L'HABITAT PARTICIPATIF :
PROGRAMME ALTERNATIF DE
LOGEMENT
Stratégie d'une SEM d'aménagement : la SERL, en
matière d'habitat participatif
2015 - 2016
Directeur de recherche Sabine Guitel
FERARD Anthony
II
L'HABITAT PARTICIPATIF : PROGRAMME
ALTERNATIF DE LOGEMENT
Stratégie d'une SEM d'aménagement : la SERL, en
matière d'habitat
participatif
III
2015 - 2016
Directeur de recherche
FERARD Anthony
Sabine Guitel
iv
AVERTISSEMENT
Cette recherche a fait appel à des lectures,
enquêtes et interviews. Tout emprunt à des contenus d'interviews,
des écrits autres que strictement personnel, toute reproduction et
citation, font systématiquement l'objet d'un
référencement.
L'auteur de cette recherche a signé une attestation sur
l'honneur de non plagiat.
v
FORMATION PAR LA RECHERCHE ET PROJET DE FIN D'éTUDES EN
GENIE DE L'AMENAGEMENT
La formation au génie de l'aménagement,
assurée par le département aménagement de l'Ecole
Polytechnique de l'Université de Tours, associe dans le champ de
l'urbanisme et de l'aménagement, l'acquisition de connaissances
fondamentales, l'acquisition de techniques et de savoir faire, la formation
à la pratique professionnelle et la formation par la recherche. Cette
dernière ne vise pas à former les seuls futurs
élèves désireux de prolonger leur formation par les
études doctorales, mais tout en ouvrant à cette voie, elle vise
tout d'abord à favoriser la capacité des futurs ingénieurs
à :
Accroître leurs compétences en matière de
pratique professionnelle par la mobilisation de connaissances et de techniques,
dont les fondements et contenus ont été explorés le plus
finement possible afin d'en assurer une bonne maîtrise intellectuelle et
pratique,
Accroître la capacité des ingénieurs en
génie de l'aménagement à innover tant en matière de
méthodes que d'outils, mobilisables pour affronter et résoudre
les problèmes complexes posés par l'organisation et la gestion
des espaces.
La formation par la recherche inclut un exercice individuel de
recherche, le projet de fin d'études (P.F.E.), situé en
dernière année de formation des élèves
ingénieurs. Cet exercice correspond à un stage d'une durée
minimum de trois mois, en laboratoire de recherche, principalement au sein de
l'équipe Ingénierie du Projet d'Aménagement, Paysage et
Environnement de l'UMR 6173 CITERES à laquelle appartiennent les
enseignants-chercheurs du département aménagement.
Le travail de recherche, dont l'objectif de base est
d'acquérir une compétence méthodologique en matière
de recherche, doit répondre à l'un des deux grands objectifs :
Développer toute ou partie d'une méthode ou d'un
outil nouveau permettant le traitement innovant d'un problème
d'aménagement
Approfondir les connaissances de base pour mieux affronter une
question complexe en matière d'aménagement.
Afin de valoriser ce travail de recherche nous avons
décidé de mettre en ligne sur la base du Système
Universitaire de Documentation (SUDOC), les mémoires à partir de
la mention bien.
vi
REMERCIEMENTS
Ce PFE s'est déroulé dans le cadre d'un contrat
de professionnalisation réalisé à la SERL. Je tiens en
premier lieu à remercier sincèrement Audrey Delaloy et Clara
Thomas pour avoir encadré ce travail mais surtout pour m'avoir offert la
chance d'effectuer ma première grande expérience professionnelle
au sein de la SERL.
Un grand merci également à l'ensemble des
salariés de la SERL pour l'accueil que vous m'avez
réservé
Je tiens à remercier Sabine Guitel tutrice sur ce
projet pour son aide précieuse, ses conseils et sa gentillesse.
Je tiens également à remercier toutes les
personnes que j'ai rencontré lors de mes entretiens et qui ont
accepté de me livrer leurs expériences sur le sujet de l'habitat
participatif.
Dernièrement, je remercie Lucie et Nicolas pour leurs
relectures et leurs conseils toujours avisés.
7
SOMMAIRE
Sommaire
Introduction générale
|
7
9
|
|
1.
|
Définition de l'objet de recherche
|
9
|
|
2.
|
Origines et motivations de l'étude
|
10
|
|
3.
|
Question de recherche
|
11
|
|
4.
|
Méthodologie
|
11
|
|
5.
|
Structure du travail
|
12
|
I)
|
L'HABITAT participatif : de quoi parlons-nous ?
|
14
|
A)
|
|
Différentes formes d'habitat participatif
|
14
|
|
1.
|
Quelle(s) définition(s) pour l'habitat participatif '
|
14
|
|
2. Quelles sont les formes juridiques d'habitat participatif '
|
16
|
|
B)
|
État des lieux de l'habitat participatif
|
20
|
|
1.
|
L'habitat participatif à l'étranger, quelles
influences pour le(s) modèle(s) français '
|
20
|
|
2.
|
L'habitat participatif en France, portrait-robot d'un
modèle qui peine à se développer.
|
27
|
|
3.
|
La France, le choix d'une politique d'accès au logement
différente
|
37
|
|
C)
|
|
La loi ALUR et l'hp quelles conséquences ?
|
39
|
|
1.
|
Genèse de cette loi en lien avec l'habitat participatif
|
39
|
|
2.
|
Les nouveaux statuts juridiques et leurs conséquences
|
39
|
|
3.
|
Les décrets attendus pour 2016
|
42
|
|
II)
|
|
La SERL et la métropole Lyonnaise, deux acteurs
institutionnels à la
|
|
recherche d'innovations en matière d'offre de
logement.
|
46
|
A)
|
|
La SERL, un aménageur qui innove dans sa gestion
de projet
|
47
|
|
1.
|
Étude sur les caractéristiques de la SERL
|
47
|
|
2.
|
Les différentes étapes et les
caractéristiques économiques d'un contrat de concession
|
49
|
|
3.
|
La question de la gestion financière d'un projet
d'aménagement
|
53
|
|
B)
|
|
La SERL, un aménageur intimement lié
à un territoire, la métropole Lyonnaise
|
59
|
|
1.
|
La Métropole Lyonnaise, une institution en mouvance
|
59
|
|
2.
|
La Métropole de Lyon, vers un modèle «
Bottom-Up » '
|
61
|
|
3.
|
La SERL, une structure qui s'adapte aux évolutions de la
Métropole de Lyon
|
62
|
C)
|
|
La métropole Lyonnaise, un territoire fertile pour
le développement de l'habitat
|
|
participatif ? 64
1. La Métropole Lyonnaise, territoire d'une
expérience emblématique en matière d'habitat
participatif, le village vertical 64
2. L'influence d'Habicoop sur le développement de
l'habitat participatif à Lyon 69
3. Quel(s) avenir(s) pour l'habitat participatif sur le
territoire métropolitain ' 71
III) Quelle(s) stratégie(s) pour la SERL en
matière d'habitat participatif ? 79
A) L'habitat participatif quelles conséquences sur
un projet urbain ? 79
1. L'habitat participatif, quelles conséquences sur
l'accession au logement ' 80
2. L'habitat participatif, quelles conséquences pour la
durée et le coût d'un projet ' 82
3. L'habitat participatif, des projets plus risqués '
85
B) Quelles expertises la SERL peut-elle mettre au profit
de la consolidation des
opérations d'habitat participatif ? 88
8
|
1.
|
La SERL des capacités importantes pour le
développement de l'H.P
|
88
|
|
2.
|
L'habitat participatif, quelles conséquences pour le
métier d'aménageur ?
|
88
|
|
3.
|
Des expériences infructueuses (à ce jour) en
matière d'habitat participatif
|
90
|
|
C)
|
|
Proposition d'un modèle opérationnel pour
développer l'Habitat Participatif.
|
92
|
|
1.
|
Identifier la parcelle, dimensionner le projet, adapter son
planning
|
92
|
|
2.
|
Associer un bailleur social au projet
|
93
|
|
3.
|
Adapter ses procédures
|
95
|
Conclusion 97
Bibliographie 99
Annexes 103
Table des figures 103
Entretiens 105
Journée thématique 105
M.Chanal 107
S.GOLFOUSE 111
M.Combourieu 114
B.Pont 117
Mind-Mapping sur le sujet 120
9
HABITAT PARTICIPATIF : MONTAGE
ALTERNATIF DE LOGEMENT
INTRODUCTION GÉNÉRALE
1. Définition de l'objet de recherche
C
o-working, co-voiturage, crowdfounding, économie
collaborative, entrepreneuriat social, colunching, couch surfing, etc... on
assiste depuis
quelques années à une véritable
révolution dans notre société. Avec l'explosion des
réseaux sociaux liée à l'avènement d'internet,
c'est toute la vision classique de l'économie qui devrait être
bouleversée. C'est en tout cas la vision de Jérémy Rifkin,
économiste américain, auteur de la troisième
révolution industrielle qui expose en 2014 dans la nouvelle
société du coût marginal zéro, sa vision future
d'une « société basée sur l'échange »
où « l'économie aura une forme hybride entre capitalisme et
partage ». Si cette vision peut paraître utopiste, elle trouve un
écho de plus en plus important au sein de notre société.
En témoigne, le succès grandissant des plateformes collaboratives
comme oui share, dont D. Filippova, (connector1 de la
plateforme) faisait état en 2014, lors des conférences TEDx
(organisation autoproclamée « propagateur d'idée »), en
annonçant l'avènement prochain de multiples formes de
démocraties participatives2.
Le marché de l'immobilier n'échappe pas à
cette évolution. S'il reste en France traditionnel avec la
quasi-totalité des productions immobilières assurées par
les particuliers, les opérateurs d'habitation à loyer
modéré (HLM) et promoteurs privés3, une
nouvelle forme d'habiter semble émerger.
Il existe une multitude de mots et expressions pour qualifier
ce mouvement, nous avons choisi d'utiliser dans cette étude le terme
d'« habitat participatif ». Il renvoie à l'idée d'un
« engagement collectif [...] de la conception à la gestion de
l'ensemble immobilier » (Devaux, 2015), engagement fondé sur «
la participation et la coopération, replaçant le citoyen et
l'habitant au centre des préoccupations et de l'action »
(R.Pointelin, 2016). L'habitat participatif doit bien être compris dans
cette
1 Connector est le mot utilisé pour décrire les
membres les plus impliqués dans la plateforme.
2 L'engagement citoyen face au mythe du plein
emploi | Diana Filippova | TEDxParis - YouTube. 2016. Disponible sur:
https://www.youtube.com/watch?v=PX4DUIuJhjs.
[Visionnée le 05 Mars 2016].
3 Entre 2000 et 2010, la construction neuve s'est
décomposée de cette façon 40 000 unités HLM, 90 000
promotion immobilière privée, 160 000 particuliers ( Driant,
2010)
10
étude comme un terme générique et ne doit
pas faire oublier les autres expressions parfois utilisées lorsque l'on
parle d'alternative aux formes classiques de logement4.
La notion d'alternative est primordiale dans la production
d'habitat participatif, c'est pour cette raison qu'il est souvent
présenté comme la « troisième voie d'accès au
logement »5, les deux premières étant les
logements privés et les logements sociaux, qui sont en France les formes
classiques de logements.
L'habitat participatif ne représente pour le moment
quasiment rien sur le marché du logement français (Devaux, 2015).
En effet, on dénombre seulement entre 300 et 400 projets6 en
cours ou réalisés sur le territoire7. Néanmoins
ce sujet fait l'objet d'un nombre de plus en plus important de thèses,
d'articles, de séminaires, de journées thématiques qui
illustrent un intérêt de plus en plus fort pour cet outil de
production. On assiste également à une institutionnalisation de
cette « troisième voie » pour le logement. Si à
l'origine, ce mouvement était cantonné à un cercle de
militants il s'étend et intéresse de plus en plus le monde
professionnel (S.Bresson, 2014).
2. Origines et motivations de l'étude
Le présent travail est un exemple de cet
intérêt des professionnels pour l'habitat participatif. En effet,
cette étude est à l'origine une volonté de la SERL,
société d'économie mixte de la Métropole de Lyon
depuis 1957. Cet aménageur intervient le plus souvent comme maître
d'ouvrage dans des opérations de renouvellement urbain ou de
création de nouveaux pôles de centralité, dans des projets
urbains8.
Ce PFE a été initié en septembre 2015 et
vient conclure ma formation d'ingénieur de l'aménagement et de
l'environnement effectuée à Polytech Tours. Il a la
particularité d'avoir été réalisé à
l'issue d'une année effectuée en alternance dans le cadre d'un
contrat de professionnalisation avec la SERL, pendant laquelle j'ai eu la
fonction d'assistant d'études.
4 Nous reviendrons de manière
délibérée dans la partie I sur la raison du choix de
l'expression habitat participatif, ainsi que sur la définition
précise de cette notion.
5 Habitat participatif, la "copro" de demain ?. 2016.
Habitat participatif, la "copro" de demain ?. [WEB]
Disponible sur :
http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/11/16/habitat-participatif-la-copro-de-demain
3514984 3234.html. [Accès 17 March 2016].
6 Les Français découvrent l'habitat
participatif. 2016. Les Français découvrent l'habitat
participatif. [WEB] Disponibles:
http://www.lemonde.fr/logement/article/2015/07/20/les-francais-decouvrent-l-habitat-
participatif 4690840 1653445.html. [Accès le 17
Mars 2016].
7 Il faut préciser qu'il est difficile
d'avoir des données sur le nombre de projet en habitat participatif. Cet
enjeu a d'ailleurs été fléché comme un besoin
fondamental lors des Rencontres nationales de l'habitat participatif en juillet
2015. La mise en place de cette base de donnée doit intervenir courant
2016.
8 Il s'agit issue que d'une introduction
très succincte de la SERL. Son rôle, son mode de fonctionnement
ses particularités et son domaine d'intervention feront l'objet d'une
partie complète dans ce mémoire. Partie II
11
Ce sujet de PFE n'est pas seulement une demande de la part de
la SERL, il s'inscrit à plus grande échelle dans une
thématique générale qui m'apparaît fondamentale,
celle de la concertation et de l'intégration des habitants dans le
processus de production de la ville.
Si la thématique n'a pas évolué,
l'approche a fait l'objet de nombreux soubresauts et réorientations. Ces
changements sont le fruit de lectures, de rencontres mais surtout
d'échanges sur la thématique de l'habitat participatif avec les
membres de la SERL.
3. Question de recherche
La question suivante guidera le travail de recherche :
Comment la SERL, acteur opérationnel de
l'aménagement, peut elle appréhender une forme innovante de
création de logement : l'habitat participatif ?
Cette problématique est une synthèse de plusieurs
interrogations :
· Qu'est-ce que l'habitat participatif ?
· Quel contexte de développement en France
?
· Quelles expertises la SERL peut elle mettre au
profit de la consolidation des opérations d'habitat participatif
?
· Quel(s) avenir(s) pour l'habitat participatif sur
le territoire de la Métropole de Lyon ?
· Qu'est-ce que l'habitat participatif suppose comme
: compétence, savoir-faire, réseau, ... ?
4. Méthodologie
Afin de répondre à cette question, j'ai
développé une stratégie basée sur la mise en
relation et le plus souvent la confrontation des points de vue : entre
habitants, universitaire, associations défenseurs de l'habitat
participatif et professionnels de l'aménagement.
Cette approche est justifiée par le cadre de cette
étude. Ayant réalisée celle-ci durant une année en
contrat de professionnalisation, mon approche du métier à
énormément évoluée, entre le début de cette
étude effectuée dans un cadre universitaire et la fin de celle-ci
au sein de la SERL.
Ce travail s'est fait de manière itératif,
plusieurs rencontres ont fait évoluer mon point de vu :
·
12
Sylvette Denefle, professeur des universités en
sociologie. Université de Tours
· Participation à une journée
conférence organisée par la SCET (Société
Centrale pour l'Équipement du Territoire) et la Caisse de
dépôts avec pour thématique « Habitat participatif
: nouveau levier de développement pour les aménageurs et les
bailleurs »
· Benjamin Pont, créateur de la structure
Graine d'idée, accompagnateur de groupe d'habitants en habitat
participatif
· Martine Chanal, chargée de mission
habitat Grand Lyon
· Stéphanie Golfouse, Rhône Saône
Habitat, Responsable développement et patrimoine
· Conférence organisée par Habicoop
sur la thématique du vieillissement
· Conférence de la coopérative
Chamarel
· De nombreux échanges avec Audrey Delaloy,
référente renouvellement urbain à la SERL
La diversité de ces rencontres : personnes du monde
universitaire, de l'associatif, du monde professionnel, ont fortement
influencé ce travail. Elles m'ont permis de venir confronter des
approches souvent opposées. Les conclusions de ce travail sont les
résultats de ces rencontres et d'une approche entre étude
universitaire et analyse professionnelle.
5. Structure du travail
Au fur et à mesure de l'avancée de ce travail
de recherche il paraissait de plus en plus évident de préciser un
certain nombre de points relatif à l'habitat participatif et aux
missions de la SERL. Ces éléments ont permis de structurer les
différentes parties de ce mémoire.
Partie 1 : Comprendre l'habitat participatif
La première question, la plus évidente mais pas
la plus simple, celle de la définition de l'habitat participatif. Nous
allons le voir par la suite le terme d'habitat participatif est une expression
générique et reste encore difficilement définissable.
L'absence d'une unanimité sémantique a
d'ailleurs rendu les recherches difficiles, il a fallu être vigilent sur
la signification des notions mobilisées par les différents
auteurs. En effet, certains parlent d'habitat participatif, d'habitat
alternatif, d'autres d'habitat coopératif... avec à chaque fois
des significations biens différentes.
À l'issue de ce travail de définition du
thème de recherche, nous effectuerons un état des lieux de
l'habitat participatif en France. Comme nous le verrons, le contexte
français du développement de l'habitat participatif est fortement
lié à la mise en place
13
de la loi ALUR, nous consacrerons donc une partie aux
modifications apportées par cette loi.
Partie 2 : La SERL et la Métropole Lyonnaise, deux
acteurs institutionnels à la recherche d'innovations en matière
d'offre de logement
La deuxième partie introduit l'aménageur : la
SERL ainsi que son commanditaire : la Métropole de Lyon. Il s'agira ici
de faire une description du rôle de cet aménageur, ainsi que ses
particularités et plus particulièrement comprendre sa
manière de monter une opération d'aménagement. Cette
étude sera contextualisée à l'espace géographique
d'intervention de la SERL, la Métropole Lyonnaise. Nous verrons ainsi
que ce territoire est en constante évolution et que la SERL participe
grandement à celle-ci. L'objectif de cette partie est de venir faire le
lien entre l'habitat participatif, la SERL et la Métropole afin de
définir quelles sont les opportunités d'introduction de ce type
de produit immobilier à l'échelle du Grand Lyon.
Partie 3 : Quelle(s) stratégie(s) pour la SERL
en matière d'habitat participatif ?
La troisième partie consiste en une analyse du montage
opérationnel en habitat participatif. L'objectif est ici de faire
état des risques liées à ce type d'opération et de
la capacité de la SERL à venir en appui de ce type de montage.
Enfin, nous viendrons proposer un modèle permettant le
développement de l'habitat participatif. Ce modèle est le
résultat de l'ensemble des éléments de cette
étude.
Conclusion
La conclusion engage une discussion sur l'utilisation future
de ce travail pour la SERL et propose des stratégies ainsi que des
pistes d'évolution sur le développement de l'habitat
participatif.
14
I) L'HABITAT PARTICIPATIF : DE QUOI PARLONS-NOUS ?
C
ette première partie a pour objectif de définir
et de dresser un état des lieux de l'habitat participatif. Dans cette
optique nous aborderons les questions suivantes : Qu'est ce que l'habitat
participatif ? Quelles sont les caractéristiques de ce type de montage ?
Quelles sont les formes juridiques de ce type d'habitat ? Comment l'habitat
participatif est-il apparu ? Quel développement en France et à
l'étranger ?
Cette analyse sera structurée en trois parties. Dans
un premier temps nous définirons l'habitat participatif en identifiant
les caractéristiques de cette forme d'habitat et sa définition
juridique. Ensuite, nous dresserons un état des lieux de l'habitat
participatif en France, nous verrons ainsi que pour comprendre le modèle
qui se développe dans notre pays, une action de benchmarking est
indispensable. Pour finir, nous analyserons les conséquences de la loi
ALUR sur le développement de l'habitat participatif en s'interrogeant
sur une probable institutionnalisation du mouvement.
A) DIFFÉRENTES FORMES D'HABITAT PARTICIPATIF
1. Quelle(s) définition(s) pour l'habitat participatif
?
H
abitat groupé ; auto-promotion ; habitat
partagé ; habitat participatif ; cohousing ; coopératives
d'habitants ; habitat coopératif ; habitat collectif choisi... Il existe
une multitude de termes pour définir notre sujet d'étude ce qui
témoigne d'une diversité en la matière. L'emploi des uns
ou des autres, peut s'expliquer, comme nous allons le voir par la suite, par
différents éléments liés aux
caractéristiques propres de chaque projet, que ce soit la structure
juridique utilisée ou bien le rôle du groupe d'habitants dans ce
processus. L'habitat participatif en France peut être comparé
à une nébuleuse dans l'offre de logement du parc immobilier, ni
logement social, ni logement privé, ni logement collectif, le
caractère hybride de cette forme de logement rend sa définition
très complexe.
Dans cette étude, nous avons choisi d'utiliser
l'expression d'« habitat participatif » pour qualifier notre sujet.
Ce choix s'explique par son utilisation par le législateur dans loi ALUR
de 2014. Ce cadre réglementaire participe aujourd'hui à la
clarification du mouvement participatif et permet la fédération
des acteurs de ce domaine autour d'une même expression.
Réclamée depuis des années, la loi ALUR
a donné en plus d'une définition, un cadre juridique à ce
type de logement. Elle définit l'habitat participatif comme «
une démarche citoyenne qui permet à des personnes physiques
de s'associer, le cas échéant avec des personnes morales, afin de
participer à la définition et à la conception de leurs
logements et des espaces destinés à un usage commun, de
15
construire ou d'acquérir un ou plusieurs immeubles
destinés à leur habitation et, le cas échéant,
d'assurer la gestion ultérieure des immeubles construits ou acquis.
»
Étant donné le caractère
générique de cette définition, nous avons choisi
d'effectuer une précision sur cet élément et
définissons l'habitat participatif à partir de l'analyse faite
par Camille Devaux pour cadrer notre étude. Cette auteure a
publié plusieurs ouvrages sur le thème de l'habitat participatif
dont « L'habitat participatif, de l'initiation habitante à l'action
publique » qui fait état des lieux du processus
d'institutionnalisation du mouvement de l'habitat participatif. C'est sur la
base des critères développés par cette auteure que nous
définirons dans notre analyse les opérations d'habitat
participatif qui se caractérisent par :
· L'engagement volontaire des ménages dans le
projet,
· Une participation à la conception et/ou à
la gestion du projet,
· Une vocation collective attribuée au projet par
les futurs habitants,
· L'existence d'espaces communs,
· L'existence d'un socle commun de valeurs faisant
écho au partage, au lien social et/ou à l'écologie,
· Un objectif économique secondaire.
Définir l'habitat participatif à partir de ces
six points nous permet d'avoir une définition plus précise et
opérationnelle que celle fournit par la loi ALUR. On voit ainsi à
partir de ces caractéristiques plusieurs éléments qui se
dégagent.
En premier lieu, l'aspect participatif qui place les
habitants au coeur du projet. Ce qui sous-entend plusieurs
éléments, ils participent à la conception du projet, pas
seulement à son terme mais dès l'origine de celui-ci. Cette
participation se poursuit également après la construction du
projet avec la nécessité d'une intégration au processus de
décision du groupe via un mode de prise de décision
démocratique.
L'habitat participatif sous-entend également un aspect
collaboratif dans le mode de vie avec l'existence de pièces communes,
buanderie, chambre d'amis, espaces extérieurs etc. Un dernier point dans
la compréhension de l'habitat participatif, c'est l'importance des
espaces privatifs. Vivre en habitat participatif, ne-sous entend pas la
suppression de toutes notions de propriété privée, mais
plutôt une gestion collective de certains espaces et une participation
à la vie collaborative du groupe.
16
Figure 1 : Infographie de l'habitat participatif.
Réalisation personnelle
2. Quelles sont les formes juridiques d'habitat participatif
?
Décrire la forme juridique de développement de
l'habitat participatif demeure un point délicat de l'analyse de cette
forme de logement. En effet, jusqu'à la mise en place de la loi ALUR
(Voir partie I-C) aucun statut ne permettait la mise en place de manière
efficiente d'un collectif d'habitat participatif.
La présente partie consiste à décrire
ces statuts et d'effectuer une synthèse comparative des modèles
juridiques existants. En raison de l'importance de l'introduction de la loi
ALUR et des nouveautés qu'elle apporte, une partie exclusive sera
consacrée aux nouveaux statuts juridiques introduites par cette loi.
Jusqu'à présent les collectifs utilisaient des
formes juridiques classiques qu'ils adaptaient en fonction des volontés
du groupement et qui évoluaient parfois au fur et à mesure de
l'avancement du projet.
1. L'indivision et/ou copropriété
L'indivision est un modèle juridique permettant
à plusieurs personnes d'être propriétaire d'un même
bien, sans nécessairement recourir à la création d'une
personne morale. Les habitants sont ainsi propriétaires à hauteur
de leur contribution financière via un système de quotes-parts.
Ce statut nécessite peu de démarches administratives en raison de
la non-création d'une personnalité morale.
A première vue ce modèle semble très
simple, cependant la gestion quotidienne rend difficile la
pérennité de ce modèle sur le long terme. En effet, pour
toutes prises de décision au quotidien la majorité des 2/3 des
droits indivis est nécessaire, ce qui entraîne bien souvent des
blocages importants dans la gestion au quotidien des biens meubles.
17
Cette forme juridique n'est pas conçue pour perdurer
dans le temps, en effet la gestion des départs et des arrivées
est rendue impossible par le droit français. En effet, selon l'article
815 du Code Civile, « nul ne peut être contraint à demeurer
dans l'indivision et le partage [É] à moins qu'il n'y ait
été sursis par jugement ou convention », un des
propriétaires s'il le souhaite peut donc décider de la vente du
bien et donc entraîner la fin de l'indivision.
C'est pour cette raison que l'indivision évolue
souvent en copropriété à l'issue de la réception
des logements. Cette forme juridique est très classique dans le
modèle français. Ici, les habitant se regroupent en syndicat de
copropriété, l'organisation et le fonctionnement étant
fixés dans le règlement de copropriété.
Si ce modèle est pour le moment largement
utilisé, c'est avant tout en raison de l'absence de forme juridique
réellement adaptée à l'habitat participatif. En effet, la
copropriété est un modèle très rigide et selon
M.Combourieu, notaire lyonnaise, « peu adaptée aux valeurs de
l'habitat participatif ».
2. Les sociétés civiles
immobilières (SCI)
La société civile est un statut qui introduit
au montage une personne morale. Ainsi, c'est la société qui
devient propriétaire du terrain et des constructions et non pas les
habitants, comme dans le modèle précédent. Il permet
d'avoir un bien détenu par un collectif de personnes. Deux
modèles apparaissent et semblent être le plus couramment
utilisés par les groupes d'habitat participatif.
