Les relations inter claniques chez les peuples Suundi de la République du Congo : héritage de Koongo dya Ntotila( Télécharger le fichier original )par Samuel KIDIBA Université Marien Ngouabi - Doctorant en anthropologie culturelle 2006 |
Les armoiries du clanLe clan, chez les Suundi a des insignes, des armoiries qui peuvent être : - un couteau, mbeele ya lusiimba, le cas du clan nsuundi ya Kayes à Kabadisu, district de Boko-Songho. Ce couteau qui a servi de guillotine depuis le XVIIIè siècle est gardé par le clan en signe de puissance ; - un balai (chasse mouche), kikomboso de nsuundi ou mansuundi-mulundu ya Nsuku Bwaadi ; - une étoffe de tissu, mulele mfunani, kiteende de Kinaanga de Kinzaambi et le clan du défunt canton Emmanuel à Hidi. Le tissu, symbole de richesse, facilite toutes les entreprises ; - une couverture en laine, vuunga dya leeni, pour le clan Mbiinda de Kissengha ; - une clé, lusaafi ou lusabi du clan Kibweende kya Kinzaambi ; - une pièce de monnaie de cinq francs, Mipata mitaanu du clan Nkebasani ; - une statuette en forme de chat, kinyaahu du clan Lwaangu de la vieille BIBIMBU à Kissengha. La statuette, en forme de chat, a un rôle tutélaire et protecteur. Tous ces objets ont un rôle différent d'un clan à un autre, et les membres de chaque clan s'y reconnaissent et ont une obligation à les garder, les gérer et le transmettre aux autres générations. Ces objets ont une dimension immatérielle, mystique mais aussi et parfois symbolique. Dans ce dernier cas, le clan peut conserver un objet juste pour des raisons liées à l'histoire du clan, sans charge mystico religieuse. Il rappelle et rappellera, à toute la descendance, tous les événements heureux ou malheureux qui lui sont liés et qui concernent le clan. La peine capitale a existé chez les Suundi. Toute personne qui allait contre les lois sociales préétablies passait à la sentence, la peine capitale de la guillotine, mbeele ya lusiimba du nsuundi de Kayi à Kabadisu. Au préalable, on faisait perdre connaissance à la victime, en lui frappant deux coups de balai, kikomboso par un membre du clan nsuundi-mulundu. Par la suite, un membre du clan Nsuundi l'exécutait avec le couteau ou coutelas, mbeele ya lusiimba du clan Kayi à Kabadisu. La victime était placée au bord d'un grand ravin qui sert de tombeau et dans lequel d'autres infortunés le suivaient en leur temps. Le ravin devenait ainsi une fosse commune. D'après nos informateurs, les clans Nsuundi, Lusiimba et Muluundu formaient le même clan19(*). Kitoto/Bototo/Nsi/Zuumbu, Terre, territoireUn autre pilier du clan chez les Koongo c'est la terre, kitoto, butoto le territoire, nsi. La terre, kitoto, butoto, zuumbu, est une véritable matrice dans la culture suundi, ne pas avoir un kitoto est synonyme de pauvreté. On est ainsi obligé à travailler sur des terres d'emprunt, on est comme réduit à l'esclavage. La terre est sacrée et inaliénable ; le kitoto est un bien commun. C'est le kitoto qui reçoit la matrice, kibutulu de la nouvelle maman et le nombril, kikwaabi du nouveau né. Même quand le bébé voit le jour en « terre étrangère », le kibutulu et le kikwaabi sont ramenés, mis en terre sur territoire de leurs ancêtres, nsi. Ce fait lie le nouveau né à son kitoto qui est sacré et inaliénable, pour cette raison. La gestion du kitoto est purement communautaire de même que tous les éléments qui le constituent, notamment les arbres fruitiers bikunu, miti, les lacs, les étangs madyaanga. Elle se focalise sur un système traditionnel local propre à tous les membres du clan. Le chef de famille mfumu dikaanda, est garant de cette gestion dont il a l'impérieuse charge, avec les autres membres du clan, à perpétuer pour les générations futures bilesi, balaanda. «Ce système est basé sur un ensemble de règles communautaires qui tirent leur légitimité et leur autorité d'un sous-système pluriel fait de valeurs, de reconnaissances et conventions sociales.»20(*). Le clan responsable du site a donc la lourde charge d'en faire une gestion intergénérationnelle et extra générationnelle. Les clans par alliance, bankweesi ont une participation effective dans la gestion du kitoto, ce bien commun. « La terre est à la fois objectivement organisée et culturellement inventée. Elle est différente de l'espace qui, lui, peut être défini comme une « étendue socialisée». L'espace est ce que les hommes constituent à partir de quelque matière première, en fonction de leurs activités, de leurs techniques, de leur organisation sociale, de leurs projets ; il est du côté de la société, de l'histoire », dit Pourtier cité par Jena Félix YEKOKA. « La jouissance effective du droit de propriétaire foncier a toujours suscité des remous dans les sociétés traditionnelles, voire urbaines. Historiquement, l'implantation et l'occupation des terres par les migrants venus de Kongo dia Ntotila, légende vivante de la culture et de la civilisation Kongo, avant (probablement) la période antélusitanienne, pour les uns, et entre le XVè et la fin du XVIIIè siècles, pour les autres, ont été faites progressivement dans cette partie du Congo méridional. »21(*) * 19 Joseph NZAOU « Kibulu », Enquête du 23 septembre 1997 au village Nzangui ; Oscar MILANDU, Enquête orale du 02 septembre 2007 * 20 Samuel KIDIBA, op. Cit. * 21 Jean Félix YEKOKA, op. Cit. |
|