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Les podcasts dans le monde du livre en France.


par Camille CAPRON
Université de la Sorbonne Paris Nord - Master Commercialisation du livre 2020
  

Disponible en mode multipage

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1

Camille CAPRON

 
 

Mémoire de fin d'études

Master 2 Commercialisation du livre

LES PODCASTS DANS LE MONDE DU LIVRE

EN FRANCE

UFR Sciences de l'information et de la communication

Sorbonne Paris Nord

Directeur de mémoire : Monsieur Bertrand Legendre, Directeur du LabSIC et du LabEx ICCA

2

Je voudrais remercier tout d'abord Monsieur Legendre, Directeur du LabSIC et du LabEx ICCA, qui a suivi mon travail de recherche pendant cette année universitaire.

Je remercie également toutes les podcastrices amateures et professionnelles ainsi que les autrices qui ont bien voulu répondre à mes questions pour ce travail : Anne-Gaëlle Huon, Emilie Deseliène, Margaux Rol, Claire Jéhanno et Caroline Psyroukis.

Je tiens à témoigner toute ma reconnaissance à Justine Souque qui, durant cette période toute particulière du confinement, m'a accordé son temps lors des entretiens et m'a transmis toute son expertise sur ce sujet ainsi que tout son soutien.

Je remercie aussi les membres du groupe « Podcast & Littérature » qui m'ont permis, via leurs réponses à mon questionnaire, d'analyser les attentes et besoins des auditeurs et auditrices de podcasts littéraires.

Et je souhaite également remercier l'université Sorbonne Paris Nord pour son suivi pendant cette période difficile et pour les aménagements qui ont pu être mis en place afin de nous faciliter le travail, le rendu de mémoire ainsi que la soutenance.

3

SOMMAIRE

I) Introduction 4

II) Point théorique autour du podcast 9

a) Définition 9

b) Chiffres, gratuité et usages 13

III) Le contenu du podcast littéraire : présence de l'auteur et du

livre, choix des thèmes et des habillages. 17

a) Podcasts littéraires et amateurs : quelles caractéristiques ? 17

b) L'auteur.rice au coeur du podcast littéraire ? 33

IV) Les podcasts littéraires dans le monde du livre 37

a) Groupes et maisons à la conquête du podcast et du podcasteur.rice ? 37

b) Une entrée dans l'édition : entre coulisses et publications 43

V) Conclusion 48

VI) Bibliographie et sitographie 51

VII) Sommaire annexes 55

VIII) Note de synthèse 77

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I) Introduction

Le confinement de cette année 2020 a engendré une augmentation de l'écoute de podcasts. Le nombre de téléchargements est passé de 70.6 millions en janvier-février à 75.9 millions en mai-juin1. Selon une étude menée le 28 avril 2020 par Audion2, pendant le confinement, 48 % des français et françaises ont déclaré écouter plus de podcasts qu'à leur habitude. Et cette période a séduit 4 % d'auditeurs et auditrices supplémentaires, une hausse conséquente puisqu'elle dépasse celle que connaît, en temps normal, le podcast en une seule année.

Depuis une dizaine d'années, le podcast a fait son entrée en France mais ce n'est seulement que depuis cinq ans que celui-ci s'est fait une réputation. À l'instar d'autres pays, le podcast a premièrement été utilisé en France comme un format de réécoute. Ainsi, il n'était pas rare de voir des médias tel que France Culture, proposer leurs émissions sous formes de podcasts, à la suite de leurs passages radios. En 2015, professionnels.elles et particuliers.ères français.es remarquent le potentiel global du podcast. Celui-ci n'est plus seulement utilisé en réécoute mais également pour créer du nouveau contenu. Cette pratique n'était pas une nouveauté, puisqu'elle existait déjà, notamment dans les pays anglosaxons. C'est pourquoi, aujourd'hui, la plupart des médias proposent désormais leurs contenus en réécoute et que de nombreuses marques créent leurs podcasts, les utilisant pour leur communication et promotion. Cependant, ce phénomène ne touche pas uniquement les entreprises. Avec l'arrivée du podcast, de nouveaux savoir-faire sont apparus, accompagnés d'une volonté de création. Ainsi, des individus sont devenus podcasteurs ou podcastrices en créant leur propre contenu par le biais de ce nouveau format.

Le podcast est un moyen de communication, soit une nouvelle forme de transmission du savoir3. En combinant le numérique (avancée technologique) à l'oral (pratique ancestrale), celui-ci permet une nouvelle forme de partage. Dans l'Antiquité, la tradition orale permettait une transmission de savoirs de génération en génération. À cette époque, les sociétés n'avaient pas d'écriture ou ne l'utilisaient que très rarement. Ainsi, l'accès à la culture se faisait de façon verbale.

1 BRULHATOUR Frédéric, « Une hausse de 48 % de l'audience des podcasts natifs », Le Pod, 25/09/2020.

2 GENTILLEAU Fiona, « Les audiences de podcast et d'audio digital en hausse pendant le confinement », emarketing.fr, 27/04/2020.

3 Communiquer vient du latin communicare qui veut dire mettre en commun, faire part, transmettre (des informations, des compétences).

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Aujourd'hui, alors que nous sommes dans une ère technologique où règnent l'écran et le virtuel, le podcast devient un relai entre les avancées numériques et l'attachement que toute société a toujours eu pour l'oral. On peut ainsi parler de « digitalisation de la tradition orale 4 » ou encore « d'une nouvelle tradition orale 5 ». La tradition orale étant la plus ancienne forme de communication, le podcast s'en rapproche donc par ses facilités d'accès et de compréhension. En effet, le lien entre l'oralité et la culture, dont fait partie la littérature, a toujours été important. Des grandes oeuvres classiques telles que L'Iliade et L'Odyssée ont été clamées et transmises par oral. Et, actuellement, oral et littérature sont encore liés. Des lectures à voix hautes s'exercent dans les écoles, les bibliothèques ou encore les centres pénitenciers. Aujourd'hui, l'oralité est donc encore essentielle à la littérature et des personnes prêtent leurs voix pour l'accès à tous et à toutes.

Dans un article intitulé « Les éditeurs à l'assaut du podcast » publié le 10 janvier 2020 dans Livres Hebdo, la journaliste Cécilia Lacour fait une mise en lumière sur la présence du podcast dans le monde du livre. Elle met en avant le fait que « quinze programmes audio ont déjà été créés par des maisons d'éditions. [Et] depuis juin 2018, treize maisons d'édition ont créé quinze podcasts, dont sept ont été lancés au cours du second semestre 2019. » Parallèlement à cela, en parcourant les plateformes d'écoute mais également les réseaux sociaux, on remarque le développement de podcasts littéraires que l'on pourrait qualifier d'amateurs en comparaison aux professionnels créés par les maisons d'édition.

Ainsi, au vu de l'influence globale du podcast en général mais également de la place que

ce nouveau format prend, petit à petit, dans le monde du livre, il est intéressant d'émettre des

questionnements :

- Comment le format du podcast s'est-il fait une place dans le monde des livres ?

- Pourquoi et comment le podcast littéraire attire-t-il les lecteurs/ lectrices et auditeurs/

auditrices ?

- Pourquoi des podcasts littéraires sont-ils créés ?

- Qui sont les créateurs de ces podcasts ?

- Qui les écoute ?

- Quelles places occupent l'auteur/ autrice et le livre dans ce nouveau média ?

4 JABBE Elias, « Podcasts : digitising an oral tradition », Wamda, 04/12/2018,

https://www.wamda.com/index.php/en/2018/12/podcasts-digitising-oral-tradition.

5 SKIDMORE Ryan, « Podcasting : the new oral tradition », Carmine, 01/05/2018, https://carmine.io/podcasting-new-oral-tradition/.

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- Le podcast est-il devenu un simple outil de promotion ou son usage a-t-il plus d'impacts ?

- Qu'apporte-t-il aux maisons d'édition ? Aux auteurs/ autrices ? Au marché du livre ?

- Ce nouveau contenu est-il une nouvelle forme de production éditoriale ?

- Est-ce une nouvelle manière de rendre les livres et la littérature accessibles à tous ?

- Cela pourrait-il être en lien avec une nouvelle forme de démocratisation de l'audio dans la

pratique de la lecture ?

- Les contenus sont-ils ponctuels ou créés dans un but à long terme ?

- Ce nouveau média est-il en voie de généralisation dans le monde du livre ?

Les réponses et interrogations qui suivront nous permettront de nous questionner autour d'une problématique générale qui nous servira de fil conducteur pour organiser ce travail : De quelle(s) manière(s) ces nouveaux médias participent-ils à la prescription littéraire ? Ainsi, dans un premier temps, une introduction historique du podcast nous permettra d'aborder le format du podcast d'un point de vue théorique. Puis, dans un second temps, nous analyserons les caractéristiques du podcast littéraire en nous focalisant sur la présence des auteurs et autrices, leur rôle dans ces podcasts ainsi que les thèmes abordés et l'ornementation des podcasts littéraires. Ceci, nous permettra, dans un dernier temps, de nous attarder sur la présence des podcasts dans le monde du livre.

Pour répondre à l'ensemble de ces questions de manière logique et synthétique, mon analyse portera sur le domaine de la littérature générale, française et étrangère, et sur des podcasts français créés au cours des deux dernières années (soit à partir de 2018). Je m'intéresserai à la fois aux podcasts d'amateurs (soit de lecteurs) et aux podcasts de professionnels du livre (soit créés par des maisons d'édition). Cela me permettra d'avoir un panorama plus large mais également de comparer ces différentes entreprises (fréquence du podcast, son sujet et son but, sa construction, la place de l'auteur, le rôle du créateur du podcast, le public auquel il s'adresse, les impacts sur la maison d'édition et l'auteur...) et de voir si un lien (ou plusieurs) existe(nt) entre ces deux types de podcasts, mais également entre podcasts d'amateurs et maisons d'édition.

De ce fait, mon corpus sera composé de cinq podcasts sélectionnés puisque centrés sur la littérature générale mais surtout puisqu'ils donnent chacun, à leur manière, une place aux auteurs et autrices dans leurs contenus.

7

Les podcasts choisis sont donc les suivants :

- Pile : créé en janvier 2018 par Claire Jéhanno « pour trouver le bon livre pour le bon moment », ce podcast délivre des conseils de lectures mais également quelques « hors-série » qui donnent la parole à des auteurs et autrices telle que Valérie Perrin.

- La page blanche : créé en mars 2019 par Emilie Deseliène, chaque podcast est « une conversation autour de l'écriture » durant laquelle un auteur se confie à Emilie sur un roman, l'écriture, l'édition...

- Primo : créé par les éditions Robert Laffont en 2018, en co-production avec Nouvelles Ecoutes, il s'agit-là d'une entrée dans les coulisses de l'édition durant laquelle les auditeurs suivent la vie des livres de trois primo romanciers, de l'appel à manuscrits à la publication de ces derniers.

- Des livres et moi : le podcast du groupe Editis créé en 2019 dans le but de donner la parole, deux fois par mois, à un auteur d'une des cinquante maisons d'édition du groupe tels que Françoise Bourdin, Franck Thilliez, Raphaëlle Giordano...

- Podcasts de Flammarion : un ensemble de podcasts créés spécialement pour la rentrée littéraire de septembre 2019. L'éditeur a choisi de donner accès à des contenus thématiques au cours desquels les neuf auteurs interviennent.

Concernant ma méthodologie, mon travail est principalement basé sur des articles de presse spécialisée, tel que Livre Hebdo, et de presse générale. Mes propos sont également inspirés par des ouvrages universitaires en communication et marketing, ainsi que des études sur les pratiques de l'écoute menées par des organismes tels que Médiamétrie ou encore le SNE. Je me base également sur des études qualitatives issues des entretiens. En effet, j'ai effectué plusieurs entretiens6 avec les créateurs ou les personnes en charge de ces podcasts sélectionnés, qu'il s'agisse de personnes travaillant en maison d'édition ou de lectrices. Mais j'ai également interviewé des autrices ayant participé à des podcasts littéraires. Ainsi, une lecture croisée des études et articles récents avec ces entretiens m'a permis d'effectuer un rapport entre la demande (des lecteurs et du marché du livre) et l'offre (proposée par les lecteurs et professionnels). Concernant les attentes et retours des auditeurs et auditrices, leurs ressentis me sont parvenus par le biais d'une étude quantitative. Celle-ci a été effectuée via des réseaux de podcasts (notamment le groupe Facebook

6 Voir grilles d'entretiens en Annexes.

8

« Podcast & Littérature ») sur un échantillon de dix-sept personnes. Ces résultats peuvent être pris en compte, compte tenu du marché de niche dont fait encore partie le podcast littéraire, mais ne peuvent en aucun cas faire figure de résultat général, compte tenu de ce faible échantillon.

9

II) Point théorique autour du podcast

Pour parvenir à notre sujet principal d'analyse qu'est le podcast littéraire, il est important d'en connaître l'origine. Ainsi, il est nécessaire de s'intéresser au format podcast, à sa découverte ainsi qu'à ses caractéristiques, pour pouvoir aborder d'une manière concrète le podcast littéraire.

a) Définition

Le mot podcast7 a été créé et mentionné pour la première fois en 2004 par le journaliste britannique Ben Hammersley, dans un article du Guardian « Why online radio is booming »8. Avant que la terminologie « podcast » ne soit utilisée par le grand public, Ben Hammersley s'est interrogé sur ce nouveau contenu d'expression qui n'avait alors aucun nom. Dans son article, il propose trois terminologies différentes : « audioblogging » soit le blog audio, « GuerillaMedia » une guerre des médias due à cette profusion de différents formats, puis « podcasting » qui est le fait de créer des podcasts et qui a donné lieu à la terminologie choisie : podcast. Dans cet article, il mettait déjà en avant la qualité ainsi que la facilité de production du podcast accessible à toutes et à tous.

The quality, he said, blew him away, until he did it himself: a cheap
microphone, free recording software, a little practice [...] sounds just as good.
It was, he says, easy.

La qualité, a-t-il dit, l'a impressionné, jusqu'à ce qu'il le fasse lui-même : un
microphone bon marché, un logiciel d'enregistrement gratuit, un peu de
pratique [...] semble tout aussi bien. C'était, dit-il, facile.

7 Dû à son usage ainsi qu'à sa fréquence d'utilisation, le mot podcast est entré dans les dictionnaires français dès 2008, ainsi que son verbe podcaster.

8 HAMMERSLEY Ben, « Why online radio is booming » , The Guardian, 12/02/2004, https://www.theguardian.com/media/2004/feb/12/broadcasting.digitalmedia.

10

Le mot podcast est en réalité un mot-valise regroupant le « pod » de l'IPod et le « cast » de broadcast (« diffusion » en français). Ce point a toute son importance puisqu'il tient en lui le fait de l'implication d'Apple dans l'histoire du podcast et l'utilisation de cette terminologie. En effet, à l'époque de la publication de l'article de Ben Hammersley, des podcasts existaient déjà mais leurs contenus n'étaient pas accessibles à tous et à toutes. C'est à la mi-mai 2005 qu'Apple, impliqué dès 2004 via son IPod, s'empare du terme en proposant un accès simple à différents podcasts via ITunes. Le public découvre alors le concept du podcast. Certains ne font que l'écouter alors que d'autres se l'approprient et deviennent ce que l'on appelle aujourd'hui des « podcasteurs » ou encore créateurs de podcasts. Les premiers podcasts natifs9 font, à cette période, leur apparition en France, due à une diffusion mondiale sur ITunes. Cependant, cela était différent de ce que l'on considère aujourd'hui comme « podcast natif » puisque, au début des années 2000, le podcast était en réalité le pendant du blog. Le contenu proposé existait donc sur deux médias, en deux formats : écrit et oral. Cela peut expliquer le fait que, selon le site PodMust, il y avait, en 2005, 3000 podcasts disponibles à l'écoute. Un nombre important pour l'époque, et qui prouve également la montée du podcast. À savoir, qu'aujourd'hui10, 900 000 podcasts le sont, soit 300 fois plus qu'il y a quinze ans.

Mais, comment pouvons-nous définir un contenu audio ? En recherchant une définition du podcast sur des sites spécialisés mais également en interrogeant des experts du genre, on se rend compte que le podcast n'a pas une seule définition sur laquelle il serait facile de s'accorder. Comme l'indique Justine Souque, consultante en édition et en audiovisuel, le podcast peut être compris, au sens large, « comme un rituel d'écoute » mais également comme une « création sonore nouvelle, avec un format relativement court et un rythme de production régulier »11. Suivant cette dernière idée, le media PodMust le définit comme « un contenu audio numérique que l'on peut écouter n'importe où, n'importe quand, grâce à la technologie du flux RSS ». En effet, le podcast accompagne notre nouvelle société mobile en étant téléchargeable et pouvant s'écouter à n'importe quel moment et à n'importe quel endroit.

9 « contenus audios produits en vue d'une diffusion directe [...] sans passage à la radio » (PodMust).

10 En mars 2020.

11 Entretien effectué par mail avec Justine Souque le 28 mars 2020.

11

Pour poser une définition du mot podcast que l'on gardera en mémoire tout le long de ce travail de recherche, on peut choisir celle de François Quairel, responsable du magazine Le Pod. Celle-ci est la suivante :

Un podcast est un contenu audio diffusé sur internet et disponible en
téléchargement pour une écoute à un moment choisi par l'auditeur. Ça peut
être une émission de radio en réécoute (podcast de replay et de rattrapage) ou
un podcast natif, c'est-à-dire créé spécialement.

Ce qu'il est important de garder en mémoire est qu'il y a deux types de podcasts. Il faut distinguer le podcast de rattrapage du podcast natif. Le podcast natif, est comme nous venons de le voir, un contenu audio original, produit en vue d'une diffusion directe, et qui n'est pas destiné à un passage en radio. Parallèlement au podcast natif, toutes les radios font du podcast depuis l'arrivée de cette pratique en France en proposant leurs émissions, préalablement diffusées en direct, en rediffusion ou réécoute. C'est ce que l'on appelle le podcast de rattrapage. Soit, comme l'indique le nom, le fait de rattraper quelque chose, dans ce cas un contenu, que l'on aurait manqué du fait de son horaire, par exemple. Comme le précise Frédéric Antelme, vice-président des contenus et productions de Deezer, il y a trois ans, l'offre en podcasts était majoritairement une offre de replays d'émissions dominée par les acteurs traditionnels. Ce genre de podcast est toujours d'actualité et a son importance. Selon lui, « la nouvelle scène du contenu audio est très dynamique grâce à une vraie expérimentation autour de la narration et des formats nouveaux. Ce qui a dynamisé la suprématie des radios. »12

La relation podcast/radio est un fait intéressant à analyser dans ce contexte. On pourrait se demander si l'arrivée du podcast et son développement auraient pu et pourraient encore porter préjudice à la radio. C'est un sujet auquel plusieurs médias se sont intéressés au cours de ces dernières années. En 2014, dans un article publié dans le media Slate, « La radio doit-elle s'inquiéter du podcast? »13, le journaliste Vincent Manilève évoquait l'avenir de la radio au vu d'une hausse d'écoute du podcast en affirmant que « le podcast pren[ait] de plus en plus de place dans notre vie, et risqu[ait] de grignoter peu à peu le terrain de la radio. ». Il rassurait en ce point en précisant que, dès l'arrivée du podcast en France, les radios se sont emparées de ce contenu en

12 Entretien présent dans le premier numéro du magazine Le Pod.

13 MANILEVE Vincent, « La radio doit-elle s'inquiéter du podcast ? », Slate, 25/11/2014, http://www.slate.fr/story/95057/radio-podcast.

