Cette partie permet de faire le point des connaissances sur
les différents problèmes en résolution. Il s'agit de
présenter les avis de certains auteurs sur la question de mobilisation
des ressources propres des collectivités locales, la faiblesse des
ressources des communes et interactions fiscales entre les collectivités
territoriales.
Les collectivités locales ou territoriales sont des
communautés sociales infra étatiques qui ont pour assise une
fraction du territoire dotée de la personnalité morale juridique
et d'une autonomie financière. Selon Carles (1987), « la
collectivité locale est une composante de personnes publiques devant de
multiples fonctions d'intérêt général ». Elle
se définit par un territoire bien délimité, une
organisation de ses habitants, une habitation à décider et
à mener ses propres affaires.
Elle est selon ROCHEGUDE (2000), une communauté
d'habitants partageant le même territoire géographiquement et
administrativement délimité, dotée de la
personnalité juridique et de l'autonomie financière, disposant
d'instances délibératives et exécutives élues,
ainsi que de ses propres services et moyens administratifs, pour l'exercice des
compétences qui lui sont reconnues par la loi.
Pour TOBOULA (2002), la mobilisation des ressources pour le
financement des futures communes à l'ère de la
décentralisation est nécessaire pour la survie des
collectivités locales. Il s'inquiète pour les nombreuses
compétences à transférer aux collectivités locales
dans le cadre de la nouvelle politique de développement à la base
poursuivie par l'Etat central. Selon l'auteur, la méconnaissance des
textes par les populations et le manque de moyens lors des travaux de
recensement de la matière imposable justifient essentiellement les
difficultés de mobilisation des ressources financières. Une
solution relative à la constitution d'une base de données
foncière par l'ancienne sous-préfecture d'Abomey-Calavi a
été retenue, mais n'a pu être expérimentée
à cause de son aspect théorique et coût prévisionnel
élevé.
Selon CHAMBAS et BRUN (2007), la décentralisation
souvent pour objectif la mobilisation de ressources publiques
supplémentaires. L'accès à une meilleure information ou
une plus grande transparence de l'utilisation des recettes collectées,
grâce à la plus grande
Réalisé par de SOUZA Jeef M. et TINMITONDE Marcel
Page 26
Effet de l'Impôt sur le Développement des
collectivités locales au Bénin
proximité du gouvernement, devrait favoriser la
mobilisation des ressources locales propres au niveau des collectivités
décentralisées et donc renforcer le niveau des ressources
publiques globales. Il est souvent plus facile au niveau local qu'au niveau
central d'établir un lien entre la prestation de services publics locaux
et des impôts locaux. La prise de conscience de ce lien par les
populations devrait favoriser le développement du civisme fiscal et donc
l'acceptation des impôts locaux propres aux collectivités locales.
Une telle relation irait dans le sens d'une plus grande mobilisation de
ressources publiques. Inversement, le lien entre prélèvement et
offre de service public devrait inciter les responsables des
collectivités locales à améliorer l'efficacité de
leurs dépenses afin de s'inscrire dans un cercle vertueux certainement
favorable à une élection des meilleurs gestionnaires qui ont su
aussi susciter la mobilisation de ressources financières
nécessaires à la réalisation de leur objectifs. La
mobilisation de ressources propres locales, garantit également une
certaine autonomie financière des collectivités locales, qui leur
permet de disposer de ressources plus stables que des transferts ou subventions
de nature largement discrétionnaires. Cette plus grande stabilité
des ressources contribue à une meilleure efficacité des
dépenses locales. Enfin, une augmentation des ressources locales propres
est la responsabilité des gouvernements locaux et réduit leurs
comportements opportuniste susceptibles de se produire lorsque les ressources
de financement sont des dons, des emprunts externes ou internes.
Les Etats africains au Sud du Sahara, et le Bénin ne
constituant pas une exception, sont des Etats de création encore
récente. Cette situation constitue un handicap pour la mobilisation de
ressources de fiscalité centrale et aussi pour la fiscalité
locale, car la réalité de l'Etat est en cours d'affirmation dans
un contexte souvent difficile. La gouvernance publique affecte la mobilisation
fiscale. Ainsi, de nombreux pays en développement sont affectés
par une forte corruption qui va à l'encontre de la mobilisation de
ressources fiscales. Cette relation négative entre corruption et
mobilisation fiscale a été vérifiée notamment par
Ghura, (1998) et Attila, Chambas, Combes, (2006).
La nature de la relation entre niveau de la fiscalité
centrale et locale s'avère également délicate à
évaluer. Un niveau important de fiscalité centrale (ou d'effort
fiscal) favorise-t-il une bonne mobilisation de la fiscalité locale
(relation de complémentarité entre fiscalité centrale et
locale), ou au contraire, réduit-il le rôle de la fiscalité
locale (relation de substituabilité) ? Les résultats obtenus par
Chambas et Duret (2001) tendent à faire apparaître une relation de
complémentarité, c'est-à-dire une bonne mobilisation
fiscale centrale serait
Réalisé par de SOUZA Jeef M. et TINMITONDE Marcel
Page 27
Effet de l'Impôt sur le Développement des
collectivités locales au Bénin
favorable à la mobilisation des ressources locales ;
inversement, une médiocre mobilisation fiscale centrale serait
défavorable à la mobilisation des ressources fiscales locales.
