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Les pieces bifaciales a bords paralleles du Middle Stone Age d'Afrique Centrale approches productionnelle et techno-fonctionnelle des assemblages lithiques des sites de la vallee du Nzako (Republique Centrafricaine)


par Marie Josée ANGUE ZOGO
Muséum National d'Histoire Naturelle - Master 2 2020
  

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III. METHODES

Nous avons eu recours à trois principales méthodes pour étudier nos pièces. En effet nous avons utilisé les approches productionnelles, morphologiques et fonctionnelles. C'est dans le but de mieux appréhender ces outils tous classer sous l'appellation de core-axes. Essayer de détecter une diversité sur le plan morphologique, productionnel mais aussi fonctionnel

1. DEFINITIONS DES TERMES TECHNIQUES PRINCIPAUX

Le vocabulaire que nous avons utilisé est issu de nos différentes lectures mais surtout de l'ouvrage Technologie de la pierre taillée (Tixier et al. 1995). Dans le cadre de cette étude détaillée des pièces bifaciales à bords parallèles, quelques précisions lexicales sont nécéssaires.

· Les outils

Notre étude concerne spécifiquement et exclusivement des outils bifaciaux. Nous nous devons ainsi de particulièrement et avant tout considérer ces pièces comme des artefacts présentant un schème d'utilisation (Rabardel 1995). Ainsi « Outil est le terme général donné aux objets par lesquels l'homme intervient sur la matière en prolongeant sa main afin de la spécialiser en fonction d'objectifs techniques à réaliser. » (Leroi-Gourhan and Collectif 2005). En parlant d'outils, nous évoquons déjà une ou des fonctions car « Nous employons le mot "outils" pour désigner, comme il est d'usage, l'ensemble des armes et outils, d'abord par souci de simplification, ensuite à cause de l'impossibilité où nous sommes, dans la plupart des cas, de prouver qu'il s'agit d'une arme ou d'un outil. Nous étendons donc la notion d'outil à toute pièce dont nous pouvons assurer l'utilisation, sans prétendre à l'identification d'une fonction.» (Tixier et al., 1995.P.154).

· La méthode

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« Par méthodes, nous entendons les connaissances apprises, appliquées et transmises par un groupe et considérées par ce dernier comme étant la (ou les) seule(s) possible(s) pour parvenir aux objectifs recherchés » (Boëda, 1997. P. 28). La connaissance d'une ou plusieurs méthodes peut ainsi se transmettre au sein d'un même groupe mais aussi d'un groupe à un autre. Il se peut donc que la méthode soit déjà pensée avant même la réalisation de l'outil. A. Lourdeau pense qu'« elle détermine l'emplacement, l'ordre de succession et la nature des enlèvements effectués et son déroulement suit les règles constitutives du concept au sein duquel il s'insère » (Lourdeau, 2011. P. 62) ou plus simplement « La méthode suivie pour obtenir un outil préhistorique est donc l'agencement, suivant une marche raisonnée, d'un certain nombre de gestes exécutés chacun grâce à une technique » (Tixier et al., 1995. P. 151).

· La technique

« Nous définissons "une technique" comme un des procédés d'un métier (et parfois d'un art), celui du tailleur préhistorique. La percussion directe avec un percuteur de pierre, le débitage d'une lame par pression, la fracture d'une lamelle par "coup du microburin" sont des exemples de techniques.» (Inizan et al., 1995. P. 163). La technique serait donc « le moyen, la méthode l'esprit qui agence les moyens. » (Tixier 1967), ce moyen mit en place dont parle Tixier « correspond alors à l'action et au moyen nécessaire au détachement de tout enlèvement sur un nucléus, une pièce bifaciale ou un outil » (Boëda, 1997. P. 29) . La ou les techniques peuvent aussi être propres à un groupe et répondre à une solution environnementale spécifique à ce groupe (Lourdeau 2011). Il serait donc approprié d'appréhender les techniques comme des « connaissances et savoir-faire de groupe humains » (Lourdeau, 2011. P. 61).

