Thomas Bizien
Université Paris 3 À Sorbonne Nouvelle UFR Arts et
Médias
Département Médiation culturelle Année
universitaire 2010 - 2011
La marque de l'impermanence dans les expositions du
Palais de Tokyo
|
Mémoire de Master 1 Session de Juin 2011
Sous la direction de MM la Professeur Cécile Camart
2
REMERCIEMENTS
En tout premier lieu, mes remerciements vont à
l'équipe du Palais de Tokyo, dont les conseils judicieux ont
aiguillé ce travail. Ma reconnaissance vise particulièrement
Frédéric Grossi et Vincent Simon, responsables du service des
éditions. L'accès aux archives de l'institution, aux ressources
iconographiques ainsi qu'aux documents imprimés m'aurait
été impossible sans eux. Je leur suis très reconnaissant
d'avoir su m'accompagner et me soutenir tout au long de ce parcours.
Je tiens également à remercier ma directrice de
mémoire, la professeure Cécile Camard pour l'attention
portée à ce travail.
3
RESUME
Présenté comme exigence partielle du master 1 de
médiation culturelle, ce mémoire revient sur les dix
années de programmation du Palais de Tokyo. Il tend à mettre au
jour la position curatoriale de l'institution. La notion
d'impermanence, entendu ici comme motif pouvant aussi bien désigner le
fugitif, l'éphémère, le transitoire, a été
choisie comme outil permettant de lire une part représentative de ses
expositions. D'oeuvres qui tentent d'intégrer dans leurs
matérialités, les flux de la vie, aux oeuvres qui se
déploient dans cette vie même, ce mémoire est aussi
l'occasion d'analyser la capacité de l'art à pouvoir rendre
compte de la temporalité. Enjeu artistique majeur de la création
contemporaine, la gestion du temps de l'oeuvre et son esthétisation est
le dénominateur commun des oeuvres ici rassemblées. Le rapport de
l'oeuvre et de l'impermanence du temps peut être envisagé selon
trois modalités :
Des oeuvres statiques qui proposent dans leur récit un
déplacement temporel. Comme des ruines suggèrent en symbolique le
transitoire, ces oeuvres déploient, dans les énoncés
qu'elles mettent en scènes, des récits qui dévoilent
l'inéluctable fuite du temps. À l'image de la vanité, qui
par effet de rétroaction, fait prendre conscience de la mort prochaine,
ces oeuvres proposent au spectateur, une approche subjectivée de la
temporalité.
Par l'usage de matériaux pauvres qui se
décomposent, de mécanismes de destructions qui liment leurs
présences, un autre corpus d'oeuvre aborde la notion de processus. Des
sculptures organiques, donc périssables de Michel Blazy aux oeuvres
autodestructrices de Floriant Pugnaire & David Raffini, ces travaux
évolutifs ont en commun de questionner la relation entre l'art et son
immutabilité.
De l'éphémère de l'objet à la
fugacité de l'action, les interventions en prise avec le réel
n'envisagent la production d'aucune oeuvre arrêtée. Vécu en
fonction des aléas du temps, l'art vise ici l'enclenchement d'un
processus intégré aux fluctuations de la vie.
Mots clés : impermanence,
maîtrise de la temporalité, processus, art
éphémère, sculpture orpheline, vanité,
espace-temps, art et vie, site spécifique
4
PLAN DU MEMOIRE
Remerciements II
Résumé III
Table des matières IV
Introduction 8
(Les oeuvres sont citées en fonction de leur ordre
d'apparition dans le texte)
I. Contre le monument : précarité,
fragilité et destruction sculpturale
...13
I.1. Une esthétique du ruiniforme 14
I.1.a - Un espace d'exposition en friche 14
Anne Lacatton & Jean-Philippe Vassal,
Travaux de réhabilitation du Palais de Tokyo, 20002002 ; 2011-2012
I.1.b - Des ruines comme expôt 16
Kay Hassan, Johannesburg by day,
2002 À Loris Cecchini, Breastwork, 2002 ;
Empty Walls - Just Doors, 2007 À Michael Elmgreen &
Ingar Dragset, Demolished Prison, Powerless Structures, Fig.
272, 2002 À Sandra Lorenzi, L'édifice
persistant, 2011
I.1.c - De la fragilité sculpturale 19
Vincent Ganivet, Caténaires,
2010 ; Round Up, 2007 À Daniel Firman,
Wûrsa (à 18 000 kilomètre de la terre), 2008
À Sébastien Vonier,
Névés, 2011 À Karsten
Födinger, Cantilever, 2011
I.2. Des processus de désagrégation 20
I.2.a - La consommation physique de l'oeuvre 21
Michel Blazy, Boules de carottes,
1998 ; Champ de pommes de terre, 2002 ; Fontaine de mousse,
2007 ; Patman 2, 2006 ; Sans titre, 2007 ;
Sculptcure, 2003 À Lonnie van Brummelen & Siebren
de Haan, Fortified Nigerian Sugars, weakened by second rainy
season and overseas transportation, 2006
I.2.b - La destruction de l'oeuvre ..23
Florian Pugnaire & David Raffini,
Expanded Crash, 2008-2009 ; In Fine, 2010 À
Jean Marie Blanchet, Adhésif sur mur, 2007
À Laurent Moriceau, Killing me Softly, 2003
À Henrik Plenge Jacobsen, Smoke, 1998-2000
I.2.c - L'emballement mécanique : le hasard et
l'aléatoire 26
.
Arcangelo Sassolino, Afasia1, 2008 ;
Sans titre, 2008 À Kris Vleeschouwer,
Glassworks II, 2006 À Roman Signer,
Valise, 2006 ; Banc, 2008 ; Tables, 2009 À
Alighiero Boetti, Lampe annuelle, 1966
5
I.3. La disparition sculpturale : de la fuite vers
l'invisibilité 29
I.3.a - Se soustraire du réel 29
Robert Gober, Partially Burried Sink,
1986 À Ryan Gander, Nathaniel Knows, 2003-2009
À Etienne Bossut, Jardinage, 1984 À
Werner Reiterer, Entrance to the Center of the World,
2005 À Vincent Lamouroux, Scape, 2006
I.3.b - Sculptures invisibles 32
Tom Friedman, Untitled (A Curse), 2009
À Dave Allen, Satie's «Véritables
Préludes Flasques (pour un chien)» 1912, rendered at tone
frequencies above 18 kHz, 2002 À Christian
Andersson, Blind Spot, 2003 À Ceal
Floyer, Autofocus, 2002
II. Le temps manipulé ou comment rendre compte de
son instabilité
...35
II.1. Des fluctuations de la pensée 35
II.1.a - La décomposition du mouvement et la culture
cinématographique 35
Bettina Samson, Warren, 1/4 de seconde en
Cinémascope, 2007 À Zilvinas Kempinas,
Flying Tape, 2006
II.1.b - Mécanismes cérébraux
dévoilés 37
Rebecca Horn, Lumière en prison dans
le ventre de la baleine, 2002 À Jota Castro,
Brains, 2005 À Arthur Barrio,
Réflexions...(s)..., 2006 À Mathieu Briand,
Le Monde flottant, 2003
II.1.c - Le temps contrôlé 42
Loris Gréaud, Forêt de poudre
à canon (bulle), 2008 À Tobias Rehberger,
Paris Light Bungalow Drawing, 2002 ; Shining, Shining,
Shining, 2002 ; Videobibliothek, 2002
II.2. Variation contemporaine sur le thème de la
Vanité classique 43
II.2.a - Ossements, crânes et squelettes 44
Adel Abdessemed, Habibi, 2004
À Laurent Le Deunff, Crâne, 2002
À Bruno Peinado, Vanity flight case, 2005
À Nicolas Juillard, The Waiting Room, 2005
II.2.b - Des fleurs comme motif du temps 47
Yoshihiro Suda, One Hundred
Encounters, 2001 ; Refrain Pain, 2002 ; Rose, 2003 ;
Weeds, 2003 À Tony Matelli, Gone,
2000 ; Weeds, 2000-2009
II.2.c - La mesure du temps : montre et bougie 48
Gianni Motti, Big Crunch Clock,
1999 À Urs Fischer, Untitled (Branches), 2005 -
Jonathan Monk, The Odd Couple (French version),
2008 À Alice Guareschi, 2005 Calendar, 2005
II.2.d - La vanité performée 51
Marina Abramovic & Jan Fabre,
Guerrier-Vierge/Vierge-Guerrier, 2004 À Ana
Mendieta, On Giving Life, 1975
II.3. De la caducité de l'existence 52
II.3.a - Une fin de course 53
Pierre Ardouvin, Nasseville, 2003
À Bertrand Lamarche, Lobby (hyper tore Ø
550), 2010 À Yuhsin U. Chang, Poussière
dans le Palais de Tokyo, 2010
6
II.3.b - La stratégie du pire 54
Alain Declercq, Instinct de mort, 2002
À Kendell Geers, The Terrorist's Apprentice,
2002
III. La critique de l'éternel 57
III.1. Consumérisme et mass médias 57
III.1.a - L'impermanence des biens matériels 57
Chen Zhen, Purification Room, 2003
À Christoph Büchel, Dump, 2008
III.1.b - Critique de la publicité 62
Guillaume Paris, We Are the World,
2003 ; Boris Achour, Cosmos, 2001
III.1.c - Critique des médias 64
Wang Du, Produit dérivé,
2004
III.2. L'obsolescence technologique et l'idée de
progrès 65
III.2.a - La caducité de l'ère industrielle
...65
Daniel Dewar & Grégory Gicquel,
Waders, 2010 À Eric Tabuchi,
Agrandissement du provisoire, 2010 ; Hyper Trophy, 2010 À
Raphael Zarka, La Draisine de l'Aérotrain,
2009
III.2.b - L'obsolescence technologique 67
Daniel Dewar & Grégory Gicquel,
Granitoïd trans goa rascal koï koï, 2007 À
Mark Handforth, Honda, 2002 À Luc
Kheradmand, Postvsnow III, 2009-2010 À Yann
Gerstberger, Hotel Gogodola Paris Executive Suite, 2010
III.3. Entropie et dépérissement
écologique 69
Henrik Hâkansson, A travers bois pour
trouver la forêt, 2006 À Tetsumi Kudo,
Pollution-cultivation-nouvelle écologie, 1971
IV. De l'éphémère de l'objet
à la fugacité de l'action 72
IV.1. La césure comme modèle d'action : abandon
et disparition 73
IV.1.a - Se dérober du monde 74
Robert Kusmirowski, Unacabine, 2008
À Gardar Eide Einarsson, Garbage (Class 1-5),
2009 ; Garbage (Class 6-10), 2009
IV.1.b - L'abandon de l'art 75
Robert Malaval, Kamikaze, 2005 À
Charlotte Posenenske, Vierkantrohre Serie D, 1989
IV.1.c - L'esthétisation du suicide 78
Bas Jan Ader, Untitled (Tea Party),
1972 À Gino De Dominicis, Tentativo Di Far Formare
Dei Quadrati Invece Che Dei Cerchi Intorno ad un Sasso Che Cade
Nell'acqua, 1970 ; Tentativo Di Volo, 1970
IV.2. 7
D'un art in situ 80
IV.2.a - Temporalité de l'oeuvre en site
spécifique 80
Robert Smithson, Rundown (1969),
Swanm (1969), Mirror vortex (1964) À Daniel
Buren, Quatre fois moins ou quatre fois plus, 2004
À Michael Lin, Spring 2003, 2003
IV.2.b - L'oeuvre exposition 82
Katharina Grosse, Construction à
cru, 2005
IV.3. ...à un art in socius 83
IV.3.a À L'artiste comme créateur de dialogue 85
Alain Bublex, Tokyorama 6, 2001 ;
Awareness box, 2003 À Fabrice Gygi,
Tribune, 1996 À Robert Milin, Le Jardin aux
habitants, 2002 - Surasi Kusolwong, La la la Minimal
Market (Welcome 1 euro) - Quand les objets rêvent (Energie Storage)
À Tsuneko Taniuchi, Micro événement
n°6 bis - Fast Food, 2001 ; Micro événement
n°11, Tsuneko Troc, 2004
IV.3.b À Agir dans l'espace social 87
Mathieu Laurette, What Do They Wear At
Friez Art Fair ?, 2003 À Renaud Auguste Dormeuil,
Tokyorama, 2001
Conclusion 90
Bibliographie 94
Annexes
I. L'idée d'impermanence dans l'art,
aperçu historique 100
II. Inventaire des expositions du Palais de Tokyo
105
2001 106
2002 107
2003 111
2004 113
2005 116
2006 (Directorat Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans)
119
2006 (Directorat Marc-Olivier Wahler) 121
2007 123
2008 126
2009 129
2010 132
2011 136
III. Iconographie 137
8
« The recurrent theme of art since World War II has been the
aesthetics of impermanence. » Harold Rosenberg1
Alors que le Palais de Tokyo fêtera en 2012 son
dixième anniversaire, le mémoire souhaite revenir sur son
programme d'exposition. Il escompte mettre au jour la position curatoriale
de l'institution, révéler un leitmotiv qui serait
apte à relier entre elles les différentes manifestations.
Au premier abord, la programmation du Palais de Tokyo est
marquée par la disparité. Large, des figures de la « fin de
l'art » new-yorkais, tel Steven Parrino ou Sarah Lucas, y côtoient
des personnalités d'un art contemporain africain. Des chantres de
l'esthétique relationnelle y croisent des photographes,
peintres et sculpteurs aux supports traditionnels. Ces contradictions semblent
d'ailleurs assumées, tant les intentions du site de création
contemporaine mettent en exergue une certaine indisposition à forger un
nouveau -isme,2 à éviter tout
écueil de dogmatisme. En énoncé sa programmation veut en
effet refléter l'ensemble de la création. Au travers
d'entretiens, les différents directeurs et commissaires insistent
d'ailleurs sur la nécessaire diversité des
expositions.3
S'il est possible de rapprocher des travaux d'artistes, les
motifs qui président à cette sélection ne peuvent
être que transversaux aux médiums, aux supports, aux courants
générationnels. Le mémoire a ainsi choisi de partir des
oeuvres exposées, afin de révéler via leurs champs
sémantiques, les liens pouvant permettre de les rassembler. Comme pour
un commissariat d'exposition, ce travail souhaite inscrire
1 « Thoughts in an Off-Season » in Art on the
Edge : Creators and Situations, Secker & Warburg, 1976
2 Marc-Olivier Wahler in « Dynasty, regard sur
une génération », Richard Leydier, Art Press 369, juillet
2010
3 « La programmation est aussi significative de
l'extrême souplesse et de la diversité qu'il m'a semblé
nécessaire d'imprimer au lieu ouverture à toutes les tendances
comme à toutes les cultures, attentive à la diversité des
courants esthétiques et sensible aux multiples questionnements du monde
contemporain. » Catherine Tasca, Dossier de presse d'ouverture,
Novembre 2001
« Un espace pour un débat esthétique
ouvert. » Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans, Dossier de presse
d'ouverture, Novembre 2001
« Les principes directeurs de la programmation sont (...)
susceptibles de se voir contredits par un projet ou un autre... C'est au prix
de cette extrême flexibilité que le Palais de Tokyo, joue son
rôle de laboratoire vivant de la création contemporaine. »
Nicolas Bourriaud, Catalogue de l'exposition Notre Histoire, 2006
9
dans un même lieu, des oeuvres qui en se rassemblant,
émane plus identifiable un concept général. Il veut
articuler des expositions aux approches, idées et thèmes
indépendants, montrer, sous un prisme sensible permettant de les
englober, leur complémentarité. Et quand bien même
l'institution se dit miroir réfléchissant de la création,
la sélection qu'impose une programmation sous-entend une vision claire
de l'idée de contemporanéité. C'est cette idée que
le mémoire vise à éclairer. 4
« Ce qui pemet d'agréger au sein d'un même
lieu des artistes poursuivant des buts et employant des méthodes si
hétérogènes, c'est le fait qu'ils travaillent à
partir d'une similaire intuition de l'espace mental contemporain.5
»
Invités à organiser la Biennale de Lyon de 2005,
les co-directeurs du Palais de Tokyo, Nicolas Bourriaud et Jérôme
Sans, montaient leur commissariat autour de l'idée de
temporalité. Nommée L'expérience de la
durée, la Biennale rassemblait des oeuvres ayant en commun, des
modes opératoires usant du temps comme matériau de construction.
Présentée à Lyon, l'installation de Kader Attia,
Flying Rats, incarne ce processus. L'artiste place dans une volière
des sculptures anthropomorphes construites à partir de graines. S'en
nourrissant, les oiseaux donnent une dynamique à l'installation, qui se
désagrége dans le temps. Comme une sorte de banc de montage sur
lequel l'artiste recomposait la réalité, l'oeuvre évoluait
en fonction des fluctuations inhérentes à la temporalité.
Et en l'automatisant, Kader Attia arrivait à figurer l'impermanence.
N'étant à aucun moment tout à fait la même,
Flying Rats contestait la beauté accomplie et l'ordre
éternel.
Depuis longtemps, la création contemporaine tente de
restituer le mouvement, le flux et l'écoulement du temps. Et dans son
imprescriptibilité à pouvoir être pèle mêle
restituer, elle use de divers stratagèmes plastiques pour exprimer cette
fugacité. À la suite d'une réflexion entamée par
les artistes conceptuels des années 1960-1975,
4 « Comment en effet traduire le bouillonnement
créatif de notre époque sans prendre des risques, sans affirmer
des visions singulières de l'art actuel plutôt que se conformer au
commerce et aux conventions ? » Nicolas Bourriaud et Jérôme
Sans, Dossier de presse, 2002
« Notre principe de départ était de
réunir des tendances éparses qui coexistent à
l'état gazeux et de les rendre plus visibles. » Nicolas Bourriaud,
Notre Histoire, 2006
5 GNS, catalogue de l'exposition, 2003
10
notamment Daniel Buren, « la maîtrise de la
durée et des protocoles temporels devient un enjeu esthétique
majeur, au même titre que la maîtrise de l'espace.6
» Aborder l'impermanence du temps sera ainsi l'occasion, par la
programmation du Palais de Tokyo, de faire un inventaire de la création
contemporaine.
Le caractère continuellement changeant de l'oeuvre
d'art, l'incorporation dans celle-ci du facteur temps, la quatrième
dimension, traduisent l'abolition des principes artistiques traditionnels. Dans
le champ sémantique des oeuvres exposées au Palais de Tokyo,
l'idée d'impermanence peut permettre d'aborder une frange importante de
son programme d'exposition.7 Transversale aux écoles, aux
époques et aux mouvements, cette notion À qui recoupe les
recherches sur le temps de l'oeuvre À peut servir d'outil pour lire
transversalement son programme d'exposition. Les thèmes-phares de
l'institution, l'invisible et le visible, le rapport avec la science À
la physique quantique À avec l'occulte, peuvent être
traversé par cette notion. Tandis que le problème de l'espace et
sa représentation dans l'art a occupé l'attention des critiques
d'art, le problème correspondant du temps et de la représentation
du mouvement a été étrangement
négligé.8 Les deux directorats ont cherché
à combler ce déficit :
Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans (2002-2006) :
« Si les artistes de ces deux dernières
décennies ont autant problématisé le temps, c'est parce
qu'il représente un plan sur lequel il est encore possible de tracer des
signes. 9 »
Marc-Olivier Wahler (2006-2011) :
« L'idée de transformation fait partie de la
réflexion globale qui préside depuis Cinq milliards
d'années. S'il n'y a pas de point fixes
6 Nicolas Bourriaud, « Time Specific », op.
cit.
7 Cf annexe 2 pour une vue d'ensemble de la programmation
8 E.H. Gombrich, Movement and Movement in art,
Journal of the Warburg and Courtauld Institute, vol. 27, 1964
9 Nicolas Bourriaud, « Time Specific »
in Expérience de la durée, Paris musées, 2005
11
dans l'espace, il n'y a pas de point fixes dans les
expositions.10 »
L'idée d'impermanence ne s'oppose pas
diamétralement à celle de permanence. Fonctionnant en relation et
non en attribut, ces deux notions ne sont pas monolithiques. Compte tenu de la
diversité des formes et des intentions sous lesquelles l'idée
d'impermanence s'est présentée au Palais de Tokyo, il
apparaît pertinent de parler de motif plutôt que de genre. Ainsi
cette notion peut aussi bien désigner le fugitif, le contingent,
l'éphémère, le fragile que le déséquilibre.
Considéré sous l'angle du transitoire, l'impermanence peut
être l'infime, le négligeable, le dérisoire, le disparu,
l'abandonné.
Marc-Olivier Wahler, interrogé sur son programme
d'exposition, définit cette impermanence en invoquant la notion de
passage :
« Alors que depuis la renaissance, notre culture, nos
cerveaux, notre manière de voir, a été formatée par
la notion de point fixe, les artistes s'intéressent aujourd'hui à
la dynamique du passage, de la transformation, à toutes les variations
possibles des chemins qui peuvent mener d'un point à un
autre.11 »
Dans ses différents essais, Nicolas Bourriaud souligne
l'importance de l'idée d'impermanence dans le programme artistique du
)()(e siècle12. Dans Esthétique
Relationnelle, il réintroduit la notion d' « espace-temps
». Dans le catalogue de la biennale de Lyon, il introduit celle de «
Time Specific ». Dans Formes de vie, il dresse un historique de
l'idée d'éphémère, mettant en parallèle les
penseurs grecs rétifs à la trace, Socrate, Diogène, et les
figures marquantes de la modernité.
Les oeuvres présentées dans ce mémoire
auront ainsi toutes en commun, comme défini par les deux directorats de
l'institution, d'ouvrir à une compréhension de la matière
fluide du temps, non en la figurant, mais en la rendant sensible.
Différent
10 Veronica Da Costa, « Marc-Olivier
Wahler. L'art contemporain dans son champ élargi » in Revue
Mouvement, Juillet À Septembre 2009
11 Anni Puolakka & Jenna Sutela « The art
and science of the invisible À OK Do met Marc-Olivier Wahler of Palais
de Tokyo » in OK Do, décembre 2009
12 Un aperçu historique de l'idée d'impermanence
dans l'art peut être trouvé en annexe 1
12
d'un sujet d'histoire de l'art, l'objectif du mémoire
n'est pas seulement de montrer la persistance de la marque de son impermanence
dans la création contemporaine. Il s'agit aussi de s'interroger sur
l'idée d'une programmation, et de mettre à jour les liens qui
peuvent la conglomérer.
Problématique :
Quelles sont les modalités de représentation des
différents aspects de l'impermanence au sein de la programmation du
Palais de Tokyo ?
13
I. Contre le monument : précarité,
fragilité et destruction sculpturale
Formé à partir du latin moneo, se
remémorer, le monument célèbre traditionnellement une
personne, un événement. Sa fonction est mémorielle et
édifiante. De large dimension À monumental - il appelle
le passant dans sa conscience historique, lui rappelle son devoir de
révérence. La pensée occidentale s'organise
hiérarchiquement autour de ce monument, non seulement en architecture,
mais aussi en art, littérature et philosophie. Dans ce système
intellectuel, une idée ne peut acquérir une réelle
résonance qu'en se matérialisant, qu'en étant transformer
en un objet solide capable de la commémorer durablement. Au sommet, le
monument est la pierre d'ancrage qui permet au protagoniste de communiquer.
À ce titre, il peut être considéré comme une mise en
ordre, une mémoire implacable qui incarnerait la figure de
l'autorité. Pour George Bataille, le monument est « l'expression de
l'être même des sociétés :
Les grands monuments s'élèvent comme des digues,
opposant la logique de la majesté et de l'autorité à tous
les éléments troubles : c'est sous la forme des
cathédrales et des palais que l'Eglise ou l'Etat s'adressent et imposent
silence aux multitudes. Chaque fois que la composition architecturale
se retrouve ailleurs que dans les monuments (...) peut on inférer
un goût prédominant de l'autorité humaine. 13 »
Les conceptions normées qu'imposent les canons
esthétiques et les règles du voir, incarnées ici par la
figure du monument, brident l'expression profonde de l'être. La
symétrie des villes et le rationalisme qui la sous-entend sont autant de
barrières dressées contre la nature impulsive, le spontané
de l'homme. George Bataille lie dès lors la lutte contre le monument et
la modernité. Dans tous les domaines des arts, la disparition de la
« composition architecturale » que sous-entendait l'académisme
est selon l'écrivain, « la voie ouverte à l'expression, par
là même à l'exaltation. » Le déclin du
monumentale peut être ainsi perçu comme un symptôme de nos
sociétés
13 Georges Bataille, « Architecture » in
Dictionnaire critique, L'écarlate, 1993
14
modernes, celui du défi lancé à tous ceux
qui voudraient affirmer une position d'autorité. Par lassitude et
irrévérence devant les grands symboles, des artistes comme
Karsten Födinger, Michel Blazy, Florian Pugnaire, Romain Signer, Robert
Gober, répugnent à servir la mise en scène de
stabilité qui s'extrapole traditionnellement de la figure du monument.
Ces artistes refusent de servir de décorateur, de servir un grandiose en
quête d'esthétisation. Cette première partie sera
l'occasion d'analyser À à partir de la programmation du Palais de
Tokyo À le déclin de l'autorité sculpturale, entendu ici
comme profondément lié à « l'apparition d'un art
prodigue d'anti-monuments.14 » Dans ses choix
curatoriaux, l'institution valorisait des pratiques artistiques mettant en
valeur le fragile et l'éphémère, le
déséquilibre et l'auto destruction. Et si les oeuvres usent de
procédés divers pour désacraliser le désir
d'éternité, lié à la fonction traditionnelle du
monument, un rapprochement peut être ici opéré dans les
visées que ces oeuvres sous-entendent. Lorsque Michael Elmgreen et
Sébastien Vonier exposent des matériaux de chantiers bruts, ils
opèrent la mise en vestige de l'institution. Comme des ruines
suggèrent en symbolique le transitoire, leurs installations donnaient
surtout à voir la fuite du temps. (chap. 1) Plus en prise avec le
réel, les oeuvres de Michel Blazy montrent le processus de dilatement du
temps en s'entachant de sa marche. Quant à Florian Pugnaire & David
Raffini, ils usent de la mécanique pour montrer ce lent
anéantissement. (chap. 2) A ce corpus d'oeuvre peut être
rattaché des travaux proposant l'illusion d'espace temps annexe. Etienne
Bossut, Ryan Gander, Vincent Lamoureux présentaient des trappes pour se
soustraire du réel, pour disparaître dans une temporalité
autre. (chap. 3)
I.1 Une esthétique du ruiniforme
I.1.a À Un espace d'exposition en friche
Au sein d'une institution qui a, dès son origine aucune
vocation à perdurer15, l'idée d'impermanence se fait
sensible dès l'ouverture. Invités à réhabiliter le
lieu laissé en
14 Paul Ardenne, Art le présent, 2009
15 En 2002, le Palais de Tokyo n'a de certitude de
financement que de trois ans. La qualité des expositions et le nombre de
visiteur permettront de prolonger l'expérience.
15
état de chantier après l'échec du projet
de cinémathèque française qui devait s'y implanter dans
les années 1990, les architectes Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal
vont entretenir l'aspect brut du bâtiment. Derrière une
façade monumentale, le Palais de Tokyo prend ainsi la forme d'une friche
industrielle. Cette quasi mise en état de chantier permanent du
bâtiment fait apparaître l'institution comme non tout à fait
structurée, position architecturale qui rejoint les courants
architecturaux les plus contemporains.16 Et les deux architectes de
préciser :
« Créer de la porosité : entendre la pluie,
voir la lumière et le soleil entrer, voir la ville, multiplier les
accès.17 »
En 2000, Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal imaginent le
Palais de Tokyo comme un espace public mobile, en mouvement permanent. En
fonction de ses acteurs, ses espaces veulent pouvoir être
modifiés. Leurs travaux de réaménagement ne sont donc pas
l'occasion de stabiliser l'espace en y imposant découpes rigides et
cloisonnements fermés, mais l'occasion de le faire bouger, de multiplier
les échanges entre corps et bâtiment, entre conscience et forme
architecturée. L'esthétique de distorsion que met en scène
le duo d'architecte affiche ainsi cette vocation critique : signifier combien
la rigidité, en termes de « composition architecturale »
verrouille négativement les jeux d'espaces, les figent dans le
monumental. Se définissant eux-mêmes comme les « artisans
d'un arte povera de l'architecture18 », les architectes mettent
en valeur des matériaux comme le plastique et les cornières en
aluminium, donnant à l'ensemble de l'édifice un aspect non-fini,
en permanent devenir. Ces choix architecturaux font le culte du changement
permanent. L'allègement systématique de l'architecture confine
presque à sa disparition, à son élimination en tant que
force rétrograde créatrice d'inertie. La position architecturale
du Palais de Tokyo rappelle à ce titre les appels futuristes. Pour un
renouvellement des idéaux de beauté, Antonio Sant'Elia
préconisait dans son Manifeste de l'architecture futuriste de
créer des maisons ayant une durée de
16 Le « déconstructivisme » notamment
17 Cité par Jean-Louis Pradel, in «
Palais de Tokyo - L'art en chantier », Beaux Arts magazine, Janvier
2002
18 Entretien avec Philippe Tretiack, Beaux Arts
magazine, février 2001
16
vide moindre que les architectes.19 A son tour, le
Palais de Tokyo favorise l'anti-monumental. Ayant mis en place une architecture
légère, dynamique, capable d'adaptation quotidienne, les
principes directeurs de la réhabilitation ont été
reconduits en 2011. Actuellement en travaux en vue d'un agrandissement
conséquent de ses espaces À ouverture de l'espace du parvis de la
fontaine À le Palais de Tokyo a demandé à Anne Lacaton et
Jean-Philippe Vassal de poursuivre leurs épurations architecturales.
Prévu pour 2012, la réouverture de l'institution sera l'occasion
de constater la persistance de la marque de l'impermanence À entendu
comme une adaptabilité progressive qui ne bribe aucun avenir À au
sein d'un bâtiment qui au premier abord, reste figé dans la
monumentalité des années 1930.
I.1.b. Des ruines comme expôt
C'est dans cette atmosphère de friche industrielle
où l'on ne sait tout à fait si le chantier a bien
été terminé que le site de création contemporaine
ouvre ses portes en 2002. Liée à la mélancolie qui tombe
sur l'être dès lors qu'il prend conscience du temps qui
inéluctablement passe, une poétique des ruines prend vite forme
dans son programme d'exposition. Dès l'ouverture, le Palais de Tokyo
montrait une pièce de Kay Hassan. Pour son installation,
Johannesburg by day20, l'artiste sud-africain
présentait dans un couloir des débris, les restes d'une fugue,
d'une migration qui se serait subitement interrompu. Des sacs de voyage
parsemaient l'espace d'une situation cacophonique, personne ne sachant tout
à fait si le départ restait imminent ou s'il s'agissait d'un
ancrage arrêté. En présentant cette pièce, les
co-directeurs de l'institution, Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans,
faisait une analogie entre la situation de l'institution - qui en 2002 n'a pas
encore vocation à perdurer - et l'installation de Kay Hassan qui
suggère que rien ne puisse être totalement arrêté.
Dans la même exposition, Loris Cecchini
présentait Breastwork21, des gaines de combustibles
vieillis par le temps. Comme si elles appartenaient à une
époque
19 Antonio Sant'Elia : « Les
caractères fondamentaux de l'architecture futuriste seront la
caducité et le fait d'être provisoire. Les choses dureront moins
que nous. Chaque génération devra fabriquer sa propre ville.
» Manifeste de l'architecture futuriste, 1914
20 Fig. # 1
21 Fig. # 2
17
révolue, cette installation plaçait le
spectateur dans un futur suggéré, des disjoncteurs s'affichant
comme des reliques d'une énergie électrique
dépassée. La mise en scène de ces vestiges, bien qu'il
s'agisse ici d'une reconstitution, séduisait pour ses qualités
évocatrices. Car les ruines renvoient toujours l'image de celui qui les
regarde. En suscitant le souvenir de ce qui fut, le spectateur contemple dans
les ruines l'image familière de l'écoulement du temps. En cela
les ruines « ne représentent pas l'espace extérieur mais
l'expérience intérieure22 », puisque
l'impermanence touche l'intériorité de tous les êtres. Et
représentant l'histoire comme un processus irréversible, les
ruines agissent comme une allégorie de la dissolution, de la
déchéance certaine. Plus précisément, Walter
Benjamin parle des ruines comme d'un symbole qui permet au «
présent d'ouvrir sur une vision du futur qui rappelle le
passé.23 » Par la perte de l'unité et de la
complétude dont elles sont le symptôme, les ruines ne signifient
pas seulement notre condition de mortels. En montrant l'échec de toute
persistance, les gaines électriques vieillies de Loris Cecchini
figuraient implicitement l'effacement du point vers lequel converge notre
marche. Et en usant d'un motif banal, l'artiste parvenait à
désigner la société entière, de telle sorte que son
installation ne témoignait pas du passé, mais de l'impermanence
du maintenant.
Toujours dans l'exposition d'ouverture, les plaques de ciment
répandus par Michael Elmgreen & Ingar Dragset24
rappelaient les vestiges détruits, abîmés et
dépassés de formes monumentales qui se seraient
effondrées. Des fragments architecturaux, comme détruits par le
délitement du polissage du temps, se plaçaient frêle au
centre de l'espace d'exposition. Pouvant être considéré
comme le passage de la représentation à la présentation,
l'art contemporain met en scène plus qu'il n'use de signe. Ainsi, le
travail de Michael Elmgreen & Ingar Dragset pouvait faire penser à
la reconstitution dans le réel d'une peinture romantique aux motifs
ruiniformes.25 Mais à l'opposé de l'image du
romantique pris de mélancolie devant les ruines, ce travail n'offrait
pas l'occasion d'exprimer un passéisme distant devant la fuite du temps.
Rapprochée des oeuvres de Kay Hassan et de Lorris Cecchini,
l'exposition
22 Fabrice Hergott, « Un aspect de l'art des
artistes allemands nés sous le nazisme », in L'art devenu
histoire, Hazan, 2006
23 Walter Benjamin, Charles Baudelaire. Un
poète lyrique à l'apogée du capitalisme, Petite
Bibliothèque Payot, 1979
24 Fig. # 3
25 Notamment Hubert Rober, Caspar Friedrich
18
d'ouverture du Palais de Tokyo peut être
considérée comme un appel à la reconnaissance de la
friabilité des choses. En montrant la fugitivité, ces travaux
utilisaient l'expression de l'éphémère comme vecteur
esthétique, dénonçait abjectement toute forme de
stabilité, de monumentalité. En exposant des vestiges,
l'exposition valorisait ce qui n'est donné à voir qu'une seule
fois.
Appelé à venir réexposer lors du
directorat de Marc-Olivier Wahler, Lorris Cecchini proposait en 2007, une
installation de grande ampleur. Intitulé Empty Walls - Just
Doors26, l'artiste assemblait un labyrinthe de porte presque
flasque, marquées par la décrépitude. Faisant penser aux
collages architecturaux de Kurt Schwitters, les portes de Loris Cecchini
montraient l'usure et la dégradation, soulignaient les qualités
poétiques de ces matériaux usés et platinés. Dans
un dédale d'interstice où les voies de sorties étaient
difficilement identifiable, son installation prenait racine dans l'iconographie
traditionnelle de la mélancolie, « un champ de ruines
parsemé de vestiges monumentaux27 ». Comme ce qu'il
serait resté après le passage d'un accident, ces portes
étaient autant de trace d'une habitation disparue,
l'esthétiquement intéressant de ces ruines prenant appui sur la
tentative de spectateur de reconstruire l'histoire, les circonstances de cet
accident :
« Le présent se donne comme ruine tandis que la
catastrophe devient le paradigme de l'événement.28
»
À ce corpus d'oeuvre, peut être rapproché
l'exposition personnelle de Sandra Lorenzi, La Nébuleuse de
l'homoncule29. Présenté en 2011 dans l'espace
d'un des modules, le spectateur apercevait d'abord une cabane de bois qui se
dressait frêle au centre de la pièce. Entourée de fortins
miniaturisés, c'était comme si cette bâtisse venait de
survivre à une attaque. Proposant une narration qui jonglait sur
différents espaces temporels, l'artiste nommait judicieusement cette
pièce, L'édifice persistant.
26 Fig. #4
27 Jean Starobinski, La mélancolie au
miroir, Julliard, 1989
28 Françoise Proust, L'histoire à
contretemps. Le temps historique chez Walter Benjamin, Le Livre de Poche,
1994
29 Fig. #5
19
I.1.c À De la fragilité sculpturale
Ayant l'ambition d'accompagner les artistes dans la
durée, le Palais de Tokyo présentait quatre fois le travail de
l'artiste Vincent Ganivet.30 En étudiant les techniques de
l'architecture, les forces de tractions et de compression, l'artiste
réalise des structures impressionnantes : des arcs sans voûte,
sans édifice, à la fois flottant dans l'espace et violemment
plantés dans le sol. Ses structures tiennent par des cales de bois, qui
en soutenant l'édifice, le mettent aussi dans un précaire
équilibre. Proche du point de rupture, la chute semble immanente, mais
à jamais repoussé. Pour Dynasty, l'artiste
présentait Caténaires31 : des arches
autoportantes en parpaings qui évoquent à la fois le chantier de
construction et le squelette architectural des cathédrales romanes.
« Au Palais de Tokyo, j'ai complexifié les formes
en faisant une seule arche sur trois pieds différents, ce qui donne un
ensemble plus déséquilibré. Ce sont des pièces
massives mais fragiles. Des sangles, des cales et des étais de
sécurité matérialisent cette fragilité. (...)
L'apparente fragilité de mes sculptures laisse imaginer au spectateur un
danger imminent.32 »
Dans la même optique, Daniel Firman présentait
à l'occasion de la session (un ensemble d'expositions)
Superdome, un éléphant taxidermisé qui tenait en
équilibre sur la trompe, les pattes vers les airs comme pour provoquer
le ciel. Se jouant des contraintes terrestres, l'équilibre fragile de
l'éléphant semblait irrémédiablement tendre vers la
chute. Donnant à voir l'instant qui précède le
désastre, ces installations jouent avec l'impermanence du temps, le
spectateur étant amené à se figurer mentalement le point
de rupture, l'inconstance de l'édifice.
