I.2 Utilisations thérapeutiques des
sérums équins
Les sérums thérapeutiques sont les
médicaments biologiques d'origine équine les plus connus. Ils se
présentent généralement sous forme de solution, ayant pour
principe actif soit les immunoglobulines G (IgG), soit leurs fragments
bivalents F(ab')2 ou simplement leurs fragments Fab.
Les formes les plus connues sont les sérums
antivenimeux (SAV), les sérums antirabiques, les sérums
antitétaniques et les sérums antidiphtériques.
En ce qui concerne les sérums antivenimeux disponibles
sur le marché, ils se présentent sous formes d'IgG, de fragments
F(ab')2 et de fragments Fab [38]. Dans tous les cas, les SAV
sont désalbuminés et décomplémentés. Les IgG
et les F (ab')2 possèdent des caractéristiques fonctionnelles et
pharmacocinétiques voisines, mais les fragments F(ab')2,
dépourvus de fragments Fc, sont sensiblement mieux
tolérés.
La suite de cette étude présente
premièrement les sérums équins antivenimeux et
secondairement ceux qui sont prescrits pour lutter contre certaines maladies
infectieuses bactériennes et virales.
I.2.1 Sérums antivenimeux
Dans le monde, le nombre annuel de morsures de serpents
dépasse 5 millions (5 400 000 comme le montre le tableau III), dont 4
millions en Asie, 1 million en Afrique et 350 milles dans les Amériques.
La moitié est suivie d'envenimation. On compte environ 125 milles
décès par an (100 milles en Asie, 20 milles en Afrique et 5
milles dans les Amériques). Les morsures de serpents et les
piqûres de scorpions causent la mort et les incapacités avec un
impact important chez les enfants et les agriculteurs [34, 4,
18].
Ainsi, les envenimations constituent un important
problème de santé publique dans le monde et
particulièrement en Afrique. Deux familles de serpents sont à
l'origine de la majorité des morsures : les Elapidae (cobras et mambas)
et les Viperidae (vipères). Environ 1500 espèces de scorpions
toutes venimeuses sont à l'origine des piq û res.
Tableau III. Incidence et mortalité par
morsures de serpents dans le monde.
|
Population 106
|
Nombre total de morsures
|
Nombre d'envenimations
|
Nombre de morts
|
EUROPE
|
730
|
25 000
|
8 000
|
30
|
MOYEN ORIENT
|
160
|
20 000
|
15 000
|
100
|
USA et CANADA
|
270
|
45 000
|
6 500
|
15
|
AMERIQUE CENTRE ET SUD
|
400
|
300 000
|
150 000
|
5 000
|
AFRIQUE
|
760
|
1 000 000
|
500 000
|
20 000
|
ASIE
|
3 500
|
4 000 000
|
2 000 000
|
100 000
|
OCEANIE
|
20
|
10 000
|
3 000
|
200
|
TOTAL
|
5 840
|
5 400 000
|
2 682 500
|
125 345
|
Source. [34].
Les sérums antivenimeux d'origine équine sont la
seule thérapie efficace disponible pour le traitement spécifique
des envenimations. Leur indication est conditionnée par l'observation de
signes patents d'envenimation. Il ne peut donc s'agir d'une précaution
systématique, comme cela se ferait pour la prévention du
tétanos ou de la rage. Le sérum doit être injecté
par voie veineuse et en quantité suffisante. Les
posologies dépendent uniquement de la dose de venin
inoculée, donc de la symptomatologie et de son évolution. Selon
l'état de la victime et le délai séparant la morsure ou la
piqûre du traitement, 20 ml de sérum en perfusion ou en
intraveineuse directe sont recommandés en première intention. Un
examen biologique (test de coagulation sur tube sec) et clinique sera
effectué une à deux heures plus tard puis toutes les 4 à 6
heures. En fonction de la réponse clinique et des résultats
biologiques, cette thérapeutique pourra être renouvelée au
cours des heures et des jours qui suivent, jusqu'à la fin de
l'envenimation systémique. Celle-ci est marquée par une
respiration normale dans les envenimations cobraïques ou la formation d'un
caillot stable en moins de quinze minutes dans les envenimations
vipérines.
