Cette étape de notre étude consiste pour nous
à faire le point des connaissances et des différents
débats déjà engagés sur notre sujet de
recherche.
Colloque sur « La juridictionnalisation
des processus d'intégration en Afrique de l'Ouest » (11 mai 2006 -
Faculté de droit de l'université de Rouen).
Le professeur Luc-Marius IBRIGA, Maître Assistant de
Droit Public à l'Université de OUAGADOUGOU ; Secrétaire
Général du C.E.E.I. « Centre Emile NOEL », animateur de
ce colloque affirmait qu'aujourd'hui le débat sur l'intégration
régionale ne porte plus sur son opportunité mais plutôt sur
sa mise en pratique et sa réalisation concrète.
A ce titre, il affirme que la multiplicité des
organisations sous-régionales constitue le handicap majeur à
cette intégration. Il existe dans la région ouest-africaine,
douze(12) à quatorze (14) organisations de coopération et
d'intégration. La plupart des pays d'Afrique de l'Ouest sont membres
de
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d'intégration régionale en
Afrique:
complémentarité ou concurrence?
plusieurs de ces organisations d'intégration
régionale. Il estime qu'en Afrique de l'Ouest, l'intégration
s'est construite de façon concurrentielle. Et qu'on remarque ainsi une
sorte de concurrence par exemple entre l'U.E.M.O.A et la C.E.D.E.A.O d'une
part, et entre l'U.E.M.O.A et l'OHADA d'autre part, bien qu'il n'y ait pas,
à priori, d'opposition entre les objectifs de ces différentes
organisations d'intégration.
Selon M. IBRIGA, il existe des difficultés de
cohabitation tant au niveau des droits produits qu'au niveau des
modalités de contrôle juridictionnel ; et pour lui une
nécessaire mise en cohérence des systèmes
d'intégration s'impose et exige que l'on fasse état des
initiatives déjà en cours avant d'explorer de nouvelles pistes de
solution.
« Regard critique sur l'intégration
africaine : comment relever
les défis ?» ISSAKA K. SOUARE ; Occasional
paper page 140, Juin 2007.
Il y a plusieurs signes qui démontrent la
volonté de nombreux leaders africains de transformer leurs pays et le
continent dans son ensemble d'une région chroniquement dépendante
à une région prospère et respectueuse, jouant le
rôle qui lui revient sur la scène internationale. Conscients de
leur handicap relatif, les pays africains semblent avoir favorisé
l'« intégration régionale » comme la meilleure
stratégie pour réussir leur transformation économique.
Mais l'analyse critique de l'état de l'intégration
économique sur le continent indique que malgré les efforts
considérables consentis à cet égard, l'intégration
régionale ne semble pas avoir produit les résultats
escomptés.
Dans cet article, l'auteur fait une lecture critique des
multiples défis auxquels les programmes d'intégration
régionale sur le continent font face, et les obstacles que l'Afrique
doit surmonter pour atteindre ses objectifs dans ce domaine. Parmi
les multiples obstacles, il focalise son attention sur quatre
principaux
facteurs dont les appartenances multiples de plusieurs Etats
africains à différentes Communautés économiques
régionales (CER).
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Afrique:
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Pour lui, si la création d'un grand nombre
d'institutions d'intégration témoigne, une fois de plus, de la
volonté soutenue des africains d'harmoniser leurs politiques dans les
différents domaines d'activités politiques et économiques,
elle révèle tout de même un problème de vision et de
stratégie. Cela d'autant plus que malgré ce grand nombre de
groupements régionaux, censés aboutir à un marché
commun couvrant l'ensemble du continent, force est de remarquer qu'il y a
encore peu de résultats concrets. Toujours selon M. ISSAKA, l'un des
facteurs qui empêchent le continent d'atteindre ses objectifs
d'intégration est la multiplicité des organisations
d'intégration. En effet, tous les Etats d'Afrique sont divisés en
cinq(5) régions géographiques. Or, il y a sept(7)
Communautés Economiques Régionales (CER) et sept(7) autres
Organisations Inter-Gouvernementales(OIG) sur le continent dont les membres ne
sont autres que les différents pays africains. De ce fait
déjà, il est clair que certaines CER et OIG transcendent des
régions géographiques en ce qui concerne la composition de leurs
membres. A titre d'exemple, on constate qu'une organisation comme la CEN-SAD
puise ses membres des rangs de la CEDEAO, de l'UEMOA, de l'UMA, de l'IGAD, du
COMESA, et de la CEMAC. C'est bien là, l'illustration du chevauchement
des groupements régionaux.
