TABLE DES MATIERES
Dédicace..............................................................................................i
Remerciement........................................................................................ii
Acronymes, Sigles et Abréviations
............................................................iii
Liste des
illustrations...............................................................................iv
Résumé ..............................................................................................v
INTRODUCTION GENERALE
3
1. Contexte
3
2. Problématique
4
3. Cadre de l'étude
5
4. Objectifs, Hypothèses et Questions de
recherche
5
4.1. Objectif général
5
4.2. Objectifs spécifiques
5
4.3. Hypothèses de recherche
6
4.4. Questions de recherche
6
5. Difficultés rencontrées
8
CHAPITRE I. GENERALITES SUR LA ZONE D'ETUDE
9
Introduction
9
1.1. Aspect Physique
9
1.1.1. Le relief à l'origine du Lac Fitri
9
1.1.2. Le climat, facteur du fonctionnement du Lac
Fitri
10
1.1.3. Une pluviosité très variable
dans l'espace et dans le temps
11
1.1.4. Hydrologie du lac sous la coupe des
précipitations et du ruissellement
13
1.1.5. Géologie
14
1.1.6. Les différents types de sols
15
1.2.Aspect
humain..............................................................................
16
I.3. Aspect économique
17
I.3.1. L'Agriculture, une activité
dominante
18
I.3.2. Elevage à plusieurs systèmes
19
I.3.3. La Pêche, pratique artisanale mais aussi
professionnel
20
Conclusion
21
CHAPITRE II. MATERIEL ET METHODES D'ETUDE
22
Introduction
22
2.1. Présentation du milieu d'étude
22
2.2. Méthodes d'étude
24
2.2.1. Méthodes d'échantillonnage et de
relevés de terrain
24
2.2.2. Étude de la
régénération
27
2.2.3. Analyse des caractéristiques de la
végétation ligneuse
27
2.3. Matériels d'étude
28
Conclusion
28
CHAPITRE III. DESCRIPTION ET STRUCTURE DEMOGRAPHIQUE
DES PEUPLEMENTS LIGNEUX
29
Introduction
29
3.1. Description des principales unités de
végétation du Fitri
29
3.2. Analyse des caractéristiques de la
végétation ligneuse et de sa diversité
floristique........................................................................................
35
3.2.1. Richesse et diversité floristiques de
la zone
35
3.2.2. Fréquence spécifique
36
3.3. Description et structure démographique
des peuplements ligneux
38
3.3.1. Etat de la régénération
des ligneux
38
3.3.2. Caractéristiques des classes de hauteur
des peuplements ligneux
39
3.3.3. Répartition des principales
espèces ligneuses par classe de diamètre
40
Conclusion
44
CHAPITRE IV. ANALYSE DE LA DYNAMIQUE DE LA VEGETATION
LIGNEUSE DU LAC FITRI
45
Introduction
45
4.1. Structure, emprise agricole et taux d'occupation
du sol dans le Fitri
46
4.1.1. Taux d'occupation de sol de 1986 à
2013
46
4.1.2. Les changements globaux
48
4.2.Effets des facteurs naturels sur la
végétation ligneuse................................
59
4.3. La perception de la dynamique de la
végétation ligneuse par les populations
locales............................................................................................
60
4.4.La dynamique de la végétation
ligneuse dans la zone selon la littérature..........
63
Conclusion
65
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
68
ANNEXES
74
INTRODUCTION GENERALE
1. Contexte
Le Tchad est un pays sahélien totalement enclavé
sans littoral, d'une superficie de 1 284 000 km2 dont 60 %
est désertique. C'est l'un des pays le plus vaste d'Afrique. Il
s'étend du Nord au Sud sur 1700 km et d'Est en Ouest sur 1000 km avec
une population estimée à plus de 11 millions (RGPH2., 2009).Son
enclavement constitue un lourd handicap pour son développement
malgré son potentiel agricole et pastoral très important à
l'exemple de la région du Lac Fitri qui demeure une zone aux hautes
potentialités agro-sylvio-pastorales. Ce lac et sa zone humide
associés jouent un rôle majeur dans cette partie du Sahel pour les
activités humaines (agriculture, élevage, pêche,
transhumance, pastoralisme, commerce) et comme refuge pour la
biodiversité (oiseaux migrateurs, faune sauvage,
végétation) (Raimond et al., 2017).Cependant, ces
potentialités sont aujourd'hui fortementdégradées. Ces
dégradations sont liées aux phénomènes naturels et
anthropiques.
L'importance des zones humides tropicales est reconnue
à l'échelle internationale, tant pour leur biodiversité,
leur rôle écosystémique, que pour les ressources qu'elles
fournissent aux sociétés. A cette échelle, un constat de
déclin s'affirme aussi bien en superficie qu'en qualité.
Le lac Fitri, réserve d'eau douce, constitue aussi
l'une des réserves de la biodiversité du Tchad. Deuxième
en superficie après le lac-Tchad, il est le pivot d'une économie
régionale en plein essor. Situé à 300 km à l'ouest
de la ville de N'Djamena, moins dégradé avant les années
de sècheresse, le lac Fitri joue un rôle primordial durant les
années de faible pluviométrie.Il demeure un point de
référence et un "eldorado" pour la plus grande partie des
habitants avoisinants.Zone humide située au coeur du Sahel, le lac Fitri
devient un objet de convoitise et attire nombre d'hommes et d'animaux venus des
zones plus défavorisées aux alentours (Marty et
al.,2012).
Cependant le lac Fitri est aujourd'hui, en voie de
dégradation à cause de l'intensification des activités
agro-sylvio-pastorales. Compte tenu de son importance sur le plan local,
national et international, le lac Fitri a été proposé
comme Réserve de la Biosphère sous le Programme
« l'Homme et la Biosphère de l'UNESCO ». Il a
été également classé comme site d'importance
internationale sous la convention sur les zones humides d'importance
internationale (Convention de Ramsar) depuis 1989 par décret
n°773/PR/MTE/8 du 02 octobre 1989.
Malgré les interventions du gouvernement tchadien et
celle de la Communauté Internationale pour la sauvegarde des ressources
naturelles du lac Fitri, force est de constater que celles-ci (surtout la
végétation ligneuse) sont fortement dégradées suite
à l'augmentation des activités anthropiques. Plusieurs
études menées (PHPTC, 2007, 2009 et 2012 ;CHRISTINE R. et
al., 2012 ;BECHIR A.B et al., 2005, MARTY et al., 2012) sur le
lac Fitri montrent qu'il dispose d'un écosystème fragile qu'il
faudra protéger afin de garantir au monde rural, la
pérennité de ces ressources naturelles dont dépendent les
activités économiques et la vie sociale.
2. Problématique
Aujourd'hui, la problématique de la dynamique des
ressources naturelles en général et de la
végétation ligneuse en particulier sous l'influence de plusieurs
facteurs se pose avec acuité. L'intense utilisation de la
végétation ligneuse liée à la croissance
démographique et à l'augmentation du cheptel (toutes
espèces confondues) est l'un des principaux facteurs de leur
dégradation auxquelles s'ajoutent les variabilités
pluviométriques. Les écosystèmes de la région du
Fitri subissent ainsi une forte dégradation. En effet, l'augmentation
des populations humaine et animale est très forte pendant que l'espace
est resté le même ou parfois réduit. La
problématique de la raréfaction ou de la disparition
complète de certaines espèces ligneuses due à l'extension
des cultures, des zones d'élevage mais aussi de l'utilisation des
ligneux comme principale source d'énergie se pose.
En outre, avec l'instabilité interannuelle des
précipitations, la végétation ligneuse subit de plein
fouet l'impact des changements climatiques et de l'action anthropique, tant
dans sa biodiversité qu'au niveau de sa répartition. En raison de
l'immensité de son territoire(1 284 000 km2) dont
la plus grande partie est désertique, les études exclusivement
consacrées à la diversité floristique ligneuse ainsi
qu'à leur dynamique au Tchad sont assez rares. Celles effectuées
jusqu'à présent (Pias, 1965, 1970; Gaston, 1981, 1996; Toutain et
al., 2000 ;...) visaient dans leur majorité à
caractériser l'écosystème végétal par
l'étude de leur composition floristique, leur typologie ainsi que leur
mode d'accès. Elles restent donc descriptives, partielles et
méritent d'être complétées. Cette insuffisance de
connaissances biologiques et écologiques (structure, diversité et
dynamique) sur la végétation ligneuse de la zone constitue une
limite et un grand handicap dans l'élaboration d'un programme
d'aménagement pour une gestion conservatoire durable.
3. Cadre de l'étude
La présente étude s'inscrit dans le cadre dela
deuxième mission du projet « Grand Ecosystèmes
Lacustres Tchadiens(GELT) ». Le GELT est unprojet du Fonds de
solidarité prioritaire(FSP),fruit des efforts conjugués du
Service de la Coopération et d'Action Culturelle(SCAC) de l'Ambassade de
France,de la Direction de la Recherche Scientifique(DRS) du Ministère de
l'Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique(MESRS), du
Centre National de Recherche pour le Développement(CNRD)et du Rectorat
de l'Université de N'Djamenareprésentant leconsortium des
Universités et Instituts du Tchad.Il s'inscrit aussi dans le cadre de
renforcement des capacités des organismes nationaux de recherche et de
développement.
Le GELT est un vaste programme pluridisciplinaire de recherche
sur les cinq(5)grands écosystèmes lacustres tchadiens à
savoir, leLac-Tchad,le Lac Léré, le LacIro, leLac Fitriet le Lac
Ounianga.Bien qu'écologiquement différents, ces
écosystèmes concentrent les problématiques actuelles
relatives à l'évolution climatique et au développement
rural.
4. Objectifs, Hypothèses et
Questions de recherche
4.1. Objectif
général
L'objectif général de la présente
étude est d'apporter des informations scientifiques sur la
diversité floristique et la dynamique de la végétation
ligneuse dans la zone du lac Fitri. Il s'agit de mettre à la disposition
des décideurs d'informations scientifiques sur la
végétation ligneuse, base de l'élaboration des
stratégies de protection, de conservation et d'une gestion durable de
nos ressources naturelles. Notre modeste contribution est d'aider à
mieux protéger ce qui nous reste encore comme patrimoine naturel parmi
lequel le lac Fitri qui constitue l'un des rares échantillons du
réservoir des ressources naturelles dans la sous-région.
4.2. Objectifs spécifiques
1. Etudier la diversité floristique ligneuse de la zone
d'étude (description et structure démographique des peuplements
ligneux) ;
2. Faire une étude diachronique afin
d'appréhender la dynamique de la végétationligneuse depuis
les années de sècheresses à nos jours (1972-1984);
3. Analyser, décrire et montrer les causes de cette
dynamique;
4. Établir la carte d'occupation du sol de la zone
d'étude.
4.3. Hypothèses de
recherche
Les hypothèses de recherche de la présente
étude sont construites à partir des préoccupations
fondamentales occasionnées par les mutations agro-écologiques et
biophysiques que subit la végétation ligneuse du Fitri. Notre
hypothèse est que ces différentes mutations de l'environnement
influencent les pratiques et stratégies individuelles ou collectives des
utilisateurs de ces ressources. Aussi, afin de soutenir ce point de vue, le
travail a été organisé autour des hypothèses
suivantes :
Hypothèse 1 : Les peuplements
ligneux subissent de profondes mutations à cause de l'augmentation des
superficies emblavées, des pressions pastorales accrues, de
l'intensification de la coupede bois.
Hypothèse 2 : Les
différentes techniques des éleveurs(émondage,
élagage, effeuillage...)lors des pâturagesaériens, la
culture du sorgho de décrue ou berbéré par les
défrichages et les brûlis, les feux de brousse récurrents
et autres usagesmultiples sont les principales causes de la dynamique
régressive de la végétationligneuse.
Hypothèse 3 : Les épisodes
de sècheresses(1973-1974 et 1984-1985) ainsi que les variabilités
pluviométriques ont influencéou continuent d'influencer
négativement l'évolution de la végétation ligneuse
dans le lac Fitri.
Hypothèse 4 : Les mesures de
protection de l'environnement à travers l'interdictionde la coupe du
bois vert et la classification du lac Fitri dans les zones humides d'importance
internationale par la convention de Ramsar participent à
l'évolution progressive de la végétation dans le lac
Fitri.
4.4. Questions de recherche
La conduite des travaux centrés sur la
problématique de la diversité floristique et la dynamique de la
végétation ligneuse dans le lac Fitri est organisée autour
de la recherche d'éléments de réponse aux questions
suivantes :
ü Quelle est la composition floristique et la structure
de la végétation ligneuse du lac Fitri?
ü Quel est l'impact des activités anthropiques
(agriculture, élevage, pêche, chasse, cueillette...) sur les
ressources naturelles en général et sur les peuplements ligneux
de la zone en particulier?
ü Quels sont les facteurs directs et indirects qui
influencent cette évolution régressive de la
végétation ligneuse dans le lac Fitri?
ü Quels bilans quantitatifs et qualitatifs pourrions-
nous faire à travers l'étude phytosociologiques de la flore et de
la végétation ligneuse du Fitri?
Les réponses à toutes ces interrogations
fondamentales permettront de comprendre avec plus de clarté la
diversité floristique et la dynamique de la végétation
ligneuse de la zone. La recherche et les propositions de solutions
concrètes aux problèmes soulevés par cette étude
permettront une gestion durable de ces ressources naturelles, à travers
une meilleure protection et une bonne conservation.Les résultats obtenus
contribueront sans nul doute, à la définition d'une politique
locale et nationale plus appropriée de la protection de l'environnement
dans le cadre d'un développement durable.
Notre travail est structuré en quatre
chapitres.Après avoir présenté l'introduction, posé
la problématique, fixé les objectifs,énuméré
les hypothèses et les questions de recherche, nous allons
présenter les quatre chapitres qui constituent le corps de ce
travail :
v Le premier chapitre est consacré à la
synthèse bibliographique. Il décrit le milieu d'étude dans
ses aspects biophysiques, humains et économiques ;
v Le deuxième chapitre présente les
matériels et méthodes qui ont été utilisés
pour mener cette recherche ;
v Dans le troisième chapitre sont décrites les
principales unités de végétation du Fitriet
présentées les analyses des caractéristiques et de la
diversité floristique ligneuse de la zone ;
v Le chapitre quatreconcerne l'analyse de la dynamique de la
végétation ligneuse et les différents facteurs de la
dynamique de la végétation ligneuse dans le lac Fitri ;
v Enfin, dans la dernière partie du rapport est
présentée la conclusion générale et les
recommandations en vue d'une gestion durable des ressources naturelles de la
zone.
5.Difficultés rencontrées
La première difficulté rencontrée
était d'ordre purement organisationnel. Les étudiants qui ont
été choisis pour la mission GELT dont je salue l'initiative ont
été surprispar le voyage pour Yao qui d'ailleurs, avait
coïncidé avec les programmes de cours théoriques à
l'Université. Les thématiques retenues n'ont pas
été communiquées très tôt aux
étudiants afin de leur permettre de se documenter avant la descente sur
le terrain. Certains ont même vu leur thème modifié aucours
de la missionau Fitri et selon les réalités du terrain. La
non-maitrise de l'arabe local et de langue Bilala ne nous a pas permis de
progresser rapidement dans le travail. Il nous a été aussi
difficile de trouver des interprètes qui maitrisent le français
afin de nous aider dans la traduction lors des entretiens individuels et
defocus-groupes. En outre, l'étude a été conduite pendant
une période (janvier-février)où certaines zones
étaient inaccessibles à cause des inondationset surtout de
l'insécurité liée aux activités d'orpaillage qui y
étaient très intenses. A ces difficultés d'ordre surtout
méthodologique s'ajoutent celles d'ordre général commele
manque des moyens de transports (déplacements dans les
bibliothèques, les ministères, les directions afin de chercher
les informations), le non accès aux réseaux d'internet, la
rareté d'électricité et surtout la non maitrise d'outils
de cartographie numérique condition sine qua non pour
l'élaboration des cartes et l'interprétation des images.
CHAPITRE I. GENERALITES SUR LA ZONE
D'ETUDE
Introduction
Ce premier chapitre concernant les
généralités apporte des éléments sur le
milieu naturel que représente le lac Fitri et ses proches environs car
toute étude d'un phénomène géographique s'inscrit
dans un cadre spatial donné et concerne une population bien
définie. Nous procèderons d'abord à une
présentation générale des paramètres biophysiques
tels que le relief, le climat (précipitations, humidité,
température et vitesse des vents), l'hydrologie, la diversité des
sols et des zones qui existent au Fitri avant de présenter l'aspect
humain et économique. Ce tour d'horizon devrait permettre de mieux
appréhender les interrogations visant à comprendre la
diversité floristique et la dynamique de la végétation
ligneuse dans la zone de l'étude : celle-ci est-elle
régressive ou progressive ? Quels sont les facteurs de cette
dynamique ?
1.1. Aspect Physique
La situation de la région du Fitri à la
lisière du grand désert lui donne une importance capitale dans
l'exploitation des ressources naturelles et joue en même temps un
rôle de bouclier naturel contre l'avancée du désert.
