5.4 Déterminants de l'intention de migration
secondaire chez les africains vivant en Belgique
5.4.1 Facteurs explicatifs de l'intention de quitter la
Belgique
L'objet principal de ce modèle explicatif de
l'intention de quitter la Belgique est de répondre à la
première partie de notre hypothèse, celle de trouver dans quelle
mesure la non-intégration économique et sociale expliqueraient la
probabilité d'exprimer le souhait ou l'intention de quitter la Belgique.
Cette hypothèse oppose par conséquent les migrants africains les
plus intégrés aux moins intégrés.
Il ressort du tableau 14 que la situation dans l'emploi, le
statut de logement, le fait d'avoir la nationalité belge, le fait
d'appartenir à une génération, le sexe, l'âge,
l'état matrimonial et le niveau d'éducation déterminent
l'intention de quitter le Belgique.
Pour ce qui est de la situation dans l'emploi, les migrants
africains ayant un travail d'intérimaire ou un contrat à
durée déterminée sont plus favorables à
l'idée de quitter la Belgique comparativement aux migrants africains
vivant en Belgique qui disposent d'un travail à durée
indéterminée correspondant /ou approchant (à) leurs
qualifications. Il s'agit probablement en majorité de migrants qui
évoquent les raisons relatives à l'amélioration de
conditions de vie pour quitter la Belgique. Ces derniers ont 1,77 fois plus de
chances d'avoir l'intention de quitter la Belgique comparativement à
ceux qui, sur le plan économique, sont relativement stables. Bien
qu'instables, compte tenu de type de contrat qu'ils possèdent, ceux qui
expriment l'intention de quitter la Belgique sont dans une situation
financière tout juste suffisante. Ces derniers ont 45% plus de chances
d'exprimer l'intention de quitter la Belgique comparativement à ceux
dont la situation financière est suffisante ou plus que suffisante
(Annexe 4 : modèles 5,6 et 7). Il en est de même pour ceux qui se
trouvent dans la catégorie "Autres " sur le plan de logement. Il s'agit
des migrants qui sont hébergés ou encore logés chez leurs
parents. Dans cette catégorie, les chances d'exprimer l'intention de
quitter la Belgique sont multipliées par 2,63 par rapport aux migrants
africains qui sont propriétaires de leur logement.
Ces résultats peuvent s'expliquer par le fait que
nombre des migrants qui aspirent à une migration secondaire sont ceux
qui sont les moins intégrés sur le plan socio-économique.
La probabilité de ré-migration est ainsi, très
élevée si le migrant se trouve dans un contexte de
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précarité sur le plan de l'emploi ou dispose
d'un emploi instable -travail sans contrat formel par exemple-. Il en est de
même pour ceux qui ne sont pas autonomes sur le plan de logement
probablement des suites de problèmes financiers. Ces migrants
justifieraient leurs aspirations par la possibilité de trouver mieux
ailleurs. Ainsi, les motivations d'ordre professionnel et d'amélioration
des conditions de vie sont généralement mises en avant pour
expliquer l'intention d'une émigration secondaire.
S'agissant du fait d'appartenir à une
génération, il s'avère que les migrants africains qui sont
nés en Afrique mais qui sont arrivés avant l'âge de 18 ans
(génération 1.5) sont nombreux à exprimer leur projet de
quitter la Belgique. La probabilité d'exprimer l'intention de migrer
dans cette catégorie est deux fois plus élevée
comparativement à ceux qui sont nés en Afrique et qui sont
arrivés après l'âge de 18 ans en Belgique. Deux
réalités socio-économiques peuvent expliquer ce
résultat. Premièrement, le contexte européen en rapport
avec la liberté de mouvement peut expliquer ce résultat
étant donné que cette catégorie de la population y est en
partie socialisée. Deuxièmement, la probabilité de trouver
un emploi est généralement faible dans cette catégorie des
migrants comparativement aux africains qui sont nés en Belgique
(Génération 2.0) et encore moins par rapport aux Belges. De ce
fait, le taux de chômage dans cette catégorie peut expliquer cette
forte intensité de l'intention de quitter la Belgique.
Pour ce qui est de l'âge, de l'état matrimonial
et du genre, la propension à avoir l'intention de quitter la Belgique
est très élevée chez les plus jeunes (18-30), chez les
célibataires et chez les hommes. Les plus jeunes ont environ 2,3 fois
plus de chances d'avoir l'intention de quitter la Belgique comparativement aux
personnes âgées de 50 ans et plus. Les célibataires voient
leurs chances être multipliées par 1.69 par rapport aux
mariés. Et les hommes sont nombreux à avoir le projet de quitter
la Belgique comparativement aux femmes. Dans environ 40% de cas, les hommes
sont favorables à l'idée d'aller voir ailleurs.
Par ailleurs, les migrants africains les plus instruits ont
plus de chances d'exprimer l'intention de quitter la Belgique comparativement
aux moins instruits, soit ceux qui ont au plus un niveau secondaire (tableau
14, effet net).
Ces résultats confirment, de façon
générale, le caractère très mobile des jeunes
comparativement aux personnes âgées mais aussi de
célibataires par rapport aux mariées et surtout si ces derniers
ont déjà des enfants d'une part et le lien étroit entre
l'instabilité économique ou la non-intégration
économique et l'intention d'émigration secondaire d'autre
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part. Ceux qui disposent de moyens limités ou qui ont
un travail instable ne correspondant pas à leurs qualifications sont
prédisposés et exposés à aller voir ailleurs.
En outre, l'influence de toutes les variables
d'intérêt sous contrôle du sexe, de l'âge, de
l'état matrimonial et du niveau d'éducation révèle
que le fait de posséder ou pas la nationalité belge comme
déterminant de l'intention de migration secondaire. Ceux qui ont la
nationalité belge ont plus de chances d'exprimer l'intention de quitter
la Belgique. Les chances dans cette catégorie sont multipliées
par 1,51 par rapport à ceux qui n'ont pas la nationalité belge.
Ce résultat révèle une forme de protection et une marge de
manoeuvre que possèdent ceux qui ont déjà acquis la
nationalité belge. Ces derniers ont la possibilité de tenter
l'aventure ailleurs sachant qu'ils peuvent revenir à tout moment si
jamais l'expérience s'avérait non concluante. Le statut de
logement et l'état matrimonial, par contre, perdent leur pouvoir
explicatif, une fois que leurs effets sont contrôlés (tableau 14,
effet net).
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