Aussi la duplication des CER et OIG visant les mêmes
objectifs et le chevauchement en ce qui concerne la composition de leurs
membres constituent-ils un véritable problème sinon un obstacle
au projet d'unité et d'intégration africaine. La
problématique de cet état de chose peut être
constatée à au moins deux niveaux. D'abord, étant
donné que l'ambition ultime de chacun des blocs sous-régionaux
est ou devrait être de se fusionner éventuellement pour
créer la Communauté économique africaine, puis l'Union
africaine (entendue dans son sens politique), cet état de chose jette le
flou sur les objectifs de ce projet et rend le processus plus compliqué.
Ensuite, il y a le problème de financement de l'UA et des autres projets
continentaux. Il est incontestable que les appartenances multiples
entraînent des responsabilités multiples envers les
différents groupements auxquels l'on appartient. Cela alourdit
indiscutablement
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les charges des Etats concernés, dans la mesure
où ils doivent non seulement faire face à des obligations
financières multiples, mais doivent aussi gérer une
multiplicité de réunions, de décisions, d'instruments, de
dossiers, de procédures et d'échéances. Ceci étant
et compte tenu des ressources limitées des différents pays
africains, on arrive forcément à une situation où beaucoup
de pays ne peuvent plus honorer les obligations des différents blocs
régionaux dont ils sont membres. Ils faillent de surcroît,
à celles de l'Union Africaine, notamment en ce qui concerne le paiement
de leurs cotisations annuelles, ce qui a un impact néfaste sur beaucoup
de projets de cette dernière.
Exposé de la Commission Economique des
Nations Unies pour l'Afrique à l'occasion de la réunion d'experts
sur la rationalisation des Communautés Economiques Régionales
(CER) ; Ghana, Accra 2728 Octobre 2005 (Rapport /Réunion Consultative
sur la Rationalisation des Communautés Economiques Régionales
(CER) pour les Régions d'Afrique du Centre, du Nord et de
l'Ouest).
Basé sur la résolution CM/464 du
26ème Conseil des Ministres de l'OUA, le Traité
d'Abuja subdivise le continent en cinq sous-régions: l'Afrique du Nord ;
l'Afrique de l'Ouest ; l'Afrique Centrale ; l'Afrique Orientale ; et l'Afrique
Australe. Il est attendu des CER couvrant ces sous-régions du continent
qu'elles jouent leurs rôles de pôles de fédération du
futur marché commun à l'échelle du continent.
Cependant au lieu de cinq(5) communautés
régionales il existe au moins 14 communautés économiques
au sien de l'espace géographique africain. A l'exception de la CEDEAO,
aucune des communautés économiques régionales existantes
ne s'inscrit dans les cadres définis par le Conseil des Ministres. Par
ailleurs, au sein de chacun des cinq espaces régionaux, il existe
plusieurs organisations orientées vers l'intégration. Ainsi, en
Afrique de l'Ouest par exemple, la CEDEAO cohabite avec l'UEMOA, l'Union du
Fleuve Mano(UFM), et à présent la CENSAD. La rationalisation des
CER
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revient par conséquent à s'attaquer à la
fragmentation des espaces sous-régionaux, au chevauchement des
institutions, à la duplication des efforts, à la dispersion des
ressources, et aux querelles de légitimité découlant des
multiples traités existants des CER. En termes réels, la
rationalisation signifie : s'attaquer aux contraintes considérables
affectant la capacité des CER à générer et à
canaliser un effort collectif durable dans le sens de l'intégration de
l'Afrique, à cause de l'existence parallèle du grand nombre de
CER dans chacun des espaces sous-régionaux, avec des mandats et des
programmes similaires.