Section 2 : Norme ISO 9001:2015 et Droit
Examinons de plus près les exigences de la norme d'un
point de vue juridique. Pour cela, je vais étudier le document NF EN ISO
9001 (parties en italique) dans sa version d'octobre 2015 (la reproduction
intégrale du document est strictement interdite).
Introduction - 0.1 Généralités :
« En mettant en oeuvre un système de management de la
qualité fondé sur la présente Norme internationale, les
avantages potentiels pour un organisme sont les suivants: a) aptitude à
fournir en permanence des produits et des services conformes aux exigences du
client et aux exigences légales et réglementaires applicables
».
La norme est donc on ne peut plus claire : l'entreprise doit
respecter la loi.
(même article) « c) prise en compte des risques
et opportunités associés au contexte et aux objectifs de
l'organisme; »
A mon avis, nous pouvons considérer que l'OEA est un
risque et une opportunité car cette nouvelle certification exige de
l'entreprise une remise à plat de ses procédures en vue d'un
avantage commercial.
(ibidem) « L'approche par les risques permet à
un organisme de déterminer les facteurs susceptibles de provoquer un
écart de ses processus et de son système de management de la
qualité par rapport aux résultats attendus, de mettre en place
une maîtrise préventive afin de limiter les effets négatifs
et d'exploiter au mieux les opportunités lorsqu'elles se
présentent (voir Article A.4). »
Il s'agit là d'une forte incitation à se mettre
à jour et à niveau.
Mémoire de Stage CARDON-Pfeiffer Vacuum Page 38
« 0.3.2 Cycle PDCA : Le cycle PDCA peut s'appliquer
à tous les processus et au système de management de la
qualité dans son ensemble. La Figure 2 illustre la façon dont les
Articles 4 à 10 peuvent être regroupés par rapport au cycle
PDCA. Le cycle PDCA peut être décrit succinctement comme suit: --
Planifier: établir les objectifs du système, ses processus ainsi
que les ressources nécessaires pour fournir des résultats
correspondant aux exigences des clients et aux politiques de l'organisme, et
identifier et traiter les risques et opportunités; -- Réaliser:
mettre en oeuvre ce qui a été planifié; --
Vérifier: surveiller et (le cas échéant) mesurer les
processus et les produits et services obtenus par rapport aux politiques,
objectifs, exigences et activités planifiées, et rendre compte
des résultats; -- Agir: entreprendre les actions pour améliorer
les performances, en tant que de besoin. »
Or, juridique, douanier et contractuel sont aussi des
processus et doivent être reconnus comme tels.
« 0.3.3 Approche par les risques : L'approche par les
risques (voir Article A.4) est essentielle à l'obtention d'un
système de management de la qualité efficace. Le concept
d'approche par les risques qui comprend, par exemple, la mise en oeuvre d'une
action préventive pour éliminer des non-conformités
potentielles, l'analyse de toute non-conformité se produisant et la mise
en oeuvre des actions appropriées adaptées aux effets de la
non-conformité visant à éviter sa réapparition,
était implicite dans les éditions précédentes de la
présente Norme internationale. »
L'entreprise doit donc disposer des contrats
et des documents exigés de nos partenaires par la certification, ce qui
est aussi une démarche de « compliance ».
(même article) « Pour se conformer aux
exigences de la présente Norme internationale, un organisme doit
planifier et mettre en oeuvre des actions face aux risques et
opportunités. La prise en compte à la fois des risques et des
opportunités sert de base pour améliorer l'efficacité du
système de management de la qualité, obtenir de meilleurs
résultats et prévenir les effets négatifs.
»
Planifier et mettre en oeuvre des actions
sont typiquement des concepts que l'on peut associer à la
rédaction de contrats cadres adossés à des conditions
générales de vente et
d'achats.
« 1 Domaine d'application - (Un) organisme: a) doit
démontrer son aptitude à fournir constamment des produits et des
services conformes aux exigences des clients et aux exigences légales et
réglementaires applicables, et b) vise à accroître la
satisfaction de ses clients par l'application efficace du système, y
compris les processus pour l'amélioration du système et
l'assurance de la conformité aux exigences des clients et aux exigences
légales et réglementaires applicables. »
Mémoire de Stage CARDON-Pfeiffer Vacuum Page 39
C'est ici l'explication littérale de ce qu'il faudra
fournir au SRA quant à la conformité de l'entreprise avec le
QAE.
« 4.2 Compréhension des besoins et des
attentes des parties intéressées : En raison de leur effet,
réel ou potentiel, sur l'aptitude de l'organisme à fournir en
permanence des produits et services conformes aux exigences des clients et aux
exigences légales et réglementaires applicables, l'organisme doit
déterminer: a) les parties intéressées qui sont
pertinentes dans le cadre du système de management de la qualité;
b) les exigences de ces parties intéressées dans le cadre du
système de management de la qualité. L'organisme doit surveiller
et revoir les informations relatives à ces parties
intéressées et à leurs exigences pertinentes.
»
L'OEA et le CDU ont et auront des effets très concrets
(en particulier, des formalités export plus longues, plus complexes et
plus coûteuses pour les entreprises qui n'auront pas la certification
OEA). Pour ce qui est des « parties intéressées »,
concept ô combien « ISO » ainsi que nous l'avons vu plus haut,
il paraît évident que les douanes doivent être prises en
considération, qui veulent devenir nos partenaires à travers
l'OEA.
« 4.3 Détermination du domaine d'application
du système de management de la qualité - L'organisme doit
déterminer les limites et l'applicabilité du système de
management de la qualité afin d'établir son domaine
d'application. Lorsque l'organisme établit ce domaine d'application, il
doit prendre en compte: a) les enjeux externes et internes auxquels il est fait
référence en 4.1; b) les exigences des parties
intéressées pertinentes auxquelles il est fait
référence en 4.2 ».
Même remarque que précédemment.
« 4.4 Système de management de la
qualité et ses processus - 4.4.1 L'organisme doit établir, mettre
en oeuvre, tenir à jour et améliorer en continu un système
de management de la qualité, y compris les processus nécessaires
et leurs interactions, en accord avec les exigences de la présente Norme
internationale. »
Il paraît évident ici qu'un processus juridique et
douanier est plus que nécessaire.
(même article) « L'organisme doit
déterminer les processus nécessaires au système de
management de la qualité et leur application dans tout l'organisme et
doit: a) déterminer les éléments d'entrée requis et
les éléments de sortie attendus pour ces processus; b)
déterminer la séquence et l'interaction de ces processus.
»
Parmi ces documents doivent bien sûr figurer les
certificats d'origine, les attestations d'assurance et de non-condamnation, le
K bis et le contrat. Cela signifie aussi qu'il faut anticiper l'intervention du
service douane, NDA et contrats.
Mémoire de Stage CARDON-Pfeiffer Vacuum Page 40
(ibidem) « g) évaluer ces processus et mettre
en oeuvre toutes les modifications requises pour s'assurer que ces processus
produisent les résultats attendus; h) améliorer les processus et
le système de management de la qualité. »
Il est donc nécessaire d'intégrer les
problématiques juridiques et douanières dans l'ensemble des
processus.
« 5.1.2 Orientation client - La direction doit
démontrer son leadership et son engagement relatifs à
l'orientation client en s'assurant que: les exigences du client ainsi que les
exigences légales et réglementaires applicables sont
déterminées, comprises et satisfaites en permanence.
»
On ne saurait être plus clair, dans une entreprise
« certifiée Norme ISO », les questions de douane et juridiques
doivent être prises en compte et traitées.
« 6.1.2 L'organisme doit planifier: a) les actions
à mettre en oeuvre face aux risques et opportunités ; b) comment
1) intégrer et mettre en oeuvre ces actions au sein des processus du
système de management de la qualité (voir 4.4); 2) évaluer
l'efficacité de ces actions. Les actions mises en oeuvre face aux
risques et opportunités doivent être proportionnelles à
l'impact potentiel sur la conformité des produits et des services.
»
Une fois de plus, la norme exige d'intégrer les
problématiques juridiques et douanières dans l'ensemble des
processus.
(même article) « NOTE 1 Les options face aux
risques peuvent comprendre: éviter le risque, prendre le risque afin de
saisir une opportunité, éliminer la source du risque, modifier la
probabilité d'apparition ou les conséquences, partager le risque
ou maintenir le risque sur la base d'une décision
éclairée. »
Les risques liés à la non-certification OEA
ressortent clairement des dispositions du CDU : des procédures
douanières à l'exportation plus complexes, plus longues et plus
coûteuses, représentant donc un risque important pour une
entreprise qui exporte les trois-quarts de sa production.
(ibidem) « NOTE 2 Les opportunités peuvent
conduire à l'adoption de nouvelles pratiques, au lancement de nouveaux
produits, à l'ouverture à de nouveaux marchés, à la
conquête de nouveaux clients, à l'instauration de partenariats,
à l'utilisation d'une nouvelle technologie et d'autres
possibilités souhaitables et viables de répondre aux besoins de
l'organisme ou de ses clients. »
Encore une fois, la norme demande d'intégrer les
problématiques juridiques et douanières à l'ensemble des
processus.
« 6.2 Objectifs qualité et planification des
actions pour les atteindre / 6.2.1 L'organisme doit établir des
objectifs qualité, aux fonctions, niveaux et processus concernés,
nécessaires au système de management de la qualité.
»
Mémoire de Stage CARDON-Pfeiffer Vacuum Page 41
Il s'agit, par exemple, de mettre en place des critères
ou étapes obligatoires, dont le juridique et douanier.
« 7.3 Sensibilisation / L'organisme doit s'assurer
que les personnes effectuant un travail sous le contrôle de l'organisme
sont sensibilisées: a) à la politique qualité; b) aux
objectifs qualité pertinents; c) à l'importance de leur
contribution à l'efficacité du système de management de la
qualité, y compris aux effets bénéfiques d'une
amélioration des performances; d) aux répercussions d'un
non-respect des exigences du système de management de la qualité.
»
En conséquence, l'entreprise certifiée ISO doit
prévoir des actions de sensibilisation et des formations aux questions
juridiques et douanières, par exemple concernant les risques et le
coût de fausses déclarations en douane, fût-ce à
cause d'une simple erreur ou omission.
« 8 Réalisation des activités
opérationnelles / 8.1 Planification et maîtrise
opérationnelles / L'organisme doit planifier, mettre en oeuvre et
maîtriser les processus (voir 4.4) nécessaires pour satisfaire aux
exigences relatives à la fourniture des produits et à la
prestation de services, et réaliser les actions
déterminées à l'Article 6, en: a) déterminant les
exigences relatives aux produits et services; b) établissant des
critères pour: 1) ces processus; 2) l'acceptation des produits et
services; c) déterminant les ressources nécessaires pour obtenir
la conformité aux exigences relatives aux produits et services.
»
Ceci peut très clairement s'appliquer aussi bien
à l'audit OEA qu'aux exigences douanières et juridiques.
« 8.2 Exigences relatives aux produits et services /
8.2.1 Communication avec les clients / La communication avec les clients doit
inclure: a) la fourniture d'informations relatives aux produits et services; b)
le traitement des consultations, des contrats ou des commandes, y compris leurs
avenants; c) l'obtention d'un retour d'information des clients concernant les
produits et services, y compris leurs réclamations; d) la gestion ou la
maîtrise de la propriété du client; e)
l'établissement des exigences spécifiques relatives aux actions
d'urgence, le cas échéant. »
Outre les données du contrôle export, nous ne
pouvons que constater que même la norme exige sans ambiguïté
des contrats !
« 8.2.2 Détermination des exigences relatives
aux produits et services / Lors de la détermination des exigences
relatives aux produits et services proposés aux clients, l'organisme
doit s'assurer que: a) les exigences relatives aux produits et services sont
définies, y compris: 1) toutes exigences légales et
réglementaires applicables. »
Ceci ressort de toute évidence de la même
philosophie que l'audit OEA.
Mémoire de Stage CARDON-Pfeiffer Vacuum Page 42
« 8.2.3 Revue des exigences relatives aux produits et
services / 8.2.3.1 L'organisme doit s'assurer qu'il est apte à
répondre aux exigences relatives aux produits et services qu'il propose
aux clients. Avant de s'engager à fournir des produits et services au
client, l'organisme doit mener une revue incluant: a) les exigences
spécifiées par le client, y compris les exigences relatives
à la livraison et aux activités après livraison ; b) les
exigences non formulées par le client mais nécessaires pour
l'usage spécifié ou, lorsqu'il est connu, pour l'usage
prévu ; c) les exigences spécifiées par l'organisme ; d)
les exigences légales et réglementaires applicables aux produits
et services ; e) les écarts entre les exigences d'un contrat ou d'une
commande et celles précédemment exprimées. L'organisme
doit s'assurer que les écarts entre les exigences d'un contrat ou d'une
commande et celles précédemment définies ont
été résolus. »
On ne saurait être plus clair. Ces questions sont aussi
celles de l'audit OEA.
« 8.3.3 Éléments d'entrée de la
conception et du développement / L'organisme doit déterminer les
exigences essentielles pour les types spécifiques de produits et
services à concevoir et à développer. L'organisme doit
prendre en compte: c) les exigences légales et réglementaires ;
d) les normes ou les règles internes, «règles de
l'art», que l'organisme s'est engagé à mettre en oeuvre.
»
Une remarque d'évidence s'impose : « entrée
» ne veut pas dire « après-coup ». Cela suppose donc une
organisation efficace et proactive dont tous les acteurs sont formés ou
sensibilisés aux problématiques juridiques et
douanières.
« 8.3.5 Éléments de sortie de la
conception et du développement / L'organisme doit s'assurer que les
éléments de sortie de la conception et du développement:
a) satisfont aux exigences d'entrée. »
« 8.4 Maîtrise des processus, produits et
services fournis par des prestataires externes / 8.4.1
Généralités / L'organisme doit s'assurer que les
processus, produits et services fournis par des prestataires externes sont
conformes aux exigences. »
C'est là encore le portait-type de l'audit OEA.
« 8.4.2 Type et étendue de la maîtrise /
L'organisme doit s'assurer que les processus, produits et services fournis par
des prestataires externes ne compromettent pas l'aptitude de l'organisme
à fournir en permanence à ses clients des produits et services
conformes. »
Il faut comprendre ici que les produits et services doivent
être non seulement conformes aux besoins du client mais également
conformes au droit. Cela ressort également de la démarche
compliance dite KYS40.
(même article) « L'organisme doit: s'assurer
que les processus fournis par des prestataires externes demeurent sous le
contrôle de son système de management de la qualité.
»
40 Cf. supra page 18
Mémoire de Stage CARDON-Pfeiffer Vacuum Page 43
C'est en effet le minimum requis de toute entreprise
prétendant à la certification ISO mais cela nous renvoie
également aux critères de l'OEA et au QAE.
(ibidem) « b) définir la maîtrise qu'il
entend exercer sur un prestataire externe et celle qu'il entend exercer sur
l'élément de sortie concerné; c) prendre en compte: 1)
l'impact potentiel des processus, produits et services fournis par des
prestataires externes sur l'aptitude de l'organisme à satisfaire en
permanence aux exigences des clients et aux exigences légales et
réglementaires applicables. »
Nous devons donc exiger un contrat, des assurances et
garanties adéquats, sans oublier la documentation de base (attestations
d'assurance, de non-condamnation, Kbis etc.).
« 8.5.3 Propriété des clients ou des
prestataires externes / L'organisme doit respecter la propriété
des clients ou des prestataires externes lorsqu'elle se trouve sous son
contrôle ou qu'il l'utilise. L'organisme doit identifier,
vérifier, protéger et sauvegarder la propriété que
les clients ou les prestataires externes ont fournie pour être
utilisée ou incorporée dans les produits et services.
»
D'où la nécessité de prévoir des
clauses de confidentialité et de propriété intellectuelle
dans les contrats.
« 8.5.5 Activités après livraison /
L'organisme doit satisfaire aux exigences relatives aux activités
après livraison associées aux produits et services. Lors de la
détermination de l'étendue des activités après
livraison requises, l'organisme doit prendre en considération: a) les
exigences légales et réglementaires. »
C'est-à-dire en fonction des termes du contrat, de
l'Incoterm choisi et des obligations douanière et juridiques.
Nous constatons donc que la norme ISO, loin de négliger
les questions juridiques et douanières, les place au contraire au centre
de ses exigences. Examinons maintenant les rapports existant entre ISO et
OEA.
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