IV- Discussion
Les échantillons de sol prélevés dans la
rhizosphère de plants de maïs à Bouaflé,
Bouaké, Ferké et Niéllé ont un pH
légèrement acide compris entre 6,21 et 6,47. Ces valeurs moyennes
de pH se situent dans la gamme de pH de sols favorables à une bonne
absorption racinaire des éléments nutritifs (Ognalaga,
2015). Les teneurs en phosphore assimilable sont comprises entre 60,17
et 117,88 g/kg de sol. Comparativement aux données de Siene
et al. (2020) qui ont obtenu des teneurs comprises entre 9,44
et 13,84 mg/kg de sol à Korhogo, les sols de Bouaflé,
Bouaké, Ferké et Niéllé ont une teneur
élevée en Phosphore assimilable. Les teneurs en potassium et en
magnésium comprises respectivement entre 0,1 et 0,14 Cmol/Kg de sol et
entre 0,63 et 0,83 Cmol/Kg de sol sont inférieures à celles
obtenues par Rincón, Droh, Villard et al. (2021)
dans les sols des régions de la Nawa, du Goh et de San-Pedro,
qui se situent respectivement entre 0,9 et 0,24 Cmol/Kg de sol ; entre 0,79 et
2,78 Cmol/Kg de sol. Elles sont par ailleurs inférieures au seuil
critique défini par Landon (1984) qui est de 4 Cmol/Kg
pour le potassium et de 0,5 Cmol/kg pour le magnésium.
Au niveau du rapport C/N, les valeurs obtenues sont comprises entre
10,4 et 11,15. Cela traduit une minéralisation normale de l'azote et par
conséquent sa biodisponibilité (Aké et
al., 2018). Ces caractéristiques physico-chimiques
montrent que les sols échantillonnés sont propices au
développement de la vie des micro-organisqmes telluriques dont les CMA
(Ognalaga, 2015).
En moyenne 138,66 #177; 11,37 à 398 #177; 86,97 ; 65,66
#177; 11,93 à 211 #177; 121,87; 127,66 #177; 63,37 à 291,33 #177;
82,51 et 107 #177; 9,53 à 296,66 #177; 4,61 spores de CMA ont
été observées dans 100 g de sol dans la rhizosphère
des plants de maïs, respectivement, dans les zones de Bouaflé;
Bouaké, Ferké et Niéllé. Ces données sont
particulièrement basses comparativement aux densités de spores de
CMA, de l'ordre 3259 #177; 32 à 12501,5 #177; 1850,5 et 4016 #177; 0,89
à 5036 #177; 0,72 spores/ 100 g de sol, rapportées dans les
cultures de maïs au bénin (Bossou et al.,
2019) et au Brésil (Castelli et al.,
2014). Il en est de même des densités de 842 à
1469 spores/ 100 g de sol observées dans les champs de manioc en
Côte-d'Ivoire (Voko et al., 2013) et de 358
#177; 0,25 à 535 #177; 0,05 spores/ 100 g de sol obtenues dans les
rhizosphères de fromagers (Ceiba pentandra) et et de
Makoré (Tieghemella heckelii), respectivement (Anguiby
et al., 2019). Cependant, des densités de spores de
CMA plus faibles, de l'ordre 15 à 38 spores/100 g de sol, ont
été rapportées dans différents types de
végétations forestières au sein de la foret classée
de la Téné en Côte-d'Ivoire (Zézé
et al., 2007). Il apparait des résultats de ces
diffférentes études que la densité des spores de CMA
serait liée aux caractéristiques physico-chimiques et aux taux
d'humidité des sols ainsi qu'aux types de végétations, de
cultures et de pratiques culturales. En effet, Egli et Brunner (2002)
ainsi que Kodjo et al. (2013) ont
indiqué que les sols pauvres en éléments minéraux,
surtout en phosphore et azote, favorisent le bon fonctionnement de la
mycorhization. Par contre, les fortes teneurs en phosphore et azote
réduisent la
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mycorhization des plantes et par conséquent elles
diminuent leur prolifération. Tawaraya (2003) a par
ailleurs souligné que la dépendance mycorhizienne des plantes
hôtes diminue avec la quantité de phosphore disponible dans le sol
car elles n'ont pas besoin des hyphes mycorhiziens pour une meilleure
absorption du phosphore à partir de la solution du sol.
Conformément aux résultats de ces auteurs, les
différences significatives observées, dans la présente
étude, entre les sols des localités prospectées, pour
leurs teneurs en phosphore assimilable, en cation Ca2+, en cation
K+ ainsi que leurs capacités d'échange cationique
(CEC) peuvent justifier les différences entre leurs densités en
spores de CMA. Les végétations varient aussi de la forêt
aux savanes arborée et arbustive à Bouaflé et
Bouaké (Dibi et al., 2008) à une zone
de savane herbeuse dans les zones de Ferké et Niéllé.
Ainsi, comme l'ont mis en évidence (Njeru et al., 2014
; Lohest, 2018 ; Touré et al., 2021),
le couvert végétal est certainement un facteur important
ayant déterminé les différences d'abondance et de
diversité des CMA observées dans cette étude. Le taux
d'humidité des sols influence également l'abondance des
propagules de CMA (Cardoso et Kuyper, 2006). Dans les zones de
Bouaflé et Bouaké, le cumul des précipitations a
été de 46,8 mm et 59,4 mm de pluie, respectivement, pour les mois
de Novembre et Décembre alors qu'aucune pluie n'est tombée
à Ferké et Niéllé (Infoclimat,
2020). Ce déficit hydrique a un éffet négatif sur
la croissance des plantes et réduit la symbiose mycorhizienne du fait
que les CMA sont des biotrophes obligatoires. En ce qui concerne l'influence
des types de culture sur la densité des spores de CMA dans la
rhizosphère, Garbaye (2013) a rapporté que les
racines du maïs sont moins abondantes, trapues et dépourvues de
poils absorbants et donc particulièrement dépendantes des
CMA. Par ailleurs, au Maroc, Meddich et al.