Société civile d'attribution
(SCIA)
Ce statut juridique peut être utilisé pour la
construction ou l'acquisition d'un bien meuble. Contrairement à un
modèle classique de propriété, les habitants ne sont pas
propriétaires mais ont la jouissance du bien. Dans ce système la
société est propriétaire du bien, mais la jouissance est
réservée aux groupes de propriétaires des parts sociales.
Une division de l'immeuble va être réalisée et
consignée dans l'état descriptif de division, ce document fait
foi de la division et est couplé à un règlement de
jouissance. A chaque lot va correspondre un groupe de parts sociales de la
société. Chaque associé est donc propriétaire de
parts sociales et aura la jouissance du lot qui est rattaché à
son groupe de parts.
Lorsqu'on quitte la société (donc son logement)
on cède ses parts, les autres associés ont un droit de
préemption, c'est-à-dire une priorité d'achat. S'il ne
souhaite pas acheter, il y a une procédure d'agrément pour un
nouvel entrant qui doit être accepté par l'ensemble des
occupants.
Un choix libre est effectué par le groupement en ce
qui concerne la possibilité d'effectuer une plus-value lors de la
revente de son logement.
18
A l'origine ce montage avait pour objectif de permettre une
construction à plusieurs. Ce statut était effectif le temps de la
construction et devait se transformer automatiquement en
copropriété à l'issue de cette étape. Le
règlement de jouissance devenant par la même occasion
règlement de copropriété. L'utilisation en habitat
participatif n'est donc qu'une adaptation du modèle d'origine pour ce
type de projet.
Société civile avec création
d'une association.
Cette structure juridique est également une adaptation
de la SCI classique aux valeurs de l'habitat participatif. Dans ce
modèle, on constitue également une société personne
morale propriétaire du bien. À la différence de SCIA on
met en place en parallèle de la société une association
constituée des mêmes membres. Pour rentrer dans cette association
il faut acheter des parts sociales donnant un droit de jouissance du bien.
L'association va détenir 90% de la société et les 10%
restants sont acquis par les membres de l'association mais sous leurs noms
propres. Chaque personne est donc propriétaire d'une faible valeur et
pourra revendre cette part lorsqu'elle quittera le logement. Dans ce
modèle il y a généralement la volonté d'introduire
un principe de non-spéculation.
Contrairement à la SCIA, dans ce modèle il n'y
a pas de division du bien immobilier, le bien est propriété de
l'ensemble des associés. La difficulté de ce modèle est
d'obtenir des garanties auprès des banques qui ne sont pas
rassurées par la multitude d'acteurs et la possibilité de
garantie financière. Il nécessite donc d'avoir des apports assez
importants avant de s'engager dans ce type de projet.
3. Les autres montages
Il existe une multitude d'autres formes de montages qui sont
utilisés par les groupements d'habitants. Ces autres formes sont des
détournements par rapport à l'objet initial. On observe par
exemple des groupements qui ont utilisé l'association de loi 1901. On
observe également à la marge l'utilisation de montages qui sont
des hybridations de plusieurs structures, par exemple la SCCI
(Société Coopérative Civile Immobilière) ou SCA
(Société Civile de construction et d'Attribution). Ces
modèles sont utilisés à la marge et ne sont pas optimaux
à la réalisation de projet participatif.
La diversité des montages juridiques observés
illustre bien toutes les possibilités existantes pour monter un projet
en habitat participatif. Néanmoins, nous venons de le voir les groupes
d'habitants en France rencontrent de nombreuses difficultés liées
notamment à l'absence d'un véritable statut juridique qui
reconnaît cette forme de conception et d'habitat de logement. Nous allons
le voir dans la partie suivante, ce n'est pas le cas dans de nombreux pays
européens qui ont fait de l'habitat participatif, une véritable
stratégie en matière de politique du logement.
19
INFORMATiONS CLéS
L'HABITAT PARTICIPATIF C'EST :
· L'ENGAGEMENT VOLONTAIRE DES MéNAGES DANS LE
PROJET
· UNE PARTICIPATION à LA CONCEPTION ET/OU à
LA GESTION DU PROJET
· UNE VOCATION COLLECTIVE ATTRIBUéE AU PROJET PAR
LES FUTURS HABITANTS MAIS UN RESPECT DE L'ESPACE PRIVé
· L'EXISTENCE D'ESPACES COMMUNS
· L'EXISTENCE D'UN SOCLE COMMUN DE VALEURS FAISANT
éCHO AU PARTAGE, AU LIEN SOCIAL ET/OU à L'éCOLOGIE
· UN OBJECTIF éCONOMIQUE SECONDAIRE LES FORMES
JURIDIQUES :
· PAS UN MODèLE UNIQUE MAIS UN CHOIX SELON
LES VALEURS DU GROUPE
· AVANT LA LOI ALUR
- INDIVISION
DIVISION CLASSIQUE SUIVANT LES APPORTS DE CHAQUE MEMBRE
COMPLEXE POUR LA GESTION, MEMBRE QUI QUITTE LE GROUPE,
RECRUTEMENT NOUVELLE PERSONNE...
- SOCIéTé CIVILE IMMOBILIèRES
DEUX FORMES LE PLUS SOUVENT UTILISéES, SCIA : PAS DE
PROPRIéTé, LES HABITANTS ONT LA JOUISSANCE DU BIEN
PROPORTIONNELLEMENT à L'APPORT DE CHAQUE MEMBRE.
LA SOCIéTé CIVILE AVEC CRéATION D'UNE
ASSOCIATION, SIMILAIRE MAIS PAS DE DIVISION DU BIEN, L'ASSOCIATION EST
PROPRIéTAIRE DE L'ENSEMBLE DU BIEN.
· LA LOI ALUR
DONNE UN CADRE JURIDIQUE à LA COOPéRATIVE ET AU
STATUT D'AUTOPROMOTION. (VOIR PARTIE C)
20
B) ÉTAT DES LIEUX DE L'HABITAT
PARTICIPATIF
1. L'habitat participatif à l'étranger, quelles
influences pour le(s)
modèle(s) français ?
C
ontrairement à ce qu'on peut observer en France,
l'habitat participatif est un modèle très largement
développé dans certains pays étrangers. Si pour certains,
il est la résultante de caractéristiques culturelles, il est pour
d'autres la conséquence de l'absence d'une offre suffisante en logements
sociaux. Pour Olivier David, président d'Habicoop et membre du labo de
l'Économie Sociale et Solidaire, « dès lors que
l'État ne va pas subvenir aux besoins de développement de
logements accessibles, c'est la population qui va se mobiliser pour
développer sa propre offre »9. On retrouve ce constat
dans les pays d'Europe du nord, mais également en Amérique du
Nord.
La France, qui dispose d'une offre de logements sociaux
très importante, environ 15 % des résidences
principales10, a choisi une autre forme de développement de
son offre de logement. Néanmoins, on observe aujourd'hui un foisonnement
de projets sur l'ensemble du territoire ainsi qu'un intérêt de
plus en plus fort de la part des ménages pour l'habitat participatif.
Cet attrait s'observe plus particulièrement chez les jeunes couples
vivant en zones tendues (O.David, 2016) qui cherchent un logement abordable et
une autre forme d'habitat.
La présente partie de ce document consiste à
étudier trois modèles qui influencent aujourd'hui la vision
française de cette « nouvelle voie » au logement. L'objectif
est ainsi de comprendre sur quoi se base le développement de l'habitat
participatif en France. Nous aborderons ainsi trois formes d'habitat
participatif : l'habitat coopératif au Canada, le modèle Suisse
et enfin Le Baugruppen en Allemagne.
Trois modèles emblématiques d'habitat
participatif : 1. Le modèle canadien de l'habitat
coopératif
Le Canada est sans doute le pays au monde qui a le plus
développé ce modèle d'habitat. Apparu dans les
années 70, il existe aujourd'hui plus de 2000 coopératives au
Canada. La seule province de Québec recense plus de 50 000 personnes
vivant en habitat participatif. Elles revendiquent des valeurs communes,
à savoir non-
9 Avec Jean-Philippe Magnen du Labo de l'ESS / France Inter.
2016. Avec Jean-Philippe Magnen du Labo de l'ESS /
France Inter. Podcast t:
http://www.franceinter.fr/emission-carnets-de-campagne-avec-jean-philippe-magnen-du-labo-de-less.
[Accès 3 février 2016].
10 Au 1er Janvier 2013, on comptait en
France 4,6 millions de logements sociaux, soit 15 % des résidences
principales. Source Insee.fr
21
spéculation, initiative, participation et
contrôle des coopérateurs sur les projets. S'il existe plusieurs
formes de coopératives au Canada, nous avons choisi de nous concentrer
sur le modèle le plus répandu à savoir « les
coopératives d'habitation locative à possession continue
».
Ici la coopérative est constituée de membres
qui se rassemblent autour d'un projet partagé afin d'accéder
à un logement abordable et de qualité. La coopérative est
alors propriétaire des unités de logements, les locataires sont
donc à la fois propriétaires individuellement de leur logement et
collectivement de l'immeuble en raison de l'adhésion à la
coopérative. Cette adhésion est appelée parts sociales
à la coopérative. La gestion et le contrôle de celle-ci est
alors assurée par leurs membres. La taille des opérations peut
varier de 10 à 220 logements avec des constantes, une localisation
majoritairement dans un tissue urbain ou péri-urbain et une
volonté d'inscrire ce projet dans une dimension de développement
durable.
Le développement de l'habitat coopératif est
fortement lié à une politique volontariste de l'état et
à des subventions très importantes. Ces subventions sont
justifiées par le caractère social des programmes de logement. En
effet, les futurs membres de la coopérative sont
sélectionnés selon des critères de revenus, justifiant les
aides publiques très importantes versées aux coopératives
pour faire baisser le prix des logements.
Afin de se structurer, les coopératives
bénéficient de l'appui d'organisations locales et nationales, on
peut par exemple citer la Confédération Québécoise
des Coopératives d'Habitants (CQCH) et les Fédérations de
l'Habitation Coopérative du Canada (FHCC). Ces organismes peuvent aussi
bien appuyer les groupes sur la formation des membres, sur l'aide à
l'obtention de financements mais effectuent également un travail
important de lobbying auprès des instances gouvernementales.
Figure 2 : Les 155 ménages de la
Coopérative Le coteau vert et l'OBNL Un toit pour tous, quartier
Petite-Patrie à
Montréal.
batirsonquartier.com
22
Bien que le modèle québécois d'habitat
participatif qui se développe depuis plus de trente ans soit un des plus
aboutis au monde, il est aujourd'hui confronté à des défis
importants, le vieillissement de son parc ainsi que celui des habitants.
2. Le modèle Suisse de l'habitat
participatif ou l'habitat coopératif d'utilité
publique
Le mouvement suisse de l'habitat participatif s'est surtout
développé et structuré à partir des années
70-80 en raison de l'apparition au sein de la société civile de
critiques sur les grands ensembles ainsi qu'une prise de conscience des
conséquences de l'étalement urbain et de l'apparition des
mouvements squats à Genève (Golluccio, 2015).
Ce modèle est resté marginal jusqu'en 1990 et
la création de la Centrale d'émission pour la Construction du
Logement (CCL). L'apparition de cette organisation intervient dans un contexte
les taux d'intérêts étaient aux plus hauts et que les
banques entrainant une frilosité des banques à accorder des
prêts. Trois associations faîtières11,
l'Association Suisse pour l'Habitat (ASH), l'Association suisse des
Coopératives d'habitation Radicale (ACR) et l'Association Suisse pour
l'encouragement à la Construction et à la Propriété
(ASCP), vont ainsi créer la CCL. C'est ainsi que va être
adoptée la « charte des maîtres d'ouvrage d'utilité
publique de la Suisse » qui va fixer l'organisation et le
développement de l'habitat coopératif. Ainsi cette forme
d'habitat doit :
· Être non spéculative,
· Fournir des logements abordables de bonne qualité
et durables,
· Intégrer des foyers modestes,
· Faire participer les locataires.
La mise en place de cette charte a été faite en
partenariat avec l'Office Fédéral du logement. L'objectif global
étant de « garantir à tous un logement à des
conditions abordables, [car] les lois du marché ne suffisent pas, il
faut l'action des maîtres d'ouvrage d'utilité publique, soit en
particulier des coopératives de construction et d'habitation
»12. Cette mise en place est une date importante dans le
développement
11 L'association faîtière est un modèle
d'organisation très développé en Suisse, il s'agit d'une
structure qui va regrouper une multitude de petites structures associatives.
Cette association faîtière va ainsi défendre les
intérêts de ses membres et va permettre de mettre en place des
actions de lobbying à l'échelle nationale.
12 Charte des maître d'ouvrage d'utilité
publique, 2013
23
du modèle suisse de l'habitat participatif car elle
institutionnalise le mouvement et le garantit d'utilité publique. Ce
mouvement s'est conforté ensuite en 2003 avec l'adoption de la loi
fédérale sur le logement (LOG) qui encourage les habitats
à des prix et des loyers modérés. Aujourd'hui l'habitat
coopératif représente environ 5% de l'ensemble du parc immobilier
suisse. À Zurich il représente 25% du parc immobilier avec un
objectif d'ici 2025 d'atteindre une proportion de 33% des
logements.13 Le succès du logement coopératif en
Suisse s'explique par des loyers en moyenne 20% inférieurs aux prix du
marché locatif (A.Golluccio, 2011). Comparé au modèle
français, le modèle suisse a atteint une envergure
impressionnante. En effet la plupart des coopératives sont d'environ 100
logements et peuvent représenter des quartiers entiers comme le projet
d'Hunziker où 35 coopératives se sont regroupées pour
créer un quartier de 450 logements !
Figure 3 : Projet Hunziker, un quartier de 35
coopératives soit 450 logements. duplex-architekten
Les instruments d'aide au logement
Coopératif en Suisse
Il existe deux échelons d'aide aux logements en
Suisse. Le premier échelon est celui de la commune, qui est un
interlocuteur particulièrement important dans la logique d'obtention
d'un terrain. Elles peuvent ainsi vendre un terrain bon marché aux
coopératives, accorder un droit de superficie, dans ce cas la
collectivité reste propriétaire et met à disposition un
terrain en échange d'une redevance annuelle et enfin elles peuvent
prêter gratuitement un terrain.
Le second échelon est celui de la
confédération qui va apporter une aide financière, via le
cautionnement de prêts auprès de la coopérative CCL. Comme
on peut le voir sur le schéma ci dessous, la CCL va se procurer des
capitaux sur les marchés à des
13Zurich: l'incroyable dynamisme des
coopératives de logement [en ligne]
https://www.espazium.ch/zurich-lincroyable-dynamisme-des-cooperatives-de-logement
(accès le 16.03.16).
24
conditions très favorables en raison du cautionnement
de la confédération. Seuls les maîtres d'ouvrages
d'utilité publique peuvent solliciter un financement de la CCL, qui
doivent adhérer aux valeurs de la CCL et s'acquitter d'une cotisation
annuelle. Ce montage financier permet à tout groupement souhaitant se
lancer dans un projet participatif de disposer d'un financement
particulièrement important avec des taux particulièrement
intéressants. Cette garantie financière est un des
éléments les plus importants pour comprendre l'essor et la
vitalité du modèle coopératif suisse.
Figure 4 : Structure des logements
coopératifs en Suisse
Un modèle qui inspire Lyon
C'est cette structure qui a influencé celle
défendue depuis dix ans par l'association lyonnaise Habicoop. Cette
association indique que c'est à partir d'un voyage réalisé
par certains membres en Suisse que l'idée de développer ce
modèle en France est apparu. Ce souhait s'est plus ou moins
matérialisé à Villeurbanne. C'est ce que nous verrons
à travers l'étude du projet du village vertical
25
3. Le modèle Allemand du Baugruppen ou
l'autopromotion
Avec 20% de ses logements neufs en immeuble participatif,
l'Allemagne est considérée comme un pays d'Europe pionnier dans
ce domaine. Ce modèle s'est popularisé à partir des
années 90, sous l'impulsion de villes comme Fribourg et Tübingen.
Les Baugruppen, (littéralement «
groupement de construction »), représentent un groupe de futurs
habitants qui vont collectivement faire appel à un
architecte/maître d'oeuvre afin de concevoir un immeuble ou un quartier
d'habitat collectif en autopromotion.
On parle ici d'autopromotion car les ménages
engagés sont leurs propres promoteurs, l'objectif de ces groupements est
ainsi d'économiser sur la rémunération habituellement
réservé aux professionnels. Néanmoins, le collectif ne
disposant pas nécessairement des compétences nécessaires
à la construction d'un projet, il va s'associer à une structure
spécialisée dans l'accompagnement de son projet
d'autopromotion.
Contrairement au modèle français, la politique
allemande en matière de logement social est très largement
décentralisée, en effet celle-ci passe en grande partie par des
subventions d'initiatives privées remplissant des conditions
d'accessibilité à la propriété. Par ce
mécanisme les Baugruppen jouent un rôle important dans la
politique du logement ainsi que dans la pérennisation des loyers
modestes (S.Trudelle, 2010).
Quel statut juridique ?
Il existe deux structures juridiques dans le fonctionnement
des Baugruppen. Le choix de la forme appartient au
groupe d'habitant et dépend en grande partie de sa philosophie. La
première structure existante est celle du GbR
(Geselschaft b·rgerlichen
Rechts) elle équivaut
à la société civile française. Dans ce
modèle, il y a un partage de l'immeuble en copropriété
entre les associés, un règlement est édité
précisant les modalités de gestion des parties communes, le
retrait ou l'intégration d'une personne au projet, ainsi que le mode de
gouvernance.
Le second modèle est celui du
Genossenschaft, qui se rapproche de la
société coopérative. Ici, les personnes se regroupent en
coopérative, La personnalité morale construit et reste
propriétaire des logements, les habitants eux reversent un loyer
à la coopérative. Là aussi un règlement propre au
groupe est édité avec quasiment le même contenu que pour le
GbR.
Le déroulement
Le processus de mise en place d'un groupement en
autopromotion se fait en trois phases avec un degré d'implication de
plus en plus fort au fur et à mesure de l'avancement du projet.
Étape 1 : Constitution du groupe
À ce stade, le groupe de base, le noyau dur, va
s'organiser afin de définir des objectifs, éventuellement
rechercher des nouveaux membres et va commencer à définir des
critères de recherche pour un terrain. C'est à cette étape
que le groupe va recruter un prestataire d'accompagnement
spécialisé dans le montage opérationnel de ce projet. Les
habitants n'étant pas forcément des spécialistes de
l'immobilier, ce recrutement est particulièrement important. Ce
prestataire va assister le groupe tout au long du projet, de la
définition du projet à l'élaboration du règlement
de vie. Ces sociétés vont se rémunérer à
hauteur de 3 à 4% du montant de l'investissement total hors terrain
(S.Trudelle, 2010).
Étape 2 : Phase d'étude
Le groupe va se constituer en société,
s'engager financièrement à hauteur de 500 à 1000 €
(S.Trudelle, 2010). Elle va ensuite rechercher des financements puis
gérer les autorisations d'urbanisme.
Étape 3 : La réalisation du projet.
Comme dans un projet classique, à ce stade, il y a une
consultation avec choix des entreprises, un suivi des travaux et enfin la
réception.
Un modèle qui a inspiré les projets
strasbourgeois.
Comme toute opération immobilière, la
maîtrise foncière est la clé du démarrage du
processus d'un projet. En Allemagne, la politique volontariste des villes dans
la réservation de foncier a constitué un facteur majeur du
développement de l'autopromotion. Contrairement à ce que l'on
pourrait penser, dans ce modèle, les groupements ne
bénéficient pas forcément de subventions publiques
concernant le foncier. Les Baugruppen peuvent en revanche
bénéficier, comme tout projet, d'aides à la construction
ou de financements privilégiés du secteur bancaire en fonction
des caractéristiques de celui-ci (efficacité
énergétique, choix des matériaux, choix des
entreprises...). Ce modèle s'est fortement développé
à Fribourg, qui compte aujourd'hui plus de 150 projets et a très
largement inspiré, proximité géographique oblige, le
développement de l'habitat participatif à Strasbourg (P.Greboval,
2013). En 2007, la ville a lancé son projet « d'autopromotion
à la strasbourgeoise » avec l'aménagement du projet
Eco-Logis, trois ans plus tard, 30 personnes se sont installées dans cet
immeuble
26
27
28
2. L'habitat participatif en France, portrait-robot d'un
modèle qui peine à se développer.
En France, le mouvement de l'habitat participatif en est
encore à ses balbutiements. Compte tenu des débats
sémantiques et de l'absence de centralité des mouvements, il est
très difficile de connaître de manière pertinente le nombre
d'opérations d'habitat participatif sur le territoire. L'association
éco-sol a entrepris cette tâche et recense à ce jour
environ 400 projets d'habitat participatif avec uniquement une trentaine
d'entre eux arrivés à leur terme. Alors que la France compte plus
de 28 millions de résidences principales, on peut légitimement
dire que l'habitat participatif ne représente quasiment rien sur le
marché du logement.
Paradoxalement, cette manière d'habiter ne cesse
d'agiter le monde de l'immobilier. À l'origine cantonné à
un milieu militant, l'habitat participatif semble être sur la voie
progressive d'une démocratisation voire d'un mouvement
d'institutionnalisation (Devaux, 2012), en témoigne le nombre de plus en
plus importants de parutions, sujets de recherches ou rencontres de
professionnels sur cette thématique. Si ce mouvement était
à l'origine impulsé par les habitants, il sort progressivement du
cercle des initiés pour toucher les acteurs institutionnels de la
production de l'habitat.
Cet intérêt de plus en plus fort pose la
question du futur de ce mouvement, est-il voué à mourir de lui
même ou à s'institutionnaliser ? (Devaux 2012) En d'autres termes,
la question d'un effet de mode peut se poser. Sous l'impulsion d'associations,
notamment le groupe lyonnais Habicoop, qui depuis dix ans effectue une
véritable action de lobbying auprès des acteurs politiques en
faveur de l'habitat coopératif, les collectivités s'engagent en
faveur du développement de cet habitat.
À la recherche d'innovations dans les programmes
d'habitations, notamment en matière d'intégration des habitants,
d'utilisation d'espaces partagés, d'architecture, d'environnement,
certaines collectivités ont décidé de se lancer dans la
production d'habitat participatif.
Sous l'impulsion de deux villes motrices, Strasbourg et
Montreuil, a été créé en 2010 le «
Réseau National des collectivités pour l'Habitat Participatif
», l'ambition de cette structure est « de créer une
plate-forme d'échanges entre les collectivités qui sera
dédiée au partage des expériences et des outils en
matière d'habitat participatif ». Ce réseau mobilise une
quinzaine de collectivités14, dont l'engagement s'est traduit
par des actions en faveur de l'habitat participatif. Parmi celles-ci, on peut
citer l'inscription dans le Programme Local de l'Habitat (PLH) « d'actions
en faveur de
14 Les premiers signataires sont :
Besançon, Bordeaux, Grenoble, Lille, Montreuil, Paris, Rennes,
Saint-Denis et Strasbourg, les communautés urbaines d'Arras, Grand Lyon,
Grand Toulouse, ainsi que les régions Ile-de-France et
Rhône-Alpes.
mode d'habiter ». C'est le cas pour la plupart des
grandes collectivités française (Grand Lyon, Grenoble-Alpes
métropole, CUM Strasbourg, Paris, etc.). Cet engagement se traduit
aujourd'hui par le lancement de nombreux appels à projets sur des
terrains identifiés par les collectivités, le plus souvent
à des prix inférieurs au marché.
L'implication forte de collectivité française
de taille importante participe à l'essor de l'habitat participatif en
France. Il convient de citer quelques exemples emblématiques pour
illustrer ce propos.
1. Montreuil : une ville en faveur des initiatives
citoyennes
Montreuil est une ville où la place de l'habitat
participatif est particulièrement importante. Cette
caractéristique s'explique en grande partie par une tradition importante
en matière d'autopromotion. Depuis les années 50 et le
développement du mouvement des Castors, auto-constructeurs de leurs
habitats, de nombreux projets coopératifs ont vu le jour dans cette
ville. Deux exemples emblématiques pour illustrer cet engagement.
Diwan (2008)
ANNéE EMMéNAGEMENT 2008
SURFAcE 1 011 M2 SURFAcE HABITABLE
NOMBRE dE LOGEMENTS 8 - 29 HABITANTS
MONTAGE JURIdIQUE SCI
COUT dE cONSTRUcTION 1 376 € M2 SHAB
Initié en 1998 ce projet aura mis 10 ans à se
concrétiser. Le groupe a traversé énormément de
difficultés et a évolué à de nombreuses reprises.
Il s'est structuré en SCI de construction avec vente en VEFA lors de la
phase de construction et a évolué en
copropriété-coopérative pour la gestion. En 2011, 21
adultes et 8 enfants vivaient dans ce collectif de 5 appartements, 3 maisons de
ville et un local d'activité. Chaque habitant a géré
individuellement le financement de logement pour un coût moyen de 2900
€ du m2 soit 20% de moins que le prix du marché.
Ce coût a été rendu possible par l'achat
du foncier à un prix largement inférieur au marché
auprès de la ville de Montreuil. La durée très importante
du projet s'explique en grande partie par le choix à l'origine du groupe
d'assurer elle même la maîtrise d'ouvrage de l'immeuble. Mais les
difficultés rencontrées, notamment pour trouver des financements,
ont obligé le groupe à se constituer sous une forme plus
classique de promotion immobilière. C'est un promoteur professionnel
Fiderim qui a donc assuré la construction et a permis une montée
en compétence et une
29
professionnalisation du groupe, sans pour autant limiter le
rôle des habitants à de simples acquéreurs. Ce projet, l'un
des premiers en France est aujourd'hui installé en coeur de ville et
participe à la vie du quartier « largement autour des enfants qui
occupent un rôle central dans la construction de ces sociabilités
de proximité »15.
Figure 5: Les habitants du projet Diwan dans un des
espaces
partagés.
www.architectes.org
Les Babayagas (2012)
ANNéE EMMéNAGEMENT 2012
SURFAcE 990 M2 SURFAcE HABITABLE
NOMBRE dE LOGEMENTS 21
MONTAGE JURIdIQUE /
COUT dE cONSTRUcTION 3 800 € M2 SHAB
Né de l'initiative de Thérèse Clerc,
militante féministe, le projet des Babayagas tend à proposer un
modèle alternatif au vieillissement. L'objectif de ce groupement
composé exclusivement de femmes est de « vivre collectivement leur
vieil âge dans un lieu géré en autonomie et fondé
sur l'autogestion, la solidarité, la citoyenneté et
15 Ville de Montreuil. L'habitat participatif à
Montreuil. Une histoire, des initiatives collectives, une Dynamique. 2011 .
[ONLINE] Available at:
http://www.est-ensemble.fr/sites/default/files/recueil_dexperiences_dhabitat_participatif_a_montreuil.pdf.
[ Accessed 11 April 2016].