Faisant partie des plans d'eaux permanents du Tchad et deuxième en terme
de superficie après le lac-Tchad, la superficie du Fitri peut doubler ou
tripler pendant les périodes de grandes crues. On comprend dès
lors son importance dans un environnement climatique difficile. Le niveau d'eau
est très fluctuant et ceci à cause de
l'irrégularité de ses bras dont le plus important demeure le
Batha, le bahr Zerzer, et le bahr Zilla
1.1.1. Le relief à l'origine
du Lac Fitri
La cuvette du lac Fitri est située dans la limite
intérieure du cordon sableux marquant l'ancien rivage du
paléo-lac Tchad et passant par Arbouchatak, Guéria et Delko. Elle
descend en pente douce de l'altitude 320 à 285 mètres. La
région du lac Fitri est très plane mais offre une
dépression suffisante pour permettre les écoulements.Trois grands
ensembles géomorphologiquesse partagent la région :
Ø La zone deltaïque du Batha et du
Bahr Zilla
Elle constitue une zone marécageuse dans laquelle
coulent divers bras de ces deux cours d'eaux avec leurs multiples
ramifications. Inondable pendant les crues (BIEP, 1989) à l'exception
des bourrelets de berge, la zoneest constituéed'une multitude de petites
buttes sableuses à végétation claire où sont
installés quelques villages. On y observe une formation dense
d'Acacia nilotica. C'est aussi le domaine de la culture de
décrue ;
Ø La dépression du sud-est entre le
lac Fitri et le cordon sableux
Le cordon sableux s'étire suivant la direction
sud-ouest / nord-est. Il est long de 50 km et large de 1 à 3 km. C'est
le point le plus haut du relief immédiat du lac qui surplombe la plaine
de 5 à 10m. Au bas de ce cordon, le lac forme une vaste zone elliptique
avec une succession de sols caillouteux, de vertisols lithomorphes sur gneiss
et micaschistes ou des alluvions argilo-sableuses (Pias, 1965). Toute cette
zone est caractérisée par une absence totale de points d'eau.
Ø La région sud-ouest du lac
Cette zone apparaît particulièrement
hétérogène en raison des avancées lacustres
à l'intérieur de cet ensemble dunaire où se localisent les
villages et quelques cultures pluviales. D'après Pias (1965), ces dunes
surplombent les dépressions de 3 à 4 m et sont orientées
suivant la direction nord-est / sud-ouest. Bien pourvue en
végétation, la zone est fréquentée par les
éleveurs en saison sèche.
1.1.2.Le climat, facteur du
fonctionnement du Lac Fitri
Le climat du Fitri est de type tropical semi-aride, avec des
fortes variations annuelles de la pluviosité. La saison de pluie
commence en juin et peut se prolonger selon les années jusqu'en
octobreavec une longue saison sèche (7 à 8 mois) et un vent sec
Nord-est qui souffle en permanence(Cabot, 1972). La mousson apporte,durant une
courte saison (4 à 5 mois)des précipitations variables.
Néanmoins, la présence dulac créée un microclimat
à Yao et aux alentours.Les épisodes climatiques en cours dans le
Fitri sont sous la dépendance des hautes pressions anticycloniques
subtropicales des Açores et de Sainte Hélène et de la
ceinture des basses pressions équatoriales (comme la majeure partie de
la bande sahélienne). Ce climat résulte de l'oscillation du Front
Inter--Tropical (FIT) par rapport à l'Equateur.Le régime des
précipitations est donc soumis à la rencontre de deux masses
d'air, l'une continentale sèche (harmattan), l'autre maritime humide
(mousson) qui déterminent le front intertropical (FIT) L'oscillation du
FIT produit l'arrivée de la saison pluvieuse lorsqu'il touche les pays
d'Afrique les plus septentrionaux, comme le Tchad, où il ne pleut
qu'à partir du mois de juin/juillet et redescend au mois d'octobre..
Cette alternance entre les deux masses d'air est ainsi
caractérisée par une forte variabilité interannuelle
Magrin etal.,(2012). La mousson apporte,durant une courte saison (4
à 5 mois) des précipitations variables.
Les températures moyennes varient entre 45°C au
moisde mai le jour, et 15° C au mois de janvier, la nuit.
L'évaporation annuelleest très élevée et se situe
en moyenne entre 3775 et 4000 mm. Ces moyennes sont égales à dix
fois celles des précipitationsdes années 1960 à 1997
(372,04mm) ou celles des années 1971 à 2010 qui sont de 364,2 mm
(Djibrine, 2011). La différence entre ces apports pluviométriques
et les pertes par évaporation est apportée par les
différents cours d'eau qui se déversent dans le Lac.
1.1.3.Une pluviosité
très variable dans l'espace et dans le temps
Résultantes de la confrontation de deux masses d'air de
nature différente, les pluies s'installent tardivement dans le lac
Fitri. Il pleut en moyenne 10 jours par mois en saison des pluies.
D'après les données recueillies par la Direction
Générale de la Météorologie Nationale (DGMN), il a
plu en moyenne 410,9 mm à Yao entre 1950 et 2015 avec des variations
interannuelles allant jusqu'à 776,6 en 1961 contre seulement 120,6 mm en
1975 et 217,7 mm en 1973 à Yao (Figure1). La moyenne des
précipitations sur 66 ans (1950-2015) est de 410,9 mm, avec un maximum
en 1961 (776,6 mm) et un minimum en 1993 (227,2 mm).Les pluies se concentrent
sur une courte période de juin à octobre. Celles-ci connaissent
une répartition très aléatoire dans le temps et dans
l'espace, sur une année, mais aussi sur des pas de temps interannuels
comme l'indique le graphique pluviométrique de la station de Yao.
Figure 1 : Tendance évolutive de la
pluviosité annuelle à Yao (de 1950 à 2015) selon les
moyennes mobiles sur trois ans (Béchir etal.,2016).
Le calcul des moyennes mobiles des précipitations sur
66 années d'observations avec un pas de 3 ans est
caractérisé par deux périodes marquées :
Ø Une première période de 1950-1970 qui
correspond à une succession d'années particulièrement
humides et où les moyennes mobiles fluctuent autour de la normale avec
un seul point d'inflexion en 1968 ;
Ø La période de 1970 à 2004 qui
correspond à une persistance d'années plutôt sèches
où les moyennes sont généralement au-dessous de la
normale. Les données pluviométriques de 1950 à 2015
renforcent l'assertion de certains auteurs qui signalent l'existence d'une
certaine anomalie dans le Sahel. Cette anomalie est donc réelle dans le
bassin du Fitri en ce sens que lesécarts observés montrent de
façon assez nette une répartition inégale de pluies sur
l'ensemble du bassin et ce, sur une faible échelle géographique.
Ainsi, les années 1970 marquent ce que Marty et al., (2012)
appellent une rupture climatique dans le bassin de Fitri. Ces auteurs
expliquent cette situation par le fait qu'il y a une très forte
variabilité spatiale des précipitations mal réparties dans
l'espace et dans le temps.
Ø Cette rupture climatique caractérisée
par la mauvaise répartition des précipitations dans l'espace et
dans le temps a joué en une grande partie sur la
végétation en général et celle ligneuse en
particulier. Cela s'est traduit par la dégradation de plusieurs hectares
de couverture végétale ainsi que la disparition de plusieurs
espèces végétales ligneuses dans la zone du Fitri.
1.1.4. Hydrologie du lac sous la
coupe des précipitations et du ruissellement
Concernant l'hydrologie du lac Fitri, il faut retenir que deux
facteurs sont essentiels dans l'alimentation de ses eaux :
Ø les précipitations directes sur le lac ;
Ø les apports du Batha et d'autres affluents.
Dans le contexte bioclimatique actuel difficile, les eaux de
surfacese singularisent par un endoréisme très marqué et
une extrême irrégularité des ressources en raison de la
variabilité climatique. C'est ce qui explique les variations importantes
du niveau du lac qui reçoit en moyenne un milliard de mètres
cubes d'eau répartis entre le Batha, principal affluent du lac dont les
eaux coulent trois à quatre mois par an (Lemoalle, 1996) et les
précipitations (11% des apports). Le reste des apports est
constitué par les eaux des Ouaddis El Ouadey, du Ouaddi Rimé et
du massif central tchadien, en particulier de l'Aboutelfan (Barhs
Melmelé, Zerzer, Zilla et Abourda). L'ensemble de ce bassin est
situé au Tchad. Le bassin d'alimentation du lac a une superficie totale
de 70 000km². Les deux tiers correspondent au sous bassin versant du
Bahr Batha (47300km²). Le tiers restant est constitué par les
sous-bassins du bahr Melméle (4 450km²), de Zilla (5 400
km²), de Zerzer, d'Abourda (4 400km²) sans oublier les abords du
lac (5 850km²) (CEDRAT, 1988).
Le bassin endoréique de la cuvette du Fitri est
défini par la hauteur du lac (359m) atteinte à l'échelle
de Yao, lors des bonnes années pluviométriques (Courel et
al., 1997). Le bassin hydrographique du Fitri est quatre fois plus
long que large (550km sur 150km) (Figure 2).
Figure 2: localisation des bassins
versants des affluents du Lac Fitri (Courel et al.,1997)
En outre, les différents sous-bassins versants n'ont
pas les mêmes caractéristiques physiques. Il se pose donc un
problème réel de ravitaillement du lac : le Batha reste encorede
loin, son principal pourvoyeur en eau. Par ailleurs, le lacdispose dans sa
partie Nord-Ouest, d'une importante zone d'épandage très propice
à l'infiltration. Les petits cours d'eau n'ayant pas un débit
suffisamment fort pour ruisseler ne peuvent plus alimenter le lac. Ainsi, le
réseau hydrographique, à la sortie des massifs (Guéra,
Ouaddai), suit bien les cassures de la roche ou serpente entre les blocs
d'altération granitique. Par contre, de par sa morphologie
extrêmement plane en zone d'arène, le réseau devient
diffus, digité, voire mal organisé (Pias, 1970). L'infiltration
devient à cet endroit plus important que le drainage : 38,4mm pour les
sables et 9,8mm pour l'argile (indice de Hénin). Ce
phénomène a un impact non négligeable sur le
ravitaillement du lac car les cours d'eaux creusent dans les argiles et les
lits ensablés créant ainsi de multiples méandres : une
partie importante de l'eau s'infiltre et n'est pas transportée.
1.1.5. Géologie
Du point de vue géologique, la région du Fitri
est caractérisée par la transition entre les formations
périphériques du massif central tchadien, essentiellement
métamorphiques, et les dépôts sédimentaires de la
cuvette tchadienne. Le socle, peu profond et localement affleurant au sud-est
du lac, s'enfonce progressivement vers l'ouest et le nord sous une couverture
alluvionnaire fluvio-lacustre à dominance argileuse. Le cordon sableux,
contemporain de l'extension maximale du lac Tchad (méga-Tchad) au
quaternaire récent (8000 à 6000 BP) et dont il devait marquer le
rivage, sépare aussi les unités structurales visibles à
l'affleurement (Pias, 1965).
Les roches métamorphiquesd'âge
précambrienaffleurent dans une boutonnière entre le cordon
sableux et le lac, à la faveur de multiples ravines orientées
vers le nord-ouest. Elles sont décrites par Pias (1970) comme «
série méta-volcano-sédimentaire de
Lélé-Dolko ». On les rencontre dans la plupart des forages
de reconnaissance exécutés au sud et à l'est du lac
(Aubagueset al.,2007).
1.1.6. Les différents types
de sols
Les terres inondables du bassin du lac Fitri sont des
vertisols localisésdans les dépressions argileuses. Ils sont
favorables aux cultures de décrue (Berbéré, Niebé,
Gombo, Concombre, Tomates, Patates...). On rencontre aussi ces sols dans les
bas-fonds (sols hydromorphes ou à pseudo gley).Très argileux en
surface et argilo-sableux en profondeur, ces solsinondables pendant une partie
de l'année, se trouvent sur presque tout le pourtour du lac. Leur
inondation prolongée leur apporte parfois une quantité non
négligeable de limon. Cependant, des tâches de calcaire
très minces peuvent être observées. Ils ont un PH acide en
surface (5 à 5,5) qui se fait aussi sentir plus en profondeur (BIEP,
1989). Cependant, lorsque l'inondation est très longue, ces sols ne sont
pas exploitables. BIEP (1989) distingue cinq (5) principaux types des
sols :
· les vertisols : ils sont
localisés dans les dépressions argileuses et constituent 39% de
la superficie de la zone. Ils sont favorables aux cultures de décrue
notamment leberbéré lorsqu'ils sont bien
inondés.
· Les sols steppiques sur matériaux
sableux : couvrent 19% de la surface totale. Ces sols sont
très propices aux cultures pluviales et au développement de
certaines espèces graminéennes comme Schoenefeldia gracilis,
Eragrostis tremulaet ligneusesparticulièrement
lesAcacias ;
· Les sols halomorphes sur alluvions
sablo-limoneuse à argilo-limoneuse : Ils
s'étalent sur 16% de la surface totale. Ces sols sont d'une
qualité médiocre et peuvent dans une certaine mesure servir pour
les cultures de décrue ;
· Les sols hydromorphes à pseudo-gley
ou à gley : représentent 11% de la superficie
totale. Ces sols sont inondés temporairement. Ils ont des aptitudes
culturales diverses en fonction de texture et de la position
topographique ;
· Les sols minéraux bruts ou cuirasses
(socles affleurants ou subfleurants) : ils couvrent 7% des
superficies totales. Impropres pour l'agriculture, ces sols sont
utilisés comme terres de parcours.
A ces différents types de sols correspondent trois
zones de végétation et d'activités humaines qui
régissent l'occupation de l'espace dans ce bassin humide :
Ø La zone humide effective (ou lit mineur
du lac) : c'est le domaine de la végétation
subaquatique et herbacée où se développe le bourgou
(Echinochloaspp) principale ressource pastorale dans le bassin du
Fitri ;
Ø La zone humide efficace (ou lit
majeur) : correspond à l'ensemble des sols
situés aux abords du lac. Ce sont, les vertisols de couleur noire
favorables aux cultures de décrues (berbéré,
niébé, gombo, concombres, tomates, patates...).
Ø La zone humide potentielle (terres
exondées) :les terres exondées sont
constituées de trois principaux types de sols : des
sols steppiques sableux, des sols halomorphes et des sols à
pseudogley.
1.1. Aspect humain
L'histoire du peuplement de Fitri semble être
controversée (Hagenbucher, 1968). Les documents écrits et les
traditions orales transmises par les uns et les autres sont très
fragmentaires, parfois contradictoires. Les premiers occupants ont
été attirés par le lac et ses potentialités
agricoles, halieutiques et pastorales (Marty et al., 2011). Selon les
documents écrits et la tradition orale récente, le peuplement du
Fitri s'est fait en plusieurs phases successives.Considérés comme
les plus anciens des rives du lac Fitri, les premiers occupants du Fitri sont
connus sous le vocable d'Abou Semen. Selon Hagenbucher (1968),
l'établissement des Abou Semen dans la région du Fitri
remonterait probablement vers les années 1530. A la base des populations
anciennes du Fitri notamment à sa périphérie, il faut
citer également les Saouia ou Sao qui constituaient sur le plan
démographique, le noyau le plus important. Les Saouia seraient les
ancêtres des Kotoko. Ils contrôlaient le pays au détriment
des autres groupes ethniques.
Ces populations ont elles-mêmes des origines très
hétérogènes au sein desquelles les Kouka semblent dominer.
Les Bilala forment une population composite à laquelle on accorde
communément une lointaine origine dite
« Yéménite ». Carbou (1912) affirme
que « les Bilala sont bien d'origine Kanouri ou
précisément Kanembou ». Ce seraient les
descendants d'un certain Ali Gatel Magabirnahostiles au pouvoir des
Séfouwaqui auraient quitté le Kanem pour s'installer au
début du XIVème siècle sur la rive méridionale du
Lac Tchad, à Hajer el Hamis. Ils se seraient ensuite
métissés avec des Arabes Hemat. Les Bilala ne seraient en fait
arrivés au Fitri qu'au début du XVIIème siècle
après avoir été chassés du Kanem oriental par les
Toundjour. Pour confirmer cette thèse, Carbou (1912) rappelle que les 19
premiers sultans de la généalogie des Bilala correspondent
presque entièrement avec celle des Bornouans. Le dernier sultan commun
aux Kanembou et aux Bilala fut Ibrahim Ben Denama, père d'Ali. C'est
cette greffe Kanembou avec des Arabes Hemat qui aurait donné les Bilala.
Mougaled Al Gueneimyrejoint en partie cette thèse mais précise
qu'ils seraient d'origine berbère (Carbou, 1912).
v Une population en forte
croissance
La forte croissance démographique au Fitri trouve son
explication dans la présence du lac qui attire tous les jours des
populations qui arrivent de tous les coins du pays ainsi que de la
sous-région. Ce flux migratoire n'est pas sans effets sur les ressources
naturelles. Selon BIEP (1990), il yavaiten 1989dans la région du Fitri,
42 000 personnes sédentaireset 17500 transhumants résidant 6
à 8 mois par an en petits campements avec 8 000 familles et 160
villages. Selon le BCR(1993), on compte une population de 77000 habitants pour
le département de Fitri pour une densitéde 8,95
habitants/km². Cette population est passée à 110403
habitants en 2009(RGPH,2009) avec une densité de 12,84
habitants/km² pour un taux d'accroissement annuel de 2,27 % (Tableau
1).Avec un tel rythme de croissance, il se pose déjà un
problème d'accès et degestion des ressources naturelles.
