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Dynamique des modes de gestion des terres agricoles dans la commune de Bembèrèké.


par Nourou-Dine BIO BAYA
Université de Parakou - Licence en géographie et aménagement du territoire 2019
  

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CHAPITRE III : RÉSULTATS ET DISCUSSION

Ce chapitre expose les différents résultats et la discussion.

3.1.Résultats

Les résultats obtenus par la présente étude s'articulent autours des points suivant :

ü Différents modes de gestion des terres agricoles dans la commune de Bembèrèkè

ü Impactes environnementaux et socioéconomiques de ces modes de gestion

ü Stratégies pour le bon usage des terres de la commune

3.1.1. Différents modes de gestions des terres agricoles

Plusieurs mécanismes sont mis en oeuvres pour la gestion des terres agricoles. Dans la commune de Bembèrèkè on observe de nombreux modes de gestions parmi lesquels on a : lemode non administratif, le mode administratif et le plus important qui est le mode agricole.

3.1.1.2. Mode de gestion non administratif

C'est un mode de gestion qui se fait selon les règles communautaires sans l'apport de l'administration publique. Ce mode consiste à considérer la terre comme un bien de la communauté gérée par un chef de terre « Roi ». Le droit d'usage pour les champs éloignés est reconnu au premier occupant et sa descendance. Chaque village dispose d'un chef de terre qui veille au nom de la communauté sur le territoire villageois. Ce chef est toujours issu du groupe le plus anciennement installé. Il est assisté dans cette tâche par les chefs féticheurs qui président toutes les offrandes destinées à la terre. La terre est donc un patrimoine ancestral et ne peut être vendue. Elle s'acquiert par prêt ou par don suivant les rituels bien déterminés.

Mais ces systèmes d'exploitation ne sont compatibles qu'avec une faible densité démographique, de l'ordre de quelques habitants par km2. Dès que celle-ci augmente, le choix se situe vers l'avènement d'un nouveau système d'exploitation. Ainsi les coutumes qui régulaient la gestion des terres ne sont plus respectées aujourd'hui et les conflitsconcernant l'usage des terres se multiplient. Ces différents confits font appel à l'interventionde l'administration locale ou nationale et à ce niveau apparait la gestion administrative des terres.

3.1.1.3.Mode de gestion administratif

La plupart des communautés africaines a un lien particulier avec la terre qu'avec d'autres ressources. De par son utilisation collective, la terre ne pouvait pas être un objet de vente car longtemps considérée inaliénable. Elle pouvait être donnée ou prêtée pour utilisation seulement à un étranger sous le contrôle de son propriétaire terrien (autochtone). De ce fait, la terre appartient aux premiers occupants et leurs descendants.

Dans le cadre de l'étude, l'administration intervient dans le cas des conflits autour des terres cultivables dans la commune. En effet, vu l'importance qu'occupe la terre les usagers cultivent dans de grandes portions provoquant ainsi le manque des terres. C'est ainsi que chaque agriculteur amorce tout l'espace qui lui est réservé pour ses cultures en utilisant celui d'autrui. Cette pratique provoque dans la plupart des cas des conflits entre agriculteurs de la même localité ou de celles voisines. Ainsi, les agriculteurs de la commune de Bembèrèkè sont souvent en conflit avec ceux de la commune de Sinendé précisément dans l'arrondissement de Bembèrèkè (village Saoré). Au sud, on note également des conflits qui opposent de temps en temps les habitants l'arrondissement Ina à ceux du village Têpa de la commune de N'Dali.

Pour apporter des solutions à ces différentsconflits les autorités locales font souvent recourt aux textes qui régissentle droit foncier moderne. Les règles du foncier moderne ou napoléoniensont entre autres :

- La terre appartient à l'Etat ;

- La terre appartient à celui qui la cultive sans distinction ;

- Celui qui ne paye pas d'impôts en république du Bénin, ne saurait prétendre à la terre 

Le droit moderne en se manifestant en milieu urbain par les lotissements, devrait consacrer en milieu rural à la modernisation des exploitations et à la spécialisation de l'espace rural. Cependant, le droit moderne est très mal connu. L'utilisation des exploitations dépend des collectivités et des groupes socioculturels qui attribuent les terres sous prétexted'être les prétendants des lieux et non selon les lois en république du Bénin.

3.1.1.4.Gestion agricole

Dans la commune de Bembèrèkè, plusieurs systèmes de cultures sont utilisés pour mieux gérer les espaces agricoles. Au nombre de ceux-ci nous avons : le système de culture associée, le système de culture attelée, la jachère, la rotation et l'assolement.

Les principales cultures pratiquées à Bembèrèkè sont: le coton, le riz et surtout le maïs. Ces cultures occupent de grands espaces dans l'exploitation agricoles. Compte tenu de la pauvreté des sols que signalent les producteurs. On note l'utilisation des intrants agricoles pour accroitre les rendements.

§ Association des cultures

Ce système ne dépend pas strictement de la nature des sols. Il résulte toujours du choix humain parmi les diverses possibilités qu'offre le milieu naturel. Les cultures associées rencontrés sont entre autre: la culture du haricot dans un champ de maïs (selon la distance entre deux pieds de maïs), la culture du maïs dans un champ d'igname, la culture de sorgho dans un champ de maïs.

§ Cultures attelées

Selon les populations enquêtées, ce type de système dépend des moyens dont dispose l'agriculteur. L'utilisation de la culture attelée est faible dans la commune. Les principaux matériels de culture attelée sont entre autres les boeufs de trait, les charrues, les charrettes, les buteurs, les semoirs et les tracteurs.

§ Jachère

La jachère est encore appelée repos de la terre, terme doublement ambigüe parce qu'il s'appliquait aussi à la friche en herbée et parce que cette terre au « repos » était intensivement travaillée.Selon la plupart des producteurs ce type de pratique est ancien. La jachère consiste à mettre au repos une terre ou un espace de culture après plusieurs années d'exploitations sous prétexte que la terre retrouve sa fertilité. Dans les milieux ruraux, la mise en jachère va de 3 à 4 ans d'autant plus que le manque de terre n'est pas remarquable.

Ainsi, la jachère était la méthode la plus utilisée par les producteurs la commune pour redonnerles fertilités aux sols jugés fatigués par les agriculteurs. Les paysans vont à la conquête de nouvelles terres en laissant les terres infertiles durant trois à quatre ans. Sur ces terres,on constate la régénération de la végétation à travers les arbustes et les herbes qui s'ydéveloppent.

Récemment, les paysans de la commune adoptent des nouvelles méthodes de fertilisation des sols à la place de la jachère traditionnelle qui sont entre autres : l'utilisation des engrais chimiques et les plantations.

Face à l'accroissement de la démographie et le besoin de l'espace qui se fait ressentir, les paysans ne laissent plus les terres en jachère. Ainsi les terres autre fois laissées au repos sont cultivées à l'aide des engrais chimiques ils épandent pour accroître la production afin de satisfaire les besoins nutritionnels de la population. En dehors de cette méthode les agriculteurs de la commune optent pour la plantation comme méthode fertilisation. En effet on observe la plantation desespèces tels que :le manguier (mangifera indica), l'anacardier(Anacardium occidentale), le goyavier(psidium gyajava), le teckeraire(tectona grandis). Cette pratique leur permet de sécuriser leurs terres, de redonner vie au sol et de tirerprofit des différents avantages que procurent ces arbres.

La Planche 1  suivante montre un début de jachère et une plantation d'anacardiers

Photo 1 : une terre en jachère à TemêPhoto 2 : une plantation d'anacarde à TemêPlanche 1 : undébut de jachère et une plantation d'anacardiers

Prise de vue LAFIA BOKO octobre, 2019

De l'observation et l'analyse de ces photos de la planche 1on comprend que la jachère est un mode de fertilisation des terres qui n'est plus très utilisé par les paysans qui ont opté pour l'usage des engrais et des plantations pour répondre à la pression démographique et au besoin d'espace sans cesse grandissante dans la commune.

