CHAPITRE 5
Conclusions & Perspectives
Lorsque j'ai abordé ce projet de thèse, le premier
objectif fixé était de déterminer et
produire un domaine structuré soluble de la proline
déshydrogénase humaine, en espérant que
sa taille soit compatible avec une étude par
RMN. Aucune donnée structurale de proline
déshydrogénase n'étant disponible, nous avons
abordé une première approche, qui consistait à exprimer
l'intégralité de la protéine sous forme native dans un
organisme recombinant, puis à caractériser ses domaines
structuraux par protéolyse ménagée. Pour des raisons
essentiellement basées sur la simplicité de mise en oeuvre,
l'organisme producteur qui a été choisi est la bactérie
E. coli. Cependant, et à l'image de plus de 50 % des
protéines eucaryotes exprimées dans cet organisme, la
production de PRODH chez E. coli conduit à l'unique
formation d'agrégats de protéine insoluble et inactive : les
corps d'inclusion.
Nous avons par conséquent entrepris de produire la forme
mature de PRODH, c'est-à- dire délestée de son peptide
d'adressage mitochondrial N-terminal. Sur la base de prédictions
bio-informatiques, le peptide signal de la séquence de
PRODH humaine a été ciblé au niveau
de l'extrémité N-terminale 1-36. L'expression de la
construction PRO564, correspondant aux
564 résidus C-terminaux de PRODH, a ainsi
été initiée chez E. coli. Cette production s'est
également soldée par l'unique formation de corps d'inclusion.
L'expression sous forme soluble constituant
l'étape limitante de notre étude structurale, il nous
fallait par conséquent modifier notre stratégie. Ces
dernières années ont vu l'apparition d'un certain nombre
d'innovations dans le domaine de l'expression de protéines
recombinantes, qui ont notamment abouti à l'émergence de
plates-formes de production dédiées à l'expression de
protéines solubles chez E. coli. Nous avons ainsi
entrepris de produire PRODH dans le cadre d'un de ces programmes, qui
offre la possibilité de tester plusieurs partenaires de fusion et
plusieurs souches d'expression différents. En parallèle, de
nouvelles données sont apparues dans la littérature et
nous ont permis d'envisager une stratégie alternative
d'étude structurale. La publication récente de la
première structure de proline déshydrogénase a mis
en évidence l'existence d'un domaine catalytique PRODH
replié en tonnelet á8â8 chez E. coli, et dont la
taille n'est pas adaptée à une étude par RMN. Nous avons
par conséquent abordé une seconde approche, qui
consiste à prédire l'organisation des domaines de la
protéine humaine sur la base de cette structure, et en
utilisant des outils bio-informatiques. A partir d'alignements de
séquence, de recherche
d'homologie de séquence, et de prédiction de
structure secondaire, nous avons prédit les
segments qui constituent le domaine catalytique humain.
Cette analyse suggère la présence
d'un large domaine catalytique C-terminal de 59 kDa,
entremêlé avec deux insertions, de fonction inconnue, de
respectivement, 50 et 100 résidus, et d'un domaine N-terminal
également de fonction inconnue. Dans l'optique de
caractériser les rôles structural et fonctionnel de ces
domaines potentiels, 3 régions de PRODH humaine ont été
sélectionnées afin de les soumettre au programme de
production 3PM du Laboratoire de Structure des Protéines du CEA
de Saclay. Il s'agit du domaine catalytique (PROcatal), du domaine N-
terminal (PROter), et de la deuxième insertion (PROinser). La
forme mature de PRODH humaine rebaptisée PROentier a également
été soumise à la plate-forme de production 3PM.
Malgré la possibilité de tester un grand
nombre de conditions d'expression, la production des 3 protéines
PROcatal, PROter, et PROinser dans le cadre du programme 3PM s'est
soldée par un échec. En effet, le criblage de ces conditions
d'expression à petite échelle
a, certes dans un premier temps, permis d'identifier un
partenaire protéique qui conduit à une expression suffisante de
protéine soluble. Cependant, nous avons été
confrontés à plusieurs difficultés lors de la
deuxième phase du processus d'expression à grand volume
(absence d'expression, agrégation, protéolyse,
incapacité à éliminer le partenaire), qui ne
permettent pas de satisfaire les exigences inhérentes à une
étude structurale par RMN ou cristallographie des rayons X
(protéine soluble, native, stable, pure, et en grande quantité).
En ce qui concerne
la protéine mature PROentier, nous avons réussi
à produire cette protéine sous forme soluble
et pure. Toutefois, les meilleures conditions
d'expression ne conduisent qu'à un rendement très faible
de 0.9 mg par litre de culture, qui nécessiterait plus de 10
litres de culture pour espérer obtenir ne serait-ce que 10 mg d'une
protéine de 67 kDa.
Au vu de l'ensemble des résultats, il ne
semblait pas raisonnable de poursuivre ce projet dans le cadre de mon
travail de thèse. En effet, la production de protéines et
domaines recombinants PRODH a été très coûteuse en
temps. Près de 20 mois ont été nécessaires pour
cloner, produire, et optimiser les conditions d'expression des
protéines PRODH, PRO564, PROentier, PROcatal, PROter, et PROinser. Au
final, seul le domaine PROentier fait l'objet
de résultats encourageants qui sont cependant
insuffisants pour envisager l'analyse structurale. De plus, cette large
région de 67 kDa n'est pas adaptée à une étude par
RMN, qui représente un des objectifs de mon projet scientifique.
La mise au point du protocole
d'expression de la protéine PROentier n'a pas
été pour autant inutile. En effet, la production
de plusieurs litres de culture serait suffisante pour
entreprendre des études biochimiques sur la
protéine PROentier, et ainsi caractériser pour
la première fois la nature du cofacteur et/ou de l'inhibiteur
compétitif naturel d'une proline déshydrogénase
eucaryote. Pour ma part, j'ai entrepris de mettre à profit
l'expérience acquise dans le domaine de l'expression de protéines
recombinantes pour produire, puis caractériser la structure d'une
autre biomolécule : la protéine KIN17, impliquée dans
la réparation des dommages de l'ADN.
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