Tableau 1 : La population résidante dans le
Département de Fitri
Superficie (km²)
|
1993
|
2009
|
8 600
|
Population
|
Densité
|
Population
|
Densité
|
|
|
|
|
77 000
|
8,95
|
|
110 403
|
12,84
|
Source : INSEED, BCR 1993 et Résultat
définitifs du RGPH II, 2009
I.3. Aspect économique
Le lac Fitri occupe une place capitale dans la vie
économique de la zone. La quasi-totalité des activités
économiques est liée à son existence.L'économie est
essentiellement axée sur le secteur primaire et intéresse la
quasi-totalité de la population. L'agriculture et l'élevage
viennent en tête puisqu'ils occupent 93 % de la population active suivis
de la cueillette etde la chasse (4%) ainsi que du secteur informel 3 % (BCR,
1987).
I.3.1. L'Agriculture, une
activité dominante
L'agriculture est une activité qui occupe une partie
importante de la population active. En effet,les Bilala sont des agriculteurs
par excellence car plus de 80% de cette population pratique cette
activité. La population pratique une agriculture itinérante sur
brûlis avec un niveau d'équipement très faible. Les moyens
de production sont rudimentaires et limités (daba, hache et houe). La
charrue est utilisée de manière irrégulière sur des
sols très fragiles. Il s'agit d'une agriculture de subsistance
basée sur la céréaliculture (mil pénicillaire,
sorgho pluvial et de décrue...) destinée à
l'autoconsommation locale sauf le surplus est vendu pour subvenir aux besoins
familiaux.
Les systèmes de culture sont adaptés aux
pulsations du lac et aux variations des précipitations. Ainsi, au
début de la saison des pluies, les agriculteurs quittent les villages
« mères », proches du lac où ils passent la saison
sèche pour rejoindre sur le « goz », les
villages agricoles. Ils y séjourneront près de trois mois avant
de retourner aux abords du lac où ils pourront s'adonner à la
pêche, à la culture de berbéré ou au
maraîchage. Ces mouvements occasionnent un véritable
déplacement des populations.
Les systèmes de production agricole pratiqués
sont nombreux et varient selon les zones et les conditions climatiques et
édaphiques. Les cultures pluviales (mil pénicillaire et sorgho
pluvial) sont pratiquées sur sols sableux et argileux localisés
dans la partie nord et nord-est du département. La culture du sorgho de
décrue, localement appelée berbéré occupe les
dépressions inondables et les abords du lac Fitri, elle cohabite avec
les cultures maraîchères installées également sur
les iles. Les surfaces cultivées en année normale sont
estimées à 15 000 et 20 000 ha et le rendement moyen à 900
kg/ha (BIEP , 1990).Les principales spéculations sont par ordre
d'importance : le sorgho, le mil pénicillaire, le maïs pour
l'alimentation, le berbéré, l'arachide, le niébé et
le sésame comme cultures de rente. D'introduction récente (en
1980), les cultures maraichères occupent près de 300 ha (BIEP,
1990) et sont beaucoup plus localisées dans les îles comme Moudo I
et II mais aussi aux abords du lac et à Yao. On y cultive la patate
douce, le concombre, le piment, le gombo, les oignons, les pommes de terre, les
pastèques, la carotte... Les produits de récolte permettent
d'améliorer le menu quotidien mais aussi de générer de
recettes pendant la saison sèche.Les cultures maraîchères
concernent en revanche le gombo, le concombre, la tomate, les pastèques,
le haricot et plus récemment la patate douce, la carotte, l'oseille et
le piment.
I.3.2. Elevage à plusieurs
systèmes
Pratiqué par les Arabes et les nomades qui
représentent environ 28% de la population totale de la région,
l'élevage est du type extensif qui mobilise aussi bien les hommes, les
femmes que les enfants. Autrefois, l'élevage réussissait
médiocrement autour du lac car l'extrême humidité
favorisait la multiplication des mouches, des taons et des moustiques ainsi que
la glossine responsable de nombreuses pertes animales. Seuls les animaux
adaptés à de telles conditions pouvaient y survivre. Mais depuis
les grandes sécheresses des années 1970 et la
dérèglementation de l'accès au lac qui s'en est suivie, le
Fitri est devenu une zone de passage et un lieu de séjour de saison
sèche pour de nombreux éleveurs transhumants. Ceux-ci descendent
dans la zone surtout en saison sèche où ils exploitent les
pâturages aquatiques et de décrue et les pâturages secs en
bordure du lac.
En effet, plusieurs systèmes d'élevage
cohabitent dans la région et se disputent l'accès et
l'exploitation des ressources pastorales : le système transhumant,
le système semi- transhumant et le système sédentaire. La
présence d'un tel lac d'eau douce riche en ressources naturelles (eau et
pâturages) attire de nombreux éleveurs. Le système
agro-pastoral sédentaire est pratiquépar les Bilala qui associent
l'activité d'élevage à l'agriculture.Ils investissent une
partie de leurs revenus de vente des récoltes dans l'achat de bovins ou
de petits ruminants qu'ils confient aux éleveurs transhumants pendant la
saison des cultures. Le bétail constitue ainsi une garantie permettant
de faire face aux situations difficiles (dot, déficit
céréalier...). Certains bovins sont aussi gardés au
village comme animaux de bât.
En raison des mobilités permanentes des éleveurs
dans cette zone, les effectifs réels du cheptel dans le lac Fitri sont
mal connus. Selon le BIEP (1989), on dénombre 100 000 bovins (dont
87000 pour les seuls éleveurs transhumants, 195 000 petits ruminants
(dont 130 000 pour les transhumants) et environ 6000 animaux de selle ou
de bât (âne, chevaux, et dromadaires). Ces chiffres paraissent
très éloignés des potentialités réelles
de la région aujourd'hui. L'espèce animale dominante dans la
région est l'espèce bovine à robe rouge noire et noire
rouge blanche (Al Hassine, 2016).
I.3.3. La Pêche, pratique
artisanale mais aussi professionnel
La pêche est pratiquée toute l'année de
manière artisanale par plus de 1000 pêcheurs au gré des
fluctuations du lac. Elle est l'oeuvre des professionnels venus d'ailleurs et
par les riverains du lac (une vingtaine de villages) à des
périodes bien indiquées. L'ouverture officielle a lieu en
novembre et la fin coïncide avec l'arrivée des eaux du Batha. En
saison sèche, période d'étiage du lac, les pêcheurs
s'installent sur les îles. Pendant la saison des pluies, période
de reproduction des poissons, la pêche à l'intérieur du lac
est interdite. Le lac Fitri comme on l'a vu précédemment est peu
profond (entre 0 et 4 mètres). Il n'est donc pas adapté aux
espèces plus exigeantes comme l'Altes Nurse et Mormyrus
sp qui ont aujourd'hui disparu (Agard, 2002). Les principales
espèces pêchées dans le lac sont par ordre
d'importanceleClarias sp (silures), suivis duTilipia sp,
Shilbe mystus (de très petite taille), Protopterus
anectensis (poisson chat de vase), Gnatonemus niger,
Polypterus sp. (aux écailles trop dures) et le
Cynodontissp.
Le matériel de pêche est constitué de
pirogueset de palangres (lignes d'hameçons tendues à l'aide de
piquets). Avec trois palangres de 1 000 hameçons, un pêcheur peut
capturer chaque semaine un sac de 25 kg de poisson durant les bonnes
années, contre le tiers les mauvaises années.Certains
pêcheurs possèdent jusqu'à une vingtaine de palangres.
Très variable selon l'année, la production annuelleest mal
connue. Le service de Pêche à Yao qui contrôle efficacement
la délivrance des permis et le paiement des taxes sur le marché
n'arrive pas à suivre les circuits informels de commercialisation du
poisson séché et fumé qui vont à N'Djamena et
jusqu'au Nigéria. En 2006, la production serait de 350 tonnes de poisson
dont le tiers serait vendu aux grossistes locaux sous forme
séchée ou fumée. Cette production générerait
des revenusnon négligeables et représente une source de
protéines indispensable à la population.Aujourd'hui, on assiste
à une adoption des textes et lois sur la gestion de la
biodiversité et de l'environnement à cause des changements
climatiques, d'une forte anthropisation et de l'augmentation du nombre de
pécheurs qui viennent duNigeria, du Niger, du Mali...Cette augmentation
du nombre des pêcheurs accompagnée de plusieurs autres facteurs
entrainent la raréfaction des poissons dans le Fitri.
I.3.4. La cueillette : une activité
d'appoint pour la sécurité alimentaire
Au Tchad, la région du lac-Fitri demeure l'une des
régions où la famine touche une grande partie de la population.
La cueillette est donc une activité traditionnelle pratiquée pour
parer à des situations de carences alimentaires. La
végétation naturelle de la région du lac Fitri constitue
une source importante de produits de cueillette. Les principaux produits de
cueillette sont les céréales, les fruits et les légumes
sauvages. De la racine aux feuilles en passant par les fruits et les fleurs,
les différentes parties de la plante sont concernées par la
cueillette. Plusieurs espèces ligneuses et herbacées font
régulièrement l'objet de la cueillette. Les espèces les
plus sollicitées sont : Balanites aegyptiaca, Hyphaene
thebaica, Ziziphus mauritiana, Tamarindus indica,
Accacia seyal,... Ces produits complètent non seulement le
régime alimentaire mais génèrent également des
revenus monétaires non négligeables. Certaines plantes
spontanées comme Corchorusolitorius, Gynandropsis gynandra, Cassia
obtusifoliasont également très sollicitées à
cause de leurs feuilles consommées comme légumes. Quant aux
graminées sauvages, le « Kreb »
(Panicum laetum, Echinocloa colona) et le riz sauvage
(Oryza Barthii, Oryza longistaminata) jouent un grand rôle dans
l'alimentation pendant la période de soudure où ces plantes
subissent de fortes pressions humaines. Des fourmilières sont parfois
éventrées pour ramasser du kreb (Panicum laetum, Echinocloa
colona) ou autres céréales accumulés par les
fourmis.
Il est important de souligner en outre que la récolte
de la gomme dans le département n'est pas très
développée suite à la disparition des Acacia
senegalensis dans le sud du département. Seule la gomme de
qualité moindre d'Acacia seyal est récoltée au
sud-est du département, dans la zone du socle.
Conclusion
La connaissance du milieu physique est importantedans
l'étude de la diversité floristique et la dynamique de la
végétation ligneuse. Ce chapitre nous a permis de connaitre les
différents aspects qui caractérisent la zone d'étude.
Situé en pleine zone sahélienne, le lac offreau rythme des crues
et des décrues, des conditions favorables au développement
d'intenses activités agricoles, pastorales et piscicoles.
L'accroissement rapide de la population n'est pas à perdre de vue car la
dégradation des écosystèmes ne résulte pas
seulement des conditions naturelles mais aussi anthropiques.Les
écosystèmes lacustres du Fitri demeurent très sensibles
aux aléas climatiques. Pour que ce géo-systèmegarde un
équilibre qui permet aux ressources naturelles de se
régénérer, il faudra une pression anthropique
modérée et une gestion rationnelle adaptée et durable.
CHAPITRE II. MATERIELS ET METHODES
D'ETUDE
Introduction
Ce
chapitre présente la méthodologie utilisée dans cette
étude concernant la diversité floristique et la dynamique de la
végétation ligneuse dans la région du lac Fitri. Selon le
dictionnaire « les mots de la géographie », la
méthodologie est définie comme l'ensemble de méthodes
mises en oeuvre dans une recherche de façon réfléchie et
explicite. Il s'agit de l'ensemble de démarches et des techniques qui
permettent de rassembler les données permettant de produire le
raisonnement. Adopter une méthodologie de recherche c'est montrer les
voies et moyens qu'on met en oeuvre pour réaliser l'étude qu'on a
entreprise.
Les méthodes d'étude de la
végétation varient d'une région à une autre, une
école à une autre selon les zones d'études et aussi en
fonctions des paramètres qu'on veut mettre en exergue.
2.1. Présentation du
milieu d'étude
La figure 3 présente la localisation de la zone
d'étude. Située au sud-ouest de la région du Batha, elle
fait partie des zones rurales du Tchad à fortes potentialités
économiques. En effet, le Département de Fitri s'étend
approximativement entre le 12ème et le 13ème
parallèle Nord et le 17ème et 18ème
méridien Est. Il est limité au Nord par le
Département du Batha Ouest (13ème parallèle
Nord), à l'Est par la Sous-préfecture d'Abtouyour (Axe
Malabé-Alifa) au Sud par le Département du Dababa (axe
Abourda-Gueria) et à l'Ouest par le Département du Bahr El ghazal
(17èm méridien Est). Le Chef-lieu du
Département est Yao et sa population totale était estimée
à 352 000 habitants sédentaires et de 44 064
transhumants en 2009 (RGPH 2, 2009).
Figure3. Carte de localisation de la zone d'étude
2.2. Méthodes
d'étude
2.2.1. Méthodes
d'échantillonnage et de relevés de terrain
Mener une étude dans un milieu aussi peu connu comme le
lac Fitri, dont il existe rarement des écrits scientifiques, impose des
méthodes qui doivent tenir compte de plusieurs aspects du
phénomène étudié en faisant recours à
d'autres disciplines connexes. Et devant un sujet aussi vaste et complexe que
la diversité floristique et la dynamique de la végétation
ligneuse, une orientation judicieuse de recherche s'était
avérée nécessaire. Plusieurs études ont
été effectuées sur la diversité floristique et la
dynamique de la végétation ligneuse dans le Sahel et au Tchad.Au
Tchad, les premières connaissances botaniques ont commencé en
1869 avec les récoltes des échantillons de Natchigal, en 1900 par
la mission Fourreau puis Corti, Gillet, et Maire (Quézel, 1958, Lebrun
et al., 1972). D'autres récoltes effectuées par des
agro-pastoralistes dans les années 2000 ont enrichi les collections
antérieures qui constituent de nos jours l'herbier du Laboratoire de
Recherches Vétérinaires et Zootechniques (LRVZ), le seul herbier
organisé et structuré au Tchad (Béchir et al,
2012). Cependant, la dynamique de la végétation ligneuse du Fitri
n'a pas encore fait l'objet d'une étude approfondie. Ainsi, l'essentiel
de notre approche a consisté à recueillir des informations
bibliographiques conséquentes et à collecter des données
lors des travaux de terrains.
Etape1 : La recherche documentaire
Une revue de la documentation a permis de recueillir des
informations relatives à la zone d'étude (rapports
d'études, ouvrages, rapports de projets, rapports annuels des services
techniques, etc.) afin de mieux appréhender le contexte de
l'étude et d'en acquérir une bonne connaissance.
Etape2 : L'élaboration du
questionnaire puis les enquêtes de terrain
L'élaboration du questionnaire a été
faite selon l'objectif de l'étude. Lesquestions ont été
basées sur la perception des populations sur l'état de la
végétation ligneuse etla dynamique des peuplements ligneux dans
le lac Fitri ces 30 dernières années (de 1980 à nos
jours). Des entretiens ont également eu lieu avec des personnes
ressources (Préfet, Sous-préfet, Sultan et ses notables, les
chefs de services en charge de l'environnement notamment les chefs de service
des eaux et forêts, de l'environnement, de l'agriculture etc.).Les
rencontres avec ces différentes autorités administratives et
traditionnelles nous ont permis de mieux cerner les acteurs principaux, la
problématique et les enjeux liés à l'évolution de
la végétation ligneuse au Tchad en général et dans
la région du lac Fitri en particulier.
Etape 3 :Étude de la
végétation ligneuse (la collecte des données)
L'étude de la végétation ligneuse a
été réalisée selon la méthode des
relevés phytosociologiques de Braun Blanquet (1963). La structure des
populations a été évaluée à partir
d'échantillonnage aléatoire sur des parcelles unitaires.
L'unité d'échantillonnage est une placette carré de 25 m
×25 m soit 625 m2 pour les forêts galeries ou 30 m
×30 m soit 900m2 pour les formations savanicoles et les
forêts claires Ouedraogo(2009) (Figure 4). Les placettes sont
disposées le long des transects croisés de 10 km chacun,
équidistants de 500 m et orientés nord/sud et est/ouest (Figure
5). Les principaux critères qui ont guidé le choix des
placettesont été la topographie du terrain (sommet, versant,
bas-fond, plaine) et la représentativité floristique des
différentes unités de végétation. Les
relevés de terrain ont été effectués par la
méthode de sondage orienté utilisée par Ouedraogo (2006)
et Béchir (2010). L'inventaire a concerné les arbres, arbustes et
lianes dont le diamètre à 1,30 m du sol (D1,30) est
supérieur ou égal à 5 cm.
25 m
25 m
5m
5 m
25m
3 30 m
30m
Figure4 : placettes de 30m x 30m telles que
réalisées sur le terrain
Figure 5. Carte des transects effectués et des
placettes
Les paramètres mesurés ont
été : la circonférence du tronc à hauteur de
1,30 m et la taille de l'individu. La circonférence du tronc a
été mesurée avec un ruban gradué qui selon Rondeux
(1999) donne des valeurs moins ambiguës que la mesure du diamètre.
Le diamètre a été ensuite calculé par la formule D
= Circonférence/ð. La hauteur des arbres a été
mesurée à l'aide d'un décamètre ou estimée.
La structure verticale de la végétation a été
appréciée sur la base de la représentation des
espèces en fonction de leur hauteur.
