II - Emergence de la société civile en
Afrique
II.1 - Le contexte d'émergence
Plusieurs raisons expliquent l'émergence dans plusieurs
pays africains d'organisations de la société civile. Dans la
plupart des pays d'Afrique subsaharienne, les acteurs de la
société civile sont apparus pour répondre aux
incohérences des appareils étatiques sur le plan national et pour
pallier aux politiques économiques internationales qui ont des impacts
négatifs sur les couches minoritaires. Au nombre de ces impacts, nous
pouvons citer entre autre une mauvaise gouvernance et une classe politique en
déphasage avec les aspirations sociales.
Des syndicats longtemps dominés par une élite
vouée corps et âme au pouvoir furent secoués par des
contradictions internes ouvrant la voie à une nouvelle approche du
syndicalisme au service des travailleurs. Cette situation nouvelle permit un
essor prodigieux de toutes les luttes politiques et syndicales. Incapable de
satisfaire les revendications corporatistes des étudiants et voulant
toujours exercer un pouvoir sans partage et réfutant la demande du
multipartisme, la plupart des régimes d'alors eurent recours à
leur arme classique : la répression sauvage et barbare. La
réaction du peuple fut violente et inattendue. Les forces
démocratiques n'ont pas reculé devant la répression et
leurs revendications se sont faites percutantes dessinant les contours de ce
qu'on peut appeler la révolution de 1989-1990. Cette situation
insurrectionnelle ne permettait plus aux régimes dictatoriaux de
maintenir leur pouvoir. Ces régimes étaient pour la plupart des
alliés objectifs de certaines puissances étrangères et en
particulier de la France. C'est ainsi que François Mitterrand, mesurant
les dangers d'une gronde révolutionnaire capable de remettre en cause
les intérêts de la France, tint un discours à la Baule. Ce
discours sema une véritable panique dans le camp des dictateurs
africains. En effet partout en Afrique, les dictatures néocoloniales
faisaient face à des résistances plus ou moins ouvertes des
masses. En Afrique occidentale, le régime de Mathieu
Kérékou grâce à une conférence nationale
souveraine fut contraint à l'ouverture démocratique. Cet exemple
fut contagieux au Congo-Brazzaville, en République Démocratie du
Congo, au Gabon, en Côte d'Ivoire, en Centrafrique, en Mauritanie, au
Togo, et au Niger pour ne citer que ceux-là. Eu égard à
ces événements et pour sortir de l'impasse, le concept de
société civile a commencé à émerger dans les
discours politiques africains au lendemain de la fin de la guerre froide en
1989, année qui correspond à la chute du mur de Berlin et
à l'éclatement du bloc communiste. Il devient assez courant
à partir de 1990-1991 avec l'ouverture au processus de
démocratisation. Et durant les périodes de transition politique
marquées par la tenue des conférences nationales souveraines, la
société civile devint une organisation remarquable, consciente et
bien organisée. Ainsi, compte tenu de sa neutralité politique, a
-t-on fait recours à certains hommes dignes de confiance pour
présider les travaux de cette transition. C'est le cas des Mgrs Isidore
de Souza au Bénin, Ernest Kombo au Congo-Brazzaville, Laurent Monsengwo
au Zaire.
En conséquence, on pourrait dire que la
société civile est la résultante d'un dynamisme
sociopolitique national. Si nous admettons que la société civile
est la résultante d'un dynamisme national, la question que nous pouvons
poser est de savoir quelle est sa composition.
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