2.La liberté de pensée, de conscience et de
religion et la liberté d'expression :
La liberté de pensée, de conscience et de religion
est un droit fondamental de
l'homme. Toutefois, sa valeur varie en fonction de
divers instruments qui le reconnaissent, ce qui traduit une divergence
d'approche. Ce droit est reconnu par l'article
18 du Pacte relatif aux droits civils et
politiques121 et par l'article 9122 de la
Convention suropéenne de sauvegarde des droits de l'homme et
des libertés fondamentales. Ces articles n'autorisent pas de
restrictions. Seule la manifestation de cette liberté peut se voir
restreinte par la loi et seulement pour des raisons tenant à la
protection de l'ordre, de
la sécurité, de la santé publique ou de la
morale et des droits fondamentaux d'autrui (la
Convention ajoute une condition de nécessité dans
une société démocratique). Le Pacte
va plus loin et interdit de déroger à cette
liberté même dans le cas de l'article 4 (danger public
exceptionnel qui menace l'existence de la nation). Ainsi au niveau
international,
la liberté de penser est absolue. Les seules
restrictions qui peuvent exister pèsent sur les manifestations de cette
pensée. En conséquence, pour respecter les obligations qui leur
incombent au titre du droit international, les Etats ne doivent pas, en cas
d'incrimination
de l'incitation à la commission d'actes terroristes,
restreindre le droit de penser que la commission d'actes terroristes est une
bonne chose, est une nécessité ou est justifiée. En toute
occurrence, même si le Pacte autorisait des restrictions à la
liberté de penser, leur mise en application serait extrêmement
difficile voire impossible (cela reviendrait à
121Art. 18
1. Toute personne a droit à la liberté de
pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la
liberté d'avoir ou d'adopter une religion ou une conviction de
son choix, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa
conviction, individuellement ou en commun, tant en public qu'en privé,
par le culte et l'accomplissement des rites, les pratiques et
l'enseignement.
2. Nul ne subira de contrainte pouvant porter atteinte à
sa liberté d'avoir ou d'adopter une religion ou une conviction de son
choix.
3. La liberté de manifester sa religion ou ses
convictions ne peut faire l'objet que des seules restrictions
prévues par la loi et qui sont nécessaires à la protection
de la sécurité, de l'ordre et de la santé publique, ou de
la morale ou des libertés et droits fondamentaux d'autrui.
4. Les Etats parties au présent Pacte s'engagent à
respecter la liberté des parents et, le cas échéant,
des
tuteurs légaux de faire assurer l'éducation
religieuse et morale de leurs enfants conformément à leurs
propres convictions.
122Art 9
1. Toute personne a droit à la liberté de
pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la
liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la
liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou
collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les
pratiques et l'accomplissement des rites.
2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions
ne peut faire l'objet d'autres restrictions que
celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures
nécessaires, dans une société démocratique,
à la sécurité publique, à la protection de l'ordre,
de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des
droits et libertés d'autrui.
« sonder les coeurs et les reins » de chacun). En
revanche, le droit pénal pourra venir sanctionner l'expression de ces
opinions lorsqu'elle entraînera un risque pour la
sécurité, l'ordre et la santé publique, ou la
morale ou les libertés et droits fondamentaux d'autrui.
À la différence du Pacte, l'article 15 de la Convention
(guerre ou autre danger public menaçant la vie de la nation)
autorise des dérogations à ce droit.
Le Pacte reconnaît le droit à la
liberté d'expression dans son article 19123, la
Convention en son article 10124. Il est toujours
possible d'y déroger en cas de danger pour
la Nation. Le Pacte autorise des restrictions, lorsqu'elles
sont fixées par la loi, pour le respect des droits d'autrui et pour
la sauvegarde de la sécurité nationale, de l'ordre public, de
la santé ou de la moralité publique. La Convention
permet de telles limitations légales lorsqu'elles constituent
des mesures nécessaires, dans une société
démocratique, à la sécurité nationale, à
l'intégrité territoriale ou à la sûreté
publique, à
la défense de l'ordre et à la
prévention du crime, à la protection de la santé ou de la
morale, à la protection de la réputation ou des droits
d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles
ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir
judiciaire.
123Art. 19
1. Nul ne peut être inquiété pour ses
opinions.
2. Toute personne a droit à la liberté
d'expression; ce droit comprend la liberté de rechercher, de
recevoir et de répandre des informations et des idées de toute
espèce, sans considération de frontières, sous une forme
orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de
son choix.
3. L'exercice des libertés prévues au par. 2 du
présent article comporte des devoirs spéciaux et des
responsabilités spéciales. Il peut en
conséquence être soumis à certaines restrictions qui
doivent toutefois être expressément fixées par la loi et
qui sont nécessaires:
a)Au respect des droits ou de la réputation d'autrui;
b)A la sauvegarde de la sécurité nationale, de
l'ordre public, de la santé ou de la moralité publiques.
124Art 10
1. Toute personne a droit à la liberté
d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la
liberté
de recevoir ou de communiquer des informations ou des
idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités
publiques et sans considération de frontière. Le présent
article n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de
radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un
régime d'autorisations.
2. L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et
des responsabilités peut être soumis à certaines
formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues
par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une
société démocratique, à la sécurité
nationale, à l'intégrité territoriale ou à la
sûreté publique, à la défense de l'ordre et à
la prévention du crime, à la protection de la santé ou de
la morale, à la protection de la réputation ou des
droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations
confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du
pouvoir judiciaire.
Pour des raisons pratiques125, seul le
régime posé par la Convention sera étudié. Celleci
reconnaît que l'expression de la pensée et la liberté
d'expression peuvent être restreintes sous certaines conditions
posées par la loi et si ces restrictions sont nécessaires dans
une société démocratique. Il convient de comprendre le
sens de ces deux conditions dont la raison d'être est de permettre un
contrôle par le juge européen des restrictions posées
par
le pouvoir exécutif ou législatif. Encore, il
est nécessaire d'étudier quels buts légitimes peuvent
être invoqués pour justifier des limitations aux libertés
dans le cadre de la lutte contre l'incitation126.
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