes culturels africainsLe contact avec l'extérieur a placé l'Afrique dans un abîme d'aliénation culturelle et a engendré l'incroyable poids de résignation et de fatalisme dans toutes ses sociétés déshéritées. Celle-ci est devenue un creuset où s'affrontent, se fondent et s'effondrent des « valeurs » multiples. Ceci a pour conséquence la perte de repères culturels, personnels, familiaux et sociaux. Étourdi et sourd dans un nuage culturel, l'Africain ne sait plus quelle direction prendre. MUDIMBE décrit cette situation comme une mouche dans une toile d'araignée : « Lancée dans la modernité d'une histoire mondiale où elle a brusquement été projetée presque malgré elle, l'Afrique essaie aujourd'hui de relier son passé et son histoire aux impératifs encore obscurs pour elle de la dépendance économique ; cette dépendance qui la relie aux anciens colonisateurs. Des idéologies de développement l'enchaînent à des modèles étrangers dont l'application se fait selon les grilles qui ne tiennent compte ni de ses contradictions propres ni de ses problèmes réels.»54(*) L'entrée dans le nouveau mode d'existence, dans la modernité fragilise, fragmente toute la société africaine. Les Africains restent divisés et partagés entre l'ethnocentrisme et le modernisme temporel et nécessaire. Séduits par les avantages de la civilisation occidentale, les Africains cherchent à s'adapter aux nouvelles formes d'existence. Inexpérimentés et ignorants, certains finissent par confondre la modernisation à l'occidentalisation, le progrès à la déculturation. TRAN VAN KHÊ décrit cette situation : « Les peuples colonisés cherchent à imiter ceux qui les ont dominés, persuadés de la supériorité des cultures de ceux qui les ont vaincus par la supériorité de leurs techniques. Ils finissent par confondre le progrès, la modernisation, avec l'occidentalisation. »55(*) Les mutations que provoque ce contact avec l'extérieur placent les Africains devant une alternative inéluctable et provoquent la montée de trois types d'homme. D'une part, des conservateurs qui ont la nostalgie très poussée du passé ancestral et demeurent accrochés à la culture primitive ; d'autre part, une élite des intellectuels aliénés qui transforment leur culture en un simple objet de musée qu'ils regardent tantôt par curiosité, tantôt par moquerie du dehors et cherchent à la combattre par tous les moyens. Enfin, le troisième type, reste celui de la synthèse, cet Africain qui a su s'ouvrir aux nouvelles valeurs tout en demeurant lui-même sans s'assimiler et sans être assimilé. C'est ce type dont l'Afrique a besoin. Nous notons, ici et là, que les traumatismes sociaux ont transformé nos mentalités et nous ont livrés à d'innombrables complexes qui sont des principaux symptômes de la myopie intellectuelle et dont souffrent les jeunes africains aujourd'hui. Devant ce phénomène d'acculturation, l'Africain désespère parce qu'il est entraîné et tiraillé par des courants multiples. Il ne rêve plus qu'à devenir `` civilisé `', à `` s'européaniser''. « Il s'assimile, on l'assimile. »56(*) Les faits sociaux actuels, les besoins et les goûts quotidiens l'expriment mieux. Devant cette fuite d'identité de son être profond, l'Africain a à s'interroger sur son devenir dans le contexte présent pour se façonner une personnalité responsable et frayer des assises culturelles libératrices. * 54 MUDIMBE, L'Odeur du Père. Essai sur des limites de la science et de la vie en Afrique Noire, Paris, Présence africaine, 1982, p. 118. * 55 TRAN VAN KHÊ, « les musiques d'orient malades du JULE-BOX », in Unesco, le courrier, Juin 1973, pp. 6-13. * 56 JANHEINZ J., Op. Cit., p. 7. |
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