Alors que le Palais de Tokyo se prépare actuellement
à des travaux de réaménagements, un cycle d'exposition s'y
greffait comme en écho. Laissées en
30 Présenté en décembre 2007 dans
un des modules, on retrouve l'artiste dans un projet hors les murs (vitrines de
la galerie Lafayette, 2009), dans un chalet de Tokyo à Séoul
(2009). À l'occasion de Dynasty (2010), l'artiste expose une
pièce maîtresse, Caténaires.
31 Fig. #6
32 Elisa Hervelin, Interview sur paris-art, 14 juillet 2010
20
l'état d'un processus encore non abouti, ces
installations troublaient le spectateur mal averti. Beaucoup passèrent
leur chemin, comme étonné d'avoir par mégarde
pénétré dans ce qu'il considérait comme un
chantier. Sébastien Vonier présentait par exemple
Névés,33 des plaques de béton
brutes auxquelles étaient rattachées des fibres de fer. En
équilibre, ces plaques voguaient au grand jour alors que d'ordinaire,
elles supportent ancrées les fondations des édifices. Outils et
matériaux de constructions laissés apparents, l'installation
dévoilait les ossatures qui permettent de faire tenir nos villes. Dans
l'espace d'exposition concomitant, Karsten Födinger présentait
Cantilever,34 une énorme plaque de ciment
portée en éloge par des échafaudages bruts. Dans ses
autres travaux, l'artiste insère des cales entre les immeubles, comme
pour souligner le déséquilibre, leur donner cette béquille
qui leur permettrait de perdurer. Révélant la fragilité
des structures, ces deux artistes mettent en valeur l'instabilité des
fondations sur lesquelles reposent nos édifices. Et en dévoilant
ces césures, c'est une fébrile sensation qui en mouvement vient
contredire l'architecture comme édifice stable, faisant de
l'impermanence de leurs fondations, le motif esthétique vecteur de leur
attrait.
I.2. Des processus de désagrégation
De la vapeur d'eau qui s'estampille dans l'air, de la mousse
de savon qui vient envahir la salle d'un musée : la création
contemporaine sculpte une matérialité vagabonde. Par l'usage de
matériaux pauvres qui se décomposent, de mécanismes de
destructions qui liment leurs présences, ces oeuvres évolutives,
statique mais d'essence ambulatoire, questionnent la relation entre l'art et
son immutabilité.
« Le retrait esthétique fraie la voie au
process art - dans lequel les forces chimiques, biologiques, physiques ou
encore le cycle des saisons, exercent leurs effets sur les matériaux
d'origine, en modifiant leur forme ou en les détruisant, comme c'est le
cas dans les oeuvres comportant des herbes qui poussent, des bactéries
qui
33 Fig. #7
34 Fig. #8
21
prolifèrent ou qui attirent la rouille - ainsi qu'à
l'art aléatoire, dans lequel c'est le hasard qui détermine la
forme et le contenu.35 »
L'impermanence du temps, bien qu'il n'en soit pas le
thème unique, joue un rôle capital dans le corpus ici
présenté. Ces artistes montrent des processus simples, lents et
monotones, aptes à insérer les flux de la vie dans l'oeuvre. Et
comme bon nombre de ces oeuvres demandent des jours, des semaines pour se
mutiler, l'expérience du temps vise souvent moins à mettre en
scène du temps vécu que du temps représenté.
I.2.a À La consommation physique de l'oeuvre
Au tournant des années 1960, les artistes du Land
Art et de l'Arte Povera interrogent la pérennité de
l'oeuvre. Ces mouvements tendent à sa disparition et participent au
développement d'un courant plus large qui intégrera son devenir
ruine. Lorsque Robert Smithson coule de l'asphalte depuis la benne d'un camion,
il intègre l'impermanence du temps, la destruction programmée de
l'oeuvre comme motif esthétique principal. En utilisant des
matériaux périssables comme médium artistique, Giuseppe
Penone active les mêmes processus. Les préoccupations d'un art
anti-monumental36, où l'oeuvre aurait une existence propre et
périssable, trouvent leurs aboutissants contemporains dans certaines
expositions du Palais de Tokyo. Invité à présenter cinq
fois ses travaux37, présent dans les deux directorats de
l'institution, Michel Blazy peut être considéré comme l'un
des artistes au centre de sa programmation. Ses travaux correspondent bien
à l'idée de sculpture orpheline : une existence propre, un
devenir unique, incertain dans ses fluctuations quoique évidentes dans
ses fins. Michel Blazy rejoint en cela les positions des courants artistiques
de l'après-guerre : il ne conçoit pas l'oeuvre d'art comme un
objet statique. Privilégiant les matières pauvres, voire
comestibles, l'artiste laisse libre champ au
35 Harold Rosenberg, La
Dé-définition de l'art (1972), Chambon, 1992
36 « La principale occupation du monument est de rester
immobile, d'être enraciné en permanence dans le sol, de s'abstenir
de tout mouvement visible. » in Krzysztof Wodiczko, Projection
publique, 1983
37 Exposition : Face à Face #1 : Michel
Blazy/Tetsumi Kudo (2004) ; Cinq milliards d'années (2006)
; Post Patman (2007) ; Château de Tokyo (expo hors les
murs, 2007)
Programmation vidéo (2004) : Voyage au centre ;
Green Peeper Gate ; Multivers
22
hasard et à la beauté de
l'éphémère. Ayant comme vertu principale de pouvoir se
décomposer, l'artiste sculpte de la matière organique, du liquide
vaisselle, du papier hygiénique... Paradoxalement, c'est cette
décomposition anticipée qui fait vivre la sculpture.
« Le hasard est accepté et
l'indétermination prise en compte, puisqu'une nouvelle mise en place
entraînera une autre configuration. (...) Cela fait partie du refus de
continuer à esthétiser la forme d'une oeuvre en concevant cette
forme comme une fin prescrite.38 »
Dégénérescence des formes, germination
souhaitée ou accidentelle, dégradation des surfaces, le temps qui
supporte ces évolutions devient un acteur de premier plan. Car dans la
lignée des sculptures de glace d'Andy Goldsworthy ou d'Allan Kaprow, les
oeuvres de Michel Blazy adoptent une temporalité qui correspond à
la durée d'existence propre aux médiums employés.
Grâce aux techniques qui permettent de le documenter, les oeuvres de
Michel Blazy offre ainsi la vision d'un processus en acte. Et en usant de la
décomposition organique, l'éphémère se saisit du
médium lui-même, dans un déplacement interne aux
surfaces.
Dans l'exposition Post Patman39, Michel
Blazy modifie et nourri régulièrement les oeuvres, intervenant
ainsi dans le processus même de l'exposition. La purée de carotte
qui habille les murs du Palais de Tokyo pour l'exposition M, Nouvelle du
monde renversé40 se dessèche, pèle puis
pourrit. Avec sa pièce, Mur qui pèle, Blazy calque sur
un mur de la farine qui au contact de l'eau se corrompt, éclot par
éclat, fait décrépir l'institution. Aussi, les
vidéos qu'il présente en 2004 partent à la
découverte d'un monde ignoré, celui de la dégradation, du
pourrissement comme phénomène créatif. Dans Voyage au
centre, une caméra observe pendant plusieurs semaines les
transformations de végétaux sous l'action de l'oxydation de l'air
et divers liquide. En accéléré, ce processus fait
hésiter le spectateur entre l'attirance pour un univers de forme
inconnue et le dégoût par la connaissance anticipée d'une
fin inévitable. Car
38 Robert Morris, « Anti-Form » in
Artforum, avril 1968
39 Fig. #9
40 Fig. #10
23
implicitement, le spectateur est invité à
attendre l'événement qui sera la décomposition totale de
l'oeuvre. Événement à venir mais dont le temps d'attente
n'est pas précisé, le spectateur est invité à vivre
le temps en conscience, donc à se le représenter. En exhibant les
processus de dégradation, Michel Blazy met ainsi en acte
l'éphémère, désignant le temps et la mort sans plus
de distance métaphorique. Cette mise en forme du processus lui permet
d'ailleurs de jouer sur deux registres, celui, esthétique de la
métamorphose, de la transsubstantiation continuelle, celui philosophique
de l'existentiel. Et par l'éloge de la fragilité, le
caractère éphémère de l'oeuvre agit comme un
révélateur de l'impermanence des choses terrestres. L'art rompt
avec sa tentation d'éternité, pour redevenir ce qu'il lui a
permis d'être, la violente conscience d'entrevoir le vide sur ce qui le
remplit. En reconnaissant le friable et le temporel, les oeuvres de Michel
Blazy délivre ainsi l'homme du secret de sa peur, la mort, en mettant
à l'honneur l'impermanence.
Intitulé Monument en sucre (2007),
l'exposition du duo d'artiste Lonnie van Brummelen & Siebren de Haan jouait
aussi sur le registre de la décomposition organique. Des blocs de sucres
imposants étaient symétriquement alignés dans l'espace
d'exposition des modules. Comme pour Michel Blazy, le pouvoir de fascination de
cette installation résidait dans cette disparition d'abord
annoncée. Rappelant Le plus gros savon du monde de Fabrice
Hyber, un savon de 27 tonnes laissé pèle mêle sur la plage
de manière à ce que sa matérialité soit
amenée à fluctuer en fonction des aléas de la
météo, l'exposition Monuments en sucre frappait par
cette fragilité. D'une constance brève, la friabilité du
sucre donnait aux sculptures l'aura de l'éphémère.
I.2.b À La destruction de l'oeuvre
Au contact de Robert Rauschenberg lors de son voyage au
Etats-unis, Jean Tinguely va avoir l'idée d'une « machine
autodestructrice41 ». Hommage à New-York en est
la grandiose réalisation. Comme les machines de Tinguely, les travaux
ici présentés
41 Pontus Hulten, Tinguely, Centre George
Pompidou, 1988
24
sont autant d'exemple du process art, autant
d'oeuvres évolutives qui mettent en avant « le processus de
déréalisation et ses évolutions possibles dans le
temps.42 »
Le Palais de Tokyo va en effet présenter des machines
aux comportements incongrus, comme celles du duo d'artiste Florian Pugnaire
& David Raffini. Leurs deux expositions, Expanded
Crash43 et In Fine étaient pour l'institution
l'occasion d'affirmer l'art en temps que processus de transformation, de porter
l'anéantissement comme élément constitutif de l'oeuvre.
Ces deux travaux étaient respectivement engagés dans une
destruction progressive, destruction qui constituait du même coup le
motif esthétique et l'unique finalité. Le duo d'artiste
installait en elles-mêmes l'inéluctable déroulement du
processus destructeur qui allait les mener à leurs pertes. Dans un
état de changement continu, ces oeuvres retournaient l'usage de la
technologie, car pour permettre aux machines de s'autodétruire il avait
précisément fallu le savoir technologique qui leur avait permis
d'être construites.
« Au modernisme qui dissimulait le chaos à
l'intérieur de l'art, il convient d'opposer un art qui fait du chaos sa
matière et son ordre.44 »
À l'occasion d'une exposition dans l'espace des modules
en mars 2009, Florian Pugnaire & David Raffini présentait
Expanded Crash, une voiture 2cv dont la matière était
amenée à se contracter progressivement. Transformation
irréversible actionnée par un mécanisme interne à
la machine, la tôle se déformait, se compressait au fur et
à mesure de la durée de l'exposition. Pour In Fine, le
duo d'artiste installait une tractopelle dans les espaces inférieurs du
Palais du Tokyo À la friche À En quatre phases
opératoires, l'engin se repliait progressivement sur lui-même,
causant à la dernière étape, sa propre destruction. Ne
restait ainsi à la fin de l'exposition que le « cadavre » de
ce tractopelle, un tas de bouts de ferraille imposant qui s'était servi
de sa force pour se mutiler. Dans un chapitre du Nouveau
réalisme, « Quand la machine devient démiurge »,
Pierre Restany commente les travaux de Jean Tinguely en parlant de «
modalité dynamique d'appropriation et de présentation.
» Les oeuvres de
42 Mathilde Ferrer (dir.), « Process Art »
in Groupes, mouvements, tendances de l'art contemporain depuis 1945,
ENSB, 2001
43 Fig. #12
44 Christine Buci-Glucksmann, L'OEil
cartographique de l'art, Galilée, 1996
25
Florian Pugnaire & David Raffini usent aussi de la
sculpture comme un événement, comme un processus mouvant.
L'oeuvre tente de libérer l'art de sa dimension matérielle en
s'auto détruisant, s'accordant pour se faire une vie propre, se rendant
éphémère. Cet instinct destructeur est d'ailleurs le
garant négatif mais fondamental de la qualité esthétique
de l'oeuvre. C'est ainsi qu'elle se libère de son rôle de
monument, de son fétichisme paralysant. En donnant une existence
autonome à l'objet, le spectateur peut percevoir le destin propre de
l'oeuvre qui l'amènera après l'usure, à son
anéantissement.
En parallèle de cette exposition, peut être
rapproché le travail de Jean-Marie Blanchet, Adhésif sur
mur45. Son oeuvre vidéo montre une grille noire se
décoller jusqu'à laisser l'écran complètement vide.
Lentement, la composition picturale s'annule, signifiant symboliquement
l'impossible adhérence du médium, un adhésif noir, sur le
support. Comme rentrées en jeu avec les nerfs des spectateurs, ces
oeuvres suggéraient chacune à leur manière
l'inéluctable de notre condition dont le devenir est avant tout un
compte à rebours, une disparition annoncée auquel personne ne
sait s'astreindre.
Dans la même logique de destruction sculpturale mais
usant d'autre procédé, peut être rapproché la
performance proposée par Laurent Moriceau, Killing me
Softly46, qui prit place en 2003 dans une des alcôves du
Palais de Tokyo. En usant d'un moule à échelle un, l'artiste
faisait une sculpture de chocolat de son propre corps. Posée sur une
table au milieu d'une foule mise en appétit, des marteaux étaient
mis à disposition afin que chacun dans le public puisse briser cette
sculpture pour venir y récolter un morceau de cacao. Expérience
collective de la destruction d'une oeuvre, la disparition de celle ci
était l'objectif et le motif esthétique du processus,
éphémère de par nature. Ecrasé sous la multitude
qui le martèle de coup, l'oeuvre disparut vite. Et en allégorie
de cette destruction sculpturale, ce spectacle rappelait aux regardants la
lente destruction qui abîme aussi leurs corps. Être de finitudes
voués à ne pouvoir durer, corps monuments égarés
dans l'éternité du temps dont les vies prennent tout au mieux le
rang de brèves gesticulations rythmiques, la performance de Laurent
Moriceau était une belle métaphore de l'impermanence du temps. Et
si le spectateur
45 Fig. #11
46 Fig. #13 - #14
26
amusé pouvait au premier abord user de ses forces pour
détruire cette sculpture de chocolat, la culpabilité le ramenait
sur le chemin de son retour à sa propre condition d'être
mortel.
D'autres installations encore mettaient en scène la
destruction, usant d'illusions pour susciter l'impression de chaos.
Déjà présenté par Jérôme Sans lors de
l'exposition Hardcore, vers un nouvel activisme, Marc-Olivier Wahler
réexposait à l'occasion du programme hors les murs à
Fontainebleau le travail de l'artiste danois Henrik Plenge Jacobsen. Un filet
de fumée opaque prenait par intermittence forme au-dessus de
l'entrée du château. Rappelant le désastre, la catastrophe,
sa pièce Smoke dissimulait le portique d'entrée en
laissant une machine à fumée distiller ses vapeurs à
l'imitation de cendre. Instiguant le doute et interpellant le spectateur, la
fumée rendait caustique la pierre du château cinq fois centenaire.
Et si ici le processus de destruction n'était que suggéré,
comme par un tour de prestidigitateur, Smoke répondait aux
mêmes ambitions que les pièces précédemment
évoquées : susciter le doute sur l'immutabilité de la
matière, montrer en esthétisant la décrépitude,
l'impermanence du temps et les possibles bouleversements à venir.
I.2.c À L'emballement mécanique : le
hasard et l'aléatoire
En pleine première guerre mondiale, les dadaïstes
prennent soudain conscience que la rationalité, sous le couvert
d'apporter des réponses à même de faire évoluer la
société, n'a pu au final apporter que guerres et
désespoir. Réinsuffler du hasard et de la
spontanéité dans les interstices de la société,
tels étaient leurs ambitions, étant sûr que le naturel de
l'être serait plus à même d'engendrer la paix, le bonheur et
la sérénité. À notre époque, la critique de
la raison se déplace de l'humain aux machines, les gages
d'infaillibilités offertes par cette dernière étant remis
en cause par les artistes contemporains. Alors que ces machines sont
censées offrir la stabilité industrielle à même de
soulager les efforts de l'humanité, les oeuvres présentées
ici critiquent cette posture. En y insérant de
l'imprévisibilité, il retourne la technologie en y
dévoilant intrinsèque à la machine, son
irrationalité.
27
Présenté lors de la session Superdome
et pour l'exposition hors les murs à Fontainebleau, le travail
d'Arcangelo Sassolino, se concentre sur les procédés techniques
et utilise le plus souvent des matériaux industriels. Sa série la
plus célèbre, Rimozione, est une plaque de béton
simplement scalpé du sol, en lévitation au-dessus du trou
béat laissé par cette incision. Ses créations montrent
simultanément l'accomplissement humain et technologique, mettant en
même temps à nu leur potentiel de destruction. Pour la session
Superdome l'artiste présentait Afasia 1, une
installation qui explore les comportements mécaniques d'une machinerie
robuste. Grâce à de l'azote comprimé, un lanceur propulsait
des bouteilles de verres à plus de 600 Km/heure. Le canon chargé
plaçait le visiteur dans une attente angoissante. Sans décompte
affiché, rien ne préciser le moment de la détente, si
fugace, que seul le bruit lourd dégagé permettait de certifier
que le tir avait bien eu lieu. En face du canon, un écran de
métal servait de bouclier tandis qu'à ses pieds, des
résidus de bouteilles vides formaient un tapis de verre, tapis devenu
montagne au moment du démontage. À Fontainebleau, Arcangelo
Sassolino présentait Sans titre47 un
mécanisme destructeur doté de détecteur de mouvement qui
rompait en deux des bûches de bois. En mettant au jour un processus de
destruction, ces deux oeuvres semblent vouloir affirmer un profond pessimisme
face à la capacité fonctionnelle des machines. Evolutives et
destructrices, elles incorporaient dans leur structure, les fluctuations qui
disent impermanence au temps.
Présenté lors de l'exposition d'ouverture du
mandat de Marc-Olivier Wahler, le travail de Kris Vleeschouwer, Glassworks
II se présentait sous la forme d'une étagère de
métal sur laquelle reposait dans un précaire équilibre,
des dizaines de bouteilles de verre. S'activant par intermittences non
programmées, un moteur venait ébranler la structure et faisait
tomber dans un fracas sonore les bouteilles qui reposaient en son bord. Du fait
de son déclenchement aléatoire, cette proposition insérait
une dimension temporelle qui fait penser à l'installation de Jean
Tinguely aux grands magasins Victor Loeb de Berne. Intitulé Rotozaza
III, cette machine longue de huit mètres détruisait douze
mille assiettes en quelques jours. Ces deux travaux offrent à voir le
processus artistique incontrôlable. Des mutations entre l'idée
originale et sa transmission sur le médium peuvent en effet faire penser
à une automatisation forcée
47 Fig. #15
28
que l'artiste ne pourra jamais entièrement
contrôler. Insérer ces processus dans le temps de l'oeuvre est
gage d'authenticité, car rendant compte de cet aspect insaisissable,
elles en permettent la lecture.
Définissant lui-même ses oeuvres comme autant d'
« Actions Sculpturales », Roman Signer a été
exposé cinq fois au Palais de Tokyo.48 Pour l'exposition
Une seconde, une année, l'artiste installait une valise close
au milieu des espaces de l'institution. Et si de l'extérieur rien ne
transparaît, un feu de détresse en attente d'animation somnolait
à l'intérieur. Lorsqu'il s'activa, la valise s'ouvrit, annulant
ainsi l'oeuvre qui apparaissait dès lors comme le vestige d'un processus
passé. Ouverte et grillée, la valise avait muté. On
retrouve aussi ces continuités brusquement rompues dans d'autres travaux
de Roman Signer. En 2009, à l'occasion d'une exposition personnelle au
sein de la session Gakona, l'artiste suisse présentait
Tables, une sculpture temps qui s'activait de manière fugitive.
Dansant en suspension au gré d'une poussée d'air
irrégulière, ce travail reprenait à son compte
l'impermanence du temps. Comme pour Valise, il n'y a dans ses oeuvres
rien qui ne tient vraiment mais c'est précisément dans ce vide
que tout se joue.
Marquées par la notion d'activation, ces installations
semblaient en berne. Subitement en mouvement, elles annulaient l'instant
d'après leurs présences. C'est en activant des processus que les
travaux d'Arcangelo Sassolino, de Kris Vleeschouwer et de Roman Signer
rejoignent la notion d'impermanence. Non statique, une essence ambulatoire les
fait s'actionner, dans une temporalité brève, furtive comme
fugitive. Comme la Lampe annuelle d'Alighiero Boetti49,
présentée éteinte mais programmée par l'artiste
italien pour ne s'allumer qu'une fois l'an, de surcroît très
brièvement, ces oeuvres exacerbent l'attente du spectateur, l'oblige
à supporter une dilatation du temps. Utilisant le suspense et filtrant
avec la frustration ces oeuvres se construisent selon des systèmes
aléatoires et fonctionnent de manières imprévisibles.
Jouant de continuité et de ruptures rythmiques, elles mètrent
48 En 2006 : présentation de Valise au
sein de l'exposition Une seconde, une année
En 2009 : exposition personnelle de Roman Signer au sein de la
session Gakona, ainsi qu'une projection de ses vidéos.
En 2010 : une vidéo, Helikopter auf Brett au sein
de l'exposition Fresh Hell
49 OEuvre présentée lors de
l'exposition, Une seconde, une année, 2006
29
le temps conformément à ce qu'il est une fois
envisagé en termes de perception humaine : un flux, un intervalle, un
rythme.
I.3. La disparition sculpturale : de la fuite vers
l'invisibilité
Sonnant la fin du monumental puisque la simple présence
sculptural n'est plus même supportée, les oeuvres
présentées dans cette partie émanent principalement des
cycles d'expositions de l'année 2009. Consacrant la « dissolution
de l'apparence50 », vers un au-delà du visible, au
derrière du tangible, le Palais de Tokyo expérimentait ici «
des formes d'art qui échappent à toutes velléités
d'interprétations figées.51 »
I.3.a À Se soustraire du réel
Du latin fugare, la racine étymologique du
verbe fuir permet de faire un rapprochement sémantique avec
l'idée de brièveté, d'impermanence. Est fugace ce qui dure
peu, disparaît promptement. Des coupures temporelles se font ainsi jour,
resituant ce flux et ses fractures. Largement présente dans
l'exposition Chasing Napoleon, l'idée de fuite
conglomérait les oeuvres présentées. En proposant des
voies de sorties, cette exposition appelait le spectateur à sortir de sa
condition. Créant l'illusion d'espaces annexes, ces installations
agissaient comme en trompe l'oeil. Pris dans le trouble, le spectateur en
venait à considérer l'espace palpable comme l'antichambre d'un
parterre plus réel. Et Marc-Olivier Wahler de préciser :
« [L'exposition] réunit des oeuvres agissant comme
autant d'instructions pour se soustraire au regard et se réfugier dans
les marges du visible.52 »
Présenté au sein de cette exposition,
également présente sous une de ces adaptations lors de la session
The Third Mind, Drain53, installation minimale
de
|
|
2009
|
50 Marc-Oliver Wahler, Palais /
|
08,
|
51 Marc-Oliver Wahler, Palais /
|
09,
|
2009
|
52 Marc-Oliver Wahler, Palais /
|
10,
|
2009
|
30
l'artiste américain Robert Gober, activait ce genre de
processus. Produisant à la main la réplique exacte de minuscules
réservoirs d'éviers, l'artiste les mettait en place sur le mur de
la travée principale. Si simples et si petits, ces apparents ready
made entretenaient l'illusion d'un monde clandestin qui serait à
conquérir derrière le mur. Se présentant comme une sortie
de secours, la bonde créait chez le spectateur l'impression d'un espace
autre, suscitant chez lui la tentation de se dérober du visible, de
rentrer dans l'invisible. Drain jouait sur les motifs du passage, donc
du fugitif et du transitoire.
Dans un espace concomitant de l'exposition, l'artiste anglais
Ryan Gander construisait une chambre noire. Dans une pièce
plongée dans l'obscurité, il creusait un trou de souris au ras du
sol. Laissant filtrer la lumière du jour, cette ouverture apparaissait
comme un lien vers un monde extérieur. Car de cette fêlure du mur,
se dégageait derrière la cloison un extérieur fleuri, un
jardin clandestin. Intitulé Nathaniel Knows54, la
pièce jouait sur les processus d'apparition et de disparition,
extrapolant un récit au-delà de l'espace d'exposition. Elle
laissait le visiteur inventer son histoire et résoudre l'énigme
posée par l'artiste : que se cache t'il derrière ce mur qui
confine les apparences ? En proposant des voies de sortie au réel, ces
trappes interrogeaient dans des processus auto réfléchie la
présence du spectateur dans ce qui semble dès lors, qu'une
parodie du réel. Et toujours lors de la session Chasing
Napoleon, deux « Jeudis » - événement hebdomadaire
en lien avec la programmation À étaient proposé sur le
thème de la disparition, de la fuite volontaire. Judicieusement
nommé « Instructions pour disparaître », une
séance de projection était consacré aux films
expérimentaux interrogeant notre propre présence au monde. Un
autre soir, Erik Bullot proposait une conférence intitulée «
Éloge du camouflage ». Donnant à voir des stratégies
de fuite, cette session était l'occasion de fournir des modes d'emplois,
d'incitation à la soustraction du monde, à éliminer la
permanence de sa présence.
À la fois trompe l'oeil et réplique parfaite
d'un trou, l'oeuvre que présentait Etienne Bossut dans le cadre de
l'exposition au Château de Fontainebleau perturbait la perfection
géométrique des jardins à la française.
Creusé à même la pelouse, le
53 Fig. #16
54 Fig. #17
31
spectateur pouvait apercevoir l'idée d'une
échappatoire, mais n'avait pas suffisamment de recul pour
vérifier le subterfuge. Comme une entrée ou sortie inaboutie
Jardinage réinterprétait les passages secrets des
châteaux royaux. Une pelle accompagnait la mégarde, comme si des
ouvriers étaient toujours attelés à creuser cette voie de
sortie vers un autre monde. Proposant une issue, l'oeuvre reléguait la
fable au rang de construction théorique pour insérer dans
l'espace la possibilité de fuite. Connu pour ses sculptures de gaz,
immatériels voire invisibles, l'artiste autrichien Werner Reiterer
présentait également au Château de Fontainebleau
Entrance to the Center of the World. Une entrée parallèle,
une connexion utopique avec l'univers romanesque de Jules Verne, la
pièce proposait une voie pour pénétrer au centre du monde.
Une mise en chantier qui interrogeait la consistance du réel, cette
pièce était aussi l'occasion de proposer l'illusion d'espace
parallèle, rendant quasi contingent le normal qui est donné
à voir. Proposant une narration, ces deux oeuvres utilisaient le
récit en tant que rôle médiateur dans l'expérience
de la temporalité.
Présentée lors de l'exposition Cinq
milliards d'années, la pièce de l'artiste français
Vincent Lamouroux est une gigantesque sculpture en acier inoxydable qui
traversait la verrière et les alcôves du Palais de Tokyo.
Intitulé Scape55, jeu de mot entre le verbe
s'enfuir, escape et l'espace space, la pièce ouvrait
des brèches sur les fondations de l'institution, amputant des fragments
de murs pour donner l'illusion d'espaces autres. Comme les rails d'un train
fantôme qui emmènerait vers un ailleurs, cette installation in
situ perturbait les points de référence du visiteur. La
forme de l'installation, reflétant de manière sinueuse le symbole
de l'infini, suscitait en réaction chez le regardant, le sentiment d'un
espace clos où une temporalité figée régnerait.
Malgré la taille imposante de l'installation, émanait de ce
travail, une constante chez cet artiste, une fragilité, une relation au
déséquilibre. Marqué par la mobilité, le regard
glissait sur cette structure dynamique, évoquant la fluidité et
la vitesse par le biais d'une installation fixe.
Tous ces exemples d'espaces annexes peuvent être
rapprochés de ce que Michel Foucault nomme hétérotopie.
Pour le philosophe, cette notion correspond à un
55 Fig. #18, Fig #48
32
espace autre, à un contre emplacement qui conteste tous
les autres lieux du monde, les efface, les compense, les neutralise. Dans ces
lieux parallèles suscités par les artistes
précédemment cités s'inscrit toujours un devenir
incertain, rejoignant en cela l'idée d'impermanence.
I.3.b À Sculptures invisibles
La dématérialisation de l'oeuvre d'art est un
enjeu fondamental du )()(e siècle : on fait disparaître
toutes les marques de « grand art56 », à commencer
par le monument. Carré blanc sur fond blanc de Kasimir Malevich
est une tentative pour révéler le rien, le vide, la sensation
pure. Marcel Duchamp développe au milieu des années 1930 le
concept esthétique de l'infra-mince qui caractérise une
différence infime entre deux choses, une distance qui ne peut tout
à fait être perçu, seulement imaginée. Lié
à la notion de temps, l'infra-mince ouvre la voie à
l'imperceptible. Trente ans plus tard, la fameuse exposition d'Yves Klein
à la galerie Iris Clert exprime ce propos. Sur le carton d'invitation de
l'exposition Pierre Restany peut écrire : « voici
l'avènement lucide et positif d'un certain règne du sensible
(...) une émotion extatique immédiatement
communicable.57 » Dans sa conférence donnée en
Sorbonne en juin 1959, « L'évolution vers l'immatériel
», l'artiste construit les prémisses d'une architecture de l'air.
Enfin en 1962, il réalise une « Vente cession d'une zone de
sensibilité picturale immatérielle ». En d'autres termes il
vend du vide, du spirituel, une simple croyance. La programmation du Palais de
Tokyo a repris ces problématiques pour proposer lors de ses expositions,
l'aboutissement contemporain de ces recherches.
Lors de l'exposition Chasing Napoleon dont la
thématique était la disparition du visible, l'artiste
américain Tom Friedman présentait Untitled (A
Curse)58. L'oeuvre ne donnait à voir qu'un socle
solitaire, un piédestal qui soutenait le vide. Comme un objet sensible,
l'artiste s'était adjoint les services d'une sorcière qui y avait
jeté un sort. Prenant sa hauteur sur 28 cm, ce sort avait la largeur
exacte du socle.
56 Anne Cauquelin, « L'art
dématérialisé » in Fréquenter les
incorporels, PUF, 2006
57 Pierre Restany, Le nouveau
réalisme, Decitre, 1960
58 Fig. #51
33
Confronté à une oeuvre qui n'offre rien à
voir, le spectateur était contraint de dépasser les limites
communément admises de la représentation. Non physiquement
observable, l'oeuvre se basait sur la capacité du spectateur à
croire au tour ésotérique.59 La
dématérialisation de l'objet qui se concrétise dans
l'invisible donne accès à l'univers de la sensibilité
pure. Car invisible ne signifie pas nécessairement l'absence de
présence. Les capacités de réception des sens étant
limitées, certaines formes peuvent échapper à l'humain
mais exister entièrement par ailleurs. C'est sur cette idée qui
reposait l'oeuvre de l'artiste suédois Dave Allen, également
présentée lors de Chasing Napoleon. For the Dogs. Satie's
«Véritables Préludes Flasques (pour un chien)» 1912,
rendered at tone frequencies above 18 kHz, son titre, montrait une
chaîne Hi Fi qui ne provoquait en apparence aucun bruit. Jouant un
morceau d'Eric Satie, le son restait cependant audible pour les chiens.
Rappelant les morceaux silence de John Cage, seuls les signaux visibles sur
l'écran de l'appareil hi fi permettaient de témoigner de la
présence d'un son, même si celui-ci échappait
précisément à notre perception. Ici l'important
n'était pas le plein mais le vide, le son mais le silence, la
présence mais l'absence. Donnant à voir l'imperceptible, cette
oeuvre réussissait à rendre sensible l'invisible en montrant les
liens que celui-ci entretient avec les modalités de l'intelligible.
Les sens mentent donc sur la réelle nature de
l'apparence. Intéressé par cette idée, le Palais de Tokyo
donnait dès 2006 - avec l'exposition d'ouverture du mandat de
Marc-Olivier Wahler, Cinq milliards d'années - à voir
des oeuvres inspirés par cet état de fait. Proposant un espace
révélateur d'invisible, l'installation de Christian Andersson
jouait sur les apparences. Blind Spot60 fonctionnait comme
un « piège à perception61 » : Un projecteur
de lumière illuminait d'un cercle le mur qui lui faisait face. Le
spectateur qui venait à se placer devant ce rayon lumineux avait la
surprise de constater que son ombre n'apparaissait pas sur le cercle de
lumière. Lui donnant l'impression subite d'être fait d'une
matière translucide, comme un cache-cache avec son propre corps
l'installation faisait disparaître sa présence, conduisait le
visiteur à reconsidérer sa propre existence.
59 Thomas Huff, Daily Impermanence, Visiting with
the Conceptual Artist Tom Friedman, ArtsEditor, 2003
60 Fig. #17
61 Cinq milliards d'années, Dossier de
presse, 2006
« Dans l'esthétique de la disparition, les choses
sont d'autant plus présentes qu'elles nous
échappent.62 »
Dans la même exposition, Marc-Olivier Wahler continuait
d'explorer l'idée de disparition en y insérant une pièce
de Ceal Floyer. Jouant sur le processus de transition du focus
à l'out of focus, de l'apparition à
l'évanescence, Autofocus est aussi un projecteur de
lumière, qui se réglait puis se déréglait de
manière aléatoire dans la travée centrale du Palais de
Tokyo. L'image du spectateur passait d'une qualité nette à un
flou total, intrigant par intermittente saccadée, les lois du voir. Et
si le monumentale peut être conçu comme une structure fixe,
incarnant pour l'éternité une figure forte, exaltante, ces deux
installations répondaient d'objectifs inverses. Elles menaient au doute
de la présence, interrogant par les rapports d'ombres et de
lumières qu'elles instauraient l'ancrage de l'homme sur cette Terre. En
cela, elles visaient plus à instaurer le doute, la relativité,
développant des discours à l'opposé des figures
d'autorité, de la sculpture comme monument.
34
62 Paul Virilio, Esthétique de la
disparition, Galilée, 1989
35
II. Le temps manipulé ou comment rendre compte de
son instabilité
Tentant de restituer les dynamiques inhérentes aux
fluctuations du vivant, les oeuvres présentées ici racontent le
chancellement du monde, l'inconstance de la réalité. Pour se
rendre intelligibles, elles appuient leurs rhétoriques sur la
durée, qu'elles incarnent ou qu'elles représentent. Pour ces
oeuvres, faire du temps et de son impermanence un objet d'art en marche
fonctionne comme une obsession : incorporer la sensation du temps, la vivre, la
communiquer au spectateur. Mais comment signifier ce flux ininterrompu de la
temporalité ? Alors que dans le chapitre précédent, les
artistes parvenaient à incorporer dans l'objet, le flux inhérent
à la marche du temps, le corpus ici présenté montre des
oeuvres à la matérialité statique, mais qui parvienne dans
leur contenu, à signifier un déplacement temporel. Mettant en
place des environnements dans lesquels le spectateur peut
pénétrer, certains artistes usent de ce relatif isolement pour
lui faire passer la succession de momentanée. (chap.1) Résurgence
de la peinture classique, des artistes utilisent le thème de la
vanité, dont ils sculptent les motifs. Posées dans l'espace, ces
pièces rendent compte de la fuite inéluctable du temps. (chap.2)
Et si la fin est certaine, certains travaux entrevoient la mort pour ce qu'elle
invalide, la vie entière. (chap.3)
II.1 Des fluctuations de la pensée
II.1.a - La décomposition du mouvement et la
culture cinématographique
À la fin du XIXe siècle, les
avancées techniques de la photographie permettent la restitution
objective du mouvement, notamment par les chronophotographies d'Etienne Jules
Marey. En shootant rapprochées, des actions en train d'être
réalisées, son fusil photographique permet à l'image
d'émaner saccadé, les différentes phases constituantes de
son mouvement. Le présentant sous les différents aspects qui
forme son unité vagabonde, il restituait quasi scientifiquement le
migratoire. Exposée à l'occasion de l'exposition collective
Dynasty, l'oeuvre de Bettina Samson rappelle cette conquête
scientifique du visible. Avec Warren, 1/4 de
36
seconde en Cinémascope63, l'artiste
présentait sept bustes alignés sur une rampe. Rappelant les
photogrammes d'une scène de film, elle présentait
décomposé, un mouvement qui rappelait du même coup,
l'idée d'une action furtive.
La chronophotographie influence la peinture du XIXe
siècle. Mais alors que la photographie reste emprunte d'un certain
académisme, notamment dans la composition, les peintres redoublent de
stratagème pour tenter de représenter le mouvement que la machine
a rendu perceptible. C'est la raison d'être de l'impressionnisme.