La structure verticale des populations adultes a
été construite en répartissant les individus en 13 classes
de hauteur qui sont : [0-0,5 m[, [0,5-1m[, [1-1,5 m[, [1,5-2 m[, [2-2,5 m[,
[2,5-3 m[, [3-3,5 m[, [3,5-4 m[, [4-4,5 m[, [4,5-5 m[, [5-5,5 m[, [5,5-6 m[ et
> 6m. La classe [0-0,5 m[ comprend des rejets et de jeunes individus de
semis. Le choix de ces différentes classes tient compte des travaux
antérieurs de Ouédraogo (2006 ; 2009). Afin d'obtenir une
modélisation qui exprime la tendance théorique de la dynamique
des populations ligneuses, des courbes de tendance exponentielle ont
été associées aux histogrammes pour avoir une
modélisation qui exprime la tendance théorique de la dynamique
des populations.
2.2.2. Étude de la
régénération
A l'intérieur de ces mêmes placettes, des
placeaux de 5 m x 5 m ont été installés à
l'intérieur (figure 4)de chaque placettepour étudier la
régénérationselon Gounot(1969) et Long(1974). A
l'intérieur de chaque placette, tousles individus dont le
diamètre à 1,30 m du sol estinférieur à 5 cm sont
considérés commejeunes individus et ainsi
comptabilisés.Les espèces ont été ensuite reparties
en 15 classes de diamètre : [0-5 cm[ ; [5-10 cm[ ; [10-15
cm[ ; [15-20 cm[ ; [20-25 cm[ ; [25-30 cm[ ; [30-35
cm[ ; [35-40 cm[ ; [40-45 cm[ ; [45-50 cm[ ; [50-55
cm[ ; [55-60 cm[ ; [60-65 cm[ ; [65-70 cm[ ; [70-75 cm[ et
76 cm.
D'autres informations à l'exemple du passage de feux de
brousse, la topographie, la nature des sols, le taux de couverture des
espèces ligneuses, le degré d'anthropisationont été
également notées.
2.2.3. Analyse des
caractéristiques de la végétation ligneuse
Elle a été faite sur la base des calculs des
paramètres quantitatifs de caractérisation de la
végétation qui sont : la densité et la
fréquence des différentes espèces.
Ø La densité
C'est le nombre d'individus toutes espèces confondues
par unité de surface. Sa valeur relative est calculée de la
manière suivante :
Nombre d'individus de l'espèce
Diversité= x 100
Nombre total d'individus
Ø Dominance relative :
elle exprime le fait qu'une espèce imprime son caractère à
une communauté végétale à laquelle elle
appartient.
Valeur absolue de la dominance de l'espèce
Dominance relative (%) =
x 100
Somme des valeurs de la dominance de
toutes les espèces
Ø Fréquence
relative
La fréquence relative (Fi) des espèces donne le
pourcentage de relevés dans lesquels chaque espèce a
été rencontrée. Elle a été calculée
selon la formule suivante :
Fi= ni / N x 100
Fi : fréquence (%) de l'espèce i ; ni
= nombre de relevés où l'espèce i est
présente ; N = nombre total de relevés.
Étape 4 : Le traitement et
l'analyse des données
Les données collectées sur le terrain à
travers les mesures dendrométriques et les relevés
phytosociologiques ont été traités et analysés
à l'aide des logicielsMicrosoft Excel, Quantum GIS, MapInfo. Le logiciel
Envi 4.1 a été utilisé pour le traitement des images pris
lors des travaux de terrains. Ainsi, nous nous somme intéressé
à l'analyse de la liste générale (richesse) de la flore de
la zone du Fitri en mettant en évidence les espèces à
statut particulier. Il s'agit des espèces rares et menacées
d'extinction et les espèces exploitées comme bois d'oeuvre ou de
construction.
2.3.
Matériels d'étude
Le matériel technique de l'étude qui a servi
à faire l'inventaire floristique de la zone est constitué d'un
ruban gradué pour mesurer les aires de relevés, un
récepteur GPS(Global Positionning System) `'Garmin 82'' pour enregistrer
les coordonnées géographiques des différentes zones
d'étude, un papier journal pour la constitution d'herbier, une bande
adhésive pour numéroter les échantillons
récoltés, des fiches de collecte des données, un
décamètre, un ciseau, un gant, une carte topographiqueau 1/200
000e du lac Fitri, des images satellitaires (Landsat 1986 et 2013),
un appareil photo numérique, des logiciels SIG.
Conclusion
Aujourd'hui, les ressources naturelles et surtout la
végétation ligneuse ont beaucoup évolué sous
l'effet de plusieurs facteurs. L'intense utilisation de la
végétation ligneuse, liée à la croissance
démographique, en est le principal facteur, auquel s'ajoutent les
variabilités pluviométriques d'une année à l'autre
et aussi de l'augmentation des activités pastorales.
Dans ce chapitre, nous venons de présenter les
informations qui donnent une vue d'ensemble sur la méthodologie du
travail du moins celle utilisée par les chercheurs pour les mêmes
études car nous savons que les méthodes varient d'une
thématique à une autre.
CHAPITRE III. DESCRIPTION ET
STRUCTURE DEMOGRAPHIQUE DES PEUPLEMENTS LIGNEUX
Introduction
Le Département de Fitri est une zone qui porte une
végétation caractéristique des milieux semi-arides,
soumise à l'alternance des périodes humides et sèches.
Relativement abondantes, la flore et la végétation ligneuses de
la zone de Fitri sont très affectées par les changements
climatiques et les pressions anthropiques tant dans leur biodiversité
qu'au niveau de leur répartition. Essentiellement arbustives peu denses,
plus ou moins arborées à boisées, ces différentes
formations présentent également plusieurs faciès. Selon la
couverture végétale et la diversité floristique, plusieurs
unités de végétation ont été
identifiées dont les principales sont : les savanes boisées,
les formations des solsdes « naga », les steppes
arbustives, les prairies marécageuses et les forêts galeries. Ces
différentes formations se répartissent en auréole selon
les gradients nord/sud et est/ouest comme la description est faite dans ce
chapitre.
3.1. Description des principales
unités de végétation du Fitri
Ø Les savanes boisées
Elles sont localisées sur des substrats d'origine
sédimentaire dans une zone de transition entre les sols ferrugineux
tropicaux au sud et les sols bruns steppiques au nord. La strate ligneuse est
dominée par Combretum glutinosum, Anogeissus leiocarpus, Acacia
senegal, Balanites aegyptiaca, Celtis toka, Albizzia amara, Sterculia setigera,
Hyphaene thebaica et Terminalia avicenioides.La strate
herbacée est dominée par Cenchrus biflorus, Eragrostis
tremula, Schoenefeldia gracilis, Hyparrhenia sp., Cymbopogon giganteus
(Photo 1).
Ø Les unités de végétation
sur sols des «naga »
Ces formations végétales sont une variante
beaucoup plus clairsemée des unités des savanes boisées et
se localisent sur les bourrelets et dans les zones d'épandage, à
l'arrière du cordon sableux. Elles se rencontrent également au
sud-ouest et à l'ouest du Département du Fitri où elles
forment une mosaïque entre les sols steppiques sableux et les
dépressions argileuses. Selon Pias (1965), ces types de
formationoccupent également le socle affleurant et les sols argileux
à argilo-sableux à nodules calcaires. Le terme
« naga » est un mot arabe équivalent de
« hardé » en foulfouldé. Il
désigne une végétation caractérisée par
quelques ligneux (arbres et arbustes) très éparses et à
très faible recouvrement avec une forte proportion de sol nu. Les
formations des sols des « naga » ne sont pas la
résultante des facteurs climatiques mais au contraire elles sont dues
à des facteurs pédologiques particuliers. Le ligneux dominant est
Balanitesaegyptiaca auquel se trouvent associées Acacia
seyal, Dalbergia melanoxylon, Boscia senegalensis, Acacia seyal, Capparis
decidua, Maerua crassifolia, Capparis corymbosa, Lannea humilis... (Photo
2).La strate herbacée discontinue et de petite taille est dominée
par Schoenefeldia gracilis, Aristida stipoides, Eragrostis tremula et
Cymbopogon giganteus en bordure des dépressions argileuses.
Photo 1 : Formation à Balanites aegyptiaca
en peuplement pur au nord-est du Fitri
(cliché: Tchoudiba B), 06/02/2017
Photo 2 :Formation sur sol des
« Naga » à Acacia seyal
(cliché : Tchoudiba B), 06/02/2017
Ø Les formations des steppes à
Acacia seyal sur sols argilo-limoneux
Elles sont localisées sur des vertisols à
inondation non excessive au voisinage des cours d'eau où elles alternent
avec les formations des « naga ». Elles sont
également localisées à proximité du Lac Fitri dans
la zone deltaïque du Batha(Pias, 1965) et sur la bordure sud-ouest du lac
où de grandes superficies de savanes ont été
défrichées au profit des cultures de berbéré. Les
espèces ligneuses dominantes sont Acacia seyal et dans une
moindre mesure Acacia nilotica en peuplement presque
monospécifique. Dans les zones exondées on note la
présence d'Anogeissus leiocarpus et de Bauhinia
rufescens. La strate herbacée est dominée par
Schoenefeldia gracilis dans la partie la plus sèche et
Panicum laetum, Brachiaria laeta, Sorghum arundinaceum, vetiveria
nigritana, Cymbopogon giganteus, et Hyparrhenia sp.dans les zones
les plus inondées ;
Ø Les formations des savanes à Acacia
nilotica sur sols argilo-limoneux
Elles sont localisées en bordure du lac et des zones
à inondation temporaire ou des dépressions(Photo 3). En raison
des contraintes édaphiques, la strate ligneuse est essentiellement
dominée par Acacia nilotica en peuplement presque
monospécifique. Sur les berges le long des cours d'eau, la strate
ligneuse est dominée par Acacia seyal, Balanites
aegyptiaca, Acacia tortilis auxquelles se trouvent
associées Capparis decidua, Capparis corymbosa, Maerua crassifolia,
Dalbergia melanoxylon, Boscia senegalensis, Calotropis procera et
Cordia sinensis.
Photo 3 :Forêtà Acacia
niloticapresque monospécifique aux abords du lac sur un sol
argilo-limoneux (cliché : Tchoudiba B),06/02/2017
La strate herbacée de petite taille, discontinue et
éparse est dominée dans la partie exondée plus sableuse
par Schoenefeldia gracilis, Cenchrus biflorus, Aristida stipoides,
Eragrostis tremula, Aristida mutabilis et quelques rares reliques
de Cymbopogon giganteus en bordure des dépressions argileuses.
En revanche les zones les plus inondées sont colonisées par
Panicum laetum, Echinocloa colona, Bracharia laeta, Oriza barthii et
des Andropogonées comme Sorghum arundinaceum,Hyparrhenia spp.,
Voscia cuspidata...
Ø Les forêts galeries
Elles sont situées dans le prolongement des affluents
du Fitri. Ces parcours augmentent de superficie lorsque les sols deviennent
alluvionnaires, argilo-limoneuses ou argilo-sableuses. Ces sols sont
généralement cultivés quand ils sont faiblement
inondés. Ces types d'unités pastorales sont composés de
grands arbres et d'un sous-bois bien fourni. En plus des espèces des
prairies marécageuses, on peut citer Tamarindus indica, Balanites
aegyptiaca, Acacia albida, Anogeissus leiocarpus, Ficus platyphylla et
Ficus gnaphalocarpa. Parmi les arbustes on note, Ziziphus
mauritiana, Albizzia chevalerie, Acacia ataxacantha, Bauhinia rufescens, Boscia
senegalensis, Capparis tomentosa, Capparis corymbosa... La strate
herbacée très lâche est représentée par
Achyrentes aspera, Dicliptera verticilata et Panicum
laetum...
Ø Les peuplements des Rôniers ou
Rôneraie
Le Borassus aethiopium ou Rônier est un arbre
très faiblement répandu ou à faible distribution dans la
zone. On la trouve le plus souvent à l'état d'individus ou de
peuplements isolés dans la partie sud du lac (îles de Djoré
et Moyo), à l'ouest de Yao à Doumourou ou autour des
agglomérations (Photo 4).
Photo 4 : Peuplement de Borassus aethiopium en
îlot sur l'île de Djoré
(cliché : Béchir A.B),18/04/2017
A Djoré, et Moyo, ces peuplements apparaissent
très bien conservés. Borassus aethiopium y forme des
colonies assez denses sur sols à texture lourde très riche en
litière. Dans les zones à très forte concentration
humaine, des individus de Borassus aethiopium sont
systématiquement exploités pour leur bois utilisé dans les
constructions (car la planche du rônier est utilisée comme
charpente des maisons), soit simplement abattus lors des défrichages.Les
groupements à Borassus aethiopium sont ainsi
remplacéespar d'autres espèces ligneuses ce qui fait que leur
aire de distribution est strictement limitée à des zones de
refuge difficilement accessibles. Ils sont parfois remplacés dans
certaines zones par Hyphaene thebaica, espèce
déjà très bien représentée dans le lac.
Ø Les formations à Hyphaene
thebaicaou peuplement de Dommeraie à l'ouest
Sur sols steppiques (argilo-sableux) en bordure ouest du lac,
on observe des peuplements assez dégradés d'Hyphaene thebaica
sur plusieurs hectares (Photo 5). Ils occupent l'ouest du Fitri entre
Amdjamena-Bilala en passant par Souar et Wagna et continue de coloniser les
espaces aux alentours soumis aux mêmes variations interannuelles de crue.
Selon les autochtones, c'est autour de la mare de Matala à
proximité nord-est du village Wagna que se sont développée
les grandes forêts de Palmier doum de la zone ouest.
En effet, Hyphaene thebaica est capable de supporter
durant une courte période une submersion de sa partie inférieure,
lui permettant d'occuper des espaces lacustres difficilement colonisables par
les autres espèces végétales. Les terrains qui favorisent
sa croissance sont en majorité perméables, à texture
sableuse, à faible teneur en argile et en limon (Guédon, 2016).
Ces sols sont localisés dans la zone de Wagna, Takété et
Seita dans le Fitri où existent des dommeraies en très mauvais
état de conservation. Il reste un peuplement en pleine
régénération avec le développement des peuplements
denses d'Hyphaene thebaica lié au remplissage plus
fréquent des mares au nord-ouest du lac Fitri (Tashi et
al.,2017).
Dans l'espace, les images satellitaires nous montrent les
situations antérieures et actuelles du Fitri. On constate sur les images
et les témoins des habitants que depuis les années 1980, le lac
s'écoule vers l'ouest alors que c'était une situation inverse
avant les années 1980. Cet écoulement vers l'ouest est sans nul
doute, l'élément ayant facilité le développement de
la grande forêt d'Hyphaene thebaica ou Palmier
« doum » ainsi que l'installation d'une ceinture
d'Acacia nilotica autour du lac dans des endroits inondables.
Photo 5 : Peuplement monospécifique d'Hyphaene
thebaica à l'ouest du Fitri
(cliché : Tchoudiba B), 06/02/2017
Photo 6 : Faciès à Calotropis procera
parsemé de touffe de doum sur sol sableux très
dégradé (cliché : Tchoudiba B),06/02/2017
Cette image (photo 5) prise entre Souar et Wagna à
l'Ouest du lac, présente une doummeraie sur sol sablo-argileux,
(forêt de doum :Hyphaene thebaica) à perte de vue mais qui se
trouve aujourd'hui dans un état de dégradation avancé et
ceci à cause de plusieurs facteurs. De prime abord, il faut noter que la
filière doum est en nette expansion dans cette zone. En effet, elle est
pratiquée par des collecteurs de noix de doum qui sont les fils du
terroir mais qui viennent le plus souvent de N'Djamena et qui ont fait fortune
dans ce secteur. Ils ont sur le terrain des ramasseurs qui sont recrutés
parmi les populations les plus pauvres du Fitri et qui ont du mal à
subvenir à leur besoin élémentaire et ceci pendant une
longue période de l'année. Hormis cette filière qui
génère assez de fortune aux intéressés, il est
important de souligner qu'il existe aussi d'autres facteurs de destruction de
cette végétation qui sont entre autres les insectes, les
pachydermes (éléphants), les feux de brousse ainsi que les crues
du lac qui ont tendance ces derniers temps à s'étaler beaucoup
plus d'Est en Ouest.
Ø La végétation aquatique ou
prairie marécageuse
Elle se développe sur sols argileux très
hydromorphes, inondés sur de vastes surfaces presque toute
l'année. La strate graminéenne est composée de
Hyparrhenia baguirmica,Andropogon gayanus et Setaria pumila.
Sur les endroits moins inondés en bordure du lac, on observe
vetiveria nigritana, Ipomea aquatica, Aeschynomène
elaphroxylon, et dans les zones les plus inondées Echinocloa
pyramidalis, Echinocloa stagnina (Bourgou) et Oryza barthii. Dans
les eaux profondes, le plan d'eau est colonisé par Nymphea lotus,
Voscia cuspidata,Ludwigia stolonifera, Oryza barthii, Ipomea aquatica,
Pistia stratioides et Aeschynomène elaphroxylon (photo
7).
Photo 7 : Prairie marécageuse à Echinocloa
stagnina et Nymphea lotus au premier plan (photo : Tchoudiba
B),18/04/2017
3.2.
Analyse des caractéristiques de la végétation ligneuse et
de sa diversité floristique
La composition et la structure de la végétation
ligneuse varient considérablement selon les localités,les
facteurs environnementaux et les perturbations anthropiques. Elles informent
sur des évolutions qualitatives et quantitatives des
phytocénoses. Dans cette étude, l'analyse de la diversité
de la flore ligneuse du Fitri organisée autour de ce lac
endoréique au milieu d'une zone sèche a été
effectuée afin de mieux appréhender son état actuel et sa
dynamique.En effet, par leurcomposante végétale, les ressources
biologiques constituent un immense réservoir de diversité et
jouent un rôle fondamental dans la satisfaction de nombreux besoins de
base des populations locales (RAPAC, 2007).