Certaines envenimations peuvent nécessiter
jusqu'à 100 ml de sérum, voire plus, avec des succès
justifiant, a posteriori, l'acharnement.
Les immunoglobulines, en se fixant sur les protéines du
venin présentes dans l'organisme, permettent leur élimination.
Les toxines constituent, en principe, des cibles plus rapidement
maîtrisées que les enzymes souvent moins immunogènes.
Toutefois, les syndromes hémorragiques et même la nécrose
peuvent bénéficier de la sérothérapie. Celle-ci
devra être entreprise quel que soit le délai séparant la
morsure ou la piqûre de l'arrivée au poste de santé.
L'immunothérapie qui bénéficie de
nouveaux perfectionnements techniques pour assurer la purification du
sérum de cheval est actuellement remarquablement tolérée
[8].
Indications. L'immunothérapie par le
sérum antivenimeux est indiquée chez un patient présentant
des signes cliniques et biologiques d'une envenimation.
Le sérum antivenimeux est recommandé si et quand
un patient suspecté ou prouvé mordu par un serpent
développe les signes suivants :
- envenimation systémique : troubles
hémostatiques (coagulopathies, thrombocytopénie), signes
neurotoxiques (paralysies, ptoses), troubles cardiovasculaires (hypotension,
choc, arythmie cardiaque).
- envenimation locale : oedème local atteignant plus
de la moitié du membre mordu, extension rapide de l'oedème,
développement de noeuds lymphatiques drainant le membre mordu.
Contre-indications. Le sérum
antivenimeux équin est contre-indiqué chez des patients ayant
connu dans le passé une allergie aux protéines
hétérologues équines. Cette contre-indication est relative
si l'envenimation représente un danger pour la vie, à condition
que le traitement du choc anaphylactique soit mis en application
immédiatement, au besoin.
Présentation. Les sérums
antivenimeux se présentent sous forme de solution pour injection
intraveineuse lente, en ampoule.
Le principe actif neutralise le venin d'animaux venimeux
(serpents, scorpions) et dépend du genre et des espèces
d'importance médicale pour les êtres humains dans une
région géographique particulière.
Formulations disponibles. Il existe quatre
formulations que l'O.M.S. prescrit en fonction des régions. FAVAFRICA et
FAVIREPT en cas de morsure des serpents d'Afrique et de Moyen-Orient, VIPERFAV
en cas de morsure par un serpent d'Europe et SCORPIFAV pour les piqûres
de scorpion. Ils seront présentés successivement avec la
composition de leur principe actif et de leur excipient.
Le principe actif est quantifié en dose létale
pour 50% de souris (DL 50). Par exemple, le venin de serpent Naja haje ~ 25 DL
50 signifie que le sérum peut neutraliser au moins 25 DL 50 du venin du
Naja haje.
FAVAFRICA
Composition qualitative et quantitative pour 1 ml:
Principe actif
Sérum antivenimeux d'origine équine.
Fragments d'immunoglobulines F(ab') 2 neutralisant (q.s.) le
:
- venin de Bitis gabonica ~ 25 DL 50
- venin de Bitis arietans ~ 25 DL 50
- venin de Echis leucogaster ~ 25 DL 50
- venin de Echis ocellatus ~ 25 DL 50
- venin de Naja haje venom ~ 25 DL 50
- venin de Naja melanoleuca ~ 20 DL 50
- venin de Naja nigricollis ~ 20 DL 50
- venin de Dendroaspis polylepis ~ 25 DL 50
- venin de Dendroaspis viridis ~ 25 DL 50
- venin de Dendroaspis jamesoni ~ 25 DL 50.
Excipients
Chlorure de sodium 9 mg
Polysorbate 80 0.05 mg
Eau pour injections qs 1 ml Hydroxideqs concentrés
d'acide chlorhydrique ou de sodium pH 6-7.