· La chaine opératoire

La chaine opératoire peut être considérée comme un outil méthodologique d'observation et de connexion des donnés techno-typologiques recueillies, de description et d'analyse des processus techniques. C'est un outil polyvalent en fonction du thème ou des objectifs de celui qui l'utilise. « C'est un enchainement d'actes ; de gestes, d'instruments constituant un processus technique avec ses grandes étapes plus ou moins visibles. » (Balfet 1991). Elle peut aussi être désignée comme « la succession effectivement réalisée ou une fraction cohérente de celle-ci, de tous les gestes qu'il sous-tend pour conduire d'une matière première brute à un ou des produits ».(Audouze and Karlin 2017). La chaine opératoire est donc constituée de toutes les étapes de collection matières premières, des supports, aux méthodes et aux techniques afin d'obtenir un outil, en ce qui est de la chaine opératoire en technologie lithique. D'ailleurs A.

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Turq dit que « La chaine opératoire, c'est l'ensemble des choix, des gestes, des méthodes, des concepts qui sous-tendent l'utilisation d'un bloc depuis sa récolte par un individu. » (Turq 2000).

s Le façonnage

« Le façonnage est une opération de taille qui a pour finalité la fabrication d'un objet, et un seul, en sculptant la masse de matière première choisie, selon une forme désirée » (Tixier et al., 1995.P. 146) aussi « Le façonnage peut être un acte de transformation volumétrique, un mode de production qui produit un artefact qui peut être immédiatement fonctionnel » tel que le définit E. Boëda (Boëda 2013) . Ce qui nous amène à comprendre que contrairement au débitage qui produit plusieurs supports, le façonnage a pour objectif de produire un outil fini et pourquoi pas, prêt à être utilisé. Dans notre cas, il s'agit des pièces bifaciales, donc d'un façonnage sur les deux faces mais il existe aussi le façonnage unifacial et trifacial dans l'assemblage de N'Zako. Ainsi dit, nous comprenons que le façonnage peut nous permettre d'obtenir plusieurs types d'outils suivant différentes méthodes (unifacial, trifacial, bifacial, multifacial), différentes modalités (intensité de réduction, bord/bord, face/face etc.) et différentes techniques (percuteur dur, percuteur tendre etc.).

s Support

Le support est considéré comme « Tout élément à partir duquel un objet est taillé, façonné, débité, retouché. Il peut donc s'agir d'un rognon, d'une plaquette, d'un galet, d'un produit de débitage, etc. » (Tixier and Inizian 1980). Cette définition révèle la variabilité de support qu'il peut y avoir en technologie lithique. Les pièces bifaciales que nous utilisons ont été façonnées pour leur part sur différent support : éclats, bloc et plaquette. Nous utiliserons « support » dans le cadre productionel pour désigner la masse lithique qui va être façonné. Cela nous permet de le distinguer de son sens fonctionnel « support d'outils », à savoir un volume sur lequel sont aménagées une ou plusieurs parties actives.

s Génération

Nous entendons ici par génération les différentes phases de réduction du support : lors du façonnage, le tailleur peut par exemple façonnée deux fois un bord, ce qui laisse en général, sur la pièce, les traces de la superposition de deux générations d'enlèvements.

s La retouche

« Une retouche est un enlèvement ou une série d'enlèvements spécifiques pratiqués dans le but d'obtenir un outil. Retoucher, c'est donc aménager, sculpter, transformer

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intentionnellement un support débité ou non. » (Tixier et al., 1995. P. 160), une autre définition dans le dictionnaire de la préhistoire dit : « C'est une modification intentionnelle par un ou plusieurs enlèvements obtenus par pression ou par percussion d'un support. La retouche peut intéresser la partie active de l'outil dans le but d'un ravivage de son tranchant ou simplement une modification. Elle peut aussi concerner l'aménagement de sa forme en passant par l'amincissement, le rétrécissement ou la régularisation. » (Leroi-Gourhan and Collectif 2005). Ainsi nous constatons que le but de la retouche est toujours fonctionnel.

Pour A. Lourdeau la retouche ne modifie pas la structure volumétrique d'une pièce ainsi que l'indique la définition de S.Soriano « opération de taille appliqué à un support (débité, façonné ou naturel) et destiné à en modifier certains caractères en vue de la transformation en outil » (Soriano 2000), car celle-ci est l'étape final de l'aménagement d'une pièce le rendant outil et donc lui accordant une capacité fonctionnelle (Boëda 2001; Boëda 1997; Lourdeau 2011). Lorsque cet aménagement concerne les parties actives, peu importe lesquelles, on parlera d'affutage dont E. Boëda dit « Le terme d'affûtage, en revanche, est réservé à la partie transformative. Il désigne très spécifiquement l'aménagement et l'entretien d'une ou de plusieurs parties d'un support en partie(s) active(s). Mais il est souvent difficile d'arriver à déterminer le (ou les) contact(s) transformatif(s) d'une pièce. » (Boëda, 1997. p. 31).

Les retouches sont variables et se caractérisent par différentes formes (scaliforme, écailleuse, parallèle, etc.), différentes étendues (couvrante, envahissante, etc.), différentes localisations (distale, latérale, proximal, etc.).

· Les Unités Techno-Fonctionnelles/ Contacts transformatifs

« Une Unité Techno Fonctionnelle se définit comme un ensemble d'éléments et/ou de contraintes techniques qui coexistent dans une synergie d'effets » (Boëda, 1997. P. 34). Un outil se structure en plusieurs Unités Techno-Fonctionnelles :

- Une Unité Techno-Fonctionnelle transformative (UTFt) : « est la partie qui rentre en contact avec la matière d'oeuvre lors de l'action. Elle correspond à l'élément communément qualifié de tranchant » (Lourdeau, 2011. P. 67) .

- Une Unité Techno-Fonctionnelle préhensive (UTFp) : « est celle qui est en contact avec l'utilisateur et qui reçoit l'énergie de l'action. » (Rocca 2016) ou encore « la partie maintenue par l'utilisateur » (Lourdeau, 2011. P. 67).

- Une Unité Techno-Fonctionnelle réceptive (UTFr) : « est la partie recevant l'énergie émise par l'utilisateur et la transmet à l'UTFt. » (Lourdeau, 2011. P. 67).

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En ce qui nous concerne, selon le nombre de couples d'Unités Techno-Fonctionnelles qui seront présent sur une pièce bifaciale, nous pouvons distinguer deux catégories de pièces bifaciales (Boëda 1997): « la pièce bifaciale outil » avec un seul couple d'Unités Techno-Fonctionnelles et « la pièce bifaciale support d'outil(s) » avec plusieurs couples d'Unités Techno-Fonctionnelles. Cette question a largement été soulevée pour les pièces bifaciales acheuléennes et la question de la diversité fonctionnelle du « biface » . Dans le cas des core-axes du MSA d'Afrique centrale, où les supports semblent également parfois standardisés, conduisant à cette grande catégorie typologique des core-axes, la question de la matrice façonnée support d'outil ou outils unique peut donc être abordée via l'analyse techno-fonctionnelle.

· La structure et le volume

Nous pouvons considérer la structure « comme un ensemble d'éléments et/ou de caractères techniques qui coexistent dans une synergie d'effet » (Boëda 1997). Ainsi c'est par l'identification des différentes UTFs et leur agencement que nous pouvons mettre en évidence la structure de l'outil. E. Boëda évoque le volume le plus souvent sous l'appellation de « structure volumétrique ». Il en a caractérisé plusieurs mais celle qui nous intéresse ici est la structure concrète qu'il définit comme : « Une structure concrète est une structure constituée d'éléments intégrés les uns dans les autres dans une synergie de forme, de fonction et de fonctionnement. » (Boëda 1997).

2. CRITERES DE SELECTION

Première sélection

Notre principal critère pour sélectionner le matériel d'étude reposait sur le caractère bifacial du façonnage et de la morphologie des bords parallèles. Ainsi, 45 pièces ont été sélectionnées en Salle de Préhistoire de l'IPH comme énoncé plus haut.

Deuxième sélection

Une fois toutes les pièces sélectionnées et montées dans notre salle d'étude, une deuxième sélection a été opérée. Celle-ci consistait à ne garder que des pièces lisibles. A quoi nous servirait, dans le cadre d'une étude qualitative, une pièce bifaciale dont on ne peut lire aucun stigmate ? Nous avons aussi écarté quatre pièces très mal conservées dont l'état ne nous permet plus d'obtenir quelconque information. Les pièces à extrémités distales ou proximales cassées

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ont été gardées car elles regorgent souvent d'informations importantes comme l'utilisation ou les accidents de taille mais surtout certaines concernant la séquence productionnelle, dont la reconstitution est un de nos objectifs. Au sein de ce corpus de 45 pièces, nous avons ensuite séparé des groupes sur des critères morpho-structurels pour l'ensemble du matériel. Nous en avons obtenu six et quatre pièces dont ces critères ne s'apparentent à aucun groupe ont été mis à part.

Lecture des pièces

Afin de procéder à la lecture de notre matériel nous avons observé les matières premières, établi des schémas diacritiques pour chacune des pièces par groupe pour déterminer la production, puis les Unités Techno-Fonctionnelles.

Les matières premières.

Avant de procéder à une étude des industries lithiques, il est primordial de savoir de quelles

Figure 17 Les différentes matières identifiées dans l'assemblage. Photos M-J Angue.

natures sont les matières premières étudiées, comment elles ont été acquises mais aussi où ont-elles été acquises. Heureusement pour nous certaines de ces informations étaient déjà mentionnés par De Bayles des Hermens (Bayle des Hermens 1968). Dans ses notes, il est dit que les matières premières principales de ces sites que sont le grès et le quartzite sont des

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matières locales. « Les roches employées pour la fabrication des outils préhistoriques des chantiers du N'Zako ont été prélevées sur place dans les affleurements qui surgissent à flanc de vallée. Grès et quartzites diversement coloriés ; quelques éléments en quartz et cristal de roche semblent provenir de galets de rivière. »

Ce qui nous restait à faire était d'observer des caractéristiques visuelles tels que : la couleur ; les inclusions et les grains. Nous avons distingué les pièces cassées, brisées ou fracturées lorsqu'elles l'étaient. Et enfin la description structurelle et les caractéristiques pour les aptitudes à la taille.

3. COMPRENDRE LA PRODUCTION DES CORE-AXES

Nous avons analysé la production de notre matériel pièce par pièce en observant le façonnage et les intensités de réductions mais aussi les supports employés. Nous avons aussi observé les retouches, leur confection, la délinéation des bords et la forme des extrémités distales. Pour arriver à cela nous avons eu recours au schéma diacritique. Celui-ci est élaboré par M. Dauvois (Dauvois, 1976). Sa fonction de dessin de lecture a été enrichie au fil des recherches afin de permettre une meilleure lecture (Turq, 2000). Ainsi le schéma diacritique est la forme graphique qui a guidé nos observations, nous permettant d'entrer dans le détail en lisant pièce par pièce notre matériel. Et surtout en écrivant sur papier toutes les informations relatives à la production que nous avons noté pour chaque pièce. Nous avons analysé la production de notre matériel pièce par pièce en observant le façonnage et les intensités de réductions mais aussi les supports employés. Nous avons aussi observé les retouches, leur confection, la délinéation des bords et la forme des extrémités distales. Pour arriver à cela nous avons eu recours au schéma diacritique. Celui-ci a été initialement élaboré par M. Dauvois (Dauvois 1976). Sa fonction de dessin de lecture a été enrichie au fil des recherches afin de permettre une meilleure représentation de la lecture (Turq 2000). Ainsi le schéma diacritique est la méthode choisie pour guider nos observations et notre lecture et la forme graphique que nous avons privilégiée pour exposer nos observations, nous permettant ainsi d'entrer dans le détail. Une fiche technique sur papier comportant le schéma et toutes les informations relatives à la production a été réalisée.

- Les supports : nous avons déterminé si les objets ont été taillés sur éclat, sur galet, sur

plaquette ou sur un bloc Nous avons également localisé les surfaces originelles et les

surfaces naturelles des supports, et les faces d'éclatement pour les éclats supports

(Figure 18).