30
l'écologie 16». Ce projet a mis dix ans
à voir le jour, initié par la création d'une association,
l'aboutissement du projet tient dans l'implication de deux acteurs
fondamentaux, la ville de Montreuil qui a mis à disposition le terrain
et l'office public de l'HLM qui devient maître d'ouvrage.
Cet immeuble est mixte et comporte 25 logements sociaux, 21
pour les Babayagas et 4 pour des jeunes de moins de 30 ans. L'attribution des
logements se fait de manière classique par l'OPHLM, mais en accord avec
les valeurs de l'association, c'est-à-dire, trouver des locataires
femmes à la retraite avec des revenus faibles et qui acceptent la «
charte de vie des Babayagas », qui régit la vie collective de ce
collectif.
Figure 6 Les membres des
Babayagas.
Libération.fr
Ce collectif se veut « laboratoire de réflexion
sur le vieillissement », en effet de nombreuses manifestations sont
organisées au sein de cet immeuble sur la thématique du
vieillissement. Cette ouverture sur le quartier se matérialise notamment
par l'organisation de l'UNISAVIE, « l'UNIversité populaire du
SAvoir des VIeux », afin de « vieillir intelligemment
».17
16 Ville de Montreuil. L'habitat participatif à
Montreuil. Une histoire, des initiatives collectives, une Dynamique. 2011 .
[ONLINE] Available at:
http://www.est-ensemble.fr/sites/default/files/recueil_dexperiences_dhabitat_participatif_a_montreuil.pdf.
[ Accessed 11 April 2016].
17 Les Babayagas, la silver solidarité au quotidien -
Libération. 2016. Les Babayagas, la silver solidarité au
quotidien - Libération. [WEB] Disponible sur :
http://www.liberation.fr/futurs/2014/02/02/les-babayagas-la-silver-solidarite-au-quotidien
977239. [Accès le 11 April 2016].
Figure 7 : Immeuble des
Babayagas.
sophieloubaton.photoshelter.com
2. Strasbourg : la municipalité à
l'initiative des projets
Afin de favoriser le développement de l'habitat
participatif à Strastourg, la communauté urbaine a fait le choix
d'une consultation. Ainsi 10 terrains répartis dans toute la ville
appartenant à la municipalité ont été vendus
à des groupes d'habitants. Cette consultation marque une volonté
forte de la part de la collectivité. Pour Roland Ries, Maire de
Strasbourg et Vice président de la Communauté urbaine de
Strasbourg depuis 2008, ce « programme répond aux besoins en
logements pour tous, aux différentes étapes de la vie, a
également comme orientation de contribuer à des
aménagements urbains innovants et un habitat durable, en prenant en
compte la santé et le bien-être des habitants »18.
Les terrains mis à disposition de la ville sont tous situés en
proximité directe du centre ville et sont également desservis par
les transports en commun.
Figure 8 : Durée de la procédure de la
consultation. Source : Dossier de consultation. Modification
AF
31
18 Cahier des charges du projet, 10 terrains, 10 immeubles
durables à Strasbourg.
32
Figure 9 : les 10 terrains vendus par la
collectivité. Source:
Strasbourg.eu
En se lançant dans ce type de projet la ville de
Strasbourg fait le choix de l'innovation dans sa politique de logements. Cette
aide de la collectivité permet également un raccourcissement des
délais de l'opération. Comme on le voit sur la frise ci-dessus,
du lancement de la consultation à la fin des travaux, 5 années se
sont écoulées. Par l'intervention de la communauté urbaine
de Strasbourg, un cadre est donné à l'opération, ce qui
rassure les banques et autres institutions de financement.
Il faut également noter en plus de la ville de
Strasbourg l'importance de plusieurs acteurs institutionnels dans le bon
déroulé de cette opération :
· Relais associatif : l'association
Écoquartier qui fait la promotion d'un urbanisme durable depuis 2001 et
a inscrit l'habitat participatif comme levier d'action. Elle a principalement
oeuvré dans la mise en relation des acteurs de ce programme, ainsi que
dans le processus d'acculturation à ce modèle d'habitat.
· AMO : Une assistance à
maîtrise d'ouvrage a été rendue obligatoire à la
suite des premières phases de consultation, en raison des nombreuses
difficultés rencontrées par les groupements.
33
Eco-Logis (2010)
ANNéE EMMéNAGEMENT 2010
SURFAcE /
NOMBRE dE LOGEMENTS 13 LOGEMENTS, 30 HABITANTS
MONTAGE JURIdIQUE SCIA
COUT dE cONSTRUcTION 2 950 € M2 SHAB
Le projet Eco-logis est le premier des immeubles
livrés. Il s'inspire des Baugruppen, l'architecte est d'ailleurs
allemand, Michael Gis, choisi en raison de son expérience sur le
modèle développé outre-Rhin. La municipalité,
maître d'ouvrage sur l'opération a imposé l'utilisation
d'une SCIA, le nombre de parts détenu par chacun dépend de la
surface des prestations propres à son logement. Les bâtiments sont
conçus sur 5 étages, au total 11 logements sont disponibles dans
cette structure allant du studio au 6 pièces, 30 personnes vivent dans
le bâtiment et 2 familles sont locataires. On y trouve des espaces
communs, une chambre d'amis ainsi qu'un grand atelier et une buanderie commune.
Le bâtiment est BBC, il consomme moins de 65 KWh/m2/an et
produit de l'énergie via 20 m2 de panneaux solaires.
Figure 10 : Bâtiment Eco-Logis. Source:
lyon.archi.fr
Consultation II & III
En 2015, Strasbourg a lancé sa troisième
consultation pour développer de l'habitat participatif sur 5 nouveaux
sites. Au total depuis 2008, 22 terrains ont été mis en
consultation pour développer de l'habitat participatif dans la ville
strasbourgeoise. Le développement de ce « nouveau » mode
d'habiter, fait aujourd'hui partie intégrante de la politique de la
ville. En apportant sa contribution, la ville de Strasbourg montre qu'il est
possible de développer à grande échelle des projets
participatifs, sous
34
réserve d'un engagement fort des politiques en
attribuant des terrains jusqu'à présent propriété
de la ville. Cet engagement financier se traduit également par un
système de décote en fonction des performances
énergétiques du bâtiment (de 150 à 200 / m2 SHON) et
également si on introduit du logement social au bâtiment (vente
entre 150 et 200 € du m2). La ville effectue également
l'ensemble des travaux de raccordement de manière à effectuer une
vente de terrain à nu.
3. Montpellier : De l'habitat participatif en ZAC,
le projet MasCobado
Le projet MasCobado a la particularité d'être
développé au sein de la ZAC des Grisettes. ZAC de 20 hectares
où 1500 logements sont créés ainsi que des bureaux, des
commerces, des équipements scolaires et un pôle de
santé.
Figure 11 : Plan Mass de la ZAC. En rouge les
deux lots de la ville dédiées à l'habitat participatif.
Source : Agence Dubus Richez
L'émergence de ce projet est l'aboutissement d'un
concours « logement design pour tous » lancé par le PUCA (Plan
Urbanisme Construction Architecture) qui a pour objectif d'« initier une
nouvelle dynamique pour programmer, concevoir et réaliser des
opérations de logement »19. Une association d'habitants
créée en 2011 a remporté ce concours, ce qui lui a permis
de bénéficier de l'appui d'une mission AMO du PUCA, qui a
accompagné la programmation et les études opérationnelles
afin de mettre au point le montage juridique. Parallèlement la ville de
Montpellier confirme
19 20PUCA. Novembre 2014. Logement design pour tous.
Habitat participatif à Montpellier. Le projet MasCobado. En ligne.
http://www.urbanisme-puca.gouv.fr/IMG/pdf/MasCobado
web.pdf.
Figure 12 : Perspective du projet. Source : Toits de
choix
son intérêt en Novembre 2011, pour favoriser
l'implantation d'un habitat participatif sur l'agglomération. Le choix
d'implantation se fera sur la ZAC des Grisettes où la SERM
(Société d'Équipement de la Région
Montpelliéraine) réalise une opération
d'aménagement. Conjointement, la ville et l'aménageur
décident de réserver deux lots de cette ZAC au
développement de projets en habitat participatif.
Envisagée dès l'origine du projet, la
construction d'un partenariat avec un bailleur social répond pour le
groupement à un impératif : celui d'offrir à tous la
possibilité d'accéder à la propriété. De
plus associer un bailleur social permet « d'asseoir la
crédibilité du projet et facilite les relations avec les
élus »20. C'est finalement Promologis qui sera choisi
par la SCA avec pour engagement de la part du bailleur de porter plusieurs
logements en location-accession ou en location sociale. À l'origine il
devait être constituée une SCA en co-maîtrise d'ouvrage avec
Promologis, mais les difficultés pour obtenir des garanties
financières obligent un passage de relais au Bailleur. À l'issue
d'une phase de conception dirigée par les habitants et coordonnée
avec le bailleur social, c'est Promologis qui a pris en charge toutes les
opérations de l'acquisition du terrain à la construction du
bâtiment. Les rapports entre Promologis et les habitants sont
formalisés par une convention partenariale annexée à tous
les documents concernant l'acquisition du terrain et les contrats de vente.
Ensuite les logements ont été attribués
à l'issue d'une VEFA (Vente en l'État Futur d'Achèvement)
pour 11 logements ou d'un contrat de location-accession PSLA pour 7 logements.
En ce qui concerne la gestion des relations entre les accèdants et le
bailleur social, c'est le régime de la copropriété qui
sera mis en place. Enfin, en ce qui concerne la réattribution des
logements sociaux, le bailleur s'est engagé à sélectionner
des nouveaux adhérents qui respectent une charte mis en place par les
habitants du MasCobado.
35
36
|
Le programme est constitué de deux bâtiments
avec au total 23 logements dont 5 sociaux et 7 en location-accession. Les
appartements vont du T1 au T5 et les
habitants partagent 3 chambres d'amis, une salle
polyvalente, une buanderie ainsi qu'une grande terrasse commune et un jardin
avec un potager partagé.
|
|
Figure 13 : MasCobado 1 et 2, mutualisation des
espaces. Source : Toits de choix
4. Paris 2014, Appel à projets en Habitat
participatif.
L'exemple de l'initiative de Paris est intéressant, en
effet il témoigne de l'intérêt des acteurs institutionnels
pour le développement de l'habitat participatif. Mais son
intérêt le plus important, c'est sûrement la couverture
médiatique qu'elle apporte à ce type d'habitat. En effet, le
succès rencontré par cette initiative a offert à ce
mouvement de nombreux articles dans les médias nationaux (Le Monde,
Libération, Le Parisien, les InrocksÉ) ce qui participe à
la formalisation de ce mouvement. Sur le modèle de Strasbourg, Paris a
décidé de lancer un appel d'offre sur trois parcelles
situées dans le 19ème et dans le
20ème arrondissement. Dans un contexte de pression
foncière très forte, cette initiative a rencontré un
succès important. Plus de 200 personnes ont manifesté leur
intérêt à l'origine du projet. L'appel à projet se
déroule en trois phases :
· Phase 1 : projet de vie
· Phase 2 : Projet d'habitat
· Phase 3 : Projet de construction
À l'issue de chacune des phases un jury composé
de professionnels étudie les propositions et sélectionne les
meilleurs groupements. Le processus d'appel d'offre devrait aboutir au second
semestre 2016. À chacune des phases les groupements
bénéficient de subventions afin de financer les frais de
maîtrise d'ouvrage et de maîtrise d'oeuvre (27 500 € maximum
de subventions en phase 3 par association)
37
3. La France, le choix d'une politique d'accès au logement
différente
En France à l'heure actuelle le niveau d'organisation
ne permet pas de rivaliser avec les pays cités
précédemment. Ces différences s'expliquent par des
différences culturelles et contextuelles, plus particulièrement
à propos des politiques de logement.
En effet au Canada comme en Suisse, l'absence d'une politique
forte en matière de logement social est compensée par l'habitat
participatif qui devient en un sens de fait un « logement social »
(Devaux, 2015). Au Canada la politique particulièrement libérale
en matière de logements, laisse quasiment uniquement la place aux
secteurs privés. Au Québec, les coopératives ont un
fonctionnement qui les place à l'intermédiaire du logement social
et privé français. Elles sont occupées par des
ménages plutôt modestes qui souhaitent s'impliquer dans la gestion
de leur logement. Pour Bouchard (Bouchard, 2005) la coopérative est un
« patrimoine permanent de logements abordables : ils ont logé,
logent et logeront des ménages à revenu modeste pour les
décennies à venir ». Le modèle suisse est
sensiblement différent, son caractère reconnu d'utilité
publique, ce qui veut dire que les coopératives renoncent à
maximiser leurs profits, permet aux groupements d'obtenir des prêts et
des terrains beaucoup plus abordables que dans un modèle classique.
Selon une estimation du bureau des statistiques de Zurich de 2004, les loyers
de ces logements sont 20 à 30% moins élevés que sur le
marché classique. En France, le secteur du logement social est
très structuré avec des organismes HLM qui produisent plus de 100
000 logements par an et l'État qui subventionne très largement ce
développement via l'exonération ou l'allègement de taxes
notamment.
Le second élément important dans la
compréhension de ces différences de développement est la
place laissée à la société civile dans le
développement de l'offre de logement. À l'opposé la
Suisse, le Canada et l'Allemagne partagent une importante tradition de la
participation et de la prise d'initiative de la société civile.
« En France, les expériences participatives sont plutôt
menées dans une logique de régulation des problèmes
sociaux que d'encouragement de l'auto-développement des populations
» (C.Devaux, 2015).
Ces différences tant d'un point de vue culturel que
contextuel expliquent les écarts de développement de l'habitat
participatif en France. Néanmoins, malgré ces différences,
les initiatives observées à l'étranger représentent
une source d'information très importante lorsqu'on développe des
outils tels que le Benchmark. C'est d'ailleurs bien souvent à l'issue de
ce genre travail et/ou de voyages d'observation que des groupes se sont
formés pour développer leurs modèles. Il ne faut pas non
plus négliger l'absence de cadre juridique français pour
comprendre, comme nous allons le voir par la suite, le développement peu
important du logement participatif en France.
38
POiNTS CLéS
ÉTAT DES LIEUX DE L'HABITAT PARTICIPATIF :
· EN FRANCE L'HABITAT PARTICIPATIF C'EST : - UNIQUEMENT
300/400 PROJETS,
· À L'éTRANGER, ALLEMAGNE, SUISSE, CANADA, UN
MODèLE DE DéVELOPPEMENT COMMENT EXPLIQUER CET éCART ?
- LA FRANCE A CHOISI DE DéVELOPPER LE LOGEMENT SOCIAL, 15
% DES RéSIDENCES PRINCIPALES - À L'éTRANGER :
L'HABITAT PARTICIPATIF FAIT PARTIE DE LA POLITIQUE DE LOGEMENT
SOCIAL, IL EST RECONNU D'UTILITé PUBLIQUE + SECTEUR TRèS
STRUCTURé AVEC SOCIéTéS FAîTIèRES,
ACCOMPAGNATEURS.
MAIS
· UN DéVELOPPEMENT DE PLUS EN PLUS IMPORTANT EN
FRANCE QUEL(S) MODèLE(S) ?
· UNE CROISSANCE QUI S'INSPIRE DES MODèLES
éTRANGERS
· CONSÉQUENCE TROIS MODÈLES SE
DÉVELOPPENT EN FRANCE - L'AUTOPROMOTION
- LA COOPÉRATIVE
- UN MODÈLE QUI REGROUPE L'HABITAT PARTICIPATIF ET
LOGEMENT SOCIAL
39
C) LA LOI ALUR ET L'HP QUELLES CONSÉQUENCES ?
1. Genèse de cette loi en lien avec l'habitat
participatif
R
éclamées par de nombreux acteurs de l'habitat
participatif, les dispositions concernant ce type d'habitat dans la loi ALUR
sont le résultat d'un long processus de réflexion sur le cadre
futur de cette troisième voie de l'habitat. Ils sont le fruit d'une
consultation entre acteurs spécialisés dans ce domaine. Il en
ressort des éléments primordiaux dans l'évolution future
de l'habitat participatif. La mise en place d'un cadre concernant l'habitat
participatif est le résultat d'un constat simple, celui d'un vide
juridique concernant ce modèle d'habitat. En effet, la loi Chalandon de
1971 qui interdit la location coopérative a rendu très
compliqué le développement de projet d'habitat participatif. La
plupart des groupes d'habitants se sont ainsi heurtés à cette
absence de cadre, utilisant des structures juridiques insuffisamment
sécurisées. Ainsi faute de statut approprié, les
opérations sont restées longues et coûteuses, excluant par
la même occasion les populations plus fragiles ainsi que celles en
situation d'urgence par rapport au logement.
La première avancée concernant l'habitat
participatif a été d'offrir une définition juridique
à ce mouvement. Ainsi selon l'article 47 un projet d'habitat
participatif « est une démarche citoyenne qui permet à des
personnes physiques de s'associer, le cas échéant avec des
personnes morales, afin de participer à la définition et à
la conception de leurs logements et des espaces destinés à un
usage commun, de construire ou d'acquérir un ou plusieurs immeubles
destinés à leur habitation et, le cas échéant,
d'assurer la gestion ultérieure des immeubles construits ou acquis.
» Cette définition est volontairement non restrictive, elle ne
vise pas nécessairement à restreindre le cadre de l'habitat
participatif mais à compléter les outils mis à la
disposition des groupes d'habitants.
2. Les nouveaux statuts juridiques et leurs
conséquences
La loi ALUR vient créer deux nouveaux statuts
juridiques pour la mise en place d'habitat participatif, ces statuts ne
suppriment pas les anciens mais arrivent en complément des formes
sociales offertes par la loi. L'objectif du législateur était
d'apporter des réponses aux attentes des partisans de l'habitat
participatif, à savoir ; la propriété collective, les
mécanismes anti-spéculatifs, la prise en compte des espaces
communs et la possibilité de les exploiter (Ferrus et Leveneur, 2014).
Les dispositions prises par la loi ALUR en matière d'habitat
participatif ont également pour objectif de garantir une certaine
sécurité juridique et financière pour les concepteurs de
projet. Les deux nouveaux statuts créés sont la
société coopérative d'habitants et la
société d'attribution d'autopromotion. Ces deux statuts
juridiques ont des dispositions communes :
· Dans tous les cas il s'agit d'une
société à capital variable, de forme civile ou
commerciale.
· Cette société est constituée pour
une seule opération immobilière et destinée à
accueillir la résidence principale des associés.
· Il est également possible d'associer à
ces structures des organismes de logements sociaux, dans la limite de 30% du
capital ou des droits de vote, qui bénéficieront de la mise
à disposition des logements proportionnellement à leur
participation.
· Les sociétés pourront développer
des activités et services aux membres et à des tiers non
associés. (ex : location d'un salle commune, installation d'un cabinet
médical...)
· Il devient obligatoire de mettre en place une charte
fixant les règles concernant l'immeuble et plus particulièrement
les parties communes. Cette charte devra être adoptée en
assemblée générale et signée par l'ensemble des
locataires avant l'emménagement.
1. La société coopérative
d'habitants
La société coopérative a pour objet de
« fournir à leurs associés personnes physiques la
jouissance d'un logement au titre de résidence principale et de
contribuer au développement de leur vie collective »21.
Cette forme de société promeut l'idée de
propriété collective de l'habitat participatif (Ferrus et
Leveneur, 2014), avec ce type de société, on supprime la notion
de propriété au profit de celle de jouissance du logement et des
espaces communs, le propriétaire étant la société
et non les associés. Le contrat passé par les
copropriétaires précise le montant de la redevance dont ils
devront s'acquitter à l'entrée dans le logement. Cette redevance
est composée d'une part locative permettant de profiter du bien et d'une
part acquisitive permettant d'acquérir des parts sociales de la
société. Cette acquisition se fait de manière
différée, en effet les associés remboursent graduellement
les sommes prises en charge par la société au moment de la
construction.
· Calcul de la redevance
Lorsque le projet est livré, la coopérative
rembourse les prêts grâce à la redevance, celle-ci est
dissociée de la valeur du bien et est calculée selon les
modalités fixées par le groupe. Elle permet également de
provisionner les obligations de propriétaire (taxes foncières,
charges diverses, provisions pour les réparations, vacances et
impayés...).
40
21 Article L.201-2 du code de la construction et de
l'habitation
· Comment quitter son logement ?
Tout coopérateur peut quitter son logement. À
son départ il récupère ses apports initiaux
pondérés au coût de la vie, ici la logique de non
spéculation prime voilà pourquoi on est sur un prix
indépendant du marché. Lors de son départ, le
coopérateur peut également récupérer une partie de
ses redevances, on parle alors de part acquisitive. Le choix d'une nouvelle
personne est soumis à l'accord de l'assemblé
générale selon les termes régis au règlement de la
structure.
2. La société d'attribution
d'autopromotion
Cette société a pour objet d'Ç
attribuer aux associés, personnes physiques, la
propriété ou la jouissance d'un logement à titre de
résidence principale, et d'entretenir et d'animer les lieux de vie
collective »22. La différence avec la
coopérative d'habitants c'est qu'avec ce montage les habitants peuvent
acheter leurs logements et la jouissance des espaces communs. Dans ce
modèle, les associés devront dès le départ faire le
choix entre attribution en jouissance ou en propriété des futurs
logements. Dans le modèle de l'attribution en propriété
cette société aura vocation à disparaître à
la fin de la construction pour se transformer en copropriété
classique, puisque les habitants sont propriétaires de leur espace
privatif grâce à une attribution en propriété.
À l'inverse, si le modèle de la jouissance est choisi celle-ci
reste en place. Les associés devront, à l'inverse du
modèle coopératif, participer au financement de
l'opération dès le stade de la construction. On est donc ici dans
un modèle où les associés disposent de moyens financiers
suffisants pour au départ assumer un investissement conséquent.
La sortie du modèle participatif apparaît comme plus simple par ce
modèle par rapport à la coopérative par l'existence d'un
état descriptif de division ainsi que des dispositions concernant les
conditions de dissolution de la société.
· Que paye l'associé ?
L'associé paye une redevance qui est
nécessairement liée à la valeur de son bien. Il doit
également payer une participation qui correspond aux frais de charges
liées là aussi à la valeur de son bien.
· Comment quitter son logement ?
Dans le cas d'une attribution en propriété, un
associé peut quitter son logement de manière libre, à
condition que l'AG a constaté l'achèvement de l'immeuble. Dans ce
modèle la revente de ces parts n'est pas nécessairement soumis
à une indexation.
41
22 Article L.202-2 du CCH
42
La logique de non-spéculation n'est pas obligatoire et
est à la décision du groupement.
3. Les décrets attendus pour 2016
Votée en 2014, la loi ALUR sera précisée
au cours de l'année 2016 par des décrets notamment en ce qui
concerne les garanties financières d'achèvement de l'immeuble,
ainsi que des éléments sur le financement des projets. La loi
ALUR devrait être précisée courent 2016 par deux autres
décrets, concernant les modalités d'achèvement de
l'immeuble et l'apport en industrie dans la construction d'un
bâtiment.
Décret relatif à la garantie
financière d'achèvement
Un décret viendra préciser la garantie
financière d'aménagement qui rendra obligatoire la souscription
d'une garantie financière d'achèvement lorsque le vendeur d'un
immeuble d'habitation n'opte pas pour une garantie de
remboursement23
Décret relatif à l'apport en
industrie
Ce décret viendra préciser la
possibilité d'entrer au capital de la société via un
apport en industrie. En d'autres termes, il s'agit là de valoriser la
participation des habitants dans le processus de construction ou bien dans
l'apport de service auprès des autres usagers.
23 Vallat, thierry (2016) Garantie financière
en cas de vente en l'état futur d'achèvement :
Disponible at:
http://www.thierryvallatavocat.com/2016/03/garantie-financiere-en-cas-de-vente-en-l-etat-futur-d-achevement-le-decret-du-25-mars-2016.html
(Accès 18 Avril 2016).
COMPARAISON ENTRE LA SOCIÉTÉ COOPÉRATIVE
/ SOCIÉTÉ
D'ATTRIBUTION D'AUTOPROMOTION
Coopérative Autopromotion
Qui est La coopérative La
société ou chaque
propriétaire ? copropriétaire
Sur autorisation de l'assemblée
générale
Que détient l'associé ?
Que paye l'associé ?
Départ d'un
associé
Attribution en jouissance des logements
· Parts sociales (sans lien nécessaire à la
valeur du bien)
· Loyer (permanent)
· Possible apport en travail manuel
Attribution en jouissance des logements ou
propriété pleine et entière
· Parts sociales (liées nécessairement
à la valeur du bien)
· Participation (permanente) aux charges liées
nécessairement à la valeur relative du lot
Prix de cession Prix de revente des parts
sociales indexé sur l'indice de référence
des loyers. Modification possible à l'unanimité
|
Pas de limite statutaire
|
|
43
Gouvernance 1 personne = 1 voix 1 personne = 1
voix
ou proportionnel
44
POiNTS CLéS
LES ARTICLES DE LOI ALUR CONCERNANT L'HABITAT PARTICIPATIF C'EST
:
· LA CONSÉQUENCE DU DÉVELOPPEMENT DE
L'HABITAT PARTICIPATIF EN FRANCE
· LA CONSÉQUENCE D'UN VIDE JURIDIQUE DEPUIS LA LOI
CHALANDON DE 1971
· UNE VOLONTÉ DE DÉFINIR JURIDIQUEMENT
L'HABITAT PARTICIPATIF ET D'ASSURER UN CADRE AUX INITIATIVES LES FORMES
JURIDIQUES :
· DEUX MODÈLES POUR DÉVELOPPER UN HABITAT
PARTICIPATIF
- COOPÉRATIVE
LA COOPÉRATIVE EST PROPRIÉTAIRE DES LOGEMENTS
ATTRIBUTION EN JOUISSANCE DES LOGEMENTS, VIA LE PAIEMENT D'UN
LOYER À LA COOPÉRATIVE
VOLONTÉ DE NON SPÉCULATION, REVENTE DE PARTS
SOCIALS ET NON DU LOGEMENT
- AUTOPROMOTION
PROPRIéTé PLEINE ET ENTIèRE,
NÉCESSITE DES APPORTS CONSÉQUENTS PAIEMENT DE CHARGES COURANTES
À LA SOCIÉTÉ
PAS DE VOLONTÉ ANTISPECULATIVE, REVENTE DU LOGEMENT
45
CONCLUSION
C
omme nous venons de le voir, l'habitat participatif est un
mouvement qui prend de l'ampleur en France. À l'origine cantonnée
à un cercle d'initiés issus du militantisme, cette forme de
logement gagne aujourd'hui du terrain. La France semble aujourd'hui
emboîter le pas aux pays étrangers qui depuis de nombreuses
années ont su développer ce modèle basé sur le
partage et la volonté de s'impliquer dans la conception de son logement.