FAVIREPT
Composition qualitative et quantitative pour 1 ml:
Principe actif
Sérum antivenimeux d'origine équine.
Fragments d'immunoglobulines F(ab') 2 neutralisant (q.s.) le :
- venin de Bitis arietans ~ 25 DL 50
- venin de Echis leucogaster ~ 25 DL 50
- venin de Naja haje ~ 25 DL 50
- venin de Naja nigricollis ~ 20 DL 50
- venin de Cerastes cerastes ~ 20 DL 50
- venin de Macrovipera deserti ~ 20 DL 50
Excipients
Chlorure de sodium 9 mg
Polysorbate 80 0.05 mg
Eau pour injections qs 1 ml Hydroxideqs concentrés
d'acide chlorhydrique ou de sodium pH 6-7
VIPERFAV
Chaque seringue de 2ml contient:
Principe actif
Sérum antivenimeux d'origine équine.
Fragments d'immunoglobulines F(ab') 2 neutralisant (q.s.) le
:
- venin de Vipera aspis ~500 DL 50
- venin de Vipera berus ~250 DL 50
- venin de Vipera ammodytes ~500 DL 50 Autres
Chlorure de sodium 18 mg
Polysorbate 80 0.1 mg
Eau pour injections q.s. 2 ml Solution ajustée
à pH 6 - 7.
SCORPIFAV
Composition qualitative et quantitative pour 1 ml
Principe actif
Fragments F(ab')2 d'immunoglobulines équine GT (lgGT)
contre le venin Suffisant pour neutraliser le:
- venin de Androctonus australis hector ~ 50 LD50 -
venin de Leiurus quinquestriatus quinquestriatus ~ 50 LD50
- venin de Buthus occitanus mardochei ~ 50
LD50 Autres
Chlorure de sodium 9 mg
Polysorbate 80 0.05 mg
Eau pour injections q.s. 1 ml Hydroxideqs concentrés
d'acide chlorhydrique ou de sodium pH 6-7.
Doses et administrations. Le sérum
antivenimeux (SAV) doit être administré aussitôt que
possible après l'envenimation, plus l'administration est
exécutée tôt, plus le traitement sera efficace.
La dose dépend de la sévérité
d'envenimation. Des doses répétées sont nécessaires
parfois dans des cas graves.
- Dose initiale : la dose est identique chez les adultes et les
enfants, indépendamment du poids.
Pour les morsures de serpents d'Afrique et de Moyen-Orient on
emploie FavAfrica et Favirept : la dose initiale est de 20 ml
de sérum par voie
intraveineuse directe lente ou en perfusion d'une dilution 250
ml de fluide (chlorure de sodium 0.9% ou solution glucosée 5%).
Pour les morsures de serpents européens on emploie
Viperfav : la dose initiale est de 4 ml de sérum
dilué dans 100 ml de chlorure de sodium 0,9% en perfusion.
Pour les piqûres de scorpions on emploie Scorpifav
: la dose initiale est de 10 ml de SAV dilué dans 50 ml de
solution de chlorure de sodium 0,9%. Après la première
administration de SAV, le patient doit être surveillé
étroitement pendant au moins 12 heures.
- Durée totale d'administration :
5 minutes par injection intraveineuse lente.
1 heure par perfusion (moins d'une heure pour le SAV de scorpion
: 50 ml de dilution). Toujours commencer la perfusion lentement : 50 ml/h.
- Administration secondaire : elle dépend de
l'évolution de l'état du patient. Si l'état du patient ne
s'améliore pas dans un délai de 2 heures après la fin de
la perfusion, une deuxième dose par injection intraveineuse devrait
être administrée. Une troisième injection intraveineuse
peut encore être faite en suivant ces mêmes critères :
celle-ci devrait être administrée 4 heures après la fin de
la deuxième injection ou 6 heures après la fin de la
première injection.
I.2.2 Sérums équins utilisés contre
les maladies infectieuses
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