- Le façonnage : les observations faites grâce au schéma diacritique nous ont véritablement permis de comprendre et voir les générations d'enlèvements via les

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modes de réduction de la matière lors de la séquence de façonnage. Nous avons ainsi pu déterminer le séquençage employé pour le façonnage. Était-ce un façonnage bord/bord, c'est-à-dire une face puis une autre ? Ou face/face c'est-à-dire une face à la suite de l'autre ? ou, dans certains cas, mixtes ?

- La retouche : celle-ci concerne toute la périphérie de la pièce mais comme le souligne A. Lourdeau elle n'a pas pour objectif de modifier la structure volumétrique d'une pièce. C'est plutôt la dernière étape de l'aménagement d'une pièce, lui accordant un caractère fonctionnel et donc pouvant à ce moment être définit comme outils (Boëda 1997; Lourdeau 2011). Il nous est apparu important de la localiser (partie distale, proximale ou latérale) mais aussi de la décrire et d'observer son étendue, qu'elle soit couvrante, marginale ou envahissante. En analysant la retouche, nous avons également distingué des ébréchures qui peuvent être liées à la mise en fonction ou à la mauvaise préservation.

- Les bords : les bords latéraux de nos pièces sont tous parallèles et nous avons analysé leurs ruptures de délinéation afin de déterminer s'ils étaient concaves, convexes, sinueux ou rectilignes. (Figure 18/1).

- Les extrémités distales : celles-ci peuvent être convergentes, arrondies ou rectilignes. Les deux extrémités ont souvent des morphologies différentes, on peut ainsi trouver des pièces à extrémité proximale à bords convergents et en partie proximale à bord arrondie ou l'inverse. Il y a plusieurs possibilités quant à la diversité des combinaisons (Figure 18 /2).

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e

Figure 19 Les types de supports. Photos M-J Angue

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4. LA DESCRIPTION DES UNITES TECHNO-FONCTIONNELLES

L'approche techno-fonctionnelle s'est développée grâce aux travaux de M. Lepot (Lepot 1993) et d'E. Boëda (Boëda 1997) qui la définit comme « Une Unité Techno-Fonctionnelle se définit comme un ensemble d'éléments et/ou caractères techniques qui coexistent dans une synergie d'effets.»(Boëda, 1997. P.34). Depuis sa création, elle a été employée et appliquée à divers types de collections (Lourdeau 2011).

Nous avons tenté de décrire et localiser les potentielles parties actives retrouvées sur les pièces que nous avons étudiées. Sachant que le point commun de toutes les roches qui existent est leur caractère incisant naturel (Boëda, 2013), nous avons donc cherché ce caractère incisant mais cette fois-ci non pas naturel mais celui obtenu par le fait de l'Homme. Il est délicat d'aborder les fonctions et fonctionnements d'outils préhistoriques sachant que nous sommes face aux pièces dont la mémoire technique se trouve totalement perdue après enfouissement de celle-ci (Lourdeau 2011). L'étude techno-fonctionnelle ne recherche donc pas la fonction ou le fonctionnement des outils préhistoriques mais nous aide à discuter des objectifs morpho-structurels d'un outil, comme le souligne R. Rocca « Cette démarche vise, à travers l'analyse des conséquences morpho-techniques des gestes mis en oeuvre, à atteindre les intentions fonctionnelles des outils. » (Rocca, 2016. P. 214).

L'outil peut se structurer en trois Unités Techno-Fonctionnelles (UTF) à savoir : Unité Techno-Fonctionnelle transformative (UTFt) ; Unité Techno-Fonctionnelle préhensive (UTFp) et l'Unité Techno-Fonctionnelle réceptive (UTFr). M. Lepot lui parlait de « Contact transformatif » pour l'UTFt, « Contact préhensif » pour l'UTFp et « Contact réceptif » pour l'UTFr (Lepot 1993).