3.2.1.
Richesse et diversité floristiques de la zone
La flore ligneuse de la région du lac Fitri
comparée à d'autres de la sous-région est relativement
pauvre mais fortement diversifiée. Les inventaires
réalisés ont montré que le peuplement ligneux est
composé de 92 espèces ligneuses regroupées en 54 genres et
29 familles, totalisant 4368 individus. Les familles les plus
représentées en nombre d'individus sont : les familles des
Mimosaceae (39,41%), des Balanitaceae (10,08%), des
Asclépiadaceae (7,8%) et des Capparaceae (7,15%). Ces
familles représentent à elles seules 64% de l'ensemble des
espèces recensées (Figure 13).
Figure 6 : Spectre des familles
Les autres espèces représentent 11%. Une
répartition taxonomique similaire a été observée
par Béchir et Mopaté (2015) dans la même région avec
les mêmes familles représentées.
3.2.2. Fréquence
spécifique
L'étude montre que seulement 11 espèces (11,95%)
sont fréquentes sur les différents sites d'étude (Figure
7). En effet, elles ont été recensées dans au moins 50%
des relevés. Il s'agit d'Acacia nilotica (75,26%),
Balanites aegyptiaca (67,48%), Acacia tortilis (54,34%),
Hyphaene thebaica (40,12%), Acacia seyal (43,19%), Calotropis
procera (44,28%), Borassus aethiopium (39,75%), Acacia albida
(22,44%), Ziziphus mauritiana (15,34%), Capparis decidua
(10,82%) et Bauhinian rufesens (13,35%). Ce faible pourcentage
d'espèces fréquentes enregistrées s'explique par
l'uniformisation de la végétation ligneuse du lac surtout dans sa
partie nord. La plupart des espèces ont été rares car
elles ont été présentes dans moins de 25 % de
relevés phytosociologiques (Figure 7). Ce sont : Tamarindus
indica, Piliostigma reticulatum, Kigelia africana, Acacia sieberiana,
Stereospermum kunthianum, Diospyros mespiliformis, Celtis toka, Ficus
plathiphylla, Anogeissus leiocarpus, Ficus gnaphalocarpa, Crateva adansonii,
Terminalia macroptera, Cadaba farinosa.
Les espèces peu fréquentes sont au nombre de 21
soit 22,82%des espèces recensées. Ces espèces sont
présents entre 20 à 49% de relevés, ce sont principalement
: Capparis decidua, Cordia sinensis, Ziziphus spina-christi, Dalbergia
melanoxylon, Salvadora persica, Leptadenia pyrotechnica, Acacia senegal, Acacia
mellifera, Acacia laeta, Combretum glutinosum...
Figure 7. Spectre des fréquences observé sur les
différents sites
Globalement, toutes les unités de
végétation ligneuse identifiées ont montré une
richesse floristique assez différente selon la zone. Les sites de la
zone nord ont cependant montré la plus forte similarité du point
de vue composition floristique que physionomique. La plus faible richesse
floristique a été observée au sein des unités de
végétation de la zone nord du Fitri alors que ce sont les
unités des zones situées plus au sud et au centre qui ont
montré les richesses floristiques les plus importantes (51 et 48
espèces respectivement).
Comparée à la diversité floristique de la
zone soudanienne du Tchad plus humide (Béchir, 2010 ; Melom et
al., 2015), la diversité floristique de la zone du Fitri
apparait relativement faible. Cela peut s'expliquer d'une part, par sa position
à la lisière du Sahara dans le centre du Tchad souvent soumise
à des aléas climatiques et à l'intensification des
activités humaines, et d'autre part, par l'uniformité du paysage
(vaste pénéplaine). La faiblesse de la diversité
floristique peut également se justifier par la non exploration de
certaines zones (zone aurifère de Gueria, Galo, Teketé et Ati
Ardebé) à cause de leur inaccessibilité pendant la
période de collecte de données et ceci à cause de
l'insécurité qui y régnait et de l'inondation d'une grande
partie de la zone. En effet, les plus grandes diversités floristiques
sont liées à l'hétérogénéité
environnementale (notamment topographique) ou à la diversité des
habitats (White, 1986; Wala, 2004).
Parmi les espèces ligneuses les plus dominantes de la
région du lac Fitri, certaines espèces comme Acacia nilotica,
Acacia seyal, Hyphaene thebaica, Calotropis procera et Balanites
aegyptiaca ont une répartition régulière sur
l'ensemble de la zone d'étude. En revanche, d'autres espèces
comme Acacia siberiana, Acacia senegal, Bauhinia rufesens, Salvadora
persica, Acacia mellifera, Acacia laeta... sont très mal
réparties et se retrouvent regroupées pour former des ilots
à des endroits spécifiques selon les types de sols, la
topographie et le relief.
Selon les populations locales, certaines espèces
ligneuses qui ont disparu à cause des sècheresses successives
qu'a connues la région ont réapparu en la faveur de la
normalisation de la pluviosité durant les dernières
années.
3.3. Description et structure
démographique des peuplements ligneux
3.3.1. Etat de la
régénération des ligneux
Le tableau 2 montre l'effectif, la contribution
spécifique et la régénération des principaux
ligneux du Fitri. L'inventaire de la strate ligneuse juvénile a permis
de dénombrer 1852 jeunes individus à l'hectare
représentant 35 espèces ligneuses regroupées en 26 genres
et 16 familles. La structure démographique globale des jeunes individus
a montré un état de régénération moyen,
caractérisé par une abondance de jeunes individus dans les
classes de hauteurs inferieures. Par ailleurs, la présence massive des
jeunes individus dans la première classe est également
favorisée par les conditions hydriques du sol (Higgins et al.,
1999). Les familles dominantes par leur contribution spécifique dans la
classe de régénération ont été par ordre
d'importance, les Mimosaceae (36,84 %), les Balanitaceae
(11,40 %), et les Capparaceae (7,45 %). Acacia nilotica,Balanites
aegyptiaca, Acacia tortilis, hyphaene thebaica, Boscia senegalensis et
Acacia seyalont été les mieux représentées
en termes de régénération. Ces espèces se sont
distinguées des autres par une forte densité d'individus jeunes.
En revanche, la régénération a été nulle
pour Kigelia africana, Khaya senegalensis, Ficus plathyphylla, Ficus
gnaphalocarpa, Tamarindus indica, Celtis toka, Dalbergia melanoxylon, Diospyros
mespiliformis et Mitragyna inermis.
L'absence d'individus appartenant aux classes de
régénération chez ces différentes espèces
est un indice de perturbation de leur pouvoir de
régénération en raison de leur gestion traditionnelle par
coupes abusives ou émondages réguliers. En effet, le
surpâturage autour des individus reproducteurs provoque
l'épuisement des réserves racinaires au niveau des souches ou des
plantules et entraîne une absence totale de
régénération (Lejju et al., 2001). Les formations
des savanes boisées à arborées, des forêts galeries,
des steppes arbustives ont montré le potentiel le plus
élevé en jeunes individus.
Tableau 2: Effectif, contribution
spécifique et régénération des principaux ligneux
du Fitri
Espèces
|
Familles
|
Effectifs par ha
|
|
|
Effectif
adultes
|
Effectif
jeunes
|
Taux (%) de
Régénération
|
Acacia nilotica
|
Mimosaceae
|
484
|
296
|
61,15
|
Balanites aegyptiaca
|
Balanitaceae
|
428
|
247
|
57,71
|
Acacia tortilis
|
Mimosaea
|
412
|
219
|
53,39
|
Calotropis procera
|
Asclepiadaceae
|
220
|
108
|
49,08
|
Hyphaene thebaica
|
Arecaceae
|
232
|
112
|
48,27
|
Acacia seyal
|
Mimosaceae
|
264
|
126
|
47,72
|
Borassus aethiopium
|
Arecaceae
|
111
|
43
|
38,73
|
Boscia senegalensis
|
Capparaceae
|
287
|
79
|
27,52
|
Acacia Senegal
|
Mimosaceae
|
192
|
49
|
25,52
|
Mitragyna inermis
|
Rubiaceae
|
13
|
3
|
23,07
|
Combretum glutinosum
|
Combretaceae
|
86
|
18
|
20,09
|
Anogeissus leiocarpus
|
Combretaceae
|
33
|
6
|
18,18
|
Bauhinia rufescens
|
Caesalpiniaceae
|
168
|
28
|
16,66
|
Acacia mellifera
|
Mimosaceae
|
122
|
16
|
13,11
|
Stereospermum kunthianum
|
Bignoniaceae
|
16
|
2
|
12,50
|
Acacia laeta
|
Mimosaceae
|
98
|
11
|
11,22
|
Leptadenia pyrotechnica
|
Asclepiadaceae
|
116
|
13
|
11,20
|
Capparis decidua
|
Capparidaceae
|
152
|
7
|
4,21
|
Ziziphus mauritiana
|
Rhamnaceae
|
112
|
12
|
1,78
|
Cordia sinensis
|
Boraginaceae
|
48
|
0
|
0
|
Sclerocarya birrea
|
Anacardiaceae
|
24
|
0
|
0
|
Piliostigma reticulatum
|
Caesalpiniaceae
|
16
|
0
|
0
|
Dalbergia melanoxylon
|
Papilionaceae
|
8
|
0
|
0
|
Diospyros mespiliformis
|
Ebenaceae
|
24
|
0
|
0
|
Ficus gnaphalocarpa
|
Moraceae
|
6
|
0
|
0
|
Khaya senegalensis
|
Meliaceae
|
21
|
0
|
0
|
Tamarindus indica
|
Caesalpiniaceae
|
52
|
0
|
0
|
Celtis toka
Kigelia africana
|
Ulmaceae
Bignoniaceae
|
12
4
|
0
0
|
0
0
|
3.3.2. Caractéristiques des
classes de hauteur des peuplements ligneux
La distribution des hauteurs est assez régulière
et le peuplement parait équilibré (Figure 8).La hauteur moyenne
des individus est de 4,68 #177; 0,2 m. Toutefois, le déséquilibre
proportionnel entre les deux premières classes contiguës ([0-0,5 m
[et [0,5-1m [) a été relativement faible avec un écart de
7,12%. La distribution du peuplement s'estompe à partir de la classe
[5,5-6 m [.Bien que la structure démographique globale des populations
juvéniles ait montré une régénération
moyenne, le peuplement n'est pas en équilibre en raison de la chute de
distribution à partir de la classe [3,5-4m [. Cette situation s'explique
par le fort taux de pertes d'individus à partir de cette dernière
classe. Nos résultats sont conformes à ceux de Béchir et
al. (2009) et Ouédraogo et al. (2008). Le faible taux
de représentativité des individus dans les classes
supérieures peut s'expliquer par la longue saison sèche, les
péjorations climatiques et les fortes pressions anthropiques (Gijsberg
et al., 1994).
Figure 8 : distribution des ligneux selon les classes de
hauteur
1 = [0-0,5 m[ ; 2 = [0,5-1m[ ; 3 = [1-1,5 m[ ; 4 =
[1,5-2 m[ ; 5 = [2-2,5 m[ ; 6 = [2,5-3 m[ ; 7 = [3-3,5 m[ ;
8 = [3,5-4 m[ ; 9 = [4-4,5 m[ ; 10 = [4,5-5 m[ ; 11 = [5-5,5
m[ ; 12 = [5,5-6 m[ ; 13 = > 6m.
Toutefois, la présence massive des rejets de souches
observée au niveau des classes inférieures [0-0,5m [ à [
2,5-3m [ est une forme d'adaptation et une stratégie de survie des
espèces soudaniennes et sahéliennes à la sécheresse
et aux pressions anthropiques (Néfabas et Gambiza, 2007). Il est aussi
important de souligner que les formes rabougries que présentent les
espèces ligneuses dans le lac sont dues à des
sévères broutages et émondages compte tenu de
l'intensification des activités agro-pastorales pratiquées dans
la zone.
3.3.3. Répartition des
principales espèces ligneuses par classe de diamètre
La figure 9 montre la répartition de l'ensemble des
espèces ligneuses selon les classes de diamètre. Toutes les
espèces ont présenté des classes de diamètre
significativement différentes. Avec un diamètre moyen de l'ordre
de 7,87 #177; 0,52 cm, la végétation ligneuse de la zone montre
un peuplement relativement équilibré bien qu'une forte proportion
(63,36 %) est représentée par des individus de diamètre
compris entre 0 et 5 cm c'est-à-dire des classes inférieures.
Figure 9. Répartition de l'ensemble des espèces
par classe de diamètre
Les peuplements d'Acacia nilotica, de Balanites aegyptiaca
etd'Hyphaene thebaica apparaissent plus (Figure 8, 9 et 10). La
régénération est bonne chez ces espèces qui se sont
distinguées des autres par une forte représentation des classes
de diamètre inferieures, traduisant une bonne dynamique de
reconstitution. En outre, les peuplements relativement stablesd'Acacia
nilotica et de Balanites aegyptiaca sont
caractérisés par leur bonne représentation dans toutes les
classes de diamètre. Ces espèces sont représentées
par des individus de gros et petits diamètres (Figure 8 et 9).
Figure 10. Répartition des individus d'Acacia
niloticapar classe de diamètre
Figure11. Répartition des individus de Balanites
aegyptiaca par classe de diamètre
Les courbes de répartition des peuplements
d'Hyphane thebaica et d'Acacia seyal ont à peu
près la même allure (Figure12 et 13). Les peuplements de ces deux
espèces ont montréun recrutement moyen dans les classes de
diamètres inférieurs [10-15m [et [20-25m [. Ils ont
été par contre très peu représentées dans
les classes de diamètres intermédiaires [25-30m [ à
[45-50m [ et complètement absentes dans les classes [50-55m[ jusqu'aux
classes supérieures à 75m.
Figure 12. Répartition des peuplements d'Hyphaene
thebaica selon les classes de diamètre
Figure13.Répartition des peuplements d'Acacia seyal
par classe de diamètre
L'absence d'individus appartenant aux classes de
régénération et aux classes supérieures est un
indice de perturbation en raison de leur surexploitation et de la pression
à laquelle se trouvent soumises ces deux espèces. En effet,
concernant Acacia seyal, des peuplements entiers sont parfois
systématiquement défrichés et se trouvent remplacés
par des champs de berbéré ou Sorgho de décrue.
Hyphaene thebaica paie en revanche les frais de l'utilisation de son
stipe dans la construction et la pression pastorale.Les résultats
obtenus montrent que les investigations floristiques effectuées dans la
zone méritent d'être approfondies. Cela corrobore l'assertion de
Adjanohoun (1964) selon laquelle : «le travail d'un botaniste n'est
jamais achevé ; il le complète ou le modifie durant toute sa
vie. Cela est plus vrai encore pour celui qui s'intéresse à la
flore peu connue des régions tropicales». Aussi, les travaux
d'inventaire restent-ils un outil indispensable pour révéler
l'existence des espèces (parfois nouvelles pour la science) avant leur
extinction due à l'amenuisement de leur habitat (Campbell et Hammond,
1989).
Conclusion
L'étude a montré que la zone du Fitri est
caractérisée par une succession de formations
végétales constituée d'unités les plus souvent
très clairsemées à relativement denses.
L'analyse floristique a permis d'appréhender sa
composition floristique, d'identifier les espèces
végétales ligneuses les plus dominantes, celles en extinction
à cause de plusieurs facteurs déterminants. La structure de la
population ligneuse a permis de suivre la distribution des effectifs et de la
régénération du peuplement et des espèces.
L'étude de la structure démographique des peuplements a
montré une régénération relativement faible car le
peuplement n'est pas en équilibre à cause d'une chute de
distribution à partir des classes inférieures chez certaines
espèces. Cependant, les espèces ligneuses étudiées
ont présenté de bonnes dispositions naturelles de
régénération pourvue que des dispositions soient prises.
Dans l'ensemble de la zone d'étude, la flore ligneuse se
caractérise par un petit nombre d'espèces fréquentes. Les
familles dominantes sont conditionnées dans la plus part des cas par la
présence du lac qui joue énormément sur la
répartition des espèces ligneuses. L'analyse de la structure de
la végétation ligneuse de la zone d'étude indique, une
dynamique régressive caractérisée par la présence
des peuplements ligneux adultes vieillissants et de plus en plus
dégradés (des espaces dénudés, des sols appauvris,
des arbres ayant des formes rabougris...) à cause d'une forte pression
anthropique accompagnée des conditions climatiques toujours plus
défavorables. Les végétations ligneuses sont
vieillissantes et certaines espèces végétales les plus
appétées par les animaux ont montré une mauvaise
régénération.
CHAPITRE IV. ANALYSE DE LA DYNAMIQUE
DE LA VEGETATION LIGNEUSE DU LAC FITRI
Introduction
Les principaux facteurs de la dynamique de la
végétation ligneuse au Tchad en général et dans le
lac Fitri en particulier sont les activités humaines accompagnées
des facteurs naturels. Les principales activités humaines qui
influencent la structure et la dynamique des ressources forestières dans
la région du lac Fitri sont l'agriculture, l'élevage, la coupe de
bois, les feux de brousse, la cueillette, l'orpaillage... A ces
différents facteurs anthropiques viennent s'ajouter les facteurs
naturels. Cependant, il est important de souligner qu'il est extrêmement
difficile sur le terrain, de différencier les effets dus à une
péjoration climatique (sécheresse par exemple) de ceux
résultant des activités anthropiques sur les formations
ligneuses. En outre, les effets des troupeaux domestiques sur la flore et la
végétation ne sont pas faciles à évaluer en
condition réelle en raison de la multifonctionnalité des espaces.
Toutefois, les dynamiques constatée sont la résultante des
facteurs écologiques (sols et climat) et d'une action combinée de
plusieurs facteurs anthropiques (élevage, agriculture, coupes de
bois...) dont certaines sont localement déterminants dans ce processus
de modification.
L'observation de certains processus environnementaux ou
sociaux nécessite aussi des temps très longs pour que
l'observateur puisse percevoir des modifications remarquables des indicateurs
(Pontanier, 2000). Ainsi, l'appréhension des dynamiques globales
(écologiques, humaines...) nécessite un recul dans le temps par
une exploitation des récits des notables et des sources écrites
lorsque ces dernières existent (Reounodji, 2003).
L'objectif de ce chapitre est d'analyser à partir des
enquêtes sur le terrain et sur la base des images satellitaires, la
dynamique de la végétation ligneuse à travers l'occupation
du sol dans la zone d'étude sous l'effet conjugué des actions
anthropiques et des facteurs climatiques. Quels sont les poids des
activités humaines (élevage, agriculture, cueillette,
pêche, artisanat etc.) sur les ressources végétales entre
1986 et 2013 et quelles en sont les manifestations environnementales et
socio-économiques ? Comment se traduit cette dynamique sur
l'état des ressources naturelles ? Pour répondre à
toutes ces questions, notre démarche s'appuie sur une analyse
diachronique (1986-2013) des données spatiales.
4.1. Structure, emprise agricole et
taux d'occupation du sol dans le Fitri
4.1.1. Taux d'occupation de sol de
1986 à 2013
Les résultats qui seront présentés dans
cette partie sont ceux issus de l'étude menée dans la même
zone par le Fonds Spécial en Faveur de l'Environnement (2016)
complétés par les résultats de nos propres enquêtes
de terrain. Les données écrites sur la zone du Fitri sont rares
surtout celles concernant la dynamique des ressources naturelles.
L'étude de la dynamique de la végétation par les images
satellitaires est fiable et raisonnable pour l'étude de l'occupation du
sol surtout dans un pas de temps assez long. La figure montre les taux
d'occupation des sols en 1986 et 2013 dans la zone du Fitri. Ainsi, à
l'aide des images satellitaires, il a été constaté
l'existence d'une nette différence entre l'occupation du sol entre 1986
et 2013. Le paysage de la zone de Fitri présente les unités
d'occupation des sols suivants : les forêts galeries, les savanes,
les steppes, les prairies, les zones de cultures, les plans d'eau, les sols nus
et les zones d'habitation (Figure 14).
Ø Méthodes
Les images satellitales optiques utilisées proviennent
des capteurs TM (Thematic Mapper) et ETM+ (Enhanced Thematic Mapper). Nous
avons utilisé une scène Landsat acquise en 1986 et 2013, au Path
183 et Row 051. L'image landsat TM à une résolution de 28 m.
L'image Landsat ETM+ de 2013 à une résolution de 28 m.
Dans l'élaboration de la classification
supervisée, nous avons digitalisée les images avec le logiciel
Erdas pour chaque classe d'occupation des sols à cartographier.le
logiciel Envi a permis à travers l'opération Compute differance
map de croiser deux couches différentes afin d'obtenir une seule
couche.
Figure 14 : Cartes de la situation de l'occupation du sol de 1986
et 2013(BEGC, 2016)
4.1.2. Les changements
globaux
Figure 15 : Changements d'occupation du sol du Lac Fitri entre
1986 et 2013
Les grandes structures de l'espace localisées sur les
images et leur emprise spatiale pour les années 1986 et 2013 ont permis
d'apprécier les différents niveaux d'occupation de l'espace entre
ces deux périodes (Figure 14).
Figure 16. Evolution de
l'occupation du sol entre 1986 et 2013
L'analyse diachronique montre un recul des espaces
boisés au profit des terres agricoles en 27 ans. L'examen croisé
des images satellitaires met en valeur plusieurs mécanismes essentiels
qui marquent l'occupation de l'espace dans le Fitri :
Ø une croissance des zones de cultures au
détriment des espaces boisés (en régression) et des
pâturages naturels : les zones de cultures ont connu de fortes
mutations entre les deux dates. En 2013, elles étaient de l'ordre de
6128 ha soit 3,7% de l'ensemble du territoire alors qu'en 1986, les zones de
cultures couvraient seulement 1066 ha soit 0,6% de la superficie totale de la
zone d'étude.Les enquêtes de terrain ainsi que les études
antérieures (BIEP 1989, Marty et al. 2012) confirment cette
tendance à la hausse des cultures de décrue, due essentiellement
à la croissance démographique des sédentaires bilala ainsi
que les cultures pluviales qui s'étendent au détriment de toutes
les formations ligneuses ce qui atteste une dynamique régressive de la
végétation ligneuse dans le Fitri ;
Ø une augmentation des sols nus(nommé Kosso
en bilala), au détriment des zones de cultures et d'espaces
boisés : les sols nus ont connu une évolution galopante.
Entre 1986 et 2013, on a enregistré une augmentation des sols nus qui
passent de 5301 ha soit 3,23% en 1986 à 7981 ha soit 4,86% de la surface
totale de la zone. L'augmentation de ces espaces nus est due en grande partie
à une mise en culture généralisée et
l'appauvrissement des sols en raison de l'intensification des activités
agropastorales. Pendant les mêmes périodes, il y a eu une
croissance démographique et une multiplication des villages à
cause de l'attraction exercée par le lac Fitri qui offre d'immenses
potentialités. Les espaces occupés par les villages ont
été également considérés comme des sols
nus.Il s'agit des zones incultes localisées au nord de notre zone
d'étude, entre Agana et Wagna, et circonscrites à
l'intérieur des vertisols cultivés en
berbéré ;
Ø les savanes couvrent une superficie de 45551,48 ha
soit 27,78% en 2013 alors que ces unités de végétation
occupaient en 1986, une surface d'environ 63667,88 ha soit 38,83%. . Elle subit
de plein fouet les effets des changements climatiques et de la croissance
humaine et animale dans la zone. Comme fourrage aérien, les
éleveurs élaguent et abattent les arbres, amenuisant leurs
capacités de régénération naturelle. Dans les
bas-fonds, les arbres sont complètement défrichés pour
faire place aux cultures de décrue. Ils sont exploités en bois
d'oeuvre et bois de chauffe, malgré l'interdiction de leur coupe par le
Ministère des Eaux et Forêts depuis 2008. On constate que les
savanes s'effritent à grand pas soit à cause du front agricole
(culture de décrue) soit en raison du changement climatique ;
Ø les steppes, caractéristiques de la zone
d'étude selon la répartition des zones agro-climatiques au Tchad
couvraient une superficie de 29818, 18 ha soit 18,18% en 1986alors qu'en 2013
elles occupent une surface de 46288,54 ha soit 28,23% de la superficie de la
zone d'étude. Si d'un côté, elle perd du terrain face aux
cultures pluviales, de l'autre, elle prend l'avantage sur les zones de savane
et forêt dans le lac Fitri car elle en présente la forme
dégradée. L'augmentation des steppes trouve son explication dans
l'embroussaillement dû à la prolifération d'Acacia
nilotica et d'Acacia tortilis, l'homogénéisation de
la végétation, la régénération dans les
jachères et surtout la dégradation des savanes et des
forêts galeries ;
Ø localisées dans les zones inondables du Fitri,
les prairies marécageuses s'étendaient sur une superficie de
36163 ha soit 22,05% de la superficie totale du Fitri en 1986 alors qu'en 2013
elles occupaient 34635,16 ha soit 21,12% de la superficie totale de la zone
d'étude.La superficie de cette unité est liée à
l'extension des crues (Tashi et al. 2017). La variation de sa superficie n'est
pas aussi prononcée que celle des autres entités du
paysage ;
Ø les forêts galeries s'étendaient sur une
superficie de 5.915,06 ha soit 3,60% de la superficie totale de la zone en 1986
contre seulement 2.321, 29 ha soit 1,41% de la superficie totale de la zone
d'étude en 2013.Il reste un peuplement en pleine
régénération avec le développement des peuplements
denses d'Hyphaene thebaica lié au remplissage plus
fréquent des mares au nord-ouest du lac Fitri (Tashi et al.
2017). . Nous pouvons estimer qu'après une phase de
régénération suite aux épisodes graves des
sécheresses de 1970 et 1980, la pression anthropique sur cette ressource
en a réduit les superficies ;
Ø les plans d'eau étaient passés de 22002
ha de soit 13,42% de la zone d'étude en 1986 à 21.038 ha soit
12,83% en 2013. Ce résultat est conforme à celui de (Tashi et al.
2017) qui montrent l'extension des crues du lac depuis les grandes
sécheresses des années 1970 - 80.
Ø Le lac qui est le régulateur de la
multi-activité est soumis à des modifications dans le temps et
dans l'espace. Dans le temps, on a remarqué que l'augmentation ou la
diminution des eaux du lac influence la répartition de la
végétation. Par exemple, les sécheresses des années
1980 et, 1984 ont provoqué la disparition de plusieurs hectares de
végétation au profit des espaces nus en augmentation continuelle
dans la zone. Le phénomène inverse s'est réalisé
avec l'installation des années de bonnes pluviométries durant la
dernière décennie facilitant ainsi la
régénérescence des espèces végétales
qui avaient presque disparu aux alentours du lac Fitri.Dans l'espace, les
images satellitaires nous montrent les situations antérieures et
actuelles du Fitri. On constate sur les images et selon les témoins des
habitants que depuis les années 1980, le lac s'écoule vers
l'ouest alors que c'était une situation inverse avant les années
1980. Cet écoulement vers l'ouest est sans nul doute,
l'élément ayant facilité le développement de la
grande forêt d'Hyphaene thebaica ou Palmier
« doum » ainsi que l'installation d'une ceinture
d'Acacia nilotica autour du lac dans des endroits inondables.
4.1.3. Effet des activités anthropiques sur la
flore et la végétation ligneuse
Pour satisfaire ses besoins élémentaires et
vitaux, l'homme est contraint de mener certaines activités qui
malheureusement, constituent des facteurs majeurs de dégradation de son
environnement.
4.1.3.1. Effets des activités pastorales :
impacts de la sur-fréquentation animale sur la flore et la
végétation ligneuse
Le Fitri est par excellence une zone de séjour de
saison sèche des transhumants car elle accueille des milliers de
bétail qui y séjournent durant cette période (Figure 17).
Cette charge pèse lourd au regard des conditions climatiques actuelles
(Chapelle, 1986).La dégradation de la végétation ligneuse
dans le lac Fitri est due au surpâturage et aux autres pratiques
d'élevageconsidérées comme l'une des principales causes de
cette dynamique régressive. Plusieurs études ont montré le
rôle de l'élevage dans la dégradation de la
végétation et des terres surtout dans les zones
sahéliennes et soudaniennes (César, 1992 ; Breman et
al., 1995 ; Bellefontaine et al. , 1997).
Figure 17. Flux des troupeaux vers le lac Fitri en saison
sèche.
L'effectif des animaux, leur nature (bovins, ovins, caprins,
camelins), leur séjour prolongé sur un parcours, la
fréquence de pâture ainsi que d'autres pratiques d'affouragement
à savoir l'émondage, l'effeuillage et l'étêtage sont
autant des facteurs qui influencent la dynamique des végétations
ligneuses dans la zone. Leurs impacts sur la végétation ligneuse
ont été très importants aussi bien sur le plan quantitatif
que qualitatif.
Les observations menées ont donc permis de mettre en
évidence des dégradations de la végétation ligneuse
en relation avec les modes de conduite des animaux en présence. Les
principaux éléments qui caractérisent cette dynamique
régressive suite à une pression pastorale intense ont
été la baisse de la couverture végétale et la
modification de la composition floristique. En effet, l'élevage surtout
transhumant influe sur la végétation ligneuse et les terres par
l'action de consommation sélective des espèces
végétales ainsi que par le piétinement qui provoquent
l'encroûtement superficielle du sol avec la formation des croutes de
battance.
Cependant, le dépôt des fèces et d'urine
par les animaux facilitent la fertilisation du sol et le développement
de certaines espèces. Au niveau de la végétation ligneuse,
le pâturage aérien a provoqué la diminution du taux de
recouvrement ligneux et la disparition des espèces les plus
consommées par les animaux (Piliostigma reticulatum, Cadaba
farinosa, Stereospermum kunthianum...) au profit de celles qui sont plus
résistantes au broutage (Acacia nilotica, Balanites aegyptiaca,
Acacia tortilis, Bauhinia rufescens, Acacia laeta...). En effet,
lesurpâturage provoque une nette domination dela végétation
par une espèce ou un petitnombre d'espèces (Hiernaux et Le
Houerou,2006). Les espèces dont la dissémination est
assurée par les animaux comme Acacia nilotica, Balanites aegyptiaca,
Acacia tortilis, Dichrostachys cinerea... ont été les plus
favorisées. Le couvert végétal ligneux s'est donc
contracté et épaissi au fil des années avec Acacia
nilotica, Balanites aegyptiaca, Capparis decidua et Boscia
senegalensis. Des situations similaires ont été
également observées dans la région par Béchir et
Mopaté (2015). En effet, dans certaines zones où les terres sont
plus marginales donc incultes et destinées aux parcours, la
végétation ligneuse qui s'y développe est
sévèrement élaguée, étêtée ou
ébranchée (Figure 18).
Figure 18. Un pied d'Acacia tortilis
sévèrement émondé (Cliché :
Tchoudiba B.)
L'émondage, l'étêtage et l'effeuillage de
certains arbres par les pasteurs afin de faciliter l'accès du
bétail à leur feuillage menacent également leur survie. En
effet, la phénologie de l'arbre est affectée par ces pratiques et
la production du fruit est ainsi interrompue, Béchir et Zoungrana(2009).
L'émondage sévère entraine petit à petit la
réduction des espèces appétées et même leur
disparition. Cela facilite au contraire le développement de certaines
espèces envahissantes entrainant un embuissonnement de l'espace
pâturable (César, 1992). Les principales espèces ligneuses
utilisées dans le cadre du pâturage aérien sont :
Acacia seyal, Acacia senegal, Balanites aegyptiaca et Acacia
tortilis très appréciées par les animaux donc
beaucoup sollicitées en saison sèche. Dans certaines zones du
Fitri, la dynamique est en revanche caractérisée par la
prolifération de Calotropis procera (espèce des zones
dégradées) qui colonise de vastes étendues et où on
la rencontre parfois en peuplement presque monospécifique. Cela est
semblable au stade final d'une dynamique régressive de la
végétation avec lasubstitution de Calotropis procera tel
quedécrit par Béchir et Mopaté (2015) dans leBatha
Ouest.
4.1.3.2Emprise agricole sur la
végétation
La figure 19 montre la répartition des
différents types d'occupation de l'espace dans le Fitri. Le Fitri est
marqué par une croissance démographique rapide. En effet, entre
1993 et 2009, la zone d'étude a vu sa population doubler, passant de
54.672 à 110. 403 habitants (RGHPII, 2009). L'accroissement de la
population et le défrichement se sont traduites par une augmentation des
surfaces emblavées, une réduction voire une dégradation
des formations végétales. Au fil des années, les
superficies emblavées se sont ainsi étendues au rythme de
l'accroissement démographique. Les défrichements du couvert
végétal pour des fins agricoles exposent et rendent les sols
très vulnérables aux phénomènes
d'érosion(Naitormbaide, 1990).
Figure19. Zone de culture de sorgho de décrue au lac
Fitri en 2015(Kemsol A., 2017)
Dans cette zone en pleine mutation, la mise en culture des
espaces pastoraux stratégiques (aires de pâturages, points
d'abreuvement, couloirs de transhumance, aires de stationnement)a
provoqué leur rétrécissement et surtout leur
parcellisation. Le morcellement des terres trouve son explication dans
l'éclatement des structures familiales et dans l'augmentation de
nouveaux besoins en terres cultivables (Sougnabé., 2010). L'extension
des zones cultivées au détriment des parcours naturels est un
phénomène qui caractérise les dynamiques agraires et pose
le problème de la gestion durable des parcours (Béchir, 2010). En
effet, les conséquences de cette situation est la transformation
des couverts végétaux accompagnée des mises en culture
généralisée des plaines inondables et de l'ensemble des
abords immédiats des cours d'eau.
A cause de la faible pluviosité enregistrée ces
dernières années, des cultures maraichères sont
installés de préférence dans les dépressions, les
plateaux, sur les talus sableux ou sur les replats ensablés. Les
cultures pluviales des céréales ont été
multipliées et parfois déplacées des glacis vers les fonds
des vallées. Les cultures de décrue avec des diguettes ont pris
également une extension croissante. Les conséquences de cette
dynamiques agricoles est la déforestation car des peuplements
d'Acacia seyalet parfois des faciès entier de
végétation sont systématiquement défrichés
et remplacés par des champs de berbéré.
Les mises en cultures des zones pastorales rend
vulnérable l'écosystème aride à l'érosion
des sols, surtout éolienne mais aussi hydrique et biochimique
(Naitormbaide, 1990). Elles contribuent à réduire la
mobilité animale et aggraver l'impact de l'élevage pastoral sur
l'environnement (Hiernaux et al., 2006). Cela entraine la
concentration des animaux dans un espace plus restreint accentuant ainsi la
pression pastorale sur les pâturages de ces zones et sur les autres
formations naturelles contiguës. On assiste donc à un effritement
du mode de conduite traditionnel d'animaux à cause de l'occupation des
parcours et des pistes de transhumances par des champs. Les éleveurs
tendent alors à se sédentariser, accroissant ainsi le rythme de
fréquentation des pâturages et des formations naturelles dans les
zones d'accueil. Or, les effets du pâturage sont d'autant moins
marqués que les troupeaux sont mobiles (Béchir, 2012). La
sédentarisation des troupeaux a des conséquences en
matière de dégradation des écosystèmes. Il s'en
suit une exacerbation des conflits d'usage.
4.1.2.2. Les coupes abusives du bois et les pratiques
de feux de brousse
Ø Les coupes abusives de
bois
Les pressions exercées sur les ressources
végétales ligneuses sont particulièrement fortes, se
traduisant par leur exploitation quotidienne. Dans le Fitri, les
enquêtes de terrains ont montré que le bois de chauffe demeure
l'une des principales causes de dégradation de la
végétation ligneuse. Dans beaucoup de pays en voie de
développement, le principal combustible demeure le bois. En effet, le
bois est aussi utilisé pour la construction des cases et des enclos ou
« Zériba » en arabe, la carbonisation, sert
également de combustible et de bois d'oeuvre. Il demeure la seule source
d'énergie dont dispose la population qui est majoritairement pauvre
(Planche 1).
Les arbres sont également coupés lors des
défriches. Cependant, certaines espèces sont
épargnées à cause de leurs
utilités :Anogeissus leiocarpus, Borassus aethiopium, Acacia
nilotica, Acacia seyalet Hyphaene thebaica.
B
A
Figure 1 :Tas de bois morts coupés et prêts
à la vente et un pied d'un acacia seyal détruit dans le
village Tékété (Cliché : Tchoudiba B)
Les pratiques de coupe de bois et des feux de brousse dans le
Fitri ont considérablement influencé la diversité
floristique ainsi que la dynamique de la végétation ligneuse.
Elles sont à la base des déforestations et des
déboisements constatés. En effet, la déforestation
résulte de toute action d'origine anthropique ou non et qui
entraînent le changement d'un biotope en lui faisant perdre son
état de forêt. Cette définition montre une similitude entre
déforestation et déboisement. En effet, le déboisement a
un sens plus large que le terme déforestation : par exemple, la
destruction du couvert ligneux d'une savane arborée est un
déboisement puisque cette formation n'est pas une forêt alors que
la transformation de la forêt dense humide en terre agricole ou en
pâturage est un fait de déforestation. Elle correspond à
des changements qui affectent négativement le peuplement forestier
où les activités anthropiques réduisent la capacité
de production tout en maintenant son statut de forêt (passagepar
exempled'une forêt dense à une forêt claire). Elle est due
à l'appauvrissement de l'écosystème, la perte d'une partie
de la valeur économique et l'ouverture du couvert forestier. Elle est
accompagnée par une diminution de la biodiversité
végétale et animale menaçant notamment certaines
espèces rares ou la grande faune.
Ø Les feux de brousse
La pratique des feux de brousse est utilisée par les
pasteurs pour favoriser la repousse des graminées pour le bétail.
Les feux sont également allumés pendant les défrichages et
les nettoyages des champs. Leur action sur le milieu est multiple et complexe.
Tardifs ou précoces, ces feux de brousse limitent
considérablement les potentialités productives de la zone et
contribuent aux remaniements de la flore et de la végétation et
à l'anéantissement des stocks semenciers disponibles en
période sèche. Les feux ont des conséquences
néfastes sur la végétation et affectent la
viabilité des graines, leur germination ainsi que leur
développement. En effet, leur action sur la végétation
dépend de divers facteurs, comme le climat, la nature et la
densité du couvert ligneux, la densité, la hauteur, l'état
de dessèchement de la strate herbacée, la vitesse du vent, la
pente du terrain et la période de mise en feux (Pyne et al.,
1996).
En revanche, tous les feux ne sont pas nuisibles pour la
végétation même si on constate que l'une des causes de la
déforestation demeure les feux de brousse. Les feux peuvent
déclencher la germination des graines de certaines espèces comme
Dichrostachys cinerea et la floraison d'autres tel que
Cochlospermun tinctorium (Devineau etal.,1998). Les
feux en règle générale, ne tuent pas les arbres et les
arbustes, mais ils favorisent le développement d'un port buissonnant et
touffu. Par contre, l'influence nocive des feux récurrents est
indéniable en ce qui concerne les jeunes brins de semis et les plantules
de nombreuses espèces arbustives et arborescentes de la savane (Schnell,
1971). Lors du passage des feux, l'élévation de la
température, parfois considérable (jusqu'à 800°C) se
produit à la surface du sol mais l'effet thermique s'atténue
rapidement en profondeur (Bouxin, 1975). Les racines des ligneux qui sont en
profondeur sont ainsi préservées. Le feu induit la
régénération végétative par drageonnage et
rejet de souche. De même, le phénomène d'abscission de
certaines espèces ligneuses en zones arides est accentué par les
feux fréquents. Detarium microcarpum constitue l'exemple
classique des espèces qui subissent le phénomène
d'abscission. La croissance des individus est ainsi retardée par le fait
qu'ils sont maintenus à l'état buissonnant dans les formations
naturelles subissant des feux récurrents (Rietkerk et al.,
1998).
La régénération des espèces
ligneuses est aussi contrariée par les feux, avec cependant des
exceptions. Les feux maintiennent la végétation ligneuse à
l'état ouvert. En effet, les feux de surface freinent la
régénération sexuée en détruisant les
semences contenues dans la litière. De nombreux pieds de ligneux sont
ainsi maintenus à l'état arbustif par la destruction
fréquente de leurs parties aériennes. De même, les apex de
grands arbres sont brûlés lors des feux tardifs intenses à
hautes flammes, entraînant une modification considérable de leur
port et les ramenant à l'état buissonnant par mort des troncs
(Sawadogo, 2009). Néanmoins, la sensibilité au feu est fonction
des espèces.
4.1.2.3. Les activités d'orpaillage : un
fait nouveau, un danger réel pour les ressources naturelles
La dégradation du couvert végétal s'est
aggravée dans le Lac Fitri suite à l'apparition des
activités d'orpaillage artisanal.La zone est ainsi devenue le point de
convergence de plusieurs orpailleurs venus non seulement des autres
régions du pays mais aussi de l'étranger : c'est la
ruée vers l'or. Aux activités traditionnelles que mènent
les populations, se sont ajouté celles d'orpaillage artisanal.
Cependant, l'exploitation des mines d'or ou orpaillage, qu'elle se passe sous
une forme moderne ou artisanale, comporte toujours des effets négatifs
sur l'environnement. Les techniques artisanales d'exploitation des gisements
alluviaux sont connues depuis l'antiquité. Au Tchad, en l'absence
d'industries minières, l'exploitation artisanale de l'or occupe une
place très importante. Ainsi, la zone est soumise à des
dynamiques environnementales et socio-économiques fortes (flux
migratoires, conflits sociaux, hausse des prix des denrées alimentaires,
cherté de vie...), base de l'insécurité alimentaire et
physique permanente dans la Région. Les risques et les
conséquences sont également liés à la santé
publique, aux valeurs sociales de la population, aux ressources naturelles,
à l'environnement (eau, sol, flore, faune, pâturage...) et au
climat (atmosphère du milieu). Il y a aussi des conséquences
liées aux pertes des terres agricoles et pastorales.
Par ailleurs, l'exploitation artisanale de l'or est une
activité qui ne peut être qualifiée de durable puisqu'elle
consiste en l'extraction d'une ressource géologique qui ne se renouvelle
pas à l'échelle humaine du temps. Les effets sur l'environnement
sont perceptibles à tous les niveaux. L'exploitation artisanal de l'or
s'est accompagnée d'ouverture des tranchées, de puits, du
grattage et du retournement des sols, avec comme conséquences la
fragilisation des sols et la destruction progressive des terres arables.
L'orpaillage a donc provoqué le déboisement, la
déforestation, la dégradation des sols et des pâturages, la
pollution de l'air, des sols et de l'eau, la perte de la biodiversité et
enfin le façonnement du paysage. L'orpaillage traditionnel tel que
pratiqué dans la zone a considérablement contribué
à la destruction du couvert végétal ligneux et
prédispose le sol à des processus d'érosion souvent
intenses.
B
A
Planche 2 : Une vue des orpailleurs en pleine
activité de creusage, symbole d'un nouveau facteur de dégradation
de l'environnement dans le Fitri (Cliché : Agée D).
4.2. Effets des facteurs naturels sur la
végétation ligneuse
Les facteurs naturels qui participent à la
dégradation des ressources naturelles sont les sécheresses
(déficits pluviométriques qui sont des phénomènes
diffus mais presque continuels)et les vents.En effet, depuis les
sécheresses des années 1973 et 1984, la pluviométrie a
été particulièrement déficitaire au Sahel. Les
variations climatiques de ces dernières années ont eu des
conséquences environnementales et socio-économiques lourdes pour
la zone du Sahel en général et la région du Fitri en
particulier.
L'assèchement du lac dans le cadre de la
désertification de la zone sahélienne est une idée
courante au Fitri, tant chez les gestionnaires que parmi les populations
résidentes (Tashi et al,. 2017).L'année 1972 correspond à
une année de grande sécheresse dans tout le Sahel. Au Fitri, les
faibles pluies accumulées dans le bassin versant et localement au Fitri
ont fortement limité l'extension de la zone humide. Dans la saison
sèche qui a suivi la crue de 1972, le lac s'est asséché (
Lemoalle., 1979) suivi d'un autre assèchement en 1985.
Parmi les principales causes de la dynamique de la
végétation ligneuse dans le Fitri, le climat semble avoir la plus
forte influence : c'est le facteur qui a les effets le plus
déterminant. Parmi ces facteurs climatiques, seuls les diminutions des
pluviosités ont été déterminants dans la dynamique
régressive des espèces végétales. Les effets des
sécheressessuccessives se sont donc manifestés au niveau de la
végétation ligneuse par la baisse de la richesse floristique et
l'augmentation de l'hétérogénéité de la
végétation avec l'apparition le plus souvent d'une
végétation en mosaïque où aucune espèce ne
domine. Suite à une diminution des réserves hydriques du sol due
à une baisse de pluviosités, il a été
également observé une forte mortalité ligneuse. Ainsi, les
ligneux peu adaptés à l'irrégularité des
précipitations sont devenus rares ou ont complètement disparu.
Sur le terrain, la dynamique liée aux déficits
pluviométriques s'était également manifestée par la
survie aléatoire de quelques rares espèces et une absence de
régénération chez d'autres (Salvadora persica, Cordia
sinensis, Tamarindus indica, Anogeissus leiocarpus, Kigelia africana...).
Celles-ci se trouvent donc à terme menacées. Cette dynamique
s'est également manifestée par la disparition de la
végétation initiale qui se trouveremplacée par une
végétation nouvelle très contractée et à
faible recouvrement.
Ainsi, dans le Fitri, la végétation ligneuse
dominée par des espèces climaciques représentées
par Khaya senegalensis, Tamarindus indica, Faidherbia albida, Celtis
integrifolia, Sclerocarya Birrea, Ziziphus mauritiana, Borassus aethiopium,
Piliostigma reticulatum, Stereospermum kunthianum, Acacia sieberiana et
Anogeissus leiocarpusa été remplacée par des
faciès à Acacia nilotica, Balanites aegyptiaca et
Acacia tortilis.Les espèces ligneuses qui se sont
raréfiées ou disparues et qui ont donc du mal à
régénérer sont nombreuses : Tamarindus indica,
Stereospermum kunthianum, Piliostigma reticulatum, Kigelia africana, Salvadoria
persica, Cordia sinensis, Acacia senegal... Néanmoins, pendant les
mêmes périodes où certaines espèces se
raréfient, on remarquela prolifération d'autres espèces
comme Acacia nilotica, Acacia tortilis et Balanites aegyptiaca
dans les périphéries proches du lac et dans les zones
argilo-limoneux à hydromorphie temporaire.
On rencontre également des ligneux qui ont
survécu aux sécheresses successives ou aux remaniements
éoliens. Ce sont, Acacia raddiana, Acacia senegal (en
régression), Balanites aegytiaca, Leptadeniapyrotechnica, Combretum
glutinosum et Sclerocarya birrea aujourd'hui en mauvais état. Il
est important de remarquer que l'Anogeissus leiocarpus est devenu
très rare dans le sud-ouest et a complètement disparu au
nord-est du Fitri et que l'Acacia senegalensisse trouve en très
forte régression. Les peuplements de Balanites aegyptiaca
autour des villages forment l'essentiel du peuplement ligneux.
Hyphaene thebaica et Borassus aethiopium sont souvent en
peuplements de mauvais état à cause de leur utilisation
constante. Nos observations sont similaires à celles faites par (Marty
et al.,2012) et(Béchir et al., 2015).
4.3. La perception de la dynamique de la
végétation ligneuse par les populations locales
Les récits sur l'évolution des paysages sont
similaires aussi bien chez les Bilala que chez les Arabes pasteurs et
agro-pasteurs. Ils décrivent l'évolution du paysage de la
même manière : le passage d'un milieu écologique
équilibré à un certain dysfonctionnement sous l'effet de
facteurs multiples. Selon les témoignages, il y a de cela plus de 50
ans, la zone de Fitri était caractérisée par une
végétation abondante, dense et très diversifiée.
Elle est de type forêt claire et l'eau renfermait d'hippopotames et des
crocodiles. Les nombreuses faunes sauvages qui y vivaient représentaient
un danger redoutable pour les hommes.
Les mêmes sources rapportent en outre que la population
était en revanche peu nombreuse. Les villages, dispersés au
milieu du lac étaient éloignés les uns des autres. Les
maladies épidémiques ainsi que les guerres ont pendant
très longtemps ralenti la croissance démographique. Cela
expliquerait la très faible pression de l'homme sur l'espace et sur les
ressources végétales.
En effet, avant les années 2000, les surfaces
emblavées n'atteignaient pas la moitié de celles observées
aujourd'hui. Cela laisse comprendre que les surfaces occupées par les
cultures ont doublé ou triplé à cause de la rapide
croissance démographique associée aux variabilités
pluviométriques interannuelles. En cette période, la
végétation en général et la
végétation ligneuse en particulier étaient très
dense si bien que les animaux sauvages venaient jusqu'aux villages.
Ensuite, la création de plusieurs villages dont le
nombre de la population est passé de 42 000 en 1993 à
110 403 en 2009 (RGPH2, 2009)), ont entrainé la création de
nouveaux champs provoquant ainsi une dynamique régressive des formations
ligneuses. Cette situation est à la base d'un grand flux (hommes
etanimaux) vers des endroits humides parmi lesquels la région du lac
Fitri s'inscrit en tête de listeaprès le lac-Tchad.
Les populations signalent également que le choix des
espaces habitables, des zones agricoles, d'élevage, de pêches, de
cueillettes... sont presque toutes situées dans les zones les plus
humides du lac Fitri. Ces zones étaient occupées dans la plupart
des cas par les peuplements d'Acacia
nilotica(« Garat » en arabe local et
« birdi » en bilala), accompagnés de
Balanites aégyptiaca (Hidjilidj en arabe et Rahanga en bilala),
Acacia albida(« Haraz » en arabe local et
« didi » en bilala), Bauhinia
rufesens(« Koulkoul » en arabe
et « Bessé » en bilala),
Acaciasieberiana(« Kouk » en arabe
local), Mitragynainermis(« Angato » en
arabe local)... Ces différentes espèces ligneuses citées
affectionnent l'humidité et se développent le long du lac dans
les proches abords. Mais aujourd'hui avec une demande accrue d'espace pour les
productions agricoles et les activités pastorales, les peuplements de
ces différentes espèces ligneuses se trouvent en grande partie
décimés. Les agriculteurs déboisent pour l'installation
des champs de « berbéré» et des cultures
maraichères et les éleveurs par les techniques d'émondage,
d'élagage, d'effeuillage et d'ébranchage mal maitrisées
détruisent les groupements d'épineux afin de faire paitre leurs
troupeaux et construire des enclos. Les éleveurs installent le plus
souvent leur campement aux abords immédiats du lac, dans les endroits
à végétation ligneuse et herbacée très
denses et diversifiées.
Les éleveurs, souvent des transhumants arabes sont
désignés par les Bilala comme des vrais destructeurs de
l'environnement. Selon les agriculteurs, ils sont contraints de créer de
nouveaux champs près du lac car suite à la diminution des
précipitations, l'eau du lac n'atteint plus lors des périodes de
crue, les anciens lits d'inondation où ont été
installés leurs anciens champs. Ils sont donc obligés de
défricher les terrains argilo-limoneux profonds ou vertisols
occupés le plus souvent par les Acacia nilotica et/ou
Acacia seyal espèces ligneuses qui affectionnent ces
mêmes types de sols que le sorgho de décrue. Plusieurs hectares
d'espaces boisés sont ainsi détruits chaque année dans le
lac Fitri pour faire place aux champs ou aux habitations (campements,
village...). Cela constitue l'une de principales causes de la dynamique
régressive de la végétation ligneuse observée dans
le Fitri entrainant ainsi la rareté de plusieurs essences ligneuses.
