Révision de la Constitution sénégalaise de 2001( Télécharger le fichier original )par Mahmoud Khamal Dine BAYOR Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Maîtrise de Droit des Relations Internationales 2007 |
2eme partie : une continuité institutionnelleL'alternance politique de mars 2000 a mis au défi la nouvelle équipe dirigeante de réaliser un changement politique, juridique ou constitutionnel. La volonté, ou plutôt la nécessité, du leader du parti au pouvoir de satisfaire les exigences ou les requêtes du peuple -- qui réclament un changement de régime politique -- a, certes, donné naissance à un certain nombre de réformes ou d'innovations constitutionnelles ; lesquelles innovations, tout en étant d'une importance moindre rapportées à la grandeur de la révolution démocratique qui les a vu naître, ont fait l'objet de proclamation par les nouvelles autorités comme instaurant, pour le bien du Sénégal, « un régime parlementaire dualiste rationalisé ». En plus de la proclamation d'avoir instauré un régime parlementaire, la nouvelle Constitution certifie avoir renforcé les droits et libertés fondamentaux20(*). Pourtant, une comparaison des contenus des deux dernières Constitutions du Sénégal fait ressortir une continuité substantielle manifeste ; laquelle continuité trouve sa justification dans l'importance moindre des éléments de rupture par rapport à ceux qui sous-tendent cette continuité constitutionnelle. Ainsi, par rapport à l'architecture constitutionnelle, des similitudes structurelles ont été relevées au niveau des deux Constitutions : une articulation tripartite livrant le Préambule, le Corpus constitutionnel et les dispositions transitoires ; une identique distribution et un même agencement des pouvoirs. Sur les questions de fond que tout système constitutionnel se pose, les réponses formulées par la nouvelle Constitution sénégalaise ne sont pas si différentes de celles que donnait sa devancière. Ainsi, par exemple, à la question de savoir qui détermine la politique de la nation -- les articles 36 de la Constitution de 1963 et 42 de la nouvelle y répondent : c'est le Président de la République ; ces dispositions précisent également qu'il détient le pouvoir de nomination aussi bien aux emplois civils 21(*) que militaires 22(*). Toutes ces similitudes remarquables entre les règles tirées de la nouvelle Constitution et celles qui, autrefois, constituaient le Texte de 1963 témoignent de ce que la Constitution en vigueur depuis le 22 janvier 2001 ne remet en cause aucun principe constitutionnel fondamental de sa devancière ; la nouvelle reprend, pour l'essentiel, les grandes options constitutionnelles existantes. Ainsi, a-t-elle, entre autres, reconduit en son sein la primauté présidentielle au lieu d'instaurer un régime plus parlementariste, ou encore totalement oublié de réformer le régime constitutionnel du Pouvoir judiciaire en vue d'une plus grande efficacité. La continuité constitutionnelle se justifie donc à un double niveau : d'abord, le maintien de la primauté présidentielle, qui a pour conséquence de reléguer le Parlement au second plan, consacre la thèse d'une continuité du régime politique (Chapitre I) ; l'autre niveau de continuité est relatif aux règles et principes de la justice (Chapitre II).
Chapitre 1* 20 Auxquels elle consacre le titre II * 21 L'article 38 de la Constitution précédente prévoyait que « le Président de la République nomme à tous les emplois civils » alors que l'article 44 de la nouvelle Constitution, qui dispose « le Président de la République nomme aux emplois civils », semble réduire le champ du pouvoir présidentiel de nomination. * 22 A ce propos, l'article 45 de la Constitution de 2001 reprend simplement la disposition de l'article 39 de sa devancière qui prévoyait que « le Président de la République est le garant de l'indépendance nationale et de l'intégrité du territoire. Il est responsable de la défense nationale. Il préside le Conseil supérieur de la Défense nationale. Il est le chef suprême des armées ; il nomme à tous les emplois militaires et dispose de la force armée ». |
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