(2017) ont montré que les fréquences de mycorhization
des racines du maïs sont plus élevées que celles des
palmiers dattiers.
Des spores de couleurs jaunâtre, blanchâtre,
marron-claire et marron-foncé ont été observées
dans les échantillons de sol. Les spores de couleur jaunâtre avec
un taux de 65 % sont les plus abondantes dans les rhizosphères de
maïs. Elles sont suivies des spores de couleur marron-foncé 14 %,
blanchâtres 11 %, et des spores de couleurs marron-clair 10 %. Ces
données difffèrent de celles de Bossou et al.
(2019) et Mohammedi (2018) qui
ont remarqué une abondance des spores de couleur noire respectivement
dans les sols de cultures du maïs au Bénin et du palmier dattier au
Maroc. Concernant leurs tailles, des spores de CMA de 200, 90 et 45 um de
diamètre ont été observés. Les spores de 90 um de
diamètre sont les plus abondantes avec un pourcentage de 62,72. Elles
sont suivies des spores de 45 um (33,68 %) et 200 um (3,6 %) de
diamètre. Ces résultats sont en accord avec ceux de Dione
(2007) et Johnson et al. (2013) qui ont
remarqué que l'abondance des spores de CMA est inversement
proportionnelle à leur taille.
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Sur la base des caractéristiques
morpho-métriques et structurales des spores, dix-sept genres de CMA
appartenant à treize familles ont été identifiés
sur l'ensemble des sites prospectés. La famille des Glomeraceae
représentée par les genres Glomus, Funneliformis,
Septoglomus et Rhizophagus ainsi que les familles des Acaulosporaceae
et des Gigasporaceae représentées par les genres
Acaulospora et Gigaspora, respectivement, sont les plus
abondantes. La diversité de familles et de genres de CMA
identifiées dans l'ensembles des zones prospectées dans cette
étude est supérieure à celles obtenues par Bossou
et al. (2019) et Koffi et al. (2021)
qui ont observé quatre genres réparties en quatre
familles et cinq genres réparties en trois familles, respectivement dans
les sols de culture du maïs au Benin et en Côte d'Ivoire. En outre,
Droh (2017) n'a mis en évidence que 5 familles
(Acaulosporaceae, Diversisporaceae, Gigasporaceae,
Glomeraceae et Paraglomeraceae) se déclinant en 7 genres
(Acaulospora, Diversispora, Otospora, Gigaspora, Racocetra, Glomus et
Paraglomus) dans la rhizosphère de cacaoyers dans trois zones
agroécologiques de la Côte d'Ivoire.
Sidibé et al. (2015) ont aussi mis en
évidence, sur l'igname, dans trois zones agroécologiques, 7
genres (Acaulospora, Ambispora, Claroideoglomus, Glomus, Gigaspora,
Pascispora et Scutellospora) de CMA. Cependant, comme l'ont
déjà mentionné Castelli et al.
(2014), Bossou et al. (2019) et
Koffi et al. (2021), sous culture de maïs au
Brésil, au Benin et en Côte d'Ivoire, les genres Glomus,
Acaulospora et Gigaspora sont les plus abondants dans les
échantillons de sols qui ont été analysés dans
cette étude. Des résultats similaires ont été
obtenus par Voko et al. (2013) qui ont
remarqué, sous culture de manioc en Côte d'Ivoire, une
prédominance des genres Glomus et Acaulospora. Les
résultats de ces différentes études concordent avec les
conclusions de nombreux auteurs qui ont montré que les
écosystèmes en général, et plus
particulièrement ceux d'Afrique de l'ouest, sont dominés par les
familles des Glomeraceae, Acaulosporaceae et
Gigasporaceae (Singh et Adholeya, 2013 ; Barnes et
al., 2016 ; Soka et Ritchie, 2018). La prédominance de ces
familles, notamment celles des Glomeraceae et Acaulosporaceae
dans les zones tropicales en Afrique de l'ouest (Voko et
al., 2013) serait due à leur grande adaptabilité
aux conditions de stress (Lenoir et al., 2016) du
fait de leur propagation préférentielle par les structures de
résistance que sont les spores (Brito et al.,
2012).
Les genres Glomus, Acaulospora et Gigaspora
et plus largement les familles des Glomeraceae, Acaulosporaceae
et Gigasporaceae représentent des symbiotes
généralistes qui peuvent coloniser une grande diversité de
plantes hôtes (Öpik et al., 2010).
Cependant, certains des autres genres (Funneliformis, Septoglomus,
Rhizophagus, Scutellospora, Cetraspora, Racocetra, Pacispora, Ambispora,
Archaeospora, Paraglomus, Sacculospora, Viscospora, Dentiscutata et
Diversispora) identifiés dans l'ensemble des
échantillons de sol pourraient être des CMA spécialistes
associés à la culture du maïs, aux autres espèces de
plantes cultivées ou aux plantes adventices poussant dans les
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différentes zones prospectées. En analysant les
communautés mycorhiziennes arbusculaires sur des arbres forestiers de
différents âges, Diédhiou et al. (2010)
et Bennett et al. (2013) ont mis en
évidence un remplacement des CMA généralistes par des CMA
spécialistes au fur et à mesure que les plantes vieillissent.
Aussi, les échantillons de sol ayant été
prélevés après la récolte des épis, dans des
champs portant des plants de maïs secs, des genres de CMA
identifiés pouraient êtres spécifiques des plants
âgés.
QUATRIEME PARTIE :
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