Cependant, des travaux complémentaires demeurent nécessaires.
En général, dans les communes
béninoises, il se pose la problématique de la qualité des
politiques de mobilisation des ressources propres. En effet, elles sont de plus
en plus insuffisantes pour exécuter les projets de développement
des autorités locales. C'est dans ce sens que, TOSSOU (2015) explique
que, ce problème de faiblesse des ressources est relatif à
certains facteurs liés à l'absence de transparence dans la
gestion communale. Le budget est resté toujours un document inaccessible
aux différents acteurs et principalement à la population. Les
textes relatifs à la mobilisation des ressources ne sont pas connus des
contribuables (paiement des acomptes provisionnels par exemple). Les programmes
d'investissement et leurs sources de financement sont mal connus. Il
règne autour de la gestion budgétaire une certaine opacité
telle que : l'absence de compte rendu de l'utilisation des impôts et
taxes payés.
Selon Yatta (2000), « la faiblesse de ressources est
également liée à la crise financière que
connaissent les états et qui les met dans la quasi impossibilité
de transférer aux collectivités locales des ressources
qu'eux-mêmes ont du mal à réunir en raison du niveau
général de pauvreté des populations. De même, la
pondération du secteur informel dans les économies Africaines
n'est sans doute pas étrangère à cette situation
».
Selon un rapport de la SNV (2000) sur la capacité de
financement des communes, la plupart des communes ont une très faible
capacité d'investissement sur ressources propres. La plus grande source
d'investissement des communes demeure les transferts financiers de l'Etat et
les programmes des bailleurs de fonds. Malheureusement, ces transferts sont
très faibles par rapport aux besoins réels de financement du
développement des communes. De même, lesdits transferts de l'Etat
accusent beaucoup de retard.
TOBOULA (2004) quant à lui, affirme que « les
finances locales garantes de l'autonomie financière des
collectivités locales apparaissent aussi comme la condition de
réussite de la décentralisation ». Cela voudra dire que la
prospérité à la base sera une réalité si la
commune arrive à mobiliser les ressources nécessaires pour
couvrir ses charges. Dans ce sens, le moyen adéquat est le paiement des
impôts et taxes par les contribuables.
Réalisé par de SOUZA Jeef M. et TINMITONDE Marcel
Page 28
Effet de l'Impôt sur le Développement des
collectivités locales au Bénin
Selon Dembele (2009), les stratégies à adopter
pour améliorer la mobilisation des ressources propres des communes des
pays de l'Afrique se trouvent dans beaucoup de concepts de base. Mais pour lui,
ces stratégies se résument par :
- l'élaboration et l'adoption d'un plan local et/ou de
plan stratégique de développement (comprenant le plan d'action
prioritaire d'investissement communal, rationnel, objectif, la stratégie
de mise en oeuvre et d'évaluation) ;
- l'adoption de mesures spécifiques en conseil municipal
ou communal.
En effet, dans sa vision de recherche de politique de
mobilisation des ressources propres des communes, ressortent les outils d'aide
de mobilisation des ressources qui existent déjà dans les pays de
l'Afrique comme le cas au Bénin et au Rwanda, des Registres Fonciers
Urbains (RFU). Comme d'autres outils d'aide de mobilisation des ressources
propres, il y a : les applications fiscales, foncières et de gestion
urbaine ; le logiciel de gestion des finances locales, et exécution de
formation.
Au cours d'un séminaire sur « les finances
locales, moteur de développement » tenu à
l'université Senghor d'Alexandrine du 15 au 16 Septembre 2010 par
l'Association Internationale des Maires Francophones (AIMF), il a
été relevé que « les difficultés pour
mobiliser les ressources propres ne sont pas de nature occasionnelle, mais au
contraire de nature structurelle ». Pour cette raison, les conditions
globales de mobilisation des ressources locales propres découlent de
:
- la relation directe de proximité de l'exécutif
des collectivités locales avec les
populations;
- la promotion d'une démarche participative;
- la transparence et la bonne gouvernance qui incite au civisme
fiscal;
- le développement d'une authentique démocratie
locale.
Sur le plan théorique, l'existence d'interactions
fiscales entre collectivités locales peut se justifier de deux
manières différentes. D'une part, dans les modèles dits de
concurrence fiscale, les interactions sont la conséquence de la
mobilité de la base imposable induite par les disparités de taux
d'imposition entre collectivités locales (Mintz et Tulkens, 1986;
Wildasin, 1988). D'autre part, les interactions fiscales sont le
résultat du comportement des décideurs politiques. En effet, les
élus peuvent agir comme si les électeurs comparaient le taux
d'imposition qu'ils supportent aux taux des collectivités voisines puis,
le cas échéant,
Réalisé par de SOUZA Jeef M. et TINMITONDE Marcel
Page 29
Effet de l'Impôt sur le Développement des
collectivités locales au Bénin
sanctionnaient leurs représentants par une non
réélection si le rapport avantages-coûts des choix publics
locaux leur paraît défavorable. Il s'agit dans ce cas des
modèles de concurrence par comparaison, dits de yardstick
compétition (Salmon, 1987; Besley et Case, 1995).