Selon toujours les autochtones, une autre cause de la
régression de la végétation ligneuse dans le lac Fitri est
l'utilisation de certaines espèces ligneuses dans la fabrication des
pirogues. L'espèce la plus concernée par cette pratique est
l'Acacia albida dont la disparition a été
signaléedans l'île de Moudo 1 où le seul moyen de
déplacement demeure la pirogue fabriquée à base du tronc
de l'espèce.
Avec la loi interdisant la coupe du bois par le gouvernement
tchadien depuis 2006 appuyée par la vulgarisation des pirogues en
planches, l'espèce Acacia Albida et d'autres espèces
ligneuses utilisées dans cette activité ont commencé
à être protégées.Cela a permis leur
régénération et ces espèces sont
aujourd'huiobservables en nombre dans la région du lac surtout aux
abords et sur les îles.
Le débat sur la sauvegarde de l'environnement est
divergeant quand on passe le temps avec les sages de la région dans les
différentes localités. Certains pensent que l'enclavement de la
région du lac Fitri devrait favoriser la conservation de ses
ressourcesen raison de sa position dans une zone basse sans infrastructures
routières adéquates. Mais le constat est tout à fait le
contraire car la zone du Fitri se trouve parmi les zones humides les plus
anthropisées au Tchad. Cela s'explique par sa position à la
lisière du Sahara dans une zone de transition entre le nord
désertique dépourvu des ressources agropastorales pourtant riche
en nombre de bétail et le sud, base de ressources agropastorales
aujourd'hui intensément dégradée.
Pour la majorité des populations du lac Fitri et
surtout les autorités en charge de la protection de l'environnement,
l'une des principales causes de la dynamique régressive de la ressource
végétale ainsi que les autres ressources naturelles demeurent
l'intensification des activités agro-sylvio-pastorales. Celles-ci sont
provoquées par la pression démographique accompagnée
deseffets de schangements climatiques qui se manifestent à travers les
sècheresses, les inondations, les vents violents, les canicules,...
Concernant le classement du Lac Fitri comme Réserve de
la Biosphère sous le Programme l'Homme et la Biosphère de
l'UNESCO et comme site d'importance internationale sous la convention sur les
zones humides d'importance internationale (Convention de Ramsardepuis 1989 par
décret n°773/PR/MTE/8 du 02 octobre 1989), toutes les personnes
enquêtées pensent que ces conventions n'ont rien apporté
comme changement dans la politique de conservation de la biodiversité du
lac. En effet, aucune mesure efficace de protection de l'environnement n'est
appliquée. Et si la situation perdure, nous assisterons à la
disparition du lac Fitri.
4.4. La dynamique de la végétation ligneuse dans
la zone selon la littérature
Les sources écrites relatives à la région
d'étude sont rares et celles qui traitent de manière
spécifique la dynamique des ressources naturelles en
général et de la végétation ligneuse en particulier
n'existent pratiquement pas.Le Lac Fitri, est très mal connu ainsi que
le soulignent clairement Burgis & Simoens (1987) : « On
possède peu d'informations sur ce lac. L'essentiel des données
provient d'une courte campagne réalisée en décembre 1973
et de documents non publiés du Service d'Hydrologie du Centre ORSTOM de
N'Djamena. ».Plusieurs études récentes ont
été menées dans la zone par des Programmes de
Développement, des institutions comme l'Institut de Recherches et
d'Application des Méthodes de développement (IRAM), le Bureau
International des Etudes et de Programme (BIEP), laCommunauté d'Etudes
de Développement Régional et d'Aménagement du Territoire
(CEDRAT), l'Office de Recherche Scientifique des Territoires d'Outre-mer
(ORSTOM) devenu aujourd'hui l'Institut de Recherche pour le
Développement (IRD), le Fonds Spécial pour l'Environnement (FSE)
et le Centre Technique de Foresterie Tropicale (CTFT) devenu aujourd'hui le
Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le
Développement (CIRAD). Parmi les auteurs qui ont mené des
études sur le Fitri, on peut citer Haguenbucher (1968), Raimond et
al.,(1997),Diop (1998), Zakinet(2008), Koyoumtan (2002), Béchir et
al., 2015), Dagou et al., (2002), Moupeng(2006), Aubague et
al., (2007), Marty et al.,(2012), BEGC (2016)...
En général, concernant les ressources
naturelles, les auteurs présentent la zone du Fitri comme l'une de
grandes réserves de la Biosphère dans le Sahel. L'homme participe
activement à la dynamique des ressources naturelles en
général et des ressources végétales en particulier
de plusieurs manières, à travers des actions directes ou
indirectes. En effet, l'activité humaine participe à la dynamique
de la végétation ligneuse par l'extension des surfaces agricoles,
l'expansion des surfaces pâturables, la déforestation, la
dégradation des terres, la désertification,... Ces processus sont
très visibles dans la région du Fitri, où les
activités humaines se sont de plus en plus multipliées et
interagissent avec les changements climatiques.
Selon le BIEP (1989), la superficie du lac varie entre 45
à 600 km2. C'est un lac temporaire variant d'une année
à l'autre selon les pluviosités. Selon toujours le même
auteur, le lac et ses abords sont le domaine d'une végétation
subaquatique et d'herbacée avec des faciès différents
suivant les fréquences des inondations. La zone inondée jusqu'en
fin de saison chaude demeure le domaine de la bourgoutière, fourrage le
plus apprécié par les troupeaux.Béchir et al.,
(2015) ont analysé la dynamique des pâturages autour des ouvrages
hydrauliques des zones pastorales du Batha. Cette étude a montré
une dynamique en régression marquée par une importante diminution
de la diversité spécifique ligneuse et herbacée aux
alentours immédiats des points d'eau au détriment d'une certaine
homogénéisation donc d'une diminution du nombre de formations
pastorales.Marty et al., (2012)dans « L'analyse de
l'évolution des ressources dans le département du
Fitri » et FSE (2016) dans une étude diagnostique de la
diversité biologique de la Réserve de Biosphère du Lac
Fitri ont fait l'état des lieux des ressources naturelles dont dispose
le lac Fitri. Ces rapports abordent les paramètres biophysiques qui
déterminent la biodiversité remarquable et le réel
potentiel agricole, pastoral, halieutique qui ont permis à la
région d'être inscritesur la liste des zones humides de la
convention de RAMSAR.Guédon (2016) a également
présenté les différentes zones d'Hyyphaene thebaica
(Palmier « doum ») qui constitue l'une de grandes
formations végétales du Fitri. Dans l'ensemble du bassin versant,
mises à part les forêts galeries le long des cours d'eau et la
forêt d'Acacias entre le village Gueria et la rive sud du lac,
seules les rives du Fitri sont colonisées par des formations
végétales denses, comparables à celles des rives du lac
Tchad (Moupeng, 2006).
Conclusion
Ce chapitre nous a permis d'évaluer et de mettre en
exergue les situations passées et actuelles de l'occupation des sols
dans le Fitri (1986 à 2013). L'étude diachronique (images
satellitaires et enquêtes rétrospectives) montre une
évolution des espaces de cultures et des sols nus au détriment du
couvert végétal. Elle met en évidence une tendance
régressive de la végétation ligneuse comparée aux
situations antérieures. En effet, les enquêtes menées
auprès des notables et la littérature retracent la structure
d'une végétation ligneuse ancienne différente de celle
d'aujourd'hui. L'accroissement de la population (humaine et animale)
favorisé par le progrès de la médecine, la multiplication
des villages à la recherche de terres riches ont participé
activement à la dégradation de la végétation
ligneuse. Le déboisement ou la diminution d'espaces boisés
provoqué par l'extension des surfaces cultivées, la
surfréquentation animale a entraîné la disparition de
plusieurs espèces végétales ou parfois des faciès
entiers de végétation provoquant ainsi par la même occasion
la disparition de la faune. Les pressions anthropiques se caractérisent
par la conjugaison de plusieurs facteurs qui sont la coupe de bois à des
fins diverses, les feux de brousse ayant plusieurs sources et l'élevage
extensif. Ces facteurs associés aux aléas climatiques qui se
manifestent par des sécheresses successives participent activement
à la dégradation de l'environnement et à la disparition
des espèces ligneuses les moins résistantes à la
sécheresse.La dynamique de la végétation ligneuse est donc
régressive car le paysage présente des stigmates d'une forte
dégradation.
CONCLUSION GENERALE ET SUGGESTIONS
CONCLUSION GENERALE
Les résultats obtenus dans le cadre de cette
étude apportent des renseignements sur les dynamiques (évolutive
et régressive) de la végétation ligneuse dans le Fitri.
Ils renseignent sur les principaux facteurs de dégradation et permettent
ainsi d'aborder de manière plus spécifique la question de la
gestion de la biodiversité du lac en général et plus
particulièrement celles des ressources végétales
ligneuses. Les observations menées ont en outre permis de mettre en
évidence des dégradations de la végétation ligneuse
en relation avec les modes de conduite des animaux en présence et les
différents modes d'exploitation et de gestion. En effet,les formations
végétales ligneusesdu lac-Fitri sont sous les effets de plusieurs
facteurs qui déterminent leur dynamique régressive dont les
principaux sont :
Ø l'emprise des activités agro-pastorales
provoquée par l'augmentation des populations humaine et
animale ;
Ø l'exploitation incontrôlée du bois
d'énergie à usage domestiquemais surtout pour l'alimentation de
grandes villes comme N'Djamena ;
Ø le climat qui se caractérise par des
années à pluviométrie déficitaire de plus en plus
fréquentes.
Les effets négatifs de ces principaux facteurs sont
perceptibles au niveau des espèces ligneuses qui constituent la
composante permanente de la végétation du lac Fitri. Cet
état de fait se caractérise par la baisse de la densité et
de la diversité floristique ligneuse dont dépend fortement la
population locale. Cette érosion de la biodiversité s'accompagne
d'une réduction des superficies forestières, menaçant
ainsi dangereusement la survie de certains animaux.Sous la poussée
démographique galopante, la recherche de terres propices à
l'agriculture conduit à un important défrichement et à un
accroissement des demandes en énergie et en ressources naturelles alors
même que leur disponibilité se trouve de plus en plus
limitée (UICN, 2002 ; Dia, 2003). Face à ces facteurs de
dégradation croissants, l'idée de protection de la nature et des
ressources biologiques s'impose (RAPAC, 2007).
Le classement du Lac Fitri comme réserve de
biosphère par le gouvernement tchadien depuis1989 n'est pas toujours
effectif. Cette situation doit interpeller le Gouvernement tchadien ainsi que
les ONG pour une plus grande attention afin de créer des structures de
gestion concertée et de cadres de prise de décisions pour cet
écosystème peu connu par les scientifiques mais beaucoup plus par
les agents destructeurs de l'environnement. En effet, l'exploitation anarchique
et excessive de ces ressources exige des interventions urgentes basées
sur de nouvelles règles plus solides que les précédentes
jugées sans effets. Pour assurer la conservation de ces ressources
exploitées aujourd'hui de façon non durable et améliorer
la sécurité alimentaire dans cette région, il faut adopter
une approche globale et intégrée du développement :
une intervention urgente et différente de celle du passé est
nécessaire pour inverser la tendance actuelle.
SUGGESTIONS
La région du lac Fitri reconnue comme Réserve de
la Biosphère et site d'importance internationale est en voie de
dégradation avancée. Elle ne bénéficie d'aucune
mesure de protection et de conservation de ses ressources naturelles telle que
prévu dans les documents cadres. C'est pourquoi,il est urgent et
nécessaire de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire
de cette zone une véritable aire protégée en mettant
surtout l'accent sur les obligations de la protection de
l'environnement :
Ø dans une zone à haute potentialité
touristique où cohabitent une faune et une flore riches et
variées, l'écotourisme pourrait y être
développé afin de valoriser économiquement les sites qui
seront mis en défens;
Ø des jardins botaniques villageois et des dispositifs
de suivi à long terme doivent être crées et
installés afin de permettre la conservation de certaines espèces
utiles (utilisées en médecine traditionnelle,
alimentation...);
Ø identifier et recenser les sites fragiles qui sont
menacés par les pressions anthropiques et les aléas climatiques
afin d'y mener des actions assurant leur conservation et leur
réhabilitation;
Ø reboiser les sols nus qui sont en croissance dans le
Fitri et encourager l'intensification au détriment de la production
extensives telle que pratiquée dans le Fitri et comme partout au Tchadet
reconnues comme l'un des principaux facteurs de dégradation de
l'environnement
Ø réfléchir à des politiques de
protection des ressources naturelles basées sur la sensibilisation des
populations dans l'utilisation des foyers améliorés, des gaz
butanes, la formation des populations aux techniques d'exploitation de
bois-énergie et de leur restauration...
Ø créer des forêts communautaires qui
seront gérées par les populations pour une gestion rationnelle et
durable des ressources forestières.
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ANNEXES
Annexe 1
Fiche inventaire des ligneux
Date :.............................. N° de
relevé........................
Localité............................................................
Coordonnées
GPS..........................................
Type de
formation...................................................
Espèce (s) dominante
(s)................................................
Nom des espèces
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DHP
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Ht (m)
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Annexe 2
Fiche d'inventaire des ligneux
Date :..../.... /...../
Opérateur :........................
Parcelle :...............................
Placeau N° :......................
Espèces
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Code
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N° Souche
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N° Brin
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C Base
(cm)
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C130
cm
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Hauteur
cm
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Observation
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Annexe 3
Fiche d'enquête ethnobotanique
0 - Identification
Feuille d'enquête
n°........................................Auteur
:..................................................
Date :
............................................................. Village
:..............................................
Nom et Prénom
:.........................................................................................................
Age :.....................................Sexe : Masculin
Féminin
Ethnie : Boulala Arabe Kouka Autres
Activités :
___________________________________________________________________________________________________________________________________________________
_______________________________________________________
I - Rapport avec la végétation ligneuse
Les différentes fonctions de la végétation
ligneuse :
1. Source de produits alimentaires
2. Source de produits comestibles
4. Source de produits pour la construction : bois
Paille Autres
5. Sources de produits médicaux
6. Lieu de cultes ou de rites
7. Pâturage
8. Autres
II - Utilisations des espèces
végétales ligneuses
Code : 1 = Alimentation ; 2 = Energie 3 = Outils ; 4 = Habitat ;
5 = Santé ; 6 = Usage cultuel ; 7 = Autres ;
Degré de préférence : a = très, b =
moyen, c = peu
Espèces
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Type d'utilisation
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Partie utilisée
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Période de collecte
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Degré de préférence
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Autres informations
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III - Historique et état de la
végétation ligneuse dans le lac-fitri
III.1 Quelles sont les tendances
évolutives de la végétation ligneuse dans le lac-fitri ?
Amélioration Statique
Dégradation
5) Autres
_________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
6) Quels sont les changements observés ces
dernières années au niveau des ligneux ? Donnez les noms et le
temps de changement correspondant
___________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
7) Quels sont les ligneux qui donnent plus de fourrages aux
troupeaux en période de rareté de pâturage ?
_________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
8) Quelles sont les activités qui participent à la
dynamique de la végétation ligneuse dans le lac Fitri ?
_________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
9) Quelles sont les causes probables de l'évolution des
espèces ligneuses dans le lac-Fitri?
____________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
10) Que proposez-vous pour remédier à la situation
?
______________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
11) Quelles sont les espèces végétales qui
ont disparu dans la région du Fitri ?
____________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
12) Quelles sont les espèces végétales qui
sont menacées de disparition dans la région du Fitri ?
_________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
13) Quand les avez-vous vues dans la région du Fitri
pour la dernière fois ?
___________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
14) Qu'est-ce qui explique selon vous la disparition de ces
ligneux ?
________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
15) Quelles sont les espèces végétales
ligneuses qui sont apparues ou qui sont en expansion ?
_____________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
16) Quand les avez-vous vues dans la région du Fitri pour
la première fois ?
_____________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
17) Qu'est-ce qui explique selon vous l'apparition de ces
ligneux ?
_____________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
18) Qu'est-ce qui explique selon vous le bon développement
de ces ligneux ?
_____________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
19) Comment le milieu naturel du lac Fitri a évolué
de 1974 jusqu'à nos jours ?
_________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
20) Est-ce-que le lac Fitri a disparu pendant les années
de sécheresse qu'a connue le Tchad ?
______________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
IV - Gestion des ressources naturelles du lac
Fitri
1. A qui appartiennent les ressources naturelles du lac Fitri ?
Au sultanA tout le monde (Tchadien) Au gouvernement Au service
des eaux et forêts
Autres :
____________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
2. Vous sentez-vous responsables de la
protection de l'environnement ? Oui Non Pourquoi ?
__________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
3. Quels sont les rapports avec les services
impliqués dans la protection de l'environnement dans le lac Fitri?
_____________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
4. Que proposez-vous pour une meilleure gestion
des ressources naturelles du lac Fitri ?
Interdiction de couper les bois
Responsabiliser les populations dans la protection
Confier la protection des ressources naturelles aux populations
Y interdire le pâturage
Renforcer le service forestier
L'aménager en créant des réserves
Autres
__________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
5. Si vous devez procéder à des
opérations de plantation, quelles sont les espèces
végétales que vous choisirez ? Pourquoi ?
_____________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
6.Quel est l'impact de la classification du lac
Fitri dans les zones humides d'importance internationale par la Convention de
Ramsar depuis 1989??
________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________
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