Notre « objectif final est donc de mettre en évidence des groupes d'outils associant une ou plusieurs parties actives avec une partie préhensive » (Rocca, 2016. P. 215) car une pièce peut avoir plusieurs et différentes Unités Techno-fonctionnelles actives, et donc supporter plusieurs outils aux caractéristiques différentes. Pour se faire nous avons donc regardé les angles et la délinéation des bords latéraux (pour les UTFt) puis la morphologie des surfaces (pour les UTFp) qui permettent l'aménagement d'une ou de plusieurs parties actives et d'une partie préhensive. « Un angle, un plan de section, une surface, un fil, etc. Constituent autant de caractères techniques participants à la définition d'une UTF. » (Boëda, 1997. P. 34).

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Figure 20 Illustration de la difficulté à distinguer l'UTFr et l'UTFp.(Lourdeau, 2011)

5. LISTE DES CRITERES OBSERVES

Critères morphologiques

Toutes les pièces de notre assemblage ont été divisées en six groupes comme énoncé plus haut. Ces groupes ont été constitués sur les critères morpho-structurels de nos pièces bifaciales à bords parallèles, à savoir l'agencement du volume de la pièce selon les différents axes transversal, longitudinal et selon le plan d'équilibre bifacial. Les principaux critères morphologiques que nous avons regardés pour constituer nos groupes sont : la morphologie générale de la pièce, les sections, les symétries ou asymétries. Les pièces partageant des caractères morpho-structurels similaires ont été classées ensemble conduisant à six groupes distincts. Cinq pièces n'ont pas coïncidé avec les groupes établis. Ces pièces ont fait l'objet d'une étude isolée élément par élément.

Les dimensions

Nous avons pris les dimensions générales de nos pièces. Il s'agissait des longueurs, largeurs maximales et épaisseurs maximales afin comparer au sein de chaque groupe la variabilité qu'il peut y avoir en termes de longueur, de largeur ou d'épaisseur. L'unité de mesure est le

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centimètre. Ces pièces ont aussi été pesées individuellement avant la constitution des groupes. Ainsi nous avons, à l'aide de ces mesures, calculé des indices d'élongation :

- Indice de finesse : cet indice s'obtient en faisant le calcule longueur/épaisseur pour chaque pièce, puis par le calcul de la moyenne du groupe. Cet indice nous indique la pièce la plus fine et allongée.

- Indice d'allongement : cet indice s'obtient en faisant le calcul longueur/largeur

également pièce par pièce, puis par le calcul de la moyenne du groupe. Ici, nous caractérisons la pièce la plus allongée.

Ces indices nous permettront par la suite de comparer chaque groupe à l'ensemble des pièces bifaciales, soit les différents types de pièces bifaciales des sites NZK (n=36) et NZA (n=68) dont les données ont déjà été publiées (Mesfin et al. 2020). Nous pourrons ensuite également comparer entre les différents groupes ces caractères morphométriques.

Critères Techno-fonctionnelles

Nous avons appliqué l'approche techno-fonctionnelle au sein de chaque groupe afin d'en déceler des organisations des UTFt et UTFp différentes. En effet, autant un groupe peut être diversifié en termes d'outils, autant une pièce peut avoir plusieurs outils. «The rim is retouched in order to create any desirable cutting edge (sharp and shaped as a point, thick and denticulate, etc.). Different cutting edges can coexist on the same piece. » (Nicoud, 2013. P.45), c'est donc le tailleur qui aménage ces différentes parties actives au sein d'une pièce.A ce moment l'outil devient « support d'outils ». Comme l'explique E ; Boëda « Dans le cas de la pièce bifaciale outil, la morphologie de la pièce est étroitement liée à sa fonctionnalité. Les éléments qui la structurent sont intégrés dans une synergie de formes, de fonction et fonctionnement appelée hypertélique. » (Boëda, 1997. P. 64).

Notre étude s'est spécifiquement intéressée aux nombres de parties actives et la localisation et l'agencement des différentes UTFs entre elles. Il s'agit donc d'exposer la variabilité et les invariants morpho-structurels de notre assemblages.

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"Nous voulons explorer la bonté contrée énorme où tout se tait"   Appolinaire