L'impérialisme culture occidental et devenir de la culture africaine: Défis et perspectives( Télécharger le fichier original )par Bernard ZRA DELI Grand Séminaire Saint Augustin de Maroua - Fin de cycle de Philosophie (Licence) 2008 |
I. PARTIEPHYSIONOMIE D'ENSEMBLE DES RELATIONS CULTURELLESI-1. Les concepts : Culture et CulturesLa culture touche tous les domaines de la vie humaine. Sa définition est contextuelle. Voilà pourquoi on parle de culture comme connaissance ou sagesse, comme production agricole ou mieux comme civilisation d'un peuple. Instance spirituelle et normative de la société, la culture fait de l'être humain un être historique, le détermine dans son expression fondamentale de l'humain, dans ses actes, sa singularité et dans sa vision du monde. On ne pourrait dans cette dynamique considérée une personne sans culture. Et selon les termes d'Achiel PEELMAN « chacun de nous baigne dans sa culture comme un poisson dans l'eau. »10(*) Et celle-ci, dans ses manifestations que sont la morale, la religion, l'art, la tradition nous suit comme une ombre dans tout notre passé et notre quotidien. Nous ne pouvons en aucun jour nous en séparer puisque regroupant toutes les sphères de notre vie et de notre être. Il y a donc lieu de définir l'homme comme un animal culturel. Ce n'est donc pas surprenant que soucieux de leur avenir, du devenir de leur être, tous les hommes « parlent d'identité culturelle, de dialogue des cultures, de développement culturel, de révolution culturelle, d'évangélisation des cultures. »11(*) Le dynamisme culturel de nos jours n'est que l'expression de la culture comme base fondamentale de tout être humain. La culture est ainsi dans son expression profonde le reflet de tout l'univers de l'homme dans son milieu de vie car elle surgit dans ce que nous sommes, dans nos connaissances, nos Us, nos moeurs, nos traditions et nos croyances. On pourrait dire que nous sommes ce que notre culture a fait de nous. Et rejoignant Achiel PEELMAN, nous disons que « chacun de nous, dès le premier jour de sa vie, a été programmé, éduqué ou endoctriné dans une seule façon d'être humain »12(*) selon les normes et les valeurs de sa société capable de lui procurer vie et liberté en rapport avec son milieu ambiant. Et si la culture est le signe, la mentalité et l'être vital d'un peuple donné, il y a lieu d'utiliser le mot culture avec diversités des valeurs. Il faut noter ainsi qu'il n'y a pas des peuples sans culture car chaque peuple essaie suivant ses possibilités de se rendre la vie plus facile dans son milieu ambiant en essayant de dominer celui-ci au risque de se faire écraser. Entendons par cultures, la diversité des sociétés ayant chacune sa façon d'être et de résister à la domination de son milieu. Et comme les problèmes ne sont jamais les mêmes pour toutes les sociétés, il y a lieu de parler des diversités culturelles. On emploie ainsi le terme cultures au niveau des groupes, des ethnies et des tribus comme ce qui crée des particularités et des différences les unes des autres. La culture est alors conçue comme la façon de chaque peuple à s'adapter à son environnement. Tous les peuples du monde se différencient par leur façon d'être et de faire. Il est important de dire avec MBUMUA que : « Les hommes ont inventé des cultures différentes en fonction de leurs préoccupations conjoncturelles, de leur subjectivité, de leurs goûts et de leur tempérament respectifs qui sont par essence, insuperposables. Les cultures humaines sont donc soumises au principe de la relativité et de pluralisme. Et comprendre une culture, c'est trouver le motif prédominant qui l'a fait naître et a pu lui permettre de se développer efficacement. » 13(*) La culture est comprise dans cette optique comme tout génie du genre humain qui permettra à chaque peuple d'éclairer le jour au jour ses dimensions proprement humanistes tant pour l'individu que pour la société. Au-delà de toutes ces diversités culturelles, l'aspiration de toutes les sociétés reste la même : parvenir à créer des conditions d'épanouissement de chaque individu. La culture devient pour tout homme ou toute société « un plan de vie à réaliser qu'un produit déjà fini. »14(*) Elle incorpore la dimension ontologique et anthropologique de l'homme. Elle apparaît ainsi comme force de libération d'un soi transcendant à tout l'ordre du spatio-temporel dans une vision globale de la croissance humaine, une croissance d'un monde vital mis en ses différents membres. Elle est aussi la « réalisation suprême de l'homme, appelé à se dépasser sans cesse intellectuellement, moralement, dans une vie individuelle et communautaire. »15(*) C'est à ce niveau qu'intervienne la définition moderne de la culture à laquelle tout le monde aspire. La culture se saisit dans ces conditions comme fonction de la réalisation humaine, d'où le devoir de chaque personne d'appartenir à une culture sans laquelle elle ne peut atteindre son plein accomplissement. Il modèlera ainsi sa nature et trouvera sa raison d'être humain dans sa culture. Le sens d'appartenance culturelle se veut un « impératif catégorique » à ne jamais perdre de vue. C'est dans cette dynamique que le pape Jean-Paul II pense qu'être homme, « signifie nécessairement exister dans une culture déterminée. »16(*) Il est donc nécessaire que l'homme soit situé dans le réseau de ses appartenances culturelles. La culture est le propre d'un homme ou d'une société. Edouard HERRIOT l'identifie à l'érudition en affirmant que la culture est « ce qui reste quand on a tout oublié. »17(*) Elle reste ce que nous procure l'éducation. Chez Ralph LINTON elle est « le mode de vie d'une société »18(*) c'est-à-dire la manière d'être et de faire propre à cette société. Loin d'être une connaissance inconsciente, la culture est une transformation consciente de la nature. La culture, au sens de la pensée africaine, doit contenir une force de libération capable de conduire aux valeurs essentielles. Chez le négro africain, elle est la conscience d'un peuple matérialisée par l'une des activités sociales. Il s'avère donc nécessaire et même indispensable de créer de nouvelles dimensions et de nouveaux critères à la culture humaine dans le processus de la réalisation de l'individu et de toute la communauté planétaire ; car « l'élément moteur de la possibilité même du développement humain d'un peuple pouvant le conduire à un niveau de vie plus digne de sa noblesse ont été, toujours et partout, et demeurent la valeur et la consistance de sa culture. »19(*) * 10 PEELMAN A., L'inculturation. L'Église et les cultures, Paris, Desclée,1988, p. 42. * 11 CARRIER H., Lexique de la culture. Pour l'analyse culturelle et l'inculturation, Paris, Desclée, 1992, page Couverture. * 12 PEELMAN A., Op. Cit., p. 42. * 13 MBUMUA W.E., Démocratiser la culture, Clé, Yaoundé, 1974, p. 7. * 14 PEELMAN A., Op. Cit., p. 46. * 15 CARRIER H., Lexique de la culture. Pour l'analyse culturelle et l'inculturation, Paris, Desclée, p. 106. * 16 JEAN-PAUL II, « Diversité des cultures et respect réciproque » in DC 2239, (2001), p. 2. * 17 HERRIOT É., cité par KENMOGNE E., Comprendre la philosophie, Tome I, Presses Universitaires de Yaoundé, 2000, p. 93. * 18 LINTON R., cité par VERGEZ A., - HUISMAN D., Nouveaux Cours de philosophie, tome II, Paris, Fernand/Nathan, 1980, p. 5. * 19 GALBIATI F., « Globalisation et mission à travers l'éducation » in Omnis Terra 406, (2004), pp .370. |
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