Ce mouvement d'institutionnalisation est accompagné par une prise de
conscience des politiques de l'intérêt de guider le
développement de l'habitat participatif. En légiférant sur
ce modèle, la loi ALUR vient donner un cadre juridique à
l'habitat participatif. Elle vient également légitimer cette
forme d'habitat auprès des groupes d'habitants, mais surtout
auprès des acteurs institutionnels et financiers de la construction. Cet
intérêt de plus en plus fort des acteurs du développement
de la ville est la conséquence directe de cette étude. En effet,
comme nous allons le voir dans la partie suivante, la SERL, aménageur
depuis plus de 50 ans de la métropole Lyonnaise, dans une volonté
perpétuelle d'innover dans ses projets urbains, souhaite comprendre ce
type de montage. C'est donc pour cette raison quelle a souhaité cette
étude sur l'habitat participatif. C'est pourquoi nous
développerons cette seconde partie en parallèle, le rôle de
la SERL et le cadre géographique sur lequel elle intervient, avant de
nous interroger sur la place de l'habitat participatif dans la métropole
Lyonnaise. A l'issue de cette seconde partie, nous pourrons dresser des
hypothèses sur le potentiel développement de l'habitat
participatif sur la métropole Lyonnaise.
46
II) LA SERL ET LA MÉTROPOLE LYONNAISE, DEUX
ACTEURS INSTITUTIONNELS À LA RECHERCHE
D'INNOVATIONS EN MATIÈRE D'OFFRE DE LOGEMENT.
A
|
vec la volonté d'être proche des habitants et de
développer des projets en lien avec le développement durable, la
SERL cherche continuellement à
|
|
innover dans la manière d'appréhender ses
projets urbains. C'est ainsi qu'elle a su développer à son corps
de métier - la maîtrise d'ouvrage - des compétences
supplémentaires qui viennent compléter l'offre que peut apporter
la SERL dans la gestion de ses projets. Cette volonté d'innover justifie
le lien entre la SERL et l'habitat participatif et donc la pertinence de cette
étude. La SERL est également indissociable de son territoire
d'action, la Métropole Lyonnaise.
En effet depuis près de soixante ans, la SERL rend
opérationnels les projets de la Métropole de Lyon. La
présente partie a pour objectif de comprendre, comment la SERL et la
Métropole Lyonnaise pourraient intégrer dans leurs projets, de
l'habitat participatif ?
Pour répondre à cette question nous avons
divisé notre travail en trois parties. En premier lieu, il convient de
comprendre comment la SERL appréhende ses projets. Cette étape
passe par la définition des caractéristiques des montages
opérationnels qu'elle développe. Ce qui sous-entend de
définir les étapes d'un projet, ainsi que la notion de risque en
aménagement. Nous le verrons, cette notion est particulièrement
importante et nous permettra de faire la liaison avec l'évolution du
métier d'aménageur et la mise en concurrence par les
décideurs des projets.
La seconde partie sera consacrée à la politique
de la Métropole de Lyon en matière de logements. Travail qui se
conclura par le développement d'une vision prospective, afin de voir
où peut se situer l'habitat participatif dans cette politique.
Ainsi, dans la troisième partie de ce chapitre, nous
analyserons la place de l'habitat participatif sur le territoire. Ce chapitre
se base en grande partie sur des retours d'expériences, ainsi que sur
des entretiens menés tout au long de cette étude et fait le lien
avec le dernier chapitre consacré à la stratégie à
adopter en matière développement de l'habitat participatif.
A) LA SERL, UN AMÉNAGEUR QUI INNOVE
DANS SA GESTION DE PROJET 1. Étude sur les caractéristiques de la
SERL
L
|
a SERL est une SEM (Société d'Économie
Mixte) d'aménagement. À ce titre, elle est soumise aux
dispositions du livre II du code de commerce et aux
|
|
articles L. 1521-1 à L 1523-3 du code
général des collectivités territoriales (Sevino, 2015).
Elle intervient dans un contexte économique particulier,
l'économie mixte qui est « la traduction institutionnelle
d'une des caractéristiques essentielles de la plupart des
économies modernes [et se présente] comme une troisième
voie entre la domination du marché et celle de la modération
» (G.Durand, 1995). À ce titre elle permet à une
collectivité territoriale d'associer lors d'une opération
d'aménagement des personnes privées et « remplace la
confrontation par une logique de coopération et de travail en commun
» (J-D Lafay, 1992). La mise en place d'une société
d'économie mixte doit être justifiée par
l'intérêt général et donc être «
dictée par des circonstances socio-économiques
particulières afin que cette intervention ne porte pas atteinte au
principe de la liberté du commerce et de l'industrie
»24. La mise en place d'une structure de ce type ne peut donc
être justifiée qu'en raison d'une défaillance du secteur
privé dans un domaine d'intervention.
La SERL a été créée en 1957 avec
cette volonté d'assister les collectivités tout au long d'un
projet « qu'il s'agisse de la définition des enjeux, des objectifs
et des outils qu'il conviendra de mettre en oeuvre, sans oublier la
réalisation ou encore la gestion d'équipement ou de site
»25. Elle intervient sur un territoire particulier : celui de
la Métropole Lyonnaise. Cas unique dans le fonctionnement institutionnel
français, « Lyon est la seule Métropole assumant la
quasi-totalité des compétences territoriales possibles sur
l'ensemble de son territoire urbain. » (G.F. Dumont, 2013). C'est dans ce
contexte métropolitain qu'évolue depuis 50 ans la SERL, se
voulant le trait d'union entre le privé et le public. L'organisation
territoriale se retrouve dans la structure capitalistique de la SERL. Son
statut de SEM, lui procure un actionnariat particulier composé
majoritairement de structure publique et se répartit de la façon
suivante :
24 Les sociétés d'économie
mixte locales (SEML) | Collectivités locales. 2016. Les
sociétés d'économie mixte locales (SEML) |
Collectivités locales. [ONLINE] Disponible sur:
http://www.collectivites-locales.gouv.fr/societes-deconomie-mixte-locales-seml.
[Accès le 04 April 2016].
47
25 Document interne édité par la SERL, concernant
les missions et l'historique de cet aménageur.
5%
7%
4%
18%
16%
Actionnariat de la SERL
50%
Grand Lyon la métropole
Caisse des dépôts et des
consignations
Caisse d'épargne Rhônes-Alpes
Lyonnaise de Banque
CCI Lyon
Autres (OPAC, SAFIDI, SFIG, DEXIA É)
48
Figure 14: Actionnariat de la SERL. Source : Rapport
d'activité 2016
Ce maître d'ouvrage pilote majoritairement des ZAC aux
caractéristiques multiples et complexes : centralité urbaine,
développement économique, immobilier d'entreprises et services.
On la retrouve dans des projets de renouvellement urbain majeur : la ZAC des
Minguettes à Vénissieux, le centre ville de Vaulx-en-Velin,
l'emblématique projet de la Duchère, des références
fortes en aménagement : ZAC Gratte-ciel (Villeurbanne), ZAC des
Girondins (Lyon 7), qui permet à la SERL d'évoluer comme acteur
majeur de l'aménagement sur le territoire métropolitain
lyonnais.
Les caractéristiques des projets de la SERL.
Lorsqu'une collectivité identifie un besoin en
matière d'aménagement, elle peut mobiliser différents
outils. La SERL a la caractéristique d'avoir développé et
de maîtriser ces différents modes opératoires de passation
de contrat avec ses clients qui sont :
· La concession d'aménagement
La SERL va assurer la maîtrise d'ouvrage des
équipements et travaux du projet urbain, ainsi que les missions
intrinsèques à son aboutissement. Nous développerons ce
mode d'opération dans une partie suivante.
· L'assistance à maîtrise d'ouvrage
Dans ce mode opératoire la SERL est prestataire de
service et intervient pour assister son client, qu'il soit public ou
privé, dans l'étude, la réalisation d'une opération
d'aménagement ou une construction. Le recours à l'AMO est
particulièrement utilisé dans le cadre de mission ponctuelle
complexe ne pouvant être assurée par le maître d'ouvrage,
qui va ainsi avoir recours à un tiers.
·
49
Le mandat de travaux
Dans ce processus la collectivité reste maître
d'ouvrage du projet, elle va seulement déléguer une partie de la
réalisation du projet. Par exemple dans le cadre d'une ZAC elle peut
mandater une société, dans notre cas SERL, pour réaliser
un équipement public. Contrairement à la concession il n'y a
aucun processus de délégation, la personne publique reste
maître de son projet 26.
La SERL se démarque depuis de nombreuses années
par sa capacité à innover et sa manière
d'appréhender les projets urbains. En effet depuis 2007, la SERL a mis
en place 4 filiales avec pour objectif d'intervenir sur l'ensemble des domaines
de l'aménagement :
· SERL Aménagement : coeur de métier de la
SERL, elle assure les fonctions d'aménageur dans les grands projets
urbains et assure la promotion du développement métropolitain
durable. Ces missions concernent aussi bien les missions d'aménagement
de renouvellement urbain, de construction et superstructures, de
développement économique ainsi que d'ingénierie
foncière.
· SERL Énergies : chargé du
développement du photovoltaïque, cette filiale a pour objectif de
faciliter l'implantation de centrales photovoltaïques dans ses projets.
· SERL Immo2 : a pour fonction la gestion
immobilière d'opérations telles que les villages d'entreprises ou
pôles de services aux entreprises.
· SERL Services : est en charge de la gestion au
quotidien et des services aux entreprises, dans le cadre de la maintenance
technique des bâtiments et des services aux entreprises.
2. Les différentes étapes et les
caractéristiques économiques d'un contrat de concession
Comme nous venons de le voir, la SERL intervient à la
fois comme aménageur urbain, mais également dans la
réalisation d'équipements. Aujourd'hui, lorsqu'elle construit des
équipements, ce sont principalement des équipements publics, type
superstructure culturelle, sportive, hôpital, EHPAD et groupement
scolaire. La SERL a notamment réalisé dans ce cadre le
Musée des Confluences.
Elle n'intervient pas dans la conception de logements
privés. En effet, aujourd'hui l'offre en matière de construction
privée est suffisante sur la métropole Lyonnaise. Une
intervention de la SERL dans ce domaine irait à l'encontre du principe
directeur
26 Ministère du logement et de l'égalité.
Loi ALUR : Les conventions de mandat d'aménagement. [en
ligne].Territoire.gouv.
http://www.territoires.gouv.fr/IMG/pdf/ALUR_fiche_convention_de_mandat.pdf.(Pa
ge consultée le 9/03/2016)
de l'économie mixte : la défaillance du secteur
privé dans un domaine. Pour cette raison nous avons choisi de nous
concentrer sur le cas de la concession d'aménagement et de ne pas
étudier la SERL comme maître d'ouvrage de projets
privés.
Pour cet aménageur, la concession représentait
en 2015, 60 % de ses réalisations 27, qui sont à la
fois des grandes opérations de renouvellement urbain mais
également le réaménagement de quartiers de ville. Il va
donc falloir comprendre comment intégrer un montage de type habitat
participatif dans une concession d'aménagement. Pour ce faire il faut
analyser les conséquences ainsi que l'ingénierie qui devra
nécessairement être mobilisée pour développer ce
type de projet. Avant de passer à cette étape il est essentiel de
bien comprendre le processus d'une concession d'aménagement.
Cette forme de montage va définir la relation
contractuelle entre l'aménageur et la collectivité. Elle
intervient dans les cas où la collectivité renonce à une
intervention en régie directe et décide de concéder la
réalisation d'une opération.
1. La phase d'étude du
projet
La première étape du projet est menée
par la collectivité et concerne la définition des
caractéristiques de l'opération avec la réalisation des
études préalables, ainsi que la définition du projet et la
mixité attendue. Cette phase comprend également l'étude de
faisabilité de la concession d'aménagement, ainsi que la
procédure de mise en concurrence et la méthodologie de choix du
candidat. On parle à ce stade de l'établissement du dossier de
création qui sera le document de base pour la mise en place de
l'étape suivante de mise en concurrence.
2. La mise en concurrence
Depuis 2005, les directives européennes obligent la
mise en concurrence des aménageurs avant la signature du contrat de
concession. L'aménageur va alors passer par une phase de
sélection avec définition d'un projet, méthodologie,
estimation financière et planning, qui seront soumis au choix de la
collectivité. La définition de ce projet se fait à partir
du dossier de création établie par la collectivité.
L'aménageur va reprendre les éléments du projet en
effectuant une analyse plus poussée mettant en oeuvre des
éléments de programmation de logement.
50
27 Rapport d'activités, SERL 2015.
51
3. La mise en place du contrat de
concession
Une fois la décision prise de la part de la
collectivité, un contrat de concession va alors être passé
entre l'aménageur et la collectivité à partir du programme
proposé et enrichie lors de la phase d'appel d'offre. Il devra
comprendre :
· Les missions confiées à
l'aménageur
· Les modalités d'acquisition du foncier par
l'aménageur (notamment les possibilités de recours à
l'expropriation et à l'utilité publique)
· Le programme des équipements publics à
réaliser
· Les modalités de réalisation du Programme
des Espaces Publics (PEP)
· Les conditions administratives et financières (le
bilan) de réalisation du projet
· Les délais de réalisation
4. La réalisation du projet
urbain
Une fois la signature du contrat de concession
l'aménageur va piloter la réalisation du projet urbain. Lors de
la réalisation de ce projet, plusieurs missions vont se superposer et
s'enchaîner durant l'ensemble du processus de l'opération.
4.1 Procédures d'urbanisme : le dossier de
réalisation
Le dossier de réalisation reprend les
éléments présentés par l'aménageur lors de
la procédure de l'appel d'offre. En effet, il s'agit d'une adaptation du
mémoire technique avec mise à jour des éléments en
fonction de l'évolution du projet et va comprendre :
Le programme des équipements publics à
réaliser dans la zone, Le programme global des constructions
à réaliser dans la zone,
Les modalités prévisionnelles de
financement, échelonnées dans le temps,
Les modifications à apporter éventuellement
à l'étude d'impact.
52
4.2 Les acquisitions foncières
Lors de la mise en place du traité de concession,
l'aménageur s'engage à acquérir l'ensemble de l'emprise
foncière de l'opération, le domaine public ainsi que le domaine
privé. Cette procédure peut être plus ou moins longue et
dépend en grande partie de la procédure choisie à
l'origine du projet et notamment la mise en place ou non d'une procédure
de DUP (Déclaration d'Utilité Publique).
4.3 Les missions opérationnelles
En raison de la taille des opérations, les phases de
développement vont se faire par lot, qui sont des divisions du
périmètre total de l'opération. Sur chacun de ces lots
seront réalisées des opérations qui le plus souvent se
divisent de la manière suivante :
· La réalisation des études d'avant projet de
conception des espaces publics.
· La désignation de l'ensemble des prestataires,
· La réalisation des travaux de démolition et
de dépollution des terrains,
· La consultation de l'opérateur commercial,
· La consultation opérateurs pour la
réalisation des logements et vente de ces emprises
· La réalisation des espaces publics 5.
La clôture de l'opération
Une fois les aménagements réalisés,
l'aménageur va liquider et clôturer son opération ce qui
passe par plusieurs étapes :
· Remise des ouvrages et revente des équipements
aux collectivités dans les conditions fixées par le contrat,
· Rétrocessions foncières,
· Bilan de clôture et liquidation comptable.
53
3. La question de la gestion financière d'un projet
d'aménagement
L'évolution juridique de 2005 en plus d'avoir
introduit l'obligation de mise en concurrence des aménageurs lors d'une
procédure de concession, a fait évoluer la notion de risque dans
le projet. Auparavant, la collectivité portait quasiment l'ensemble des
risques financiers du projet. Aujourd'hui c'est l'aménageur qui va
assumer ces risques financiers, les modalités étant
prévues lors de l'établissement du contrat de concession entre
l'aménageur et la collectivité. Échelonné dans le
temps, c'est le bilan d'opération qui va permettre le suivi financier du
projet. Année par année les dépenses et recettes de
l'opération sont mises à jour en fonction de la mobilisation des
financements nécessaires à la poursuite du projet ainsi que les
frais financiers associés à l'opération. Ce bilan fait
l'objet d'une publication au CRAC, (Compte Rendu Annuel à la
Collectivité) qui permet un suivi de la part de la maîtrise
d'ouvrage. Le bilan d'opération est l'un des éléments le
plus important pour l'aménageur, qui doit bien veiller à son
suivi. En effet, à l'issue de l'opération un partage du solde,
qu'il soit négatif ou positif, a lieu entre l'aménageur et la
collectivité, d'où la nécessité de faire une
estimation pertinente (montant de l'investissement en début
d'opération) et de réaliser un suivi rigoureux tout au long de
celle-ci. Les éléments du bilan sont mis à jour
annuellement et font régulièrement l'objet de discussion entre
l'aménageur et la ville. Les projets urbains étant des
opérations très longues et soumis à des aléas
importants ont introduit à ce bilan la notion de risque.
54
1. Les éléments d'un bilan
d'opération
Figure 15: Bilan d'un aménageur. Réalisation
personnelle
2. La notion de risque dans une opération
d'aménagement
Depuis 2005, lorsque la mise en place d'un traité de
concession est décidée, on intègre la notion de risques
liés aux aléas d'une opération d'aménagement. On
parle ainsi de marge pour risque. Il s'agit ici de définir le potentiel
d'occurrence sur ces risques afin de déterminer la somme qu'on va
bloquer dans cette catégorie. Si le risque se produit,
l'aménageur va pouvoir puiser dans cette ressource, sinon elle est
conservée. Ces risques sont partagés entre l'aménageur et
la ville et sont définis dans ce traité qui se présente de
la manière suivante :
NOMENCLATURE DES RISQUES
Risques liés aux sols ·
Réalisation de fouilles archéologiques
· Mauvaise qualité géotechnique du sol
· Pollution du sol
Risques liés aux · Montant des
acquisitions plus élevé que prévu au
acquisitions foncières bilan
· Acquisitions foncières plus longues que
prévu
Risques liés aux · Montant des
études plus élevé que prévu
études générales
Risques liés aux ·
Nécessite d'amener ou de renforcer les réseaux
réseaux
Risques liés aux · Montant des
études plus élevé que prévu à
travaux prestations égales
55
Commercialisation · Montant de la
charge foncière moins élevé que prévu
· Non atteinte de la SDP prévue
· Rythme de commercialisation plus faible que
prévu
Risques liés aux frais ·
Évolution des taux d'intérêts
financiers
Figure 16 : Nomenclatures des risques. Réalisation
personnelle. Source : SERL, 2014
56
Le traité de concession n'est pas un
élément figé, il est susceptible d'évoluer de
nombreuses fois au cours de l'avancée du projet. Cependant ces
évolutions ne doivent pas remettre en cause le projet urbain
défini au préalable. Il est donc particulièrement
important pour la SERL d'identifier les risques liés à un projet
urbain dans ces éléments de programmation. L'implication d'un
programme d'habitat participatif au sein d'un projet urbain de plus grande
envergure n'échappe pas à cette règle. C'est pour cette
raison que nous allons intégrer dans la partie consacrée aux
conséquences de l'intégration d'un groupe d'habitants dans un
projet urbain des éléments sur les risques liés à
ce type de montage opérationnel (Partie II-B). L'objectif consistera
à dresser l'ensemble des éléments de réflexion sur
le risque potentiel d'intégrer de l'habitat participatif dans un projet
urbain.
3. Le partage du solde de
l'opération
Depuis 2005, les directives européennes, en plus
d'avoir introduit la notion de risque dans un projet, ont fait évoluer
le partage du solde d'une opération. A l'issue de celle-ci est
effectué un partage du solde d'une opération suivant les
modalités suivantes :
Figure 17: Partage du solde dans une
opération d'aménagement. Réalisation personnelle. Source :
SERL, 2014
C'est dans ce cadre qu'évolue actuellement la SERL
lors de ses missions d'aménagement. L'aménageur est essentiel au
bon suivi d'un projet urbain, de sa capacité à optimiser
l'enchaînement des procédures, à veiller à la
coordination des acteurs en place ainsi qu'à un suivi financier
rigoureux dépend la réussite finale d'une opération
d'aménagement. La procédure dans laquelle évolue la SERL
est complexe et induit la maîtrise d'une ingénierie du projet
très technique.
Par son organisation la SERL se démarque par sa
capacité à innover dans ses projets urbains. Elle a la
volonté de ne pas être seulement investisseur mais
également producteur et service de la ville.
C'est dans ce processus qu'intervient cette étude sur
l'habitat participatif. Comme nous avons pu le voir précédemment,
les opérations immobilières en habitat
57
participatif restent pour le moment très minoritaires
en France. Cependant, la SERL a été confrontée sur
plusieurs opérations à des candidatures de groupes d'habitants
qui souhaitaient développer un projet participatif. L'absence de
référence pour le moment sur ce sujet, a rendu difficile
l'analyse de ces propositions. L'objectif de cette étude n'est pas
à très court terme pour la SERL de lancer un projet en habitat
participatif mais d'être « sachant » sur le sujet, afin
d'appréhender au mieux une éventuelle candidature d'un groupe
d'habitants sur une opération urbaine menée par elle-même.
La partie présente était indispensable à notre
étude sur l'habitat participatif. En effet, pour savoir comment la SERL
peut appréhender cette forme de création de logement, il faut
nécessairement comprendre le fonctionnement de cet aménageur.
Comme nous avons pu le voir, cet aménageur intervient dans un cadre
très formalisé. Sa structure en économie mixte lui
confère des responsabilités importantes et fixe la recherche de
l'intérêt général comme élément
directeur de sa réflexion. Les projets menés sont très
longs et le risque est un élément déterminant dans le
processus de mise en place d'un projet, d'autant plus que les montants
financiers engagés sont colossaux. Il est donc important pour
l'aménageur de mesurer de la manière la plus précise
possible les risques qu'il va prendre dans son projet. La partie suivante a
pour objet d'expliquer les conséquences de l'introduction du groupe
d'habitants dans le montage opérationnel. Il s'agit là d'avoir la
vision la plus claire et précise possible en se plaçant dans un
cadre théorique afin d'anticiper au mieux les conséquences de
l'intégration d'un projet d'habitat participatif au sein d'un projet
mené classiquement par la SERL. Cette partie est le fruit de nombreux
échanges avec des professionnels de l'aménagement qui sont
intervenus sur des opérations d'habitat participatif ou qui projettent
de le faire, elle intervient également à l'issue de
participations à des réunions et à une journée
thématique consacrée à ce sujet et organisée par la
SCET (Société Centrale pour l'Équipement du Territoire
28).29
28 La société centrale pour
l'équipement du territoire est une structure créée par la
caisse des dépôts en 1957 et anime le réseau des structures
spécialisées dans l'économie mixte.
29 L'ensemble des réunions font l'objet d'un
compte rendu disponibles en annexe.
58
POiNTS CLéS
LA SERL :
· éVOLUE DANS LE CADRE DE L'éCONOMIE MIXTE.
INTERVIENT EN CAS DE DéFAILLANCE DU SECTEUR PRIVé
· MAJORITAIREMENT :
- OPéRATIONS CONCéDéES (ZAC GRATTE-CIEL,
ZAC LA DUCHèRE,)
- OPéRATIONS CONSTRUCTIONS ET SUPERSTRUCTURES
(MUSéE DES CONFLUENCES, CENTRE UNIVERSITAIRE, SIèGE
RéGION RHôNE ALPES)
· OPéRATIONS CONCéDéES MAJORITAIREMENT
PAR LE GRAND LYON, ACTIONNAIRE à 50% DE LA STRUCTURE
ÉVOLUTIONS :
· DEPUIS 2005, MISES-EN CONCURRENCE ET éVOLUTIONS DU
VOLET FINANCIER
· NéCESSITE DE S'ADAPTER à LA COMMANDE DU
CLIENT
L'HABITAT PARTICIPATIF PEUT êTRE UNE DEMANDE DE LA
MéTROPOLE DONC LA SERL DOIT MAîTRISER CE MODèLE
· NéCESSITE D'INNOVER PAR RAPPORT à LA
CONCURRENCE
L'HABITAT PARTICIPATIF PEUT êTRE UNE SOURCE
D'INNOVATION DONC LA SERL DOIT MAîTRISER CE MODèLE
· LA SERL DOIT éGALEMENT éVALUER
PRéCISéMENT LA NOTION DE RISQUE D'UN PROJET
· LE RISQUE VA INFLUENCER LE BILAN D'AMéNAGEMENT DE
L'OPéRATION
CETTE NOTION DE RISQUE, LA SERL DOIT êTRE CAPABLE DE
LE MESURER DANS LE CADRE D'UN PROJET EN HABITAT PARTICIPATIF
B) LA SERL, UN
AMÉNAGEUR INTIMEMENT LIÉ À UN TERRITOIRE, LA
MÉTROPOLE LYONNAISE
1. La Métropole Lyonnaise, une institution en mouvance
Figure 18 : Territoire de la Métropole du
Grand Lyon :
http://data.grandlyon.com/utiliser-smart-data/
Réalisation personnelle
L
|
a Métropole de Lyon est née le 1er
janvier 2015,
|
|
cette collectivité territoriale
unique en France est le résultat de la fusion de la
Communauté Urbaine de Lyon et du Conseil général du
Rhône, elle se compose de 59 communes.
Ce changement d'échelle est la conséquence de
la loi MAPAM
(Modernisation de l'Action
Publique territoriale et d'Affirmation des
Métropoles). Dotée d'une clause de
compétence générale,
la Métropole de Lyon règle par délibération
toutes les affaires d'intérêt métropolitain.
59
Depuis le 1er Janvier 2005, la Métropole a
élargi le champ de ses compétences, elle est ainsi en charge des
5 grandes compétences suivantes :
· Développement économique
· Éducation, culture et loisirs
· Solidarités
· Cadre de vie
· Gestion au quotidien
60
Quelles conséquences pour la politique
d'aménagement ?
En matière d'aménagement territorial,
l'évolution vers la Métropole Lyonnaise élargie à
la fois le territoire d'intervention et les moyens à dispositions pour
cette collectivité territoriale. Selon Gérard Collomb,
sénateur, Maire de Lyon et Président de la Métropole, dans
les prochaines années un « plan pluriannuel d'investissement,
prévoit 3,5 milliards d'euros pour financer 1175 projets, qui va ainsi
permettre à ce territoire de continuer à se transformer
»30.
Le président de la Métropole, place
l'aménagement du territoire au coeur de la stratégie
économique de cette collectivité. La fusion de la
Communauté urbaine et du Conseil général réunie
deux compétences, « hier la Communauté Urbaine était
chargée de créer des emplois, mais c'était le Conseil
Général qui suivait les personnes les plus
éloignées de l'emploi. Réunir les deux compétences
nous permet de rapprocher le monde économique et monde de l'insertion
»31. G.Collomb souhaite ainsi faire de ce territoire la «
Métropole de l'innovation sociale ».
Cet objectif passe par un renforcement des politiques en
matière d'action sur les quartiers paupérisés « pour
résorber la fracture spatiale, qui est au coeur de la fracture spatiale
». C'est pour cette raison qu'après les opérations
réalisées sur les quartiers de la Duchère, Mermoz,
Vaux-en-Velin, Venissieux, la Métropole de Lyon va poursuivre sa
politique de renouvellement urbain.
Dans le cadre du NPNRU (Nouveau Programme National pour la
Rénovation Urbaine), 14 sites ont d'ores et déjà
été identifiés par l'ANRU (Agence Nationale de
Renouvellement Urbain) et bénéficieront des fonds
débloqués dans le cadre de ce programme.
