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Révision de la Constitution sénégalaise de 2001

( Télécharger le fichier original )
par Mahmoud Khamal Dine BAYOR
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Maîtrise de Droit des Relations Internationales 2007
  

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Chapitre II

L'étendue matérielle des innovations.

Au-delà des raisons politiques qui l'ont sous-tendu et, de surcroît, des astuces juridiques qui l'ont formellement consacré ou rendu acceptable, le changement constitutionnel -- qui s'est opéré au Sénégal au lendemain de l'alternance -- est perceptible au niveau des innovations constitutionnelles réalisées lors de l'opération constitutionnelle de 2001. La Constitution de 2001 s'est en effet attribué un titre douzième, qui porte ainsi le nombre de ses articles à 108, là où celle qu'elle abroge et remplace n'en comptait que 91 ; ce qui se comprend aisément quand on sait la place très importante qu'occupent, dans le dispositif constitutionnel, les droits et libertés ou toutes les générations de droits humains. Cet élargissement du contenu matériel de la Constitution de 2001 est très certainement le reflet de la volonté du Constituant de clarifier davantage, et à titre préventif, les dispositions qui pourraient ultérieurement soulever des questions d'interprétation, de régler définitivement certaines questions assez délicates et récurrentes qui minent la scène politique ou mettent en branle le pouvoir interprétatif des juges : c'est le règlement constitutionnel de certains conflits politiques et juridiques majeurs (Section I). A coté de cette innovation, le Constituant a voulu restaurer des acquis démocratiques en n'oubliant pas de codifier des pratiques et coutumes (Section II).

Section I

Règlement des conflits politiques et juridiques

Les nouveautés introduites dans le cadre de la Constitution sénégalaise du 22 janvier 2001 sont assez nombreuses. cependant, les plus importantes sont, avant tout, une manifestation de la noble intention du Constituant de poser des éléments de réponses à un certain nombre de questions litigieuses ; le plus souvent relatives à la valeur juridique du préambule constitutionnel, ou aux débats récurrents du système politique. Avec la première alternative, on assiste à la codification du préambule constitutionnel (Paragraphe I), alors que la seconde consacre, dans le corpus constitutionnel, une réponse « définitive » à chacune des questions relatives au cumul de fonctions présidentielle et de Chef de parti d'une part et à la transhumance des parlementaires (Paragraphe II).

Paragraphe I

Le préambule

L'intention du Constituant de 2001 de réaliser des innovations constitutionnelles s'est avant tout manifestée au niveau du préambule. En effet, contrairement aux préambules traditionnels sobre et succincts -- comme ce fut indéniablement le cas de celui qui introduisait la Constitution de 1963 -- celui de 2001 présente un caractère assez expansif mais surtout riche. En effet, là où son prédécesseur rappelle brièvement l'indépendance, énumère de façon concise quelques libertés fondamentales et réaffirme la nécessité d'oeuvrer à la réalisation de l'unité africaine, celui de 2001 actualise d'abord la liste des instruments juridiques internationaux de protection de droits fondamentaux qui n'existaient pas encore en 1963, mais que les multiples révisions intervenues entre cette date et 2000 auraient pu intégrer ; il invoque ensuite les termes symboles de la démocratie tels l'Etat de droit, la transparence 8(*) et la bonne gouvernance, l'égalité formelle, la loyauté du jeu politique et le statut de l'opposition. Mais c'est avec la codification de la jurisprudence française « Liberté d'association » du 16 juillet 1971 que se manifeste véritablement l'innovation. Car, dorénavant, le préambule est déclaré partie intégrante de la Constitution9(*).

Une telle déclaration ne manque pas de produire une conséquence juridique certaine. Car « le contenu du préambule fait dès lors partie du bloc de constitutionnalité, représentant les normes de référence du contrôle de constitutionnalité»,10(*) ce qui signifie que le contrôle que le Conseil est appelé à exercer sur la base des instruments juridiques internationaux cités dans le préambule procède plutôt du contrôle de constitutionnalité au lieu de celui qui s'applique aux conventions internationales visées par l'article 98 de la Constitution. Cette identité établie entre normes internationales, contenues dans le préambule, et normes constitutionnelles n'est qu'une résultante de l'indissociabilité des premières par rapport à leur contenant (préambule) qui, lui-même fait partie intégrante de la Constitution. Et cette intégration, quoi qu'on puisse en dire, est déjà perceptible dans la pratique11(*).

* 8 Sur la question de la transparence, les préoccupations du Constituant sénégalais coïncident avec celles du droit communautaire qui s'exprime à travers l'adoption de la Directive n°02/2000/CM/UEMOA du 20 juin 2000 portant adoption du Code de Transparence dans la Gestion des Finances publiques au sein de l'UEMOA.

* 9 Voir le préambule de la Constitution de 2001 : « approuve et adopte la présente Constitution dont le préambule fait partie intégrante ».

* 10 FALL (I. M.), opcit, pp 121.

* 11 Conseil Constitutionnel, Décision n°1/C/2005 du 12 février 2005.

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