Section 2 : Les dispositions constitutionnelles des
Etats
En dehors des règles de droit international l'usage de la
force par un Etat est aussi régi
par le droit interne. La question principale à
laquelle nous essayerons de répondre est la suivante : Il y
a-t-il des Constitutions dont on peut dire qu'elles autorisent la
guerre préventive ?
Nous verrons à ce titre, les positions de
quelques Constitutions africaines (paragraphe1) et
occidentales (paragraphe2) par rapport à la guerre et
plus précisément par rapport à la guerre
préventive.
Paragraphe 1 : Cas des Constitutions africaines
Nous étudierons ici, la Constitution béninoise
(A) et celle de l'Afrique du Sud (B).
A- La constitution béninoise de décembre
1990
Aux termes de l'article 41 alinéa2 de la
Constitution béninoise, le Président de la
République est « le garant de
l'indépendance nationale, de l'intégrité territoriale et
du respect
de la Constitution, des traités et accords
internationaux ». A ce titre, si le Parlement l'y autorise,
comme le précise l'article 101, il peut déclarer la guerre et la
faire dans le but de préserver l'indépendance nationale. Pour
cela la Constitution a prévu deux dispositions différentes
(les articles 66 et 68) qui régissent deux différents
aspects de la question. La première disposition, l'article 66,
prévoit les cas où le Bénin fait déjà
l'objet d'une agression
et la seconde, l'article 68, les cas où le Bénin
serait menacé d'une agression de manière grave
et imminente.
Voici ce que stipule l'article 66 :« En cas de coup
d'Etat, de putsch, d'agression par
des mercenaires ou de coup de force quelconque, tout membre
d'un organe constitutionnel a
le droit et le devoir de faire appel
à tous les moyens pour rétablir la
légitimité constitutionnelle, y compris le recours aux
accords de coopération militaire ou de défense existants
» Cette disposition ne traite pas de la guerre préventive mais
vise seulement les cas
où rien n'a pu être fait pour prévenir
l'agression. Celle qui concerne l'agression imminente est
l'article 68 dont le contenu est le suivant : «
Lorsque les institutions de la République,
l'indépendance de la Nation,
l'intégrité du territoire national ou I'exécution des
engagements internationaux sont menacées de manière grave
et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs
publics et constitutionnels est menacé ou interrompu, le
Président de la République, après consultation du
Président de l'Assemblée Nationale et du Président de la
Cour Constitutionnelle, prend en conseil des Ministres les mesures
exceptionnelles exigées par les circonstances sans que les droits
des citoyens garantis par la Constitution soient suspendus ».
Si les conditions exigées par l'article 68 sont remplies, il
est alors possible d'envisager une mesure exceptionnelle de l'ordre d'une
guerre préventive, pourvu que cette mesure n'entame en rien les
droits garantis aux citoyens. La Constitution n'a donc pris la peine
de sauvegarder que les droits des citoyens et non ceux des autres Etats ;
d'où une guerre
préventive serait possible à notre
avis.1
B- La constitution sud africaine d'avril
1994
La Constitution sud-africaine, en son article 227, stipule :
« 1- Obéissant à cette
Constitution, la Force nationale de défense peut être
employée pour servir
a) à la défense de la République,
à la protection de sa souveraineté et de son
intégrité territoriale ;
b) en conformité avec les obligations
internationales de la République en ce qui concerne des organismes
internationaux et d'autres Etats [...]
2- La Force nationale de
défense [...]
d) ne viole pas le droit international coutumier qui s'impose
à la République en ce qui concerne l'agression ;
e) respecte dans les conflits armés les obligations
qu'elle a selon le droit et les traités internationaux coutumiers qui
s'imposent à la République ;
f) est principalement une force défensive dans
l'exercice ou l'accomplissement de ses pouvoirs et fonctions [...]
»
A travers cette disposition, on voit que le constituant sud
africain a conféré à la force armée le pouvoir
de préserver la souveraineté de l'Etat. Mais, cette
disposition prend bien
1 Mais cette position est discutable.
soin de préciser aux alinéas suivants, dans quelles
limites l'armée sud-africaine doit défendre
la souveraineté. Ainsi remarque t-on qu'il lui a
été fait obligation de respecter non seulement
le droit international1 mais aussi de ne jouer
qu'un rôle défensif. Il ne sera donc pas question pour elle de
prétendre à une défense offensive. Elle ne doit
protéger l'Etat d'Afrique du Sud que dans la mesure où
celui-ci fait déjà l'objet d'une agression.
Conformément à cela l'Afrique du Sud ne peut
procéder à une guerre préventive et encore moins
à une guerre d'agression ou à toute forme de guerre interdite
par le droit international.
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