§ Rotation agricole

La succession d'une culture à une autre sur une même parcelle d'une campagne agricole à une autre est remarquable dans la zone d'étude. Ce système de culture permet de contrôler la baisse de fertilité des sols. La variation des cultures suit une logique selon laquelle, les cultures exigeantes au début de l'exploitation pour terminer par les cultures les moins exigeantes au moment où les terres sont appauvries

La rotation des cultures année par année est le fait de changer la culture à chaque année. Selon les paysans, ils changent sur le même terrain les cultures au fur et à mesure que les années passent. Cette rotation se fait en considérant l'exigence des cultures en éléments nutritifs. Chez les Batumbu l'ethnie majoritaire de la commune, l'igname occupe la première place. Ainsi elle est cultivée dans une terre neuve « teemkpam » afin d'avoir de long et gros tubercules. Et les années qui suivent ce sera le tour des céréales(maïs ou sorgho) ou des cultures des rente tel que : le coton. Lorsqu'ils constatent que la terre est très pauvre, ils sèment des cultures moins exigeantes telles que :le soja, l'arachide, le haricot.

Par ailleurs la rotation de diverses espèces végétales permet de diversifier la flore et la faune étant donne que les racines sécrètent différentes substances organiques qui attirent une diversité  de bactérie et de champion. Ces micros organismes vont à leur tour jouer un rôle très important dans la transformation des substances sécrétées en élément nutritifs pour la plante.

§ Assolement

Il consiste à faire succéder des cultures dans un certain ordre en divisant les terres labourables en grandes portions ou soles. La surface réservée à chaque culture s'appel sole « pkarou ». Une sole peut aussi regrouper plusieurs parcelles d'exploitation céréalière : maïs sorgho, maïs haricot et mil.

Il est établi avant chaque année de culture et résulte des choix de l'agriculteur quant à l'orientation technico-économiques qu'il veut donner à son exploitation.

La Figure 3 ci-dessous présent un exemple d'assolement observé dans le milieu d'étude

Figure 3 : exemple d'assolement observé dans le milieu d'étude

Source :résultat de recherche du terrain octobre, 2019

La figure 3 révèle que la plus grosse part des terres est réservé au maïsqui occupe 36% des terres, il est suivit de l'igname 27%, du sorgho22% et l'haricot qui vient en dernier position et qui tourne autour de 15%.

3.1.1.5.Extension des superficies cultivées

Dans le but d'accroitre leur rendement agricole, de satisfaire les besoins alimentaires de la populationcroissante et d'avoir de bénéfices économiques, les paysans augmentent les superficies de leurs champs.Le choix du terrain pour le paysan de la commune de Bembèrèkè, se repose sur plusieurs critères dont : les espèces qu'il comporte.

Ainsi les espèces telles que :Yanfainkounou, Yakaconsou, Warou, Gbakpa, Karara, Saka sont les espèces indicatrices de bonne fertilité des sols. La recherche d'une terre de telle qualité entraine la dispersion des champs dans l'espace. Cette conditionnalité dans le choix est aujourd'hui alternée avec l'usage des intrants agricoles pour les cultures de rente notamment le coton.

Une fois le terrain identifié, suit le défrichement qui consiste à débarrasser le sol du tapis herbacé. Les herbes déterrées sont laissées étaler par terre tandis que les bois secs coupés sont entassés autour des arbres à abattre pour les calciner sur pieds. Cependant, il existe deux types de défrichement dans la commune de Bembèrèkè à savoir :

Le premier, la terre neuve « yampkam » est destiné aux champs d'igname, de mil, de maïs et de nos jours le coton qui a même pris le dessus sur cette pratique. Il consiste à désherber, à labourer la terre à l'aide d'une daba ou des boeufs de trait afin de pouvoir mettre en place les buttes destinées à recevoir des têtes d'ignames coupées qui servent de semi, tous ceci pour la culture des plantes à tubercules et à racines.