La SERL, en temps qu'aménageur de la Métropole
Lyonnaise jouera un rôle déterminant dans ce processus. La fusion
de la Communauté Urbaine et du Grand Lyon a eu en effet pour
conséquence, une évolution dans la composition de l'actionnariat
de la SERL, la Métropole est désormais actionnaire à 50%
de la SERL.
Plus que jamais, dans ce cadre et dans un contexte où
la concurrence est de plus en plus importante, la SERL se doit de
répondre et/ou d'anticiper les besoins de la Métropole dans les
futurs projets urbains de ce territoire.
30 A.L, Décembre 2015, Vers une Métropole de
l'innovation sociale, Urbanisme, l'individu créateur de ville,
Métropole de Lyon, 55.
31 Idem.
61
2. La Métropole de Lyon, vers un modèle «
Bottom-Up » ?
Il est aujourd'hui difficile de dire quelle stratégie
sera décidée par la Métropole de Lyon dans les prochaines
années. Néanmoins, au regard des articles étudiés
et des rencontres réalisées tout au long de ce travail, une
volonté semble se mettre en place : renforcer l'intégration de
l'habitant dans le processus de conception de la ville.
Cette stratégie se rapproche de la vision «
Bottom-Up ». Cette logique s'oppose à la conception « Top-Down
», il s'agit d'un concept qui renvoie « aux dispositifs de type
participatif » ou « chacun « apporte une partie fondamentale de
l'édifice qu'elle cherche à produire » 32. Cette
intégration de l'habitant est mobilisée par la Métropole
de Lyon depuis de nombreuses années, à travers notamment des
réunions publiques et de la concertation. La Métropole lyonnaise
souhaite renforcer ce processus de participation des habitants. Pour Michel le
Faou33, Vice-président de la Métropole de Lyon, cette
évolution doit être portée par les acteurs politiques et
opérationnels de l'aménagement, selon lui « il ne faut pas
avoir peur de ces transitions mais les prendre à bras-le-corps.
»
Cette analyse est renforcée par les conclusions de la
36è rencontre des agences d'urbanisme qui a eu lieu à
Lyon en Octobre 2015 et qui avait pour thème, « l'individu,
créateur de ville ». À travers cette rencontre
organisée par la FNAU (Fédération Nationale des Agences
d'Urbanisme) le constat est sans appel, l'intégration des habitants
transforme les métiers de l'aménagement. Ces évolutions
aussi minoritaires et peu visibles soient-elles, interpellent les élus
et tous les professionnels. Les besoins sont là, son expression prend de
l'ampleur, les pratiques s'en trouvent modifiées. Pour Jean Paul
Delevoye34« les citoyens ne veulent plus obéir mais
adhérer et il faut susciter en eux la gourmandise du futur ».
On retrouve cette volonté aussi bien à
l'échelle de la ville qu'à l'échelle de son logement. De
nombreux acteurs de l'immobilier s'interrogent notamment sur le futur de
l'habitation. La Métropole de Lyon à l'issu d'un travail de
prospective via une grande enquête auprès de la population
lyonnaise a livré ses conclusions lors de l'atelier « Désirs
d'habiter et modèles économiques ». Pour la
collectivité à l'échelle
32 Muriel Frisch MCF Sciences de l'éducation -
Didactique des disciplines et didactique professionnelle-12 septembre 08
33 Adjoint au maire de Lyon et
vice-président de la Métropole de Lyon, président de
l'Agence d'urbanisme de l'aire métropolitaine Lyonnaise
34 Président du conseil économique, social et
environnemental
62
de ce territoire les enjeux sont « d'assurer une
réponse au vieillissement de la population, favoriser la mixité
sociale, tout en s'ajustant aux attentes des habitants, à celle des
élus locaux et des acteurs de la construction »35.
L'habitat participatif, est un bon outil pour favoriser la
mixité sociale et générationnelle, elle répond
également à la volonté des élus de proposer un
modèle qui vient intégrer les habitants à la conception de
la ville. La Métropole de Lyon en se positionnant sur ce point annonce
son ambition d'innover sur son modèle de conception urbaine.
Nous allons le voir dans la partie suivante l'idée de
développer l'habitat participatif sur la Métropole de Lyon est
une stratégie réaliste étant donnée les
caractéristiques de ce territoire.
3. La SERL, une structure qui s'adapte aux évolutions
de la Métropole de Lyon
La SERL depuis le projet de la Duchère jusqu'à
l'aménagement de la ZAC Gratte-ciel en passant par le musée des
Confluences a toujours répondu aux volontés de son donneur
d'ordre la Métropole de Lyon. Il est donc nécessaire pour notre
structure de s'interroger sur la volonté de la Métropole de
placer l'habitant au coeur du processus urbain. On peut bien sûr se dire
que cette velléité n'est qu'un effet d'annonce, mais les discours
tenus ainsi que les actions engagées sur différentes
opérations de la Métropole de Lyon nous poussent à croire
en un engagement fort dans les prochaines années.
La SERL en 2013, a engagé une étude sur la
concertation urbaine dans les projets urbains, les conclusions de cette
démarche interne montraient déjà l'importance d'un
développement de cette pratique. L'analyse faite aujourd'hui
démontre la même nécessité.
Il y a de grande chance pour que dans un futur proche, la
SERL s'engage sur un projet participatif, que se soit en raison d'une demande
de la Métropole ou bien une volonté de la SERL. En effet par son
caractère participatif, cet habitat est un outil d'une stratégie
plus globale de « Bottom-up », vers quoi souhaite tendre la
Métropole. De plus, nous allons le voir dans la partie suivante ce
territoire réuni tout les ingrédients pour voir émerger de
nombreux projets de ce type dans les années à venir.
35 Thierry Roche, Décembre 2015, Désirs
d'habiter et modèles économiques, Urbanisme, l'individu
créateur de ville, Métropole de Lyon, 55.
63
POiNTS CLéS
LA MéTROPOLE DE LYON, C'EST :
· UNE INSTITUTION EN MOUVEMENT
· UNE STRATéGIE BASéE SUR LE
DéVELOPPEMENT DE L'INTéGRATION DES HABITANTS AU PROCESSUS DE
CONCEPTION DE LA VILLE
· DE NOMBREUX PROJETS DANS LES ANNéES à
VENIR. L'HABITAT PARTICIPATIF
· UN MODE DE PRODUCTION DU LOGEMENT QUI INTèGRE LES
HABITANTS
· DONC POTENTIELLEMENT UN AXE DE STRATéGIE DE
DéVELOPPEMENT POUR LA MéTROPOLE LYONNAISE POUR LA SERL
· LA NéCESSITé DE S'ADAPTER AUX
STRATéGIES DE LA MéTROPOLE
64
C) LA MÉTROPOLE LYONNAISE, UN TERRITOIRE FERTILE POUR LE
DÉVELOPPEMENT DE L'HABITAT PARTICIPATIF ?
1. La Métropole Lyonnaise, territoire d'une
expérience emblématique en matière d'habitat participatif,
le village vertical
L
|
e Village Vertical est à l'échelle lyonnaise et
nationale un projet emblématique de l'habitat participatif. En effet, ce
projet est novateur, il est le premier qui a
|
|
développé le modèle de la
coopérative en France et il a la particularité d'intégrer
une SA coopérative d'HLM, Rhône Saône Habitat, dans son
montage. La médiatisation très importante de ce projet contribue
également à présenter le Village Vertical comme une
référence sur le plan national.
Le projet du Village Vertical
Ce projet débute en 2005, comme souvent il naît
de la volonté d'un groupe d'habitants de développer une forme
innovante de logement. Très vite le groupe noue un partenariat avec
l'association Lyonnaise, Habicoop, qui promeut depuis 2005 le
développement de l'habitat participatif (voir partie suivante).
Habicoop, va offrir ses services gratuitement au titre du caractère
expérimental de la démarche, elle accompagnera le groupe tout au
long du processus. En 2007 le groupe s'associe avec RSH dans l'idée de
développer une coopérative d'habitation. Ce premier contact s'est
fait de manière très informel avec un entretien entre le groupe
alors constitué et le directeur général de la structure
Benoît Tracol. RSH a décidé de se lancer dans cette
aventure pour le coté innovant du projet sans forcément
être à la base spécialiste de l'habitat participatif.
À ce stade, le groupe n'avait encore aucun projet il a
donc fallu le mettre en place. Avec l'aide d'Habicoop et de RSH, le groupe a
identifié un terrain susceptible de pouvoir accueillir le village dans
la ZAC de la maison neuve à Villeurbanne. L'accès à ce
foncier a pu aboutir uniquement grâce à la ville de Villeurbanne
et du Grand Lyon qui ont mis à disposition du groupe un terrain au prix
du logement social qui à l'origine était fléché
pour de la promotion privée.
65
|
Le développement du projet a duré 7 ans entre
la constitution du groupe et la livraison du bâtiment. Cette durée
très longue explique notamment la rotation très importante des
personnes qui habitent dans le village vertical, en effet du groupe originel il
ne reste qu'une seule personne. Cette rotation s'explique également par
la complexité du projet et son caractère novateur. L'absence de
cadre législatif et de projet similaire a obligé la mise en place
d'une structure juridique assez complexe qui a évolué au fur et
à mesure des difficultés rencontrées.
|
Figure 19 : Chronologie V.V. Source:
RSH
|
|
Le montage du Village Vertical
Figure 20 : Montage du jardin de Jules .
Réalisation personnelle
L'association entre RSH et l'association du Village Vertical
a pour conséquence un montage particulier. En effet, l'opération
comporte 2 maîtres d'ouvrage, RSH pour les 24 logements en accession
sociale et le village vertical pour les 14 logements de la coopérative,
le tout formant le Jardin de Jules, nom donné à
l'opération. Le village vertical est structuré en SAS,
(société par actions simplifiée), les habitants ne sont
pas propriétaires de leurs logements mais locataires auprès de
l'association. À ce titre, ils payent chaque mois une redevance, qui
correspond au remboursement du
prêt, plus une participation aux charges de gestions.
Pour devenir locataire du logement il faut être membre de la
société, en entrant dans le capital, investissement que l'on
récupère en quittant celui-ci. Afin de mettre en place cette
structure, c'est l'association qui effectue le prêt pour la construction
des logements, montage qui permet à des personnes aux revenus plus
modestes de devenir propriétaire. L'inconvénient de ce
modèle, c'est la difficulté pour une banque à garantir ce
prêt.
Devant les difficultés rencontrées par le
groupe, c'est RSH qui a effectué le portage financier jusqu'à
l'obtention du prêt PLS par la coopérative d'habitants (Juin
2013). Prêt locatif social qui a pu être obtenu grâce
à l'introduction d'un plafond de revenu pour les futurs locataires. Fait
rarissime, RSH est garant du village vertical pour les 50 prochaines
années. En cas de défaillance de paiement d'un des locataires, le
bailleur devient propriétaire du logement. À noter dans ce
montage une participation de la caisse des dépôts et consignations
via l'obtention d'un prêt PLA-I, en raison des 4 logements
étudiants du village vertical.
Figure 21 : La garantie d'emprunt du jardin de
Jules. Réalisation personnelle
Le bâtiment
Figure 22 : Le Jardin de
Jules.
Habicoop.fr
66
|
Figure 24 : Espaces partagés.
Présentation SCET.2015
|
|
67
Le bâtiment est un immeuble unique de 38 logements, la
partie Ouest est réservée à l'accession sociale, la partie
Est au Village Vertical. Extérieurement, à la demande de RSH
cette division est invisible et partage des prestations communes : un ascenseur
commun, un sous-sol commun, une chaufferie bois-gaz commune.
Figure 23 : Organisation du bâtiment.
Présentation SCET 2015
Côté Village Vertical, chaque ménage
dispose d'espaces privatifs importants, clé de la réussite d'un
projet d'habitat participatif. Les « villageois » partagent une salle
commune en rez-de-chaussée, une buanderie et 4 chambres d'amis
destinées à accueillir ponctuellement, voire à servir de
local d'activité. Parmi les 14 logements du Village Vertical, 4 sont des
résidences sociales, construites via un bail emphytéotique de 50
ans et animées par AILOJ, association qui s'occupe du logement de jeune
en difficulté.
Le bâtiment réalisé représente une
surface habitable (SHAB) de 2752 m2 dont 1741 m2 pour les 24
logements en accession sociale et 1011 m2 pour les 14 logements du
Village Vertical. Au total le prix revient global de l'opération est de
6 250 000 € HT soit 2 270 € HT par M2 SHAB. A noter un
coût du terrain inférieur au prix du marché de 200 €
HT / m2 SP, grâce à une subvention Grand Lyon de 50
€ HT / m2 pour le Village36.
Bilan et retour
d'expérience
Le retour d'expérience est très variable selon
les acteurs. En ce qui concerne les habitants, l'expérience semble
très positive, pour le moment l'ensemble des personnes du groupement
habitent encore dans le Village Vertical. En revanche, l'exposition
médiatique très importante ainsi que les demandes de rencontres
conséquente, ont obligé le groupement à dorénavant
refuser toutes les sollicitations. Néanmoins l'association garde un
contact privilégié avec Habicoop et ses membres participent
régulièrement à des rendez-vous organisés par
l'association.
Pour Habicoop la réussite est totale, puisqu'avec ce
projet abouti de coopératives elle se positionne comme un acteur majeur
(voir par la suite).
Pour RSH cette expérience est mitigée. Elle est
très positive professionnellement parlant, dans la manière de
gérer un groupe et également dans l'aventure humaine. Cependant,
l'investissement horaire, 2 réunions par mois pendants 5 ans, sans
compter le temps passé à la gestion du projet fait que RSH ne
souhaite pas renouveler l'expérience sous ce format. De plus,
l'engagement financier très important ainsi que la prise de risque dans
le montage de la part du bailleur sont également des
éléments qui justifient la réflexion de la part de RSH
à s'engager dans le futur sur ce modèle.
Malgré des réticences, RSH est aujourd'hui
convaincu du futur et de la nécessité pour les bailleurs de
s'investir dans le développement de l'habitat participatif, vecteur
important du développement de la mixité sociale. C'est à
ce titre que RSH est engagé dans un groupe de réflexion à
l'échelle nationale de bailleurs pour le développement de
l'habitat participatif. Malgré tout selon ce bailleur l'habitat
participatif ne se décrète pas, ce mode d'habiter ne peut pas
correspondre à tout le monde et obéit à des convictions
fortes de partage et de vivre ensemble.
À ce jour, RSH intervient sur le programme de
rénovation d'un immeuble de 5 logements en habitat participatif, la
Gargouse (Lyon 7ème) en garantie financière en cas de
défaillance éventuelle d'un des habitants. L'aspect financier est
selon RSH
68
36 Données Rhône Saône Habitat.
Présentation SCET. 12/2015
69
l'enjeu majeur du développement de ce type d'habitat, qui
peine à trouver des garanties financières, en raison du
caractère novateur de ces projets.
2. L'influence d'Habicoop sur le développement de
l'habitat participatif à Lyon
Le challenge le plus important pour favoriser le
développement de l'Habitat participatif, c'est la
nécessité d'acculturer les populations à ce modèle
si particulier. Comme nous avons pu le voir tout au long de cette étude
le modèle de l'habitat participatif apporte des changements importants
dans la notion de propriété qui au premier abord semble
être diamétralement opposé à la vision classique de
l'habitat. Ce processus de sensibilisation au modèle de l'habitat
participatif, l'association Habicoop l'a entrepris tout d'abord à Lyon
auprès des citoyens puis à une échelle nationale en
entreprenant une action de lobbying auprès des pouvoirs politiques.
L'association Habicoop naît en 2005 de l'association de
plusieurs membres issues du monde de l'économie sociale et solidaire, de
la politique et de l'architecture, qui à l'issue de visites de
coopératives habitantes en Allemagne et au Québec décident
de développer ce mouvement en France37. L'association a en
premier lieu travaillé sur la sensibilisation des personnes à ce
modèle par l'organisation d'ateliers sur la définition de
l'habitat participatif, ateliers qu'elle continue d'organiser très
régulièrement sur la Métropole Lyonnaise.
Parallèlement, l'association a rencontré le groupe du
Village-Verticale et en juin 2006, un partenariat se crée pour effectuer
une mission d'accompagnement du projet. Le Village Vertical est ainsi devenu le
projet pilote, avec lequel s'est construit le montage juridique, financier et
partenarial dans une logique de reproductibilité (voir partie
précédente). Aujourd'hui l'association se place comme
accompagnateur de projet en s'inspirant de ce qui se fait à
l'étranger et plus particulièrement au Québec.
L'association souhaite se placer comme Groupe Ressource Territoriale avec pour
missions38 :
· Ressources habitants, en mettant en commun des
documents de recherches et en mettant en relation des porteurs de projets et
des habitants afin de favoriser la constitution de groupes en habitat
coopératif.
· Ressources professionnelles, permettre la
mutualisation des compétences et des outils d'accompagnement entre les
membres du GRT afin de proposer des missions d'assistance.
· Ressources recherches, participer à des groupes
de travail dans la rédaction et la diffusion de documents sur l'habitat
participatif. Effectuer de la diffusion auprès des collectivités
et professionnels de l'aménagement.
37 Site de l'association :
Habicoop.fr
38 Missiones issus des objectifs listés par l'association
Parasol, GRT
Ouest. Parasol35.org
70
Le projet du Village Vertical a permis à l'association
de légitimer son rôle et en fait aujourd'hui un acteur majeur du
développement de l'habitat participatif à Lyon comme sur le
territoire national. En effet, l'association est un acteur majeur du lobbying
auprès de l'État (C.Devaux, 2015), qui s'est
concrétisé par l'adoption de statuts juridiques propre à
l'habitat participatif dans la loi ALUR. Cette action est le fruit d'un travail
de prospective entamé en 2008, qui a mis en lumière « la
possibilité de développer ce modèle, mais qui
nécessitait des changements législatifs puis
réglementaires » (Lyon, réunion publique). Pendant 5 ans
l'association a développé son action auprès des
gouvernements successifs, publiant dans les revues spécialisées
et utilisant largement les réseaux sociaux (C.Devaux, 2015) afin de
faire connaître leur mouvement. Le Village Vertical a sans nul doute eu
une portée très importante dans la diffusion et la connaissance
de l'habitat participatif. En effet, cette coopérative, la
première en France est une vitrine pour l'association Habicoop qui lui a
permis également une légitimité forte sur ce sujet,
où peu de professionnels se sont pour le moment imposés.
Comme nous venons le voir, le rôle d'Habicoop est
primordial dans le développement de l'habitat participatif à
l'échelle de la Métropole. En effet, l'organisation
régulière de réunions d'informations participant à
l'acculturation des populations ainsi que l'action de lobbying auprès
des politiciens pour faire entrer dans le droit français le statut de
coopérative d'habitants ont permis à cette association
d'être identifiée comme acteur majeur de l'habitat participatif.
Ce constat est particulièrement vrai à l'échelle de Lyon,
où l'ensemble des projets d'habitat participatif en cours est suivi par
Habicoop. Cette légitimité, l'association la doit en grande
partie au Village Vertical et à ces retombées médiatiques
qui fait de l'association un acteur essentiel au développement
éventuel de l'habitat participatif à Lyon.
71
3. Quel(s) avenir(s) pour l'habitat participatif sur le
territoire métropolitain ?
Avec la mise en place du Village Vertical, un engouement fort
aurait pu être créé sur la Métropole de Lyon. En
effet, les retombées médiatiques particulièrement
importantes ainsi que le travail de terrain réalisé par le
secteur associatif ont engendré les ingrédients d'une
popularisation du mouvement. Cependant, comme nous allons le voir dans cette
partie la réalité est relativement différente.
Un engagement politique à deux
vitesses
La position de la Métropole du Grand Lyon depuis
l'émergence du projet du Village Vertical est assez ambivalente. En
effet, on a à la fois le sentiment que la collectivité
désire s'impliquer dans le processus de réflexion autour du
développement de l'habitat participatif et dans le même temps on
constate qu'elle ne souhaite pas s'engager dans la phase opérationnelle
de ces projets. À partir d'entretiens formels et informels ainsi que de
participations à des rencontres sur le sujet, il semblerait que cette
position tiraillée trouve son explication dans la gestion de
l'après Village Vertical.
La métropole de Lyon s'est engagée dans divers
organisations afin de promouvoir le développement de l'habitat
participatif. Depuis 2010, la métropole de Lyon est membre du
Réseau National des Collectivités pour l'Habitat Participatif :
groupement qui s'est engagé dans la constitution de « cet outil
opérationnel et engagé pour faire de l'habitat participatif une
composante des politiques publiques, mais aussi un levier de lobbying
39È. C'est au titre de cette participation que la Métropole
de Lyon a participé à la réflexion autour du cadre
juridique de l'habitat participatif qui a abouti à l'adoption de la loi
ALUR.
La Métropole de Lyon est une des rares
collectivités à avoir inscrit à son PLH son ambition de
développer l'habitat participatif dans une logique d'innovation pour le
logement aidé40.
La Métropole de Lyon a également mené une
réflexion importante autour d'un projet resté aujourd'hui sans
suite. L'ambition était de créer un modèle pour ensuite
l'étendre afin de pouvoir créer du logement participatif. Cet
outil opérationnel, inscrit au PLH du Grand Lyon, était
basé sur le modèle suisse afin de créer une
faîtière en mettant en place un fond d'investissement permettant
de venir en appui des groupements. Un travail a été
effectué avec la caisse des dépôts, la région et
trois
39 Charte d'orientation du Réseau National.
Novembre 2010.
40 Cette action est introduite dans la fiche d'action
n°13 du PLH du Grand Lyon. Disponible sur :
http://www.grandlyon.com/fileadmin/user
upload/media/pdf/habitat/plh/20110404 gl plh t2 progdacti on.pdf
72
fondations, fondation Abbé Pierre, Macif et Fondation
de France. Le modèle évoqué était de permettre
à cette société d'investir dans le logement privé
diffus pour réhabiliter des immeubles en lien avec des
coopératives qui occuperaient ces logements. La mise en place de cette
structure est demeurée sans suite, faute d'un portage politique et de
sources de financement insuffisantes.
De l'avis de nombreux acteurs de l'habitat participatif
Lyonnais, l'expérience d'un projet participatif dans le quartier de
Confluence marque un tournant dans la stratégie politique de la
Métropole de Lyon. À la suite du projet du Village Vertical, un
autre groupe se monte sur Confluence, la collectivité est alors d'accord
pour se lancer dans ce programme, mais émet des réserves suite
à l'expérience du Village Vertical. La collectivité
souhaite d'emblée que le groupement s'associe avec un bailleur social,
afin notamment d'avoir une garantie financière, puisque le bailleur va
alors s'engager à racheter le logement en cas de défaillance du
groupement.
La suite est assez floue ce qui rend difficile d'affirmer
connaître la cause exacte de l'échec de ce groupement.
D'après une étude menée par M.Sirieix, plusieurs raisons
peuvent expliquer l'échec du groupement. Pour un des coopérateurs
c'est une « action malhonnête d'un des partenaires » qui
explique l'échec du projet. Pour une autre source c'est le «
caractère trop amateur du projet qui a conduit à l'arrêt
des négociations », enfin certains pointent « une arnaque et
le groupe s'est fait avoir »41. Toujours est-il que le
groupement a fini par éclater et l'opération n'a jamais vu le
jour.
Cette mauvaise expérience marque pour beaucoup la fin
de la volonté de la municipalité de s'engager de manière
offensive dans ce type de projet42. La posture du Grand Lyon est
aujourd'hui de répondre aux groupes intéressés, pour le
moment la ville n'est pas dans une logique d'appel à projet comme le
font Grenoble, Paris ou Lille...
À partir du moment où un groupe sollicite le
Grand Lyon, la collectivité répond et oriente vers
différents acteurs de l'habitat participatif. Son objectif n'est pas
pour le moment de flécher des fonciers susceptibles d'être mis
à disposition d'un groupe. Cette absence de stratégie forte se
retrouve également dans les moyens mis en place en faveur du
développement de l'habitat participatif. En effet, ils sont aujourd'hui
assez faibles, voire quasi-inexistants, il n'y a d'ailleurs aucune personne qui
soit en charge exclusivement de définir une stratégie et de
développer ce secteur.
41 Sirieix Marion. Le mouvement Lyonnais de
l'habitat coopératif, un nouvel acteur du changement social ? Soutenu en
septembre 2012 à l'Institut lumière Lyon 2.
42 Analyse de M.Chanal, chargée de mission habitat
Grand Lyon, voir compte rendu de son entretien en annexe et confirmé par
le travail de M.Sirieix.
73
Cartographie des projets à l'échelle de la
Métropole
Figure 25 : Carte des projets et initiatives en habitat
participatif à l'échelle de la métropole Lyonnaise.
Réalisation personnelle.
Projet aboutit
1 - Le Village Vertical
Année
emménagement
Surface
2015
1 011 m2 surface habitable
Nombre de logements 14
Montage juridique Coopérative
Cout de construction 1 335 € M2
SHAB
Projets en développements
Septembre 2017
2 - Chamarel
Année
d'emménagement
Surface /
Nombre de logements 16
Montage juridique Coopérative
Cout de construction /
3 - La Gargousse
Surface /
Nombre de logements 6
74
Le projet Chamarel propose un habitat assez unique en France,
il s'agit ici de la première coopérative d'habitants pour
personnes vieillissantes. L'objectif de cette coopérative est de
permettre aux habitants de vieillir ensemble, sur la base de la
solidarité. Ce groupement vient de poser la première pierre d'un
bâtiment entièrement écologique.
Montage juridique Coopérative
Cout de construction /
Le projet de la Gargousse est situé au coeur du
quartier de la Guillotière (Lyon 7). Le groupement est en phase
d'acquisition du bâtiment. Il s'agit d'un immeuble à
rénover qui appartient à la ville de Lyon. Le collectif de 4
personnes deviendra propriétaire via un bail emphytéotique de 70
ans.
4- Les choux lents
Année
d'emménagement
|
2017
|
Surface /
Nombre de logements 7
Montage juridique SCIA
Cout de construction /
Le projet des choux lents se situe à Saint Germain en
Mont D'or, le groupement a investi dans une maison bourgeoise et une grange
qu'elle partage. Actuellement le site est en travaux mais une partie des
habitants ont déjà investi les lieux.
/
5- Groupe du 4 mars
Année
d'emménagement
Surface /
Nombre de logements 13
Montage juridique SCIA
Cout de construction /
75
Groupe situé à la Croix-Rousse qui utilise un
montage intéressant. Ils ont fait le choix de monter le projet avec
Alliade-Habitat, Entreprise Sociale pour l'Habitat. Une signature de contrat
d'étude a été mise en place sous la forme d'une VEFA
participative. Le groupement avance très vite et devrait entamer
très prochainement la construction du bâtiment.
76
Projets qui ont échoué
La liste ci-dessous est non-exhaustive, elle fait état
des projets qui n'ont pas abouti sur le territoire Métropolitain. Les
raisons ne sont pas toujours connues, mais dans l'ensemble des cas, un
échec a engendré l'explosion du groupe.
6- Projet de Confluence
Comme nous avons pu le voir précédemment dans
ce cas, les raisons de l'échec sont multiples, groupe débutant,
refus politique, action malhonnête... Le groupe n'a pas souhaité
continuer ce projet.
