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Communication politique et séduction à  travers la Déclaration de politique générale du Premier ministre Idrissa Seck à  l'Assemblée nationale le 03 février 2003

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par Mamadou THIAM
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Dea Science du langage 2005
  

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3. SÉDUCTION

Le Dictionnaire de l'Académie Française définit la séduction de la manière suivante :

Action de suborner, de corrompre des témoins. Séduction se dit absolument de l'action de séduire une jeune fille ou une femme, de corrompre son innocence, sa vertu. Il se dit aussi de l'attrait, de l'agrément qui rend certaines choses propres à séduire.

C'est dire toute l'ambiguïté du mot qui réfère à la fois à des pratiques illégales, illicites, en même temps qu'il connote un attrait que l'on exerce ou qui s'exerce sur nous, malgré nous et sans que nous sachions pourquoi. Ce qui amène le psychanalyste Sirois à écrire :

Dans la séduction la personne détournée de son but et de sa course est menée ailleurs que là où elle se trouve ou que là où elle veut aller. Ce détournement implique une force, et s'exerce sous la motion d'un charme ou la puissance d'un attrait. (Sirois 2005)

Le côté négatif trouve son explication dans l'origine du mot qui vient du latin se-duceré signifiant « mener à part ». Toutefois, comme le précise le Dictionnaire de l'Académie, Il s'emploie absolument, surtout dans la dernière acception renvoyant à l'attrait et au charme. Par là, la séduction emprunte à la dimension ludique qui amène Baudrillard (1979 : 18), à l'interpréter « en termes de jeu, de défi, de relations duelles et de stratégies des apparences (...) ». Une dimension ludique qui exige d'elle un travail d'adaptation et d'innovation. Toutes choses qui lui confèrent, pour reprendre Baudrillard, le statut de « cérémonial souple » (1979, op.cit. : 174) par lequel toute norme préétablie peut être contournée, violée. Car c'est un univers au sein duquel « le choix de la règle vous y délivre de la loi » (1979, op. cit.  : 182)

Appliquée à la politique, nous avons du mal à partager la conviction de Baudrillard (op.cit. : 75), comme quoi « la séduction est ce qui ôte au discours son sens et le détourne de sa vérité ». Pour Baudrillard, « la stratégie de la séduction est celle du leurre ». Certes, mais nous pensons que la séduction est d'abord, et avant tout, un processus interactif entre deux actants, le séducteur et sa cible que le premier voudrait transformer en être séduit. Dès lors, dans le jeu politique comme dans la séduction, la vérité n'existe pas en soi. La vérité, dans ces deux champs, est davantage à chercher dans l'impact, avéré ou pas, sur la cible que dans le bien fondé de sa démarche.

Selon Rossignol (2002 : 238), « la séduction, si peu morale soit-elle, est une dimension fondatrice des rapports de pouvoir». Aussi, la question de la séduction est-elle prépondérante en politique. En effet, en tant que « lutte pour l'appropriation de signes-pouvoir » (Bonnafous, op.cit. : 68), la politique vise le ralliement d'un plus grand nombre afin de bénéficier de leur confiance pour exercer le pouvoir. C'est un champ marqué, par essence, par sa dimension performative.

Aussi, refusons-nous de procéder, comme Baudrillard, à cette distanciation, quasi-épistémologique, entre séduction et politique21(*). Nous pensons, au contraire, que le rapport entre politique et séduction est un rapport de connivence et de complémentarité, plutôt que d'hégémonie. En effet, autant la séduction exercée sur les électeurs peut permettre à l'homme politique d'accéder au pouvoir, autant la détention du pouvoir et l'exercice de celui-ci par la prise de décisions pertinentes et utiles, peuvent être source de séduction. Nous avons donc là une dimension spéculaire des rapports entre séduction et politique. La séduction étant source de pouvoir, le pouvoir aussi fonctionnant comme vecteur de séduction.

Si, comme l'écrit Sirois (2005), « toute séduction s'établit sur le déploiement d'un réseau de signes sensibles », séduire en politique, ne consiste pas tout simplement à convaincre par des arguments relevant du logos (logiques et rationnels). Car nous sommes à l'ère de l'homo videns. Et ce dernier, selon Pereyra (2005) :

habite le monde du spectaculaire, dominé par les célébrités (...) aussi différentes que puissent être les situations ou les cultures locales, la popularité domine le marché, l'audimat règne. Nous approchons de la fin du siècle et chaque pays du « village global » a transformé sa société en audience et sa population en téléspectateurs passifs hypnotisés par la magie du spectaculaire.

Et comme l'ont rappelé Perelman et Olbrechts-Tyteca (2002 : 23), « pour qu'une argumentation se développe, il faut, en effet, que ceux auxquels elle est destinée y prêtent quelque attention ». Ainsi, l'homme politique, sans doute tenu par la loi de l'adaptation, tente de satisfaire son public davantage porté vers l'image et le sensationnel.

Désormais, séduire, c'est aussi et surtout plaire. Plaire par une image de soi (ethos), attrayante, qui ne répugne ni au vernissage, ni au lissage par des moyens non plus discursifs uniquement, mais aussi, par un paraître, une gestuelle, voire une mise en scène à grande échelle permettant d'intégrer la nouvelle « société du spectacle » (Debord 1999).

* 21 Pour Baudrillard, « la séduction représente la maîtrise de l'univers symbolique alors que le pouvoir ne représente que la maîtrise de l'univers réel. La souveraineté de la séduction est sans commune mesure avec la détention du pouvoir politique ».

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry