Les tiers-lieux culturels, un outil pour la démocratisation culturelle ? Démarche comparative( Télécharger le fichier original )par Emeline PESCHAUD Université de Cergy-Pontoise - Master 2 Développement culturel et Valorisation des patrimoines 2017 |
Chapitre 7 : Ré-envisager, apporter du sang neuf dans le champ culturel (...)Donner une nouvelle dimension à la culture est lié à l'émergence de nouvelles technologies, comme cela a déjà été mentionné en amont. Les tiers-lieux culturels équilibrés possèdent souvent de nouvelles technologies notamment pour la création. Par exemple, le Château Ephémère possède un FabLab, appelé le Vanderlab181, et met à disposition des médiateurs. Ces derniers interviennent à la fois auprès des artistes, en « les accompagnant dans leur prototypage de dispositifs » et auprès des citoyens, dans le but de les aider à « acquérir des compétences artistiques », de les « sensibiliser aux usages créatifs du numérique », de réduire la fracture numérique. On peut notamment voir les médiateurs guider le public dans l'emploi de la découpeuse laser et/ou de l'imprimante 3D182. Leur Un FabLab est une forme de tiers-lieu qui peut entrer dans la catégorie des makerspaces, c'est-à-dire des tiers-lieux de fabrication numérique. Au Château Ephémère, il y a la volonté de lier l'usage de ces technologies à la création sonore : « le Vanderlab a pour vocation de populariser l'accès et les usages des nouvelles technologies, tout en ajoutant une dimension nouvelle liée aux pratiques sonores ». Ouvert à la fois aux créateurs et au public, on y retrouve la philosophie du do it yourself : « l'espace est convivial et y règne l'esprit `Do It Yourself' ». Le Fablab est parfois considéré comme le module caractéristique du classement du site dans la catégorie des tiers-lieux183. Les tiers-lieux culturels sont une manière de « fixer les innovations numériques »184, de sensibiliser aux usages du numérique. Le Château Ephémère présente une thématique tournée vers l'art numérique. Il possède un Fablab mais aussi des studios d'enregistrement, un restaurant, des aménagements paysagers (potager, land-art, installations autour des arts numériques et de la botanique). La gestion de l'établissement est menée par une équipe de trois personnes quant à la coordination générale et de cinq personnes formant une équipe permanente. Le projet du Château Ephémère est issu du projet de réhabilitation du château de William K. Vanderbilt par l'association Caserne Ephémère, après le lancement d'un appel à projet émis par l'ancienne CA2RS en 2012. En partenariat avec l'EPAMSA, la CA2RS « se dote d'une volonté de transformer le site en espace culturel multifonction tourné vers les arts numériques »185. Le Château Ephémère se revendique comme un « laboratoire de création numérique » mais également comme un « lieu d'échange qui interroge les enjeux liés aux nouvelles technologies ». Le bâti, de style anglo-normand, appartient à la Communauté urbaine GPS&O et le fonctionnement est assuré par une DSP, ce qui est un équilibre dans la gestion du tiers-lieu culturel. Aujourd'hui, il semble qu'une une nouvelle vision de la culture et du patrimoine émerge ; cette nouvelle vision peut apporter de nouveaux modèles de lieux culturels, et parallèlement de 181 https://chateauephemere.org/vanderlab/ 182 Annexe 21 : entretien S. CAMPOS 183 Annexe 16 : entretien R. BESSON 184 Annexe 18 : entretien B. RIDOUX 185 https://chateauephemere.org/le-projet/presentation-et-acteurs/ 42 Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ? E. PESCHAUDnouveaux modèles de tiers-lieux culturels. Par exemple, des friches industrielles mutées en lieux culturels tendent à « défendre une vision dynamique du patrimoine culturel »186. Cette mutation peut trouver son origine dans les contextes de « restriction économique et sociale » : « nouveau concept susceptible de guider l'intervention publique en matière de culture : la démocratie culturelle, et avec une nouvelle conception de la culture, moins restrictive, moins élitiste, et moins hiérarchisée »187. Conception encore au stade d'hypothèse, les chercheurs tendent néanmoins à penser qu'une convergence des modèles, des motivations et des objectifs est en train de s'opérer. D'ailleurs, cela est mis en place à La Condition Publique puisque son directeur, J.-C. LEVASSOR, a déclaré : « la contrainte économique et le contexte urbain et social nous poussent à innover pour réinventer notre modèle culturel et devenir un lieu de rayonnement, tout en associant le quartier à notre projet »188. Ce « laboratoire créatif »189 et lieu de vie, de travail et de diffusion est un EPCC, dont les membres du conseil d'administration sont des personnels de la Région Hauts de France, de la Métropole Européenne de Lille, de la Ville de Roubaix et le département du Nord. Ce lieu existe depuis maintenant quatorze ans. Avant 2016, il y avait une friche industrielle « réhabilitée en manufacture culturelle »190. Le nouveau projet a pour axe principal sa transformation en un « laboratoire créatif, pluridisciplinaire, au croisement entre art, créativité, urbanisme et développement durable ». Pour cela, l'établissement s'appuie sur des « démarches collaboratives avec les acteurs culturels ainsi qu'avec les acteurs économiques, associatifs, universitaires, écologiques, sportifs, sociaux ou de l'urbanisme ». La Condition Publique a permis de mailler le quartier en mettant en place la participation citoyenne, une économie collaborative, une pépinière d'entreprises, ... Ce tiers-lieu culturel est intégré dans « le réseau métropolitain et régional de l'innovation ». Les mutations des lieux culturels sont en quelque sorte le reflet de la mutation du monde aujourd'hui : le social, l'économique, la consommation, l'éthique, les réseaux sociaux, la communication etc. Cette idée de mutation est appuyée par le propos de l'élue à la culture de Chanteloup-les-Vignes, L. KHARJA : « avec la digitalisation et le développement des réseaux sociaux, la culture entre dans les foyers et n'est plus nécessairement destinée à une élite »191. On peut citer ici le Medialab Prado qui met en place des « espaces192 ouverts de réflexion critique sur les technologies numériques et leur impact sur la société »193. Les objectifs du Medialab Prado sont tournés autour du citoyen, autour de la mise en place de « projets concrets » grâce à la rencontre de personnes de différents « mondes », « favoriser une atmosphère de coopération et d'échange » ... Ce tiers-lieu culturel porte une volonté 186 L'hypothèse des tiers-lieux, R. BESSON 187 La démocratie culturelle : un autre modèle de politique culturelle, A.CHATZIMANASSIS 188 L'avenir est dans la friche. Etats généreux de la culture, Y. OREMIATZKI 189 http://www.laconditionpublique.com/ 190 http://www.laconditionpublique.com/le-lieu/le-projet/ 191 Annexe 15 : entretien L. KHARAJA 192 Annexe 9 : les différents `Labs' du Medialab Prado 193 https://www.medialab-prado.es/medialab/mas-informacion/que-es 43 Les tiers-lieux culturels, outils de la démocratisation culturelle ? |
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