Synthétisant cette représentation du fugitif, les mouvements
d'avant-gardes du début du XXe siècle incorporeront
ensuite dans leurs travaux, le cinéma naissant. En tant que nouveau
langage, le cinéma offre à la modernité la capacité
d'enregistrer le mouvement. La première oeuvre d'art qui en tire les
conséquences, c'est la Roue de bicyclette de Marcel Duchamp,
« la première oeuvre cinématographique en son
principe64 », c'est à dire la première qui, sans
en imiter les formes, tire parti de ce nouveau langage. En faisant tourner la
roue posée sur un tabouret, le spectateur instaure, par le biais de la
réalité elle-même, le mouvement. La culture
cinématographique ouvre ainsi la voie à une approche processuelle
du déplacement dans l'art. Et l'influence de l'art
cinématographique sur l'art contemporain reste aujourd'hui un point
capital. Les oeuvres présentées dans cette partie ont en effet
toutes en commun d'exprimer leur contenu dans le temps. Présentée
pour l'exposition Une seconde, une année, l'oeuvre de Zilvinas
Kempinas est un ensemble de ventilateur qui propulse en apesanteur le
négatif d'un film. Intitulé Flying Tape,65
cette bande magnétique de plusieurs mètres flottent dans les
airs, ses ondoiements comme autant d'actes furtifs qui dansent sur le vide.
Chacune de ses oscillations rappelle le « matérialisme
aérien » dont parlait Gaston Bachelard, la restitution du
mouvement, de ces chutes et de ces hauts, en étant une partie
prenante.
63 Fig. #19
64 Nicolas Bourriaud, Formes de
vie, Denoël, 1999
65 Fig. #20
37
II.1.b - Mécanismes cérébraux
dévoilés
L'être est constitué par des flux incessants de
processus physiques et mentaux qui changent continuellement. Toutes les choses
sont transitoires, il n'existe aucune entité stable, d'édifice
mental durable. Comment rendre plastiquement compte de ces flots d'états
d'âmes, de l'impermanence des fluctuations qui nous constitue ? La
réalisation à partir des années 1960 d'«
environnements66 », des sculptures tridimensionnelles où
le spectateur peut entrer, est l'occasion pour les artistes de mettre au jour
des oeuvres qui proposent des atmosphères. L'inscription de ces
environnements dans un volume important leur permet de susciter plus que de ne
signifier, de rester ouvert à une multitude d'interactions et
d'interprétations possible. Le premier directorat du Palais de
Tokyo67 a proposé quatre installations qui proposaient
chacune à leurs façons une cartographie instable et
évolutive du mentale de l'être. Ses oeuvres avaient toutes en
commun de ne pas essayer de toucher à la perfection, mais de rendre
intelligible les fluctuations de la pensée.
Les oeuvres de Rebecca Horn sont marquées par la
culture cinématographique que nous évoquions
précédemment. Son oeuvre est en effet fortement marquée
par l'idée de processus, la plupart de ces pièces étant
des machines à actionner :
« Mes travaux ont plus à voir avec la
littérature et le cinéma qu'avec les autres arts, plus avec des
séquences d'images et de mouvements qu'avec la peinture.68
»
Rebecca Horn installait en 2003 dans l'espace d'une des
alcôves du Palais de Tokyo une installation gigantesque,
Lumière en prison dans le ventre de la baleine.69
Cloisonné depuis l'extérieur, le spectateur qui venait
à y rentrer découvrait une pièce sombre. En son centre, il
pouvait voir à une trentaine de centimètres du sol Pendulum
with Black Bath (Pendule avec bain noir), une cuve en aluminium contenant
de l'eau noire. Accrochée au plafond, une perche électrique
oscillait dans
66 Le premier à utiliser cette expression est Edward
Kienholz
67 Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans,
2002-2006
68 Entretien de Germano Celant avec Rebecca Horn,
in Rebecca Horn, publié à l'occasion de l'exposition
Rebecca Horn, musée de Grenoble, 1995
69 Fig. #21
38
le liquide, laissant la trace d'un cercle, la
représentation d'une pendule à son extrémité. Sur
les murs, des projecteurs vidéos faisaient danser des extraits de
poèmes de Jacques Roubaud, tel que « éphémère,
sans épaisseur mais sphérique70 », ainsi que
d'autres poèmes, écrits par l'artiste elle-même. Entre ces
halos lumineux d'encre nocturne et le bac de résine au sol survenait un
champ de tension dont les visiteurs devenaient l'axe mouvant. Ils
accomplissaient ainsi une ronde, danse qui a de tout temps symbolisé le
renouveau. En tournant la tête vers les auréoles, un mouvement
d'ellipse recréait l'instabilité de la marche de la
pensée, mesurée par le pendulier.
Pour son exposition personnelle au Palais de Tokyo,
Exposition universelle 1, Jota Castro présentait
Brains71 (2005). L'artiste assemblait bout à bout
des tourniquets, similaires à ceux du métro, auxquels avait
été adjoint, comme une cage de sécurité, un enclos
de barreaux où le spectateur allait prisonnier. Une fois
inséré, il devait enclencher ses portes pour se permettre
d'avancer. L'installation mettait dans le monde sensible les formes
d'allégorie des processus du raisonnement. Comme une idée, chaque
sas permettait d'accéder à un autre, mais la progression se
faisant, empêcher de retourner au point de départ. L'artiste
tentait ici de faire un parallèle avec les processus de la
pensée, bâtissait l'oeuvre sur les étapes de la
créativité. Symbolisant « toutes les limites,
frontières et obstacles qu'il faut dépasser pour créer
» l'installation souhaitait être « la métaphore du
cerveau au cours d'une psychanalyse.72 »
La perpétuelle transformation de la marche de la
pensée trouve aussi dans l'installation d'Arthur Barrio un honnête
écho. En 2005, à l'occasion de l'année du Brésil en
France, le Palais de Tokyo présentait le travail de cet artiste
brésilien. Intitulé
Réflexion...(s)...73 l'exposition prenait place dans
l'espace d'une alcôve. Coupé de l'extérieur par un rideau
noir opaque, le spectateur devait franchir ce perron pour littéralement
rentrer dans l'installation. Calfeutré, l'espace d'exposition
émanait sombre, une atmosphère de chaos. Jamais en pleine
lumière, l'artiste avait
70 Rebecca Horn : Lumière en prison dans le
ventre de la baleine, Hatje Cantz, 2003
71 Fig. #22
72 Jota Castro, Catalogue publié
à l'occasion de l'exposition Exposition universelle 1, Palais
de Tokyo, Paris Musée, 2005
73 Fig. #23
39
aménagé une pénombre ponctuée de
sources lumineuses, une manière pour lui d'inciter à une
concentration de la perception, de rendre perceptible « la
réalité dans sa totalité74 ». L'artiste
disposait dans l'espace des matériaux pauvres,
éphémères et précaires, issus de la vie quotidienne
: des déchets, des rebuts, ainsi que des matériaux organiques
comme le pain, le café, le sang et de la laque des Indes. Un vieux sofa
éreinté rythmait aussi l'espace. En désordre, ces
éléments jonchaient le sol qui apparaissait dès lors comme
abandonné. Envisageant l'art comme un processus dynamique, Arthur Barrio
récuse en effet « le sens d'objet fini, statique et immuable de
l'oeuvre d'art pour l'envisager comme action.75 » Son refus de
l'oeuvre d'art comme matérialité fixe profite en ce sens à
la mise en place d'ambiance en lien direct et immédiat avec la vie. La
durée de l'installation était ainsi calquée de l'ordre de
la durée du vivant, de ses différents états jusqu'à
l'abandon, la disparition, puisque rien n'est récupérable.
L'esthétique de non-forme de « Réflexion...(s)... »
usait donc du perpétuel développement. Évolutive,
l'oeuvre incorporait les flux de vie, rompait le calme du matériel
monolithique stable. Il concrétisait en cela son ambition, «
réveiller le sensoriel de son sommeil rationnel.76 »
Détournant l'art de la domination de l'image, son installation amenait
le spectateur vers le royaume de l'expérience. Et ce désordre
suscitait chez lui le vacillement de ces perceptions.
« C'est une immense jouissance que d'élire domicile
dans le nombre, dans l'ondoyant, dans le mouvement, dans le fugitif et
l'infini.77 »
Instabilité des formes du monde, l'installation
d'Arthur Barrio disait tout le monde en état de chancellement, la
réalité en état d'inconstance, la relativité de
toute permanence. L'impression de chaos qui en ressortait était la
tentative d'exprimer cette finitude qui serait non une fin mais une
impossibilité de conclure, l'inachèvement laissant ouvert le
champ de l'interprétation. Souhaitant « éviter toute
pensée architecturale78 », Arthur Barrio restituait au
Palais de Tokyo le momentané. Comme les idées qui se
développent jusqu'à l'épuisement de leurs propres logiques
et dynamiques, son installation avait aussi un caractère
indéterminé, imprévisible et
74 Cité dans Ligia Canongia , " Barrio Dynamite
", Artur Barrio, Modo Ediçoes, 2002
75 Léa Gauthier, Arthur Barrio, impropre
à la consommation humaine, Frac Provence-Alpes-Côte d'Azur,
2005
76 Joao Fernandes, Arthur Barrio : Records,
Fundaçao de Serralves, 2000
77 Charles Baudelaire, Curiosités
esthétiques, 1868
78 Léa Gauthier, Op. cit.
40
éphémère. En constante évolution
et transformation, l'artiste construisait un univers peuplé de signes et
de symboles qui rendait compte de la psyché, capturait le spectateur
pour l'immerger dans une perception sensorielle, rendant ainsi compte des
fluctuations de temps, de son impermanence. Marinetti exprime d'ailleurs bien
cette incapacité à pouvoir explicitement rendre compte de
l'expérience intérieure, en cela que la réalité
envahit l'être de fragments déconnectés, de discordances
embrouillées :
« Dans la vie quotidienne, nous ne sommes en
général confrontés qu'à des éclairs
d'argumentation, rendus momentanés par notre expérience moderne
(...) et qui restent dans nos esprits comme une symphonie fragmentaire et
dynamique de gestes, de mots, de lumières et de sons.79
»
Tenant d'un art qui fait du corps le centre de la production
artistique, Arthur Barrio mettait en avant l'expérience sur l'image et
l'objet. L'oeuvre se situait ainsi plus dans la réception, dans l'espace
mental suscité que dans la disposition cacophonique de son
installation.
En 2003, Mathieu Briand créait un
environnement80 dans l'espace d'une alcôve du Palais de Tokyo.
Rendu hermétique par l'adjonction d'une porte étanche, le
spectateur était invité à se déchausser avant d'y
pénétrer. Guidé par une fréquence continue d'onde
sonore, il pénétrait dans une atmosphère moite. Quatre
tonnes de talc, déversées par l'artiste, constituait un sol fait
de particules si fines que le tapis de poudre blanche devenait nuage au moindre
pas. De plus, la pièce était plongée dans une
atmosphère sombre, seulement éclairée par un laser vert
qui offrait à dix centimètres du sol, une source de
lumière vacillante. Un bassin d'eau salée rythmait l'espace en
son centre, au fond duquel l'eau était si sombre que le spectateur
pouvait croire nager dans le néant. Marchant pied nu sur ce sol
instable, l'immersion dans cette plastique virtuelle donnait forme à un
moment suspendu. Provoqué par les pas, le voile blanchâtre du talc
redéfinissait les enveloppes corporelles et estompait les contours de
l'espace, faisait voler en éclats l'illusion des contours
79 Filippo Tommaso Marinetti, Le
théâtre futuriste synthétique, 1915
80 Fig. #24
41
définis de notre corps. Comme un ensemble d'atome qui
s'assemblerait avant de se séparait, l'installation illustrait bien le
principe cher à Merleau-Ponty de l'appartenance du corps à
l'espace et de la notion de corps comme composant sensible de
l'espace.81 Car l'artiste parvenait à mettre au point une
unité éclectique fait d'images fugaces et de stabilité
éphémère. Et utilisant l'image mouvante des projections
pour représenter le fugitif, Mathieu Briand faisait un lien entre le
tangible et l'insaisissable, le mental et les sens.
Le titre de son exposition, Le Monde flottant, est
d'ailleurs la traduction française du concept japonais d'ukiyo-e,
littéralement le « royaume de l'éphémère
». À ce propos, l'éphémère À ou
l'idée d'impermanence - est au coté des notions
d'impersonnalité et d'insatisfaction, un concept central du bouddhisme.
Cette religion considère en effet l'éphémère comme
un aspect immuable de la réalité, parce que la vie est
précisément bâtie sur « une concomitance de causes et
d'états transitoires voués à disparaître en
même temps que les effets produits.82 » Mettant l'accent
sur « les mécanismes et les processus du changement83
», l'oeuvre instaurait un rapport ambivalent entre le sujet, le spectateur
et l'environnement qu'il pénétrait entièrement. Sans
direction univoque, l'installation s'articulait autour de la
multiplicité des positions, semblait vouloir susciter le sentiment
d'errance, montrait l'individu comme un être décomposé. Et
le spectateur retrouvait bien dans l'installation du Palais de Tokyo tout le
lexique de l'impermanence bouddhique, dans toute l'ampleur de son champ
sémantique : glisser, échapper, voguer, inconstance.
Intégrant la structure, le visiteur devait supporter la donnée
temporelle qu'elle lui imposait. Induit intuitivement dans l'installation, le
spectateur retrouvait la quatrième dimension de l'art, le temps.
Provoquant chez lui des « images-flux84 », « ce temps
non pulsé, ce temps flottant, ce temps libéré de la mesure
régulière ou irrégulière85 ».
81 Maurice Merleau-Ponty,
Phénoménologie de la perception, Gallimard, 1990
82 Nicoletta Celli, Le Bouddhisme,
fondements, pratiques, civilisations, Hazan, 2007
83 Isabelle Caparros &
Fabienne Vernet, « Les atomes qui constituent la peinture ne sont pas
rouges » in Mathieu Briand, Op. cit.
84 Christine Buci-Glucksmann,
Esthétique de l'éphémère, Galilée,
2003
85 Gilles Deleuze,
Conférence sur le temps, IRCAM, 1978
42
II.1.c À Le temps contrôlé
Lors de la session Cellard Door (févr.-avr.
2008), l'ensemble des espaces d'expositions du Palais de Tokyo était
confiés à l'artiste français Loris Gréaud. Il y
incorporait une temporalité propre. De midi à quatorze heures,
puis de vingt heures à minuit, l'exposition était éteinte,
même si elle restait libre d'accès pour les visiteurs.
L'éclairage était réduit au minimum, les vidéos
étaient en bernes. L'exposition n'était réellement
fonctionnelle que de quatorze à vingt heures. Allumée par un
technicien, l'activation de l'exposition faisait partie du temps de la visite.
À la cime d'une forêt d'arbre calcinés
éparpillée sous la verrière, Loris Gréaud
accrochait une sphère gigantesque, aux couleurs changeantes comme
translucides. Intitulé Forêt de poudre à canon
(bulle)86, cette pièce divisait cet espace d'exposition
en une seconde temporalité, rythmant l'espace dans la durée. En
fonction du moment où le spectateur la regardait, la sphère se
dilatait jusqu'à sa disparition lumineuse, avant de commencer le cycle
d'un nouveau départ. Dans l'obscurité, cette sphère
était en perpétuelle fluctuation, métamorphosant l'endroit
à chaque pas, de l'ombre à la lumière. Son cartel
était lui-même présenté sur un petit pupitre qui
s'allumait et s'éteignait en intermittence. Semblable à une
respiration lente et tranquille, cet éclairage en mouvement obligeait le
spectateur à patienter afin de pouvoir lire correctement les indications
qu'il contenait. Ainsi l'exposition produisait « non pas un temps
différent, mais des différentiels temporels modulables selon
l'emploi qu'en fera le visiteur.87 » Elle rappelait en cela
l'installation d'Olafur Eliasson à la Tate Moderne. En 2003, l'artiste
danois présentait à Londres The Weather Project, une
énorme forme sphérique qui rappelaient les variations du soleil,
du jaune brûlant à l'orange crépusculaire. Ces deux
installations rendaient compte des instabilités lumineuses, des
variations perpétuelles qui agissent dans la nature.
Visible uniquement de nuit, l'exposition de Tobias Rehberger,
sous le premier directorat du Palais de Tokyo, adoptait aussi une
temporalité propre. Intitulé Night Shift, elle ouvrait
au coucher de soleil pour ensuite fermer à minuit. Normalement
définie comme une entité stable, l'exposition adoptait une
dynamique en calque sur l'écoulement du temps. Ces horaires d'ouverture
spécifiques la liaient au cycle
86 Fig. #25
87 Marc-Olivier Wahler, «
Interview avec Loris Gréaud » in Palais 05, 2008
43
naturel du jour et de la nuit. Les variations de
lumière formaient ici aussi l'élément fondamental de cette
exposition nocturne. Constamment changeantes, les installations,
présentées sous l'espace de la verrière, étaient
équipées de dispositifs phosphorescents qui proposaient une autre
perception du temps et de l'espace. S'inspirant du crépuscule avec
lequel s'ouvrait chaque jour l'exposition, les installations gagnaient en
intensité lumineuse à mesure que la nuit se faisait plus sombre.
Elles rendaient compte d'une forte oscillation perceptible, en usant de ce
temps cinématographique que nous évoquions plus haut. Tobias
Rehberger présentait aussi une vidéo représentant le ciel
parisien et ces variations en accéléré. Filmée en
point fixe depuis le parvis du Trocadéro, cette vidéo montrait le
demi-cercle de la fuite infinie du soleil.
II.2. Variation contemporaine sur le thème de la
Vanité classique
Les oeuvres présentées dans cette partie peuvent
toutes être reliées, au moins dans leurs champs
sémantiques, aux thématiques des vanités classiques. Le
terme - vanité - vient du latin vanitas, littéralement
l'« état de vide ». Ce thème apparaît dans la
peinture occidentale au XVIIe siècle, en Flandre
particulièrement. Liée historiquement avec la traduction et la
divulgation en langues européennes des textes védiques, dont
l'idée d'impermanence est l'une des idées clefs, la peinture des
vanités offre généralement une méditation sur la
mort et sur le caractère éphémère des biens
terrestres. Et s'il revient à des objets statiques de signifier la fuite
du temps, d'avertir de la fin inexorable, ces oeuvres proposent dans les
énoncés qu'elles mettent en scène, des récits qui
dévoilent son inéluctable déroulement.
« Représenter l'inexorabilité du mouvement
qui entraîne vers la mort par un procédé pictural qui joue
essentiellement sur la mise en valeur de l'objet relève d'une gageure au
sens où c'est l'accent porté sur la pérennité de
l'objet que revient le rôle de témoigner de la fuite du temps et
de la fugacité des choses.88 »
88 Marie-Claude Lambotte, « La destinée
en miroir » in Alain Tapié (dir.), Les Vanités dans la
peinture au XVIIe siècle, Albin Michel, 1990
44
Si le temps du contenu reste statique, celui de
l'énoncé est empreint d'un dynamisme instable, qui rejoint
l'idée du temps et de son impermanence. Ces sculptures statiques offrent
ainsi par leurs dynamismes réfléchis, une mobilité
temporelle. Reprenant à leur compte l'adage latin du Memento mori
À souvient toi que tu es mortel À ces oeuvres jouent le
rôle d'un miroir. Le spectateur s'y reflète pour y
découvrir la révélation de ce qui le définit, la
mort et de la fuite du temps qui l'y acheminera. Marie-Claude Lambotte
distingue d'ailleurs trois temps dans le processus de déplacement
temporel suscité par la vanité, étapes qui «
constituent intrinsèquement la psychologie du temps89 ».
En montrant la fin de toute chose, la vanité incite le spectateur
à considérer la fin de son existence. Cette prise de conscience
l'amène tout d'abord dans un état de « suspension », un
choc qui le laisse presque patois. Ensuite, par un phénomène
d'« anticipation », la finitude de sa condition existentielle s'abat
sur lui, prenant subitement en compte la périssabilité de son
propre corps. Enfin, la vanité suscite par un processus de «
rétroaction », la prise en compte de ce qui est déjà
révolu, comme pour les ruines, de ce qui a déjà disparu.
Et en se situant dans l'ordre de la présentation plutôt que de la
représentation, l'art contemporain parvient à susciter des
émotions encore plus directes. À la différence des
peintures de vanité, qui usaient du signe pour se permettre de
communiquer, la portée des vanités contemporaines
présentées au Palais de Tokyo accable le spectateur,
développe un discours en lien direct avec son pathos. Poignante, les
oeuvres présentées ici sont autant de manifeste à la prise
de considération de l'impermanence comme élément
fondamental du vivre. Pour ce faire, elles adaptent en sculpture les motifs
classiques du thème de la vanité : squelette pour signifier la
fragilité des choses humaines, instrument de mesure du temps pour rendre
compte de son inéluctable déroulement, fleurs pour la
périssabilité des choses...
II.2.a À Ossements, crânes et squelette
Pour l'exposition de leur fin de mandat, Notre
histoire..., Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans
présentait vingt-neuf artistes « représentatifs » de la
scène émergente
89 Marie-Claude Lambotte, « Les vanités
dans l'art contemporain, une introduction » in Anne-Marie Charbonneaux
(dir.), Les vanités dans l'art contemporain, Flammarion,
2005
45
française. Dans l'espace de la verrière
était installé le squelette monumental d'Adel Abdessemed.
Intitulé Habibi90 (2004), l'oeuvre était
squelette géant suspendu dans les airs, comme propulsé par le
moteur d'avion à réaction qui lui faisait dos. Monumentale mais
flottante, la sculpture « préparait à notre propre
envol91 ». Face à ce squelette géant, le
spectateur était partagé entre trouble et rire. Se
développant sur 17 mètres, cette oeuvre était empreinte,
pour reprendre la terminologie de Freud, d'une « inquiétante
étrangeté ». S'inspirant du Schleletro de Gino De
Dominicis, un squelette allongé de 22 mètres de long auquel
était adjoint un nez en forme de bec d'oiseau, Habibi rappelait
l'insignifiance de l'homme face à la mort. Par son gigantisme, l'oeuvre
ramenait les fantasmes de puissance à leur nature infantile, les
ravalaient au rang de farce. Ce qui était ici moqué, c'est
l'homme et ses rêves de dépassement. Invitant à la modestie
et la lucidité, l'oeuvre mettait au jour ce que tout le monde sait mais
qui semble impalpable, la fin inévitable.
Présenté dans l'exposition collective
Dynasty - une exposition du mandat de Marc-Olivier Wahler qui avait aussi
pour ambition de faire le point sur la scène émergente
française À l'oeuvre de Laurent Le Deunff reprenait les
allégories des vanités de la peinture classique. À
l'opposé de l'extrême dimensionnalité du squelette d'Adel
Abdessemed, Laurent Le Deunff présentait
Crâne92 (2002). Posé à une cinquantaine
de centimètres du sol sur un socle anormalement bas, ce qui accentuait
sa petite taille, l'artiste montrait la sculpture réduite d'un
crâne humain. Fait en pâte à modeler, l'artiste y avait
adjoint une année de la production de ses propres ongles. Ces rognures
accentuaient le côté morbide de l'oeuvre, comme si un malheureux
avait gratté pour mettre à jour la substance friable qui le
constitue. Mais l'aspect quelque peu repoussant de cette vanité trouve
aussi une autre explication. Si elle succombe aux tentations
esthétiques, la vanité se retourne contre elle-même. Pour
inciter à la réflexion sur l'impermanence des choses, il importe
donc que le spectateur ne se contente pas de l'observer, n'en jouisse pas comme
d'un spectacle. Crâne répondait à ce retrait
esthétique comme révélateur méditatif.
90 Fig. #26
91 Sven-Olov Wallenstein, « Vivre parmis les
choses » in Notre Histoire, Paris Musées, 2006
92 Fig. #27
46
Toujours sur le motif du crâne, deux pièces
À présentées chacune dans l'un des deux directorats -
peuvent être ici regroupé. Lorsqu'il était encore directeur
du Swiss Institute de New-York, Marc-Olivier Wahler commandait à
l'artiste français Bruno Peinado Vanity flight
case93 (2005). En poste au Palais de Tokyo, le directeur
représentait cette pièce au sein d'une exposition hors les murs
en Argentine, intitulé Medio Dìa - Media Noche (2007).
Comme les crânes qui ont rendu célèbre Damien Hirst,
Vanity flight case était une tête humaine à
laquelle était adjointe des morceaux de miroirs
réfléchissants. Plongé dans l'obscurité, un flash
de lumière venait éclairer ce crâne, comme une boule
à facette. Le temps du plaisir, insinué par l'ustensile de la
fête, était calqué sur celui de la dégradation. Par
ce tour, Bruno Peinado moralisait l'anatomie, tant ce crâne semblait
vouloir dire qu'il est si assommant de s'amuser lorsqu'on en ressent à
aucun degré l'utilité. À cette pièce peut
être accolé le travail de Nicolas Juillard, The Waiting
Room94 (2005). Présentée lors de l'exposition de
groupe de la session 2005 du Pavillon À la résidence artistique
du Palais de Tokyo À la pièce prenait depuis l'extérieur
la forme d'un réservoir industriel. Invité à y
pénétrer, le spectateur était confronté à un
crâne grandeur nature qui tournait presque en lévitation sur
lui-même. En évoquant une sorte de purgatoire, le petit espace de
cet austère silo d'acier insinuait plus directement des relations avec
l'intime. Le crâne de Nicolas Juillard était aussi paré
d'une mosaïque d'éclats de miroirs, comme celles qui sont sur les
boules discos des boîtes de nuit. Naguère habitées par des
yeux, les orbites du crâne accueillaient désormais des hauts
parleurs diffusant une bande-son dérangeante comme
irrévérencieuse. Ces samples étaient extraits de films
pornographiques et de chansons rock. Intitulé The Waiting Room,
l'installation invitait le spectateur à danser sur sa mort prochaine,
mettant à jour les stratégies artificielle qui lui permette
d'accepter sa peine. Les oscillations lumineuses provoquées par le
crâne venaient lui rappelait la mort, comme à tous les autres
danseurs qui tenteraient de l'oublier. Mais le dispositif n'était pas
seulement morbide. Affichant le volage comme partie constituante de la vie, le
dispositif affirmait l'existence comme belle car précaire, au sens
où Nietzsche parle d'un « éphémère de
l'impermanence acceptée.95 » L'installation invitait
à affirmer l'éphémère comme entité
constituante du vivant, comme processus nécessaire de la vie, tel le
danseur
93 Fig. #28
94 Fig. #29
95 Cité dans Christine Buci-Glucksmann, Op.
cit.
47
de la fin de Zarathoustra. Dansant devant ce crâne, le
spectateur prenait conscience de la fuite du temps, et accélérait
de fait ses pas, dansait comme d'une intensité davantage puisqu'il
venait d'apprendre qu'il était mortel.
II.2.b À Des fleurs comme motif du temps
Au côté des crânes et des squelettes,
d'autres motifs prennent appui sur le modèle rhétorique de la
vanité. Par le cycle qui les mène de la graine à la
fanaison, les fleurs reconstituent la psychologie intrinsèque du temps.
Comme symbole, la fleur montre la décrépitude à
venir, interpelle le spectateur au plus sensible de son intime. En usant de la
fleur comme médiation, deux expositions du Palais de Tokyo levaient le
voile de l'illusion et présentaient, en un face à face entre
l'oeuvre et son regardeur, la vérité de l'impermanence du
temps.
À l'échelle un, hyper réaliste, Yoshihiro
Suda produit à la main des fleurs de vase, des camélias, des
roses, des magnolias... Sous le premier directorat, l'artiste était
invité à installer ses sculptures dans les recoins de
l'institution96. Il choisissait des lieux spacieux, presque vides,
pour placer ses fleurs à des endroits inattendus. Sans socle protecteur,
sans cartels pour avertir de leur présence, les oeuvres étaient
presque invisibles. Mais quoique minuscules, les sculptures de Yoshihiro Suda
plaçaient l'espace sous tension. Comme pour révéler des
fissures cachées, ses interventions délicates offraient aux
spectateurs l'occasion de méditer sur « le cycle des saisons,
c'est-à-dire sur le passage du temps, la vie, la mort.97
» L'insertion de ces fleurs montrait une nature infiltrant l'environnement
urbain en tant que chose non désirée. Comme un bouton sur un
visage, les fleurs perturbaient le glacis architectural de l'espace, venaient
symboliquement entacher la perfection neutre des murs blancs du Palais de
Tokyo. En célébrant la faille, elles proposaient un
déplacement temporel qui faisait apparaître les espaces
d'exposition, comme le vestige d'un passé révolu. Comme s'il
voulait faire confidence de notre vulnérabilité, Yoshihiro Suda
mettait à jour l'inévitable césure qui nous perdra
tous.
96 Fig. #30
97 Akiko Miki, « Germination aléatoire
» in Yoshihiro Suda, Palais de Tokyo, 2004
48
Intitulé Abandon98, l'exposition de
l'artiste américain Tony Matelli prenait place dans les deux espaces des
modules. L'artiste y insérait des mauvaises herbes en bronze
sculptées à la main. Hyper réalistes, ces statuettes
miniatures reproduisaient à la perfection ces plantes
indésirables et envahissantes. Plus présent que dans le travail
de Yoshihiro Suda, les mauvaises herbes de Tony Matelli avaient un aspect
foncièrement engagé. Dans ces autres travaux, l'artiste
américain critique avec virulence la société marchande et
les gages d'éternité qu'elle se propose d'offrir. Dans Cinq
milliards d'années, il montrait un singe empaillé dans la
posture de somnambule, yeux fermés et mains tendues. Rêvant de
notre monde, le songe du primate plaçait le spectateur dans un cauchemar
: celui de l'évolution lente mais destructrice. S'arrogeant le titre
d'un recueil de poème de T.S. Eliot, il intitulait une autre de ses
expositions Europe is a Vast and Desolate Wasteland. Dans Chasing
Napoleon, il présentait Fuck it ! Free yourself, deux
billets de 500 euros qui brûlaient continuellement sans jamais se
consumaient. Les mauvaises herbes qu'il présentait dans l'exposition
Abandon étaient aussi de ces objets prosaïques qui
signifient à la fois le vide et la vie99. Ces herbes folles
proposaient un déplacement temporel qui disait précisément
« abandon » à la pièce. Comme Robert Gober et ses
éviers100, les oeuvres de Yoshihiro Suda et de Tony Matelli
jouaient une fois insérées dans l'espace, un pouvoir de
simulation imparable. Hyperréalistes, elles indexaient la notion de
durée et tendaient à donner l'impression de caducité. Les
deux artistes parvenaient à transformer les mauvaises herbes et les
fleurs en un concept, un processus qui escortait le spectateur dans
l'indétermination. Leurs oeuvres rendaient compte de l'écoulement
prévisible du temps, qui viendra insérer du végétal
dans les fondations hermétiques de l'architecture de nos villes.
II.2.c À La mesure du temps : montre et bougie
Installée depuis 2006 à la cime du perron de la
porte d'entrée du Palais de Tokyo l'oeuvre de Gianni Motti
définit par sa présence, la position esthétique du lieu.
Elle est le symbole de la position curatoriale de Marc-Olivier Wahler, qui
l'installait dès sa
98 Fig. #31
99 « The Waste and life at the same time » Lisa
Fischman, « Transformer » in Tony Matelli, Leo Koenig Inc.,
2003
100 cf. I.3.a
49
prise de fonction. Big Crunch Clock101 se
présente sous la forme d'une horloge numérique qui
décompte au millième de seconde près, le temps qu'il nous
reste avant la phase de décélération de l'univers.
Combinée avec une baisse des réserves d'hydrogène
disponible, cette phase de décélération annoncera le
déclin inéluctable de notre étoile. Dans ses derniers
instants, le soleil gesticulera avant de s'éteindre
éternellement, combinant dans son déclin, notre système
solaire. Le laps de temps qu'il nous est donné à vivre, cinq
milliards d'années, donnait d'ailleurs son nom à la
première exposition du mandat de Marc-Olivier Wahler, où
l'idée d'impermanence imposait sa marque, comme vue dans la
première partie du mémoire. Accompagnant cette exposition,
Big Crunch Clock était la transcription plastique contemporaine
des discours eschatologique, marquait l'avènement de la chute prochaine,
de la fin irrémédiable. Lorsque le critique d'art Timothée
Chaillou demande à Gianni Motti :
« Serait-ce la vanité absolue, celle qui indique la
réelle fin des temps, non plus sur un mode métaphorique ?
»
L'artiste de répondre :
« Oui la vanité ultime.102 »
L'idée qu'une vanité ait besoin d'une
matérialité figée pour continuer à exprimer
l'impermanence du temps a été prise en compte dans
l'élaboration de cette oeuvre. Ironie du sort, Big Crunch Clock
fonctionne à l'énergie solaire, cessera théoriquement de
battre la mesure à l'extinction des rayons du ciel. Se présentant
comme le détonateur qui annulera le temps, l'oeuvre installe une
tension, induit du stress pour le spectateur. Celui-ci voit les derniers
chiffres défiler très rapidement. Il lui rappelle
l'écoulement du temps présent. Les autres chiffres, à la
gauche du compteur restent figés. Destinés aux
générations futures, ils rappellent que si le spectateur est hors
d'affaire, tout n'est qu'une question de temps. Une horloge en milliards
d'années qui nous situe face à un temps immensément long,
tandis que ces secondes nous rappellent l'urgence de ce décompte, de
cette fin prévue, de cet
101 Fig. #32
102 Timothée Chaillou, « Gianni
Motti, Big Crunch Clock » in Catalogue de collection du FRAC
Franche-Comté, 2011
50
inéluctable craquèlement. Interpellant chaque
spectateur non pas parce qu'elle mesure une échéance proche, mais
parce qu'elle rend compte d'une échéance certaine, Big Crunch
Clock inquiète puisqu'elle insinue l'inexorable fin de toute chose,
tant matérielle qu'immatérielle.
Le spectateur pouvait aussi voir dans Cinq milliards
d'années, l'oeuvre d'Urs Fischer, Untitled
(Branches)103. En l'accrochant à un moteur
suspendu, l'artiste faisait léviter une branche dans les airs. Dessus,
il installait deux bougies qui en se consumant, dessinait des cercles de cires
sur le sol. Les circonvolutions de la branche dressaient comme une ronde,
symbole de l'éternel recommencement. Le spectateur pouvait aussi y voir
l'image d'une pendule, le rythme du temps. Saisir le temps, le
représenter dans ses différentes considérations, tel est
aussi l'enjeu de la pièce de Jonathan Monk The Odd Couple (French
version). Présentée au sein de l'exposition hors les murs au
Château de Fontainebleau, la pièce consiste en deux horloges
à balancier, posées l'une en face de l'autre. Ne parvenant pas
s'accorder sur l'heure exacte, elles semblent se disputer la mesure du temps.
Dans une conférence donnée à l'occasion de l'exposition
Le temps vite en 2000 au Centre Pompidou, Anthony J. Turner rappelle
qu'Henri Bergson, après Saint Augustin, distingua le temps
mécanique de la durée intérieure, subjective, liée
à la mémoire, en mettant en évidence deux
temporalités, l'une imposée par la nature (l'horloge solaire) et
l'autre personnelle. La pièce de Jonathan Monk montrait cette
ambivalence qui ne peut réellement s'accorder. Si chaque minute est en
principe exactement pareille à toute autre minute, les
expériences intérieures contredisent cette mesure
homogène. La superposition de ces deux temporalités est aussi le
propos de l'oeuvre d'Alice Guareschi, 2005 Calendar. Cette
pièce était présentée à côté du
crâne de Nicolas Juillard à l'occasion de l'exposition du
Pavillon, The Final Cut. Alice Guareschi disséquait un agenda
et le présentait enroulé autour d'une bobine. L'écoulement
des jours mis sur papier rappelait à la fois « un mètre
ruban, notre manière de quantifier le temps, et une bobine de film,
notre manière de qualifier le temps.104 » Ici aussi,
l'artiste interrogeait la relation entre le temps et l'expérience. Et
s'il s'étire dans l'ennuyeuse attente, se contracte dans
l'activité fébrile, les oeuvres d'Urs Fischer, de
103 Fig. #18
104 Candice Breitz « The Final Cut : un mode d'emploi »
in Le Pavillon, session 2004-2005, Palais de Tokyo, 2005
51
Jonathan Monk et d'Alice Guareschi ont en commun de montrer
son écoulement permanent, l'impossible prise à laquelle il se
démet constamment.
II.2.d À La vanité performée
Les représentations de danse macabre se multiplient
dans l'Europe du Bas Moyen Âge. On y voit des hommes de chairs communier
avec des squelettes. En cela proche des vanités, les danses macabres
révèlent la relativité des plaisirs et des biens, montre
la mort qui emportera chacun. Si le style s'estompe à la renaissance, il
refait jour à l'avènement des Temps Modernes. Dans son
poème, Danse macabre, Baudelaire chante le « charme d'un
néant follement attifé. » L'art contemporain étant le
passage de la représentation à la présentation, les
artistes d'aujourd'hui ne figurent plus seulement les motifs de la danse
macabre, mais danse pour de vrai. À deux occasions, le Palais de Tokyo
en apportait la preuve.
En 2004, Nicolas Bourriaud invitait Marina Abramovic à
réaliser une performance dans l'enceinte de l'institution. En compagnie
de Jan Favre À célèbre pour ses crânes faits en
insecte éphémère À les deux performeurs
installaient une cage de verre dans une des alcôves du Palais de Tokyo.
Intitulé Guerrier-Vierge/Vierge-Guerrier105 la
performance s'attachait à décrire, l'envers organique de
l'apparence humaine. Marina Abramovic insérait son corps dans la cage de
verre avec des morceaux de viandes qui lui pendaient autour du cou. Elle
ouvrait ensuite par incisions franches, les canaux de Jan Favre, lui faisant
couler le long de son corps des vives coulées de sangs. Ce protocole
exprimait d'une façon provocante, à la fois répugnante et
séduisante, l'inscription du périssable en tant que
matière constituante du corps. Les morceaux de viandes utilisés
pour la performance étaient ensuite exposés. Dans un lent
processus, ils séchaient, se dégradaient, jusqu'à devenir
la relique mémoire d'une vie disparue. Cette performance pourrait
être rapprochée des oeuvres de Jana Sterbak. Vanitas: Flesh
Dress for an Albino Anorexic prend la forme d'une robe faite en tranches
de beefsteak. C'est la matière du corps qui vient l'habiller. En
rapprochement, la performance de Marina Abramovic et de Jan Favre
105 Fig. #33
52
peut être perçue comme une ontologie. Les deux
artistes insinuaient dans le Palais de Tokyo, l'être comme apparence
perméable et impermanente.
Le spectateur pouvait aussi retrouver l'idée d'une
vanité performée au sein de l'exposition Fresh Hell.
Commissaire invité, Adam McEwen plaçait sous la travée
centrale, On Giving Life (1975), quatre photographies documentant une
performance d'Ana Mendieta. Le spectateur pouvait y voir l'artiste se
dénuder et s'allonger dans l'herbe pour simuler un acte d'amour avec un
cadavre. Cette série rappelle la performance de Marina Abramovich,
Cleaning Bones, où l'artiste nettoie avec une éponge, des
ossements ensanglantés. Ici Ana Mendieta imprimait la marque de
l'éphémère. Dans ses autres travaux, notamment la
série Silueta, on retrouve cette expression de l'impermanence.
Mendieta imprime sa présence sur le paysage laisse dans la neige ou des
marécages, son empreinte corporelle, des dessins
éphémères qu'elle documente ensuite par la photographie.
Lorsque Mendieta tente de faire l'amour avec un squelette, elle remet en cause
la frontière qui sépare les morts des vivants, tente par ses
caresses de le ressusciter. Et si elle fait appel au fantôme qui habite
encore le squelette, le spectateur peut sentir par effet de rétroaction,
le squelette qui repose pour un temps dans le vivant.
II.3. De la caducité de l'existence
Cette partie propose des oeuvres qui, sans être
réellement des vanités, prolongent les idées de
caducité exprimées dans le chapitre précédent.
Entendu comme le jaillissement premier de la vie et le refus instinctif de tout
ce qui peut l'entraver, le lyrisme est pour Annie Lebrun une violente
conscience de la disparition, une manière d'entrevoir la beauté
en transparence sur ce qui la menace. Expression subjective qui concerne en
particulier les sentiments privés, le lyrisme perçoit la mort non
plus pour ce qu'elle sanctionne mais pour ce qu'elle invalide, la vie. En ce
sens, les oeuvres qui seront ici présentées peuvent être
entendues comme la métamorphose plastique respective du rapport
qu'entretient chaque artiste avec la finitude des choses. En induisant leur
échéance, ces oeuvres proposent un déplacement temporel
qui rejoint la thématique du mémoire, l'impermanence du temps.
53
II.3.a À Une fin de course
Invité par Jérôme Sans à venir
exposer au Palais de Tokyo, l'artiste belge Pierre Ardouvin présentait
Nasseville106 (2003). Sur l'espace de la mezzanine,
l'artiste installait au sortir des escaliers un chapiteau de filets. Faisant
suffoquer l'espace, les lourdes mailles du filet encerclaient le visiteur. Seul
un périmètre strict lui permettait une déambulation
serrée autour de l'escalier. Car en contraignant le lieu, l'oeuvre
n'agissait pas comme un signe, comme une figure exotique extérieure au
spectateur. Au contraire, le filet créait une dynamique à
laquelle il ne pouvait pas se soustraire. Le regardant était
également ébloui par des puissants spots de lumières
blanches, qui suivaient un cercle les cimes du filet. Cette lumière,
difficilement soutenable, aveuglait tant le visiteur qu'elle l'empêchait
de distinguer l'envers du décor. Un podium qui emprisonne l'être
et qui lui voile son regard, un espace clos dans lequel évoluer, Pierre
Ardouvin proposait une mise en forme de la fatigue mentale, de
l'éreintement psychique. Comme un cul-de-sac, son installation
constituait la fin d'une visite, le filet obligeant le spectateur à
rebrousser chemin pour sortir. Aussi, l'artiste introduisait à
différents points de l'espace des enceintes, si bien que le spectateur
ne pouvait exactement savoir d'où émanait la source sonore. Par
intermittence, des résonances métalliques et des sons abstraits
renforçaient l'effet de cercle et d'enfermement. Industriel, le son
rebondissait en écho sur les matériaux bruts et sans affect de
l'architecture du bâtiment. Combinée à cette lumière
qui aveugle, l'installation en son entière faisait penser à une
descente après l'euphorie. Elle montrait le moment de la
désillusion, de la fatigue, de l'incertitude. Faces aux ressorts et aux
effets du spectaculaire - les spots, le son et le chapiteau en filet - le
spectateur se sentait comme dans une arène, devenant acteur
malgré lui. Il ne savait cependant pas s'il était à
l'intérieur ou à l'extérieur du dispositif, s'il
était le point focal du spectacle ou s'il était exclu
d'événements qu'il ne pouvait voir. Et lorsque Hans-Hulrich
Obrist précise que les travaux de Pierre Ardouvin fonctionnent « en
grande partie sur la notion d'éphémère,
d'impermanence107 », le processus se fait plus claire.
106 Fig. #34
107 Entretien entre Pierre Ardouvin et Hans Ulrich Obrist,
Déjà vu, Chez Valentin, 2004
54
Cette mise en scène visait surtout à se
désamorçait d'elle-même. Sèche, brûlante et
assourdissante, l'installation dessinait la fin de perspective, la fin d'une
course, la perte des repères.
Présentée en décembre 2010 dans l'espace
d'un des modules, l'oeuvre de Bertrand Lamarche parlait aussi de courbure
harassante, de déprime fourbe. L'artiste présentait un tore, une
forme cylindrique qui, comme une vis sans fin, tournait sur elle-même en
circuit fermé. En mouvement vers le bas, l'oeuvre semblait mimer le
déclin inéluctable, plaçait l'humain au seuil du
transitoire. Intitulé Lobby (hyper tore Ø
550)108, le titre proposait d'assembler deux images mentales,
celle du vestibule, de l'antichambre, lobby, et celle de la forme
géométrique du tore. En action, il semblait creuser un couloir
vers l'enfer, annonçant dans ses oscillations hypnotiques, une chute
inéluctable.
Sur le même registre, peut être rapproché
du travail de Bertrand Lamarche, les sculptures de poussière que
l'artiste Yuhsin U. Chang présentait à l'occasion de l'exposition
collective Dynasty. L'artiste s'était fait remarquée par
les commissaires avec ses photographies de paysages montrant des espaces
désertiques, sans traces ni présences humaines. Nommée
Poussière dans le Palais de Tokyo109, sa sculpture
partait aussi à la recherche de l'inerte, de l'inorganique
résiduel. Comme un corps en fin de course, l'oeuvre intimait à
l'espace un vieillissement radical, l'essoufflait en le mettant à la
hauteur d'un vestige. Informe et précaire, elle symbolisait les
processus de désagrégation, l'impuissance radicale. Des
sculptures comme ontologie du vide, Yushin U. Chang présentait
l'être comme vacuité, comme une matière
éphémère qui contiendrait sa propre finitude.
II.3.b À La stratégie du pire
Les oeuvres précédemment évoquées
montrent l'érosion du souffle vital, l'impuissance de l'art à
nous extraire de notre condition existentielle. Prenant en compte cette
incapacité, deux expositions du Palais de Tokyo tentaient de
dépasser
108 Fig. #35
109 Fig. #36
55
la figuration des limites, d'inciter au changement. Visible
depuis le sas d'entrée au premier jour de l'ouverture du site de
création contemporaine, l'oeuvre d'Alain Declercq, Instinct de
mort110, exprime ce propos. L'artiste
demandait à un officier de police de tirer deux milles balles sur une
palissade de bois, ce dernier inscrivant par les tirs, le titre dans la
palissade. En forme d'hommage à Mesrinne, l'artiste convoquait la
mémoire du criminel pour lui rendre À l'oeuvre date de 2002
À une partie de la reconnaissance sociale qu'il desserve. Agissant par
effet de réflexion, l'installation incitait le spectateur à
l'irrévérence, puisque celle-ci devenait
institutionnalisée.
Également marqué par le défaitisme, le
travail militant de l'artiste sud-africain Kendell Geers peut être
rapproché de celui d'Alain Declercq. Les travaux de l'artiste reprennent
l'iconographie des vanités. Dans une de ses séries
photographiques, l'artiste part en quête du motif du crâne. En
shootant de l'angle approprié, balcons, bancs ou portes d'immeubles,
Kendell Geers cherchent les allusions crâniennes qui se dessinent dans
l'architecture de nos villes. Sa pièce Memento Mori est une
série de sculptures hyper réalistes représentant des corps
transpercés de balles. Dans sa performance Bloody hell l'artiste
s'étalait du sang sur le visage, criait au désespoir sous cette
rivière rouge vermeil. Pour le Palais de Tokyo, l'artiste faisait poser,
en réaction aux espaces bruts et décloisonnés de
l'institution, de lourds rideaux noirs dans une de ses alcôves. Le
spectateur devait écarter cet épais velours pour découvrir
une installation intitulée The Terrorist's
Apprentice111. Plongée dans l'obscurité, la
pièce ne laissait découvrir qu'un socle en son centre,
éclairé par une seule source de lumière. Sous une cloche,
le spectateur pouvait y découvrir une allumette anodine.
Kendell Geers figurait ici « la pulsion où
s'affronte la volonté de vivre et le désir de
mourir.112 » S'il ne montrait pas l'horreur, il exposait la
pulsion qui pourrait amenait à cette horreur, comme un stimulant de
l'instinct destructeur. Cette allumette provoquait le visiteur, questionnait la
capacité de son psychisme à pouvoir résister aux pulsions
dévastatrices. Entre pulsion de vie et pulsion de mort, l'artiste
montrait
110 Fig. #37
111 Fig. #38
112 Christine Macel, Dangereux de se pencher au-dedans
in « Kendell Geers, my tongue in your cheek, Les presses du
réel, 2002
56
le morcellement à venir. Son installation mettait au
jour la vulnérabilité de notre société,
menaçait presque sa stabilité. Intitulé « l'apprenti
terroriste », l'allumette se déployait entre la simplicité
du dispositif et dans la violence du contenu. Dixit Marx, les individus ont
d'abord besoin de se rendre compte qu'ils ont des intérêts
mutuels, qu'il faut s'unir pour les défendre. Dans une seconde phase, ne
restera plus à trouver que l'élément déclencheur.
Invitant à l'immolation, à la destruction, Kendell Geers semblait
ici offrir l'allumette pour faire partir cette révolution. The
Terrorist's Apprentice visait à libérer ce qui est en chacun
de nous, d'impulser ce mouvement de décharge. Selon la stratégie
du pire, seule une crise peut produire des
changements. En proposant l'allumette subversive, l'artiste
appelait à
l'impermanence, au bouleversement des logiques
éternelles dans laquelle la société s'est formolée.
Faisant partie intégrante de l'exposition, une affiche,
distribuée à l'occasion de l'ouverture de l'exposition,
réunissait tous les numéros d'urgence de la ville de Paris.
Intitulée Emergency Series (Paris), l'affiche visait aussi
à alerter la population d'un danger latent, d'avertir du bouleversement
à venir.
57
III. La critique de l'éternel
Les recherches artistiques de l'après-guerre
mènent à une prise en compte de la notion
d'éphémère dans les processus de création.
Installations, art in situ, land art sont autant de
tentatives pour substituer l'objet à l'oeuvre. Ces travaux
défient par leurs structures l'institution muséale, le
marché de l'art. L'idée d'une vanité politique, entendue
comme objet stable signifiant la fuite du temps comme enjeux de modification
sociétale, trouve son origine dans cette prise de position.
La troisième partie du mémoire est l'occasion
d'analyser un corpus d'oeuvre qui exprime l'impermanence du temps non plus pour
extrapoler un lyrisme douloureux, un passéisme distant vis-à-vis
de la fuite du temps, mais pour mettre en valeur un discours critique faisant
référence aux modalités socio-économiques
contemporaines. Le corpus d'oeuvres ici présentées met en doute
les discours gageurs d'éternité que la société se
permet d'énoncer. Quand tout est changeant, relatif, l'art qui use de la
notion d'éphémère suggère implicitement la
méfiance en mettant à mal le principe de permanence sur lequel
repose nombres de fondements. Les oeuvres de ce chapitre interrogent ainsi le
consumérisme en tant que vecteur de satisfaction matérielle
(chap. 1), questionnent l'idée de progrès technologique (chap.
2), montrent la dégénérescence écologique
(chap.3).
III.1 Consumérisme et mass média
III.1.a - L'impermanence des biens matériels
Sans passer par le signe, l'art contemporain signifie par la
réalité même. En accumulant des objets, les artistes Chen
Zhen et Christoph Büchel montrent la relativité de toute
possession. Dans leurs amoncellements d'emblèmes et d'objets dont la
possession semble dès lors vaine, ces artistes critiquent âprement
le consumérisme. En vieillissants les objets rassemblés, ils
proposent comme une archéologie du quotidien, une anticipation
dystopique de notre présent. Un lien peut
58
ici être tracé avec la représentation
traditionnelle de la vanité du savoir. Sur ces tableaux113,
on peut voir des savants, philosophes, scientifiques, entourés de tous
les instruments de savoirs. Entremêlés, des globes terrestres et
des livres disputent l'équilibre aux cartes et aux lunettes. Un
crâne rappelle souvent que le génie qui aurait
épuisé tous les domaines du savoir n'approchera que plus
davantage le néant. Et si ces tableaux critiquent les objets comme gage
de connaissance donc comme moyen de dépassement, les accumulations
contemporaines à caractère de vanité place plus leur
discours sur la société de consommation et ses avatars. En
accumulant des vestiges d'objets, Chen Zhen critique par exemple la
survalorisation des objets et des biens matériels.
En hommage à l'artiste décédé en
2000, le Palais de Tokyo réactivait une de ses installations dans une de
ses alcôves. Intitulé Purification Room114, la
pièce stigmatisait le règne des objets. Il était
rassemblé des télévisions, des amas de câbles,
sièges et cartons, recouverts d'une épaisse couche de terre
battue qui leur insufflait l'impression de périssabilité.
Camouflés en vestige, ces objets libéraient leurs forces
latentes, appelaient intrinsèquement à une réflexion sur
le présent, sur ce système de production qui enfante des objets
avec des cycles de vie de plus en plus court. Se sachant atteint d'une maladie
incurable, Chen Zhen vieillissait souvent les objets de ses installations,
défiant ainsi l'offre de stabilité que le matériel incarne
théoriquement. En montrant l'histoire fatale, l'évolution
inéluctable du matériau, c'est comme si ces objets avaient
été abandonnés, avaient déjà vécu
leurs vies d'objet, des « après-objets115 », selon
le terme de Chen Zhen :
« Un vieil appareil de téléphone n'est pas
qu'une enveloppe devenue vide ou simplement le témoignage
matériel d'un produit abandonné, d'un moment donné de la
société, mais plutôt un contenu qui porte tout le
potentiel, toute la conscience d'un monde de communication, de vitesse et de
consommation.116 »
113 Notamment : Hans Holbein, Les ambassadeurs, 1533 ; Harmen
Steenwyck, Allégorie aux vanités de la vie humaine,
1640
114 Fig. #39
115 Entretien entre Chen Zhen et Jérôme Sans, «
Confusion immunitaire » in Chen Zhen, les entretiens, Les presses
du réel, 2003
116 Chen Zhen, « Question du ciel », Op.
cit.
59
Critiquant l'objet et l'information, les deux piliers de nos
sociétés, cette accumulation ne renvoyait pas à
l'idée de richesse mais à celle d'un système de production
d'objets en série. Le spectateur était confronté à
l'image du luxe dans les sociétés occidentales, un luxe qui n'est
fonction de la qualité des objets, mais de la quantité d'objets
que l'on peut réunir. Comme les déchets laissés sur place
une fois terminé, le temps du plaisir semblait être passé,
Purification Room laissant les marques de sa
désagrégation. Putréfiés, ils semblaient tout droit
sortir de la gigantesque boulimie matérialiste et exprimaient, comme le
précisait le sinologue François Jullien dans une critique sur le
travail de Chen Zhen, « L'éphémère et la mouvance
ininterrompue des choses, la fugacité et l'in substantialité des
existences.117 »
La pièce de Chen Zhen pourrait être
rapprochée du travail de l'artiste suisse Christoph Büchel, qui
présentait lors de la session Superdome (2008),
Dump118, dans toute la longueur de la travée
principale. Ses autres installations investissent le plus souvent des espaces
conséquents, font confronter le visiteur à des hypothèses
fictionnelles savamment ficelées, sordides comme inquiétantes,
parfois traumatisante. Ses oeuvres se conçoivent comme des
reconstitutions hyperréalistes, des expositions récits, où
des détails précis viennent augmenter le trouble de
l'observateur. Subversif, son travail propose d'expérimenter l'art
plutôt que de la contempler, poussant le visiteur dans des
environnements. En reconstituant les dédales d'un hôpital
psychiatrique, d'une réserve de musée dévasté, ou
encore la cachette de guerre de Saddam Hussein119, Christoph
Büchel aime proposer une temporalité renversée, comme si un
archéologue mettait à jour une réalité proche de
notre visible, déterrait les restes de notre monde contemporain et de
son inquiétante étrangeté. Politiquement engagées,
confrontant mémoire collective, mémoire personnelle et leur
possible reconstruction, ses installations dénoncent les excès du
capitalisme, de la mondialisation, de la surconsommation. Obligeant le visiteur
à s'insérer dans ses installations, celui-ci est convié
à participer à une expérience, physique et intellectuelle.
Par sa dimension, la nécessaire durée de sa visite, l'oeuvre
vient au spectateur, l'empêche de rester dans une posture de spectateur
passif.
117 Chen Zhen, « Thérapie et méditation
», Op. cit.
118 Fig. #40 - #41
119 Installation également
présentée au Palais de Tokyo à l'occasion de la
session Chasing Napoleon
60
Ambitionnant « de faire venir le plus grand nombre
à l'art contemporain en ouvrant ses portes à toutes les
influences qui les constituent120 » le Palais de Tokyo a
toujours souhaitait proposer des expériences déstabilisantes,
encourageant les expositions qui dérogent aux repères
muséaux habituels. Il devait trouver dans le travail de Christoph
Büchel, une occasion de présenter un travail en tout point
novateur, témoin d'une nouvelle manière d'appréhender
l'art.
Rien ne laissait entrevoir la puissance de l'oeuvre :
Dump, décharge en anglais, se présentait comme une montagne
de détritus culminant à plus de six mètres. Un tuyau
métallique évoquait un possible entré, comme une porte
vers l'oeuvre recherchée. Obligeant le visiteur à ramper vers sa
découverte, c'est casque sur la tête qu'intrigué, il
avançait sans savoir avec précision où il se dirigeait. Il
s'enfonçait alors dans un dédale de salles bas de plafond, d'un
mètre soixante-dix environ. Saturée de signes et d'objets,
l'installation ressemblait à un labyrinthe inquiétant, où
des zones de pénombres recelaient des dangers certains,
suggérés comme imaginés. Au fur et à mesure de la
visite, le visiteur était confronté à un
enchaînement d'espaces de vie et d'espaces de travail, basé
principalement sur la transformation de matériaux. Ainsi un espace
« téléphone » rassemblait une quarantaine d'appareils
hors d'usage, un espace de recyclage de composants informatiques
présentait des débris d'ordinateurs, avec au centre mais presque
caché, un micro processeur flambant neuf doté d'une connexion
internet surpuissante. Des ateliers de transformation de métaux
laissaient entrevoir un travail pénible, fait de labeur douloureux, de
crasse inaltérable. Un espace de recyclage du papier laissait voir des
piles de feuilles, soigneusement archivées, comme si les habitants
tentaient de remettre sur pied un vestige littéraire passé. Un
espace de culte présentait un autel, portant en crucifix un squelette
d'hirondelle, laissant présager comme une forme païenne de
spiritualité. Un simulacre d'école, avec tableau noir et chaises
d'enfants, laissait penser à une scolarisation précaire, mais
aussi à la reproduction inaltérable de la vie. Plus
poétique encore, un espace était réservé au
recyclage et à la réparation de globe terrestre, qui
s'accumulaient et s'entremêlaient, comme si la notion de territoire,
d'horizon lointain, de planète appartenait déjà au
passé. Un espace de recyclage de mégot de cigarette laissait
120 Note de présentation de la programmation 2008
61
aussi voir une récupération organisée des
restes de tabacs, ensuite stockés dans des bocaux de verres, comme si
une autre espèce était réduite à éplucher
les poussières de nos miettes.
Une échelle permettait, après une escalade
habile, d'accéder à un niveau plus élevé.
Décalage frappant de richesse, le premier étage donnait à
voire un garage automobile : une Citroën DS éclatante était
placée sur un pont de voiture. En avançant, la dernière
pièce de l'exposition donnait à voir un large espace
dégagé, en tout point similaire à une salle des
fêtes de communauté rurale. Des tables de brasseries, des bancs,
une tireuse à bière, un barbecue, une rôtissoire à
poulet, s'exposaient comme signe d'une festivité passé. Des
coupes et des trophées remémoraient des gloires oubliées.
Sur les tables, des carcasses de poulets, des canettes des bières
à moitiés pleines laissaient présager un départ
subit, une fuite vivace. Restés sur place, ses aliments pourrissaient,
laissant sentir leur fumet avarié
En envahissant le visiteur d'objets familiers, simplement
contextualisés121, la force de l'exposition
Dump se situait dans son habilité à saisir et à
reformuler notre quotidien. Par l'accumulation de produit de consommation
courante, Christoph Büchel se contentait de montrer des objets
tirés de l'ordinaire, comme s'il voulait laisser à l'anodin le
soin de par lui-même témoigner. En ce sens, son travail peut
être perçu comme une tentative d'architecturer le monde en dehors
de toute sentimentalité, comme si l'accumulation de ces objets pouvait
jouer le rôle de documentaire, de témoin neutre, presque
malgré eux dotée de « l'autonomie expressive du réel
» dont parlait Pierre Restany. Car de ce capharnaüm ressortait une
présence humaine, tant les matériaux rassemblés
rappelaient nos activités. La figure de l'homme était
suggérée par des objets permettant d'identifier des profils. Dans
cette reconstitution à l'échelle un, des survivants semblaient se
débattre dans un univers hostile, saturé de rebus de la
société de consommation. Ici aussi, des vivants étaient
contraints de collecter, de classer, de rationaliser leurs activités.
Mais qui étaient ces hommes, si miséreux, obligés à
construire un abri au coeur des déchets ? Comment le visiteur,
placé dès lors en spectateur, ose t'il pénétrer
davantage dans cette détresse, à la manière d'un touriste
en vacance en guise de sensation forte ? Comme ces
121 Paul Ardenne, Un art contextuel, op.
cit.
62
« villages indigènes », reconstitués
au début du )()(e siècle à l'occasion
d'expositions universelles, Dump reproduisait un lieu chaotique,
destiné à être traversé. Et c'est cet étalage
de misère qui assaillait, comme si chacune des pièces de
l'installation visait à exprimer les traumatismes cachés de notre
civilisation.
Reproduisant des conditions de vie difficiles, l'installation
de Christoph Bûche interrogeait le sens de notre confort moderne, les
limites de son système, les conséquences que nous sommes
prêt à accepter pour pouvoir continuer à y vivre.
Prévenant d'un déclin inéluctable, l'exposition
Dump remettait en question notre satisfaction à s'illusionner d'une
croissance, d'un développement. L'installation questionnait notre
rapport à la sécurité matérielle, notre
quiétude face à notre avenir. Dump montrait les fissures
du progrès, l'instable qui entoure notre contemporanéité,
l'éphémère nécessairement révocable sur
lequel il repose.
III.1.b - Critique de la publicité
Conçu dans l'intention de représenter le genre
humain à l'échelle mondiale, le projet de Guillaume Paris, We
are the world122, présenté en 2003 au Palais de
Tokyo, s'apparentait à une galerie numérique de portrait.
Composée de sept moniteurs vidéo présentant des «
produits portraits » de chaque pays du G7, l'installation
développait une réflexion critique autour des enjeux des
systèmes de représentations qui structurent les
sociétés occidentales. Sur les écrans, les «
produits-portraits » étaient autant de produits de consommation
courante sur l'emballage desquels figurait la représentation
réaliste d'un être humain. Afin de fournir de plus précises
explications, revenons plus en détail sur la genèse du projet.
L'exposition We are the world montrait une partie
d'un projet plus général de Guillaume Paris,
H.U.M.A.N.W.O.R.L.D., acronyme pour Holistic and Utopian
Multinational Alliance for New World Order and Research in Living and
Dying. Depuis quinze ans, l'artiste accumule et répertorie des
produits de consommation courante de l'ère occidentale sur lesquels
figurent des portraits d'être humains. Il les insère
122 Fig. #42
63
dans une collection, sous leur forme matérielle donc
périssables. L'artiste intègre ensuite ces portraits dans une
banque de donnée virtuelle. Un logiciel, qui permet à partir
d'une simple photographie de prévoir l'évolution la plus probable
d'un visage en fonction du temps écoulé, les vieilli
virtuellement. En fonction du temps passé dans
H.U.M.A.N.W.O.R.L.D., le nom de cette base de données, le
portrait s'altère. À côté de cela, Guillaume Paris
établit une banque d'information sur l'identité des êtres
humains ayant servi de modèle aux produits de consommation courante
collectionnés. L'artiste y rassemble des données d'ordre
biographique, contribuant à la nature sociologique du projet. Cette
dimension humaine permet de comparer le temps biographique de la vie d'un
individu au temps artificielle de la publicité. Car sur les
écrans, le vieillissement a lieu en temps réel. Cette
évolution permanente a lieu en parallèle de l'altération
physique des contenus périssables et au vieillissement réel des
figurants d'origine. Dans We are the world, les vidéos
exprimaient chacune leurs tours les biographies respectives des personnages.
Les vidéos étaient animées par la voix des modèles
eux-mêmes, filmés et interviewés par l'artiste. Une femme,
dix ans après son portrait publicitaire, parlait par exemple de son
enfance. Sur le même écran, le spectateur pouvait voir l'image de
l'emballage du yaourt sur lequel elle figurait. Celui-ci avait pourri, des
champignons de moisissure étant apparus, détériorant
l'image et son portrait.
L'exposition du Palais de Tokyo interrogeait ainsi la
représentation véhiculée par les objets de consommation et
les processus de réifications, la fonction de la publicité dans
les processus de mythification de la société. Par extension,
l'exposition We are the world questionnait « le rôle de
l'image et du stéréotype dans la construction sociale de
l'individu et de l'altérité.123 » La
représentation des emballages fonctionnait visuellement comme la «
composition architecturale » d'une permanence. Au contraire, l'exposition
de leur vieillissement fonctionnait mentalement comme l'espace de
transformation d'une nature transitoire, périssable. En accordant une
vie propre aux produits, Guillaume Paris liait ainsi la nécessité
de la mort à la possibilité de la vie, « réinjectait
de l'humain dans l'objet usiné en reprenant la chaîne de
production à l'envers124 ». Et en
réinsérant certains produits jusqu'à les faire parler au
sein d'un cycle humanisé, dès lors caractérisé
par
123 Guillaume Paris, H.U.M.A.N.W.O.R.L.D. expliqué aux
enfants, Palais de Tokyo, 2005
124 Charles Barachon, « Guillaume Paris » in
Technickart 37, 2003
64
l'évolution du vieillissement, il jouait sur la
disparition à venir et c'est par cette disparition que le propos se
faisait le plus éloquent. En sorte, l'artiste montrait le triomphe de la
nature sur les rêves d'éternels jouvence que sous entend le
discours publicitaire. Comme un assaut contre les théories
normatives, We are the world critiquait la posture d'un
éternel, encouragée par le discours commercial.
À côté de cette exposition pourrait
être rapproché celle de Borris Achour,
Cosmos125, présenté au Palais de Tokyo en
2002. Sur une étagère toute en longueur, l'artiste alignait plus
de deux cents boîtiers ordinaires de cassettes vidéo. Portant
toutes le titre « cosmos », inspiré du roman éponyme de
Witold Gombrowicz, l'artiste réalisait lui-même les jaquettes.
Cette succession d'adaptation posait le relativisme de la représentation
publicitaire. Les deux cents jaquettes étaient autant de boîtes
à la fois closes et ouvertes, constituées de plusieurs sources et
orientées sur d'autres. Replacée dans un ensemble, la jaquette
individuelle perdait de son autonomie. Chaque film entretenait une relation
à la fois de succession et d'emboîtement avec ses semblables.
Comme si l'emballage avait une existence en soi, dans un monde où rien
n'existe sans représentation, l'installation montrait la
publicité comme information de l'objet et la production comme l'objet de
la publicité. Ces jaquettes « aux sens vides comme
interchangeables126 » critiquaient l'impermanence de la
représentation commerciale, malléable en fonction des caprices de
la norme du voir. Elles montraient la flexibilité de la mise en image
d'une idée, flexibilité régit par l'opportunisme du
discours commercial.
III.1.c À Critique des médias
En arrivant en France, l'artiste chinois Wang Du est
choqué par l'omniprésence des images : affiches publicitaires,
kiosques débordant de journaux, flux télévisuel
ininterrompu, saturation sonore... Ses oeuvres prennent appuient sur ce larsen
continue, entre réalité et représentation. Pour son
exposition personnelle, Wang Du parade #4, l'artiste suspendait entre
les colonnes du Palais de Tokyo trois gros
125 Fig. #43
126 Emilie Renard, « De nombreuses poules colorées
placées côte à côte » in Borris Achour,
Cosmos, Palais de Tokyo, 2002
65
cubes de journaux compressés. Telles des balises qui
bordaient l'exposition, Produit dérivé127
était autant de produits rappelant « la post-réalité
médiatique dont veut rendre compte l'artiste.128 » Se
définissant lui même comme un « artiste média »,
Wang Du interrogeait ici la posture de la presse qui par ses gros titres se
pose comme sosie de la réalité, comme capteur figé des
flux de la réalité. Plutôt que d'ajouter d'autres images
à ce trop plein, il réutilisait ces images médiatiques
pour en montrer la caducité. Les médias accordent aux images et
aux informations une durée de vie éphémère. En les
restituant dans une matérialité statique, Wang Du montrait
l'impermanence de la réalité.
III.2 L'obsolescence technologique et l'idée de
progrès
III.2.a À La caducité de l'ère
industrielle
Au sein de l'exposition collective Dynasty, Daniel
Dewar & Grégory Gicquel présentait Waders, une
salopette de marbre portée en éloge sur un socle. Faisant penser
à un bleu de travail devenu sculpture, l'oeuvre appelait sur le registre
du monument, à considérer historiquement l'ère
industrielle comme une période révolue. Telle une relique, ce
bleu de travail venait signifier une réalité révolue.
Suites aux mutations économiques des années
1960, l'Europe abandonne de nombreux sites et bâtiments industriels.
Comme un naturaliste, Eric Tabuchi parcourt les paysages vernaculaires
français à la recherche de ces constructions abandonnées.
Dans l'espace d'un module, le Palais de Tokyo présentait en 2010 sa
série Hyper Trophy, une archéologie industrielle de
friches délaissées. Intitulé Réserve
naturelle129, l'exposition présentait une série
de photographies de la campagne désindustrialisée, des mutations
fonctionnelles dont ces espaces font parfois l'objet. Sur Agrandissement du
provisoire, le spectateur pouvait par exemple voir une station essence
devenu un centre d'observation astronomique, un bâtiment industriel
transformée en restaurant exotique. L'exposition présentait aussi
une
127 Fig. #44
128 « Wang Du Parade #4 » in Le_Journal 5, Palais de
Tokyo, 2005
129 Fig. #45
66
maquette réduite de la station-service
photographiée, comme une relique industrielle d'un temps
dépassé. Ces formes collectées étaient autant de
manifestations de l'itinérant, de l'instable, de
l'éphémère. Des formes architecturales oubliées qui
rappellent le célèbre récit de Robert Smithson, « A
Tour of the Monuments of Passaic ». En 1967, l'artiste fait en bus le tour
de cette petite ville du New Jersey. Mais ne rencontrant que des chantiers
abandonnés, des machines au repos, la ville lui apparaît
déserte. Robert Smithson conclut que l'espace vernaculaire contient les
traces d'un passé si codifié que son avenir archéologique
est déjà standardisé :
« Ce panorama zéro paraissait contenir des ruines
à l'envers, c'est à dire toutes les constructions qui finiraient
par y être édifiées. C'est le contraire de la ruine
romantique, parce que les édifices ne tombent pas en ruine après
qu'ils ont été construits, mais qu'ils s'élèvent en
ruine avant même de l'être.130 »
Exposé à l'occasion de la session
Pergola, Raphaël Zarka présentait sur le même
registre La Draisine de l'aérotrain131 (2009). Comme
Eric Tabuchi, l'artiste part en quête de paysages industriels
passés, de vestiges révolus qu'il nomme « forme de repos
». Zarka photographie ces objets créés par l'homme puis
abandonné. Lorsqu'il découvre près d'Orléans, le
viaduc abandonné de l'aérotrain de Jean Bertin - véhicule
glissant sur un coussin d'air -, il prolonge sa démarche photographique
en réalisant une réplique hypothétique d'une draisine
conçue pour cette voie d'essai en forme de T inversé. Il s'agit
d'un véhicule composé de deux motos disposées
tête-bêche. S'attachant à repérer les isomorphismes
entre art et industrie, Raphael Zarka proposait une oeuvre se conjuguant dans
un temps incompatible avec le réel. Le caractère absurde de cet
engin, mis en regard des usages communs, le constituait en un objet
hétérotopique, faisant signe vers le réel tout en
bouleversant ses règles132. Ce véhicule apparaissait
comme l'image d'une vision révolue du futur, une apparition d'un vestige
de notre passé proche qui corrobore d'ailleurs bien l'idée du
critique d'art britannique Lawrence Alloway selon laquelle le demain d'hier
ne
130 « L'entropie et les nouveaux monuments » in
Robert Smithson, une rétrospective, Marseille, RMN, 1994
131 Fig. #46
132 Vincent Pecoil, « La pergola comme
hétérotopie » in ZéroDeux, 39, 2009
67
correspond pas à notre présent : «
yesterday's tomorrow is not today133 » C'est ce décalage
temporel qui créait l'hétérotopie, un espace qui, tout en
renvoyant à des espaces concrets, réalise leur conjonction, leur
réversion impossibles dans le réel. Comme pour les séries
d'Eric Tabuchi et le bleu de travail de Daniel Dewar & Grégory
Gicquel, ces oeuvres accentuent l'idée d'un temps perçu comme un
ressort ou une visse sans fin, alliant la linéarité de devenir et
l'impermanence de la technologie. Ces travaux réussissaient ainsi
à susciter des doutes sur l'idée de progrès,
forcément révocable.
III.2.b - L'obsolescence technologique
Daniel Dewar & Grégory Gicquel présentait
à deux reprises À pour l'exposition Granitoïd trans goa
rascal koï koï (2007) et l'exposition hors les murs
Château de Tokyo, Palais de Fontainebleau (2008) À la
reproduction réaliste d'une voiture de sport. Taillé de leurs
mains dans le granit, ce véhicule préhistorique imposait une
forte présence aux espaces. Relique d'un passé révolu, cet
élément perturbateur contaminait et accélérait la
marche de l'histoire. En s'approchant, le spectateur pouvait voir des
cisailles, des césures qui rendaient l'édifice en ruine. Monument
dédié à la technologie industrielle des années
80, Mason Massacre134 proposait un basculement du
réel entre des polarités temporelles différentes. La
pointe technologique d'hier fait aujourd'hui passer ces engins, selon le mot de
Robert Smithson, pour « des créatures préhistoriques
enlisées dans la boue, ou mieux encore à des machines disparues,
des dinosaures mécaniques écorchés135 ».
Le Palais de Tokyo accompagnait d'ailleurs une de ces expositions par une
citation de Marcel Duchamp : « Le rapport a/b est tout entier non pas dans
un nombre c tel que a/b=c mais dans le signe (/) qui sépare a et b
». La voiture de granit de Daniel Dewar & Grégory Gicquel
était cette barre de fraction, le signe d'une transformation,
l'opérateur de renversement. Elle représentait ce point de
rupture, cette scission temporelle entre un passé révolu et un
avenir déjà ruiniforme.
133 Lawrence Alloway, The Independent Group, MIT Press,
1955
134 Fig. #47
135 « Une visite aux monuments de Passaic » in
Robert Smithson, une rétrospective, RMN, 1994
68
Pour l'exposition d'ouverture du mandat de Marc-Olivier
Wahler, Cinq milliards d'années, Marc Handfort était
invité à présenter Honda136 (2002). Au
centre de la grande verrière, une moto était couchée sur
le coté. Dessus, l'artiste disséminait d'innombrables bougies de
couleurs qui se consommaient sur son flanc. La bougie, symbole de la fuite du
temps, immolait progressivement dans sa cire l'appareil, de tel sorte que ses
capacités motrices se trouvèrent vite annulées.
Immobilisée, la moto annonçait comme l'inéluctable
déclin technologique, un temps anticipé qui verrait la fin des
flux motorisés. Ces bougies pouvaient aussi faire penser à un
autel improvisé. Comme si des hommes du futur avaient retrouvé ce
vestige contemporain, ils le plaçaient en éloge, en relique de
notre temps dépassé. Le Palais de Tokyo proposait un récit
similaire lorsqu'il invitait en 2010 le collectif d'artiste KIT à
organiser une exposition dans l'espace de ces modules. À cette occasion
était présenté un travail de Yann Gerstberger, Hotel
Gogodola Paris Executive Suite. Comme un totem amérindien,
l'artiste créait une forme anthropomorphe avec des objets de
récupérations. Des tuyaux d'arrosages formaient des bras, une
plaque de carton un nez. Le tout était assemblé avec du grossier
adhésif gris. Invitant à la révérence, cette oeuvre
semblait aussi bâtie par des êtres du futur, comme en gloire
à un passé industriel révolu. Elle évoquait le
souvenir d'une puissance aux reliques dissimulées.
La discordance technologique était aussi le sujet de
l'exposition de Luc
Kheradmand. Dans l'espace d'un module, l'artiste
présentait sa vidéo Postvsnow III137
(2009-2010), un écran plasma ne présentant apparemment d'autre
image que celle d'une neige cathodique sur fond noir. L'artiste donnait
simplement à voir des nuages vidéo, une poussière
électronique où s'évanouissaient les formes.
Phénomène visuel propre à l'absence de signal vidéo
À précisément révolu depuis l'apparition des
écrans plasma À l'oeuvre se présentait comme un
anachronisme technologique. L'artiste reconstituait en image de synthèse
l'image archaïque d'un irréel présent, puis le faisait lire
sur cet écran « nouvelle génération ». Par la
confrontation d'hier et d'aujourd'hui, par l'évocation de l'après
et d'un maintenant - post versus now À cet écran
s'installait dans une faille temporelle et démontrait par l'impermanence
technologique, son obsolescence.
136 Fig. #48
137 Fig. #49
69
III.3 Entropie et dépérissement
écologique
En 2004, Nicolas Bourriaud provoquait en un face à face
percutant une oeuvre de Michel Blazy, une autre de Tetsumi Kudo. Comme vu
précédemment, Michel Blazy use de l'éphémère
de la matière organique pour mettre au point des sculptures
évolutives, qui incluent dans leurs développements, les
fluctuations du temps. Mais si ici le processus d'altération physique
des oeuvres constitue un effet lyrique de disparition, l'oeuvre de Tetsumi Kudo
use de l'impermanence dans un but plus politisé. Marqué par les
bombardements atomiques de la seconde guerre mondiale, l'artiste japonais place
sous fioles de verres des plantes, fioles auxquelles l'artiste adjoint le pot
d'échappement d'une voiture qui tourne moteur allumé. La plante
se courbe sous l'effet du gaz, avant que la fiole ne devienne toute noire. Ses
travaux les plus connus, comme Pollution-cultivation-nouvelle
écologie (1971) présenté au Palais de Tokyo, sont
autant de cage d'oiseaux à l'intérieur desquelles l'artiste place
des matériaux périssables. Ses environnements reconstitués
patientent comme l'oiseau lacéré dans sa cage, attendant un futur
salvateur qui ne viendra jamais. Cette installation est le symbole du souci
d'accumulation, de préservation malhabile que l'homme exerce sur la
nature. Pour la conserver, l'homme en extrait des parties qu'il place dans des
parcs naturels, dans des zones préservées qui, en étant
coupé de tout, dépérissent comme isolé mortellement
dans une cage.
Pour leur fin de mandat, Nicolas Bourriaud et
Jérôme Sans présentaient en 2006 cinq expositions
personnelles, regroupées sous le titre Programme
Tropico-végétale. Parmi-elles, l'exposition d'Henrik
Hakansson, À travers bois pour trouver
forêt138, prolonge le propos de Tetsumy Kudo. Henrik
Hakansson insérait dans les espaces des parties vivantes de forêt
: arbre, mousse, fleurs. Un écosystème de taille réduite
était inversé à la verticale pour matérialiser les
conditions de vie absurdes de la forêt. Comme dans un zoo où des
cages prennent la parjure de reconstituer le « cadre naturel » de
l'animal, l'artiste introduisait les conditions de survie d'une
végétation tropicale. À travers bois pour trouver
forêt se présentait comme un ensemble de
végétations luxuriantes maintenues artificiellement en vie par un
système d'arrosage, d'humidificateurs, de chauffage et de lampes
solaires. Tous ces éléments étaient
138 Fig. #50
70
régulés par un ordinateur accessible aux
visiteurs, rendus ainsi responsables de la survie de l'écosystème
reconstitué. L'artiste réussissait à matérialiser
visuellement la destruction d'un équilibre que provoque l'intervention
de l'être humain. Des affiches représentant une forêt
tropicale dans son élément naturel étaient
empilées. Le visiteur était invité à en ramener une
chez lui, réduisant à chaque fois la hauteur de la pile. Cette
participation menait à la disparition de l'oeuvre comme l'emprise de
l'homme sur la forêt représentée.
À travers bois pour trouver était une
métaphore de l'emprise de l'humain sur la nature, du désordre
irréversible qu'entraîne la quête de découverte. La
prise de responsabilité que l'homme souhaite prendre sur l'environnement
et les détériorations inéluctables que cette emprise
amène pose un paradoxe que le travail d'Henrik Hakansson restituait
habilement. L'homme cherche à augmenter ses connaissances, ici
botanique, biologique, mais c'est précisément ces dynamiques qui
imposent une altération du sujet étudié. L'installation
d'Henrik Hakansson dévoilait ainsi en conscience la part de
responsabilité de l'entreprise scientifique dans l'inexorable
destruction du sujet de son étude, montrait les dommages causés
par l'homme par la simple observation d'écosystème ou
espèce jusque là préservée139. Sur ce
propos Claude Lévi-Strauss propose paradoxalement de renommer
l'anthropologie en « entropologie » telle une science qui en
augmentant le degré de désordre au coeur d'un
écosystème précédemment isolé,
accélèrerait sa disparition.140
Au travers de biosphères reconstituées, cette
installation évolutive évoquait l'emprise de l'homme sur la
nature, son effritement progressif, la conséquence inévitable de
la curiosité humaine, même lorsque celle ci est motivée par
les meilleures intentions. Elle indiquait la disparition programmée de
l'écosystème, non seulement celui de la
139 Francesco Manacorda, « Histoire courte de la
destruction naturelle » in Henrik Hakansson, Throught the Woods to
Find the Forest », Palais de Tokyo, 2006
140 « Si bien que la civilisation prise dans son ensemble
peut être décrite comme un mécanisme prodigieusement
complexe où nous serions tentés de voir la chance qu'à
notre univers de survivre, si sa fonction n'était de fabriquer ce que
les physiciens appellent entropie, c'est-à-dire de l'inertie. Chaque
parole échangée, chaque ligne imprimée, établissent
une communication entre deux interlocuteurs, rendant étale un niveau qui
se caractérisait avant par un écart d'information plus grande.
Plutôt qu'anthropologie, il faudrait écrire « entropologie
», le nom d'une discipline vouée à étudier dans ses
manifestations les plus hautes ce processus de désintégration
» Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, Plon, 1995
71
forêt tropicale mais de n'importe quel
écosystème plus large souffrant de déséquilibre.
72
IV. De l'éphémère de l'objet
à la fugacité de l'action
Lorsqu'un spectateur est amené à
considérer une oeuvre, l'événement qui l'engendrait est le
plus souvent passé. L'oeuvre dresse de l'acte créatif qu'un
constat plus ou moins fidèle, fait paradoxal dans la mesure où
une oeuvre n'abrite précisément de valeurs qu'en fonction des
comportements spécifiques qui lui ont permis de voir le jour. Surpasser
ce paradoxe fut l'un des enjeux des mouvements artistiques de
l'après-guerre. En tentant de rompre les distinctions entre art et vie,
l'art de la performance et les happenings du groupe Fluxus
intégraient ce paradigme. Puisque l'existence de l'artiste
précède toujours son oeuvre, ils opéraient un
déplacement radical de la valeur artistique de l'objet au geste qui
avait permis de le créer, puis par extension, au comportement
lui-même. Ainsi à partir des années 60, certaines oeuvres
d'art ne sont plus créées pour aboutir à un produit
matériel fini, mais vécues, en fonction des aléas du
temps. La forme n'est plus une fin en soi. Dorénavant, elle vise
l'enclenchement d'un processus intégré aux fluctuations de la
vie.
« L'idée qu'une oeuvre est un processus
irréversible trouvant son aboutissement dans un objet iconique statique
n'est plus guère d'actualité.141 »
Le temps de l'artiste, le temps biographique, ne se distingue
plus du temps de la réalisation de l'oeuvre. La vie est
transformée en art, le temps de l'art devient le temps de vie. Sans
tenter d'expliquer les oeuvres en fonction des circonstances d'une vie
privée, le Palais de Tokyo donnait à voir des artistes qui
imbriquaient leurs oeuvres et leurs existences dans le même processus de
production. Les travaux de Bas Jan Ader, Robert Malaval, Alain Bublex et
Mathieu Laurette ont en commun d'entrevoir l'art comme l'exposition de
l'existence. L'impermanence du temps, temporalité sérielle faite
de moment entrecoupé, est intégrée puisque la vie de
l'artiste devient son oeuvre. Dans l'espace d'exposition de l'institution, des
indices documentaires laissaient entendre l'oeuvre dans ses différentes
phases temporelles,
141 Donald Karshan, « Conceptual art and conceptual aspects
», Cultural Center, 1970
73
dans une succession de moments éphémères
que le spectateur ne pouvait qu'à posteriori imaginer.
Se masquer pour apparaître, disparaître pour
devenir visible, les artistes contemporains jouent de leurs propres
présences au monde. Dans les années 1960 et 1970, des artistes
quittent la sphère de l'art pour des motifs différents. Ces
gestes sont en eux-mêmes pourvoyeur de valeur et de sens et
l'impermanence de leur carrière devient partie de leur oeuvre. (chap. 1)
S'inscrivant dans un lieu spécifique, les oeuvres in situ sont
par nature éphémères. Elles prennent place dans un lieux
et pour un temps déterminé. De ses installations ne subsistent
que vestiges et documentations qui témoignent pour l'histoire
d'événements révolus. Le Palais de Tokyo mettait à
l'honneur des artistes qui relèvent de cette pratique. (chap. 2) Ces
parties permettront d'aborder la troisième : la marque du vécu
dans l'oeuvre, combinée à l'idée d'art créé
en fonction de sites spécifiques, permettent l'émergence de
travaux qui prennent pour matériau d'élaboration
l'interactivité qu'elles instaurent entre des individus, dans un
espace-temps définis. Théorisé par Nicolas Bourriaud dans
l'Esthétique Relationnelle, ces oeuvres aboutissent la
réflexion sur l'impermanence. L'éphémère n'est plus
seulement montré, c'est dans celui-ci que l'oeuvre prend forme.
IV.1. La césure comme modèle d'action :
abandon et disparition
Rester en place, c'est en filigrane se résoudre
à ne vivre qu'à moitié, immolé dans « l'espace
convivialité » que l'on a bien consenti à s'octroyer. Dans
des fuites en avant pour anesthésier leurs hémorragies d'ennui,
certains ont tenté de se soustraire à ce sédentarisme
forcené. Délaissant Charleville-Mézières à
16 ans, les fugues de Rimbaud le conduisent vers le port d'Aden. Arthur Cravan,
poète-boxeur dadaïste, se laisse perdre jusqu'au golf du Mexique.
Et réputation faite, Marcel Duchamp quitte la sphère de l'art
pour se consacrer aux échecs. Sans rien produire, il décrit le
silence comme sa pièce maîtresse142, part à la
recherche d'idée dans la structure même de l'expérience. Il
opère ainsi un déplacement À déjà
opéré avec ses
142 See Ana Dimkle, Duchamp's Künstlertheorie,
Hann-Münden, 2001
74
ready made À de l'objet à l'artiste. Le
retrait du monde de l'art ou plus généralement, de la
société, est dès lors doté de sens, que le Palais
de Tokyo mettait en exergue dans son programme d'exposition. L'institution
montrait l`abandon de l'art comme un acte paradoxale, un silence susceptible de
signification artistique, capable chez certain de prendre le sens de geste
artistique ultime. Cette partie permettra d'aborder les différentes
interprétations de ce geste en fonction du degré de valeur
artistique que l'on lui attribue.
IV.1.a À Se dérober du monde
En 2009, l'exposition Chasing Napoleon venait combler
le silence quasi général qui accompagna en 1996 la publication
française du manifeste de Théodore Kaczinsky L'Avenir de la
société industrielle. Surnommé Unabomber,
cet homme fut pendant dix-sept ans, l'ennemi public numéro un des
Etats-Unis. Brillant élève issu d'une famille modeste, il devient
à l'université de Berkeley, un professeur de mathématique
distingué. À vingt-six ans cependant il quitte les honneurs pour
partir se réfugier solitaire dans une cabane du Montana. Sensible aux
théories anarcho-primitivisme, Kaczynski se fait chasseur-cueilleur dans
le pays le plus industrialisé au monde. À l'image de William
Thorreau et ses récits sur les forets du Maine, Théodore
Kaczinsky vit en autarcie, reclus, sans eau courante ni
électricité. Défendant farouchement la nature, il
développe des positions extrémistes sur les systèmes
économiques contemporains. Après s'être coupé du
monde, il envoie pendant plus de quinze ans des colis piégés
à des dirigeants de compagnies d'aviation, à des chercheurs en
informatique et biologie, tous les responsables à ses yeux des
altérations écologiques dont il est témoin.143
En 1995, il propose à la police de cesser l'envoi de ses colis
piégés, à la condition que soit publié dans le
Washington Post, le manifeste qu'il avait écrit L'avenir de
la société industrielle, une impitoyable critique du monde
technologique.
À l'occasion de l'exposition Chasing Napoleon,
c'est au centre de la travée centrale du Palais de Tokyo que l'artiste
Robert Kusmirowski installait à l'identique la
143 D'où le surnom, trouvé par le FBI, de
Unabomber, Un pour université, a, pour
airlines
75
reproduction de la cabane de Theodor Kaczynski144.
Comme la relique profane d'un monde alternatif, la reconstitution de sa maison
du Montana venait apporter la marque empirique de l'engagement de la pratique
dans la théorie. Souhaitant non seulement se débarrasser des
gouvernements mais voulant - comme il l'écrit dans L'avenir de la
société industrielle - la chute de « la base
techno-économique de la société actuelle », Unabomber
tirait les conséquences de ce qu'il disait. Et c'est cette
intrépidité devant les certitudes scientifiques que le Palais de
Tokyo souhaitait mettre à l'honneur. Intriguant le spectateur, la
réplique de Robert Kusmirowski proposait de faire ressurgir l'histoire
de cette digression. À côté de la cabane d'Unabomber,
Gardar Eide Einarsson la compléter. Reproduisant dix notes
laissées par Theodor Kaczynski, l'artiste proposait un diptyque
intitulé Instruction pour disparaître. Mis sur tableaux,
les spectateurs étaient invités à lire ces instructions,
écrites par Unabomber pour permettre aux citoyens de fuir l'emprise des
sociétés techno industrielles, de fuir en toute circonstance sans
laisser de trace. C'est parce qu'il avait fait disparaître le
fossé entre la théorie et la pratique, qu'il avait avec une
cohérence implacable qui vient contredire la classe intellectuelle, -
qui trouve dans l'écart entre ce qui se dit et ce qui se fait, son
critère d'excellence145 - que des artistes illustraient sa
pensée, que le Palais de Tokyo lui rendait hommage. Et c'est pour
insuffler la remise en question, susciter l'impermanence devant les certitudes
qui courbent l'homme que les travaux de Robert Kusmirowski et de Gardar Eide
Einarsson étaient mis en exergue au sein de l'institution.
IV.1.b - L'abandon de l'art
Si l'art peut être envisagé comme une tentative
d'opposition au fonctionnalisme de la vie, et si au premier abord il permet de
s'écarter de tout système préétabli, il devient
avec l'expérience, la matière contre laquelle il s'agit de
lutter. Car la recherche de singularité peut embrigader l'artiste dans
des logiques productivistes. Trop heureux d'avoir pu faire reconnaître
leur originalité, beaucoup finissent par se cantonner dans leur
technique, répétant leur principe jusqu'à
épuisement de l'expression. En l'absence de rigueur, ils font perdre
toute teneur à leurs créations à mesure qu'ils se
144 Fig. #51
145 Annie Lebrun, Du trop de réalité,
Stock, 2001
76
plient devant elles. Esclaves de leur propre travail, ils
subordonnent leurs travaux à des enjeux ordinaires comme celui de faire
perdurer le motif qui leur a permis de rencontrer le
succès.146 Contre la routine, des artistes ont au contraire
refusé de rentrer dans toute logique de style. Alliant l'art et leur
vie, Robert Malaval fait par exemple carrière dans l'impermanence,
préférant abandonner l'art plutôt que de se retrouver dans
une Artwork Class, de se retrouver dans les allées d'un
marché de l'art saturé d'insignifiances grossières.
À 25 ans, sa série de l'Aliment blanc,
matière blanchâtre avec laquelle il recouvre des fauteuils, des
chaises roulantes et des tableaux, Robert Malaval rencontre du succès.
Il se forge un personnage et pour un temps ne porte que du blanc. Lorsque Dali
l'invite à diner, il commande un oeuf dur, une sole et un yaourt nature.
Il expose à New York, chez Yvon Lambert et Daniel Gervis. Le milieu de
l'art achète et lui en redemande. Mais ne concevant son activité
ni comme un sacerdoce, ni comme une obligation Robert Malaval arrête
l'Aliment blanc. Comme s'il refusait de faire semblant de jouer avec
les systèmes de reconnaissance de la société, l'artiste
combat sa soif de créativité. En abandonnant l'art, il se
libère lui-même de la posture d'esclave servile qu'il venait
d'endosser. Une attitude qui se retrouve au fil du temps tant les changements
de période et l'impermanence de sa production déjouent tous les
styles. Malaval s'arrêtera par intermittence de travailler, ponctuant son
oeuvre de longues césures, afin de ne jamais se
répéter.
« J'aime le changement, c'est ma ligne. La seule ligne que
je puisse avoir. Disons que ma ligne est de ne pas en avoir.147
»
L'exposition Kamikaze (2005) mettait en valeur les
aspects très hétérogènes du travail de Robert
Malaval. La scénographie rendait compte de cette inconstance, du
renouvellement continu de son langage. Dans son organisation, elle faisait
explicitement référence à ces césures :
146 Ian Burn, The artist as victim, 1974
147 Entretien avec Sylvain Lecombre in
Robert Malaval : attention à la peinture - Exposition pirate,
Maison des arts et de la culture, Créteil, 1980
77
« Toute son oeuvre est faite de rupture et cette
exposition souhaite en rendre compte (...), en rendant compte de son
désir constant de se surprendre lui-même et de se
réinventer.148 »
La rétrospective du Palais de Tokyo mettait ainsi en
valeur le travail d'un artiste qui avait refusé d'être un
bureaucrate de sa propre oeuvre. Sur ce point, Robert Malaval a en commun avec
Charlotte Posenenske d'envisager l`art comme une manière d'être
consciemment pensée contre l'aspect fonctionnel d'un système
construit sur des rapports de domination et de logique productiviste.
Marc-Olivier Wahler proposait en 2010 une rétrospective de cette artiste
allemande, accentuant le discours sur son retrait de la scène
artistique. En 1968, Charlotte Posenenske abandonne en effet toute production
artistique et commence des études de sociologie portant sur
l'étude des processus de travail standardisés. Cette
décision de mettre fin à une carrière artistique
prometteuse s'inscrit dans le contexte de développement des attitudes
performatives et conceptuelles de l'art de l'après-guerre. En
abandonnant toute production, Charlotte Posenenske adoptait une attitude
porteuse d'une critique de la marchandisation de l'art, faisait un pas pour
mieux intégrer pratique et théorie, comme le projet
avant-gardiste d'unifier l'art et la vie. En mai 1968, l'artiste publie un
texte dans Art International qui conclut :
« Je ne peux me résigner à l'idée
que l'art ne saurait contribuer à résoudre des problèmes
sociaux pressants. »
Avant de se retirer de la sphère artistique, Charlotte
Posenenske produit des formes modulables fabriquées en série
illimitée et dont le matériau reste brut : acier, carton. Ses
dernières oeuvres ne sont pas signées, sont éditées
en série illimité et vendue sans marge de bénéfice.
Exposées au Palais de Tokyo, ces sculptures ressemblent à s'y
méprendre à des conduits d'aérations. Dans l'espace
d'exposition, ces oeuvres créaient un double écho : à la
fois trappe de sortie de l'espace d'exposition, et par sa vie personnelle, un
exemple de sortie du monde de l'art. Pour Charlotte Posenenske, quitter l'art
peut être envisagé comme une conséquence des recherches de
l'artiste sur la production et la consommation. L'abandon de l'art peut ici
être perçu comme la
148 Marc Alizart, Robert Malaval, kamikaze, Palais de
Tokyo, 2005
78
conclusion de sa quête d'un art objectif et
coopératif. L'art est impuissant à résoudre les
problèmes sociaux. Il ne produit que des simulacres de relation libres
et doit être abandonné au profil d'activité ayant
réellement prise avec le réel. Ayant constaté que l'art ne
lui permettait d'intervenir qu'au niveau de la consommation, l'artiste fait le
choix de la sociologie et du syndicalisme pour pouvoir agir au niveau de la
production. Elle tire les conséquences pratiques et abandonne toute
activité artistique pour s'engager pleinement dans des activités
en prise avec le social. Et pour Posenenske et Malaval, les coupures de leur
oeuvre et l'immolation dans le silence ne dénie pas leur travail. Au
contraire, leur retrait de la scène artistique rajoute de la valeur
ajoutée à leur oeuvre. Désavouer un travail devient une
nouvelle source de sa légitimité, un certificat de bonne foi, un
gageur de sens.149
IV.1.c - L'esthétisation du suicide
Il faut admettre l'impossibilité profonde de faire
métier tout ce qui est ouverture sur l'être. Et l'art devient
l'ennemi de l'artiste lorsqu'il l'enchaîne dans des attentes, et si c'est
une logique qu'il a lui-même amenée, il doit comme pour se
purifier de lui-même, se distancier vis-à-vis des systèmes
qu'il vient d'établir. C'est dans la fuite qu'il faut poursuivre ses
explorations, et c'est dans le silence de la disparition que l'artiste se
libère de ses aliénations, l'appétit pour
l'insoupçonné ne pouvant s'apaiser que dans des
expériences franches et insensées. Dans ce sens, l'exposition
collective du Palais de Tokyo, Fresh Hell, présentait des
artistes au courage indéniable, dont certains avaient
préféré se perdre plutôt que de se
répéter. Parmi eux, c'est une belle image de ce mythe de la fuite
que l'artiste néerlandais Bas Jan Ader. Déjà aux Beaux
Arts, il n'utilisait que trois feuilles canson à l'année,
laissant pour oeuvre l'effilochement de ses bribes de papiers, des pages
blanches où ne subsistent que des traces d'une expressivité
camouflée. Adepte de l'esthétique de la chute, ses vidéos
le montre se jeter de l'air, questionnant le corps et son équilibre,
mettant en jeu les difficultés d'adhérences qui incombent
à tout être faisant effort pour exister. Dans Untitled (Tea
Party), une série de photographies présentées dans
Fresh Hell, Bas Jan Ader est surpris de la chute d'un piège
qu'il a lui-même mis en
149 « Disavowal of the work becoming a new source of its
validity, a certificate of unchallengeable seriousness » Susan Sontag,
« The Aesthetics of Silence » in Stills of Radical Will,
Picador, 2002
79
place. Et dans une dernière tentative pour
défier les lois de la rationalité, à la manière de
l'implacabilité d'un dandy qui s'impose des règles sociales
strictes pour questionner la rigueur, il défie d'insolence
l'océan. Embarquant sur un croiseur de poche, il nomme In Search of
the Miraculous cette performance qui vise la traversée de
l'Atlantique. Ne subsistera de cette tentative de dépassement que son
petit bateau, retrouvé abîmé près des côtes
irlandaises.
L'exposition Fresh Hell convoquait face à face
l'oeuvre de Bas Jan Ader à deux vidéos de Gino De Dominicis.
Faisant aussi référence au thème de la disparition de
l'artiste, ces vidéos permettaient au spectateur d'envisager sa
pratique. Sur Tentativo di far formare dei quadrati invece che dei cerchi
attorno ad un sasso che cade nell'acqua» e «Tentativo di volo,
De Dominicis tente de former un cercle en jetant une pierre dans l'eau. Sur
Tentativo Di Volo, il défie les lois de la gravité. Ces
deux canulars augurent l'adéquation entre l'oeuvre et la vie de cet
homme. Obsédé par la contemplation de la mort, De Dominicis
annonce à mainte reprise sa propre disparition, met en oeuvre sa propre
mort en publiant des fausses nécrologies. L'artiste publie dans des
revues d'art ou des journaux d'informations de multiples communiqués,
l'occasion de fonder une biographie chaque fois différente de
lui-même. Il use de la réceptivité de sa mort pour forger
son identité. Ainsi c'est dans la fuite, dans l'esthétisation de
leur suicide qu'Ader et De Dominicis posent après Lautréamont,
Rimbaud et Cravan la disparition comme l'ultime geste de l'artiste accompli.
Relevant de l'esthétique de soi le choix du silence ne réduit
paradoxalement pas la portée de l'oeuvre. Au contraire elle lui
confère du pouvoir, de l'autorité. En fuyant la sphère de
l'art, l'artiste continue de parler, mais d'une manière que l'audience
ne peut pas entendre. Il prend en compte la faculté expressive de la
renonciation. Car pratiqué dans un monde de réaction
normée, spolié par le mensonge du langage, l'art devient l'ennemi
de l'artiste puisque l'objet créé l'empêche de
réaliser la transcendance qu'il désire. L'art commence à
être perçu comme ce qui doit être dépassé.
L'artiste détruit son oeuvre, appel à l'abolition de l'art lui
même. C'est dans le suicide esthétisé que Bas Jan Ader et
De Dominicis ont trouvé l'espace pour survivre entre le spirituel de
l'art et la matérialité de l'oeuvre.
La disparition dans le silence laisse les états de fait
ouverts, portant la confusion à son apogée. Et s'il est possible
d'envisager un art de la disparition, il faudrait voir ici
80
une résurgence singulière de l'expression
lyrique. Avec une violente conscience de la fuite, ces destins de vies
envisagent la beauté en transparence sur ce qui la menace, quitte
à embrasser le danger. Car l'art doit venir contredire les logiques dans
lesquelles nous nous sommes immiscées. Il doit offrir des illusions
cinglantes, aptes au renversement, à la perte des modèles comme
aux voies préétablies. L'art permet à l'artiste de se
sentir en vie. Et c'est la disparition, cet absolu qui seul par le silence,
peut répondre à toutes les questions.
IV.2. D'un art in situ...
Les pratiques in situ se développent à
partir des années 1960. Continuant les voies ouvertes par la
dématérialisation de l'art, des artistes remettent en cause
l'objet et de sa présence. Victor Burgin parle alors
d'esthétique situationnelle. Prenant acte de la
généralisation des moyens de reproduction technique qui
enlève désormais à l'oeuvre son « aura », les
pratiques in situ prennent forme dans l'ici et maintenant.
Éphémère l'oeuvre in situ ne pourra se produire
qu'une seule fois, n'existe qu'à l'endroit où elle se montre.
Sans autonomie spatiale ni permanence temporelle, les pratiques in situ
ne sont rendus accessibles que par l'archive, support à
visée documentaire qui permet le référencement de
l'oeuvre.
IV.2.a - Temporalité de l'oeuvre en site
spécifique
En 2007, le Palais de Tokyo présentait deux oeuvres de
Robert Smithson. Sous la verrière était montré Mirror
vortex (1964), une sculpture en miroir aux perspectives
kaléidoscopiques. Utilisé comme matériau, le miroir
impliquait l'intégration dans l'oeuvre de l'image du regardant, ainsi
que des parties de l'espace de la travée où elle se situait. De
cette façon, l'oeuvre renvoyait toujours à autre chose,
intégrait en son sein le réel environnant. Le miroir agissait
comme un révélateur d'image à jamais actif, à la
différence d'une peinture, d'une sculpture, à jamais figé
dans un ensemble immuable. À côté était
projeté Rundown (1969). Sur cette célèbre
vidéo, une benne déverse une coulée d'asphalte le long
d'une colline des hauteurs de Rome. L'oeuvre
81
est cette coulure fugitive, capté avant de
disparaître. Rundown rappelait les processus d'érosion
déjà exploité dans Spiral Jetty. Pour cette
pièce Robert Smithson déplaçait six milles tonnes de
terres pour former une spirale dans un lac isolé de l'Utah.
Fasciné par les processus d'échange, de mobilité, et de
transformation, l'artiste choisissait le site pour sa forte concentration en
sel, étant sûr que la dégradation viendrait faire patiner
d'une couche blanchâtre la terre déplacée. Dans le de
descriptif de l'oeuvre, il inscrivait d'ailleurs le sel - à
côté de la terre, de l'eau et de la pierre À comme l'un de
ses composants. Aujourd'hui c'est lorsque le niveau du lac est bas
qu'émerge de l'eau Spiral Jetty. Comme l'envisager Smithson,
les blocs ont blanchi. Le sel s'y est enraciné et sert d'indice à
la marque du passage du temps. Partant autonome à « l'exploration
de la structure cristalline du temps150 », comme une immense
fluidité réfléchissante, le sel incorpore dans l'oeuvre
les marques du ressac incessant. Comme du miroir, l'artiste use avec le sel de
matériaux de transparence afin de créer des lieus
réflexifs du temps et de son impermanence.
En formalisant l'oeuvre en fonction du site où elle
viendra prendre place, les pratiques in situ jouent sur la
temporalité. Anti-monuments de la précarité et de la
fragilité, ces installations poussent à accepter les limites,
à reconnaître que la durée n'est pas synonyme de
qualité. Invité à intervenir dans les espaces du Palais de
Tokyo, Daniel Buren présentait Quatre fois moins ou quatre fois
plus151. Première exposition « historique »
dans un lieu consacré à la création émergente,
Nicolas Bourriaud insistait pour rendre hommage à l'investigateur du
terme in situ à l'un des premiers artistes français
à avoir consacré de l'importance au contexte de l'oeuvre. Tout au
long de son activité artistique, Daniel Buren intervient en espace
public, le plus souvent au moyen d'installation éphémère.
La durée des oeuvres qu'il conçoit est toujours fonction
d'adéquation avec le site et de son usage. Prenant en compte la
dimension active du lieu - dimension qui imprimera sa temporalité sur
l'oeuvre - Buren remplit de sens cette désagrégation progressive
:
150 Robert Smithson, « Towards the Development of an Air
Terminale Site » in Writings, 1953
151 Fig. #52
82
« L'éphémérité de l'art,
c'est sa grandeur et sa dignité. Toutes les oeuvres devraient avoir
l'ambition d'être éphémères.152 »
En créant des environnements qui ne vivent que le temps
de l'exposition, les oeuvres de Michael Lin sont aussi conditionnées par
les lieux dans lesquelles elles s'insèrent. Créés pour un
lieu et pour un temps spécifique, ces travaux dépendent des
contraintes propres à leur élaboration. En 2003, l'artiste
présentait Spring, une composition florale peinte à la
main sur le sol du Palais de Tokyo. Mettant le visiteur dans une position
d'iconoclaste, il invitait le public à marcher sur l'oeuvre sans
précaution particulière. Au fur et à mesure, les
piétinements détérioraient inéluctablement les
surfaces peintes.
« Quand on considère la durée de
l'exposition comme un élément à part entière de
l'oeuvre, on envisage déjà l'exposition comme un
événement, et non comme une collection d'objet
exposé.153 »
En changeant notre rapport à l'oeuvre, Michael Lin
interrogeait l'attitude du spectateur, renversait les dispositifs de
création et d'exposition. Plus que de la contemplation, il attendait que
son travail fournisse un cadre à d'autre scénario. Par la mise en
contexte de l'oeuvre, Michael Lin montre bien que la signification de tout lieu
tient aux activités qui s'y déroulent, que l'oeuvre n'est rien de
plus que le théâtre de l'échange social, bref de par
nature.
IV.2.b - L'oeuvre exposition
Au Palais de Tokyo, Katharina Grosse occupait tout l'espace
lumineux de la grande nef. D'importantes quantités de terre y
étaient rassemblées, alliant du sombre, du humus, du claire, de
l'argile. Ces formes géoglyphes étaient ensuite recouvertes par
l'artiste par de la peinture acrylique en utilisant un pistolet vaporisateur.
Débordant sur le mur, l'espace d'exposition principal était
transformé en un paysage total, en une immense peinture qui englobait le
spectateur en son sein. Intitulé Construction à
152 Daniel Buren, « Entretien avec Suzanne Pagé
» in Daniel Buren, les écrits, CAPC, 1991
153 Entretien avec Jérôme Sans, Michael
Lin, Palais de Tokyo, 2003
83
cru154, construction sans fondation,
l'oeuvre se liée à l'exposition et l'exposition devenait
l'oeuvre.
Le programme moderniste, tel que définit par
Clément Greenberg, tente de donner une indépendance à
l'oeuvre. Autoréférentielle, celle-ci doit pouvoir exister pour
elle-même, en dehors de tous contexte. À partir des années
1960, en réponse à la doxa moderniste de l'autonomie de
l'art, les artistes cherchent à dépasser l'enveloppe du tableau,
sa surface englobante. Le tableau n'est plus perçu comme la
frontière ontologique de la peinture, comme la « limite du corps
enveloppant.155 » L'autonomisation de l'oeuvre perd ainsi de
son actualité156. Le travail de Katharina Grosse au Palais de
Tokyo montrait ce processus. Installation in situ, la peinture
occupait tout l'espace de la verrière, l'oeuvre devenant l'espace
d'exposition, l'exposition devenant l'oeuvre. Conçue pour le temps de
l'exposition, l'oeuvre était de par nature
éphémère. En lien avec son environnement, la peinture
perdait de son automatisation. L'oeuvre n'existait pas en dehors de
l'exposition. Et si l'exposition est l'oeuvre et l'oeuvre l'exposition, on peut
d'une certaine manière y voir une certaine forme de résistance
à l'objet. Construction à cru était une oeuvre
d'art totale qui ne pouvait laisser échapper des objets, au risque de
voir leur « aura » s'annuler. Comme lorsqu'Yves Klein réalise
L'exposition du vide, il n'expose pas une oeuvre intitulée Le
Vide, mais une exposition présentant le vide, Katharina Grosse
produisait une exposition dont les objets ne pouvaient être
isolés. Le caractère éphémère de l'oeuvre
instituait une tension, donnait à l'ensemble un gage
d'authenticité.
IV.3 ... à un art in socius
Au tournant des années 60, l'art commence à
s'étendre, d'abord hors des sculptures, hors du tableau, puis occupe
l'espace d'exposition en son entier. L'art va même jusqu'à se
retrouver au-dehors de ces espaces, notamment dans la pratique du land
art. En s'externalisant, les oeuvres accordent une importance grandissante
au
154 Fig. #53
155 Aristote, Physique IV
156 « La forme exposition prime désormais sur la
forme-tableau ou la forme-sculpture. » Nicolas Bourriaud, Formes de
vie, Op. cit.
84
contexte où elles prennent place, aux
caractéristiques physiques, culturelles et politiques du lieu.
Pensée en fonction de l'ensemble des circonstances mises en jeu par
l'actualité du site, l'oeuvre s'en inspire et dès lors les
reflète. Mais alors que l'art in situ se passionnait pour le
lieu de l'oeuvre, les pratiques artistiques contemporaines orientent
désormais leur réflexion vers l'idée de réseau, de
communauté. Un phénomène que Nicolas Bourriaud identifie
en parlant du « passage de l'in situ à l'in
socius157 ».
En continuité idéologique avec l'art de la
performance, où l'artiste considérait son corps comme un
matériau, son ossature comme sculpture, les pratiques in socius
prolongent le dédain pour l'objet d'art. Dans ce contexte de la
dématérialisation de l'oeuvre, les artistes expérimentent
des pratiques qualifiées de relationnelles en raison de leur inscription
dans la « sphère des interactions humaines et son contexte
social.158 » Bien que visible, comme l'happening,
l'acte créatif est ici intangible. Explorant les relations entre art et
vie, il ne laisse aucune trace et ne peut être ni acheté ni vendu.
Ces événements sont déplaçables. Interagissant dans
le milieu où elle prend place, l'oeuvre est incompatible avec
l'immobilité pérenne habituellement observée dans la
tradition du monument. L'art in socius consacre ainsi
l'émergence d'un nouveau rapport aux lieux de l'art dans des oeuvres
mettant en formes des ambiances. Comme pour le land art, l'ambition
n'est plus de fonder une totalité plus ou moins autonome mais de
s'insérer dans un monde éclaté et de tenter d'y faire lien
:
« L'artiste des années 80 défie les
qualités de permanence, d'immobilité et de
non-répétition qui étaient intrinsèquement
liées à la sculpture, notamment en la recréant en tant que
pratique nomade.159 »
157 Nicolas Bourriaud, Esthétique relationnelle,
Op. cit.
158 Nicolas Bourriaud, Op. cit.
159 Hélène Doyon, Hétérotopie :
de l'in situ à l'in socius, Université du Quebec, 2007
85
IV.3.a - L'artiste comme créateur de
dialogue
Au début des années 90, une frange d'artistes
réunis sous la bannière de l'Esthétique
relationnelle, telle que la théorise Nicolas Bourriaud,
entreprennent de restaurer le dialogue. Alors qu'apparaît en France le
terme de « fracture sociale », ces artistes tentent de restaurer le
dialogue face à un certain repli sur soi et à « un retour
proclamé de l'intime160 ». Ces artistes veulent
entretenir avec le lieu et le contexte un échange passager, moins
soucieux de pérennité mais préoccupé davantage de
proximité et de quotidien. L'oeuvre se situe au niveau des interactions
qu'elle produit, interactions entendues comme les expériences
subjectives des participants, de par nature impermanente.
Dans le programme d'événement préalable
à l'ouverture du Palais de Tokyo, les directeurs de l'institution
invitaient Alain Bublex à proposer une pièce161.
L'artiste proposait une marche dans le 16e arrondissement, aux
environs de l'institution et demandait aux participants de venir chargé
de bagage. Chacun portait deux ou trois sacs, à bout de bras, en
bandoulières... L'idée était d'introduire l'image du
voyage, du transit, de la mobilité. Alors que ces sacs étaient
vides, les participants rentraient aussi dans un jeux
d'intersubjectivité sociale, se faisant de fait passer pour des
touristes, des immigrants. L'oeuvre se situait au niveau des dialogues que
cette situation était amenée à créer, au niveau de
la subjectivité des participants et de leurs ressentis propre. L'artiste
offrait les conditions d'un lien social innovant, le travail prenant place dans
un nomadisme aléatoire. Dans la même optique, à l'occasion
d'une exposition hors les murs en Argentine, le Palais de Tokyo installait dans
les espaces Tribune162, un travail de Fabrice Gygi. Ce
banc, recouvert d'un abri contre la pluie, comme ceux des entraîneurs sur
un terrain de football, plaçait les spectateurs qui étaient
amenés à s'y asseoir dans une position qui engendrait de
l'échange social. Dans ces deux cas, l'oeuvre est volatile, prend place
une fois et ne peut pas se répéter, rejoignant en cela
l'idée d'impermanence.
160 Claire Moulène, « Scénariser le
réel : les utopies de proximité » in Art contemporain et
lien social, Editions cercle d'art, 2007
161 Fig. #54
162 Fig. #55
86
À l'ouverture du Palais de Tokyo, Nicolas Bourriaud et
Jérôme Sans demandaient à l'artiste Robert Milin de penser
l'espace laissé vacant à l'ouest de l'institution, la fine bande
de terre de la rue de la Manutention. L'artiste pense son oeuvre en fonction du
lieu et souhaite réagir face à l'aspect un brin glacial du
quartier. Peu chaleureux, le 16e arrondissement de Paris exhibent en
effet ses symboles de pouvoirs. Ses rues sont larges et
déshumanisées. Tout y est extrêmement onéreux. Pour
réinsuffler du dialogue et de la convivialité, Robert Milin
décidait d'installer un jardin collectif, intitulé Le Jardin
aux habitants163. Il divisait la fine bande de terre en seize
parcelles et les proposait à des volontaires pour les cultiver. Il
mettait ainsi en place, les conditions suffisantes pour faire germer des
relations, qui n'auraient sinon pu prendre place. Son travail s'inscrit dans la
durée de la vie sociale plutôt que dans celle d'un objet
relativement pérenne, dans des processus et expériences
vécues plutôt que dans la contemplation passive d'un objet. Et
l'artiste de dire :
« De Fluxus j'ai retiré cette idée qu'il
était possible de sortir de sortir de la peinture. (...) Par
l'idée d'environnement, d'un art plus synthétique, incluant des
performances, des processus, des expériences vécues, Kaprow a
pensé que de nouvelles formes pouvaient intervenir en dehors du cadre
contemplatif du musée. Je crois moi aussi qu'il y a un certain
conservatisme à rester dans la contemplation des objets.164
»
Décloisonner l'art et la vie, donner la
possibilité aux gens de se rencontrer, autant d'enjeux que l'on retrouve
aussi chez l'artiste thaïlandaise Surazi Kusolwong. Pour l'exposition
d'ouverture du Palais de Tokyo, l'artiste installait un marché proposant
au rabais des centaines d'articles sans grande utilité, bradés
dans les rues de Bangkok. En 2004, à l'occasion de son exposition
Quand les objets rêvent (Energie Storage) elle plaçait
dans l'une des alcôves un jukebox, un distributeur de boisson, des
canapés. Pour Surazi Kusolwong l'art est une fête, un moment de
partage et de rencontres. Elle invite le public à participer à
ces installations et privilégie un art relationnel tourné vers
les dispositifs de communication. Dans ce contexte, l'art devient plus un lieu
à vivre qu'un espace de contemplation. L'oeuvre se situe au
163 Fig. #56
164 Entretien entre Robert Milin et Jérôme Sans,
Robert Milin, Palais de Tokyo, 2004
87
rapport interhumain qu'elle déploie. Comme un work
in progress, elle prend différentes formes selon les situations. La
flexibilité, le nomadisme sont les deux moteurs du processus de
l'oeuvre. Processus que l'on retrouve aussi chez Tsuneko Taniuchi,
présentée deux fois dans l'institution. Un jour
d'été, l'artiste installe un stand à l'entrée de
l'institution. Baptisé Tsuneko Troc165, cette
installation précaire invite le passant à un échange. Sous
la bannière « prends ce qui te plaît et laisse ce que tu veux
», l'installation s'active dans avec l'interaction d'un public. À
la frontière de l'étrange À dans une autre installation,
l'artiste cuisinait des sushi à la merguez dans les espaces
d'expositions du Palais de Tokyo À ses performances happent le
spectateur dans des processus qu'ils n'ont pas choisis, toujours
différents. Un événement, dit-elle, qui comporte «
une part de naturel, une part d'improvisation sur un thème, et aussi une
part de scénario, sans que la limite entre ces domaines soit absolument
distincte166 ». Dans la lignée du théâtre
d'intervention, les performances de Tsuneko Taniuchi et de Surazi Kusolwong
sont connectée à la réalité la plus
immédiate, figure le conditionnement social dans des apparitions
fugitives, pour le temps de l'action.
IV.3.c À Agir dans l'espace social
Exit l'atelier, l'art pénètre la place publique
pour mieux la questionner. Dans les escalators d'un centre commercial, un
programme télé ou une boucherie hallal, les artistes
interviennent au plus près des normes qui organisent notre
société. En faisant l'éloge du paradoxal, ils y insufflent
de l'anormalité, et soulagent l'ambiante morosité.
Car à quoi bon produire des objets, les placer dans un
musée pour ensuite demander au public de venir les contempler ?
Et dans quelle mesure, si quand bien même quelqu'un daigne les regarder,
peuvent-ils être vecteurs de ce que l'artiste a voulu signifier ?
Puisqu'ils appellent une révérence sotte, faite de stupeur et de
réflexes conditionnés, certains artistes ont
dépassé l'idée de l'oeuvre en tant que
matérialité. Ils ont délaissé le signe,
l'intermédiaire d'une représentation, afin de
165 Fig. #57
166 Paul Ardenne, Art, le présent, op.
cit.
88
pouvoir composer à partir de la réalité
même. Et en forgeant leurs pratiques dans le champ social, ils
anéantissaient la barrière qui séparait encore la vie de
l'art.
Alors que les pratiques in situ consistaient à
produire une oeuvre en fonction du site où elle viendrait prendre place,
l'art in socius peut être perçu comme la version plus
aboutie et contemporaine, d'une prise en compte totale par l'artiste du
réel. Ces artistes l'infiltrent, l'incorporent plus qu'ils ne le
figurent. Ils transforment en expériences esthétiques les
phénomènes les plus ordinaires de la vie quotidienne, abordent
l'art comme un événement plutôt que comme un monument.
Leurs actions prennent place à l'intérieur du corps social
où ils utilisent tels des matériaux, les jeux
d'intersubjectivités qui formalisent nos rapports aux autres.
Présentées au Palais de Tokyo, voici quelques exemples de ces
pratiques.
Mathieu Laurette s'incruste sur les plateaux de jeux
télés, participe à Tourner manège pour en
montrer toute l'incongruité. Dans sa série des
Apparitions, on le voit dans le public de toutes les émissions
de variétés. À l'occasion de l'exposition collective
Notre Histoire... Mathieu Laurette présentait la documentation
d'un travail intitulé Les Produits remboursés167.
Sans dépenser un sou, l'artiste se nourrit pendant trois mois
uniquement avec des produits « satisfait ou remboursé ». Par
la simple À mais systématique À mise en fonctionnement
d'un dispositif publicitaire, Mathieu Laurette remet symboliquement en cause le
système capitaliste. Ces actions dévoilent par un effet de
miroir, l'image de la propre présence du spectateur. En les surlignant,
l'artiste interroge ainsi les normes relationnelles, les usages
comportementaux, les postures sociales. Invité à présenter
ses travaux trois fois au Palais de Tokyo, Renaud Auguste Dormeuil vit quatre
mois dans une tour-bureau de la Défense. Dans le monde des affaires, il
crée au contact des consultants, performe au milieu de leurs
réunions power point. Actes vifs et transitifs ces projets sont
temporaires, impossible à représenter nulle part ailleurs sans en
altérer le sens, précisément parce que le travail
s'inscrit dans des circonstances qui tant sir le plan géographique que
temporel impliquent des relations imprévisibles, donc non
programmable.
167 Fig. #58
89
Se basant sur l'anticipation des réactions, ces actions
happent les spectateurs dans des processus artistiques qu'ils n'ont pas
choisis. Comme composant central, s'extrait la volonté de lutter contre
la standardisation des comportements. Car il ne s'agit plus de critiquer, c'est
la société qui se disloque. Les artistes in socius, sans
complexe vis-à-vis des aspects les plus dérisoires de la culture
populaire, en agrandissent les détails pour leurs laisser le soin, par
eux même de s'exprimer. Ils rejoignent en cela l'idée d'une «
autonomie expressive du réel », théorisé par Pierre
Restany. Achèvement du réalisme puisque leurs interventions
interagissent avec la vie, ces artistes interviennent sur le vif, mettent en
scène le présent même. Et quitte à focaliser
l'événement en un temps et un espace circonscrit, non
reproductible et par nature éphémère, ces actions ont le
mérite d'établir une connexion franche entre l'oeuvre et son
spectateur. L'art in socius renoue ainsi avec l'essence d'un art
engagé. Il perturbe les relations humaines pour briser le formalisme
dans lequel nous nous sommes installés. Et comme l'étonnement est
propice à insuffler une nouvelle hygiène d'esprit, ces actions
laissent aux spectateurs surpris, le terreau pour remettre en germe leurs
pensées.
90
CONCLUSION
Pour répondre d'une manière synthétique
à la problématique qui anime le mémoire À Quelles
sont les modalités de représentation des différents
aspects de l'impermanence au sein de la programmation du Palais de Tokyo ?
À rassemblons en guise de conclusion les trois aspects principaux que
recouvre cette notion au sein de l'institution.
Première modalité, des oeuvres statiques qui
proposent dans le récit qu'elles mettent en place, un déplacement
temporel, une incarnation du transitoire. Pour plus de précision,
scindons en deux parties cette catégorie, division prenant compte des
visées sur lesquelles la rhétorique de ces oeuvres repose.
Pourrait être considéré comme lyrique la
capacité d'entrevoir la vie sur ce qui la menace et en
rétrécie la portée, la mort. Regrettant de ne pouvoir
« jamais sur l'océan des âges, jeter l'ancre un seul
jour168 », ces artistes usent de leur sensibilité devant
l'impermanence du temps. Comme vu dans la première partie, les ruines de
Michael Elmgreen & Ingar Draset, de Kay Kassan, les sculptures fragiles de
Vincent Ganivet, Karsten Födinger, Sébastien Vonier, Yuhsin U.
Chang, sont autant d'oeuvres qui anticipent l'usure à venir. Dans la
même logique les vanités contemporaines d'Adel Abdessemed, Laurent
Le Deunff, Bruno Peinado, Nicolas Juillard, Yoshihiro Suda, Tony Matelli,
Gianni Motti, Urs Fischer, font prendre conscience au spectateur, par effet de
rétroaction, de la fuite du temps, de la fin certaine.
À côté de cette contemplation lyrique de
l'impermanence du temps, d'autres oeuvres usent de l'expression de
l'éphémère comme critique des gages d'éternelles
jouvences qu'accompagnent souvent les discours commerciaux, politiques et
sociétaux. Ces oeuvres, certes statiques dans leurs présences,
incarnent aussi le passage d'un état à un autre, montrent
l'éreintement de la matière pour signifier le caractère
transitoire des possessions matérielles. Analysés dans le
troisième chapitre À la critique de l'éternel À les
travaux de
168 Alphonse de Lamartine, « Le lac » in
Méditation poétique, 1820
91
Christoph Büchel, Chen Zhen, Guillaume Paris, Wang Du,
rappellent l'impermanence des biens, les mensonges des discours publicitaires
et médiatiques. Mettant en doute l'idée de progrès
technologique, son obsolescence à venir, les oeuvres de Daniel Dewar
& Grégory Gicquel, Raphael Zarka, Eric Tabuchi, Luc Kheradmand,
montrent comme des ruines, les restes hypothétiques qu'un
archéologue du futur pourrait trouver en dépoussiérant les
vestiges de notre temps. Et en rendant perceptible l'emprise de l'homme sur la
nature, son dérèglement programmé et sa fragilité,
Henrik Hâkansson et Tetsumi Kudo rendaient compte au Palais de Tokyo de
l'impermanence dangereuse résultante du déséquilibre
écologique.
Seconde modalité de l'expression de l'impermanence du
temps, la première partie du mémoire revenait sur l'idée
de processus. En usant de matériaux pauvres, flexibles et
périssables, les sculptures organiques de Michel Blazy proposent
d'indexer à la matière, les fluctuations vitales correspondantes
à la durée d'existence des médiums employés. Jamais
tout à fait pareilles, ses oeuvres évoluent dans un
déplacement interne aux surfaces. Pour montrer le transitoire, le
fugitif, les environnements d'Arthur Barrio et de Mathieu Briand utilisent des
matériaux légers et éphémères :
poussière, sang, talc, café... Autant de matières qui
rendent compte de l'impermanence, font perdre la conscience des
référents temporels. L'imminence de la perte semble tout à
côté, sa menace constante. Alors que Loris Gréaud, Tobias
Rehberger figurent la marche du temps par des procédés lumineux,
les travaux de Roman Signer, Arcangelo Sassolino, Zelvinas Kempinas usent de la
mécanique pour figurer le mouvement. Donnant le sentiment que tout est
transitoire, leurs oeuvres se meuvent dans l'espace par intermittences
programmées, par succession de phases de réalité
fragmentée, quitte comme chez Floriant Pugnaire & David Raffini,
Kris Vleeschouwer, à s'autodétruire, ne laissant à terme
que des résidus inertes de matière. Présentés au
sein du mémoire, ces travaux évolutifs ont en commun de
questionner la relation entre l'art et son immutabilité.
La troisième et dernière modalité de
l'expression de l'impermanence dans la programmation du Palais de Tokyo
correspond au passage historique À au tournant des années 1970
À de la question « Qu'est ce que l'art ? » à la
question « Quand y a-t-il art ? ». Ainsi, la quatrième partie
du mémoire présentait l'imbrication
92
progressive dans l'oeuvre du temps de la vie de l'artiste,
notamment avec l'exemple de Robert Malaval, de Bas Jan Ader et celui de
Charlotte Posenenske, dont le retrait de la scène artistique est
paradoxalement reconnu comme acte créatif. Reliés avec les
performances de Marina Abramovich et d'Ana Mendieta, ces travaux prennent place
dans une temporalité brève, donnée comme
non-reproductible. Seule une documentation photographique, sonore ou filmique
peut en rendre compte. Au côté d'un « art de l'attitude
» - pour reprendre l'expression de Nicolas Bourriaud À d'un art de
la performance, le temps de l'oeuvre joue aussi un rôle crucial dans
l'art in situ. Présentant des vidéos de Robert Smithson,
accordant une rétrospective au travail de Daniel Buren, le Palais de
Tokyo mettait à l'honneur ces pratiques. Il en montrait aussi
l'intégration muséale, notamment avec le travail de Katharina
Grosse. Dans ce cas, l'exposition devient l'oeuvre et l'oeuvre l'exposition,
brève de par nature. La quatrième partie du mémoire
À de l'éphémère de l'objet à la
fugacité de l'action À montrait aussi les aboutissants
contemporains des pratiques juste énoncées. Présentant
l'art in socius (esthétique relationnelle), notamment
par les travaux de Matthieu Laurette, Alain Bublex, Robert Milin, Surasi
Kusolwong, Tsuneko Taniuchi les interventions en prise avec le réel
n'envisagent la production d'aucune oeuvre arrêtée. Vécu en
fonction des aléas du temps, l'art vise ici l'enclenchement d'un
processus intégré aux fluctuations de la vie.
Phases sérielles séquencées qui impriment
sur l'art la marque de l'impermanence, le temps est une matière qui
offre de multiples prises, de nombreuses déclinaisons plastiques sur
lesquelles l'artiste d'aujourd'hui greffe la rhétorique de son travail.
Au travers du corpus d'oeuvre présenté, le mémoire a
montré À par le prisme de la programmation du Palais de Tokyo
À les enjeux et aboutissants contemporains des recherches portant sur la
temporalité de l'oeuvre. Répondant à des visées
différentes, ces recherches trouvent leur unité dans leur
capacité à interroger le devenir de l'oeuvre, l'avenir de
l'homme. Et en traitant du temps, ces travaux permettent un déplacement
du rapport traditionnel que l'on peut entretenir avec lui, dans le but, bien
souvent, de créer une complication, une gêne dans la
manière dont nous le vivons d'ordinaire. En dépréciant
l'idée de permanence statique À si ancrée dans l'esprit
occidental À la figuration de la limite temporelle revient à
contrecarrer les conceptions sur lesquelles reposent les leurs qui font
fonctionner la société. Montrant toujours le passage d'un
état à un autre, les oeuvres présentées
démontrent le
93
mouvement permanent, le leur de stabilité. Et incitant
à la prise de conscience du changeant comme donnée fondamentale
du vivre, ces oeuvres montrent la friabilité de ce qui peut sembler si
ancrer, donner l'occasion de constater la malléabilité de ce qui
apparaît figé. En cela, le pessimisme qui au premier abord, a pu
transparaître du corpus d'oeuvre présentée, reste à
être relativisé.
Notre époque voit chaque société humaine,
qui avait confié aux religieux la tâche de construire la
représentation de l'au-delà, peu à peu réfracter
son discours sur la mort. Cachée, cette donnée fondamentale de la
vie reste absente des débats, comme si elle était trop
évidente pour devoir être exprimé. Affichant le transitoire
comme partie constituante de la vie, le corpus présenté comblait
le déficit de discours sur ce thème et affirmait l'existence
comme belle car précaire, au sens où Nietzsche parle d'un «
éphémère de l'impermanence acceptée.169
» Tel le danseur de la fin de Zarathoustra qui accélère ses
pas après s'être rendu compte de l'inconsistance de l'existence,
les oeuvres présentées tendent à prouver
l'inadéquation des discours qui prennent appui sur la permanence, afin
peut être, de montrer le chemin d'accès à un bonheur plus
véritable. En montrant la fragilité, la caducité, la fin
certaine, ces oeuvres nous réapprennent à parler de la mort, non
pas dans une rengaine accablante mais dans une finitude acceptée qui
pousse à vivre chaque instant plus intensément. Les installations
de Christoph Büchel peuvent par exemple être perçues comme
vecteurs d'idéaux au sens où elles appellent à un
renversement des pratiques consuméristes, à une remise en
question des gages de satisfactions colportés par le
matérialisme. En montrant pêle-mêle le vieillissement
à venir, son travail montre que le point d'ancrage de l'humain dans la
vie doit nécessairement se trouver dans une autre optique.
Comme le dégoût profond du langage incite le
poète à hausser la qualité de son verbe, user de
l'impermanence du temps est pour l'artiste, l'occasion de mettre en exergue son
dédain pour l'oeuvre gageuse d'éternité. C'est une
beauté toute éphémère qui s'y affirme, un gage
d'honnêteté calqué sur les données du vivre.
169 Cité dans Christine Buci-Glucksmann,
Esthétique de l'éphémère, Op.
cit.
94
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100
ANNEXE 1
L'IDEE D'IMPERMANENCE DANS L'ART
APPERCU
HISTORIQUE
Dans l'art, l'expression du fugitif, de
l'éphémère, exprime la métamorphose plastique du
rapport qu'entretient l'artiste à sa propre impermanence. Puisque la
sensation d'impermanence présuppose la prise de conscience par l'artiste
de la nature mortelle des êtres et des choses, l'idée
d'éphémère traverse l'histoire de l'art. Il s'agit ici
d'en donner un bref aperçu, afin de démontrer l'importance de
cette idée, afin aussi de poser les bases théoriques sur
lesquelles repose ce mémoire. Ce retour historique veut aussi tendre
à prouver, alors que Marc-Olivier Wahler affirme vouloir « tourner
le dos à l'histoire de l'art170 », qu'une analyse de la
programmation permet, au niveau du champ sémantique des oeuvres
exposées, de montrer une filiation entre création contemporaine
et programme esthétique moderne.
Comme toutes les choses sensibles, les belles choses ne durent
pas. Lorsque Socrate discute avec le sophiste Hippias d'Elis, le premier lui
demande ce qu'est la beauté, et Hippias de répondre, « Tu
sauras donc, puisqu'il faut te dire la vérité, que le beau, c'est
une belle jeune fille.171» La notion du beau est ici
reliée à une apparition fugitive, à une image convenant
à un lieu et à un moment déterminé, qui
disparaîtra inéluctablement l'instant suivant. Il est aussi
intéressant de noter la réticence de certains philosophes
antiques à laisser une trace matérielle. Socrate, Diogène,
Antisthène n'ont jamais formulé leurs pensés par
écrit. Dans l'intellect, elles sont en permanence
réactualisées par les expériences sensibles. La mise en
pratique de ces idées prend place à un moment et dans un lieu
déterminé.
A l'opposé, la notion du beau classique repose sur une
série de principes esthétiques immuables qui recouvrent des
idées normatives que l'art aurait pour tache de décliner. En ce
sens, la toile représente un lieu fermé où la
beauté peut régner car figée, elle n'a plus prises aux
circonstances du temps. Dans cette optique,
170 « Marc-Olivier Wahler. L'art contemporain dans son champ
élargi », Veronica Da Costa. Revue Mouvement, Juillet À
Septembre 2009
171 Platon, Hippias majeur
101
il ne saurait y avoir de sens, que par l'entremise d'une trace
matérielle durable, sa pérennité étant le gage de
sa viabilité.
À partir du XVIIe siècle, notamment
grâce aux efforts technologiques qui permettent sa mesure, «
s'accentue la perception d'un temps réellement
instantané.172 » Ces dires sont confirmés par
Jean Starobinski, qui remarque qu'à la même époque, une
césure s'opère au niveau des relations qui lient le beau à
l'éternel.
« On s'éloigne au XVIIe siècle de
la conception d'un temps circulaire ou immobile, pour commencer à
imaginer un temps irréversible.173 »
Devant la prise de conscience de la fuite du temps, les
artistes commencent à représenter
l'éphémère. Une esthétique prend progressivement
forme sur ce thème. Goethe, sans pour autant dire que la marque de
l'éphémère fasse la beauté, eu l'idée que
seul l'éphémère soit porteur du beau :
« Pourquoi suis-je éphémère, ô
Zeus ? dit la Beauté Je n'ai fait beau, dit Zeus, que le seul
éphémère174 »
Avec l'industrialisation croissante, le chemin de fer qui
s'instaure, les mentalités du XIXe siècle commencent
à percevoir le temps non plus dans sa linéarité
homogène, mais comme une discontinuité fragmentée, comme
une succession d'instants à intervalles irréguliers. Un parmi
d'autres, le tableau Pluie, vapeur, vitesse (1844) de Turner illustre
à merveille la mise en figure mobile du monde. Le temps passe d'une
dimension de l'histoire à celle de l'instantané.
En contact avec l'art et les philosophies de
l'Extrême-Orient, les artistes européens se retrouvent puis
s'inspirent du concept de l'impermanence, présent pour exemple dans le
bouddhisme, dont il est l'une des idées clefs. Van Gogh collectionnera
des estampes japonaises inspirées par le thème du
ukiyo-e, dont la conscience du mouvement ininterrompu forme le clair
de son concept spirituel. Magnifiées dans la
172 Heinrich Wölfflin,
Réflexions sur l'histoire de l'art, 1940
173 Jean Starobinski, La Mélancolie
au miroir, Julliard, 1989
174 Goethe, « L'Amour, la rosée, les fleurs et la
jeunesse » in Les Saisons, 1790
102
représentation du ressac de vague, ces images offrent
une allégorie du temps insaisissable.
À son tour, Baudelaire définit la
modernité comme le passage d'un idéal du beau, extérieur
à la prise du temps, à un beau impulsif, évolutif et
changeant. Est moderne le culte du présent plus que de l'immuable, le
culte du transitoire plus que de l'éternel. Le présent rentre
dans le champ d'action, l'expression de l'impermanence venant la valoriser. En
quête d'honnêteté vis-à-vis du réel, sa
restitution s'impose dès lors comme l'un des enjeux de
l'esthétique moderniste. Contre le beau normé, Baudelaire
célèbre le fugitif et le transitoire. Dans Le peintre de la
vie moderne, il loue les esquisses de Constantin Guy, car elles mettent en
valeur l'éphémère de l'apparence. Cet article de L'Art
romantique permet de faire un rapprochement entre l'expression de
l'impermanence et les enjeux modernistes. Le poète écrit :
« La modernité, c'est le transitoire, le fugitif,
la moitié de l'art dont l'autre moitié est l'éternel et
l'immuable. [...] Cet élément transitoire, fugitif, dont les
métamorphoses sont si fréquentes, vous n'avez pas le droit de le
mépriser ou de vous en passer. En le supprimant, vous tomberez
forcément dans le vide d'une beauté abstraite et
indéfinie.175 »
Les peintres de la seconde moitié du XIXe
siècle tentent de capter les changements fugitifs du ciel, les
variations lumineuses qu'offrent les différentes heures du jour. Leurs
peintures montrent la fugacité de l'instant, l'impermanence du temps.
Ainsi, les études de Monet sur la cathédrale de Rouen, comme sa
série sur les Nymphéas, révèlent la
métamorphose incessante de la réalité, le caractère
éphémère et relatif de l'apparence, de sa perception et
des certitudes qui y prennent racine.
Les mouvements artistiques du XXe affirment
à leur tour la volonté de transfigurer le transitoire, de montrer
le mouvement. « Le monde s'est enrichi d'une beauté nouvelle, la
beauté de la vitesse » écrit Marinetti en 1909. Le
poète promet d'abolir le temps et l'espace et de les remplacer par la
vitesse perpétuelle et universelle,
175 Charles Baudelaire, Le Peintre de la vie moderne,
1863
103
comme Hippias, d'aimer « la beauté d'une sensation
ou d'une émotion en tant qu'elle est unique et destinée à
s'évanouir immédiatement.176 »
Marcel Duchamp aborde le problème de la
représentation du mouvement, et se sert du cubisme et du futurisme pour
créer un art dynamique. Dans son Nu descendant un escalier, il
fait fusionner le concept de simultanéité futuriste, la
restitution successive d'une action, saccadée comme sortant d'un
objectif photographique, et le concept de simultanéité cubiste,
qui représente latéralement le sujet, au même moment, des
faces et du côté. Picabia proposera d'ailleurs le concept d'«
instantanéisme ». Ces recherches trouveront un aboutissement dans
la Roue de bicyclette de Duchamp, roue mobile, animée, «
qui concrétise son message par le mouvement physique.177
»
Les recherches sur le mouvement, le temps et les changements
se font encore plus explicites au tournant des années 1960. La
mondialisation entrainant une « culture des flux et des
instabilités mondialisées178», ces pratiques
accompagnent les bouleversements de la société. L'histoire de
l'art du vingtième siècle opérerait ainsi le passage d'une
évocation du mouvement à l'utilisation de cette impermanence
comme espace d'élaboration de l'oeuvre. En d'autre terme, à
l'évocation du temps que privilégie le classicisme, les artistes
du )()(e siècle institue un rapport plus concret entre art et
temps, y substituant plus volontiers une relation d'expérience. Ces
pratiques peuvent êtres regroupés comme suit :
D'un côté, des oeuvres dont la
matérialité est empreinte d'instabilité. L'Arte Povera
utilise des matériaux pauvres. Le Land Art, les pratiques
in situ, inscrivent par le contexte où elles prennent place,
les oeuvres dans des exigences de périssabilité.
Déplaçant des énormes monticules de terre, Robert Smithson
modèlent une spirale dans une crique. À la merci de l'eau, ce
symbole de la fuite du temps s'érode inéluctablement.
176 F.T. Marinetto, Manifeste futuriste, Le Figaro, 20
février 1909
177 Pontus Hulten, La liberté
substituve ou le mouvement en art, 1955
178 Christine Buci-Glucksmann,
Esthétique de l'éphémère, Galilée,
2003
104
De l'autre, dans la ligne sensible des performances
dadaïstes d'Hugo Ball au Cabaret Voltaire, Nicolas Bourriaud nomme «
art de l'attitude179 » ces interventions en prises directes
avec le réel. Les performances interagissent dans le temps, prenant acte
dans l'instant. Les happenings des actionnistes viennois, le mouvement Fluxus,
le Body Art, inscrivent leurs pratiques dans l'éphémère,
pour annuler les barrières qui séparent l'art de la vie. En
exemple, John Cage s'accapare de la philosophie Zen. Lui rendant hommage,
l'exposition Rolywholyover, organisée en 1995 au Gugghenheim
Museum montrait les aboutissants de cette pratique. Pour rendre
l'insaisissable, l'exposition changeait d'apparence chaque nouvelles
journées.
Il ne faut cependant pas perdre de vue, qu'un art de
l'éphémère À un art où les oeuvres
déploient dans leur autonomie, une action, un mouvement À n'a pu
être rendu possible que par le développement des techniques
permettant de le documenter. L'essor de la photographie, de la vidéo et
des captations sonores ont permis, en enregistrant ses différentes
phases de mutations, de rendre perceptible l'ensemble du cycle de vie de
l'oeuvre. À la manière du tableau, objet fixe nécessaire
aux impressionnistes pour exprimer le furtif, ces pratiques ont besoin
d'archive pour exister.
« La prise en compte du caractère
éphémère des choses, ainsi que le souci de les sauvegarder
pour l'éternité, est un des principaux moteurs de
l'allégorie.180 »
Puisque des moyens techniques cherchent à conserver
dans des formes durables ses formes impermanentes, les oeuvres qui jouent sur
l'éphémère sont remplies de paradoxe. En soi, cette
documentation a permis d'accepter progressivement l'idée et la
réalisation d'une oeuvre éphémère. Ne sont plus
liées, la valeur et la persistance dans le temps, de sorte que le
caractère éphémère de l'oeuvre d'art n'a plus la
plus centrale importance.
179 Nicolas Bourriaud, Formes de vie, op.
cit.
180 Walter Benjamin, Origine du drame baroque allemand,
Flammarion, Paris, 1985
105
ANNEXE 2
INVENTAIRE DES EXPOSITIONS
DU PALAIS DE
TOKYO
A été ici rassemblé l'ensemble du
programme d'exposition et certaines manifestations du Palais de Tokyo. Les
événements complémentaires (conférence,
privatisation, partenariat...) non directement reliés aux expositions,
ont été volontairement retirés, afin de faciliter la
lecture des tableaux.
A été mis en gras les expositions qui font
l'objet d'un développement dans le texte du mémoire.
Liste des abréviations utilisées :
DC : débat, conférence, table ronde PJ :
projection
PC : performance, concert
MD : mode, design
106
2001
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Type
Commande public
Projet Tokyorama 1
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Titre
Drapeaux Pirates
In Memory of the
Unknowable Space
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Artistes
Henrik Plenge
Jakobsen
Mark Themann
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Début
01/06/2001
01/05/2001
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Fin
20/09/2002
31/05/2001
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Evénements
Chaque visiteur emporte onze fleurs
étiquetées. En onze différents points
déterminés
par l'artiste (places et squares du quartier), chacun pose
une fleur à l'endroit qu'il désire.
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La fleur qui n'est pas étiquetée est
jetée dans la Seine depuis la passerelle Debilly en
récitant un poème d'Octavio Paz.
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Projet Tokyorama 2
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Bernard Leprince
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Bernard Leprince
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06/06/2001
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Futur chef du restaurant du Palais de Tokyo, Bernard
Leprince nous fait découvrir dans
le quartier (Chaillot - George V -
Montaigne) le dessous des cartes et des menus des
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Projet Tokyorama 3
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Je suis disponible
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Nadine Norman
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04/07/2001
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grands et moins grands restaurants.
Suscitant des rencontres, Nadine Norman explore les
relations intimes qui naissent
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Projet Tokyorama 4
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Renaud Auguste
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Renaud Auguste
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01/08/2001
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31/08/2001
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entre deux inconnus au cours de leur première
entrevue.
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Projet Tokyorama 5
Projet Tokyorama 6
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Dormeuil
Tsuneko Troc
Alain Bublex
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Dormeuil
Tsuneko Taniuchi
Alain Bublex
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01/09/2001
01/10/2001
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30/09/2001
31/10/2001
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Tsuneko installe un stand qui propose aux touristes
de passage de laisser
quelque chose en échange d'autre
chose.
Alain Bublex demande aux personnes
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Projet Tokyorama 8
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Alberto Baraya
|
Alberto Baraya
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01/12/2001
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31/12/2001
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l'accompagnant de se charger de bagages.
L'idée est d'introduire l'image du
voyage, du transit dont on ne sait
véritablement s'il s'agit de
tourisme ou d'exode...
Alberto Baraya distribue au musée de la Marine des
petits documents réalisés par lui
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comprenant des textes et des images ayant une apparence
trompeuse, faisant planer le
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107
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2002
Type
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Titre
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Artistes
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Début
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Fin
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Evénements
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Projet Tokyorama 9
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Eléonore de Montesquiou
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Eléonore de Montesquiou
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01/01/2002
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31/01/2002
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Buvez un café dans le quartier avec Eléonore
de Montesquiou et parlez-lui d'un objet qui vous est cher...
Elle en confiera ensuite votre description à un
dessinateur de rue qui, à son tour, en produira une image.
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Commande Publique
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Les fenêtres de Beat Streuli
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Beat Streuli
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21/01/2002
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27/08/2006
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Exposition
Personnelle
Expo personnelle
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Le salon de Michael Lin/
Le sol de Michael Lin
Super(M)art
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Michael Lin
Navin Rawanchaikul
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21/01/2002
22/01/2002
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21/12/2002
09/06/2002
|
DC 02/02 Super curator et super artist ? Avec
Eric Troncy, Hou Hanru, Stephen Nikolaev et Jérôme
Sans DC 09/02 "La question du chef d'oeuvre à travers
les âges" Avec Mathias Washek
DC 16/02 Nouvelle institution ? Nouveau
concept ? Avec Paul Ardenne, Isabelle Ballu, Ami Barak,
|
Commande Publique
|
Le programme Audiolab
|
Laetitia Bénat, Curd Duca, Dorine Muraille
(Julien
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22/01/2002
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21/04/2002
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Suzanne Crotter, Karim Ech-Choayby, Emmanuelle Huynh, Akiko
Miki, Amiel Grumberg.
DC 02/03 Voyager dans le temps Avec Norman Spinrad et Navin
Rawanchaikul.
DC 09/03 Entresort de l'art / Entresort
dollar ?
PC 06/04 Intervention sonore de Rupert Huber, puis de
Alejandra & Aeron.
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Locquet), To Rococo Rot (Ronald Lippok, Robert
Lippock et Stephan Schneider), Xavier Veilhan,
David
Artaud.
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PC 13/04 Concert électronique de Dorine Muraille,
Performance visuelle et sonore de Rebecca
Bournigault.
|
Expo personnelle:
Projet Tokyo Games
|
Opniyama
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Le jeu d'arcade de Team cHmAn
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22/01/2002
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13/03/2002
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PC 20/04 Collectif Radio Mentale : Performance et
Concert + To Rococo Rot
PC 23/04 Monolake musique expérimentale de Robert
Henke
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Commande Publique
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Le Jardin aux habitants de
Robert Milin
|
Robert Milin
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22/01/2002
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Commande Publique
Expo personnelle
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Le Jardin sauvage de
l'Atelier Le Balto
Island of an Island
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Atelier Le Balto (Marc Pouzol, Laurent Dugua)
Mélik Ohanian
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22/01/2002
29/01/2002
|
17/03/2002
|
DC 22/01 Living Momento 1 Mélik Ohanian
DC/PC 01/02 Living Momento 002 Présentation de l'
association Segbolissa, qui collecte des livres
pour le Senegal. Open Mic par Nadine Hounkpatin,
organisatrice des Evenings of Poetry. intervenant :
Dokhandeme Sound System, Jacques Yéchiazarian, Villy
Kudsen.
DC 15/02 Living Momento 003 Jacques Yéchiazarian
interroge la place de la parole dans le quotidien et
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l'imaginaire.
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Expo personnelle
Expo collective
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Loris Cecchini
Exposition collective
d'ouverture
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Loris Cecchini
Virginie Barré, Christophe Berdaguer et Marie
Péjus,
Alain Declercq, Wang Du, Michael Elmgreen et
Ingar
Dragset, Naomi Fisher, Gelatin, Subodh
Gupta, Kay
|
29/01/2002
29/01/2002
|
31/03/2002
21/04/2002
|
PJ 10/02 Living Momento 004 Films de Villy Kudsen Erruption
de Surtsey Island et Erruption de
Vesbmann Island (extraits).
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Hassan, Alexander Györfi, Gunilla
Klingberg, Surasi
Kusolwong, Michel Majerus, Paola
Pivi,Matthew
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108
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2002 (Suite)
Type
Expo personnelle
Exposition
Personnelle
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Titre
Monica Bonvicini
Musée d'art contemporain
africain : le Salon
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Artistes
Monica Bonvicini
Meshac Gaba
|
Début
29/01/2002
29/01/2002
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Fin
10/03/2002
29/09/2002
|
Evénements
Tokyo Games à partir du 29/01 : Le jeu en
ligne de
PJ 07/03 Projection d' "Urgent", de Ghazel suivi d'un
entretien entre l'artiste et
Alexandre Pollazzon
PJ 26/03 Projection de "My Parent's Garden" et "Perfect Day"
de John Lovett et
Alessandro Codagnone
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PJ 23/04 Projection de "Krystufekova", performance d'Elke
Krystufek et
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Expo collective
Projet Tokyorama
10
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Aura
Jacques Villeglé
|
Thibault Montamat, Christophe Renard
Jacques Villeglé
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03/02/2002
16/02/2002
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28/02/2002
|
présentation de "A territory to be mastered in the
same as patagonia".
PC Dès 17h, musique avec Chrysalide en guest
live
Jacques Villeglé, le fameux piéton de Paris,
vous emmène faire le tour du
quartier pour découvrir les richesses des affiches
lacérées.
DC 07/02 Rencontre avec Jacques Villeglé
DC 16/02 Rencontre avec Jacques Villeglé
DC 23/02 Rencontre avec Jacques Villeglé
|
Projet Tokyorama
|
Attention à la marche
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Eric Chevillard
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01/03/2002
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31/03/2002
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DC 28/02 Rencontre avec Jacques Villeglé
Eric Chevilllard, écrivain, propose pendant tout le
mois de mars une promenade
|
11
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autour du Palais de Tokyo. A vous de retrouver les messages
disséminés dans
l'espace urbain et signalés sur le plan disponible
à l'accueil du Palais de Tokyo.
|
Expo personnelle
Projet Tokyorama
|
Celluloïd
La méthode B
|
Franck David
Natasha Nisic
|
30/03/2002
01/04/2002
|
28/04/2002
30/04/2002
|
Expo 18/04-25/04 A l'invitation de Franck David, la jeune
artiste ng propose une
installation intitulée "Waiting for the
future"
Promenade suivant le protocole du regard mis en place par le
photographe
|
12
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Bertillon, inventeur de l'anthropophotographie. Le promeneur
disposera d'un
minicasque qui, comme dans une visite commentée de
musée, diffusera une
|
Expo personnelle
|
Qui perd gagne
|
Pascale Marthine Tayou
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13/04/2002
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bande sonore où se mêleront instructions,
archives sonores et commentaires.
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Expo personnelle/
|
Sam
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Palle Torsson
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13/04/2002
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109
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2002 (Suite)
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Type
Projet Tokyorama 13
Expo personnelle
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Titre
Out-Sight / In-Sight
Polders
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Artistes
Helga Griffiths
Tatiana Trouvé
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Début
02/05/2002
07/05/2002
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Fin
31/05/2002
16/06/2002
|
Evénements
CF
http://www.palaisdetokyo.com/fr/prog/tokrama.htm#
DC17/05/2002 Rencontre avec l'artiste. Présentation
du catalogue.
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DC/PJ 29/05/2002Rencontre avec l'artiste. Projection du film
réalisé sur Tatiana Prouvé
dans le cadre de son exposition par ArtFilms. Nouvelle
installation de l'exposition
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"Polders", modifiée par l'artiste.
|
Expo personnelle
|
Fat Car et Jakob-Jakob Fat
|
Erwin Wurm
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28/05/2002
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08/09/2002
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DC 29/05 Rencontre avec l'artiste
|
Expo personnelle
Expo personnelle
Projet Tokyorama 14
|
Vue d'en haut
Sympathy for the Devil
Et si c'était à refaire
|
Wolfgang Tillmans
Kendell Geers
Jota Castro
|
01/06/2002
01/06/2002
01/06/2002
|
15/09/2002
08/09/2002
|
Sondage : "les questions que
j'aimerais que l'on me pose en tant que citoyen"
PC 12/06 Première intervention aux
Buttes-Chaumont
PC 19/06 Seconde intervention
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Expo personnelle
Expo personnelle
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Le projet des Perméables
Prix Picto 2002
|
Laurent Moriceau
Sofia Sanchez et Mauro
|
27/06/2002
29/06/2002
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25/08/2002
14/07/2002
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Mongiello
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Projet Tokyorama 15
Expo personnelle
Expo collective
|
Variations 1.0
Hanayo
Squats d'artistes : documents
|
Alexandra Sa
Hanayo
|
09/07/2002
18/07/2002
10/09/2002
|
31/07/2009
15/09/2002
02/10/2002
|
PC 18/07 Concert par Hanayo &
Paincake
DC 14/09 "20 ans de squats d'artistes" Avec Mohamed
benmerah, Harry Bellet, Jean
Starck, Luis Pasina, Frédéric Dorlin-Oberland,
Yabon Paname, Jean-Luc D'Asciano,
Pierre Cornette de Saint-Cyr, Nicolas Bourriaud.
DC 21/09 "Vivre en squat" Avec Emmanuelle
Maunaye, Yann Renaud, Eric Doidy,
Alexandre Archenoult, Luis Pasina, Marc Sanchez.
DC 27/09 "Quel avenir pour les squats
d'artistes?" Avec Fabrice Raffin, Pierre Manguin,
Gaspard Delanoé, Florence Diffre, Rémy
Beauvis, Chantal Cusin-Berche, Marc Sanchez.
PJ 27/09 "Nous, Arzonautes" de Marie
Decraene, "L'Usine Palikao" de René Licata", "Sur
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les pavés" de Jean-Robert Viallet
|
Expo personnelle
|
Cosmos
|
Boris Achour
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10/09/2002
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13/10/2002
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DC 02/10 Discussion entre Jean-Yves Jouannais,
Emilie Renard, Jean-Baptiste
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Thoret,Nicolas Bourriaud
|
Expo personnelle
Expo personnelle
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Collective Wishdream for Upper
Class Possibilities
The Essential Disturbance
|
Plamen Dejanoff (expo
Ed Templeton
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28/09/2002
03/10/2002
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110
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Expo
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Expo
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2002 (Suite)
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Type
Expo
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Titre
le jour la nuit le jour
|
Artistes
Louise Bourgeois
|
Début
08/10/2002
|
Fin
24/11/2002
|
Evénements
PJ 12/10 - 24/11 Projection de
"C'est le murmure de l'eau qui chante" de Brigitte Cornand
|
personnelle
personnelle
Expo
|
Playground
|
Maria Marshall
|
22/10/2002
|
17/11/2002
|
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Expo Collective
Expo
|
Topokosm, compte
rendu
|
Nicolas Moulin avec Christian Francelet,
Olivier Gendre, Hervé Gio, Albane du
|
23/10/2002
|
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|
personnelle
|
Night Shift
Lumière en prison
dans le ventre de la
|
Tobias Rehberger
Rebecca Horn, avec Jacques
Roubaud et Hayden Danyl Chisholm
|
24/10/2002
28/11/2002
|
26/01/2003
|
PJ 21/12 Projection films de Rebecca Horn "Berlin
Exercises" (1975), "Buster's Bedroom"
|
111
2003
Type
|
Titre
|
Artistes
|
Début
|
Fin
|
Evénements
|
Expo
personnelle
|
Les circonstances ne sontAgnès
pas atténuantes
|
Thurnauer
|
11/01/2003
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28/02/2003
|
DC 19/01 Visite d'atelier à Ivry en compagnie de
Michaël Batalla.
PJ Films experimentaux choisis par Philippe
Alain-Michaud
PC 05/02 "Laine sur Parquet", performance de Éric
Martin / "Il n'y a qu'un pas d'Ivry à Tokyo",
improvisation de Annabelle Pulcini et Myriam Lebreton, autour des Objets
à danser conçus par Fabienne Denoual /
"Opéra Isotherme", lecture de son texte par Véronique
Pittolo accompagnée de Agnès Thurnauer et Jacques
Sivan
|
Expo
personnelle
|
Beauty Cabinet Prototype
|
Ana Laura Alaez
|
14/02/2003
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06/04/2003
|
DC 01/03 Rencontre, "Art et Beauté : un
corps recréé", débat autour de l'idée de
beauté avec
David Lebreton, sociologue, Orlan, Sylvie Mokhtari,
historienne de l'art
DC 15/03 Rencontre, "Comment s'élabore une
beauté ?" Autour de professionnels de
l'industrie cosmétique avec Yutaka Goto de Sisheido,
Annie Ziliani de Novale Next
DC 29/03 Rencontre, "Une histoire de la beauté" avec
Dominique Paquet, philosophe
|
Expo
collective
|
Hardcore - Vers un
nouvel
activisme
|
A.A.A. CORP., Jota Castro, Shu Lea Cheang,
Minerva Cuevas, Alain Declercq,Michel Dector Michel Dupuy,
etoy.CORPORATION, Kendell Geers, Guerrilla
Girls On Tour, Johan Grimonprez, Clarisse Hahn, Ocean Earth,
Gianni Motti, Henrik Plenge
Jakobsen, Anri Sala,
|
27/02/2003
|
18/05/2003
|
PC 27/02 Performance de Henrik Plenge Jakobsen,
thématique du feu, réalisée quatre fois.
Performance de Minerva Cuevas "Ronald McDonald"
Quentin Armand, artiste du Pavillon habille le personnel du
Palais pour créer des "agents
vecteurs du souci de l'Etat du bien être de tous et de
la béatitude de chacun".
Lucas Mancione, "Harmonies dissonantes" :
Réalisation d'un cd à partir des commentaires de
Jérôme Sans
Nicolas Milhé, artiste du Pavillon,
"Clairvoyance" : Transmission live des réactions des
|
Expo
|
|
Santiago Sierra, Sislej Xhafa
|
|
|
habitants du 16° suite à l'ouverture factice
d'un centre d'hébergement pour réfugiés.
|
personnelle
|
Superficial Resemblance
|
Rivane Neuenschwander
|
27/02/2003
|
20/04/2003
|
|
Expo
personnelle
|
Nasseville
|
Pierre Ardouvin
|
14/03/2003
|
27/04/2003
|
|
Expo
collective
|
The Wide Show
|
Kyupi Kyupi (collectif) Yoshimasa Ishibashi
|
19/03/2003
|
11/05/2003
|
18/03/2003 PC Cabaret : "Kyupi Kyupi Grand Kayo
Show Super Mega Hits", projection,
performance, musique, lumière.
|
Expo
personnelle
|
We are the World
|
Guillaume Paris
|
17/04/2003
|
25/05/2003
|
|
Expo
personnelle
|
Waiting for God
|
Tricky
|
29/04/2003
|
18/05/2003
|
|
personnelle
Expo
PC
|
Game is Over
the rock electro clash party
|
Lars Nilsson
|
06/05/2003
29/06/2003
21/05/2003
|
112
2003 (Suite)
|
|
Type
|
Titre
|
Artistes
|
Début
|
Fin
|
Evénements
|
Expo collective
|
GNS (Global Navigation System)
|
Franz Ackermann, Nathan Carter, Wim Delvoye,
Dominique Gonzalez-Foerster, Thomas Hirschhorn, Laura Horelli,
Pierre Huyghe, Pierre Joseph, Jakob Kolding, Matthieu
Laurette, Mark Lombardi, Julie Mehretu, John Menick,
Aleksandra Mir, Ocean Earth, Henrik Olesen, Kirsten Pieroth,
Marjetica Potrc, Matthew Ritchie, Pia Rönicke, Sean Snyder,
Stalker, Simon Starling + Le Pavillon
|
05/06/2003
|
07/09/2003
|
DC 05/06 Conférence : "Voyage sur la via
Egnatia" à propos des migrations est/ouest, avec Francesco
Careri, Lorenzo Romito, Alex Valentino, Ana Janewski,
Florian
Aggalliu, Constantin Petcou, Doina Petrescu, Alain Guez,
Francesco Sylos Labini, membre des
collectifs "Stalker" et "ON/Observatoire Nomade"
DC 06/06 Conférence : Pierre Huyghe,
"Quelle type d'exploration peut-on mener aujourd'hui ?" DC 07/06
Rencontre : "L'art contemporain et la cartographie" avec Bernard
Marcadé, commissaire et critique d'art indépendant,
Judicaël Lavrador, journaliste, Pierre Joseph, artiste, Thomas
Hirschhorn, artiste. Discussion animée par Nicolas
Bourriaud.
|
Expo collective
|
Raccourcis (au Pavillon)
|
Quentin Armand, Angela Detanico, Rafael Lain,
Adriana Lara, Lucas Mancione, Emilie Renard, Jiri
Skala, Johann van Aerden et Gabriela Vanga, Quentin
Armand, Angela Detanico, Rafael Lain, Andreas
Fogarasi, Adrian Lara, Lucas Mancione et Nicolas
Milhé.
|
0510612003
|
1310712003
|
|
Expo personnelle
|
A Novel for life
|
Fabien Verschaere
|
08/07/2003
|
07/09/2003
|
|
Expo personnelle
|
Silence Sonore
|
Chen Zhen
|
01/10/2003
|
18/01/2004
|
Divers 26/09 - 01/11 l'Espace Topographie de
l'Art présente sept installations
PC 01/10 - 05/10 performances en écho
à l'oeuvre "Jue Chang (The Last Song) - Dancing
Body/Drumming", avec le compositeur Tan Dun, le danseur et
chorégraphe Huang Dou-Dou et les
percussionnistes Haruka Fujii et David Cossin.
DC 02/10 Table ronde "Chen Zhen, artiste
guérisseur" autour du rôle de la médecine
dans
l'oeuvre de Chen Zhen, avec Chen Zhu, Thierry Davila
et Mathias Haby
|
Expo personnelle
|
Action Restreinte
|
Pierre Joseph
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01/10/2003
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23/11/2003
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(Salon du PdT)
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Spring 2003
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Michael Lin
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01/10/2003
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20/11/2003
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Expo personnelle
Expo personnelle
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Le monde flottant
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Mathieu Briand
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04/12/2003
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18/01/2004
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DC 12/10 Présentation du catalogue
monographique consacré à Mathieu Briand. Projection
de
"In process with Mathieu Briand" qui propose de
découvrir "Le Monde Flottant" et "Derrière le
Monde Flottant".
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Expo collective
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Transimages 2 : Mobilités
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("Radio Shack #2")
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04/12/2003
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20/12/2003
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PC
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Laurent les Magnifiques
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Alain Bublex ("Awareness box"), Vincent Epplay
Laurent Friquet et Laurent
Moriceau
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19/12/2003 PC "Just the way you said
goodnight to me" Laurent Friquet propose son anthologie personnelle de
la
musique du crépuscule... Avec la participation de
Françoise Klein et sur des textes inédits de Patrick
Bouvet. PC
"Killing me softly" Laurent Moriceau aime
créer des situations ambiguës... Invitation à
déguster
l'artiste. Projet réalisé avec la
complicité de Michel Chaudun, chocolatier
|
"Histoire du vidéo clip", une sélection
historique proposé par Fabrice Brovelli et David Bois
113
2004
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Type
Expo Collective/
Le Pavillon
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Titre
Code Unknown
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Artistes
Ziad Antar, Pascal Beausse, Louidgi Beltrame, Davide
Bertocchi, Sophie Dubosc, Johannes Fricke-Waldthausen, Shiho
Fukuhara, Agnieszka Kurant, Ange Leccia, Christian Merlhiot,
Gérald Petit et Jean-Luc Vilmouth + Guests :
Saâdane Afif, Heike Baranowsky,
|
Début
12/02/2004
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Fin
22/02/2004
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Evénements
DC 12/02 Rencontre "N'Kisi Project" de Rupert Sheldrake
biologiste et philosophe auteur de
recherche sur la communication et la
télépathie entre les espèces.
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Expo Collective
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Playlist
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Charles Lopez, Aimée Morgana, Rupert Sheldrake, Georg
Tremmel
Saâdane Afif, Jacques André, John Armleder,
Carol Bove, Angela Bulloch, Cercle Ramo Nash, Clegg &
Guttmann, Sam Durant, Pauline Fondevila, Bertrand Lavier,
Rémy Markowitsch, Bjarne Melgaard, Jonathan Monk, Dave
Muller, Bruno Peinado, Richard
|
13/02/2004
|
25/04/2004
|
PJ 12/02 Projection de " 'This Pity She's a
Fluxus Whore" de Catherine Sullivan
PJ 17/02 Projection de "Phantom Release" de Slater
Bradley
PJ 20/02 Projection de "The Screensaver, the Hard-disk, the
Disk" de Stefan Nikolaev
PJ 24/02 Projection de "Baldessari Sings LeWitt" de John
Baldessari
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Prince, Allen Ruppersberg, Samon Takahashi
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PJ 27/02 Projection de "Script" de John Baldessari
|
Expo Personnelle
Expo collective
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Daniel Pflumm
Face à Face #1
|
Daniel Pflumm
Michel Blazy, Tetsumi Kudo
|
13/02/2004
03/03/2004
|
28/03/2004
11/04/2004
|
PC 12/02 Présentation live de Furious, album de The
Customers, groupe de Daniel Pflumm
|
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: Michel
Blazy/Tetsumi
Kudo
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Expo Collective
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Ninja Tune
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Jonathan More, Matt Black, Coldcut, Amon Tobin, Funki
Porcini, DJ
Vadim
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03/03/2004
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14/03/2004
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|
Expo
Personnelle
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Yoshihiro Suda
|
Yoshihiro Suda
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09/04/2004
|
20/04/2004
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Le Pavillon
Expo Collective
|
Soirée "Loin du
Mékong"
Live (Exposition/perf ormances
musicales/clips vidéo/DJ
sets/Installation)
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Ange Leccia, Christian Merlhiot, Jean-Luc Vilmouth et
Christelle
Lheureux,
AÏ, Tobias Bernstrup, Hsia-Fei Chang, Chicks on Speed,
Carles Congost, Martin Creed, EchoparK, Vincent Epplay, erikm,
Exchpoptrue, FMdD, Janine Gordon aka Jah Jah, Alexander Györfi,
Hanayo, Richard D. James (aka Aphex Twin), Kyupi Kyupi, Arnaud
Maguet, Daniel Pflumm, Prototypes, Gerwald Rockenschaub, DJ
Spooky, Stereo Total, Annika Ström
|
24/04/2004
14/05/2004
|
27/06/2004
|
PJ Projection de trois films réalisés par
l'équipe pédagogique du Pavillon, à l'occasion
d'un
workshop au Vietnam en janvier 2003.
PC 13/05 LiveStep 01 Exposition : Chicks on
Speed, Vincent Epplay, Alexander Györfi,
Arnaud Maguet, Gerwald Rockenshaub, Daniel Pflumm et Sidney
Stucki
Performance : Chicks on Speed avec Kevin
Blechdom
Musique au TWINS : Sidney Stucki
PJ 13/05 LiveClips 01 : "Clips Live", Projection
des clips de Hsia-Fei Chang, Chicks on
Speed, Carles Congost, Martin Creed, EchoparK, erikm,
Exchpoptrue, Janine Gordon aka
Jah Jah, Alexander Györfi, Hanayo, Arnaud Maguet,
Prototypes, Stereo Total et Sidney
Stucki. PJ 14/05 LiveClips
(BETC Euro RSCG)
|
10h : Christophe Fiat, La vérité
est hallucinante 11h : Judith Revel, Biopolitique et
puissance
114
2004 (Suite)
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Type
Expo Personnelle
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Titre
Perpetuum Mobile
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Artistes
Bruno Peinado
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Début
14/05/2004
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Fin
22/06/2004
|
Evénements
|
Expo Personnelle
Expo Personnelle
|
Quatre fois moins ou
quatre fois plus
?
Richard Kern
|
Daniel Buren
Richard Kern
|
14/05/2004
08/07/2004
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22/08/2004
22/08/2004
|
PJ 10/07 Films : Richard Kern, "The Hardcore
Collection". Les films présentés : Right Side
of
My Brain (1984), You Killed Me First (1985), Manhattan Love
Suicides (1985), Death Valley
(1986), Fingered (1986), Submit To Me (1986), The Evil
Cameraman (1986), Submit To Me
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Now (1987), X is Y (1990), Horoscope (1991), The Bitches
(1992), My Nightmare (1993).
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Expo Personnelle
Expo personnelle
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Energy Storage (Quand
les objets rêvent)
Wang Du Parade #4
|
Surasi Kusolwong
Wang Du
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09/07/2004
17/09/2004
|
19/07/2004
02/01/2005
|
DC 30/11 Table ronde :
"Quelles critiques des médias?" Wang Du , Ignacio
Ramonet (Le
Monde diplomatique), Bruno Serralongue, artiste et
Nicolas Bourriaud, modérateur.
|
Expo Personnelle
|
24h Foucault
|
Thomas Hirschhorn (projet nuit
blanche)
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02/10/2004
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03/10/2004
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DC 11/12 Visite à thème, "L'image en
jeu", un voyage autour de notre rapport à l'image
DC 12h : Marcus Steinweg, Sujet du
dépassement de soi 13h : Philippe Artières,
"Entrevoix" avec Jean-Claude Zancarini, Pascal Michon, Pierre
Lascoumes...14h : Alessandro Fontana 15h :
Peter Gente, Exposé pour un festival (2000) 16h : Jacob
Rogozinski, "Je suis, moi, cette force sombre" Foucault et sa
(non)lecture d'Artaud 17h : Alain Brossat, Plèbe, politique
et événement 18h : Christina von Braun,
L'hystérie des signes dans l'écriture, la religion,
l'économie 19h : Alenka Zupancic, Jouissance Ex Machina
20h : Alexandre Constanzo, La part
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Expo Personnelle
|
24h Foucault (suite)
|
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02/10/2004
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03/10/2004
|
de la plèbe
21h : Joseph Vogl, Le Social e(s)t l'Irrationnel
22h : Chantal Mouffe, Politique et Agon 23h :
Wilfried Dickhoff, L'art de parer
24h Foucault (Suite) 0h : Simon Critchley,
Humiliation (Words with Music) / (Quelques Mots en
musique) 1h : Sebastian Egenhofer, Forme et Subjectivité
dans l'Art Moderne 2h : Bogdan Ghiu, Dead Zone ou de
l'intolérable inutilité de l'être (un regard à
distance de Foucault) 3h : Claudia Blümle, La
vérité et les formes juridiques dans la peinture 4h :
Manuel Joseph/Marc Touitou, Un Foucal, des Foucaux 5h :
Meike Schmidt-Gleim, Du hasard de la rencontre avec le pouvoir
6h : Stephanie Wenner, Liberté inconsciente 7h :
Mark von Schlegell, Poe ou la folie de la raison 8h :
Frédéric Gros, Creuser de soi à soi la distance, non
plus d'un secret impossible, mais d'une oeuvre de vie à
accomplir 9h : Béchir Koudhai, la violence de
l'inhumai
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115
2004 (Suite)
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Bottinelli
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Type
Expo Personnelle
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Titre
The Sick Opera
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Artistes
Barthélémy Toguo
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Début
13/10/2004
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Fin
23/01/2005
|
Evénements
PC 12/10 Performance crée par
Barthélémy Toguo et interprétée par le
chorégraphe Romano
|
Salon! Projet
Special
Expo Collective
|
Salon Loris
Cecchini
Prix Altadis Arts
Plastiques 2004-
2005
|
Loris Cecchini
Artistes sélectionnés par
François Piron : Juan Perez Agirregoikoa,
Ibon Aranberri, Rafel G. Bianchi, Jordi Colomer, Carles
Congost, Cristina
|
13!10!2004
20/10/2004
|
02!01!2005
31/10/2004
|
DC 25/11 Rencontre : Philippe Dagen et
Barthélémy Toguo
PC 08/12 Performance : Caroline Chassany,
plasticienne et chanteuse lyrique
DC 19/12 Table ronde "Le voyage" avec Sébastien
Pecques, Gérald et Jeanne Susplugas
Lauréats français : François
Curlet, Marie Péjus & Christophe Berdaguer, Hugues
Reip Lauréats espagnols : Ibon Aranberri, Cristina
Lucas, Jordi Ribes
|
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Lucas, Itziar Okariz, Antonio Ortega,
Jordi Ribes, Pepo Salazar.
Artistes sélectionnés par David G.
Torres : Boris Achour, Stéphane
Bérard, Delphine Coindet, François
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116
2005
|
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Type
Expo Personnelle
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Titre
Texte court sur la possibilité
de créer une économie de
l'équivalence
|
Artistes
Liam Gillick
|
Début
26/01/2005
|
Fin
27/03/2005
|
Evénements
Programme d'événements "L'art au
travail"
PJ 29/01 Projection de "Classe de lutte" (Groupe Medvedkine
de Besançon) et de "Lettre à
mon ami Pol Cèbe" (Michel Desrois)
PJ 05/02 Projection de "Nouvelle société 5, 6,
7" (Groupe Medvedkine de Sochaux) et de
"Week-end à Sochaux" (Groupe Medvedkine de
Besançon) DC 12/02 Rencontre : "L'autogestion
expliquée et l'autogestion appliquée" Nathalie Ferreira,
économiste spécialiste de l'autogestion et de
l'économie sociale, dialogue avec Pierre Manguin, artiste
engagé dans le mouvement des squats d'artistes, autour d'une
définition
précise de ce type d'économie. DC
|
Expo
|
Exposition Universelle 1
|
Jota Castro
|
04/02/2005
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27/03/2005
|
19/02 Table ronde "Ma petite entreprise" Réflexion
autour du statut de l'artiste en temps
qu'entrepreneur, avec Yann Toma, Nicolas Pinier et Guillaume
Désanges.
PC 03/02 Vernissage-Performance "Discrimination Day" sur les
excès du délit de faciès
monde politique actuel et des enjeux de l'art dans ce
contexte
|
Personnelle
|
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DC 09/02 Visite-Rencontre de Jota Castro sur les
thèmes de la discrimination, de l'état du
|
Expo Personnelle
|
Pièce lumineuse
|
Orlan, en collaboration
avec Philippe
Chiambaretta
|
17/02/2005
|
20/03/2005
|
|
DC
Expo personnelle
|
Rencontre graphisme :
Dimitri Bruni et Manuel
Krebs de Norm
"Jurassic Pork II"
|
Alain Séchas
|
17/02/2005
31/03/2005
|
05/06/2005
|
DC Rencontre avec le duo de graphistes
zurichois Norm, animée par Catherine de Smet
DC 06/04 Rencontre avec Alain Séchas
PJ 13/05 Film : "Les Chasses du Comte
Zaroff"
dans le cadre de 'La Lignée oubliée', une
autre histoire de l'art (2/4)
et l'écrivain et Frédéric Roux
|
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DC 18/05 Table ronde : "Rires et caricatures"
avec Frédéric Valabrègue, historien de l'art PC
02/06 Performance : "Les jeux sont faits" par Sentimental
Bourreau
|
PC
|
Nuits Sonores
|
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31/03/2005
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PC Programmation : Blue Baboon, Duracell, Harry
and the nimrods, Chewbacca
Chewbacca, Dj Aï.
|
Expo personnelle
|
All Cut Up
|
Candice Breitz
|
14/04/2005
|
12/06/2005
|
PJ 28/04 Projection : Soirée
pointligneplan Candice Breitz. Présentation d'un ensemble de
films de l'artiste : Aiwa to Zen (2003) ; Soliloquy
Trilogy (2000) ; Becoming (2003). Suivie
|
117
2005 (Suite)
Type
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Titre
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Artistes
|
Début
|
Fin
|
Evénements
|
|
The Final Cut
|
|
25/05/2005
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05/06/2005
|
PC 24/05 Elshopo, show sérigraphique avec dermes
sensibles (Jérémie Cortial) /
|
Expo Collective/
Le Pavillon
|
|
Nicolas Juillard, Anne-Laure
Maison, Alice
Guareschi, André Guedes, Benjamin
Lee Martin,
|
|
|
Thomas B. Kauk presents The Final Cut Party Mix
|
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|
Marcelline Delbecq, Mathieu Simon, Corentin
|
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|
PC 27/05 Performance musicale : "Last chance for
a slow dance" Avec MADMACS-
|
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Hamel
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|
Benoit Delbecq, Chevreuil et Vincent Madame.
|
|
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|
Expo Collective
|
WA - Surface
|
Stéphane Dafflon et Olivier Millagou
|
25/05/2005
|
20/11/2005
|
|
|
d'Autonomie
Temporaire
|
|
|
|
|
Expo Collective
|
Translation
|
Vanessa Beecroft, Ashley Bickerton, Cai Guo-
|
23/06/2005
|
18/09/2005
|
|
|
|
Qiang, Maurizio Cattelan, Matt Greene, Mike
|
|
|
|
|
|
Kelley, Jeff Koons, Liza Lou, Ningura Napurrula,
Shirin Neshat, Takashi Murakami, Cady Noland, Chris Ofili,
Gabriel Orozco, Yinka Shonibare, Shahzia Sikander, Fred Tomaselli,
Joseph Kosuth, Kara Walker, Nari Ward, Christopher
|
|
|
|
Expo personnelle
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|
Wool. Et la collaboration de M/M (Paris)
Valéry Grancher
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13/11/2005
|
DC 04/11 Rencontre : Autour des indiens Shiwiars.
Avec Valéry Grancher, artiste ;
|
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Project
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The Shiwiars
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01/09/2005
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(Phase 1 -
hors murs)
26/10/2005
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Pascal Kunchicuy, chef de la confédération
shiwiar, Pascal
Languillon, président de l'Association "Vers un autre
tourisme" ; Jean-Claude Monod,
philosophe, Jean-Patrick Razon, Survival
International-France, Marc Sanchez, Anne-
|
Expo personnelle
|
Keep your distance
|
Nadav Kander
|
21/09/2005
|
25/09/2005
|
Christine Taylor du musée du Quai Branly.
Exposition dans les espaces en cours
d'installation.
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Robert Malaval
|
08/10/2005
|
08/01/2005
|
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Expo
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Robert Malaval,
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DC 19/10 NUITS MALAVAL : Table ronde, "La
redécouverte d'artistes" Autour du
|
personnelle
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kamikaze
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phénomène de la redécouverte d'artistes
dans l'histoire de l'art. Avec Denys Riout,
historien d'art, et Christophe Domino, critique d'art.
+ Performance d' Olivier Babin
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PC 28/10 Musique : Soirée vibrö avec
Goran Vejvoda, Jopo Stereo, Dinahbird, OttoannA
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DC 16/11 Table ronde :
"Transat-Marine-Campagne-Rock'n'Roll" ou les prémices de
l'art
Hubaut
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des années 90. Rencontre avec Gilles de Bure,
Jean-Marc Poinsot, Joël Hubaut et
Nicolas Bourriaud + Performance :
"Toast pour Robert Malaval", performance de Joël
PJ 07/12 NUITS MALAVAL 4 : Film "La brune et moi"
de Philippe Puicouyoul. + Table ronde "Robert Malaval,
peintre rock" Alin Avila, Claude Lévèque, Jean-Louis Pradel
,
Dominique Tarlé, et Jérôme
Sans.
|
118
2005 (Suite)
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Type
|
Titre
|
Artistes
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Début
|
Fin
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Expo personnelle
|
Lyrics
|
Saâdane Afif
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08/10/2005
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119
2006
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Type
Expo collective
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Titre
Notre histoire...
|
Artistes
Adel Abdessemed, Boris Achour,
Saâdane Afif, Kader Attia, Olivier Babin,
Jules de Balincourt, Virginie Barré, Rebecca Bournigault,
Mircea Cantor, Alain Declercq, Leandro Erlich,
Laurent Grasso, Loris
Gréaud, Kolkoz, Arnaud Labelle-Rojoux,
Matthieu Laurette,
Michael Lin, Mathieu Mercier, Jean- François
Moriceau et Petra Mrzyk, Nicolas Moulin, Valérie
Mréjen, Bruno Peinado, Bruno Serralongue,
|
Début
21/01/2006
|
Fin
07/05/2006
|
Evénements
20/01 - 12/02 le Pavillon installe "La Cabane"
dans l'entrée du PdT. Programmation chaque jour
différent : performances, interventions, présentation
d'une oeuvre PC 21/01 - 22/01 Programmation d'artiste :
séance d'hypnose, concert de couteaux, anniversaire
d'artiste, conférence sur le Big-Bang, émissions musicales
en direct, concerts, rencontres avec les artistes, danse du ventre.
DC 23/01 Table Ronde "Emergence artistique et émergence
économique" avec Jacques Attali, Christian de Portzamparc, Michel
Pébereau, Daniel Sibony.DC/PC 24/01 Dialogue avec Jota Castro,
Alain Declercq, Maroussia Rebecq et Agnès Thurnauer,
performance surprise et Revue Tricatel proposée
|
PJ
|
La Cabane
|
Nathalie Talec, Agnès Thurnauer,
Barthélémy Toguo,
Tatiana Trouvé, Fabien Verschaere, Wang
Du
Christelle Lheureux & Apichatpong
Weerasethakul, Hsia-Fei Chang, Davide Bertocchi, Marie
Maillard, Julien Loustau, Louidgi Beltrame, Seulgi Lee, Gerald
Petit, Ziad Antar, Adriana Garcia Galan, Emilie Pitoiset, Fanny
Adler, Adam Vackar, Angela Detanico & Rafael Lain, Koki Tanaka,
Liliana Basarab, Isabelle
|
21/01/2006
|
12/02/2006
|
par Bertrand Burgalat.
PJ 20/01 #1: Christelle Lheureux et Apichatpong
Weerasethakul, Ghost of Asia (2005) PJ
21/01 #2 : Hsia-Fei Chang PJ 22/01 #3 :
Davide Bertocchi PJ 24/01 #4 : Marie Maillard PJ
25/01 #5 : Julien Loustau PJ 26/01 #6 : Louidgi Beltrame
PC 27/01 #7 : Seulgi Lee
PC 28/01 #8 : Gerald Petit PC 29/01 #9 :
Ziad Antar PC 31/01 #10 : Adriana Garcia PJ 31/01
#11 : Emilie Pitoiset PJ 02/02 #12 : Fanny Adler PJ
03/02 #13 : Adam Vackar PC 03/02 #14 : Angela
Detanico & Rafael Lain
|
|
Hurloir/Montevideo-
|
Cornaro, Benoît Maire, Wagner Morales, Gérald
Petit,
Mihnea Mircan.
|
|
|
|
Expo Collective
|
Le
Paris
|
Thierry Fontaine, André Lozano aka Loz, Elli
Medeiros
|
23/02/2006
|
12/04/2006
|
07/04-27/04 Session 1
|
Expo Collective
|
Faux Semblants
|
Jean-François Chermann, Régine Cirotteau,
Eric
Maillet et Stani Michiels
|
07/04/2006
|
25/05/2006
|
28/04-25/05 Session 2 Copacabana Cybercafé
par Stani Michiels
|
Expo Collective
Expo
Collective/ Le
Pavillon
|
Land Mark
(Programme
Tropico-Végétal)
La Cabane Vidéo
|
Jennifer Allora & Guillermo
Calzadilla
Mathilde Rosier, François-Xavier Courrèges,
Fabiano Marques, Louidgi Beltrame, Christian Merlhiot, Melvin
Moti, Angela Detanico et Raphaël Lain, Caecilia Tripp,
Wagner Morales
|
08/06/2006
08/06/2006
|
27/08/2006
23/07/2006
|
PJ 08/06-18/06 La Cabane Vidéo : Mathilde
Rosier. Projection de "La Centrifuge" et de
"Ballet pour une limace".
PJ 20/06 - 25/06 La Cabane Vidéo :
François-Xavier Courrèges. Projection de "Another
Paradise"
|
120
|
|
|
|
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|
|
|
|
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|
2006 (Suite
Type
|
Titre
|
Artistes
|
Début
|
Fin
|
|
Expo Personnelle
|
A travers bois pour trouver la
forêt
|
Henrik Håkansson
|
08/06/2006
|
|
|
Expo Collective
|
Grottes sauvages sur forêt
cérébrale
|
Gerda Steiner & Jörg Lenzlinger
|
08/06/2006
|
|
|
121
2006 MOW
|
|
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|
Type
Session
|
Titre
|
Artistes
|
Début
|
Fin
|
Evénements
|
Expo collective
|
Cinq milliards
d'années
5'000'000'000
d'années
|
CHRISTIAN ANDERSSON / ARTISTS
UNKNOWN / MICHEL BLAZY / MIKE
BOUCHET / LORIS CECCHINI / PHILIPPE
DECRAUZAT / MARCEL DUCHAMP / CEAL
FLOYER / URS FISCHER /
MARK HANDFORTH /
JOACHIM KOESTER / VINCENT LAMOUROUX /
LANG-
|
14/09/2006
14/09/2006
|
31/12/2006
31/12/2006
|
PC 14/09 Ballet de mini-motos et concours
international de sculpture à la
tronçonneuse.
(Présentation des oeuvres primées le
05/10)
|
|
|
BAUMANN / TONY MATELLI /
JONATHAN MONK / FRANÇOIS MORELLET /
GIANNI MOTTI / CHARLES RAY
|
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|
Expo collective
|
Une Seconde une
année
|
ALIGHIERO E BOETTI /
FRANÇOIS CURLET / LARA FAVARETTO / GRAHAM
GUSSIN / LEOPOLD KESSLER / KRISTOF KINTERA /
JONATHAN MONK / FERNANDO ORTEGA / WERNER
REITERER /
|
14/09/2006
|
31/12/2006
|
|
Expo personnelle
|
The Day Before -
|
ROMAN SIGNER / KRIS
VLEESCHOUWER Renaud Auguste -
Dormeuil
|
14/09/2006
|
29/10/2006
|
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Star System
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Expo
personnelle
Expo personnelle
|
Flying Tape
Sans Titre (Rodage)
|
Zilvinas Kempinas
Fabien Giraud
|
14/09/2006
14/09/2006
|
29/10/2006
29/10/2006
|
|
Expo personnelle
|
A Day in Paris
(Ghost Rider Goes
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Ghost Rider
|
14/09/2006
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01/10/2006
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Crazy in Europe)
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Projet Permanent
|
Les Fenêtres
|
Olivier Mosset
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14/09/2006
|
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Expo personnelle
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Around
|
Ulla Von Brandenburg
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05/10/2006
|
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Expo personnelle
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Kant Tuning Club
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Raphaël Siboni
|
02/11/2006
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122
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2006 MOW
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Type
Expo
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Titre
Mécanique populaire
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Artistes
Stéphane Vigny
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Début
07/12/2006
|
Fin
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123
2007
|
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Type
Projet Special
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Titre
Empty Walls - Just
Doors
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Artistes
Loris Cecchini
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Début
11/01/2007
|
Fin
21/01/2007
|
Evénements
|
Expo Collective
|
L'ICEBERG (XPLOITATION,
LOVE, etc./volet I)
|
  (collectif) : Rada Boukova, Aymeric
Ebrard, Thomas
Fontaine, Elodie Huet
|
11/01/2007
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21/01/2007
|
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Expo Collective
|
10 artistes, 10 jours, 10 vidéos
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11/01/2007
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21/01/2007
|
Une sélection de vidéos
réalisées par les étudiants des Beaux
Arts et des Arts Décoratifs de Paris.
|
Session
|
M Nouvelles du monde renversé
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01/02/2007
|
06/05/2007
|
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Expo Personnelle
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Post Patman
|
Michel Blazy
|
01/02/2007
|
06/05/2007
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Expo Personnelle
|
Joe Coleman (Exposition)
|
Joe Coleman
|
01/02/2007
|
11/03/2007
|
|
Expo Personnelle
|
Double Bind
|
Tatiana Trouvé
|
01/02/2007
|
11/03/2007
|
|
Projet Special
|
Etats (faites-le vous-même)
|
Peter Coffin
|
01/02/2007
|
06/05/2007
|
|
Projet Special
|
Musique pour plantes vertes
|
Peter Coffin
|
01/02/2007
|
11/03/2007
|
|
Expo personnelle
|
Avis de grand frais
|
David Ancelin
|
01/02/2007
|
25/02/2007
|
|
Expo Personnelle
|
King Kong Addition
|
Camille Henrot
|
01/02/2007
|
25/02/2007
|
|
Expo Personnelle
Expo Collective
Expo Collective
|
Setting Up and Taking Down
From Beyond
Granitoïd trans goa rascal
Koï
Koï,
Shimenawa Mamba, Original
peruvian carpet and digital
|
Koki Tanaka
Lucas et Jason Ajemian
Daniel Dewar &
Grégory Gicquel
|
01/03/2007
01/03/2007
22/03/2007
|
01/04/2007
01/04/2007
06/05/2007
|
PC (Jeudis de M) 01/03 Into the void de Black
Sabbath
|
|
projects for musicians
|
|
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|
Expo Personnelle
|
David Noonan
|
David Noonan (exposition)
|
22/03/2007
|
06/05/2007
|
|
Expo collective
|
Unités élémentaires
|
Bernadette Genée et Alain Le Borgne
|
05/04/2007
|
29/04/2007
|
PC 05/04 Un groupe de légionnaires chantent a capella
des
|
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|
|
|
|
chants de marche.
|
Expo Personnelle
|
Programme de gouvernement
|
Adriana Garcia Galan
|
03/05/2007
|
03/06/2007
|
|
Expo Collective
Session
|
Monument en sucre
La Marque noire
|
Lonnie Van Brummelen &
Siebren De Haan
|
03/05/2007
24/05/2007
|
|
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124
2007 (Suite)
|
|
|
|
|
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|
|
|
|
|
Type
Expo
Collective
Expo Collective
|
Titre
Before (Plus ou
moins)
Bastard Creature
|
Artistes
Vito Acconci, Kenneth Anger, Nancy Holt,
Robert
Smithson, Jane Crawford, Robert Fiore,
Donald Judd,
Frank Stella, Sturtevant, Andy Warhol.