12

proposant des podcasts de rattrapage. Cependant, avec le développement de la 4G, certaines d'entre elles misaient davantage sur le streaming que sur le podcast. La différence entre ces deux modes de diffusion étant la présence de publicité dans le contenu en streaming, permettant ainsi le maintien d'une rémunération pour les radios14. Aujourd'hui, on remarque tout de même que toutes les radios (ou presque) proposent leurs émissions en replay sous forme de podcast de rattrapage. Bien loin de « tuer » la radio, le podcast s'est greffé à la radio par le biais du podcast de rattrapage qui séduit les auditeurs malgré la forte proposition en podcasts natifs. Une étude réalisée par Médiamétrie15 en 2019 annonce que 6,6 % des internautes écoutent des podcasts natifs contre 19,5 % qui écoutent des radio en replay16. En somme, a contrario de ce qu'aurait pu prédire l'arrivée du podcast, celle-ci permet aux auditeurs et auditrices d'avoir accès à l'ensemble des émissions en dehors de leur période de diffusion. Cela inclut logiquement une hausse d'écoute puisque la radio aurait affaire à deux types de publics et non plus un seul : l'auditoire à l'instant T et l'auditoire de rattrapage. La dernière étude de Médiamétrie17, englobant des chiffres de 2020, annonce une augmentation de 48 % d'écoutes de podcasts natifs, comparé à l'année 2019. En effet, en 2020, 21,2% des internautes écoutent des podcasts en replay contre 9,8 % qui en écoutent des natifs. Soit, une très nette augmentation du pourcentage d'écoute du podcast natif18. Bien que l'écoute de podcast en radio différée reste en première place, avec deux fois plus d'écoutes, on remarque une montée du podcast natif qui séduit autant les auditeurs et auditrices que les créateurs et créatrices de podcasts et les boîtes de production.

Avec le podcast natif, outre la production et la diffusion par radio, de nouveaux acteurs indépendants sont arrivés et avec eux de nouveaux usages et formats. On peut, par exemple, nommer Nouvelles Ecoutes ou encore Louie Media. Désormais, l'offre du podcast s'enrichit de jour en jour. Des particuliers créent leurs propres podcasts natifs. Le podcast est une nouvelle forme de parole, proche des auditeurs et auditrices, et propose un choix multiple de sujets. De nombreuses thématiques, telles que l'Histoire, la gastronomie, la société, la culture ou encore la santé y sont évoquées et deviennent sources de partages. En ce sens, la littérature n'est pas une exception.

14 Affirmation que l'on peut maintenant contester au vue de la professionnalisation du métier de podcasteur via des publicités - généralement sous forme de sponsors - au sein même de certains épisodes.

15 Médiamétrie, communiqué de presse du 26 mars 2019, https://www.mediametrie.fr/sites/default/files/2019-03/2019%2003%2026%20CP%20Global%20Audio 1.pdf.

17 Société spécialisée dans la mesure d'audience et l'étude des usages des médias audiovisuels et numériques en France

18 Médiamétrie, communiqué de presse du 22/04/2020, https://www.mediametrie.fr/fr/global-audio-1.

13

Justine Souque définit le podcast littéraire comme « un podcast [dont] le point de départ [est] la vaste thématique du monde des livres ». Tout podcast qui mettrait en avant les livres, et plus généralement la littérature, pourrait donc être qualifié de podcast littéraire. Et plus précisément, tout podcast dont la ligne éditoriale (soit tous les épisodes) se veut être en accord avec cette thématique, serait littéraire. Elle fait également une distinction au sein même du genre du podcast littéraire en différenciant podcast de fiction et podcast de non fiction. Elle distingue également dans les podcasts de fiction « l'adaptation sonore d'un texte préalablement publié d'un texte écrit spécialement pour une diffusion sonore » mais ajoute que « dans ces deux cas, le rendu doit répondre aux exigences du format podcast : être pensé pour l'audio, et sous forme d'épisodes ». En somme, un podcast littéraire peut aborder l'écriture d'un livre, les coulisses du monde de l'édition ou encore le processus d'écriture d'une autrice/ d'un auteur (dans ces cas, il s'agit de podcasts de non fiction) mais également être la forme audio d'un livre papier ou encore une création de contenu de fiction en audio sans publication au format papier préalable (c'est dans ces cas que l'on parle de podcasts de fiction). À noter qu'il existe également des podcasts littéraires de rattrapage, issus de médias tels que France Culture. On peut également noter le podcast de l'émission La Grande librairie. Cependant, ceux-ci ne nous intéressent pas dans le cadre de notre étude qui se focalise sur les podcasts littéraires natifs.

Ce qui est intéressant avec le podcast, c'est qu'il y a du contenu pour tout le
monde, même le plus petit sujet qui soit.
(Frédéric Antelme)

b) Chiffres, gratuité et usages

Après avoir défini le podcast et ses différentes formes, nous pouvons nous demander : pourquoi ce nouveau format attire-t-il ? En plus de son offre de contenus, le podcast séduit par trois points. Le premier est sa facilité d'accès (disponible sur plusieurs plateformes), le deuxième est son utilisation (compte tenu de notre société en constant déplacement) et le dernier concerne son prix (et notamment sa gratuité).

14

Sa facilité d'accès est en partie due au nombre d'acteurs présents sur le marché du podcast. On peut en distinguer six19 : le label (aussi appelé maison de production), le label de site de presse, l'indépendant, l'association, l'agrégateur, ou encore le « Netflix » du podcast. Mais que sont-ils ? Un label est une société qui a une grille de plusieurs podcasts. C'est le cas de Nouvelles Écoutes ou encore Louie Media que nous avons mentionné précédemment. C'est, en somme, des maisons de production de podcasts. Alors qu'un label de site de presse est rattaché à un titre de presse papier/web et produit du contenu en lien avec la rédaction. C'est le cas, par exemple, de Slate et Les Echos. Opposé à cela se trouve l'indépendant qui fait un podcast en solitaire, sans être aidé par un label, et qui a une offre limitée d'émissions (en général une ou deux). On peut nommer Podcastio et Podshows. Celui-ci peut se faire aider par financement participatif ou détient son propre budget loisir pour produire son contenu. La plupart des indépendants sont des associations dont le but est d'aider la création et la diffusion de podcasts. Parallèlement à cela se trouvent l'agrégateur et le « Netflix » du podcast. Un agrégateur est une application qui permet d'écouter des podcasts, il agrège des flux RSS de plusieurs podcasts et permet des fonctionnalités diverses : constitution de playlists, partage sur les réseaux sociaux... Tandis qu'un « Netflix » du podcast a un studio de production pour proposer du contenu exclusif sur sa propre plateforme. Il propose donc à la fois du contenu gratuit (avec des podcasts que l'on retrouve sur d'autres plateformes) et du contenu payant (avec leur propre production, soit leurs podcasts originaux). Le « Netflix » du podcast est le plus proactif en ce moment. On peut par exemple, nommer Sybel ou encore Spotify. Ce dernier ayant la place numéro une de plateforme d'écoute du podcast.

Ces acteurs proposent leurs podcasts à l'écoute sur les plateformes qui acceptent et diffusent ce format. À noter que certains acteurs disposent de leur propre plateforme. Ainsi, on trouve sur Apple Podcast, Deezer, Google Podcast, Spotify, Acast, ou encore sur Audible des podcasts à l'écoute. Dans un article « Comment Spotify est devenu un géant incontournable du podcast », Thomas Urbain, journaliste pour La Tribune, parle d' « écosystème ouvert » pour parler de l'offre du podcast. C'est-à-dire qu'il s'agit d'un système basé sur l'accessibilité et la facilité d'écoute. En somme, un podcast peut se trouver sur plusieurs plateformes d'écoute. Cependant, Spotify, premier acteur mondial dans ce domaine, tend selon le journaliste, à « verrouiller cet univers » en acquérant divers podcast et en proposant des formules d'abonnements payantes pour leur exclusivité.

Avec l'émergence du podcast, certaines plateformes sont elles-mêmes devenues productrices de podcasts. Et, à la suite de cela, de nouvelles applications exclusivement dédiées à l'écoute de

19 Voir Annexe.

15

podcasts ont vu le jour. On peut nommer Pocket Casts, Podcast & Radio Addict, Podcast Republic, Overcast. Cependant, celles-ci ne représentent qu'une minorité de plateformes utilisées pour l'écoute des podcasts, les auditeurs.rices gardant celles qu'ils ont l'habitude d'utiliser pour écouter leurs musiques, soit Spotify, Deezer et Apple Podcast.

En plus de sa facilité d'accès, le podcast est facile à consommer. Cette facilité d'usage est propre à toute activité qui inclut de l'audio. Tout comme une musique, le podcast peut s'écouter chez soi, dans les transports et dans le même temps qu'une autre activité (sport, cuisine...). C'est notamment le développement d'une société mobile, ajouté à l'implantation de la 4G, qui a permis au podcast de se développer.

Selon une étude de Médiamétrie, 96 % des internautes écoutent du contenu audio chaque mois, 19,5 % écoutent des replays de radio et 6,6 % écoutent des podcasts natifs. En moyenne, chaque mois, 8,5 % des internautes écoutent des podcasts radios (podcasts de rattrapage), soit 4 millions d'individus. Ces résultats vont plus loin dans l'analyse de l'audio en s'intéressant aux podcasts et plus précisément à ce qu'on appelle leur « découvrabilité » soit le fait de savoir par quel(s) canal/canaux les auditeurs sont passés. Selon eux, plus de la moitié (59 %) des auditeurs de podcasts natifs interrogés pour l'étude de Médiamétrie considèrent les réseaux sociaux comme étant le premier vecteur de notoriété des podcasts20.

Pour finir, la gratuité est une des raisons de la gloire du podcast puisque 99,9 % des podcasts sont gratuits. Autant de contenus sont donc gratuits, accessibles à toutes et à tous. Parallèlement à cela, seulement quelques podcasts originaux et exclusifs sont payants (les 0,1% restants), par abonnements ou par achat à l'acte sur les différentes plateformes. Ce qui est le cas pour certains podcasts originaux de Spotify, par exemple. Mais cela reste tout de même rare, compte tenu de l'offre proposée en podcasts et des habitudes d'avoir un contenu gratuit à l'écoute.

La croissance du podcast est intéressante dans notre société mobile où tout doit se faire rapidement, dans des temps simultanés. Une étude d'Opinéa menée pour Audible en janvier 2019 évoque le taux d'adoption du podcast en déclarant que 37 % des français ont écouté un podcast en 2018. Un pourcentage qui augmente d'année en année, compte tenu des chiffres concernant les

20 Voir Annexe.

usages du podcast. Selon Acast21, l'écoute du podcast aurait augmenté de 26 % entre le 12 mars et le 16 mai 2020, soit pendant la période de confinement. Mais qu'est-ce qui déclenche une attirance vers un podcast plutôt qu'un autre ? Pourquoi l'auditeur continue-t-il à l'écouter ? Selon Philippe Chapot, fondateur du média Le Pod, ce qui attire dans le podcast peut être : la voix, le ton, la durée, l'habillage (soit le choix de la musique, d'un jungle, du rythme...), l'interactivité. Autant de caractéristiques que nous garderons en mémoire et qui nous intéresserons pour étudier notre corpus.

16

21 Entreprise qui « propulse les créateurs et créatrices de podcasts les plus influents».

17

III) Le contenu du podcast littéraire : présence de l'auteur et du livre, choix des thèmes et des habillages.

Après avoir étudié l'origine du podcast, ses caractéristiques et avoir observé une hausse d'écoute depuis son arrivée en France, nous pouvons désormais nous intéresser au podcast littéraire, à ses caractéristiques ainsi qu'à la place de l'auteur.rice dans ce contenu.

a) Podcasts littéraires et amateurs : quelles caractéristiques ?

Comme nous l'avons énoncé précédemment, le podcast littéraire serait « un podcast [dont] le point de départ [est] la vaste thématique du monde des livres ». C'est à partir de cette définition que nous allons analyser les caractéristiques du podcast littéraire, en prenant comme exemple notre corpus. Ainsi, nous pouvons nous questionner sur le terme de « thématique du monde des livres » et à ce qu'elle renvoie, mais également étudier la présence de cette thématique et sa mise en scène au sein des podcasts littéraires.

La « thématique du monde des livres » regroupe plusieurs sujets. Il peut s'agir de l'objet livre, de l'auteur, d'écriture ou encore d'édition. En somme, un podcast littéraire peut être un échange entre un podcasteur/ une podcastrice et un auteur / une autrice, ou encore l'avis du podcasteur/ de la podcastrice sur tel ou tel livre. Si l'on part de ce constat, on remarque qu'un podcast littéraire englobe de nombreuses thématiques et donne ainsi de nombreuses possibilités pour la création de contenu. Notre corpus est composé de plusieurs types de podcasts : des interviews (avec La Page Blanche), des conseils de lectures (avec Pile), des « reportages » (avec Primo), ou encore des présentations de livres (avec la rentrée littéraire de Flammarion).

Certains formats fonctionnent-ils mieux que d'autres aux yeux des auditeurs et auditrices ? Qu'en pensent-ils / elles et que recherchent-ils / elles ?

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En 2018, une étude menée par Offremedia mettait en avant un taux de conversion de 81 % pour le podcast22. Le taux de conversion, tenant en compte de l'efficacité du podcast, nous pouvons nous demander ce que peut prendre en compte l'auditoire comme critère décisif pour passer d'une simple curiosité à une écoute. Partant de ce constat et en le reliant aux comportements et commentaires des auditeurs et auditrices sur les réseaux sociaux et sites d'écoute, on remarque trois critères importants23 à leurs yeux. Le premier est le sujet du podcast littéraire. Il s'agit du premier critère de conversion, soit le fait de passer de l'intérêt à l'écoute du podcast. C'est alors généralement en voyant un titre significatif, une photo parlante ou encore une présentation de l'épisode qu'ils et elles vont être amenés.ées à écouter le podcast. Le deuxième critère de conversion est la personnalité du podcasteur ou de la podcastrice. Ce critère fait partie de la dynamique du podcast puisque si la voix, l'intonation ainsi que les partis pris plaisent, l'auditoire sera attiré et fidélisé. Le troisième critère concerne l'habillage global du podcast. On parle plus largement d'habillage pour mentionner le rythme, les choix musicaux ou encore la structure du podcast. Compte tenu de ces observations, ces trois choix sont donc importants et doivent être réfléchis et explicables.

Sur Apple Podcast, les auditeurs et auditrices de La Page Blanche évoquent ces trois caractéristiques par le biais de commentaires. Ils et elles trouvent le format de l'entretien « riche et authentique ». De plus, ils et elles soulignent « la forme originale et pertinente » du podcast ainsi que « la voix agréable » d'Emilie.

On remarque très vite que le caractère authentique du podcast est ce qui le rend original et attrayant. Dans un podcast, l'attention de l'auteur est autant portée sur le sujet (son côté informatif) que sur sa dynamique. Cette dernière peut passer par l'intonation des voix, le choix de narration, le rythme de l'échange ou encore le style de musique proposée. Ainsi, pour attirer en étant créatif et parvenir à cette forme d'authenticité, le podcast doit jouer avec ses codes : spontanéité, sincérité, créativité, honnêteté... et se transformer en une conversation amicale. Il doit inviter l'auditeur et l'auditrice, pour exclure l'idée d'une communication à but commercial ou promotionnel. Anne-Gaëlle Huon, autrice invitée dans Pile, aime la spontanéité du podcast qui permet d'avoir « un rapport plus honnête, plus direct avec l'auteur ». C'est en effet ce que recherche la plupart des podcasteurs et podcastrices, comme le mentionne Emilie Deseliène, podcastrice et créatrice de La Page Blanche, en essayant de « [donner à l'auteur] une place centrale » et que son « invité se sente le plus libre de s'exprimer, sans filtre et sans tabou. ». Ainsi, on remarque que le côté humain du

22 Voir Annexe.

23 Voir Annexe.

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podcast est ce qui lui confère son unanimité. La voix de la podcastrice ou encore sa façon de parler ont d'autant d'importance que le sujet du podcast ou les thèmes abordés. Et cela se remarque davantage lorsque le format proposé est celui de l'interview, comme le prouve le ressenti de l'autrice ci-dessus.

L'authenticité se transmet également dans le dépassement de la forme traditionnelle de l'interview radio. Le podcast s'affranchit d'une forme classique en utilisant les codes que tous deux ont en commun : la voix, le ton, la durée, l'habillage (soit le choix de la musique, d'un jungle, du rythme...) et l'interactivité. Une bonne utilisation de ceux-ci doit permettre au podcast d'attirer dès les premières secondes d'écoute. C'est pourquoi et comme nous l'avons énoncé précédemment, au même titre que le sujet choisi et le contenu, la voix, le choix de musique et le rythme sont importants. Ils doivent donc être réfléchis en amont par rapport au sujet du podcast, à l'image que l'on souhaite donner et au but de celui-ci. Ces choix différencient un podcast d'un autre en lui attribuant une image qui lui est propre. Certains podcasts vont alors être reconnaissables par leur « signature ». Pile le podcast est celui qui permet de « trouver le bon livre pour le bon moment » comme le dit la voix de Claire Jéhanno dans chaque introduction d'épisode. Alors que d'autres vont attirer par le rythme qu'ils laissent transparaître. On peut par exemple prendre le podcast Primo, rythmé par la bande son mais aussi par l'ensemble des voix qui en font partie à chaque échange. Un rythme qui accompagne son thème qu'est l'aventure éditoriale rythmée de trois primo romanciers.

Le choix de la syntaxe et de la présentation du corps du podcast est, elle aussi, importante pour en comprendre la visée. Cela est d'autant plus primordial lorsque les formats proposés sont multiples. Claire Jéhanno nomme chacun de ses épisodes en commençant leurs titres par « Un livre pour/avant/après... » pour les épisodes thématiques et « Un moment avec... » pour les hors-série. Cela lui permet, en tant que podcastrice, de pouvoir créer du contenu original et ordonné, et à ses auditeurs et auditrices de comprendre ce qu'ils et elles vont écouter.

Le podcast attire donc de par son aspect authentique, mais en quoi son contenu est-il original et en quoi se différencie-t-il de ce qui existe déjà ? Comment un choix d'utilisation de codes peut-il différencier le podcast de la radio et ainsi lui conférer une authenticité ?

De premier abord, radio et podcast se rejoignent sur plusieurs points. Il s'agit d'émissions, d'un contenu audio, d'un moment de partage et/ou d'information. Cependant, comme nous l'avons expliqué ci-dessus, l'utilisation des codes de la radio se fait d'une manière toute différente chez le

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podcast. Ainsi, le podcast explore ces sujets avec plus de liberté. Qu'il s'agisse du ton, de la durée, ou encore les musiques d'accompagnement, le podcast a l'atout d'être actuel et d'attirer. Il répond à plusieurs demandes tels que mettre à l'écoute un contenu court qui attire dès les premières secondes, ou encore proposer des voix plus passionnées que l'on ne relie pas à une voix de journaliste. En soit, le podcast n'a pas pour seule volonté d'informer, comme le fait la radio, mais va au-delà de cela, jusque dans le partage. En effet, la grande différence qu'il existe entre la radio et le podcast est la présence du storytelling. Cet ingrédient secret du podcast ne s'applique pas qu'aux oeuvres de fiction puisqu'il assure la bonne construction de la structure narrative de tout podcast. En effet, « une histoire permet de faire passer des messages tout en divertissant [le] public »24. Le podcast, en utilisant donc les mêmes codes que la création d'une histoire en devient d'autant plus captivant. Ainsi, on peut retrouver dans tout podcast la figure du héros (soit par exemple la podcastrice à laquelle on s'identifie ou s'intéresse) ou encore son objectif (soit le but de l'épisode dont il est question). L'augmentation de la création et d'écoute de podcasts en 2014 est liée à cette présence du storytelling et notamment à plusieurs facteurs : un premier technologique se caractérisant par le développement des smartphones et applications mobiles, et un second humain concernant les usages du storytelling dans le podcast. Le storytelling fait donc partie intégrante du podcast, englobant à la fois le podcast de fiction et le podcast de non fiction. Ainsi, tout podcast contient une part de storytelling dont il a besoin pour exister et perdurer. Concernant le podcast littéraire de non fiction, on pourrait se demander où se trouve l'aspect storytelling. Celui-ci est en fait présent dans l'échange que crée le podcast. Qu'il s'agisse d'une interview, d'une présentation ou encore d'un moment de vie, chaque échange est organisé, animé et surtout authentique. Cela crée une histoire. En interrogeant différentes autrices sur leur écriture, Emilie Deseliène livre aux auditeurs et auditrices des histoires, les leurs. Et, en présentant leurs romans et leurs univers, les auteurs du groupe Editis et de Flammarion donnent à écouter un avant-goût d'aventures littéraires. Mais pour parvenir à créer ce storytelling, il est important d'organiser le podcast. À l'image de la création d'un scénario, il faut donc assembler divers éléments pour donner vie au podcast. Mais existe-t-il une structure type pour la création d'un podcast ? Celle-ci est-elle universelle et identique pour tous les podcasts littéraires ?

La structure même du podcast organise le contenu et permet d'attirer l'auditoire. Celle-ci est décidée par le podcasteur/ la podcastrice et se retrouve ensuite à l'écoute. Elle crée un rythme,

24 Ausha, « Le storytelling dans le podcast : l'art de raconter des histoires en 3 questions ».

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un développement et une logique tout au long de l'épisode, mais également l'authenticité via les voix, la tonalité, ou encore la musique.

À défaut d'une structure universelle prédéfinie, on peut, après une écoute minutieuse du corpus choisi, remarquer la présence d'un schéma récurrent au sein des podcasts littéraires. Celui-ci est le suivant : 1) une musique d'introduction ; 2) une présentation générale du podcast et du sujet de l'épisode ; 3) l'épisode soit le développement du sujet ; 4) un bref résumé suivi d'une conclusion accompagnée d'un remerciement ; 5) une musique de conclusion. On retrouve également ce schéma au sein de podcasts non littéraires puisque cette organisation participe à l'authenticité même du format podcast.

Deux caractéristiques précises ressortent et participent aux fondements de ce schéma : les voix (du/de la podcasteur/rice mais également de l'invité.e), et le rythme (qui passe par la dynamique de l'échange et la musicalité choisie). Tous deux ont pour fonction d'attirer l'auditeur.rice, de l'entraîner et de l'accompagner dans son écoute. En effet, si la voix n'est pas audible, compréhensible et vivante, l'auditeur.rice ne s'attachera pas au contenu. Et si le rythme n'est pas présent, le podcast donnera une impression de longueur. Dans ces deux cas, l'auditeur.rice ne continuera certainement pas son écoute d'épisode, n'en écoutera pas d'autres et ne s'attachera pas au podcast même si le thème de celui-ci ou le sujet de l'épisode l'intéressent en amont. La structure a donc toute son importance. Mais, même si cette structure est identique à l'ensemble des podcasts étudiés pour ce travail, la fréquence, la durée et l'organisation de chaque étape diffèrent. Cela participe au processus de storytelling, unique pour chaque podcast et nécessaire à la création de leur propre identité.

La fréquence est un critère intéressant à prendre en compte puisqu'il peut répondre à une question : pourquoi avoir créé ce podcast ? En effet, nous avons d'un côté des podcasts à temporalité longue. C'est-à-dire des podcasts qui ne sont pas limités dans le temps, qui n'ont pas de date de fin prédéfinie. C'est le cas pour la majorité des podcasts. Et nous avons, d'un autre côté, des podcasts à temporalité courte qui ne durent que quelques mois, répondant à ou en suivant une actualité. Dans notre corpus, deux podcasts sont à temporalité courte : le podcast de Flammarion, créé spécifiquement pour la rentrée littéraire 2019 avec des épisodes mis en ligne durant la période de l'événement ; et le podcast Primo, créé et alimenté pendant la période qui accompagnait l'édition et la publication des trois romans dont il est question dans ce podcast. Lorsque l'on parle de temporalité, on entend bien évidemment dans ce contexte, le temps de publication soit de mise en ligne du podcast. Puisque ce format, une fois mis en ligne, est toujours accessible. Les podcasts à temporalité courte tel que celui de Flammarion pour sa rentrée littéraire 2019 sont donc encore

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dsponibles à l'écoute aujourd'hui, en 2020. Cependant, ceux-ci n'accueilleront pas de nouveaux épisodes et sont donc d'une certaine façon clos.

La durée globale d'un épisode de podcast littéraire diffère. Certains épisodes ont une durée inférieure à quinze minutes alors que d'autres offrent une écoute d'une trentaine de minutes voire plus. Généralement, les créateurs et créatrices de podcasts confèrent un temps approximativement identique à chacun de leur podcast. Cela leur permet de créer une continuité dans leur proposition de contenus. Chaque podcasteur.rice a son idée de la durée idéale d'un épisode et sait également combien de temps l'auditeur.rice arrive à rester attentif.ive à l'écoute. Selon l'outil de podcasting Ausha, trois critères permettent de choisir la durée d'un épisode de podcast : l'audience du podcast, le contenu proposé par l'épisode, et la fréquence du podcast. Avec un podcast à temporalité longue qui partage des échanges avec des autrices, Emilie Deseliène a choisi une durée moyenne de trente-cinq minutes pour l'ensemble des épisodes de La Page Blanche. Une durée qui lui permet d'exploiter les échanges avec les autrices et de ne pas noyer son auditoire dans un flux d'informations.

Je veille toujours à calibrer mes épisodes pour obtenir une durée de 30 à 40 minutes. Je ne suis
pas adepte des formats longs, et je crois qu'une moyenne de 30 minutes est idéale pour ne pas
perdre l'attention de l'auditeur, tout en ayant malgré tout assez de temps pour dire véritablement
quelque chose.
(Emilie Deseliène)

Mais il arrive également qu'il y ait des différences de durée au sein d'un même podcast. Dans Pile le podcast, on peut en effet être amené à écouter des podcasts d'environ cinq minutes (pour les épisodes réguliers) mais également des épisodes de plus longue durée, d'environ trente minutes, qui vont être plus ponctuels (c'est le cas des Hors-Série dans lesquels sont invités.ées des auteurs.rices). Cela permet à la podcastrice d'organiser son podcast et de facilité la reconnaissance des podcasts « réguliers » et des « hors-série ».

Les hors-séries me permettent de partager de formidables rencontres avec des auteurs, des
passionnés de livres... Ces moments sont tellement merveilleux que ce serait dommage de se
limiter à une durée de 5 minutes, qui est mon format original. Et puis, c'est une des grandes
forces du podcast : ne pas être formaté, ne pas être obligé de rentrer dans une case... donc j'en
profite à fond !
(Claire Jéhanno)

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En effet, la force du podcast, qui est de ne pas être formaté selon un seul et même modèle, donne une grande liberté aux podcasteurs et podcastrices. Ils et elles peuvent organiser leurs podcasts de la manière dont ils et elles le souhaitent. Ces parti pris débutent dès l'introduction d'un épisode et diffèrent d'un podcast à un autre. Dans Pile, Claire Jéhanno opte pour une introduction courte, de dix à quinze secondes selon les épisodes. Une introduction qui se veut être concise et qui ne rentre pas dans les détails de l'épisode, ceux-ci étant évoqués à la suite de l'introduction pour amener la discussion autour du livre.

Bonjour et bienvenue dans Pile, le podcast pour trouver le bon livre pour le bon moment.
Episode numéro X/ Hors-Série numéro X, [titre de l'épisode].

D'autres podcastrices vont, au contraire, choisir d'avoir une introduction davantage développée. Dans La Page Blanche, Emilie explique au début de chacun de ses épisodes le but de ceux-ci, pendant une quarantaine de secondes. Cela lui permet d'introduire avant de commencer l'échange avec l'autrice de l'épisode.

Bonjour à tous et bienvenue dans La Page Blanche. Je suis Emilie et dans ce podcast j'invite des
auteurs pour discuter de leur dernier roman, d'écriture et de processus créatif. Ensemble, on
parle de livres, d'édition, de la manière dont on construit une histoire, des doutes, des joies, des
galères qui jalonnent la vie pas toujours facile de l'écrivain. Avec ces discussions, j'espère
partager avec vous des idées de lectures mais aussi une bonne dose d'inspiration.

Parallèlement à cela, l'introduction des épisodes du podcast Primo ressemble davantage à un trailer, mêlant voix et musique. Cela leur permet d'introduire Primo mais également de donner un avant-goût aux auditeurs et auditrices quant au rythme proposé dans chacun des podcasts. Cette différence s'explique également par le fait que Primo est co-construit avec le studio de production Nouvelles Ecoutes, soit par des professionnels.elles du genre et de la technicité du podcast.

En somme, le début du podcast est une étape importante dans la création d'un podcast. Il en est de même pour les outils utilisés lors de chaque étape, tels que la voix ou encore l'accompagnement musical. Bien que tout le monde peut être podcasteur et podcastrice, il ne faut pas oublier que la voix entendue par les auditeurs et auditrices doit être posée et pouvoir entraîner. Certains podcasts littéraires, professionnels, vont donc parfois faire appel à des professionnels tels que des journalistes ou acteurs. Comme il est le cas pour Des livres et moi, podcast introduit et présenté

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par la voix rauque masculine de Vincent Malone, musicien et auteur-compositeur. Celui-ci introduit chaque épisode en énonçant simplement le nom de l'auteur ou de l'autrice dont il est question. Dans l'ensemble, les voix sont accompagnées par la musique. Par exemple, Primo nous donne à écouter une introduction rythmée mêlant conversations, musique, et échanges divers.

Ces différences sont en réalité les choix des créateurs et créatrices. Elles participent en l'originalité de leur podcast et en créent l'image. Ce qui leur vaudra, ou non, du succès et des retours positifs de la part de leur audience.

Qui sont les auditeurs et auditrices de podcasts littéraires ? Pourquoi en écoutent-ils/elles ? Quelles sont leurs attentes ? Qu'aiment-ils/ elles écouter ?25

Alors que le profil type du podcast général est un auditeur de 34 ans, celui du podcast littéraire est constitué à 90 % de femmes. Cela peut s'expliquer par le fait qu'en France 62 % des lecteurs sont en réalité des lectrices. 26 Le podcast littéraire ayant pour sujet principal la littérature, celui-ci attire donc davantage les lectrices. Mais, qui sont ces auditrices et auditeurs ? Qu'y recherchent-ils / elles ?

Pour répondre à ces interrogations, nous avons rassemblé l'avis de personnes membres du groupe « Podcasts et Littérature » mais également de personnes de la communauté Bookstagram27. Nous sommes donc parvenus à un constat qu'il est intéressant de mettre en lumière mais qui fait, cependant, office d'hypothèse compte tenu de la taille de notre échantillon. Les auditeurs et auditrices de podcasts littéraires ont entre 20 et 40 ans. Ils et elles reconnaissent la facilité d'accès du podcast littéraire. Ils et elles affirment être attirés.ées vers un podcast littéraire par le sujet, l'habillage et la personnalité du podcasteur/ de la podcastrice. Ceux-ci et celles-ci sont davantage tournés.ées vers les podcasts amateurs, « authentiques », que ceux « traditionnels » créés par des maison éditions et groupes. Certains.es parlent même d' « indépendance » en opposant la « publicité » (du podcast professionnel) au « partage » (du podcast amateur). Pour l'auditoire, le podcast professionnel n'est pas dépourvu d'enjeux commerciaux et marketing. Et cela s'explique par le fait que les auditeurs et autrices recherchent principalement à l'écoute des réflexions, des

25 Pour répondre à cette question, je me base sur une étude quantitative menée sur dix-sept personnes, issues de réseaux littéraires et de réseaux de podcasts (tel que le groupe Facebook Podcasts & Littérature), un échantillon qui bien que moindre reflète également le caractère de niche du podcast littéraire.

26 Etude « Les français et la lecture 2019 » effectuée par le CNL.

27 Bookstagram désigne une communauté de lecteurs et lectrices sur Instagram.

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émotions, des interviews, des idées de lectures hors best-sellers, de l'engagement et des informations sur l'auteur.rice et son écriture. De plus, pour plus de 80 % d'entre eux/elles, la présence de l'auteur.rice n'est pas indispensable, ce qui laisse encore une fois de côté le podcast professionnel au sein duquel l'auteur.rice est généralement présent.e. Concernant leurs pratiques, ils et elles écoutent également des podcasts non littéraires (+ 90 %) et sont intéressés.ées par les livres audios (environ 70 %).

Face à ces points, on remarque tout de même des ressemblances entre l'auditoire de podcasts et celui des podcasts littéraires. La première concerne l'âge du profil type, ce qui correspond à des étudiants et jeunes actifs. La seconde concerne leurs attentes. En effet, ils et elles souhaitent écouter un contenu doté d'informations, de réflexions et de sentiments. Concernant le podcast littéraire, on remarque bien, lié à ces attentes, le souhait du podcast professionnel à ne pas être purement commercial ou marketing n'est pas perçu comme tel de la part des auditeurs et auditrices. Ceci est un fait important puisque leurs voix comptent et que ces ressentis s'observent ensuite dans les statistiques d'écoutes des podcasts. Les auditeurs et auditrices sont donc davantage attirés.ées par les podcasts amateurs, et ce malgré les souhaits et innovations dont peuvent faire figure certains podcasts professionnels, tel que Robert Laffont avec Primo. Mais pourquoi ceux-ci attirent-ils plus ?

Pour y répondre, nous allons analyser la parole des auditeurs et auditrices. Lorsque le podcast est présent sur les plateformes d'écoute et/ou sur les réseaux sociaux, ceux-ci et celles-ci peuvent facilement transmettre leurs avis suite à ce qu'ils et elles ont écouté. C'est une autre des particularités du format du podcast, qui lui permet de se renouveler, suivant ou non les recommandations qui lui sont faites. Si l'on s'intéresse aux podcasts présents dans notre corpus, on remarque que les commentaires laissés sur les plateformes d'écoute, principalement sur Apple Podcast, confirment nos précédentes observations quant à l'attirance vers le podcast amateur, du fait de son authenticité. Certaines auditrices applaudissent, par exemple, la « voix très agréable » d'Emilie Deseliène ou encore le contenu et le format de ses épisodes « instructifs et agréables à écouter ».

Emilie propose un podcast original, bien mené (qualité pro !) et amène ses
invités à se dévoiler tout en proposant une discussion vraiment enrichissante
sur leur oeuvre.
(Commentaire laissé par une auditrice sur Apple podcast pour
La Page Blanche)

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Concernant le podcast Primo, sa présence sur Instagram lui a permis, en plus d'être visible, de nouer une relation avec leurs auditeurs et auditrices. Un fait intéressant puisqu'il n'existe pas pour l'ensemble des podcasts professionnels, contrairement aux podcasts amateurs. Ce qui pourrait expliquer le fait que Primo soit l'un des podcast littéraires professionnels les plus connus du public.

« Très intéressant, bravo pour cette initiative ! J'ai hâte d'écouter l'évolution de ce projet et de découvrir les deux suivants » (Commentaire laissé par une auditrice sous le post Instagram du premier épisode de Primo)

« On apprend plein de choses utiles et intéressantes. C'est top ! » (Commentaire laissé par une auditrice sous le post Instagram du deuxième épisode de Primo)

Cependant, cela ne l'empêche pas de rester lié à l'image de sa maison d'édition et donc d'être catégorisé comme un outil de promotion. En effet, pour certaines auditrices, le « plan de communication [de Primo était] déjà tout tracé » et que « la gagnante avait gagné avant le concours »28. En somme, malgré les efforts du podcast professionnel, celui-ci reste majoritairement, pour les auditeurs et auditrices, un outil de marketing calculé.

C'est pourquoi, après avoir étudié la « structure type » du podcast littéraire, analysé ce que les auditeurs et auditrices y recherchent, nous avons remarqué une « préférence » pour le podcast amateur. Ceci dû à deux faits que sont la spontanéité et la proximité ressentis par les auditeurs et auditrices. Deux besoins que les créateurs et créatrices de contenus ont bien observé et auxquels ils et elles tentent de répondre, dès le processus de création.

Comme nous l'avons vu précédemment, pour attirer une audience, des choix préalables concernant la structure et le contenu du podcast doivent être pris. Le podcasteur / la podcastrice fait ces choix de structure et du contenu en fonction de l'identité de son podcast et des sujets qu'il /elle aborde mais surtout de la cible qu'il/elle vise. Cependant, tous types de podcasts littéraires (amateurs et professionnels) ne sont pas égaux face à ces choix puisque les professionnels connaissent déjà un de leurs publics cibles, soit leurs lecteurs et lectrices, et ont donc une base à analyser avant la création de leur podcast. D'un côté se trouve donc les podcasts amateurs qui n'ont, lors de leur création, aucune audience préalable soit aucun public. Et d'un autre côté, les podcasts de maisons d'édition qui elles ont déjà une base de potentiels auditeurs. Ainsi, les amateurs et amatrices

28 Commentaires d'auditrices laisser sous des posts du compte Instagram de Primo.

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doivent réussir à faire connaître leurs podcasts pour se faire une place et se démarquer. Les professionnels.elles, quant à eux/elles, créent un nouveau contenu qui a préalablement été réfléchi par les équipes marketing et commerciales, à destination d'une base d'audience formée par les lecteurs et lectrices adeptes de la maison et/ou du groupe. C'est à ce niveau que la structure et les choix sont importants et que le podcast amateur gagne souvent en spontanéité, par sa forme, l'approche de l'échange et le choix des thématiques davantage privées. Le respect de l'identité de marques et des souhaits de leurs lecteurs et lectrices, confèrent moins de liberté aux professionnels.elles. Alors que les créateurs et créatrices de contenus n'ont aucune barrière, qu'il s'agisse d'une image de marque à respecter ou des fidèles lecteurs et lectrices pré-installés.ées.

Mais un autre facteur permet de gagner en spontanéité, en authenticité, et de créer l'intime : la présence sur les réseaux sociaux. Celle-ci aide les podcastrices et podcasteurs à faire connaître leurs podcasts. Cela leur permet de se rapprocher de leurs publics cibles, de les informer et d'échanger avec eux. En effet, les réseaux sociaux participent à la création de leur visibilité. Une visibilité sur laquelle ils et elles doivent travailler au même titre que les professionnels.elles. Les auditeurs et auditrices interrogés.ées ainsi que l'étude du Pod mettent en lumière le fait que les réseaux sociaux sont le premier facteur de découvrabilité du podcast littéraire, suivi des médias, puis du bouche à oreille. Mais, tous les podcasts littéraires sont-ils réellement présents sur les réseaux sociaux ? Sur lesquels ? Dans quel but ? Qu'y partagent-ils/elles ? Comment y communiquent-ils/elles ?

Pour répondre à ces questions, nous allons prendre comme référence un épisode Des coulisses du podcast. Ce podcast a été créé en 2019 dans le but d'aider les podcasteurs et podcastrices en leur donnant des conseils sur l'univers du podcast. Dans un épisode « Communiquer et promouvoir son podcast : réseaux sociaux et référencement », Anastasia et Mélanie expliquent que la stratégie de communication à appliquer sur les réseaux sociaux suit trois points : définir ses objectifs, définir ses cibles, et définir son contenu. Les objectifs peuvent avoir trois visées : faire connaître le podcast (soit, le rendre visible), le faire aimer (soit, amener à l'écoute) et faire agir l'auditoire (soit, créer du bouche à oreille pour augmenter la visibilité). Trois buts sur lesquels podcasteurs et podcastrices travaillent. Anastasia et Mélanie admettent que la plupart des podcasteurs et podcastrices privilégient Instagram qui est aujourd'hui le réseau social le plus utilisé et le plus impactant. Instagram compte aujourd'hui un milliard d'utilisateurs actifs par mois et plus de vingt-cinq millions de comptes professionnels. Et, selon une étude de Hubspot et Mention, une

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photographie publiée sur ce réseau social entraîne 23 % plus d'engagement que sur Facebook29. En plus de cela, Instagram implique davantage l'utilisation de hashtags, ce qui est un moyen supplémentaire d'acquérir de l'audience. Ce qu'elles expliquent en montrant que l'utilisation des stories et hashtags permettent une plus grande conversion et induit donc plus d'écoutes.

Dans l'épisode Des coulisses du podcast30, une des podcastrices énonce un fait important qui est le suivant : il est aussi préférable de créer deux comptes Instagram, un premier dédié au podcast et un second pour le podcasteur/ la podcastrice. En effet, outre le fait de donner une visibilité au podcast et permettre aux auditeurs et auditrices d'en suivre les actualités, un compte personnel leur permet d'avoir accès à ce qui constitue l'originalité du podcast : l'intime. Cependant, cela peut tout de même être considéré comme un parti pris. Comme l'admet la deuxième podcastrice, il est important de se tenir à la ligne éditoriale du podcast et de garder une seule et même logique. Si, par exemple, une podcastrice ne se met pas en avant dans son podcast et ne se base pas sur ses propres expériences, la présence de deux comptes Instagram (accessibles à son auditoire) n'a pas lieu d'être. Cependant, il est important de mentionner que le fait d'avoir un seul compte Instagram, sur lequel la podcastrice ou le podcasteur est visible ou non, n'empêche en aucun cas de créer l'intime. Cela peut avoir un avantage, celui d'être pratique en concentrant l'ensemble sur un seul compte et ne pas perdre l'auditoire avec plusieurs sources d'informations. En somme, il n'y a pas une seule règle, et notre corpus reflète cette idée.

C'est un sujet que nous avons évoqué avec deux podcastrices littéraires amateures, Emilie et Claire. Emilie Deseliène, podcastrice de La Page Blanche, admet échanger très régulièrement avec ses auditeurs et auditrices via ses deux comptes Instagram : un à son nom @emilie.Deseliène et un créé spécifiquement pour son podcast @lapageblanche_podcast. Bien que ces deux comptes soient séparés, ils sont tout de même accessibles à tous et à toutes, et ont comme point commun la littérature. Emilie considère les réseaux sociaux comme un moyen d'effectuer une « promotion constante et qualitative du podcast (compte dédié, publications régulières, stories, extraits audio...) » et y «sollicite beaucoup [ses] auditeurs pour qu'ils parlent du podcast autour d'eux (le bouche à oreille fonctionne très bien) ». De son côté, Claire Jéhanno de Pile, affirme échanger avec son auditoire, ce qui représente « un vrai bonheur » à ses yeux. Auparavant présente sur

29 PATARD Alexandra, « Instagram : étude sur les tendances de l'engagement », Blog du Modérateur, 27/02/2020, https://www.blogdumoderateur.com/instagram-tendances-engagement/.

30 Les Coulisses du podcast, épisode «Communiquer et promouvoir son podcast : réseaux sociaux et référencement» , https://podcast.ausha.co/coulissespodcast/communiquer-et-promouvoir-son-podcast-reseaux-sociaux-et-referencement.

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Instagram sous le nom « Pile le podcast », elle a pris la décision, en avril 2020, de changer le nom de son compte pour @claire.Jéhanno. Un changement qui lui a donner plus de « liberté » et à l'occasion duquel elle avait fait un post sur Instagram31. Suivant ce choix, elle raconte davantage ses découvertes littéraires personnelles et se met davantage en scène dans ses posts et stories. Malgré leurs deux présences distinctes, Claire et Emilie arrivent toutes les deux a créé du lien avec leurs auditoires et se sentir proches d'eux. Un sentiment qui se retrouve également dans le sens inverse, puisque auditeurs et auditrices n'hésitent pas à réagir à leurs posts et/ou à les mentionner sur leurs propres réseaux sociaux.

Mais, en plus de cette possibilité d'échanges avec les auditeurs et auditrices, les réseaux sociaux deviennent également un cercle de « professionnelles ». C'est ce que met en avant Claire Jéhanno. Elle explique qu'elle y crée du lien avec d'autres podcastrices littéraires : « C'est un milieu très bienveillant, avec beaucoup d'entraide. On s'envoie des encouragements sur les réseaux sociaux, on se refile des conseils, et surtout on fait des soirées ! ». Cependant, même si une présence digitale est désormais primordiale, il ne faut pas oublier les autres moyens de recommandations, plus classiques, qui ont encore aujourd'hui toute leur importance. Les médias et le bouche à oreille restent encore deux critères de découvrabilité du podcast. Claire salue, en effet, l'importance de ceux-ci: « Je compte beaucoup sur le bouche-à-oreille, je pense que c'est le plus efficace en termes de recommandation, mais sinon, les réseaux sociaux... J'ai aussi eu la chance d'avoir des articles dans de grands médias comme Lire, ELLE, lemonde.fr, Telerama... ».

Mais qu'en est-il des autres podcasts du corpus ? Sont-ils également présents sur ce réseau social et sous quelle forme ?

L'ensemble des podcasts amateurs de notre corpus sont présents sur Instagram, comme nous l'avons vu précédemment. Les trois restants, professionnels, y sont aussi mais de manières différentes. Le podcast Primo des éditions Robert Laffont a son compte dédié, public, sur Instagram, au même titre que les podcasts amateurs mentionnés ci-dessus. La différence réside en la non présence d'une podcastrice ou d'une personne physique représentant le podcast. En effet, derrière tout podcast littéraire se trouve non pas une personne mais une entité : une maison d'édition et son groupe éditorial. Les podcasts du groupe Editis et des éditions Flammarion sont différents en ce sens. En effet, ceux-ci ne sont, de premier abord, pas présents sur Instagram. On ne trouve pas de compte à leur nom et le compte des éditions dont ils sont reliés ne les mentionne pas dans leur biographie Instagram. Cependant, ils y sont tout de même présents. Des Livres et

31 Un de ses posts les plus aimés et commentés.

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Moi y est par le biais du compte Instagram de Le Poste Général qui participe à la création du podcast. On retrouve alors sur le compte @lepostegénéral tous les podcasts dont cet incubateur de podcasts natifs est acteur. De ce fait, Des Livres et Moi se retrouve au milieu d'autres podcasts, non littéraires. Les postes liés au podcast d'Editis se présentent sous la même forme que les autres postes de ce compte : un visuel (de l'auteur ou de l'autrice dont il est question dans l'épisode) accompagné d'une présentation dans l'épisode ainsi que du #Deslivresetmoi. Le Poste Général n'omet pas de mentionner sous chaque poste le compte @lisez_officiel et celui de la maison d'édition. Concernant le podcast de Flammarion, celui-ci est, en réalité présent sur le compte Instagram de la maison d'édition à deux niveaux. Ils existent neuf posts qui ont été publiés du 7 septembre 2019 au 15 septembre 2019. Il s'agit à la fois de photos et de vidéos (sous forme IGTV). Les épisodes sont également présents dans la story à la Une « RL 2019 », au milieu de photos de l'événement. Cependant, les liens ne fonctionnent plus aujourd'hui.

À l'instar des influenceurs et influenceuses littéraires, les podcasteurs et podcastrices se doivent donc d'être présents.es sur les réseaux sociaux. En effet, Instagram regroupe à la fois une communauté de lecteurs.rices et des non lecteurs.rices. Cela expliquerait le fait que les podcasts amateurs y soient présents, mais également certains professionnels. De plus, les réseaux sociaux participant au travail de prescription littéraire, les podcasts littéraires y ont également leur place. Cependant, être présent sur les réseaux sociaux via un compte dédié a davantage d'impact qu'une présence, sur un ou plusieurs posts, qui sera ensuite oubliée dans la masse. Cette forme de présence est plus authentique, mais correspond également à ce qui est recherché par l'auditoire. Cette présence peut-elle être analysée ? Fait-elle réellement agir l'auditoire ?

Pour y répondre, nous pouvons prendre trois podcasts du corpus présents sur les réseaux sociaux : ceux d'Emilie et Claire (La Page Blanche et Primo) mais également celui des éditions Robert Laffont (Primo). Ceci, en tenant compte du type de podcast (amateur ou professionnel, temporalité courte ou longue) mais également de leurs lignes éditoriales respectives (soit le but du podcast).

Une étude de la présence de ces trois podcastrices sur le réseau social Instagram32 montre qu'un nombre d'abonnements élevé n'a pas de conséquence sur la réaction de l'auditoire sur les réseaux sociaux. En effet, si l'on analyse le taux d'engagement33 de ces trois podcasts, on constate que

32 J'ai choisi de me focaliser sur ce réseau social puisque, comme nous l'avons précédemment vu, il s'agit du réseaux le plus apprécié et utilisé aujourd'hui. Voir Annexe.

33 En marketing, un taux d'engagement permet généralement de mesurer l'engagement des consommateurs ou abonnés à l'égard d'une publication ou publicité de marque. Dans ce cas présent, on s'intéresse à l'engagement des auditeurs.

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celui-ci varie d'un podcast à un autre, sans rapport direct avec le nombre d'abonnés. La Page Blanche, par exemple, a le taux d'engagement le plus élevé des trois podcasts, environ trois fois plus que celui de Primo et deux fois plus que celui de Pile, mais a le nombre d'abonnés le plus bas des trois. La prise de parole des auditeurs et auditrices via des commentaires, des mentions j'aime, des partages participe au taux d'engagement du compte. Ainsi, on pourrait avancer l'idée que la présence d'Emilie sur son compte Instagram, et donc ses choix en matière de contenu, a plus d'impact sur sa cible d'auditoire. Ses abonnés.ées réagissent davantage aux contenus qu'elle propose puisqu'ils correspondent à ce qu'ils et elles attendent. Parallèlement à cela, le compte Instagram de Pile dispose du plus grand nombre d'abonnés.ées. Cela pourrait s'expliquer par le fait que Pile soit devenu une référence dans l'univers du podcast littéraire, Claire Jéhanno étant en quelque sorte une précurseure dans ce domaine. La podcastrice l'anime de façon très vive. Elle poste trois contenus différents par semaine, cependant, la proportion de réactions compte tenu du nombre d'abonnés, ne lui confère qu'un faible taux d'engagement. Les auditeurs et auditrices sont présents.es et la suivent mais ne réagissent pas tous et toutes en retour. Ce qui est à l'opposé de ce que vit le compte Instagram de Primo, qui a deux fois moins d'abonnés.ées que Pile. Le podcast étant terminé dans son temps de création, le compte continue tout de même d'être animé, environ une fois par semaine. Cependant, la répétitivité du contenu proposé, désormais uniquement accès vers le partage de lectures et d'avis livresques, ne lui permet pas d'obtenir un taux d'engagement correct, compte tenu du faible nombre de réactions laissées. Les abonnés.ées sont également présents.es mais réagissent de moins en moins aux publications proposées. Ainsi, on remarque que, un nombre d'abonnés.ées élevé n'est pas forcément gage d'interactivité. Mais cela a-t-il un lien avec l'identité du compte et ce qui y est partagé ?

Ces trois comptes sont différents de par leurs identités et contenus. Le compte de Primo est désormais constitué de reposts, soit de contenus issus d'autres comptes Instagram. Il n'est donc plus très actif, ce qui explique son faible taux d'engagement. Celui de La Page Blanche regroupe, en réalité, trois podcasts créés et animés par Emilie, la podcastrice. Elle y est très active et partage l'ensemble des actualités de ses podcasts. Parallèlement à cela, celui de Pile se concentre sur un seul podcast, regroupe à la fois des posts liés aux épisodes, à des avis littéraires et à des moments de vies privées. Malgré cet apport du privé, La Page Blanche a davantage d'impacts, comment peut-on expliquer cela ?

et auditrices à l'égard du podcast, sur le réseau social Instagram, en analysant le nombre d'abonnés.ées mais également d'interactions (mentions j'aime, commentaires, partages).

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Avoir ce seul compte pour l'ensemble de ses podcasts lui permet d'être très active sur ce réseau social, et de publier très régulièrement tout en proposant du contenu hétérogène. Mais si l'on compare le rythme de publications global au rythme de publications consacré à La Page Blanche, celui-ci passe de trois posts par semaine à un post par mois. Cependant, ce regroupement de podcasts n'a pas d'incidence sur ce haut taux d'engagement. Lorsque l'on étudie son compte, on remarque que Emilie utilise chaque code de ce réseau : elle répond et aime chaque commentaire laissé, elle crée des stories ainsi que des sélections « à la Une », et s'abonne également en retour aux comptes professionnels et personnels. En dehors de son compte Instagram, celle-ci est aussi très présente sur les comptes littéraires et de podcasts, puisqu'elle y laisse des commentaires et n'hésite pas à y réagir. Sa présence générale sur la sphère « bookstagram » mais également l'activité « multi-podcast » d'Emilie, le tout lié à un plus petit nombre d'abonnés.ées, place son compte et sa présence sur ce réseau social comme un modèle à suivre. Elle arrive à conférer l'ensemble de ses abonnés.ées et d'en faire réagir la quasi-totalité, ce qui fonctionne parfaitement. Cependant, il est important de noter qu'un taux d'engagement moindre n'engendre pas un faible taux d'écoute. Comme précisé précédemment, Pile le podcast est un des podcasts littéraires les plus écoutés. En effet, si l'on compare individuellement les nombres d'abonnés, de commentaires et de mentions j'aime, sa présence est également un modèle à suivre puisqu'il rassemble deux fois plus de réactions (abonnés, commentaires et réactions) que celui d'Emilie, par exemple. Parallèlement à cela, la podcastrice utilise elle aussi tous les codes de ce réseau et n'hésite pas à partager des moments plus privés. Une raison pour laquelle elle a récemment décidé de changer le nom de son compte en le remplaçant par le sien.

Cependant cette analyse doit être relativisée puisque, une partie des personnes présentes sur les réseaux sociaux pourrait être qualifiée de « dormeurs » ou encore d' « observateurs ». C'est-à-dire qu'ils et elles y sont présents.es, et s'intéressent à ce qui y est partagé mais ne réagissent pas ou très rarement. Parallèlement à cela, un autre phénomène peut accentuer un faible taux d'engagement : le scrolling. Il correspond à l'action de faire défiler son fil d'actualité, soit les contenus publiés récemment, en ayant alors une vue d'ensemble. Ainsi, les personnes ne prennent plus forcément le temps de lire un post et de réagir face à celui-ci. En somme, malgré cette analyse et ces faits sociétaux, il est important de noter qu'une présence en ligne reste importante pour les podcasts littéraires puisqu'elle leur donne une visibilité.

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b) L'auteur.rice au coeur du podcast littéraire ?

Dans un podcast littéraire, l'auteur.rice peut généralement y être cité.e, être lu.e, lire un ou plusieurs extraits, participer à une conversation, ou encore être le sujet d'un épisode. Pour certains podcasts la présence physique a son importance. Certains sont construits autour de cela. C'est le cas du podcast littéraire Des livres et moi qui donne la parole, pour chaque épisode, à un des auteurs du groupe Editis, mais également pour La Page Blanche qui transmet des conversations entre la podcastrice et un.e auteur.rice lors de chacun des épisodes. D'autres n'accueillent cette figure physique que ponctuellement. C'est le cas de podcasts littéraires qui en donnent la parole aux auteurs et autrices qu'occasionnellement, comme le fait Claire Jéhanno dans son podcast Pile sous forme d'Hors-série. Pour d'autres, la présence va être autre que physique. L'auteur.rice a alors une place dans le podcast via l'évocation de son oeuvre ou de sa vie. On peut observer cela dans les podcasts de France Culture, par exemple.

Est-il alors si important de donner une place à l'auteur dans un podcast littéraire ? Si oui, sous quelle forme ? Quelle place l'auteur/l'autrice y a-t-il /t-elle réellement ? Et pourquoi sa présence y est-elle majoritairement récurrente ? Un podcast sans auteur.rice serait-il encore « littéraire » ?

Pour répondre à ces questions, on s'intéressera à la présence physique de l'auteur.rice, ayant alors participé à l'enregistrement du podcast. Nous laisserons donc de côté la présence de l'auteur via la mention de son nom, l'évocation de son livre, ou encore la lecture de celui-ci.

Si l'auteur.e est à l'aise dans l'exercice de lecture, il peut intervenir en lisant des
passages qu'il ou qu'elle juge emblématiques (les plus personnels, difficiles à
écrire...). Quand l'auteur.e parle, il est nécessaire qu'il ou elle donne encore
plus de chair, de vie, à son livre, en ponctuant les émissions d'anecdotes et de
ressenti. (Justine Souque, consultante en édition et en audiovisuel)

La présence de l'auteur.rice dans un podcast littéraire n'est pas veine. Elle sert et participe à la dynamique de l'échange. Comme Justine Souque le précise, « c'est avant tout la personnalité de l'auteur qui compte [...] et ce que sa voix, sa présence, apporte [au podcast] » mais également la « complicité » existante ou possible entre le podcasteur / la podcatrice et l'auteur/ autrice. C'est en ce sens que la définition du podcast, comme « un contenu vivant et attractif » prend forme. C'est pourquoi, il est parfois préférable pour un podcasteur/ une podcastrice de parler au nom de

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l'auteur.rice ou de n'aborder seulement que son oeuvre. En effet, si un.e auteur.rice n'est pas à l'aise avec le principe du podcast, l'échange n'aura pas l'effet voulu. Ce n'est donc pas parce qu'un podcast est littéraire que la présence de l'auteur.rice est indispensable.

En effet, comme nous l'avons vu précédemment, la définition du podcast littéraire n'inclut pas une présence obligée de l'auteur.rice dans ce processus. Justine Souque développe davantage cela en précisant que « les oeuvres doivent pouvoir vivre indépendamment de la présence de l'auteur » et que le fait de parler de tel ou tel livre dans un podcast n'inclue pas forcément d'y inviter l'auteur.rice en question. Chaque texte est libre à être interprété, commenté et analysé dans les podcasts. C'est ce que l'on voit dans la plupart des épisodes de Pile dans lesquels plusieurs livres sont abordés sous forme de conseil de lecture, ceci sans la participation ou l'intervention de l'auteur.rice pour appuyer ou développer les propos énoncés. On pourrait alors se dire que cette non présence permet une certaine impartialité. Etant donné que l'auteur.rice n'est pas là pour appuyer les propos ou défendre son point de vue, cette non présence permet plus de liberté. A contrario, on pourrait se demander si la présence d'un.e auteur.rice dans un épisode de podcast est promotionnelle et réfléchie en ce sens par les podcasteurs.rices, les auteurs.rices et les professionnels.elles. Cette question d'impartialité se pose davantage lorsque l'on s'intéresse aux podcasts professionnels, créés par des maisons d'édition. On peut se demander si le premier but de ceux-ci ou celles-ci n'est pas purement marketing. Il n'y a pas d'éclectisme dans le choix des auteurs.rices qui y interviennent puisqu'il sont tous et toutes publiés.ées chez le même éditeur ou du moins dans le même groupe éditorial. Et, en plus d'être, pour certains, présents sur les plateformes d'écoute, ils sont également disponibles sur les sites des maisons d'édition, poussés par l'image de celles-ci et plus largement du groupe éditorial. Derrière ces podcasts professionnels ne se cache pas un.e amateur.e de livre mais une image de marque et les enjeux économiques qui s'en suivent.

Pour la plupart des podcastrices34 interrogées, la promotion n'est pas le but du podcast puisqu' « il était important [...] de ne pas faire un podcast qui soit un pur produit marketing de promotion. »35. Pour Justine Souque, « si l'auteur.e vient dans un but uniquement promotionnel, c'est une publicité à peine subtile qui n'ajoutera pas de contenu qualitatif au podcast. [...] l'invitation d'un ou d'une auteur.e lors d'un podcast ne doit pas être un prétexte, mais bien l'occasion d'approfondir un sujet. ». C'est donc en cela que réside l'enjeu du podcast, celui « de transformer [le] moment en

34 Podcastrices amateures et professionnelles.

35 Entretien avec Margaux Rol.

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une rencontre authentique » pour ne pas tomber dans l'enjeu marketing qui détournerait les auditeurs et auditrices de l'écoute, comme l'exprime Justine Souque. Ainsi, il est important de faire la différence entre le contenu du podcast (ce qu'il nous raconte) et sa visée (marketing ou de partage).

La présence dans un podcast programmé par une maison d'édition perd en spontanéité. Les auditeurs se doutent qu'il s'agit d'une invitation promotionnelle, et tout l'enjeu sera de transformer ce moment en une rencontre authentique. L'avantage d'un podcast amateur est double, non seulement pour le ou la podcasteur.rice qui, selon la notoriété de l'auteur.rice, va voir les chiffres de son audience augmenter, et pour l'auteur.rice, qui se sentira davantage dans une conversation moins formelle, et donc plus intimiste.

Ainsi, on peut se demander de quelle manière les auteurs et autrices sont présents dans notre corpus ? De quels types d'auteurs et autrices s'agit-il ? Si ils et elles sont présents.es sur différents podcasts ? Si ils et elles demandent à y être présents.es ? Si leur présence a forcément un lien avec une sortie récente de livre ou de best-seller ?

La particularité des podcasts du corpus est qu'ils accueillent tous des auteurs et autrices. Ils et elles sont, pour la plupart sujet du podcast, celui-ci portant comme titre leurs noms ou sinon le titre de leur dernier livre. Ils et elles y sont invités.ées pour parler de leurs dernières parutions mais surtout évoquer leurs parcours, leurs vies, leurs écritures. La différence entre les podcasts professionnels et amateurs, à ce niveau, réside en la cause de cette présence. Une podcastrice amateure va choisir de parler de tel ou tel auteur, telle ou telle autrice, à la suite d'une lecture. Alors que le podcast professionnel accueille l'auteur ou l'autrice à la suite d'une publication récente d'un de ses livres. Dans Des Livres et Moi, l'échange porte principalement sur le dernier ouvrage de l'auteur.rice alors que dans La Page Blanche, il est centré sur son écriture. Ainsi, le podcast et la présence de l'auteur.rice en son sein fait partie du parcours du produit livre, de sa campagne promotionnelle. On remarque également que, dans les podcasts professionnels, l'échange va être plus formel. Ceci se voit via les questions posées mais également via le ton de l'échange. C'est ainsi que l'on peut entendre des rires, des références à la vie privée ou autres dans des podcasts tel que Pile.

On remarque que le format du podcast attire les auteurs et autrices. Même si ils et elles ne vont pas demander aux podcastrices et podcasteurs amateurs.es d'être présents.es dans un épisode, être contactés.ées dans ce but est une chose qui leur plait. C'est ce qu'a ressenti l'autrice Anne-Gaëlle Huon, à plusieurs reprises lorsqu'elle a été contactée pour participer à des podcasts tel que Pile.

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En effet, même si elle est plus attachée au format du livre audio qu'à celui du podcast, elle aime le côté ouvert et familier du podcast qui lui permet de s'exprimer plus librement que lors d'une simple interview. Et cette attirance pour le podcast n'a pas de barrière face au genre littéraire dont fait partie les auteurs et autrices ou encore face à leurs personnes. Les podcasts de notre corpus accueillent aussi bien des primo-romanciers.ères, que des auteurs.rices de best-sellers ou encore des écrivains.es internationaux. Cette richesse reflète celle du podcast mais également le fait qu'il n'y a pas un modèle d'auteur.rice invité.ée. En effet, tout auteur.rice, s'il/elle le souhaite, peut participer à un podcast.

Le podcast littéraire doit donc être authentique pour attirer et répondre aux demandes de son auditoire. Cela passe par des caractéristiques propres aux podcasts, qu'amateurs.rices et professionnels.elles choisissent en accord avec leur sujet et leur cible. Mais cela peut également passer par le choix de faire intervenir un auteur ou une autrice dans son contenu. Toutefois, il n'existe aucune recette miracle et aucun de ces parti-pris ne donne vie à un podcast littéraire idéal. Ainsi, un podcast peut très bien être littéraire sans accorder une place d'honneur à l'auteur.rice.

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IV) Les podcasts littéraires dans le monde du livre

Le domaine de l'édition ne cesse de se renouveler. Il y a plus de dix ans, l'édition numérique a fait son entrée accompagnée des ebooks et des liseuses. Désormais, l'audio est au coeur des conversations et séduit plus d'un éditeur. Depuis trois années environ, le livre audio a fait son apparition en France, amenant avec lui un engouement pour l'audio en général. Une arrivée tardive, comparée à d'autres pays, anglosaxons et nordiques, et poussée par l'usage des smartphones et l'arrivée de la 3G en France.

a) Groupes et maisons à la conquête du podcast et du podcasteur.rice ?

Dans mon article, écrit pour le média en ligne ActuaLitté, je m'intéressais déjà à l'audio dans le monde de l'édition et plus particulièrement au livre audio. J'y parlais d'un « boom » du livre audio en me référant à plusieurs études effectuées par le SNE. En effet, ce marché avait, en mars 2020, augmenté de 50 % en une année. Et on pouvait y comptabiliser 32 % de lecteurs cibles, en prenant en compte les lecteurs actuels de livres audios et ceux qui commençaient à s'y intéresser. Pour cause, de plus en plus de titres en papier étaient publiés sous format audio, et de nombreux acteurs s'emparaient de l'audio : les revendeurs/producteurs (comme Audible, Kobo, Audiolib), les éditeurs (tels que Gallimard, Actes Sud) ou encore les regroupements d'éditeurs (ce qu'est Lizzie du groupe Editis). Ainsi, les maisons d'édition étaient et sont toujours au coeur de l'innovation pour le marché du livre. Ce qui explique leur actuelle attirance pour le podcast. Celle-ci est liée, d'une part, à cet attrait à tout contenu audio, et d'une autre part, au souci d'innover pour rendre le marché attractif et attirer de nouveaux lecteurs et nouvelles lectrices.

La frontière entre le livre audio et le podcast peut être poreuse. C'est ce que démontre Antoni Fournier, dans sa thèse Le développement du livre audio, la révolution de l'édition?. Il « note une différence entre ce format original (qui se rapproche du podcast) et le format classique (un livre préalablement publié au format papier repris en audio). Une frontière poreuse qui est toutefois de plus en plus utilisée aujourd'hui pour rendre le livre audio attractif. »36

36 CAPRON Camille, « Catalogues, autopublication et objets connectés : quel avenir pour le livre audio en France ? », ActuaLitté, 24/03/2020.

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Ainsi, en s'intéressant au livre audio et en souhaitant innover avec ce nouveau format, certains acteurs du livres ou extérieurs créaient déjà des podcasts, avant même que ce format y soit recherché. On trouve alors des formats hybrides, à la frontière du livre audio, du podcast et de la série. Comme c'est le cas du podcast original (de fiction) L'Employé, créé par Spotify. De plus, on remarque que, pour attirer de nouveaux publics, les acteurs du livre audio (on peut nommer Lizzie de chez Editis ou encore Kobo) ont cherché au-delà des frontières du livre en s'associant avec d'autres acteurs : Canal+ pour Lizzie en tentant d'attirer les auditeurs TV vers le livre audio, Uber en donnant l'occasion aux livres audios d'être écoutés par des personnes différentes. Un principe que les maisons d'édition tentent de reproduire avec le podcast littéraire, en commençant par s'associer avec des acteurs liés au monde du podcast, tels que des studios de production. La création d'un podcast demande de la technique ainsi que du temps, ce qui nécessite de l'aide pour les maisons d'édition. C'est pourquoi, la plupart des maisons d'édition s'associent avec des professionnels. Les éditions Robert Laffont ont travaillé avec Nouvelles Ecoutes pour la création du podcast Primo. Les équipes de Nouvelles Ecoutes n'étaient pas sur place tous les jours mais se sont occupées du conseil, du matériel ainsi que du montage du podcast. De leur côté, le groupe Editis s'est associé avec Le Poste Général pour leur podcast Des Livres et Moi, Vincent Malone37 y prêtant même sa voix pour les interviews.

Compte tenu de ce panorama, il n'est donc pas étonnant que le podcast attire le monde du livre. Les maisons et groupes y voient à la fois une occasion de s'ancrer dans les usages mais également de trouver du contenu innovant et attractif à produire. Quelles maisons d'édition créent des podcasts ? Dans quel(s) but(s) ?

En janvier 2020, quinze podcasts littéraires avaient été créés par treize maisons d'édition38. Des nombres de podcasts et de maisons d'édition qui ont, depuis, augmenté comme le prouve la création du podcast des éditions du Masque en juin 2020, en plein confinement. Le profil des éditeurs qui se lancent dans le podcast est varié. Il peut s'agir de maisons d'édition spécialisées dans la littérature générale mais également dans la littérature jeunesse. Les éditions Nathan ont, par exemple, leur podcast littéraire Parlons livres avec Nathan qui donne à écouter chaque mercredi un ou une libraire autour du livre de leur choix. Un podcast qui s'apparente davantage à des épisodes conseils qu'à des chroniques littéraires ou interviews d'auteurs. Ce qui correspond à

37 Musicien, auteur-compositeur et interprète.

38 LACOUR Cécilia, « Les éditeurs à l'assaut du podcast ? », Livres Hebdo, 10/01/2020.

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leur cible : les parents et à leur besoin : des conseils. Ainsi, leurs cibles vont être différentes, la majorité du temps allant vers le public des livres qu'ils publient. Pour certaines maisons d'édition, la création d'un podcast leur permet de se développer davantage dans leur genre (policier, jeunesse, BD...). Et elles cherchent alors à se démarquer via la forme et/ou le contenu de leur podcast. Robert Laffont a créé un podcast qui s'apparente à une mini-série d'immersion dans le monde du livre, les éditions du Masque ont créé « Conversation dans le noir »39, un podcast hebdomadaire qui donne à écouter des conversations téléphoniques entre une éditrice et une autrice de la maison d'édition. Il s'agit d'un media en plus, qui leur confère une casquette de spécialiste. Pour d'autres, cela leur procure (ainsi qu'à leurs auteurs) davantage de visibilité.

Mais on peut se demander si créer un podcast n'est pas devenu une mode, tout comme avoir un compte Instagram. Et cette question peut autant se poser pour les podcasts professionnels qu'amateurs. Le podcast étant un nouveau genre de contenu attractif, on pourrait le comparer à Instagram et au succès que ce réseau social a depuis sa création. Il s'agirait donc de « modes » auxquelles il est important d'adhérer pour correspondre aux usages et à la nouveauté. Ainsi, tout comme avec Instagram, le podcast attire les amateurs.es et professionnel.elles du livre, devenant un nouveau moyen de partage (comme l'est Bookstagram) mais également d'information et de communication (rôle qu'ont les compte Instagram des maisons d'édition). Le podcast attirant de plus en plus, sur des sujets divers, l'industrie du livre profite de cet engouement et s'en empare également. Cependant, comme nous l'avons précisé précédemment, l'appétence de cette industrie pour l'audio existait bien avant que le podcast ne soit reconnu. Et, du point de vue des maisons d'édition, le podcast n'est pas un nouveau moyen de communication et ne remplace aucun support précédant, il permet de proposer, comme l'indique Aurélie Benoit-Gonin, directrice Connaissance client chez Editis, dans un article de Livres Hebdo40, des contenus supplémentaires.

Pour essayer de comprendre le souhait de ces professionnel.elles, à savoir si les podcasts sont créés dans un but commercial, comme le pensent la plupart des auditeurs et auditrices, ou comme un « contenu supplémentaire », il est nécessaire de comprendre l'usage du podcast littéraire dans le monde professionnel du livre.

39 VINCY Thomas, « Le Masque lance des »podcasts» noirs et féminins », Livres Hebdo, 16/04/2020.

40 LACOUR Cécile, « Les éditeurs à l'assaut du podcast », Livres Hebdo, 10/01/2020, https://m.livreshebdo.fr/article/les-editeurs-lassaut-du-podcast.

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Les podcasts professionnels peuvent se présenter sous deux formes distinctes. On a d'un côté des podcasts portés par des groupes éditoriaux, et de l'autre des podcasts créés par des maisons d'édition. Dans les deux cas, un rapport direct au groupe éditorial existe mais celui-ci est plus ou moins évident pour les auditeurs et auditrices, extérieurs.es à ce monde. En effet, la plupart des podcasts littéraires vont être accessibles uniquement via le site web du groupe ou de la maison d'édition. Certains groupes, tel que Editis, ont même une page de leur site consacrée uniquement à l'audio et un onglet pour les podcasts du groupe. On y retrouve ainsi Des Livres et moi, mais également Parlons livres avec Nathan. Cependant, certaines maisons d'édition ont tout de même choisi de rendre leurs podcasts accessibles sur les plateformes d'écoute. C'est le cas pour Robert Laffont, avec son podcast Primo.

Les podcasts portés par des groupes éditoriaux réfèrent au groupe, dans son ensemble. Ils ne vont pas se spécialiser en une thématique. Ils ne font aucune différence entre un livre ou un auteur/une autrice de telle ou telle maison d'édition. Ils parlent au nom du groupe et constitue une vitrine de celui-ci. C'est le cas pour le podcast Des livres et moi créé par le groupe Editis. Celui-ci donne à écouter des interviews d'auteurs de best-sellers présents dans le groupe. On peut alors écouter une interview de Michel Bussi publiée chez Les Presses de la Cité, à la suite d'une interview de Franck Thilliez publié chez 12 21, un autre éditeur du groupe. Le cas d'Editis est très intéressant puisque le groupe possède à son actif six podcasts littéraires différents de par leurs formes et contenus. Il s'agit de podcast tantôt à temporalité longue tantôt à temporalité courte, qui sont pensés pour être continuellement animés et écoutés, ou pour ne paraître que sur une période courte. Le podcast Primo des éditions Robert Laffont a été alimenté pendant quatre mois (à partir de mars 2019), lors de l'année 2019. Il comprend douze épisodes mis à disposition d'écoute plusieurs fois par semaine, donnant à suivre ces trois aventures éditoriales. Celui-ci a d'emblée été réfléchi pour ne durer que sur cette période donnée. Parallèlement à cela, Des livres et moi, autre podcast porté par le groupe, a été mis en ligne à période identique que Primo, alimenté de manière identique mais avec un rythme dépendant des sorties éditoriales. Ainsi, il compte à ce jour vingt-cinq épisodes et il est toujours animé, le dernier épisode datant de mars 2020. Editis a alors des podcasts en son nom de groupe mais également sous le nom d'une des maisons d'édition qui en font partie. Et chacun de ceux-ci sont consultables sur le site Lisez.com du groupe, sur une page dédiée à leurs contenus audios. En effet, depuis deux ans, le groupe fait son ascension dans le domaine de l'audio, de par la création de podcasts mais également par la production de livres audios. On remarque alors que le groupe considère ce format comme une branche de l'audio, à même échelle que le livre audio, dans lequel il s'investit de plus en plus.

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Parallèlement à cela, des maisons comme Flammarion n'utilisent le podcast littéraire qu'à événement exceptionnel pour les aider dans leur communication. En effet, avec le podcast sur la rentrée littéraire 2019, l'éditeur a ainsi pu proposer du contenu à tous professionnels.elles et passionnés.ées du livre sur une période donnée. Ce podcast a temporalité courte est encore consommable mais n'est plus actualisé.

Selon les auditeurs et auditrices de podcasts littéraires, un podcasts créé par un groupe ou une maison d'édition aurait davantage un but marketing et promotionnel. Une remarque que rejettent la plupart des professionnels.elles. Mais qu'en est-il réellement ? Y-a-t-il une réelle différence dans le contenu et/ou dans la communication d'un podcast professionnel ? Tous les podcasts littéraires professionnels sont-ils identiques ?

Comme nous l'avons vu précédemment, les podcasts professionnels tentent de se différencier entre eux mais également des podcasts amateurs. Pour ne peut être seulement reliés au service marketing de la maison d'édition, ils se doivent d'être innovants. Ainsi, temporalité, forme et contenu vont être réfléchis. Alors que certains podcasts ont une temporalité longue dans le temps, d'autres sont assignés à une période donnée plus ou moins longue41. Cette caractéristique se retrouve davantage chez les podcasts professionnels où les événements nécessitant une communication particulière sont présents. Le podcast Primo des éditions Robert Laffont a duré pendant plusieurs mois, le temps du travail et de la publication des trois romans. Et le podcast de la rentrée littéraire 2019 de Flammarion n'a duré qu'une journée, pour l'événement littéraire. Concernant la forme, les maisons d'édition adaptent celle-ci à leurs publications et spécialisations. Comme nous l'avons vu, les éditions du Masque ont choisi la forme de la conversation téléphonique alors que les éditions Robert Laffont se sont rapprochés du reportage. Deux formes différentes qui s'harmonisent avec le sujet choisi : converser avec des autrices ou suivre trois primo romancières.

Alors que l'on a précédemment vu la présence des podcasts amateurs sur les réseaux sociaux et notamment Instagram pour se faire connaître et fidéliser leur auditoire, il n'en est pas de même pour les podcasts professionnels. Dans un article pour Livres Hebdo, Quentin Gauthier de chez Nathan affirme que « la difficulté majeure est de les faire connaître ». Propos appuyé par Leslie

41 Cependant, lorsque l'on parle de durée, on évoque la mise à disposition de l'épisode ou des épisodes. Ceux-ci sont encore disponibles aujourd'hui, un an après, et pourront être écoutés à tous moments par la suite.

42

Meyzer de chez Bayard : « Nous n'avons pas encore trouvé le moyen idéal de communiquer sur Histoires de jeunesse en dehors des réseaux traditionnels ».42 En effet, les maisons d'édition ont déjà toutes leurs comptes sur les réseaux sociaux. Serait-il alors intéressant pour elles d'y inclure une communication ciblée sur leurs podcasts ? Ou ce nouveau format nécessite-t-il un nouveau moyen de communication ?

Certains podcasts professionnels ont leurs propres comptes sur les réseaux sociaux. On peut prendre l'exemple du podcast Primo qui est présent sur Instagram sous le nom de Primo Podcast. Un compte qui a permis durant la mise en ligne des épisodes une promotion de l'écoute, et en aval un suivi des avis des auditeurs et auditrices mais également des lecteurs et lectrices des trois livres dont il est question dans le podcast. Désormais, le compte partage les avis de lectures. Parallèlement à cela, certains podcasts professionnels sont présents dans les comptes réservés à la maison d'édition. On peut nommer le podcast récent des éditions JC Lattés. La community-manager de la maison n'hésite donc pas à créer des posts spécifiques aux podcasts, posts qui sont ensuite partager via les comptes personnels mais publics des employés.ées de la maison. Un dernier cas de figure est la non présence des podcasts sur les réseaux sociaux. Certaines maisons ou groupes ne font aucune promotion de leurs podcasts, ceux-ci ayant tout de même une place privilégiée sur le site web du groupe ou de la maison.

Cependant, et comme nous l'avons déjà mentionné, les podcasts professionnels sont liés à leurs maisons d'édition. Cela s'observe également sur les réseaux sociaux. Le compte Instagram de Primo renvoie, dans sa bio, au compte Instagram des éditions Robert Laffont, et inversement. Un lien que podcast et maison d'édition mettent en avant.

De nos jours, les maisons d'édition se doivent d'être présentes sur les réseaux sociaux pour communiquer, informer et créer des relations avec leurs lecteurs et lectrices. Depuis près de dix ans, leurs services de communication et marketing se renouvellent, s'ouvrant au digital et nouvelles pratiques. Plus que d'autres secteurs, celui du livre a dû s'approprier les nouveaux outils en s'y créant une présence et en utilisant cette dernière à bon escient. Après l'entrée dans YouTube face à la montée des Youtubeurs, et celle récente dans Instagram avec la création d'une communauté de lecteurs et lectrices connue sous le nom de Bookstagrameurs, l'édition fait face à un nouvel outil : le podcast. À la frontière du réseau social et de l'outil de communication, celui-

42 A noter qu'il s'agit là de deux podcasts ciblés jeunesse.

43

ci est désormais le centre des préoccupations. Les maisons d'édition et groupes lui cherchent une place, une utilisation et tentent parfois d'innover. Un processus que l'on a vu récemment, par exemple sur Instagram, avec le mise en place de rendez-vous littéraires sous forme de partages de photos ou encore de hashtags.

Lors d'un entretien avec le journal ActuaLitté, Stéphanie Vecchione, consultante en médias sociaux et promotion digitale, affirme que « les éditeurs ont [...] compris l'impact de la recommandation » qui s'exerce sur les réseaux sociaux. Pour elle, cette présence à trois objectifs. Le premier est d'être là où est présente et s'est construite une communauté de lecteurs et lectrices. Le deuxième est de se créer une visibilité et une e-réputation positive. Et, le troisième, concerne la possibilité d'entretenir un réseau professionnel puisqu'y sont présents également les libraires, les journalistes, les bloggeurs... Elle ajoute également que l'importance est de ne pas oublier de véhiculer l'identité et la valeur de la maison d'édition, sans se perdre sur les codes des réseaux sociaux.

Avec l'arrivée du podcast dans l'édition, de nouvelles compétences se développent et des associations se créent. La plupart des podcasts dits professionnels sont nés de partenariats avec des boîtes de production spécialisées dans le podcast. Dans ce cas, soit celles-ci se chargent entièrement de la conception du podcast professionnel, comme c'est le cas pour Des livres et moi du groupe Editis, produit par Le Poste Général. Soit, les boîtes de production aident à la mise en pratique de compétences telle que la prise de son pour l'enregistrement de Primo, laissant la boîte de production s'occuper du montage en accord avec la maison d'édition pour correspondre avec l'image de marque. Et, parfois, ces partenariats permettent de créer des podcasts où le livre n'est qu'une source d'inspiration, laissant place à une conversation non littéraire. C'est ce que fait Editis avec son podcast Keep It Simple, une série de podcasts produite par My Little Paris qui aborde les thèmes de la méditation, l'éducation ou encore le sommeil. Le livre devenant alors un accompagnateur dans la création des épisodes.

b) Une entrée dans l'édition : entre coulisses et publications

Plus qu'une simple interview entre deux individus sur un roman, son intrigue et ses personnages, le podcast est devenu un réel moment d'échange dans lequel l'auteur.rice peut être invité.e à s'ouvrir. En effet, l'aspect amical voire familier de l'échange créé lors de

44

l'enregistrement d'un podcast donne à écouter des échanges plus sincères mais également dans l'ordre privé. Y est donc souvent abordée la question du processus de l'écriture, des coulisses du monde de l'édition, des secrets de la vie d'écrivain.e... Et, à défaut d'un aspect purement promotionnel, c'est généralement cet aspect-là qui séduit les auteurs.rices et les font participer à ce nouveau format.

Moi j'aime bien quand les choses sont sincères et spontanées et c'est
exactement le ton du podcast. [...] J'aime bien, de façon générale, quand on
donne l'opportunité à l'auteur de parler des secrets d'écriture, des choses
qu'on ne peut pas lire dans le livre et qu'on a à coeur de savoir une fois qu'on
a lu le livre [...] Typiquement, pour Même les méchants rêvent d'amour qui est
le roman sur lequel elle m'avait interviewée, ce qui est intéressant est qu'il est
inspiré d'une histoire vraie, et donc : comment on passe de la réalité à la
fiction ? comment on gère aussi la pudeur ? comment on gère le secret de
famille ? C'est des sujets intéressants mais j'avoue je ne me souviens plus si
c'est ce dont on a parlé. ».43

Certaines maisons d'édition ayant compris l'importance de ce critère, en ont fait leur coeur de cible. C'est le cas de Primo qui, en collaboration avec la maison de production Nouvelles Ecoutes, a créé le podcast Pile. Celui-ci a retranscrit trois aventures littéraires de primo romanciers. Il a suivi leurs parcours, surtout celui de leurs oeuvres, en allant de l'idée au manuscrit, jusqu'à la parution finale, le tout en passant par les coulisses des éditeurs. Pour Margaux Rol, cheffe de produits des éditions Robert Laffont, « il était important [...] de ne pas faire un podcast qui soit un pur produit marketing de promotion. [...] Le marketing est là pour aider à raconter des histoires afin d'attirer vers le livre. De fait, il était important pour nous de raconter une histoire, et il est vite devenu évident que ce qui passionnait souvent les gens hors de la profession était ce qu'il se passait en coulisses et comment faisait-on pour publier un premier roman. ». Ainsi, en s'appropriant le format du podcast, les éditeurs peuvent créer du contenu original, à la frontière de la promotion marketing et d'échange de vie.

Et c'est ce que recherche la plupart des auditeurs et auditrices en écoutant un podcast littéraire. Que celui-ci ne soit pas qu'une simple interview, mais que l'échange aille plus loin. Ils et elles

43 Entretien avec Anne-Gaëlle Huon.

45

souhaitent avoir accès à des « informations plus techniques » et des « anecdotes » sur l'écriture et la vie de l'auteur.rice interrogé.ée. Et c'est en ce sens qu'une présence d'auteur.rice peut être privilégiée, pour « parler de la genèse » de leur livre et de leurs pratiques d'écriture.

Les maisons d'édition s'adaptent réellement à ce nouveau format. Comme nous l'avons vu, celles-ci n'hésitent plus à se mettre aux codes du podcast soit en créant leurs propres podcasts, soit en sollicitant les podcasteurs et leur proposer des partenariats. Certaines vont même plus loin, en utilisant ce format comme nouvelle source éditoriale. En effet, depuis le début de l'année 2020, certaines maisons d'édition annoncent dans leurs catalogues la publication des livres issus de podcasts existants. C'est le cas de Marabout et des Arènes. (Un article de Livres Hebdo du 21 juillet 2020 annonce l'adaptation en livres de plusieurs podcasts Louie Media. Ceci, quelques moins après la publication d'un premier article annonçant l'adaptation par Marabout en livre de podcasts Nouvelles Écoute)s. Deux maisons qui, à défaut d'avoir créé leurs propres podcasts, ont vu en ce marché de nouvelles sources de création. Marabout a signé avec Nouvelles Écoutes un contrat d'exclusivité pour l'adaptation en livres des podcasts phares du studio. Ainsi, trois podcasts reconnus seront prochainement disponibles sur papier : Émotions (par Les Arènes), La Poudre et Mortel (par Marabout). Ce phénomène est intéressant si on analyse le lien entre le podcast et le monde du livre puisqu'il s'agit là de deux podcasts non littéraires qui le deviennent en passant par le format papier. Deux livres qui seront classés dans la catégorie vie pratique/essais. Ainsi, alors que certaines maisons et certains groupes voient dans le podcast un simple outil de prescription, d'autres lui trouvent une nouvelle forme. Le podcasts ne cesse donc d'évoluer dans le monde du livre.

En s'associant avec des boîtes de production de podcasts récentes et modernes qui cherchent à dynamiser le marché du podcast, elles utilisent ce format d'une manière innovante. Un principe original puisque le lien entre l'audio et le papier se trouve souvent dans l'autre sens : du papier à l'audio, comme le prouve le format du livre audio. Ce qui est intéressant à observer dans ce cas est que le projet de livre est déjà créé et que la maison d'édition a comme objectif de transformer un format audio, parlé et authentique, en un format papier. Ainsi, travailler une forme orale et originale tel que le podcast mérite d'aboutir à une forme écrite originale.

C'est pourquoi, on peut se poser la question du choix des podcasts pour ce genre de projets. En adaptant les podcasts de Nouvelles Écoutes, Marabout aura dans son catalogue un best-seller du podcast : La Poudre, le podcast féministe de Lauren Bastide. De son côté, la maison Les Arènes

46

aura dans son catalogue le podcasts Emotions produit par Louie Media. Des best-sellers du podcasts, promis best-sellers en livres ?

Il s'agit là de deux projets similaires, cependant entrepris dans deux groupes éditoriaux différents : Hachette et Editis. De plus, il est intéressant de mettre en avant que les deux maisons choisies sont de l'ordre de l'édition pratique/ essais documentaire. Ce qui correspond davantage à la forme du podcast par rapport à une maison purement littéraire. Un critère de ligne éditoriale qu'il est important de prendre en compte et de ne pas négliger. En vient alors une question concernant la frontière du livre audio et du podcast. Le podcast de non fiction ne serait-il pas une forme de livre audio (forme spécifique compte tenu du format interview, de plusieurs voix etc.) spécialisé dans le life style ?

Le podcast a donc un rôle différent selon l'utilisation qu'en fait la maison d'édition ou le groupe. Comme nous l'avons vu, certaines maisons d'édition créent des podcasts littéraires. Elles s'organisent en interne en développant de nouvelles connaissances et/ou avec un partenariat extérieur, en faisant pour la plupart appel à des boîtes de production spécialisées dans le podcast. D'autres maisons d'édition ne deviennent pas créatrices de podcasts mais les relaient lorsque ceux-ci mentionnent leurs livres. Pour elles, les podcastrices littéraires sont bénéfiques puisqu'elles participent, de manière indirecte, à la promotion de leurs livres. Certaines relations se créent donc entre les podcastrices et les maisons d'édition, notamment pour la mise en place de partenariats, à l'image de celles existantes avec les journalistes et influenceurs/ influenceuses littéraires. Cela prouve alors bien le pouvoir de prescription qu'à le podcast littéraire. D'autres maisons d'édition trouvent dans le podcast une nouvelle forme de création éditoriale. Ces maisons, généralement tournées vers une ligne éditoriale sur l'actualité et la société, adaptent des podcasts non littéraires (c'est à dire dont le sujet n'est pas en lien avec le monde du livre et de la littérature) en livres. Les podcasts deviennent alors une source de littérature, ce qui amène une nouvelle façon de consommer le format podcast, via une transformation, qu'est l'écoute.

En somme, on pourrait avancer l'idée que toute maison d'édition peut être liée au podcast littéraire. Certaines créent des podcasts littéraires de manière professionnelle alors que d'autres, sans en avoir, ont la chance d'entendre leurs auteurs.rices dans les podcasts littéraires amateurs. Pour d'autres, cela va plus loin puisqu'elles voient à travers le podcast littéraire une nouvelle stratégie d'influence. Ainsi, les podcasteurs et podcatrices deviennent des influenceurs et

47

influenceuses, à l'image de ce que sont également les blogueurs et blogueuses. Ceux-ci et celles-ci sont donc approchés.ées par les maisons d'édition, en reçoivent les services de presse et sont invités.ées aux événements. En contrepartie, les maisons s'attendent à un retour via le podcast et ses réseaux sociaux. Mais, envoyer un service de presse, induit-il forcément un retour via la création de contenu ? En vient également la question que l'on se pose avec les blogueuses / les blogueurs et instagrameuses / instagrameurs, et que l'on pourrait analyser dans le futur pour les podcastrices / podcasteurs : y-a-t-il de l'impartialité dans leurs propos ?

48

V) Conclusion

Le podcast littéraire, qu'il soit amateur ou professionnel, participe à la prescription littéraire de par son écoute et sa présence sur les plateformes et réseaux. Cette prescription va au-delà du format podcast en entraînant avec elle les influenceurs et influenceuses littéraires dans son jeu. Pour cela, chaque podcast à sa « recette miracle » qui lui permet de toucher son public et de transmettre son message. Mais, le podcast littéraire est bien plus qu'un nouveau moyen de communication ou support de partage. C'est aussi un outil au service de l'auteur/ autrice, à son travail, et au monde du livre en général (tant en marketing qu'en reconnaissance humaine). Pour Margaux Rol44, il s'agit avant tout de « faire découvrir de nouvelles voix et montrer à nos auteurs que nous sommes capables de déplacer des montagnes pour eux ».

Alors que le podcast littéraire est pour certaines maisons utilisé comme un nouveau contenu, pour certains groupes (tel que Editis) l'univers du podcast fait désormais entièrement partie de leur stratégie de marque et donc de leur identité. En effet, le groupe a récemment , en septembre 2021, signé un accord avec Majelan, « plateforme de distribution et de production de contenus audios ». Ceci signifiant l'ancrage du groupe dans le podcast mais donnant surtout l'exclusivité à cet acteur sur leurs parutions futures. Ainsi, Majelan s'occupera de la mise en podcasts de plusieurs livres du groupe dans les années à venir. Cet accord est important puisqu'il part du postulat que 74 % des auditeurs de podcasts natifs lisent des livres45. Celui-ci est principalement entre Edi8 (ensemble de maisons d'édition du groupe Editis) et Majelan dans le but de proposer de « nouvelles expériences d'écoute ». Ainsi, selon le communiqué de presse, Majelan aura un accès prioritaire aux auteurs du groupe et Edi8 aura la priorité dans l'adaptation de leurs livres en podcasts. Cet accord de la part de deux entreprises révèle la complémentarité entre le livre et l'audio, et dynamise le devenir du podcast littéraire.

Je crois dans la complémentarité de l'expérience entre le livre et l'audio.
(Mathieu Gallet, Président de Majelan)

44 Cheffe de produit des édition Robert Laffont.

45 Enquête réalisée par Havas Paris et l'Institut CSA.

49

Je me félicité de ce partenariat qui témoigne de la complémentarité entre la
voix et l'écrit. C'est également un partenariat entre deux sociétés qui
partagent les mêmes valeurs et les mêmes ambitions : la quête de sens,
répondre aux besoins d'apprendre et de transmettre, contribuer à
l'épanouissement personnelle.
(Vincent Barbare, Président d'Edi8)

Cependant, malgré cela, on remarque que les podcasts littéraires ne sont pas assez visibles en France. Ils ne représentent en effet qu'une partie minime de l'écoute du podcast en général et restent restreints à des auditeurs et auditrices citadins.es et CSP+46. On remarque également, sur les différents réseaux de podcasts (réseaux sociaux et groupes qui s'y trouvent) qu'une majorité habitent Paris, centre du monde de l'édition française. Ce constat peut s'élargir au podcast en général. Etant donné que le profil type d'un auditeur de podcasts est un homme actif, urbain, âgé d'une trentaine d'années47. Que faire pour élargir la cible du podcast littéraire, réservé jusqu'ici majoritairement à un public féminin ?

Comme le montre le Pod, une opportunité pour le marché du podcast serait la création de podcasts régionaux, dans le but d'acquérir de nouveaux publics48. Concernant le podcast littéraire, la réponse est plus complexe dans le sens où les maisons d'édition se concentrent à Paris, ainsi que la plupart des événements littéraires. C'est en cela qu'une présence sur les réseaux sociaux ainsi que la publication de podcast en livres, rend le forme du podcast davantage visible et accessible à tous et à toutes. C'est pourquoi, le développement de ces deux principes pourrait contribuer à l'avenir du podcast littéraire et à le rendre plus visible en France.

De plus, même si nous avons pu remarquer que la plupart des auteurs et autrices de bestsellers peuvent être invités.ées à échanger lors d'épisodes de podcasts littéraires, nous n'avons pas pu analyser dans ce travail l'impact, ou non, des podcasts littéraires sur les ventes. N'ayant pas pu aborder ce sujet lors de mes entretiens avec des professionnelles du livre, j'ai tout de même eu l'occasion d'échanger de manière informelle avec X49, selon qui, on ne peut pas réellement voir l'impact de ce genre de contenus sur les ventes de livres puisqu'il n'y a pas de circuit direct écoute/

46 CSP+ désigne, en marketing, les catégories socio-professionnelles les plus favorisées en France.

47 Voir annexe.

48 Voir annexe.

49 S'agissant d'une conversation informelle, et n'ayant pas de contact avec la personne dont il est question, j'ai préféré anonymiser son nom pour ce travail.

50

achat. Cependant, on pourrait tout de même rapprocher cela de l'impact qu'à sur les ventes un post Instagram ou encore une vidéo sur YouTube, ce genre de contenus transmettant davantage de visibilité à l'objet livre.

En somme, le sujet du podcast littéraire, bien qu'ayant déjà vécu plusieurs années dans le monde du livre, n'en est qu'à ses débuts en France. Des innovations continuent d'être réfléchies et pratiquées, autant par les professionnels.elles que par les amateurs.es. Et cela aurait le mérite d'être approfondi, dans le futur, pour essayer d'en extraire l'impact sur les ventes, la création de nouvelles façons de lire, mais également de nouvelles manières d'appréhender la littérature.

Un autre sujet mériterait toute notre attention, celui du droit. En effet, suite à l'événement « Podcast Festival Paris » qui a eu lieu du 15 au 18 octobre pour sa troisième édition, un communiqué de presse de P/A (le Syndicat de producteurs audio indépendants) et Geste (Groupement des éditeurs de contenus et services en ligne) évoque le fait que le podcast pourrait un jour être considéré comme une oeuvre audiovisuelle, ce qui permettrait aux podcastrices et podcasteurs d'obtenir des aides à la création. Ainsi, une dernière question pourrait se poser dans le cas où ce sujet évoluerait : cela amènerait-il à une hausse de podcasts mais également à une hausse de création croisées entre le livre et le podcast ?

51

VI) Bibliographie et sitographie

- Ouvrage(s) :

JON Reed (2011), Le marketing en ligne : boostez votre activité avec le web 2.0 : sites web, moteurs de recherche, réseaux sociaux, blogs et podcasts, Paris, Pearson

- Articles :

Ausha, « Le storytelling dans le podcast : l'art de raconter des histoires en 3 questions ».

BRULHATOUR Frédéric, « Une hausse de 48 % de l'audience des podcasts natifs », Le Pod, 25/09/2020.

CAPRON Camille, « Catalogues, autopublication et objets connectés : quel avenir pour le livre audio en France ? », ActuLitté, 24/03/2020

CONTRERAS Isabel (29/11/2019), « Livres audio : A l'offensive », Livres Hebdo, https://www.livreshebdo.fr/article/livres-audio-loffensive?xtmc=podcast&xtcr=2#489160

CONTRERAS Isabel (14/06/2019), « Un livre audio podcasté », Livres Hebdo, https://www.livreshebdo.fr/article/un-livre-audio-podcaste?xtmc=podcast&xtcr=23

GARY Nicolas (09/07/2019), « La rentrée littéraire Flammarion en podcasts : lecture et entretiens », ActuaLitté, https://www.actualitte.com/article/monde-edition/la-rentree-litteraire-flammarion-en-podcasts-lecture-et-entretiens/95735

GARY Nicolas (07/11/2019 ), « Les liens entre livre et podcast se resserrent dans le monde numérique », ActuaLitté, https://www.actualitte.com/article/lecture-numerique/les-liens-entre-livre-et-podcast-se-resserrent-dans-le-monde-numerique/97734

52

GENTILLEAU Fiona (27/04/2020°, » Les audiences de podcast et d'audio digital en hausse pendant le confinement», emarketing.fr

GUCHEREAU Alexiane (05/04/2019), « Editis lance des podcast littéraires », Livres Hebdo,
https://www.livreshebdo.fr/article/editis-lance-des-podcast-litteraires?xtmc=podcast&xtcr=32

JABBE Elias (04/12/2018), « Podcasts : digitising an oral tradition », Wamda, https://www.wamda.com/index.php/en/2018/12/podcasts-digitising-oral-tradition

HAMMERSLEY Ben (12/02/2004), « Why online radio is booming » , The Guardian, https://www.theguardian.com/media/2004/feb/12/broadcasting.digitalmedia

LACOUR Cécilia (10/01/2020), « Les éditeurs à l'assaut du podcast ? », Livres Hebdo

Lettres Numériques (24/09/2019), « Image, audio, texte : les trois piliers de la communication web », ActuaLitté, https://www.actualitte.com/article/monde-edition/image-audio-texte-les-trois-piliers-de-la-communication-web/96992

MANILEVE Vincent (25/11/2014), « La radio doit-elle s'inquiéter du podcast ? », Slate, http://www.slate.fr/story/95057/radio-podcast

Médiamétrie, communiqué de presse du 26 mars 2019, https://www.mediametrie.fr/sites/default/files/2019-03/2019%2003%2026%20CP%20Global%20Audio_1.pdf

Médiamétrie, communiqué de presse du 22 avril 2020, https://www.mediametrie.fr/fr/global-audio-1

PATARD Alexandra (27/02/2020), « Instagram : étude sur les tendances de l'engagement », Blog du Modérateur, https://www.blogdumoderateur.com/instagram-tendances-engagement/

53

Partenaire (08/10/2018), « Robert Laffont et Nouvelles Écoutes lancent le podcast « Primo » », ActuaLitté, https://www.actualitte.com/article/monde-edition/robert-laffont-et-nouvelles-ecoutes-lancent-le-podcast-primo/91251

SKIDMORE Ryan (01/05/2018), « Podcasting : the new oral tradition », Carmine, https://carmine.io/podcasting-new-oral-tradition/

URBAIN Thomas (25/05/2020), « Comment Spotify est devenu un géant incontournable du podcast », La Tribune, https://www.latribune.fr/technos-medias/comment-spotify-est-devenu-un-geant-incontournable-du-podcast-848532.html

VINCY Thomas (16/04/2020), « Le Masque lance des »podcasts» noirs et féminins », Livres Hebdo

- Documents :

Synthèse de la rencontre « Comment lirons-nous demain ? » lors des Assises du livre numérique 2019

Etude de 2019 du SNE sur les français et le livre audio

Etude « Les français et la lecture 2019 » effectuée par le CNL

- Podcasts (écoute, analyse de leurs contenus et réseaux sociaux/sites) : Pile

La page blanche Primo

Des livres et moi Flammarion

54

Les Coulisses du podcast, épisode «Communiquer et promouvoir son podcast : réseaux sociaux et

référencement» , https://podcast.ausha.co/coulissespodcast/communiquer-et-promouvoir-son-
podcast-reseaux-sociaux-et-referencement

- Autres sites : pour avoir accès à des données et définitions générales

Le Pod PodMust

55

VII) Sommaire annexes

A) Grilles d'entretiens 56

1. Grille d'entretien avec les podcastrices amateures 56

2. Grille d'entretien avec les podcastrices des maisons d'édition 57

3. Grille d'entretien avec Justine Souque 58

B) Entretiens 60

1. Entretien avec Anne-Gaëlle Huon 60

2. Entretien avec Justine Souque 63

3. Entretien avec Claire Jéhanno 68

C) Graphiques, données et pourcentages 71

D) Captures écrans de l'étude quantitative 74

E) Analyse des comptes Instagram de La Page Blanche, Pile et

Primo : 74

56

A) Grilles d'entretiens

1. Grille d'entretien avec les podcastrices amateures

QUESTIONS

REPONSES

- Pouvez-vous me parler de [Nom du

podcast] ? (question ouverte pour

permettre à la personne de dire

plusieurs choses sur son podcast : but,

processus de création, idée
globale...)

 

- Pourquoi ce nom ?

 

- Pourquoi le format du podcast plutôt

qu'un autre ?

 

- Vous proposez votre podcast sur

[Nom(s) de plateforme(s)], pourquoi ce(s) choix ?

 

- Vous travaillez avec [Nom d'un

label], quels sont les avantages d'une telle cohésion ?

 

- La durée moyenne de vos épisodes est

de [Durée] ? Cela est-il important pour vous ?

 

- Ecoutez-vous des podcasts ? des

podcasts littéraires ? Si oui,
les(s)quel(s) ?

 

- Quelle relation entretenez-vous avec

les autres podcasts littéraires ? Les autres podcasteurs.rices ?

 

- Comment choisissez-vous vos

sujets ? En fonction de livres lus ?

Des sorties littéraires ? D'une
demande ?

 

- Avez-vous des partenariats avec des

maisons d'édition ? Avec des
médias ?

 

- Quel place donnez-vous à l'auteur

dans vos contenus ?

 

- Quelles sont vos audiences ? Les

analysez-vous ?

 

- Connaissez-vous le profil type de vos

auditeurs.rices ?

 

57

- Echangez-vous avec eux ?

 
 

- Comment avez-vous fait/faîtes-vous

connaître votre podcast ?

 

- Que pensez-vous du podcast comme

nouveau moyen de communication pour le livre ?

 

- En quoi cela diffère de l'offre radio

déjà présente ?

 

2. Grille d'entretien avec les podcastrices des maisons d'édition

QUESTIONS

REPONSES

- Pouvez-vous me parler de [Nom du

podcast] ? (question ouverte pour

permettre à la personne de dire

plusieurs choses sur le podcast : but,

processus de création, idée
globale...)

 

- Pourquoi ce nom ?

 

- Qui s'en charge dans le groupe/ la

maison ? (en quoi cela a-t 'il changé

l'organisation, les postes, les
compétences...)

 

- Pourquoi le format du podcast plutôt

qu'un autre ?

 

- Est-ce que cela diffère de l'offre radio

que l'on peut avoir en relations
presse ?

 

- La durée moyenne d'un de vos

épisodes est de [Durée] ? Cela est-il important pour vous ?

 

- Vous proposez votre podcast sur

[Nom(s) de plateforme(s)], pourquoi ce(s) choix ?

 

- Vous travaillez avec [Nom d'un

label], quels sont les avantages d'une telle cohésion ?

 

58

- Quels retours avez-vous déjà eu (des

lecteurs, non lecteurs,
professionnels...) ?

 

- Quelles sont vos audiences ?

 

- Connaissez-vous le profil type de vos

auditeurs ? Sont-ils des lecteurs du groupe Editis ?

 

- Les auteurs du groupe sont-ils

demandeurs d'y prendre part ? Sur quel(s) critère(s) leur proposez-vous d'y intervenir ?

 

- Quelle place y donnez-vous à l'auteur

? au livre ?

 

- Voyez-vous le podcast comme un

nouvel outils de communication et de marketing des maisons d'édition ?

 

- Cela remplace-t-il (a-t-il plus

d'impact que) une intervention dans la presse radio ?

 

- Avez-vous déjà eu des retours de

libraires ? S'intéressent-ils et
utilisent-ils votre podcast ?

 

- Quel lien faites-vous avec le podcast

et le livre audio ?

 

- Pensez-vous qu'une présence audio et

donc que l'audio en général pourrait

aider à attirer vers le papier ?

 

- Est-ce une façon de proposer du

contenu audio gratuit aux lecteurs et donc les sensibiliser au livre audio ?

 

3. Grille d'entretien avec Justine Souque

QUESTIONS

REPONSES

- Comment définissez-vous le terme

podcast ?

 

- Le terme podcast littéraire ?

 

- Selon vous, le podcast littéraire est-il

différent du podcast tel qu'on le conçoit (par sa forme, son contenu,

 

59

son utilisation, son créateur/sa

créatrice, les
auditeurs/auditrices...) ?

 

- Pour vous, quel est le rôle d'un

podcast littéraire ?

 

- Est-ce un nouveau moyen de

communication et/ou une nouvelle

création de contenu littéraire ?

 

- Y-a-t 'il un « concurrent » au podcast

littéraire ?

 

- Quel avenir voyez-vous pour ce

nouveau média ?

 

- Quel est l'utilité du podcast littéraire

dans le monde du livre, pour les maisons d'édition ?

 

- Comment un podcast littéraire peut-il

se faire connaître ?

 

- Quelle peut être la place de l'auteur

dans un podcast littéraire ?

 

- Dans quel but pourrait-il être

présent ?

 

- Tous types d'auteurs peuvent-ils y

être présents ?

 

- Un podcast littéraire a-t-il plus de

« valeur » si l'auteur y est présent ?

 

- Quelle incidence cette présence peut-

elle avoir sur l'auteur ? le podcast ? l'économie du livre ?

 

- Une présence dans un podcast

amateur ou un podcast professionnel est-elle différente ?

 

- Le livre papier en tant qu'objet a-t-il

sa place dans un podcast ?

 

- Est-ce que le podcast est devenu une

nouvelle manière de rendre les livres et la littérature accessibles à tous et à toutes ? ·

 

- Cela pourrait-il être en lien avec une

nouvelle forme de démocratisation

 

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de l'audio dans la pratique de la

lecture ?

 

- Pensez-vous que ce nouveau média

est en voie de généralisation dans le monde du livre ?

 

B) Entretiens

1. Entretien avec Anne-Gaëlle Huon

- Pourquoi avez-vous participé à Pile le podcast ?

Parce que j'ai rencontré Claire Jéhanno via mon éditeur d'Albin Michel. Elle avait envie de chroniquer Même les méchants rêvent d'amour, et j'ai trouvé que sa voix, le format, même le support, tout était intéressant et puis assez créatif. Ça rendait bien l'univers réaliste mais pas trop qu'on aime bien avoir dans les romans, davantage que la vidéo.

- Connaissiez-vous le podcast ?

C'est au moment où j'ai rencontré Claire, donc pas beaucoup de temps avant [l'enregistrement].

- Avant l'enregistrement : Écoutiez-vous des podcasts ? Lesquels ?

J'écoute très peu de podcasts. Je n'ai pas beaucoup de temps et je travaille de la maison donc je n'ai pas vraiment de temps de transport qui justifie ça. Et, par ailleurs, j'aime beaucoup écouter de la musique, j'en écoute beaucoup, beaucoup.

Donc, j'ai toujours l'impression que je n'ai jamais le temps. Ce qui est une fausse idée je pense puisqu'on a toujours 20 mn quand on se maquille etc... Mais j'y pense pas et j'aime bien être dans mes pensées aussi.

J'en écoute un peu l'été en voiture et dans les transports quand on va en vacances. J'aime beaucoup les TedX, en anglais ; les interviews d'économistes ou d'historiens, les gens qui sont des spécialistes et qui arrivent à vulgariser leurs savoirs, ça me plaît beaucoup.

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- A la suite de l'enregistrement : En écoutez-vous davantage ? Ce média vous intéresse-t-il plus ?

Non, je n'en écoute pas davantage. J'aime bien Pile car c'est vraiment très court, c'est ludique. C'est facile à grignoter, c'est un peu du snacking.

Après, non, ce n'est pas un media qui me touche particulièrement, lié aussi je pense à la façon dont je vis.

- Aviez-vous déjà participé à un autre podcast (littéraire ou non) avant ?

Oui, notamment un qui me plait beaucoup qui s'appelle « Un livre dans le tiroir » qui est par Kobo où j'ai été interviewée aussi, qui est très qualitatif.

- Avez-vous réitéré l'aventure depuis ?

Evidemment, pour moi c'est un média comme un autre, ça permet de se faire connaître auprès de gens différents, ça permet aussi d'être assez spontanée ce que l'écrit permet moins : il n'y a pas le ton, l'humour etc...

Donc moi j'aime beaucoup ce medium-là, je faisais de la radio quand j'étais étudiante et j'ai toujours bien aimé tout ce qui était sonore. J'aime bien, encore une fois, que l'esprit puisse s'évader, qu'il ne soit pas contraint par l'image. Je trouve que ça stimule l'imaginaire davantage, la voix que l'image.

- Comment s'est passé l'enregistrement ?

Très très bien, Claire est venue chez moi dans mon salon, un soir quand les enfants étaient couchés. Elle avait préparé des questions, évidemment elle avait lu le livre. Donc ses questions étaient très intéressantes, et puis c'était, je trouvais, très spontané. Moi j'aime bien quand les choses sont sincères et spontanées et c'est exactement le ton du podcast. De la même façon qu'Un livre dans le tiroir, c'était une conversation davantage qu'une interview un peu formatée. Moi, j'aime pas trop les interviews formatées. J'aime pas les écouter, j'aime pas les lire. Voilà, j'ai à coeur que tout soit assez honnête et sur le vif.

- Avez-vous préparé un "texte" ? Avez-vous réfléchi à des réponses ?

Non, pas du tout. Réfléchi à des réponses non plus. Parler de son livre est un exercice qui n'est pas compliqué, on connait quand même le contenu. Ce n'est pas une interrogation écrite non plus. Après, le jeu est de savoir donner envie mais Claire était là aussi pour m'y aider. Résumer son livre est toujours très difficile car on passe beaucoup de temps à écrire les quatrièmes de couverture, à les retravailler avec l'éditeur et je trouve que c'est souvent la meilleure version. A l'oral, c'est comme quand quelqu'un nous dit qu'il a vu un super film et qu'il va nous le raconter, ça donne rarement envie, je trouve. Donc, à moins de savoir résumer en une phrase, ce qui est très dur, voilà ça c'est moins évident. Mais pour le reste j'ai trouvé que c'était un exercice qui n'était pas très difficile.

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- Quels sujets avez-vous aimé aborder ?

C'était assez court, j'ai bien aimé les questions qu'elle m'a posées.

J'aime bien, de façon générale, quand on donne l'opportunité à l'auteur de parler des secrets d'écriture, des choses qu'on ne peut pas lire dans le livre et qu'on a à coeur de savoir une fois qu'on a lu le livre.

Typiquement, pour Même les méchants rêvent d'amour qui est le roman sur lequel elle m'avait interviewée, ce qui est intéressant est qu'il est inspiré d'une histoire vraie, et donc : comment on passe de la réalité à la fiction ? comment on gère aussi la pudeur ? comment on gère le secret de famille ? C'est des sujets intéressants mais j'avoue je ne me souviens plus si c'est ce dont on a parlé.

Pour Un livre dans le tiroir de Kobo, je me suis beaucoup livrée pendant cette interview, les questions étaient intéressantes aussi : comment arriver à l'écriture ? quel livre on a dans le tiroir ? Des questions un petit peu farfelues, j'aime bien.

- Qu'aimez-vous dans le format du podcast littéraire ?

J'aime quand ça me permet d'écouter l'auteur sans posture, sans masque. Il y a des auteurs, j'aimerais bien qu'ils m'expliquent comment ils écrivent.

Dans les entretiens libres comme ça, on entend beaucoup de l'auteur et de sa personnalité, on entend ses doutes ou a contrario sa grosse tête, on entend sa rigueur, là où il puise son inspiration, ça me plait beaucoup.

- Cette intervention vous a-t-elle été bénéfique ? J'imagine, il n'y a rien qui vous fait du tort.

- Avez-vous écouté le podcast par la suite ?

Oui, évidemment, je l'ai écouté le jour de sa sortie. Et puis je l'ai partagé aussi sur les réseaux sociaux.

- Selon vous, qu'apporte l'intervention d'un auteur / d'une autrice dans un podcast ?

On passe dans les coulisses, on a un rapport plus honnête, plus direct avec l'auteur et puis avec le processus de création.

- Aviez-vous, par le passé, participé à une émission radio ou contenu se rapprochant ? Si oui, cela a-t-il été différent avec le podcast ?

Je n'ai jamais fait d'émission radio sur mes livres. Récemment j'ai été interviewée pour une radio qui voudrait parler de la situation de l'édition et des auteurs pendant le confinement. C'était plus factuel, des questions comme : comment se portent les ventes ? quelles

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inquiétudes ? Il y a moins de place à l'imaginaire, on n'est pas là pour donner envie aux gens de rentrer dans un univers ou dans une histoire donc oui c'était différent.

- En tant qu'autrice, pensez-vous que le podcast laisse plus de place à l'auteur/autrice qu'un autre média ?

Oui, plus que l'interview par exemple dans un journal où tout est lu, relu ; probablement même que certains auteurs répondent à des questions sans être briefés à l'avance ou quand ils répondent ; le pire c'est de répondre par mail car là on peut faire relire par l'éditeur ou faire corriger.

Peut-être qu'un podcast c'est plus spontané peut-être si les réponses sont longues.

- Voyez-vous le podcast comme un possible nouveau média de création littéraire ?

Si c'est diffuser des oeuvres par le podcast, on se rapporte plutôt à l'audiobook.

Après, le podcast en soi, non je ne vois pas forcément une forme de création littéraire mais peut-être que je n'ai pas encore trouvé la solution.

- Selon vous, le podcast est-il amené à prendre de l'ampleur dans le monde du livre ? Si oui, pourquoi / dans quel(s) but(s) ?

Alors, moi je trouve qu'il y en a déjà beaucoup beaucoup. On m'envoie souvent des liens de podcasts, j'avoue je n'écoute pas tout. Il y a plein de trucs que j'adorerais écouter (émission de France Inter sur les livres, Pénélope Bagieu... ). Comme je disais, je préfère lire des livres ou écouter de la musique donc le succès du podcast ne passera pas forcément par moi.

Je crois plus en l'audiobook qu'au succès du podcast. Après je pense qu'il y en a de très très bons mais quitte à parler de littérature, autant lire un bon livre, contrairement peut-être aux trucs de développement personnel, je m'ennuie prodigieusement. En revanche, il y a quelques personnes que j'aime bien écouter en podcast, des américaines surtout. Mais c'est personnel ce que je dis.

2. Entretien avec Justine Souque

- Qu'est-ce qu'un podcast ?

Au sens large, le podcast peut être compris comme un rituel d'écoute. Quand on lit par exemple "disponible en podcast", cela signifie que nous avons accès à un contenu audio n'importe quand. Il est souvent d'usage de distinguer les podcasts comme rituel d'écoute des podcasts dits natifs, c'est-à dire des créations sonores nouvelles, avec un format relativement court et un rythme de production régulier (quotidien, hebdomadaire, mensuel...). Mais cette distinction apporte une certaine confusion. Les podcasts sont par essence natifs, sinon il faut mieux parler de replay, de réécoute, ou de rediffusion.

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- Qu'est-ce qu'un podcast littéraire ?

Un podcast littéraire a pour point de départ la vaste thématique du monde des livres. Ce type de podcast peut aborder les coulisses d'une publication, depuis la recherche d'inspiration lors de l'écriture, jusqu'à la promotion de l'ouvrage, en passant par l'édition du texte. Le podcast littéraire peut aussi valoriser un mouvement littéraire, une maison d'édition, un genre, un auteur, ou un livre en particulier... Certains podcasts sont de vrais relais de promotion, en conseillant des lectures. Ajoutons que les podcasts littéraires englobent la fiction et la nonfiction : ce qui compte, c'est la littérarité du texte, autrement dit sa valeur littéraire.

En ce qui concerne les podcasts littéraires de fiction, il convient de distinguer l'adaptation sonore d'un texte préalablement publié d'un texte écrit spécialement pour une diffusion sonore. Dans ces deux cas, le rendu doit répondre aux exigences du format podcast : être pensé pour l'audio, et sous forme d'épisodes.

- Un podcast littéraire est-il différent du podcast tel qu'on le conçoit (par sa forme, son contenu, son utilisation, son créateur/sa créatrice, les auditeurs/auditrices...) ?

Un podcast littéraire est seulement l'une des offres dans la planète podcasts. Sur cette planète, il y en a pour tous les goûts, disponibles quand chacun le souhaite. Un podcast sportif, médical, économique ou littéraire de qualité nécessite un format audio rythmes par épisodes réguliers et relativement brefs, autour desquels se réunissent des passionné.e.s (aussi bien le.la créateur.trice du podcast que les auditeurs.trices).

- Selon vous, à quel moment le podcast littéraire est-il arrivé en France ?

Le véritable engouement de ce format audio est très récent, il y a environ deux ans. Cela ne veut pas dire que le podcast littéraire n'existait pas avant, mais il a pris une toute autre ampleur, en témoigne l'arrivée des géants du monde de l'audiovisuel, des médias et de l'édition pour développer cette offre en France.

- Quels acteurs se le sont approprié en premier ?

Avant ces géants, il y a eu des podcasts littéraires plus confidentiels, réalisés par des amateurs.trices, et non des professionnels. Ces acteurs.trices sont toujours là et méritent d'être entendu.e.s

- Quels en sont les usages actuels ?

Un podcast littéraire s'écoute quand on en a le temps et l'envie, seul ou à plusieurs. Cela dépend de chacun, c'est ce qui fait la grande liberté du podcast. Les podcasts qui font un effort particulier sur l'habillage sonore et l'accompagnement musical peuvent être écoutés au casque, pour une plus grande immersion et capacité d'attention.

- Pour vous, quel est le rôle d'un podcast littéraire ?

Un podcast littéraire est complémentaire de la passion pour la lecture. Il accompagne et valorise le livre sous toutes ses formes, qu'il soit papier ou audio.

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- Est-ce un nouveau moyen de communication et/ou une nouvelle création de contenu littéraire ?

Les deux, cela dépend de la ligne éditoriale du podcast, s'il se positionne comme un relais de promotion, ou bien comme le canal de diffusion d'une oeuvre nouvelle.

- Qui sont les créateurs ?

Les passionnés de littérature et les professionnels de l'édition.

- Y-a-t 'il un « concurrent » au podcast littéraire ?

Non.

- Quel avenir voyez-vous pour ce nouveau medium ?

Une ampleur croissante et des exigences de plus en plus élevées quant à la qualité de la narration et du son.

- Connaissez-vous le profil type d'un auditeur /une auditrice de podcast littéraire ? Des lecteurs, et surtout des lectrices.

Quel est l'utilité du podcast littéraire dans le monde du livre, pour les maisons d'édition ? La promotion d'un ouvrage et de son auteur.

- Comment les podcasts littéraires se font-ils connaître ? Y-a-t `il une « méthode miracle » pour la reconnaissance ?

Le bouche à oreille fonctionne particulièrement au sein d'une communauté déjà soudée autour d'une même inclination, celle du livre.

- Selon vous, quelle est la place de l'auteur/ autrice dans les podcasts littéraires ?

Je crois qu'a minima, l'auteur.e doit savoir que son livre sera évoqué dans un podcast, grâce à son attaché de presse par exemple, car cette présence fait partie de la promotion du livre. L'auteur.e n'est toutefois pas indispensable, car à partir du moment où le livre est publié, il est entre les mains de son lectorat.

- Dans quel(s) but(s) pourrait-il/elle être présent(e) ?

Si l'auteur.e vient dans un but uniquement promotionnel, c'est une publicité à peine subtile qui n'ajoutera pas de contenu qualitatif au podcast. Il est intéressant de l'inviter pour connaître ses propres goûts littéraires, ses procédés d'écriture... En bref, l'invitation d'un ou d'une auteur.e lors d'un podcast ne doit pas être un prétexte, mais bien l'occasion d'approfondir un sujet.

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- Quel peut-être leur apport dans un podcast ? (intervention, lecture...)

Si l'auteur.e est à l'aise dans l'exercice de lecture, il peut intervenir en lisant des passages qu'il ou qu'elle juge emblématiques (les plus personnels, difficiles à écrire...). Quand l'auteur.e parle, il est nécessaire qu'il ou elle donne encore plus de chair, de vie, à son livre, en ponctuant les émissions d'anecdotes et de ressenti.

- Tous types d'auteurs/autrices ont-ils leur place dans un podcast ? (cf genre littéraire ?)

C'est avant tout la personnalité de l'auteur qui compte, et non le genre qu'il représente. Il faut que sa voix, sa présence, apporte une valeur ajoutée au podcast. Si ce n'est pas le cas, il est préférable que l'animateur.trice du podcast parle en son nom.

- La voix, la personnalité de l'auteur/autrice ont-ils leur mot à dire ?

Sauf si le podcast littéraire a clairement été créé pour donner la voix aux auteur.e.s, ils et elles ne doivent pas nécessairement s'imposer lors des émissions. Les oeuvres doivent pouvoir vivre indépendamment de la présence de l'auteur. Par contre, si l'auteur.e a prêté sa voix à la version livre audio de son ouvrage, l'entendre est une aubaine, non seulement pour faire connaître la publication sous ses différents formats, mais aussi pour offrir un moment de lecture privilégié aux auditeurs.

- Un podcast littéraire a-t-il plus de "valeur" lorsqu'un auteur / une autrice est présent(e) (pour parler de ses romans, d'un genre littéraire, d'une analyse ) ?

Non, sauf si le thème du podcast littéraire est défini comme une rencontre avec différent.e.s auteure.s.

- Est-il préférable qu'il/elle y soit présent(e) tout le long de l'épisode ? pour une intervention ? qu'il/elle soit un réel acteur du podcast ?

Là encore, tout dépend de la ligne directrice du podcast. Mais si le podcast n'est pas uniquement dédié à une rencontre avec un.e auteur.e, il est tout à fait possible d'insérer un contenu pertinent pré-enregistré dans un épisode. La priorité est la pertinence et la vigueur du propos introduit.

- Quel incidence a la présence de l'auteur/autrice sur un podcast ? pour l'auteur/ l'autrice ?

La présence de l'auteur.e sur un podcast, c'est un nouvelle voix à écouter, en plus de celle de l'animateur.trice, pour les auditeurs. Il faudra donc une certaine complicité entre l'animateur.trice du podcast et l'invité.e, afin que le déroulement soit fluide, car avec le podcast, il n'y a pas de repères visuels qui accompagnent les échanges.

- Sa présence dans un podcast professionnel (ex : créé par une maison d'édition) ou amateur (ex: créé par une lectrice) est-elle différente ?

La présence dans un podcast programmé par une maison d'édition perd en spontanéité. Les auditeurs se doutent qu'il s'agit d'une invitation promotionnelle, et tout l'enjeu sera de

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transformer ce moment en une rencontre authentique. L'avantage d'un podcast amateur est double, non seulement pour le ou la podcasteur.teuse qui, selon la notoriété de l'auteur.e, va voir les chiffres de son audience augmenter, et pour l'auteur.e, qui se sentira davantage dans une conversation moins formelle, et donc plus intimiste.

- Pensez-vous que cela participe à la promotion de leur image d'auteur/autrice ? à la promotion de leurs livres ?

Oui, c'est même une motivation.

- Une participation à un podcast peut-elle avoir un "bénéfice économique" (cf ventes de livres) pour l'auteur ?

Oui, mais le contraire est vrai aussi : une mauvaise critique d'un livre lors d'un podcast peut desservir l'ouvrage.

- Existe-t-il des podcasts créés par des auteurs/autrices ?

A ma connaissance, c'est le cas pour des auteur.e.s qui ont aussi des activités journalistiques en parallèle, comme Lauren Malka.

- Les auteurs littéraires ne sont-ils cantonnés qu'aux podcasts littéraires ?

Les auteur.e.s peuvent aussi être invité.e.s pourquoi pas à d'autres types de podcasts, selon le thème de leur livre, par exemple des podcasts historiques, sociologiques ou sociétaux.

- Dernière question, plus large : si je prends par exemple le podcast Primo mais également quelques podcasts de fictions, pouvons-nous supposer que le podcast peut être vu comme une sorte de plateforme liée au processus de création de l'auteur ?

Je crois que, plus largement, le podcast en tant que format sonore divisé en épisodes peut inviter les auteur.e.s à penser autrement la dimension orale (polyphonie, dialogue...) et la construction du texte (enchaînements des péripéties, rythme des phrases...), durant le processus d'écriture.

- Le livre papier en tant qu'objet a-t-il toujours une place dans un podcast ? (étant donné qu'il n'y a pas le visuel comme à la TV ou sur Insta)

L'audio est là pour faire jouer l'imagination des auditeurs. Sans écran, ils peuvent imaginer l'objet livre, projeter à quoi il pourrait ressembler. C'est au podcasteur ou à la podcasteuse de décrire la couverture, le format, peut-être même les illustrations à l'intérieur, et autres détails qui attisent la créativité et la curiosité de l'auditorat. Il s'invente alors son propre objet livre, et des sensations toutes personnelles accompagneraient ses projections, en attendant que l'auditeur tienne le livre entre ses mains.

- Si non, comment palier à ce manque ? (lien avec d'autres réseaux ?)

Les réseaux sociaux ne pallient pas un manque, ce sont des relais de diffusion complémentaires.

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- Est-ce que le podcast est devenu une nouvelle manière de rendre les livres et la littérature accessibles à tous et à toutes ? ·

Oui, c'est un format qui démocratise, en règle générale, les productions culturelles. En ce qui concerne le livre, le défi est de convaincre des non lecteurs, de ne pas se satisfaire d'une communauté qui lit déjà beaucoup. Le croisement des disciplines et centres d'intérêt (livre/jeu vidéo ; livre/cinéma...) serait une initiative astucieuse pour partir à la conquête de nouveaux lecteurs.

- Cela pourrait-il être en lien avec une nouvelle forme de démocratisation de l'audio dans la pratique de la lecture ?

Le podcast valorise indirectement le livre audio et la lecture à haute voix (lors de festivals ou de rencontres en librairie), car il nous familiarise avec l'écoute de contenu littéraire. Il n'est plus seulement question de lecture silencieuse et solitaire : l'audio ouvre de nouvelles perspectives dans la pratique de lecture.

- Pensez-vous que ce nouveau média est en voie de généralisation dans le monde du livre ?

Le podcast est en train de prendre une place de choix, et ce à différents moments de la vie du livre : coulisses de la création littéraire, sortie en librairie, ou adaptation du livre papier en autre média (livre audio, film, série...). Les éditeurs de livre papier et audio ont tout intérêt à considérer le podcast comme un acteur à part entière du monde éditorial.

3. Entretien avec Claire Jéhanno Pouvez-vous me parler de Pile ?

PILE, c'est le podcast pour trouver le bon livre pour le bon moment. Il s'adresse à ceux qui aiment lire mais ne savent pas toujours quoi... et à tous ceux qui n'aiment pas (mais je me charge de les convaincre !)

Pourquoi ce nom ?

PILE, comme une pile de livres ou comme pile le bon livre pour le bon moment ! C'est le premier nom qui m'est venu à l'esprit (il faut dire qu'il y a des piles de livres partout chez moi)!

Pourquoi le format du podcast plutôt qu'un autre ?

Je conseillais souvent des livres à des amis ou à de la famille, et là, c'est tout pareil ! Beaucoup d'émotions et de délicatesse passent par la voix. C'est vraiment un format génial pour créer de la proximité.

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Vous proposez votre podcast sur différentes plateformes (podtail, soundcloud, deezer...), pourquoi ce choix ?

Plus PILE est écouté, plus il y a de chances que des livres que j'adore soient lus et appréciés. C'était donc évident pour moi que l'on puisse retrouver mon podcast un peu partout.

Vous ne travaillez pas avec un label, est-ce un choix ? Le souhaiteriez-vous ?

PILE, c'est vraiment un espace de liberté et de récréation pour moi. J'aime le fait de le produire en indépendante.

La durée moyenne de vos épisodes est de 3mn (pour les « épisodes ») à 45mn (pour les « Hors-Série »).

Cela est-il important pour vous ?

Les hors-séries me permettent de partager de formidables rencontres avec des auteurs, des passionnés de livres... Ces moments sont tellement merveilleux que ce serait dommage de se limiter à une durée de 5 minutes, qui est mon format original. Et puis, c'est une des grandes forces du podcast : ne pas être formaté, ne pas être obligé de rentrer dans une case... donc j'en profite à fond !

Pourquoi proposez-vous ces deux types de contenus ?

Il y a une grande diversité dans PILE : des romans, des classiques, des BDs, du tout nouveau qui vient de sortir, ou des coups de coeur qui durent toujours... C'est chouette que cette liberté se retrouve aussi dans une diversité de formats, des contenus différents... ! Les auditeurs.ices me disent souvent qu'ils aiment l'alternance entre les deux formats, qu'ils ne les écoutent pas pour les mêmes raisons et dans les mêmes moments.

Ecoutez-vous des podcasts ? des podcasts littéraires ? Si oui, les(s)quel(s) ?

Oui, j'adore en écouter ! J'aime beaucoup notamment ce que fait Arte Radio, c'est une source d'inspiration depuis des années ! Mais je m'intéresse aussi à la production des podcasteurs indépendants. En revanche, j'écoute assez peu de podcast littéraire.

Quelle relation entretenez-vous avec les autres podcasts littéraires ? Les autres podcasteurs.rices ?

C'est un milieu très bienveillant, avec beaucoup d'entraide. On s'envoie des encouragements sur les réseaux sociaux, on se refile des conseils, et surtout on fait des soirées !

Comment choisissez-vous vos sujets ? En fonction de livres lus ? Des sorties littéraires ? D'une demande ?

Parfois, je lis un livre génial et je cherche un thème qui me permettrait d'en parler. Parfois, c'est le contraire, et dans ce cas, je peux mettre des mois avant de trouver le livre qui correspond à ce thème. J'aime bien aussi suivre les demandes des auditeurs/auditrices, et chercher le livre qui collera à leurs envies de thématique.

Avez-vous des partenariats avec des maisons d'édition ? Avec des médias ?

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Certaines maisons d'édition me proposent de m'envoyer des livres, mais je n'accepte que très rarement. Il faut que cela colle à mes thématiques de lecture, à mes envies du moment...

Quel place donnez-vous à l'auteur dans vos contenus ?

J'adore en interviewer dans mes hors-séries ! Sur les épisodes normaux, je suis toujours hyper contente quand un auteur découvre que son livre est sur PILE et qu'il m'envoie un petit mot. Le jour où Sophie Fontanel m'a complimentée sur ma voix, j'étais en joie !

Quelles sont vos audiences ? Les analysez-vous ?

Je regarde peu les statistiques et ne communique pas tellement sur mes audiences, mais disons que PILE fait partie des podcasts littéraires (natifs) les plus écoutés...

Connaissez-vous le profil type de vos auditeurs.rices ?

Pas vraiment, non

Echangez-vous avec eux ?

Oui, sur les réseaux sociaux, et c'est un vrai bonheur !

Comment avez-vous fait/faîtes-vous connaître votre podcast ?

Je compte beaucoup sur le bouche-à-oreille, je pense que c'est le plus efficace en termes de recommendation, mais sinon, les réseaux sociaux... J'ai aussi eu la chance d'avoir des articles dans de grands medias comme Lire, ELLE, lemonde.fr, Telerama...

Que pensez-vous du podcast comme nouveau moyen de communication pour le livre ?

Je trouve que c'est un formidable moyen de faire entendre les voix du monde du livre, les auteurs bien sûr, mais aussi les passionnés, les libraires, les éditeurs... Mais il faut que cela reste une approche authentique et sensible pour que les auditeurs.rices s'y retrouvent.

En quoi cela diffère de l'offre radio déjà présente ?

L'offre radio est déjà très intéressante, mais la liberté qu'offre le podcast permet d'explorer des terrains inconnus...

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C) Graphiques, données et pourcentages

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D) 74

Captures écrans de l'étude quantitative

E) Analyse des comptes Instagram de La Page Blanche, Pile et Primo :

IDENTITE

La Page Blanche : @lapageblanche_podcast 96 publications

777 abonnements

NOMBRE ABONNES

1073 abonnés

FREQUENCE DE PUBLICATION

Environ 3 fois par semaine

TYPES DE PUBLICATION

Sortie d'épisode (des trois podcasts d'Emilie) Partage de citations extraits d'épisodes du podcast La Page Blanche, mais aussi des

deux autres podcasts qui n'ont pas de
comptes dédiés

REACTIONS AUDIENCE

Nombre moyen de mentions j'aime = 66 Nombre moyen de commentaire = 2

RATIO / TAUX ENGAGEMENT

(693/1073) X 100 = environ 64 %

ANALYSE

Remarque : la fréquence du nombre de posts pour La Page Blanche est d'environ un par mois

Remarque 2 : moins d'abonnés que Pile mais ceux-ci réagissent plus.

Dans ses stories à la une, il y a une section « interviews » pour retrouver des extraits avec des visuels auteurs.

Emilie répond à chaque commentaire et les aime également.

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IDENTITE

 

Primo : @primopodcast 190 publications 42 abonnements

NOMBRE ABONNES

1394 abonnés

FREQUENCE DE PUBLICATION

Une fois par semaine

TYPES DE PUBLICATION

En ce moment : chroniques des 3 livres (partages de posts de lecteurs et lectrices) ;

partage d'épisodes, de rencontres et
d'interviews.

REACTIONS AUDIENCE

Moyenne d'environ 24 mentions j'aime Moyenne d'environ 0,8 commentaires

RATIO / TAUX ENGAGEMENT

(251/1394) X 100 = 18 %

ANALYSE

Compte qui fait office de « vitrine » pour le podcast et maintenant pour les trois livres des primo-romanciers.

Toujours des stories à la Une avec des extraits du podcasts, des informations sur les auteurs, les livres et les événements.

Remarque : un compte très lié au groupe Editis. On retrouve en ce moment dans la bio du compte, le #LisezChezVous mis en place par le groupe Editis depuis le début du confinement. De plus, dans la bio se trouve

toujours la mention des comptes de
@nouvellesecoutes @robertlaffont (les deux créateurs du podcasts) ainsi que ceux des trois autrices @alexandra.ughetto @albane.l et @h.e.l.e.n.e.v.

Conclusion : compte lié à plusieurs entités, non indépendant.

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IDENTITE

Pile : claire.Jéhanno (anciennement

@pile le podcast)

NOMBRE ABONNES

2814

FREQUENCE DE PUBLICATION

3 fois par semaine

TYPES DE PUBLICATION

Partage d'idées de lecture

Partage de sortie d'épisodes

Photos d'elle en lisant

Photos de lieux liés aux livres ou non

REACTIONS AUDIENCE

Nombre moyen de mentions j'aime = 104 Nombre moyen de commentaires = 4

RATIO / TAUX ENGAGEMENT

(1093/2814) X 100 = 38 %

ANALYSE

Avant : le compte était au nom de Pile. Il a changé pour pouvoir partager des choses plus personnelles et aussi se montrer en tant que Claire Jéhanno ; et pas seulement partager des choses liées à Pile.

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VIII) Note de synthèse

Le lien entre l'oralité et la littérature a toujours existé. Dans l'Antiquité, ces deux entités étaient liées et permettaient un transfert de savoirs. Aujourd'hui, alors que les nouvelles technologies nous permettent d'avoir accès à la moindre information, le podcast recrée ce lien en proposant à l'individu une écoute et une attention, à la fois personnalisées et accessibles à tous et à toutes.

Le podcast fait désormais partie de nos vies. À la même échelle que la musique, il peut s'écouter partout et à tous moments. Il rentre au coeur des réflexions des marques et plateformes d'écoute, devenant l'outil indispensable. Son côté polyvalent attire et séduit. On peut écouter un podcast sur le féminisme, puis en écouter un deuxième sur un fait d'actualité. Aucun sujet n'est mis de côté. La littérature est donc elle aussi au coeur des préoccupations du podcast : podcast de fiction et de non fiction. Les maisons d'édition et acteurs du livre ont donc dû appréhender ce nouvel outil, et cela de manières différentes. Des groupes, déjà sensibilisés à des nouvelles pratiques, ont fait de l'audio leur coeur d'innovation et se sont mis à créer plusieurs podcasts avec l'aide de studios de production spécialisés dans le podcast. D'autres maisons ont choisi d'utiliser ce nouvel outil de manière plus originale, sur un laps de temps ou encore via un format unique.

Le podcast littéraire a trouvé son public mais également ses créateurs et créatrices. Des amateurs et amatrices ont créé leurs podcasts littéraires, de la même façon que, des lecteurs et lectrices avant eux et elles, avaient créé leurs blogs littéraires. Ainsi, ils et elles se sont mis à parler de livres, mais également à accueillir des auteurs et autrices.

Bien plus qu'un simple moyen de prescription littéraire, le podcast est devenu un nouvel endroit d'échanges et de création littéraire. La liberté donnée à ce format et la transformation possible de celui-ci attire de plus en plus. Le contenu de certains podcasts donne publication à des livres papiers, pendant que certaines histoires ne sont créées qu'au format podcast donnant lieu à des podcasts de fiction et remplaçant ainsi un format papier.

En somme, le podcast n'a pas encore fini de se développer et d'innover. De nouveaux changements, de pratiques et de créations, vont très certainement arriver au fur et à mesure des années à venir. Le podcast, et donc le podcast littéraire, est une pratique à surveiller et à laquelle il est alors important de continuer à s'intéresser.






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"Le don sans la technique n'est qu'une maladie"