7- Projet Gratte-ciel
Le groupement HaCoNovi s'est dit intéressé par
un projet sur la ZAC Gratte-Ciel, d'après l'association un « refus
politique a poussé le groupe à abandonner cette option
È.
8- Projet Croix Haute
Ce groupe de 8 foyers a décidé d'abandonner ses
recherches, faute d'opportunité dans le 4ème
arrondissement, le groupe a été dissout.
On constate à travers les projets d'habitat
participatif en développement sur la Métropole Lyonnaise qu'ils
sont pour le moment peu nombreux et de tailles assez modestes, pas plus de 20
logements. En revanche, on observe une diversité dans la forme, le type,
les valeurs de ces résidences, ce qui témoigne des multiples
possibilités d'initiatives en matière d'habitat participatif.
77
POiNTS CLéS
L'HABITAT PARTICIPATIF À LYON, C'EST :
· AVANT TOUT L'EXPéRIENCE DU VILLAGE VERTICAL,
PREMIèRE COOPéRATIVE EN FRANCE
· HABICOOP, ASSOCIATION QUI PROMEUT L'HABITAT
COOPéRATIF ET AIDE LES GROUPES DANS LE DéVELOPPEMENT DE
PROJETS
· UNE POLITIQUE AMBIVALENTE DE LA PART DE LA
MéTROPOLE
- UNE INSCRIPTION DE L'HABITAT PARTICIPATIF À LA
STRATéGIE DU PLH, UN INVESTISSEMENT DANS LE RHNP - MAIS PAS DE POLITIQUE
VOLONTARISTE
POURQUOI ?
· IL SEMBLE QUE DES EXPéRIENCES AVORTéES ONT
DONNé UNE MAUVAISE RéPUTATION AU MOUVEMENT DE L'HABITAT
PARTICIPATIF ALORS QUE
· TRAVAIL D'ACCULTURATION TRèS IMPORTANT DE LA PART
D'HABICOOP
· PROJETS EN COURS ET GROUPES FORMéS SUR LE
TERRITOIRE
78
CONCLUSION
A
travers l'étude de l'expérience Lyonnaise en
matière d'habitat participatif, on se rend compte que ce territoire
nourrit une position paradoxale. En effet, Lyon fait jusqu'à
présent figure de ville moteur en matière de développement
d'habitat participatif. Cette position s'explique en grande partie par sa
participation au RNHP (Réseau National de l'Habitat Participatif) et par
l'importance de son tissu associatif qui favorise l'acculturation à
cette innovation. Enfin, on ne peut pas évoquer l'habitat participatif
à Lyon sans parler du Village Vertical qui est l'expérience
emblématique à l'échelle du territoire français.
Lorsqu'on s'intéresse à ce projet, on se rend
très vite compte que les analyses effectuées se placent le plus
souvent du côté des habitants. Nous avons effectué le choix
dans ce travail de se placer du côté des professionnels. Comme
nous avons pu le voir cette position permet d'avoir une vision très
différente puisque le retour d'expérience montre que ce type de
projet nécessite des améliorations importantes.
Comme le montre les divers projets en cours, la
métropole de Lyon semble aujourd'hui dans une position d'attente et ne
dispose pas d'une stratégie propice au développement de l'habitat
participatif. C'est cette position qui est paradoxale car nous avons pu le
voir, ce territoire semble propice au développement de cette forme
d'habitat. En effet, d'un côté les associations et plus
particulièrement Habicoop effectuent un travail très important
d'acculturation, étape indispensable à la formation de groupe,
permettant aux collectivités d'initier des projets. Mais cet
élément propice à l'essor à grande échelle
de l'habitat participatif est freiné par l'absence d'une volonté
de la part des politiques de développer cette troisième voie pour
le logement. En effet, il semblerait que des expériences passées
non concluantes ont remis en question la stratégie inscrite au PLH du
Grand Lyon en 2007 visant à développer de l'habitat participatif
dans une logique d'innovation pour développer le logement
aidé43.
Nous allons le voir dans la partie suivante, la
sécurisation des risques et la professionnalisation de l'habitat
participatif est un des enjeux les plus importants pour le développement
et l'institutionnalisation de ces projets [C.Devaux, 2005]. La partie suivante
sera ainsi consacrée à l'étude des projets en habitat
participatif, nous verrons donc les enjeux liés à
l'intégration d'habitat participatif sur un projet urbain, ainsi que
l'apport de la SERL dans la mise en place de ces projets. Cette analyse nous
permettra de définir un modèle opérationnel qui pourrait
permettre à la SERL de développer de l'habitat participatif dans
ces projets urbains.
43 Cette action est introduite dans la fiche d'action
n°13 du PLH du Grand Lyon. Disponible sur :
http://www.grandlyon.com/fileadmin/user
upload/media/pdf/habitat/plh/20110404 gl plh t2 progdacti on.pdf
79
III) QUELLE(S) STRATÉGIE(S) POUR LA SERL EN
MATIÈRE
D'HABITAT PARTICIPATIF ?
A) L'HABITAT PARTICIPATIF QUELLES CONSÉQUENCES SUR UN
PROJET URBAIN ?
L
|
'innovation de l'habitat participatif concerne
essentiellement les processus et les rapports entre les acteurs. C'est pourquoi
les phases de la programmation
|
|
et de la conception sont profondément modifiées
par la présence des futurs usagers''.
Il est important dans l'éventualité pour la
SERL de développer ce type de projet d'avoir une connaissance large des
caractéristiques d'un montage opérationnel d'habitat
participatif. En effet, comme nous avons pu le voir dans la partie
précédente, la notion de risque est particulièrement
importante dans le fonctionnement d'un aménageur qui doit donc les
anticiper de la meilleure des manières afin de tenir un bilan financier
le plus constant possible.
À travers cette partie, nous allons aborder les
différentes caractéristiques induites par l'intégration
d'un projet d'habitat participatif dans le montage opérationnel d'un
projet urbain. Nous avons identifié trois types de conséquences
propres à l'intégration d'un projet d'habitat participatif :
· Conséquences sur l'accession au logement,
· Conséquences sur le coût d'un projet,
· Conséquences sur la durée d'un projet.
44 Hab-Fab - Quelle stratégie pour commencer ?. 2016.
Hab-Fab - Quelle stratégie pour commencer ?.
[en ligne ] Disponible sur :
http://www.hab-fab.com/collectivites/quelle-strategie-pour-commencer.
[Accès le 15 Mars 2016].
80
1. L'habitat participatif, quelles conséquences sur
l'accession au logement ?
« L'habitat participatif est un bon outil de
démocratisation de l'accès aux logements » ? (Réunion
publique, Habicoop, 2016).
On est en droit de s'interroger sur cette affirmation qui est
un des arguments utilisés par les défenseurs de ce type de
projet.
Au vu de notre analyse, ce type d'habitat est aujourd'hui
encore réservé à une certaine catégorie sociale qui
s'inscrit dans une démarche militante issu des Professions et
Catégorie Socioprofessionnelles supérieurs (professions
intermédiaires, professions intellectuelles supérieures...). On
va ainsi retrouver le plus souvent dans ces groupements des architectes, des
instituteurs, des retraités de la fonction publique, des personnes
issues du secteur associatif voire du militantisme.
Cette constitution des groupes trouve sa raison dans le
caractère même de l'habitat participatif. En effet, comme nous
avons pu le voir depuis le début de cette étude, ces projets sont
complexes et défendent le plus souvent des valeurs telles que la non
spéculation, la non propriété et le partage. Il semble
donc légitime de trouver dans ces groupes des personnes prêtes
à s'engager dans ce type d'habitat qui va dans une direction
différente des modèles classiques.
Véronique Biau45 en 2012 s'interrogeait
déjà sur le futur de l'habitat participatif selon elle ce
mouvement était à un « point critique ». Soit ces
projets, pour l'instant diffus et réservés à une certaine
catégorie sociale s'installeront, réussiront et enclencheront, un
processus d'amplification ; soit ils conserveront cette échelle
expérimentale et n'existeront jamais à une plus grande
envergure.
La mise en place de la loi ALUR combinée à
l'implication de plus en plus importante des collectivités contribuent
à un processus d'institutionnalisation qui selon C. Devaux ne peut se
faire que par une implication plus grande du politique dans ce processus, en
incitant et en favorisant le développement de cette forme d'habitat.
Comme nous n'avons cessé de le rappeler dans cette étude,
l'habitat participatif n'est pour le moment en France qu'à ses
prémisses.
Cependant, le nombre de projets de plus en plus important en
France (voir partie II-B) ainsi que l'engagement des acteurs institutionnels
pour le développement de
45 Véronique Biau est architecte-urbaniste en chef de
l'État, docteur en sociologie, chercheuse à l'École
nationale supérieure d'architecture de Paris-Val de Seine, directrice du
Centre de Recherche sur l'Habitat.
81
l'habitat participatif témoignent de l'engouement
suscité par cette « troisième voie » du logement.
L'habitat participatif vecteur de mixité sociale
?
La notion de mixité sociale est aujourd'hui
primordiale en aménagement. Recherchée dans les projets urbains,
elle est au coeur du Nouveau Programme National de Renouvellement Urbain
(NPNRU) et participe à la notion de vivre ensemble ainsi qu'à la
création de la ville durable.
L'habitat participatif peut être un vecteur de
mixité sociale pas seulement à la macro-échelle du
quartier, mais également à la micro-échelle du
bâtiment. Cependant, elle être atteinte que si l'on intègre
un bailleur social au projet. En effet, incorporer cet acteur permet de
développer de la mixité via la construction de logements sociaux
au sein du projet participatif.
Deux formes d'intégration de logements sociaux nous
semblent pouvoir alors être mises en place :
Sous la forme de lots séparés
C'est le modèle qu'on retrouve sur l'opération
du Village Vertical, où le bâtiment le Jardin de Jules est
divisé entre les logements du bailleur HLM (24 logements) et la
coopérative d'habitants (15 logements). Les deux groupements partagent
les coursives communes et ont accès aux espaces communs du Village
Vertical (buanderie, pièce commune) moyennant une adhésion
à l'association.
Sous la forme de lots mixés
Intégrer le logement social de manière
mixée dans un bâtiment participatif est pour le moment un choix
assez peu répandu. Il s'agit de disposer les logements sociaux sans
distinction dans le bâtiment. C'est sur ce modèle que souhaite se
développer la coopérative du 4 Mars à Lyon qui s'associe
avec Alliade, entreprise sociale pour l'habitat, qui assurera la location des
logements sociaux à des locataires qui devront adhérer à
la charte des valeurs de la coopérative.
L'habitat participatif, nous venons de le voir est une
opportunité pour introduire de la mixité sociale à
l'échelle du bâti, mixité particulièrement
intéressante puisqu'elle n'est pas subie mais choisie, ici le voisin
n'est pas ressenti comme une menace qu'il faut tenir à distance, mais au
contraire intégré au quotidien. Afin d'atteindre cet objectif de
mixité sociale, il apparaît primordial d'intégrer un
bailleur social dans l'opération, ce qui va permettre d'inclure au
projet des logements sociaux et va participer à la
démocratisation de l'habitat participatif, jusque-là
réservé à une certaine population.
82
2. L'habitat participatif, quelles conséquences pour la
durée et le coût d'un projet ?
L'habitat participatif, des projets plus longs que
l'accession classique ?
L'ensemble des projets analysés sont
caractérisés par une durée très longue avant leur
concrétisation. Selon différentes études observées,
la durée de montage d'un projet participatif nécessite pour le
moment 2 à 5 ans de plus qu'un projet classique. Cette durée
varie en fonction de la taille des groupes, l'opportunité
foncière ou de la réservation de parcelles par des
collectivités ou des aménageurs.
La professionnalisation du mouvement montre actuellement une
tendance à la diminution de cet écart, mais les
caractéristiques des projets participatifs font qu'ils ne seront jamais
aussi concurrentiels que la promotion immobilière.
Selon une étude menée par l'union sociale pour
l'habitat ce délai supplémentaire s'explique par 4
éléments :
La construction du collectif
Le groupe passe souvent du temps sur la définition de
ces valeurs qui vont fonder le collectif.
La volonté des futurs habitants de maîtriser leurs
projets
L'acculturation nécessaire pour suivre la mise en
place de son habitat nécessite un investissement fort de la part des
futurs habitants.
La recherche de financement
Là encore, généralement peu au fait des
démarches à réaliser, les futurs habitants y consacrent
beaucoup de temps.
La définition des besoins du groupe Ð le programme
architectural
Un travail très important doit être
effectué entre l'architecte et le groupe d'habitants qui doit
définir les besoins tout en respectant un cadre budgétaire. Plus
le groupe est important, plus les aller-retours entre l'architecte et le groupe
sont nombreux.
L'étape introductive au projet est la période
où les ambitions seront fixées, elle est assez longue mais forme
la base du groupe et conditionne la réussite du projet. C'est cette
période qui diffère par rapport à l'accession classique et
explique en grande partie des projets assez longs dans l'habitat
participatif.
HABITAT PARTICIPATIF
DU PROJET À LA RÉALISATION
|
|
|
commune ou collectivité locale
groupe d'habitants potentiel ou en formation
structure d'accompagnement (médiation
et programmation participative)
opérateur social
|
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Mobilisation des coeurs
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|
Cption sur un terra
|
définition du nombre de logements
bilan des ressources et moyens des habitants
choix d'une maîtrisa d'ouvrage et des statuts de la
propriété
définition des modes de financement appropriés
|
|
|
|
|
|
|
Définition du montage juridique et financier
adapté
|
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|
|
Contractualisation des rdation entre acteurs
|
|
|
PROGRAMMATION
une charte
Construction du groupe
des règles de cooptation et dedédsion
PÉRIODE 1 (6 à 8 mois)
Élaboration du programme
Validation du programme
méthodologies de programmation assistance à la
maîtrise d'ouvrage
vérification de l'adéquation du programme avec les
moyens et les modes de financement
ETUDES
ARCHITEC I URALES
Pd fIJDd 2 (d a 8 rroi l:)
Choix de la maîtrise d'oeuvre
consultation concours
Suivi de la maîtrise d'oeuvre (phase esquisse)
Validation d'une esquisse
Dessin et validation des logements
Validation de l'Avant Projet Sommaire
assistance à la maîtrise d'ouvrage
Dépôt de permis de construire
Engagement forma des membres du groupe
83
|
|
assistance à la maîtrise d'ouvrage
|
EIUDES
ARCHITECTURALES
PÉRIODE 3 (18 à 24 mois)
|
|
Création des structuresjuridiques et achat du
terrain
|
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Construction
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|
|
|
|
F ceptionet emménagement
|
|
|
|
|
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|
|
Gestion commune
|
commissions thématiques
|
|
Figure 26 : Différentes étapes d'un projet
participatif. Extrait du guide méthodologique pour la création
SCIAPP. AERA. Réalisation personnelle
84
L'habitat participatif, une réduction des
coûts ?
L'habitat participatif est présenté comme
l'opportunité de réaliser des réductions importantes sur
le coût de production des logements. Nous allons le voir cette
affirmation est difficilement quantifiable et vérifiable.
En effet, on trouve dans la littérature plusieurs
estimations d'économie réalisées. Elles tournent en
général autour de 10 % dans une fourchette comprise entre 5 et 18
%46. Le livre blanc de l'habitat participatif propose notamment une
comparaison de différents montages participatifs et d'une
opération classique, l'économie se situe entre 9,89 % et 17,5%,
mais la méthode utilisée est critiquable, en effet ni les sources
ni la méthode ne sont précisées47.
On peut néanmoins démontrer que les
caractéristiques propres à l'habitat participatif engendrent des
sources d'économie.
Économie liée au
montage
La première source d'économie s'explique du
fait du recrutement des futurs habitants en amont de l'opération, le
coût lié à la commercialisation est donc naturellement
nul.
Cette absence de commercialisation permet également
une levée de fond plus importante étant donnée que
l'ensemble des réservataires sont connus, ce qui entraîne une
baisse de l'emprunt et des frais financiers48.
Économie liée au coût de
conception
Au-delà des économies permises par le montage
financier, la conception de projet en habitat participatif permet une
réduction des coûts sur la construction des logements. En effet,
la mutualisation des chambres d'amis, buanderie, jardin, etc. permet
d'économiser de l'espace dans les logements et divise le coût de
ces espaces.
Économie sur l'usage
Le choix de la conception du bâtiment permet de
réaliser des économies sur le long terme. En effet, une des
caractéristiques des projets en habitat participatif, c'est la dimension
écologique des bâtiments et plus particulièrement la
consommation énergétique de ces derniers. Dans la
quasi-totalité des projets étudiés, on observe
46 CEREMA. Habitat participatif et
logement abordable. Note problématique. 2015.
47 Ouvrage collectif. Le livre blanc de
l'habitat participatif, 2011.
48 Idem
85
une consommation en énergie très faible des
bâtiments ce qui permet de réaliser des économies sur le
long terme.
Des sources d'économie sont également
observées tout au long de la vie du projet, notamment, en ce qui
concerne la mutualisation de services qui dépasse les liens classiques
entre voisins et permet d'éviter le recours à des services
externes.
Il est donc difficile d'affirmer que les logements en habitat
participatif sont sources d'économie, pour le démontrer il
faudrait mettre en place une étude avec un protocole fixe qui
permettrait de comparer deux projets l'un en accession classique et l'autre en
participatif, avec les mêmes surfaces et les mêmes
caractéristiques techniques or l'habitat participatif se distingue par
le caractère multiforme des projets qui sont le fruit de la
réflexion des habitants. Le livre blanc de l'habitat participatif
affirme ainsi que « c'est au cours de la vie du bâtiment que les
économies sont les plus grandes ». Cette affirmation fait
référence au coût global : « la solidarité et
l'intelligence collective permettent une meilleure rentabilité
économique en coût global : phase de conception, construction,
utilisation et entretien ».
3. L'habitat participatif, des projets plus risqués ?
Malgré l'essor du mouvement participatif, de nombreux
projets n'aboutissent pas en raison de la complexité des projets.
Ces échecs et contretemps font dire aux professionnels
du bâtiment que ces projets sont impossibles à mener. Plutôt
que de partir de ce constat, nous allons analyser quelles sont les
difficultés rencontrées par les groupes d'habitants.
Nous allons voir à travers trois grandes
catégories de risques que la difficulté pour mener à bien
un projet en habitat participatif, s'explique par trois grandes raisons : la
méconnaissance des institutions, le manque de compétence du
groupe et les facteurs humains.
Les risques financiers
Obtenir un prêt de la part d'une banque peut devenir
mission impossible pour certains groupes d'habitants. Ces rejets ne sont pas
forcément motivés par un manque de ressources des membres mais le
plus souvent par le projet en lui-même.
En effet, certaines banques refusent des prêts face
à la complexité des dossiers à monter, notamment lorsqu'on
intègre des logements sociaux. Mais également lorsqu'il y a
méconnaissance des montages juridiques proposés.
Face aux problématiques de financement de nombreux
groupes choisissent de s'associer à des professionnels notamment
bailleurs sociaux qui apportent une légitimité et une garantie
auprès des banques.
Les risques liés aux
groupes
Le groupe est un élément sensible, en effet il
est la force d'un projet, mais il peut rapidement devenir sa faiblesse.
L'habitat participatif vient donner du poids à la
maîtrise d'ouvrage collective des habitants, or ces groupes
représentent une somme d'individualité qui n'a pas les
mêmes intérêts, envies et traits de personnalité.
Plus ce groupe devient important, plus les décisions à prendre
sont compliquées et peuvent donner lieu à d'interminable
débat.
D'après une étude d'Habicoop49, la
taille optimum d'un groupe d'habitants se situe entre 15 et 25 adultes, car
cela permet de disposer de compétences internes variées, une
répartition des tâches plus efficiente et, à priori, de
gérer les situations de départ de manière moins
délicate.
Un élément important soulevé par les
groupes impliqués dans l'habitat participatif est celui du «
Turn-over ». C'est le problème le plus récurrent dans les
projets d'habitat participatif, il se pose alors la question du remplacement
des ménages et de la gestion au quotidien du groupe.
Les risques techniques et
administratifs
Les compétences que les groupes peuvent mobiliser sont
l'élément primordial d'explication du succès ou de
l'échec d'un projet. Dans la majeure partie des cas les groupes
sous-estiment la complexité de mener un projet de cette ampleur.
Il est primordial pour les groupes qui se lancent dans ce
type de projet de s'accompagner de professionnels du bâtiment et de
l'habitat participatif. Nous allons le voir dans la partie suivante avec le
développement de l'habitat participatif émerge de nouveaux
métiers que la SERL, si elle décide de favoriser des projets en
habitat participatif, devra prendre en compte.
86
49
http://www.habicoop.fr/IMG/pdf/FAQ_210111.pdf
87
POiNTS CLéS
L'HABITAT PARTICIPATIF :
· AU VU DE NOTRE éTUDE L'HABITAT PARTICIPATIF, N'EST
PAS FORCéMENT UN OUTIL DE DéMOCRATISATION D'ACCèS à
L'HABITAT
· MAIS CETTE FORME D'HABITAT SE DÉMOCRATISE
· LA SERL EN TEMPS QU'ACTEUR OPéRATIONNEL DE
L'AMéNAGEMENT, SE DOIT D'ANTICIPER CETTE DEMANDE CE QUI PASSE PAR UNE
CONNAISSANCE APPROFONDIE DU MONTAGE ET DE L'éVALUATION DU RISQUE DE CE
TYPE DE PROJET
· L'HABITAT PARTICIPATIF EST VECTEUR D'UNE MIXITÉ
SOCIALE, SI ELLE INTÈGRE UN BAILLEUR SOCIAL À SON MONTAGE DES
PROJETS PLUS LONG
· OUI
· CES PROJETS INTRODUISENT DES DISCUSSIONS,
DÉSACCORDS, NÉGOCIATIONS QUI ALLONGENT LA DURÉE DU PROJET
DES PROJETS MOINS COÛTEUX `
· OUI & NON
· DIFFICILE D'AFFIRMER QUE LES LOGEMENTS EN HABITAT
PARTICIPATIF SONT SOURCES D'éCONOMIES DANS LA PHASE CONSTRUCTION
· MAIS LA MUTUALISATION D'ESPACES ET DE SERVICES ENGENDRENT
DES ÉCONOMIES AU QUOTIDIEN
DES PROJETS PLUS RISQUÉS ?
· NON MAIS ...
· LES PROJETS EN HABITAT PARTICIPATIF NE SONT PAS PLUS
RISQUÉS MAIS INTRODUISENT UNE COMPLÉXITÉ LE GROUPE
· LE GROUPE REND NéCESSAIRE UNE ADAPTATION DU
MODèLE UTILISé CLASSIQUEMENT ET L'APPARITION DE NOUVELLES
COMPéTENCES
88
B) QUELLES EXPERTISES LA SERL PEUT-ELLE METTRE AU PROFIT DE LA
CONSOLIDATION DES OPÉRATIONS D'HABITAT PARTICIPATIF ?
1. La SERL des capacités importantes pour le
développement de l'H.P
E
|
n temps qu'aménageur, la SERL dispose de
compétences importantes pour intégrer de l'habitat participatif
dans ses projets.
|
|
De nombreux projets en
développement
La SERL est actuellement aménageur de nombreuses
opérations sur le territoire de la Métropole lyonnaise qui
pourraient permettre la mise en place d'une expérience en habitat
participatif. Cette diversité est un atout puisqu'elle offre la
possibilité d'intégrer de l'habitat participatif sur des
opérations variées.
Une légitimité sur le territoire de
la Métropole Lyonnaise
La SERL depuis plus de 50 ans développe des projets
urbains reconnus pour leurs qualités. A travers la ZAC de la
Duchère, la rénovation des TONKIN, la gare Part-Dieu, la
réhabilitation du quartier des pentes de la Croix-Rousse
etc. la SERL est devenue légitime en
matière d'aménagement.
L'expérience accumulée est
particulièrement intéressante dans l'optique du
développement de l'habitat participatif. On peut considérer que
si la SERL décide d'expérimenter ce type d'habitat elle
apporterait la légitimité manquante à l'habitat
participatif auprès des acteurs de la construction.
La perspective d'innover
L'expérience de l'habitat participatif participe
à la volonté de la SERL de chercher l'innovation dans son
métier d'aménageur. Ainsi la SERL peut très bien, au titre
de l'expérimentation lancer une opération pilote sur un des
secteurs actuellement en cours d'aménagement.
2. L'habitat participatif, quelles conséquences pour le
métier d'aménageur ?
Un projet d'habitat participatif a donc pour
conséquence principale d'intégrer dès l'origine du projet
un groupe d'habitants. Ce caractère innovant est également un
élément primordial pour comprendre les difficultés de
développement de l'habitat participatif. En effet, en plaçant au
centre du projet l'habitant « celui-ci devient devient l'inconnu du projet
» (C.Devaux, 2015). Pour Stéphanie Golfouse, responsable
développement et patrimoine pour Rhône Saône Habitat,
l'expérience du Village Vertical a montré la
nécessité d'un processus d'acculturation de la part des
professionnels dans le suivi de ce type de montage.
89
Il induit des compétences professionnelles
supplémentaires notamment dans la gestion des groupes d'habitants. Avec
le développement de ce type d'habitat, on voit apparaître
l'émergence de professionnels spécialisés dans le montage
opérationnel d'habitat participatif. L'apparition de cette nouvelle
activité s'explique par la complexité des projets immobiliers
pour les non-initiés. L'accompagnateur est ainsi chargé de faire
l'interface entre l'aménageur et le groupe d'habitants. Les missions de
ces professionnels interviennent tout au long du processus de mise en place du
projet de la phase de conception du groupe d'habitants, on peut les
résumer de la façon suivante :
· Aide à la constitution du groupe, en mobilisant
son réseau dans l'apport de nouvelles personnes,
· Animer le groupe et participer à
l'amélioration de son fonctionnement,
· Réaliser le cadrage du projet en fixant le
calendrier ainsi que les priorités afin d'aider la prise de
décision,
· Être à l'interface entre les partenaires
publics et privés afin de favoriser la coordination,
· Réaliser le montage d'opération et
financier en lien avec le maître d'ouvrage,
· Favoriser la médiation entre le groupe
d'habitants et le maître d'oeuvre.
L'ensemble de ces professionnels sont regroupés depuis
2011, au sein de la RAHP (Réseau nationale des Acteurs professionnels de
l'Habitat Participatif), l'objectif étant de se structurer et de
profiter d'un retour d'expérience entre les acteurs afin de
développer les projets participatifs.
Il apparaît essentiel pour la SERL de se doter de cette
assistance dans la gestion d'un projet. En effet, ce professionnel permet de
créer une véritable interface entre l'aménageur et le
groupe d'habitants. De plus, l'accompagnateur amène au projet une
véritable expertise et des compétences dans l'ingénierie
participative.
Cette compétence fait bien souvent défaut dans
la mise en place de projets participatifs et explique pour partie la
durée très longue et l'éclatement de nombreux groupements.
Il faut néanmoins noter que même si ce métier se
développe de plus en plus et se structure par la mise en place d'un
réseau de professionnel, Les accompagnateurs bien souvent n'ont que
très peu d'expériences, avec pour la plupart un ou deux projets
livrés (voire aucun !). Ce manque de référence et le
caractère novateur et non structuré augmente le risque de ces
projets.
90
3. Des expériences infructueuses (à ce jour) en
matière d'habitat participatif
La SERL a eu des approches en matière d'habitat
participatif sur des opérations mais qui n'ont pas été au
bout de leurs ambitions. C'est au cours de ces expériences qu'il a
été décidé de la nécessité de cette
étude, afin de comprendre les caractéristiques de ces projets et
expliquer les échecs rencontrés.
· Projet Terra cités - ZAC de La
Duchère - Lyon / 2013
Dans le cadre de la consultation du lot 23 sur la ZAC de la
Duchère, un opérateur, Terra Cités, a proposé un
projet qui se rapproche de l'habitat participatif. Il s'agissait pour
l'opérateur de construire un bâtiment qui comportait des espaces
partagés, principalement la toiture terrasse. Parallèlement,
Terra Cités se fixait pour objectif de recruter les futurs habitants
groupés en SCIA, société qui s'engageait à
l'acquisition du bien via une procédure de VEFA (Vente en État
Futur d'Achèvement), c'est-à-dire une vente sur plan, avant la
fin de la construction.
L'équipe a atteint la phase 2 de la consultation, qui
est l'étape où 3, 4 équipes (tout dépend de la
procédure) sont sélectionnées et proposent une esquisse.
Terra-cités, après remise de sa proposition, a été
placé en liquidation judiciaire. Cette expérience a
confirmé la fragilité du secteur naissant de l'habitat
participatif.
· Projet Urban Coop - Terrain des Soeurs -
Villeurbanne / 2015
Dans le cadre de la consultation du lot 1-3 de
l'opération Terrain des Soeurs, l'opérateur Urban coop a atteint
la phase 2 en proposant un programme coopératif. Cette SCIC
(Société Coopérative d'Intérêt Collectif)
proposait une solution d'accès à la propriété en
garantissant des prix inférieurs d'achat. Afin d'obtenir des prix de
sortie plus bas que le marché, elle proposait notamment aux futurs
acquéreurs des appartements où les locataires réalisaient
les travaux de finitions eux-mêmes.
Cette équipe n'a pas été retenue pour
des raisons diverses, architecture : projet moins aboutit que les autres
candidatures... Néanmoins, cette offre a provoqué des
interrogations de la part de la SERL, notamment sur la manière d'aborder
ce type de projet, qui se revendique comme de l'habitat participatif.
· Initiative Jamel Debbouze pour l'habitat
et l'insertion professionnelle dans les quartiers / 2016
Dans le cadre du projet de La Duchère, la SERL en
temps qu'aménageur de la ZAC a été sollicité par
l'association Jamel Debbouze pour réaliser sur cette opération
une « initiative [qui] s'adresse aux habitants des quartiers
populaires qui sont exclus du marché du logement, du fait de leur
isolement et / ou d'une instabilité face à
l'emploi »50. Cette initiative
portée par l'État et la Caisse des dépôts vise
à produire de l'habitat participatif, afin de développer un
programme reproductible. À l'échelle de la ZAC le projet consiste
à la construction de 12 à 15 logements, mais le mode de
production des logements, le montage juridique ainsi que l'intégration
des habitants au processus de participation ne sont pas encore
définis.
Le travail réalisé dans le cadre de mon contrat
de professionnalisation va pouvoir permettre d'apporter des
éléments d'analyse et de réflexion sur cette initiative
qui est pour le moment encore assez floue.
POiNTS CLéS
L'HABITAT PARTICIPATIF ET LA SERL C'EST :
· LA POSSIBILITé DE S'ENGAGER DANS UNE
EXPéRIENCE INNOVANTE
· DES PROJETS SUSCEPTIBLES D'ACCUEILLIR DE L'HABITAT
PARTICIPATIF
· QUELQUES APPROCHES SUR LE SUJET QUI ONT MONTRé
· LA NéCESSITE D'UNE ADAPTATION DANS LA
MANIèRE DE MENER UN PROJET POUR CETTE RAISON
· PROPOSITION D'UN MODèLE DANS LA PARTIE C
91
50 Document interne à la SERL
C) PROPOSITION D'UN MODÈLE OPÉRATIONNEL POUR
DÉVELOPPER L'HABITAT PARTICIPATIF.
L
|
e modèle présenté ci-dessous est
l'aboutissement de l'étude réalisée sur l'habitat
participatif. La problématique de cette étude est, rappelons-la
:
|
|
Comment la SERL, acteur opérationnel de
l'aménagement, peut elle appréhender une forme innovante de
création de logement : l'habitat participatif ?
Cette problématique a structuré ce travail.
Nous avons ainsi donné une définition à ce mouvement, que
nous avons par la suite intégré au contexte de la
Métropole lyonnaise. L'objectif fixé au début de cette
étude était de dresser une stratégie pour la SERL en
matière de développement de l'habitat participatif. Pour ce faire
nous avons choisi de développer un modèle.
Ce modèle se base sur les problématiques
identifiées d'un projet en habitat participatif : un projet plus long,
plus risqué financièrement, plus instable et surtout un nouvel
acteur le groupe !
Au regard de cette analyse la SERL peut participer à
une opération d'habitat participatif à condition qu'elle respecte
les 3 points suivants.
1. Identifier la parcelle, dimensionner le projet, adapter son
planning
· Identifier une parcelle pouvant accueillir de
l'habitat participatif en début d'opération
Un projet d'habitat participatif, nous l'avons vu
précédemment, est plus long qu'un projet en accession classique,
on parle généralement d'une durée supérieure, entre
2 et 5 ans. Il est donc nécessaire pour la SERL, d'identifier une
parcelle pouvant accueillir un groupe d'habitants au début d'une
opération d'aménagement.
En effet, il est important de prendre en considération
ce délai supplémentaire pour éviter les risques de
dérapage à l'échelle de l'ensemble de l'opération.
Il est donc exclu de lancer un projet d'habitat participatif en fin
d'opération sur une parcelle non-identifiée et restant à
disposition.
L'exemple de Montpellier et du projet
MasCobado
Le projet MasCobado mené par la SERM
(Société d'Équipement de la Région
Montpelliéraine) est un bon exemple de démarche à suivre.
Sur la ZAC des Grisettes, l'aménageur a identifié une parcelle
pouvant accueillir de l'habitat participatif, celle-ci, trop petite pour une
opération de grande envergure a été mise à
disposition dès le lancement de la ZAC pour développer de
l'habitat participatif.
92
93
Dimensionner le projet
L'habitat participatif ne doit pas être
considéré comme un projet classique, sa dimension doit être
déterminée en nombre de foyers. Un projet d'habitat participatif
dans sa taille optimale doit se situer entre 15 et 25 adultes, car il permet de
regrouper des compétences variées, au-delà il est
surdimensionné et sa gestion devient trop complexe.
Pour la SERL, une opération de cette envergure n'est
pas à l'échelle des projets habituellement réalisés
par l'aménageur. Pour cette raison, nous proposons d'associer un
bailleur social, qui permet (entre autre) de mettre en place un projet de plus
grande ampleur
2. Associer un bailleur social au projet
Les bailleurs sociaux ont un rôle primordial à
jouer dans le développement de l'habitat participatif. Ces organismes
ont conscience de la place qu'ils ont dans ce processus et des avantages de ce
type d'opération. Depuis quelques années la plupart des projets
qui se développent associent bailleur social et groupe d'habitants. Les
avantages sont multiples.
Permettre un projet d'une plus grande
dimension
Nous venons de le voir, l'habitat participatif ne permet pas
la création de nombreux logements. Or, pour un aménageur, il est
important de développer des projets d'une bonne envergure. Associer un
bailleur social permet ainsi de développer un bâtiment de plus
grande ampleur. On peut ainsi mettre en place une partie réservée
au groupe d'habitants et une autre partie de l'édifice à des
logements sociaux. Ce type de montage qui associe logement social et habitat
participatif se développe de plus en plus.
L'exemple de Lyon et du projet Village
Vertical
Le projet Vertical est un bon exemple de ce type de montage.
En effet, il associe un groupe d'habitant et RSH, SA coopérative d'HLM
qui ont livré un bâtiment de 38 logements, le Jardin de Jules, qui
comprend 24 logements en accession sociale, 4 en résidence sociale jeune
et 10 en coopérative d'habitants (Village Vertical)
·
94
Stabiliser et sécuriser l'opération
auprès des partenaires
En accord avec le groupe, le bailleur social peut s'engager
à reprendre à son compte les logements destinés au groupe
d'habitants, en cas d'échec ou de dissolution.
Ce montage sécurise l'opération pour :
· Les banques : qui vont financer une opération
classique avec de la vente en VEFA (Vente en État Futur
d'Achèvement),
· L'aménageur : Le projet aboutira quoi qu'il
arrive. En cas de défaillance du groupe, le bailleur reprend l'immeuble
à son compte.
· Les habitants : Ils ont leur financement et ne
supportent pas les responsabilités du chantier.
L'exemple de Montpellier et du projet
MasCobado
Le groupe s'est chargé de la maîtrise d'ouvrage de
conception avec l'architecte, futurs propriétaires et locataires
confondus.
Une fois les plans terminés, au moment du
dépôt du permis de construire, la maîtrise d'ouvrage a
été transférée au bailleur qui s'est chargé
des travaux
Il a pris les responsabilités et a revendu via une VEFA
aux futurs propriétaires et loue aux locataires les appartements.
· Diminuer les coûts
Réaliser une opération en compagnie d'un bailleur
social permet des économies d'échelle. Une opération d'une
dizaine de logements seulement peut, en effet, s'avérer très
coûteuse pour le groupe d'habitants.
De plus, les futurs habitants sous plafonds de ressources
peuvent grâce à ce montage bénéficier des conditions
avantageuses des opérations de logements sociaux51.
· Permettre que des ménages à bas
revenus participent au projet ; permettre la mixité
sociale
51 Accompagner les projets d'habitat
coopératif et participatif. Union sociale pour l'habitat. Février
2011.
95
En intégrant un bailleur social au montage de ce type
d'opération on permet à des ménages, dans le cadre de
l'accession sociale de venir s'intégrer à ce type de projet. Une
mixité va également se créer entre les habitants des
logements participatifs et ceux des logements sociaux.
En revanche, à moins d'obtenir une dérogation,
le bailleur ne peut pas identifier les ménages en amont de la
définition d'un programme locatif, puisque cela consisterait en un
non-respect des règles d'attribution.
3. Adapter ses procédures
· S'entourer d'un accompagnateur-projet en
habitat participatif
Au vu de la complexité, d'un projet participatif, il
apparaît nécessaire de faire appel à un accompagnateur de
groupes. Comme nous avons pu le voir précédemment,
l'accompagnement de groupes est un métier qui ne s'improvise pas et qui
fait appel à de multiples compétences. Il est nécessaire
de s'entourer d'acteurs professionnels, aussi pour le montage des projets que
pour la promotion des valeurs de l'habitat participatif.
Le domaine d'intervention est double :
· La SERL, peut faire appel à un accompagnateur
pour qu'il assure une mission d'assistance tout au long de l'opération
et ainsi faire le lien entre l'aménageur, le groupe d'habitants et le
bailleur social.
· La SERL doit imposer lors de la consultation que le
groupe soit appuyé d'un accompagnateur. En effet, là aussi
l'accompagnateur assure le rôle de liens. Il permet également
d'assurer le rôle de modérateur dans le groupe et ainsi
prévenir dans la mesure du possible les conflits.
· Adapter son règlement de
consultation au groupe d'habitants
Enfin, la SERL doit s'adapter à l'introduction du
groupe dans sa manière de gérer un projet. Même si dans ce
modèle, nous préconisons une association bailleur social / groupe
d'habitants, ce qui limite l'interaction entre les habitants et la SERL,
rôle assumé par le bailleur.
En effet, un projet d'habitat participatif ne peut se mener
comme un projet classique. La SERL doit donc adapter son règlement de
consultation si elle décide de mener un projet participatif.
L'assistance d'un accompagnateur, sachant sur le sujet, est important puisqu'il
va permettre de fixer les attentes et le règlement de la
consultation.
L'introduction du groupe d'habitants dans un projet vient
sensiblement modifier la manière dont la SERL mène ses projets.
Voilà pourquoi il est important pour cet aménageur de s'entourer
de professionnels de l'habitat participatif, afin de mener une
96
consultation dans laquelle l'aménageur, le bailleur et le
groupe d'habitants retrouvent leurs intérêts.
L'exemple de Lille, Appel à projet en habitat
participatif.
Lors de cet appel à projet lancé en 2012 en
partenariat entre la ville de Lille et le bailleur social, Lille
Métropole Habitat, il était fortement recommandé de faire
appel à un assistant à maitrise d'ouvrage (AMO)
spécialisée dans l'habitat participatif. Le le retour
d'expérience tend à démontrer que l'intervention d'un
professionnel contribue à raccourcir les délais et permet au
groupe de se structure52.
POiNTS CLéS
L'HABITAT PARTICIPATIF ET LA SERL C'EST :
· LA POSSIBILITé DE S'ENGAGER DANS UNE
EXPéRIENCE INNOVANTE MAIS
· À CONDITION DE RESPECTER LE MODèLE
SUIVANT
1- IDENTIFIER LA PARCELLE, DIMENSIONNER LE PROJET, ADAPTER SON
PLANNING
POURQUOI ?
· HABITAT PARTICIPATIF, LES PROJETS SONT PLUS LONGS
· HABITAT PARTICIPATIF, LE PROJET DOIT êTRE ENTRE 15
ET 25 ADULTES
2- ASSOCIER UN BAILLEUR SOCIAL AU PROJET
POURQUOI ?
· PERMET DE DéVELOPPER UN PROJET D'UNE DIMENSION
PLUS IMPORTANTE
· STABILISE ET SéCURISE L'OPéRATION
AUPRèS DES PARTENAIRES
· PERMET DE RéDUIRE LES COUTS
· PERMET QUE DES MéNAGES À BAS REVENUS
PARTICIPENT AU PROJET
3- ADAPTER SES PROCéDURES
· S'ENTOURER D'UN ACCOMPAGNATEUR DE PROJET EN HABITAT
PARTICIPATIF
· ADAPTER SON RèGLEMENT DE CONSULTATION
52 CAUE DU NORD - Habitat participatif à Lille. 2016.
CAUE DU NORD - Habitat participatif à Lille. [ONLINE] Available at:
http://www.caue-nord.com/index.php/component/k2/551-habitat-participatif-a-lille.
[Accessed 16 avril 2016].
97
CONCLUSION
Ce Projet de Fin d'Études m'a permis d'aboutir
à plusieurs conclusions que la SERL doit prendre en considération
si elle décide de participer à un projet d'habitat
participatif.
Premièrement, l'habitat participatif doit être
vu comme une volonté il ne peut être imposé, je retiendrais
ainsi cette phrase de S. Golfouse prononcée lors d'un entretien «
l'habitat participatif ne se décrète pas, ce mode d'habiter ne
peut pas correspondre à tout le monde et obéit à des
convictions fortes de partage et de vivre ensemble ». Il est primordial
pour la SERL de garder cet élément en tête, car la notion
de « vivre ensemble » est la base de ce mouvement.
La seconde conclusion de ce travail tient dans
l'évolution de ce mouvement en France. Bien que l'habitat participatif
soit encore peu développé comparé à certains pays
comme le Canada ou l'Allemagne, il est indiscutable que cette «
troisième voie » au logement séduit de plus en plus de
ménages. Les perspectives de développement sont donc bonnes,
d'autant plus que la loi ALUR vient donner une assise juridique à ce
mouvement. Il est néanmoins complexe en l'absence d'études de
quantifier cette demande.
Afin de définir la stratégie que la SERL
pouvait adopter en matière d'habitat participatif, il était
nécessaire de comprendre le cadre d'intervention de cet
aménageur. Cet acteur opérationnel intervient en grande partie
pour la Métropole Lyonnaise. Il est donc indispensable que la SERL
anticipe les demandes de la collectivité en matière
d'aménagement. Cette étude montre que la Métropole est en
pleine évolution et que des pistes d'innovations sont en cours de
développement. Parmi elle, la volonté d'intégrer de plus
en plus l'habitant dans le processus de construction de la ville, on parle
ainsi de politique bottom-up. L'habitat participatif est un outil de croissance
de cette stratégie, accroître les politiques en faveur de ce
développement semble donc pouvoir être une piste que la
Métropole pourra mener dans les prochaines années.
Enfin l'étude des modes opérationnels de la
SERL et des caractéristiques du montage opérationnel d'un projet
d'habitat participatif a montré que l'habitat participatif pouvait
être développé par cet aménageur, en respectant le
modèle développé dans cette étude.
C'est-à-dire identifier une parcelle pouvant accueillir de l'habitat
participatif et dimensionner le projet dès l'origine de celui-ci,
associer un bailleur au montage de ce type d'opération et enfin adapter
sa procédure en faisant appel et en imposant au groupe d'habitants un
accompagnateur spécialisé dans ce type d'habitat.
98
Ë la suite de ce PFE ce modèle de
développement va me permettre de présenter à la SERL deux
stratégies à adopter en matière d'habitat participatif
:
· La première position consiste à attendre
une volonté politique de développer de l'habitat participatif sur
la Métropole de Lyon. Dans ce cas présent, la SERL doit continuer
à affiner ses connaissances sur le sujet, afin de répondre
présent dans cette éventualité.
· La seconde stratégie consiste à
être force de proposition en matière d'habitat participatif. Il
s'agit là pour la SERL d'identifier une parcelle pouvant accueillir de
l'habitat participatif et d'initier le projet auprès de la
Métropole. Cette position nécessite d'affiner cette étude,
notamment en ce qui concerne la demande sur le territoire, la taille d'un
projet, la rédaction d'un règlement de consultation et la
procédure à adopter.
L'étude réalisée dans le cadre de ce
Projet de Fin d'études doit être analysée comme un
élément précurseur dans la réflexion de la SERL de
s'investir dans un projet d'habitat participatif et ne pourra être
précisée que par la réalisation d'une opération
d'habitat participatif.
Pour terminer, aborder ce sujet fut passionnant par sa
richesse et sa diversité. Le fait de réaliser cette étude
dans le cadre d'un contrat de professionnalisation m'a permis de confronter la
vision théorique au terrain. Cette approche n'a pas toujours
été simple à appréhender mais elle a eu le
mérite de faire évoluer ma réflexion sur l'habitat
participatif. Mon approche est passée d'une vision idéaliste
à une conception pragmatique de l'habitat participatif. Je reste
persuadé de la nécessité de développer ce type
d'habitat, mais uniquement dans un cadre précis, à petite
échelle et surtout à l'initiative de l'habitant.
99
BIBLIOGRAPHIE
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- http://www.habitatparticipatif.net/
- https://www.habitat-groupe.be/
- http://www.toitsdechoix.com/
- http://www.rahp.fr/
103
ANNEXES
TABLE DES FIGURES
FIGURE 1 : INFOGRAPHIE DE L'HABITAT PARTICIPATIF.
RÉALISATION PERSONNELLE 16
FIGURE 2 : LES 155 MÉNAGES DE LA COOPÉRATIVE LE
COTEAU VERT ET L'OBNL UN TOIT POUR
TOUS, QUARTIER PETITE-PATRIE À
MONTRÉAL.
BATIRSONQUARTIER.COM 21 FIGURE 3 : PROJET HUNZIKER, UN QUARTIER DE
35 COOPÉRATIVES SOIT 450 LOGEMENTS.
DUPLEX-ARCHITEKTEN 23
FIGURE 4 : STRUCTURE DES LOGEMENTS COOPÉRATIFS EN
SUISSE 24
FIGURE 5: LES HABITANTS DU PROJET DIWAN DANS UN DES ESPACES
PARTAGÉS.
WWW.ARCHITECTES.ORG 29
FIGURE 6 LES MEMBRES DES
BABAYAGAS.
LIBÉRATION.FR 30
FIGURE 7 : IMMEUBLE DES
BABAYAGAS.
SOPHIELOUBATON.PHOTOSHELTER.COM 31
FIGURE 8 : DURÉE DE LA PROCÉDURE DE LA
CONSULTATION. SOURCE : DOSSIER DE
CONSULTATION. MODIFICATION AF 31
FIGURE 9 : LES 10 TERRAINS VENDUS PAR LA COLLECTIVITÉ.
SOURCE:
STRASBOURG.EU 32
FIGURE 10 : BÂTIMENT ECO-LOGIS. SOURCE:
LYON.ARCHI.FR 33
FIGURE 11 : PLAN MASS DE LA ZAC. EN ROUGE LES DEUX LOTS DE LA
VILLE DÉDIÉES À
L'HABITAT PARTICIPATIF. SOURCE : AGENCE DUBUS RICHEZ 34
FIGURE 12 : PERSPECTIVE DU PROJET. SOURCE : TOITS DE CHOIX 35
FIGURE 13 : MASCOBADO 1 ET 2, MUTUALISATION DES ESPACES. SOURCE
: TOITS DE CHOIX 36
FIGURE 14: ACTIONNARIAT DE LA SERL. SOURCE : RAPPORT
D'ACTIVITÉ 2016 48
FIGURE 15: BILAN D'UN AMÉNAGEUR. RÉALISATION
PERSONNELLE 54
FIGURE 16 : NOMENCLATURES DES RISQUES. RÉALISATION
PERSONNELLE. SOURCE : SERL,
2014 55 FIGURE 17: PARTAGE DU SOLDE DANS UNE
OPÉRATION D'AMÉNAGEMENT. RÉALISATION
PERSONNELLE. SOURCE : SERL, 2014 56 FIGURE 18 : TERRITOIRE DE
LA MÉTROPOLE DU GRAND LYON :
HTTP://DATA.GRANDLYON.COM/UTILISER-SMART-DATA/
RÉALISATION PERSONNELLE 59
FIGURE 19 : CHRONOLOGIE V.V. SOURCE: RSH 65
FIGURE 20 : MONTAGE DU JARDIN DE JULES . RÉALISATION
PERSONNELLE 65
FIGURE 21 : LA GARANTIE D'EMPRUNT DU JARDIN DE JULES.
RÉALISATION PERSONNELLE 66
FIGURE 22 : LE JARDIN DE
JULES. HABICOOP.FR 66
FIGURE 23 : ORGANISATION DU BÂTIMENT. PRÉSENTATION
SCET 2015 67
FIGURE 24 : ESPACES PARTAGÉS. PRÉSENTATION
SCET.2015 67
FIGURE 25 : CARTE DES PROJETS ET INITIATIVES EN HABITAT
PARTICIPATIF À L'ÉCHELLE DE LA
MÉTROPOLE LYONNAISE. RÉALISATION PERSONNELLE.
73
104
FIGURE 26 : DIFFÉRENTES ÉTAPES D'UN PROJET
PARTICIPATIF. EXTRAIT DU GUIDE MÉTHODOLOGIQUE POUR LA CRÉATION
SCIAPP. AERA. RÉALISATION PERSONNELLE .... 83
105
ENTRETIENS
Journée thématique
Ecet
|
GRO uvE
n
Casse
Depots
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
réseauscet
|
|
PROGRAMME
Paris le 11 décembre 2015
Lieu : Holiday Inn Paris Gare de Lyon 11-15 rue de Lyon
- 75012 Paris
Habitat participatif : nouveau levier de
développement pour les aménageurs et les bailleurs
Journée organisée en association avec le
Réseau national des collectivités pour !habitat
participatif
9h30
09h Accueil - Café
Introduction
L'habitat participatif : un mouvement en marche dans les
territoires, qui requestionne l'aménagement et la production du
logement.
Stéphane KEÎTA -- Président
directeur général de la SCET
Alain JUND -- Président du réseau
national des collectivités pour l'habitat participatif f RNCHP), Adjoint
au Maire en charge de l'urbanisme et de la transition énergétique
de la Ville de Strasbourg. Vice-président de Strasbourg
Eurométropole
10h00 L'habitat participatif : définition,
nouveau cadre législatif, rôle des
collectivités,
des EPL et des bailleurs
Quelle définition de l'habitat participatif ?
Quelle nouvelle légitimité pour favoriser
le développement de ces démarches ? Comment les Lois (ALUR,
Macron) et leurs récents décrets donnent-t-elle de nouveaux
outils opérationnels et fonciers pour l'habitat participatif ?
Quelle impulsion donnée par les élus
(appels à projets, encouragement des EPL et des bailleurs à se
lancer dans la démarche) ?
Quels instruments financiers pour porter l habitat
participatif et le logement abordable ?
Echange avec :
Audrey LINKENHELD -- Députée
du Nord, rapporteur de la Loi ALUR I Philippe MAZENC Direction
générale de l'habitat et de la construction -- Ministère
du Logement, de l'égalité des territoires et de la
ruralité I Laurent LE CORRE -- SCET Direction des
expertises et de l'ingénierie de projets I Alain
JUND
Table-ronde animée par Stanislas DENDIEVEL
-- SCET Direction de l'animation du réseau et
de la communication
11h00 ! Pause : 15 mn
Sous réserve
106
11h15 Photographie des expériences
pionnières et des modèles d'habitat participatif
Panorama des modèles mis en place en France,
â partir des exemples du Réseau national des collectivités
pour ! habitat participatif (RNCNF)
Exposé : Pierre ZIMMERMANN - Chargé de
mission, Strasbourg Eurométropole, co-animateur du RCNHP
Quelles conditions de réussite d'un projet
d'habitat participatif (montage opérationnel, ingénierie
immobilière, ingénierie sociale) ? Quels premiers retours
d'expérience autour de projets réalisés aujourd'hui
?
Echange avec
Eric HARTWEG - Directeur d'opération,
SERS, Strasbourg I Philippe BANULS - Responsable
d'opérations. SERM, Montpellier I Stefan SINGER - Directeur
de Toits de choix. Directeur général de Hab-Fab,
fondateur du Réseau des accompagnateurs de l'habitat participatif
(RAHP) I Pierre ZIMMERMANN
Table-ronde animée par Pierre
BEULAYGUE - SCET Direction de l'animation du réseau et de la
communication
12h45 Pause-déjeuner
14h00
|
La place de l'aménageur dans le
développement de l'habitat participatif : l'habitat participatif,
nouveau levier économique pour l'aménagement et la revitalisation
des territoires ?
|
|
Focus sur des expériences de projets urbains
participatifs en Suisse, impliquant dès l'amont les coopératives
d'habitants dans les opérations d'aménagement
Exposé : Cyril ROPER - Architecte,
Président d'Urbamonde
Quelle cartographie des modes de faire et des typologies
d'habitat participatif développés par les SEM et les SPL en
France ? Quel montages mis en place dans les opérations
d'aménagement et quels enseignements ? Comment, entre
collectivité et aménageur, favoriser l'émergence de
projets ? Quel intérét économique pour les SEM et les SPL
d'aménagement ?
Echange avec :
Emilie FLEURY - Chargée de mission habitat innovant,
Communauté d'agglomération Est Ensemble, référente
du RNCHP I Romain MARCHAND` - 1' Adjoint au Maire d'Ivry
délégué à l'urbanisme I Djamel
AÏT-AÎSSA* - Directeur opérationnel, SADEV
94 (Ivry) I Arnaud LE LAN - SCET Direction
des expertises et de l'ingénierie de projet I Cyril
ROPER
Table-ronde animée par Stanislas DENDIEVEL
- SCET Direction de l'animation du réseau et de la
communication
15h30 Co-produire l'habitat participatif : le rôle
des bailleurs
Comment les bailleurs peuvent porter ou être
partenaires de projets d'habitat participatif ? Quels modes de travail avec les
habitants ? Quels montages opérationnels et financiers possibles ? Quels
retours d'expériences en cours ?
Echange avec :
Stéphanie GOLFOUSE - Rhône
Saône Habitat (exemple du « village vertical v. Villeurbanne) I
Julie XAVIER - Lille Métropole Habitat (exemple des
Voisins du quai -, Lille) I Antoine BOUCHEZ - Haute Savoie
Habitat (exemple de l'écoquartier de Viry) I Christine RIVIERE -
SCET Direction des expertises et de l'ingénierie de projet
Table-ronde animée par Boris HIVERNEL
- SCET Direction de l'animation du réseau et de la
communication
Synthèse de la journée et
perspectives
16h45 L'habitat participatif : la place de la SCET et de son
réseau au côté des EPL et des bailleurs
par Marina ALCALDE - Directrice
générale adjointe de la SCET
* Sous réserve
107
M.Chanal
02/02/16
Lyon Métropole
Chargée de mission habitat Grand Lyon
Éléments de contexte
Martine Chanal est chargée de mission Habitat au Grand
Lyon. Elle est identifiée sur la métropole comme une personne
essentielle de l'habitat participatif. En effet, de nombreux articles citent
cette personne comme une porte d'entrée afin de comprendre l'ambition du
Grand Lyon sur cette thématique.
Objectifs de la rencontre
La volonté de rencontrer M.Chanal naît de
discussions avec des acteurs du mouvement de l'habitat participatif à
l'échelle du Grand Lyon. À l'issue de ces divers entretiens, le
nom de cette chef de projets est revenu régulièrement comme
étant une des personnes du Grand Lyon sachant sur ce sujet.
Les missions de M.Chanal.
À l'origine M.Chanal est spécialisée
dans les gens du voyage. En 2006, par l'intermédiaire d'Habicoop et
d'une mission de lobbying très intense, le Grand Lyon décide de
laisser une porte d'entrée au projet d'habitat participatif. M.Chanal
devient alors porte d'entrée de l'habitat participatif au Grand Lyon.
L'idée à la base était d'aider le projet du Village
Vertical à trouver écho auprès du Grand Lyon. Très
vite il s'est avéré que le projet avait un certain nombre
d'éléments bancals, notamment sur le sujet financier. M.Chanal a
donc accompagné le Village à voir le jour.
La définition de l'habitat participatif selon
M.Chanal.
· L'autopromotion au sens Grenoblois avec la
Sablière et le sens Strasbourgeois qui s'inspire du modèle
allemand
· La coopérative, qui se développe
à Lyon sous l'impulsion d'Habicoop qui s'inspire du modèle
Canadien et Suisse.
· L'habitat participatif dans le logement social,
porté par des bailleurs sociaux et qui est populaire à Montreuil
notamment.
Ces trois formes ont été cadrées par la
loi ALUR et ont permis la mise en place d'un socle juridique.
108
Pour M.Chanal il est important de faire la distinction entre
les promoteurs qui se lancent aujourd'hui dans ce type de projet en raison d'un
effet d'aubaine et les accompagnateurs de projets qui apportent une vraie
plus-value dans la gestion des projets participatifs. Du fait de l'apparition
de ces projets tout azimut, on a également le développement de
ces nouveaux métiers. On a le métier d'accompagnateur qui se
créé et dans le même temps le métier de promoteur
spécialisé dans le participatif.
La contribution à la loi ALUR et au
RNHP
A partir de son expérience sur l'opération du
Village Vertical, Mme Chanal a participé à l'édition de la
loi ALUR, elle représente également le Grand Lyon au RNHP
(Réseau National de l'Habitat Participatif).
L'après Village Vertical
L'opération du Village Vertical a été
très longue avec un prix de sortie correct mais qui a
bénéficié d'un coût du foncier très
inférieur au marché avec surtout un effort conséquent de
la collectivité. L'opération a été largement
subventionnée par la ville et par la région, mais le loyer est
très avantageux, avec un coût au m2 de 8€. Cet
exemple montre que l'habitat coopératif est un modèle qui permet
à des gens qui n'ont pas les moyens de devenir propriétaires,
alors que l'autopromotion concerne les personnes qui ont plus les moyens.
Après le Village Vertical un autre groupe se monte sur
Confluence, la collectivité est alors d'accord pour se lancer dans ce
programme, mais est assez réservée suite à
l'expérience du Village Vertical. La collectivité souhaite
d'emblée que le groupement s'associe avec un bailleur social, pour
divers éléments mais surtout pour la garantie d'emprunt, puisque
le bailleur va alors s'engager à racheter le logement en cas de
défaillance du groupement. Le groupement qui devait se lancer
associé à un bailleur à fait faillite. La
coopérative d'accession a fait faillite à Confluence et à
partir de ce moment une confusion est apparue et depuis il y a une
réticence à développer ce type de projet. Le mot
coopératif est banni de Lyon.
Plusieurs projets sont actuellement en cours.
· La Gargousse dans le 7ème qui est
une réhabilitation montée à partir d'un bail
emphytéotique de 70 ans.
· Le projet du 4 mars avec Alliade qui est un projet
très intéressant. Un modèle en coopératif qui pose
des questions sur la relation entre le social et les coopérateurs, le
logement social étant dans le diffus du bâtiment. Avec la plupart
des bâtiments en PLS.
· Le Projet Chamarel, à Vaulx en Velin, qui est
une coopérative de jeunes retraités.
·
109
Le projet Cité Coop initié également dans le
7ème arrondissement
Pour Martine Chanal ces habitants ont une vraie vocation de
création de liens sur le quartier et d'animateur de réseau par
leurs actions, leurs volontés et l'implication dans les tissues
associatifs.
Il ne s'agit pas de brader du foncier, si ces groupements ont
un projet cohérent qui tient la route pourquoi les empêcher de
s'installer ?
La position des bailleurs sociaux ?
L'intérêt d'intégrer un bailleur social est
multiple :
· Pour le bailleur permet d'apporter de la mixité
sociale, via un projet couplé de plus grande envergure (V.V)
· Permet au bailleur d'accéder à des
terrains intéressants
· Permet de garantir l'emprunt
· Permet d'accéder à des capacités
professionnelles intéressantes
Quel portage politique aujourd'hui ?
Un portage pas très important assez faible de la part de
la collectivité.
Aujourd'hui les groupes viennent chercher la
collectivité pour obtenir du foncier et avoir des avantages financiers
sur cet élément. Ils viennent aussi pour obtenir une aide
financière, et enfin la garantie d'emprunt. La posture du Grand Lyon est
pour le moment de répondre aux groupes intéressés, la
ville n'est pas dans une logique d'appel à projet comme le font
Grenoble, Paris... Mais à partir du moment où un groupe sollicite
le Grand Lyon, l'institution répond. Les risques sont limités et
cette action ne prend pas un temps trop important.
Paradoxalement, Lyon fait aujourd'hui figure de figure
nationale en matière d'habitat participatif.
Projet actuellement avec EMH, qui s'appelle OASIS à
Saint Priest dans la même lignée que les Babayagas.
Et maintenant ?
A l'origine en 2006, avec la subvention d'Habicoop l'ambition
était de créer un modèle pour ensuite l'étendre et
pouvoir créer des logements participatifs assez rapidement. Or avec
seulement 14 logements sortis depuis on voit que le processus est très
long et compliqué. L'ambition d'origine était, sur le
modèle suisse de créer une faîtière en mettant en
place un fonds d'investissement. Un travail a été effectué
avec la Caisse
110
des Dépôts, la région et trois fondations,
fondation Abbé Pierre, Macif et Fondation de France. Qui ont fait une
étude et ont montré qu'il fallait un fond d'investissement
participatif. Le modèle évoqué était de permettre
à cette société d'investir dans le logement privé
diffus pour réhabiliter des immeubles et ensuite louer ces appartements
mais sur le modèle de la coopérative. C'est-à-dire de
rentrer dans le capital social de la société faitière. On
est donc sur un entre deux entre la propriété et la location.
111
S.GOLFOUSE
16/02/16
Rhône Saône Habitat
Responsable développement et patrimoine
Éléments de contexte
SA coopérative d'HLM, RSH est une structure
spécialisée dans la construction de bâtiments
destinés à l'accession sociale à la
propriété. Elle a livré en 2013 un
bâtiment de 38 logements, le Jardin de
Jules, qui comprend 24 logements en accession sociales, 4 en
résidence sociale jeunes et 10 en coopérative d'habitants,
le Village Vertical. Cette coopérative
est dans sa dimension et dans sa structure la première en France.
Objectifs de la rencontre
Fortement médiatisé par son caractère
novateur, le Village Vertical malgré son jeune âge a d'ores et
déjà fait l'objet de nombreuses publications au sujet des
habitants. L'objectif de cet entretien était de se placer du
côté du maître d'ouvrage en recueillant le témoignage
de la chef de projet qui a suivi l'ensemble du processus du projet, de la
constitution du groupe à la livraison du bâtiment.
Le processus du projet
Le projet a démarré en 2006 avec un groupe qui a
contacté RSH avec l'idée de développer une
coopérative d'habitation. Ce premier contact s'est fait de
manière très informelle avec un entretien entre le groupe alors
constitué et le directeur général de la structure
Benoît Tracol. RSH a décidé de se lancer dans cette
aventure pour le côté innovant du projet sans forcément
à la base être spécialiste de l'habitat participatif.
À ce stade, le groupe n'avait encore aucun projet il a donc fallu le
mettre en place. Ce travail s'est effectué avec l'aide d'Habicoop,
association lyonnaise qui milite pour le développement de l'habitat
coopératif. Habicoop, qui a offert ses services gratuitement au titre du
caractère expérimental de la démarche. Le groupe a
identifié un terrain susceptible de pouvoir accueillir le village dans
la ZAC de la Maison Neuve à Villeurbanne. L'accès à ce
foncier a pu aboutir uniquement grâce à la ville de Villeurbanne
et du Grand Lyon qui ont mis à disposition du groupe un terrain au prix
du logement social qui à l'origine était fléché
pour de la promotion privée.
Le développement du projet a duré 7 ans entre la
constitution du groupe et la livraison du bâtiment. Cette durée
très longue explique notamment la rotation très importante des
personnes qui habitent dans le Village Vertical, en effet du groupe originel il
ne
112
reste qu'une seule personne. Cette rotation s'explique
également par la complexité du projet et son caractère
novateur. L'absence de cadre législatif et de projet similaire a
obligé la mise en place d'une structure juridique assez complexe qui a
évolué au fur et à mesure des difficultés
rencontrées.
Le bâtiment
Le bâtiment est un immeuble unique de 38 logements, la
partie Ouest réservée à l'accession sociale, la partie Est
au Village Vertical. Extérieurement, à la demande de RSH cette
division est invisible et partage des prestations communes : un ascenseur
commun, un sous-sol commun, une chaufferie bois-gaz commune. Côté
Village Vertical, chaque ménage dispose d'espaces privatifs importants,
clé de la réussite d'un projet d'habitat participatif. Les «
villageois » partagent une salle commune en rez-de-chaussée, une
buanderie et 4 chambres d'amis destinées à accueillir
ponctuellement, voire à servir de local d'activité. Parmi les 14
logements du Village Vertical, 4 sont des résidences sociales,
construites via un bail emphytéotique de 50 ans et animées par
AILOJ, association qui s'occupe du logement des jeunes en difficulté.
Le montage d'opération
L'opération comporte 2 maîtres d'ouvrage, RSH
pour les 24 logements en accession sociale et le Village Vertical pour les 14
logements de la coopérative.
Le Village Vertical est structuré en SAS,
(société par actions simplifiée), les habitants ne sont
pas propriétaires de leurs logements mais locataires auprès de
l'association. À ce titre, ils payent chaque mois un loyer, qui
correspond au remboursement du prêt, plus une participation aux charges
de gestion. Pour devenir locataire du logement il faut être membre de la
société, en entrant dans le capital, investissement que l'on
récupère en quittant celui-ci. Afin de mettre en place cette
structure, c'est l'association qui effectue le prêt pour la construction
des logements, montage qui permet à des personnes aux revenus plus
modestes de devenir propriétaires. L'inconvénient de ce
modèle, c'est la difficulté pour une banque à garantir ce
prêt. Devant les difficultés rencontrées par le groupe,
c'est RSH qui a effectué le portage financier jusqu'à l'obtention
du prêt PLS par la coopérative d'habitants. Prêt locatif
social qui a pu être obtenu grâce à l'introduction d'un
plafond de revenus pour les futurs locataires. Fait rarissime, RSH est garant
du Village Vertical pour les 50 prochaines années. En cas de
défaillance de paiement d'un des locataires, le bailleur devient
propriétaire du logement. À noter dans ce montage une
participation de la caisse des dépôts et consignations via
l'obtention d'un prêt PLA-I, en raison des 4 logements étudiants
du village vertical.
Au final, l'opération aura coûté au total 6
250 000 € HT
113
|
Coût Coût village Coût
global
accession vertical sociale
|
Investissement € HT
|
4
|
300 000
|
€
|
1
|
950 000
|
€
|
6
|
250 000
|
€
|
Prix HT / m2
|
|
2 470 €
|
|
|
1 930 €
|
|
|
2 270 €
|
|
Le retour d'expérience
Pour RSH l'habitat participatif ne se décrète
pas, ce mode d'habiter ne peut pas correspondre à tout le monde et
obéit à des convictions fortes de partage et de vivre
ensemble.
Cette expérience a été très
positive professionnellement parlant, dans la manière de gérer un
groupe et également dans l'aventure humaine. Cependant, l'investissement
horaire, 2 réunions par mois pendant 5 ans, sans compter le temps
passé à la gestion du projet fait que RSH ne souhaite pas
renouveler l'expérience sous ce format. De plus, l'engagement financier
très important ainsi que la prise de risque dans le montage de la part
du bailleur sont également des éléments qui justifient la
réflexion de la part de RSH à s'engager sur ce modèle.
Malgré ces réticences, RSH est aujourd'hui
convaincu du futur et de la nécessité pour les bailleurs de
s'investir dans le développement de l'habitat participatif, vecteur
important du développement de la mixité sociale. C'est à
ce titre que RSH est engagé dans un groupe de réflexion à
l'échelle nationale de bailleurs pour le développement de
l'habitat participatif.
À ce jour, RSH intervient sur le programme de
rénovation d'un immeuble de 5 logements en habitat participatif, la
Gargouse (Lyon 7ème) en garantie financière en cas de
défaillance éventuelle d'un des habitants. L'aspect financier est
selon RSH l'enjeu majeur du développement de ce type d'habitat, qui
peine à trouver des garanties financières, en raison du
caractère novateur de ces projets.
114
M.Combourieu
17/03/16 Notaire
Éléments de contexte
Maître Brun est un notaire lyonnais qui à la
suite de rencontre avec des groupes d'habitants a développé des
compétences dans la mise en place de projet d'habitat participatif. Il
ne se définit pas comme un spécialiste, mais comme un «
sachant » sur cette thématique. Son associée, M.Combourieu a
suivi la majorité des projets de ce type et est identifiée comme
la personne ayant le plus de compétences sur ce sujet au sein de cet
office notarial. Cette expérience du montage juridique en habitat
participatif ils l'ont acquise grâce aux projets du groupe de Grezieu la
Varenne, cTMteau de la Chaudanne et des Choux Lents à St Germain au
Monts d'Or.
Objectifs de la rencontre
Deux structures ont été mises en place par ce
notaire la SCI et la SCIA. L'objectif de cette rencontre est double : avoir une
description du modèle développé par ce notaire ainsi qu'un
retour d'expérience des projets mis en place.
Les projets menés
L'ensemble des projets suivis par le notaire est de petite
taille, 4 à 6 foyers, avec une base du groupe fondée sur des
liens affectifs (famille, amis proches...). Ces groupes ont une âme
militante qui désirent s'occuper d'un projet dans son ensemble. Ils
développent leurs projets à la campagne et selon ce notaire ne
souhaitent pas s'intégrer dans un projet de grand ensemble urbain. Le
notaire va alors créer une structure juridique à l'image du
groupement d'habitants et surtout des convictions de ces groupes.
Le montage d'opération
Il existe une multitude de structures juridiques qui existent
dans ce type de modèle. Ce notaire a développé deux types
de structures :
Société civile
classique
Dans ce modèle, on constitue en parallèle de la
société une association, les deux structures ont les mêmes
membres. L'association va détenir 90% de la société et
les
115
10% restants sont acquis par les membres de l'association mais
sous leurs noms propres. Chaque personne est donc propriétaire en son
nom propre d'une faible valeur et pourra revendre cette part lorsqu'elle
quittera le logement. Dans ce modèle il y a généralement
la volonté d'introduire un principe de non spéculation.
Contrairement à la SCIA dans ce modèle il n'y a pas de division
du bien immobilier, le bien est propriété de l'ensemble des
associés. La difficulté de ce modèle est d'obtenir des
garanties auprès des banques qui ne sont pas rassurées par la
multitude d'acteurs et la possibilité de garantie financière. De
même que la nouveauté de ce montage ne rassure pas les
institutions financières. Nécessite donc d'avoir des apports
assez importants avant de s'engager dans ce type de projet.
Société civile
d'attribution
Dans ce modèle on effectue une division de l'immeuble
qu'on va consigner dans l'état descriptif de division, document qui
divise en lots le bien par un géomètre auxquels on va accoler un
règlement de jouissance. A chaque lot va correspondre un groupe de parts
sociales de la société. Chaque associé est donc
propriétaire de parts sociales et aura la jouissance du lot qui est
rattaché à son groupe de parts, mais c'est la
société qui est propriétaire du bien. Donc, dans ce
système la société est propriétaire du bien, mais
la jouissance est réservée au groupe de propriétaire de
parts sociales.
Lorsqu'on quitte la société (donc son logement)
on cède ses parts, les autres associés ont un droit de
préemption, c'est-à-dire une priorité d'achat. S'il ne
souhaite pas acheter, il y a une procédure d'agrément pour un
nouvel entrant. Le nouvel entrant doit donc être accepté par
l'ensemble des occupants.
Dans ce modèle il y a possibilité de faire de la
plus-value lors de la revente de son logement.
A l'origine ce montage avait pour objectif de pouvoir
construire à plusieurs. Ce statut était effectif le temps de la
construction et devait se transformer automatiquement en
copropriété à l'issue de cette étape. Le
règlement de jouissance devenant par la même occasion
règlement de copropriété. L'utilisation en habitat
participatif n'est donc qu'une adaptation du modèle d'origine, mais pour
le notaire est particulièrement adapté à ce type de
projet.
La copropriété
classique
Selon les observations de Mme Combourieu la majorité
des projets réalisés pour le moment sont des
copropriétés qu'on adapte pour convenir à de l'habitat
participatif. Mais cette structure est très rigide et contraignante et
permet peu de liberté, elle n'est pas selon le notaire le modèle
à privilégier.
116
Le retour d'expérience
Aujourd'hui, Maître Brun est identifié comme un
« sachant » sur ce modèle du participatif, il fait partie des
rares professionnels juridiques à s'intéresser à ce
modèle de construction. Il reçoit énormément de
sollicitations, notamment suite aux RHNP de Marseille en 2015 de groupes qui
souhaitent se lancer dans ce type de projet. Cependant il ne peut pas
s'occuper, faute de temps de toutes ces sollicitations. En effet, ce type de
montage demande énormément de temps en recherche, sans
forcément au final aboutir à un projet et n'est donc pas
rémunérateur. Pour ce notaire il manque une interface pour
aiguiller ces groupes et faire de l'information sur la façon de mener un
projet.
La place de la SERL pour le notaire dans ce type de
projet
La SERL, si elle se lance dans des projets de si grande
envergure doit savoir que le projet sera long et nécessite un temps
d'apprentissage assez important. Une des difficultés les plus
importantes est qu'aujourd'hui il n'existe quasiment aucun projet
finalisé, il est donc difficile de savoir comment les mener de
manière la plus efficiente possible.
117
B.Pont
29/10/15
Graine d'idée
Éléments de contexte
Benjamin Pont est développeur de la structure graine
d'idée qui propose du conseil en environnement et habitat participatif.
L'objectif est de développer des prestations d'habitat participatif
auprès des professionnels de l'aménagement en associant à
chaque fois des habitants et/ou groupe d'habitants dans ces projets. En
parallèle il lance habitat et partage association qui va se transformer
en SCIC dans les prochains mois, elle intervient dans l'accompagnement des
groupes d'habitants. Ces deux structures sont liées dans leur
fonctionnement mais n'interviennent pas aux mêmes étapes du
projet. Le rôle d'habitat et partage est de travailler avec des
professionnels qui ne veulent pas forcément être impliqués
directement dans les phases de réflexion et d'accompagnement.
L'association a le rôle d'interface entre professionnel et groupe
d'habitant. Cela permet de structurer les démarches grâce aux
rencontres organisées avec les habitants, qui va permettre de travailler
ensemble pour définir un projet puis animer les rassemblements.
Une des caractéristiques de la structure c'est la
volonté de développer l'intergénérationalité
: pour trois logements séniors construits, un logement jeune avec une
location moins élevée est crée. Volonté
également d'introduire des activités innovantes comme fab lab,
fermes urbaines, crèches participatives, espaces de co-working qui vont
favoriser le lien avec les habitants et la population.
Quel déroulement ?
La mise en place du groupe
On va d'abord identifier des personnes
intéressées pour la mise en place de ce type d'habitat, puis une
réunion d'information va être programmée afin de
démarrer des ateliers où ils vont travailler pour faire
mûrir un projet, s'interroger sur les valeurs qu'ils souhaitent
véhiculer, ainsi que sur leurs attentes. Avec des cas-pratiques de mise
en situation d'urgence pour comprendre la personnalité de chaque
personne. L'objectif est de créer des liens entre les personnes. Au bout
de cinq ateliers on voit se créer des groupes d'affinités,
à partir desquels on va pouvoir démarrer un projet.
Première étape de travail consiste à
identifier le foncier suivant les attentes des habitants en relation. Le
process ne démarre que lorsqu'on a identifié le foncier. Les
premiers ateliers se font durant 2 mois, puis 6 mois de recherche. Ensuite
lorsqu'on a identifié une zone géographique on va rencontrer les
communes et collectivités pour identifier un foncier pas
forcément public. En parallèle on met en place une charte du
vivre ensemble où est explicitée les valeurs de la structure,
les
118
compétences proposées entre eux, quels sont
leurs implications, comment ils veulent travaillerÉL'objectif de la
structure est également de faire respecter les délais, en habitat
participatif, l'objectif c'est d'être dans des délais
raisonnables, entre 4 ou 5 ans.
Quel montage opérationnel ?
Question sur le foncier :
La prospection n'est pas le coeur de métier de la
structure, on est plus sur des opportunités. Soit ils ont
déjà identifié un terrain et le propose au groupe
d'habitants, ou alors ils vont permettre à ce groupe de rentrer en lien
avec les professionnels.
Aujourd'hui ils ont un terrain à Vaux-en-Velin le long
de la Rize, un terrain particulier où il est possible de construire un
petit habitat de 5 foyers. À Vaise, ils ont un projet de
réhabilitation d'un appartement de la part d'une association.
Le montage juridique
Chaque projet se défini en une structure
particulière, elle peut être une association, une
coopérative, une société immobilière, une
société d'attribution. Elle va définir son statut
juridique qui va être associé à la SCIC. Une structure
très utilisée est celle des coopératives d'habitant qui
sont propriétaires de l'ensemble mais reverse une part à la
coopérative. Le choix du notaire est très important.
À la différence d'un opération classique
ici on effectue le montage avant d'avoir le foncier, se qui fait évoluer
les dynamiques d'acteur.
Pour l'aménageur, on est sur des grosses
opérations, ils vont acquérir le foncier qui a une valeur il est
vendu et on y fait un type de produit.
Une question qui va devoir être posée c'est la
propriété, la meilleure des solutions c'est le mode locatif, mais
il se trouve qu'en France on est attaché à la
propriété et qu'il est difficile aujourd'hui d'aller vers ce
système même si on peut dire qu'on observe une évolution
des mentalités depuis quelques années.
La question de la spéculation : une des dérives
où les collectivités doivent être vigilantes.
Lors de la revente pour les coopératives,
l'acquéreur va revendre ses parts au futur habitant, part
calculée en fonction du prix de l'immobilier ou de l'inflation, montant
calculé en amont du projet.
Les garanties financières
Pour le moment la structure ne peut se porter garant, à
cour terme on sera sur du cas par cas, sur le long terme l'association devra se
porter garant. En ce qui concerne
119
les banques qui se lancent dans l'habitat participatif, le
Crédit Mutuel dans le huitième, qui ont déjà
travaillé sur ce type de produit, le crédit coopératif, la
NEF mais non compétitif en matière de taux
d'intérêt. Il y a pour le moment beaucoup de curiosité mais
il reste de l'inertie à mettre en place ces projets
La loi ALUR
On attend les décrets pour faciliter le travail et la
reconnaissance, en plus de la réforme sur les community land trust, pour
le printemps été 2016, qui va permettre au office de foncier
solidaire pour que le propriétaire du foncier soit différent de
celui propriétaire du bâti. Modèle utilisé au
Quêbec et en Suisse.
Quelles relations avec les acteurs de
l'aménagement ? Les promoteurs
Aujourd'hui il y a un intérêt grandissant de ces
promoteurs pour mettre en place des projets de ce type, ils sont
intéressés par l'animation et par la recherche de groupe
d'habitant, on leur amène des acquéreurs immédiatement.
Les pouvoirs publics
On observe une reconnaissance de plus en plus forte en
matière d'H.P, avec la loi Alur qui évolue pour faire reconnaitre
l'H.P. Strasbourg est un parfait exemple en matière d'implication du
public dans les projets.
Les bailleurs sociaux
Les bailleurs sont tous globalement intéressés,
mais à Lyon la démarche du village verticale qui a
été assez longue, chronophage a eu pour effet de donner une
mauvaise image de ce type de projet. Avec le recul le bailleur ne souhaite pas
s'engager de nouveau sur ce type de projet, mais souhaite avoir une interface,
un professionnel entre le groupe et eux-même.
L'avantage des bailleurs sociaux est qu'il permet une garantie
financière, en contrepartie il y a une répercussion sur des
quotas de logements sociaux, il n'existe pas de règle fixe sur ces
questions.
La population
Aujourd'hui on a beaucoup d'architectes qui font parties des
groupes de population, vitrine de leur créativité. Une autre
« cible » importante c'est celle des séniors, très
demandeurs pour vieillir autrement, pour permettre une relation avec les
populations plus jeunes. Troisièmement les jeunes couples avec enfants
à la recherche d'espace plus important.
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MIND-MAPPING SUR LE SUJET
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PLANNING
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