Richard Aldrich, Cinema Zero, Gardar Eide
Einarsson,
|
Début
24/05/2007
24/05/2007
|
Fin
25/07/2007
25/05/2007
|
Evénements
|
|
|
Amy Granat, Richard Kern, Jutta Koether, Michael
Lavine, Chuck Nanney, Amy O'Neill, Mai-Thu Perret, Blair
Thurman, Banks Violette, Elizabeth Valdez, Andy Warhol
|
|
|
|
Expo Collective
|
Versus (Session
1)
|
Promotion 2006-2007 du Pavillon : Alex
Cecchetti, Duvier Del Dago Fernandez, Mati Diop, Manu Laskar,
Jaime Lutzo, Cova Macias, Denis Savary, Jean Luc Vincent. Sous
la dir. D'Alain Declercq.
|
07/06/2007
|
17/06/2007
|
|
Expo Collective
|
Versus (Session
2)
|
Promotion 2006-2007 du Pavillon : Alex
Cecchetti,
Duvier Del Dago Fernandez, Mati Diop, Manu Laskar,
Jaime Lutzo, Cova Macias, Denis Savary, Jean Luc
|
21/06/2007
|
01/07/2007
|
|
|
|
|
Vincent. Sous la dir. d'Alain Declercq.
|
|
|
|
Expo
Personnelle
Expo Collective
Expo hors
murs
|
Inaccessibilité et
connecteurs
hiérarchiques
Get Lost
Château de
Tokyo
|
Lucas Lenglet
Claire Fontaine (duo)
Michel Blazy, Philippe Decrauzat, Daniel Dewar
&
Grégory Gicquel, Renaud Auguste-Dormeuil,
Fabien
|
05/07/2007
05/07/2007
03/08/2007
|
26/08/2007
26/08/2007
|
|
|
|
Giraud &
Raphaël Siboni, Amy Granat, Mark
|
|
|
|
125
2007 (Suite)
|
|
|
|
|
|
Type
Expo
Collective
|
Titre
The Third Mind
|
Artistes
RONALD BLADEN · LEE BONTECOU ·
MARTIN BOYCE · JOE BRAINARD ·
VALENTIN CARRON · VIJA CELMINS ·
BRUCE CONNER · VERNE DAWSON ·
JAY DEFEO · TRISHA DONNELLY
· URS FISCHER · BRUNO GIRONCOLI
· ROBERT GOBER · NANCY
GROSSMAN · BRION GYSIN AND WILLIAM S.
|
Début
27/09/2007
|
Fin
01/03/2008
|
Evénements
PC 27/09 Cut-Ups : Sélection de musique
par Vincent Epplay
et Samon Takahashi toute la soirée du
vernissage.
|
|
|
BURROUGHS · HANS JOSEPHSOHN ·
TOBA KHEDOORI · KAREN KILIMNIK · EMMA
KUNZ · ANDREW LORD · SARAH
|
|
|
|
|
|
LUCAS · HUGO MARKL · CADY
NOLAND · LAURIE PARSONS ·
JEAN-FRÉDÉRIC SCHNYDER · JOSH SMITH
· PAUL THEK · ANDY WARHOL · REBECCA
WARREN · SUE WILLIAMS
|
|
|
|
Expo
Expo
Personnelle
|
Local technique
Where I lived, and
|
Frédéric Pradeau
Oscar Tuazon
|
05/10/2007
09/11/2007
|
|
|
Expo
|
Medio Dìa -
Media
|
John Armleder, Renaud Auguste-Dormeuil, Philippe
Decrauzat,
|
10/11/2007
|
30/12/2007
|
DC 07/12 "Recoleta", Séance consacrée à
l'exposition, au
|
126
2008
|
|
|
|
|
|
Type
Expo Collective
|
Titre
Medio Dìa -
Media
|
Artistes
John Armleder, Renaud Auguste-Dormeuil,
Philippe Decrauzat,
|
Début
10/01/2008
|
Fin
02/03/2008
|
Evénements
|
|
Noche (Chalet de
Tokyo)
|
Fischli & Weiss, Lucio Fontana, Douglas
Gordon, Fabrice Gygi,
Carlos Herrera, Jorge Macchi, Mathieu Mercier, Philippe
Parreno,
|
|
|
|
|
|
Bruno Peinado, Tatiana Trouvé.
|
|
|
|
Expo personnelle
|
Cairn
|
Gyan Panchal
|
08/02/2008
|
02/03/2008
|
|
Exposition
personnelle
Expo personnelle
Expo Collective
|
Cellar Door
Polka dot
Pavillon 7
|
Loris Gréaud
Marc Geffriaud
Avec : aiPotu (Andreas Siqueland /
Anders Kjellesvik), Meris Angioletti,
Jose Arnaud, Gaëlle Boucand, k.g. Guttman, Niklas
Goldbach, Romain
|
14/02/2008
06/03/2008
12/03/2008
|
27/04/2008
16/03/2008
|
|
Le Pavillon
|
|
Kronenberg, Charlotte Moth, Jorge Satorre, Stéphane
Vigny, et Ange
Leccia. Commissaire : Judicaël
Lavrador.
|
|
|
|
Expo personnelle
Expo Collective
|
Goldfingia
Medio Dìa -
Media
|
Emmanuelle Lainé
John Armleder, Renaud Auguste-Dormeuil,
Philippe Decrauzat,
|
03/04/2008
13/04/2008
|
27/04/2008
27/04/2008
|
DC 07/12 "Recoleta", Séance consacrée à
l'exposition, au
|
|
Noche (Chalet de
Tokyo)
|
Fischli & Weiss, Lucio Fontana, Douglas
Gordon, Fabrice Gygi,
Carlos Herrera, Jorge Macchi, Mathieu Mercier, Philippe
Parreno,
|
|
|
Bureau des médiateurs.
|
|
|
Bruno Peinado, Tatiana Trouvé.
|
|
|
|
Expo
personnelle
|
Dump
|
Christoph Büchel
|
29/05/2008
|
24/08/2008
|
|
Expo
personnelle
|
Würsa (à 18 000 km
de la Terre)
|
Daniel Firman
|
29/05/2008
|
24/08/2008
|
|
Expo personnelle
|
Last Manoeuvres in
the Dark
|
Fabien Giraud & Raphaël Siboni
|
29/05/2008
|
24/08/2008
|
|
Expo
personnelle
|
Time Between
|
Jonathan Monk
|
29/05/2008
|
24/08/2008
|
|
Expo
|
Afasia
La ligne dure
|
Arcangelo Sassolino
|
29/05/2008
|
|
|
127
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
2008 (Suite
|
|
|
|
|
|
Type
Expo
personnelle
Expo Collective
|
Titre
Inside the White Cube
(Expanded Editions)
You talking to me
|
Artistes
Yann Serandour
Lina Jabbour, Carole Manaranche
|
Début
03/07/2008
03/07/2008
|
Fin
24/08/2008
24/08/2008
|
Evénements
|
Expo Collective
Expo collective
|
Medio Dìa - Media
Noche
(Chalet de Tokyo)
Château de Tokyo, Palais
|
John Armleder, Renaud Auguste-Dormeuil,
Philippe Decrauzat, Fischli & Weiss, Lucio Fontana, Douglas
Gordon, Fabrice Gygi, Carlos Herrera, Jorge Macchi,
Mathieu Mercier, Philippe Parreno, Bruno Peinado,
Tatiana Trouvé.
Etienne Bossut, Jeremy Deller,
Dewar et Gicquel, Daniel Firman, Urs
|
07/08/2008
07/09/2008
|
31/08/2008
17/11/2008
|
|
|
de Fontainebleau
|
Fischer, Luca Francesconi, Roman Signer
et Ceal Floyer, Fabrice Gygi,
|
|
|
|
|
|
Henrik Plenge Jacobsen, Jonathan Monk, Gianni
Motti, Werner
|
|
|
|
|
|
Reiterer, Arcangelo Sassolino,
Unabomber...
|
|
|
|
Expo collective
|
Banderoles
|
Jeremy Deller, Ed Hall
|
25/09/2008
|
18/01/2009
|
|
Expo collective
Expo collective
|
Folk Archive
Les débuts du rock en
France
|
Jeremy Deller, Alan Kane
Jeremy Deller, Marc Touché
|
25/09/2008
25/09/2008
|
18/01/2009
18/01/2009
|
|
Expo collective
Expo collective
|
Son Z
"Tout ce qui avait solidité et
|
Andreï Smirnov, Matt Price, avec l'aide de Christina
Steinbrecher
Jeremy Deller, Scott King
|
25/09/2008
25/09/2008
|
18/01/2009
18/01/2009
|
|
|
permanence s'en va en
fumée"
|
|
|
|
|
Expo personnelle Expo
personnelle Expo collective
|
No Show
La géométrie (toucher
Cordélia)
Carte blanche à
l'association DCA "Fiac
Cinéma"
|
Melvin Moti
Benoît Maire
« IV » par Andrea Bruciati: Mounir
Fatmi, Arnaud Maguet, Alice Anderson,
Antoinette Ohannessian, Emre Hüner, Gail Pickering,
Markus Schinwald,
Bettina Hutschek.
« Peur et désir » par Bettina
Steinbrügge : Mounir Fatmi, Arnaud Maguet,
Alice Anderson, Antoinette Ohannessian, Emre Hüner,
Gail Pickering,
Markus Schinwald, Bettina Hutschek.
« De A à Y » par d.c.a :
A Constructed World, Neal Beggs, Simon
|
26/09/2008
26/09/2008
06/11/2008
|
26/10/2008
29/10/2008
30/11/2008
|
|
128
|
|
|
|
|
|
2008 (Suite
Type
Expo collective
|
Titre
Carte blanche à
|
Artistes
Grace Ndiritu, Marion Boquet-Appel, Marie Preston, Giasco
Bertoli, Ilanit Illouz,
|
Début
06/11/2008
|
Fin
30/11/2008
|
Evénements
|
|
l'association TRAM
"Hospitalités"
STATION
|
Seulgi Lee, A Constructed World, Jan Kopp, Régis
Perray, Lydie Jean-Dit-
Pannel, Stéphane Pichard, Dominique Petitgand,
Marie-Jeanne Hoffner, Lionel
Monier, Eva Keil, Denis Savary, Daniela Franco, Diego
Sarramon, Edouard
|
|
|
|
|
|
Sautai, Bertille Bak, Vincent Meessen & Adam
Leech, Kimsooja, Kolkoz, Delphine Kreuter, Anne Deguelle, Charlotte
Moth, Nicolas Boone & Johann Van
Aerden, Katinka Bock.
|
|
|
|
129
2009
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Type
|
Titre
|
Artistes
|
Début
|
Fin
|
Evénements
|
Expo Personnelle
|
Abandon
|
Tony Matelli
|
09/01/2009
|
01/02/2009
|
|
Expo Personnelle
|
Sans titre
(Melancholia)
|
Dominique Blais
|
06/02/2009
|
01/03/2009
|
|
Expo Personnelle
Expo Personnelle
|
Color Suite
Chizhevsky
|
Etienne Chambaud
Micol Assaël
|
06/02/2009
12/02/2009
|
01/03/2009
03/05/2009
|
|
|
Lessons
|
|
|
|
|
Expo Personnelle
Expo Personnelle
|
Ceal Floyer
Exposition
Haarp
|
Ceal Floyer
Laurent Grasso
|
12/02/2009
12/02/2009
|
03/05/2009
03/05/2009
|
|
Expo Personnelle
|
Exposition
|
Roman Signer
|
12/02/2009
|
03/05/2009
|
|
|
Roman Signer
|
|
|
|
|
Expo Personnelle
Expo collective
|
Un ensemble
Expanded
|
Mathilde Du Sorbet
Florian Pugnaire et David Raffini
|
06/03/2009
06/03/2009
|
29/03/2009
|
|
Expo Personnelle
Expo Personnelle
|
Replica
Une haine sans
|
Bettina Samson
Clément Rodzielski
|
02/04/2009
02/04/2009
|
|
|
Projection
|
Carte blanche à
|
|
16/04/2009
|
|
PJ d'une sélection de films et de
vidéos réalisés et
|
130
2009 (Suite)
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Type
Projet Special
|
Titre
Nomiya
|
Artistes
|
Début
01/07/2009
|
Fin
01/03/2011
|
Evénements
Une oeuvre de Laurent Grasso sur le toit du Palais
de
Tokyo soutenue par Electrolux
|
Expo Collective/
Le Pavillon
|
Le plan
méthodique de F.
Le Play
|
Pedro Barateiro, Emma Dusong, Isa Griese,
Louise Hervé et Chloé Maillet, Matteo
Rubbi,
Axel Straschnoy, Iris Touliatou, Gilles
|
02/07/2009
|
16/08/2009
|
PC 16/07 Le jeu de l'exposition universelle,
performance
de Louise Hervé et Chloé Maillet. Les artistes
ont édité
un scénario de semi-réel sous la forme d'un
livre de
|
Expo Collective
|
A man on the
moon
|
Toutevoix. Avec la participation de Thomas
Lannette
Les astronautes des missions Mercury,
Gemini, Apollo.
|
05/07/2009
|
20/09/2009
|
poche.
|
Expo
|
Rivières/ Vitrinne
|
Vincent Ganivet
|
07/07/2009
|
25/07/2009
|
|
Personnelle
|
des Galeries
Lafayette
|
|
|
|
|
Réondeur
|
Music For
|
Nicolas Juillard
|
01/09/2009
|
30/09/2009
|
|
Expo
|
Masses #2
Châlets de Tokyo
|
Vincent Ganivet
|
03/09/2009
|
25/09/2009
|
|
personnelle
Expo Personnelle
|
Same time
|
Julien Dubuisson
|
03/09/2009
|
20/09/2009
|
|
Expo Personnelle
|
Incomplete
|
Hugo Pernet
|
03/09/2009
|
20/09/2009
|
|
Expo Personnelle
|
Basse Def
|
Julien Dubuisson
|
14/09/2009
|
|
|
Expo Personnelle
|
Postface
|
Hugo Pernet
|
14/09/2009
|
|
|
131
2009 (Suite)
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Type
Session/
Exposition
collective
Expo Collective
|
Titre
Chasing
Napoleon
Naoshima :
|
Artistes
Dave Allen, Micol Assaël, Christoph
Büchel, Dora Winter, Gardar Eide Einarsson, David
Fincher, Tom Friedman, Ryan Gander, Robert
Gober, Robert Kusmirowski, Paul
Laffoley, Tony Matelli, Ola Pehrson,
Charlotte Posenenske, Hannah
Rickards, Dieter Roth, Tony Smith, John Tremblay
Les architectes Tadao Ando, Kazuyo Sejima, Ryue Nishizawa et
les artistes
|
Début
15/09/2009
23/09/2009
|
Fin
17/01/2009
08/10/2009
|
Evénements
DC 23/09 Conférence avec les
|
|
Archipel d'art
et
|
Shinro Ohtake, Hiroshi Sugimot.
|
|
|
architectes Kazuyo Sejima, Ryue
Nishizawa, Hiroshi Sambuichi, Patrick
|
|
d'architecture
|
|
|
|
Bouchain et Soichiro Fukutake, président
de la Fondation Naoshima Fukutake Art Museum, Francis
Rambert, directeur de l'Institut français
|
Expo
|
A la playa
|
Antoine Dorotte
|
03/12/2009
|
|
|
132
2010
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Type
|
Titre
|
Artistes
|
Début
|
Fin
|
Evénements
|
Exposition
personnelle
Exposition
|
Dead End
Le Corso
|
Marion Tampon-Lajarette
Bertrand Dezoteux
|
07/01/2010
07/01/2010
|
31/O1/2010
31/O1/2010
|
|
personnelle
PJ/ Jeudis de
|
pointligneplan
|
Erik Bullot, Volkeir Schreiner, Michael
Snow, Dominique Gonzalez
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07/01/2010
|
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PJ Films expérimentaux et films d'artistes
croisant
|
Chasing
Napoleon
|
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Foerster, Isabelle Prim et Ludovic Burel, Marine
Hugonnier.
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géographie, technique et disparition.
Présenté par Eric
Bullot.
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Répondeur
|
Chasing Pergola
|
Jens Brand
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01/02/2010
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28/02/2010
|
|
Exposition
personnelle
|
Perspective cavalière
|
Isabelle Frémin
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04/02/2010
|
28/02/2010
|
|
Exposition
personnelle
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Fertilité du Diable
|
Benjamin Swaim
|
04/02/2010
|
28/02/2010
|
|
Exposition personnelle
Exposition personnelle
Exposition
|
Monsieur
Retrospective
(A list of which I
|
Valentin Carron
Charlotte Posenenske
Raphaël Zarka
|
19/02/2010
19/02/2010
19/02/2010
|
23/05/2010
23/05/2010
23/05/2010
|
|
personnelle
Exposition
personnelle
|
could tediously
extend ad infinitum)
Re/Search: Bread and Butter with the
ever present Question of How to define the
difference between a Baguette
|
Serge Spitzer
|
19/02/2010
|
16/01/2010
|
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133
2010 (Suite)
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Type
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Titre
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Artistes
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Début
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Fin
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Evénements
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Exposition
personnelle
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Comme on fait disparaître
les miroirs
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Emilie Pitoiset
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04/03/2010
|
28/03/2010
|
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Exposition
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Mes plans sur la comète /
|
Emmanuel Régent
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04/03/2010
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28/03/2010
|
|
personnelle
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Drifting away
|
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|
Exposition
personnelle
|
Postvsnow
|
Luc Kheradmand
|
04/03/2010
|
28/03/2010
|
|
Exposition
personnelle
Exposition
|
Squall Lines
Constellation basse
|
Franziska Furter
Florian Fouché
|
01/04/2010
01/04/2010
|
02/05/2010
02/05/2010
|
|
personnelle
Exposition
|
Reworks
|
Alexis Guiller
|
01/04/2010
|
02/05/2010
|
|
personnelle
PC (Jeudis de
Pergola)
Exposition
|
Autour de Charlotte
Posenenske
Off
|
Jean-Marie Blanchet
|
15/04/2010
06/05/2010
|
|
DC Rencontre avec Paul Maenz,
collectionneur
berlinois et Renate Wiehager, historienne
de
l'art et directrice de la Daimler
Collection
|
Expo Collective
|
Coulis de framboises
|
Collectif Kit : Julie Béna, Laurence De
Leersnyder, Daphné Navarre. Avec :
Miriam Cahn, Julia Cottin, Noël Dolla, Julien
Dutertre, Yann Gerstberger,
|
13/05/2010
|
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134
2010 (Suite)
Type
|
Titre
|
Artistes
|
Début
|
Fin
|
Evénements
|
Session/ Expo
Collective
|
Dynasty
|
Gabriel Abrantes et Benjamin Crotty, Farah Atassi,
Laëtitia Badaut Haussmann, Gaëlle
Boucand, Mohamed Bourouissa, Guillaume Bresson, Pierre-Laurent
Cassière, Yuhsin U. Chang,
Stéphanie Cherpin, Pauline Curnier Jardin, Mélanie Delattre-Vogt,
Alain Della Negra et Kaori Kinoshita, Dewar et Gicquel,
Bertrand Dezoteux, Rebecca Digne, Antoine Dorotte, Julien
Dubuisson, Vincent Ganivet, Fabien Giraud et Raphaël
Siboni, Camille Henrot, Louise Hervé et Chloé Maillet,
Armand Jalut, Laurent Le Deunff, Benoît Maire, Vincent
Mauger,
|
11/06/2010
|
05/09/2010
|
PC 10/06 After-party avec un DJ set de
KRIKOR et JOAKIM sur la terrasse.
|
|
|
Robin Meier et Ali Momeni, Théo Mercier, Nicolas
Milhé, Benoît-Marie Moriceau, Jorge Pedro
Núñez, Masahide Otani, Florian
Pugnaire et David Raffini, Jean-Xavier Renaud, Raphaëlle
|
|
|
|
|
|
Ricol, Bettina Samson, Alexandre Singh, Oscar Tuazon et Eli
Hansen, Cyril Verde + Mathis
Collins, Duncan Wylie, Chen Yang
|
|
|
|
Expo Collective
|
La leçon de l'histoire
|
Curator : Joseph Backstein
|
12/06/2010
|
27/06/2010
|
Présentation des travaux d'une trentaine
d'artistes russes contemporains.
|
Expo Collective/ Le
|
Ce monde
|
Andrea Acosta, Haizea Barcenilla Garcia, Patrick Bock,
Davide Cascio, Ramiro Guerreiro,
|
27/06/2010
|
19/09/2010
|
PC 01/07 Les sept artistes et les deux
|
Pavillon
|
impitoyable
|
Anthony Lanzenberg , Jorge Pedro
Nùñez, Florence Ostende et Samir Ramdani
|
|
|
curatrices réinstallent leur module dans
les murs du Palais de Tokyo et
è ( )
|
Expo Collective
Expo personnelle
|
In Fine
Les Jeunes Filles
Horribles
|
Florian Pugnaire et David Raffini
Giuliana Zefferi
|
01/07/2010
12/07/2010
|
05/09/2010
05/08/2010
|
|
Expo personnelle
Expo personnelle
|
Apollo goes on
Holiday
Que nul n'entre ici qui
ne soit géomètre
LE PAVILLON, La
Cabane-le Monde
|
Iris Touliatou
Benjamin Valenza
Niklas Goldbach, Louise Hervé &
Chloé Maillet, Romain Kronenberg, Cova Macias, Ariane
Michel, David Raffini & Florian Pugnaire, Koki Tanaka, Adam
Vackar.
|
09/09/2010
09/09/2010
|
03/10/2010
03/10/2010
03/10/2010
|
|
PJ/ Nuit Blanche
Expo personnelle
|
Apichatpong
Weerasethakul The
Réserve naturelle
|
De Ziad Antar, Louidgi Beltrame, Isabelle Cornaro, Angela
Detanico & Rafael Lain, Mati Diop,
Eric Tabuchi
|
02/10/2010
07/10/2010
|
31/10/2010
|
|
Expo personnelle
|
Palace (Red Dog) /
La traversée difficile
|
Carol Bove
|
07/10/2010
|
31/10/2010
|
|
135
2010 (Suite)
|
|
|
|
|
|
Type
Session/ Expo
|
Titre
Fresh Hell, Carte blanche à
|
Artistes
Bas Jan Ader, Barbara Bloom, Jonathan
Borofsky, Angela Bulloch, Maurizio Cattelan,
|
Début
19/10/2010
|
Fin
16/01/2010
|
Evénements
|
Collective
|
Adam McEwen
|
Anne Collier, Martin Creed, Gino De
Dominicis, Walter De Maria, Jessica Diamond,
Matias Faldbakken, Isa Genzken, Geert Goiris, Dan Graham,
Philip Guston, Raymond
|
|
|
|
|
|
Hains, David Hammons, Georg Herold, Martin Kippenberger,
Michael Landy, Hanna &
Klara Liden, Nate Lowman, Sarah Lucas, Ana
Mendieta, Henri Michaux, Reinhard
|
|
|
|
|
|
Mucha, Bruce Nauman & Frank Owen,
Michelangelo Pistoletto, Rob Pruitt, Steven
Shearer, Roman Signer, Agathe Snow, Rudolf Stingel,
Rosemarie Trockel, Valie
Export, H. C. Westermann
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Expo personnelle
|
Rachelle, Monique
|
Sophie Calle
|
20/10/2010
|
|
|
Expo personnelle
|
Chalet de Tokyo à Coimbra :
|
João Onofre
|
30/10/2010
|
|
|
Expo personnelle
|
Grand Radical Country Mix
|
Fabien Souche (dit Souche)
|
05/11/2010
|
|
|
136
2011
|
|
|
|
|
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|
Type
Exposition
|
Titre
Un film abécédaire
|
Artistes
Eléonore Saintagnan
|
Début
01/01/2011
|
Fin
30/01/2011
|
Evénements
|
personnelle
Exposition
|
Bring us to ourselves,
|
Emmanuel Van Der Auwera
|
01/01/2011
|
30/01/2011
|
|
personnelle
|
Mikhaïl
|
|
|
|
|
Répondeur
Exposition
|
Bell Study
Assis sur l'obstacle
|
Stephen Vitiello
John Cornu
|
01/01/2011
04/02/2011
|
31/01/2011
27/02/2011
|
|
personnelle
Exposition
|
Névés
|
Sébastien Vonier
|
04/02/2011
|
27/02/2011
|
|
personnelle
Exposition
personnelle
|
Quand la ville dort
|
Hakima El Djoudi
|
04/02/2011
|
27/02/2011
|
|
Exposition
personnelle
|
João Onofre
|
Box sized Die featuring No Return
|
18/02/2011
|
03/04/2011
|
Les performances ont lieu à 19h30 les jeudis 24
février,
3 mars, 10 mars, 17 mars, 24 mars
|
Exposition
|
Karsten Födinger
|
Cantilever
|
18/02/2011
|
|
|
Exposition
personnelle -
|
Sandra Lorenzi
|
La nébuleuse de l'homoncule
|
04/03/2011
|
|
|
137
ANNEXE 3
ICONOGRAPHIE
Fig. #1 : Kay Hassan, Johannesburg by
day, 2002 Fig. #2 : Loris Cecchini, Breastwork,
2002
Vue de l'exposition d'ouverture, 2002 Vue de l'exposition
d'ouverture, 2002
Fig. #3 : Michael Elmgreen & Ingar Dragset,
Demolished Prison, Powerless Structures, Fig. 272, 2002
Vue de l'exposition d'ouverture, 2002
Crédit photo : Marc Domage
Fig. #4 : Loris Cecchini, Empty Walls -
Just Doors, 2006 Courtesy Gallerie Continua Vue de l'exposition Empty
Walls - Just Doors, 2007 Crédit photo : Didier Barrosso
Crédit photo : Marc Domage Crédit photo : Marc
Domage
138
Fig. # 5 : Sandra Lorenzi,
L'édifice persistant, 2011 Fig. # 6 : Vincent
Ganivet, Caténaire, 2010
Jizo gisants, 2010 ; Shell, 2011 ; Courtesy
de l'artiste Courtesy de l'artiste
Vue de l'exposition La nébuleuse de l'homoncule
Vue de l'exposition Dynasty, 2010
Crédit photo : Fabrice Gousset Crédit photo :
André Morin
Fig. # 7 : Sébastien Vonier,
Névés, 2011 Fig. #8 : Karsten
Fodïnger, Cantilever, 2011
Courtesy de l'artiste Courtesy RaebervonStenglin,
Zürich
Vue de l'exposition Névés, 2011 Vue de
l'exposition Cantilever, 2011
Crédit photo : F. Gousset Crédit photo : F.
Gousset
Fig. #9 : Michel Blazy, Sculptucre,
2003-2007 Fig. #10 : Michel Blazy, Peau de
bête, 2007 ; Fontaine de
Courtesy Galerie Art Concept mousse, 2007 ; Sans
titre, 2007
Vue de l'exposition Post Patman, 2007 Vue de
l'exposition Post Patman, 2007
Crédit photo : André Morin Crédit photo :
André Morin
139
Fig. #11 : Jean Michel Blanchet,
Adhésif sur mur, 2007 Fig. #12 : Florian
Pugnaire & David Raffini, Expanded Crash
Vue de l'exposition Off, 2010 2008-2009 ; Production
du Fresnoy
Crédit photo : André Morin Vue de
l'exposition Expanded Crash, 2009
Crédit photo : André Morin
Fig. #13 : Laurent Moriceau, Killing Me
Softly, 2003 Fig. #14 : Laurent Moriceau, Killing Me
Softly, 2003
Capture d'écran de la vidéo de la performance
Capture d'écran de la vidéo de la performance
Fig. #15 : Arcangelino Sassolino, Sans
titre, 2008
Vue de l'exposition Château de Tokyo / Palais de
Fontainebleau, 2008 Courtesy de l'artiste & galerie Feinkost
Crédit photo : André Morin
140
Fig. #16 : Robert Gober, Drain, 2009
Fig. #17 : Ryan Gander, Nathaniel Knows, 2009
Collection S.M.A.K. Courtesy Flowerman Collection
Vue de l'exposition Chasing Napoleon, 2009 Vue de
l'exposition Chasing Napoleon, 2009
Photo : André Morin Photo : André Morin
Fig. #18 : Urs Fischer, Untitled
(Branches), 2005 ; Courtesy de l'artiste & Galerie Eva Presenhuber
Christian Andersson, The Blind Spot, 2003-2006 ;
Courtesy Galerie Nordenhake
Vincent Lamouroux, Scape, 2006 ; Courtesy de
l'artiste
Vue de l'exposition Cinq milliards d'années,
2006
Photo : Marc Domage
Fig. #19 : Bettina Samson, Warren, 1/4 de
seconde en Fig. #20 : Flying Tape, 2006
Cinémascope, 2007 ; Courtesy de l'artiste
Courtesy Spencer-Brownstone
Vue de l'exposition Dynasty, 2010 Vue de l'exposition
Une seconde, une année, 2006
Photo : André Morin Photo : Marc Domage
Fig. #21 : Rebecca Horn, Lumière en
prison dans le ventre de la baleine, 2002
Vue de l'exposition Lumière en prison dans le ventre de la
baleine, 2002
Photo : Marc Domage
141
Fig. #22 : Jota Castro, Brains, 2005
Fig. #23 : Arthur Barrio, Réflexion...(s)..., 2005
Vue de l'exposition Exposition Vue de l'exposition
Réflexion...(s)..., 2005
Universelle 1, 2005 Photo : Cristina B. Motta
Photo : Guillaume Loiret
142
Fig. #24 : Mathieu Briand, Le Monde
flottant, 2003 Fig. #25 : Loris Gréaud,
Forêt de poudre à canon (bulle), 2008
Vue de l'exposition Le Monde flottant, 2003 Vue de
l'exposition Cellar Door, 2008
Photo : Marc Domage Courtesy Yvon Lambert Paris
Photo : Olivier Pasqual
Fig. #26 : Adel Abdessemed, Habibi,
2004 Collection MAMCO
Vue de l'exposition Notre histoire..., 2006 Photo :
Florian Kleinefen
143
Fig. #27 : Laurent Le Deunff,
Crâne, 2002 Fig. #29 : Nicolas Juillard, The
Waiting Room, 2005
Vue de l'exposition Dynasty, 2010 Vue de l'exposition
The Final Cut, 2005
Photo : Pierre Antoine Photo : Marc Domage
Fig. #28 : Bruno Peinado, Vanity Flight
Case, 2005 Vue de l'exposition Medio Dia - Media Noche, 2007
Photo : Santos Suetta
Fig. #30 : Yoshihiro Suda, One Hundred
Encounters, 2001 Fig. #31: Tony Matelli, Weeds,
2006
Vue de l'exposition Yoshihiro Suda, 2004 Courtesy
Galerie Loevenbruck
Courtesy Gallery Koyanagi Vue de l'exposition Abandon,
2009
Photo : Daniel Moulinet Photo : André Morin
|
Fig. #33 : Marina Abramovic & Jan Favre,
Guerrier-Vierge/Vierge - Guerrier, 2004
Vue de la performance
|
|
144
Fig. #32 : Gianni Motti, Big Crunch
Clock, 1999-2005 Fig. #35 : Bertrand Lamarche, Lobby
(Hyper tore
Commande publique O 550) Courtesy Galerie Poggi &
Bertoux
Photo : Marc Domage Photo : André Morin
Fig. #34 : Pierre Ardouvin, Nasseville,
2003 Photo : Marc Domage
145
Fig. #39 Chen Zhen, Purification Room,
19912003
Courtesy Galleria Continua
Vue de l'exposition Silence Sonore, 2003 Photo : Daniel
Moulinet
Fig. #37 : Alain Declercq, Instinct de mort,
2002 Vue de l'exposition d'ouverture,
2002
Photo : Marc Domage
Fig. #36 : Yuhsin U. Chang,
Poussière dans le Palais de Tokyo,
2010 ; Courtesy de l'artiste & Galerie Yvan Roubin Vue de
l'exposition Dynasty, 2010
Photo : Hervé Morin
Fig. #38 : Kendell Geers, The Terrorist's
Apprentice, 2002 Vue de l'exposition Sympathy for the Devil,
2002
Photo : Marc Domage
Fig. #40 Christoph Büchel, Dump,
2008
Courtesy Cristophe Büchel, Hauser & Wirth Vue de
l'exposition Dump, 2008
Photo : Didier Barroso
Fig. #41 Christoph Büchel, Dump,
2008 Courtesy Cristophe Büchel, Hauser & Wirth
Vue de l'exposition Dump, 2008 Photo : Didier Barroso
Fig. #42 : Guillaume Paris, We are the
world, 2003
Vue de l'exposition H.U.M.A.N.W.O.R.L.D, 2003
Photo : Marc Domage
146
Fig. #43 Boris Achour, Cosmos, 2003
- Vue de l'exposition Cosmos, 2003 - Photo : Marc Domage
Fig. #45 Eric Tabuchi, Hyper Trophy 008,
142, 2010 ; Peinture
d'angles, 2010 ; Sunrise, 2010 ;
Agrandissement du provisoire, Photo : Daniel Moulinet
2010 - Vue de
l'exposition Réserve naturelle, 2010 - Photo :
André Morin
Fig. #46 Raphaël Zarka, La draisine
de l'Aérotrain, 2009 - Vue de l'exposition (A List Of Which I
Could Tediously Extend Ad Infinitum), 2010 À Photo : André
Morin
Fig. #48 : Marc Handforth, Honda, 2002
À Vincent Lamouroux, Scape, 2006 À Vue de l'exposition
Cinq milliards d'années, 2006 À Photo : Marc Domage
Fig. #47 : Daniel Dewar et Grégory
Gicquel, Mason Massacre, 2008 À Courtesy Chez Valentin À Vue de
l'exposition, Château de Tokyo, Palais de Fontainebleau, 2008
147
Fig. #44 Wang Du, Produit
dérivé, 2004
Vue de l'exposition Wand Du Paradade #4, 2004
148
Fig. #49 Luc Kheradmand, Postvsnow III,
2009-2010 Courtesy de l'artiste
Vue de l'exposition Postvsnow, 2010 Photo :
André Morin
Fig. #50 Henrik Hakansson, Broken
Forest, 2006
Vue de l'exposition A travers bois pour trouver
forêt, 2006
Photo : Florian Kleinefenn
Fig. #51 Tom Friedman, Untitled (A
Curse), 2009 -- Courtesy Gagosian Gallery - Robert Kusmirowski,
Unacabine, 2008 -- Courtesy Foksal Gallery -- Vue de l'exposition
Chasing Napoleon, 2010 -- Photo : André Morin
Fig. #52 Daniel Buren, Quatre fois moins
ou quatre fois plus?, 2004 -- Vue de l'exposition in situ,
Quatre fois moins ou quatre fois plus?, 2004 -- Photo : Marc Domage
149
Fig. #53 Katharina Grosse, Constructions
à cru, 2004 Fig. #54 Alain Bublex, Projet
Tokyorama 6, 2001
Photo : Florian Kleinefenn Photo : Alain Bublex
Fig. #55 Fabrice Gygi, Tribune, 1996
- Vue de l'exposition Medio Dia - Media Noche, 2007 - Photo : Santos
Suetta
Fig. #57 Tsuneko Taniuchi, Tsuneko
Troc, 2001 À Vue de la performance Projet Tokyorama 5,
2001 À Photo : Marc Domage
Fig. #56 Robert Milin, Le Jardin aux
habitants, 2002 Commande publique À Photo : Marc Domage
Fig. #58 Matthieu Laurette, Les Produits
remboursés, 2001 - Courtesy Yvon Lambert - Vue de l'exposition
Notre histoire..., 2006 - Photo : Fotostudio Eshof