Quant à la culture des céréales et du coton, pour le même type de défrichement, il est question de couper les arbustes et les branchagesdes arbres et de les entasser autour des arbres à abattre pour les calcinés sur pieds. Pour les paysansles avantages de ces pratiques sont multiples : économie de force de travail et fertilisation appréciable du sol par apport d'éléments minéraux fournis par les cendres. De même pendant cette période, les herbes mortes se décomposent et humidifient le sol.Cette catégorie de défrichement prend le pas sur l'autre et s'utilise surtout pour la production d'igame et du coton.

Le second type de défrichement, l'ancienne terre « pkaro » repose sur l'essouchement des résidus de cultures dans un champ qui a été au moins une fois cultivé des années antérieures.Ces résidus seront à la suite brûlés pour la fertilisation du sol grâce aux cendres. Ce type se pratique par les paysans travaillants sur les parcelles qui ne garantissent pasde grandes productivités. Ce sont des techniques culturalesnon respectueuses de l'environnement. A chaque saison, les paysans font des feux tardifs de végétations, coupent les arbustes qui devraient reconstituer le couvert végétal. La houe et les coupe-coupe sont les outils les plus utilisésdans ces types de défrichage. Mais pour le laboure la daba, la charrue et les tracteurs sont utilisés. Le laboure est la condition nécessaire avant tout ensemencement dans le secteur d'étude. Ainsi il existe deux types de laboure :

- Les buttes pour l'igname, le manioc

- Les sillons pour le coton et les céréales

Ces laboures ameublissent aèrent le sol mais leurs inconvénients résident dans le fait qu'ils favorisent l'ablation du sol, les pentes sont légèrement prononcées et dépassant4%.

Les techniques de culture représentent l'ensemble des pratiques mises en oeuvre par l'agriculteur dans son processus. Le système de production d'agriculture itinéraire, les différentes associations de cultures, la technique de rotation sont autant de méthodes traditionnelles qu'utilisent les agriculteurs de la commune de Bembèrèkèpour mettre en valeur leurs parcelles. L'agriculture itinérante sur brulis est la forme la plus ancienne d'exploitation du paysan de notre commune d'étude.

On considère cette pratique comme une méthode archaïque. Mais elle constitue une forme de culture extensive qui était parfaitement adaptée région jadis moins peuplée. La culture itinérante consiste à défricher la parcelle destinée à recevoir les cultures en coupant et en brûlant la végétation naturelle qu'elle porte

La Planche 2 ci-dessous  une présente parcelle en préparation pour recevoir une culture à Keroupkpogoh

Photo 4 : champs préparé pour l'igname

Photo 3 : terrain traité à l'herbicide

Planche 2 : parcelle en préparation pour recevoir une culture à Keroupkpogoh

Prise de vue : BIO BAYA octobre, 2019

De l'analyse de la planche 2 on retient que les producteurs de la commune on adopter une nouvelle méthode de défrichage des terrains de production. En effet pour emblaver de grandes superficies et économiser la force et le temps de travail, les producteurs traitent les champs en utilisant les herbicides.Cette pratique leur permet dedésherber les champs même en plaine saison pluvieuse sans faire recours aux feux de brousses.

L'agriculture estun système d'exploitation du milieu naturel permettant la production des végétauxnécessaires à l'homme c'est une activité primordiale sans laquelle il n'aura pas les aliments nécessaires pour la vie, car elle participe dans l'alimentation de tous les êtres vivants.Ainsi au Bénin et surtout dans commune de Bembèrèkè, une commune essentiellement rurale et dont 80% de la population est agricole ne reste pas en marge de cette activité. Les agriculteurs de ladite commune utilisent diverses méthodes dans la gestion de leur espace cultural. Ces modes de gestion leurs permettent de subvenir à leurs besoins vitaux et même. Toute fois ces modes de gestion ne sont pas sans conséquence.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo