IV.2.3- La synchronisation des cycles
économiques (nominal et réel)
Une union monétaire avec des économies
hétérogènes peut, dans une perspective dynamique,
réduire les coûts des chocs asymétriques si elle
accroît la synchronisation des cycles économiques et si elle
favorise le développement du partage des risques entre les États
de l'union. Ces effets de l'union monétaire sont probables parce que
l'adoption d'une monnaie commune implique des changements structurels dans la
conduite des politiques économiques et dans l'intégration des
économies (Tapsoba, 2009). Dans une union monétaire
hétérogène, l'asymétrie des chocs et la nature
asynchrone des cycles économiques ne permettent pas la mise en oeuvre
d'une politique monétaire optimale ; parce que les effets d'une telle
politique deviennent contra-cyclique dans certains pays et pro-cyclique dans
d'autres. Frankel et Rose (1996) montrent que deux pays se caractérisant
par une forte intensité d'échange bilatérale ont tendance
à avoir des cycles économiques plus corrélés. Un
choc affectant une économie influe directement sur ses investissements
et par la suite d'une manière indirecte il affecte les économies
étrangères qui sont en relation commerciale avec cette
économie et vice versa.
La crédibilité de la politique économique
notamment la politique budgétaire apparait ainsi fortement liée
au degré de convergence des économies des pays membres (Kane,
2013). En effet, la présence de cycles asynchrones génère
des mécanismes asymétriques de propagation des impulsions
monétaires et de ce fait, des coûts différenciés de
la politique monétaire unique (Pinot, Polin, Seltz,
2000). Etant donné qu'une union monétaire est
propice à l'intensification des
cycles économiques (Frankel et Rose, 1998) la
concordance des cycleséconomiques est devenue un critère
important de convergence ex post, qui a fait l'objet de nombreuses analyses
théoriques et de multiples vérifications empiriques.
Sur le plan théorique tout d'abord, après la
remise en cause dans les années
1970 de l'hypothèse keynésienne par la nouvelle
macroéconomie classique, relatives à la concurrence parfaite et
aux anticipations rationnelles soutenues par Lucas (1973), la théorie du
cycle réel s'est servie du cadre néoclassique pour mettre les
fluctuations économiques au centre du débat théorique
(Kydland et Prescott, 1982 ; De Long et Plosser, 1983). La théorie du
cycle réel se démarque donc des thèses
néoclassiques en étudiant spécifiquement les fluctuations
économiques. Elle s'écarte aussi du modèle de Lucas
où la source des fluctuations réside dans les variations
aléatoires et non anticipées du stock de monnaie. Ainsi, les
cycles économiques sont engendrés par les réponses
(optimales) des agents à des chocs réels, essentiellement
technologiques. La théorie des cycles réels nie l'existence des
« trends » et soutient l'idée que des chocs sur les
économies ont des effets permanents et non temporaires ; de sorte qu'on
ne revient pas après cycle sur la trajectoire de long terme qui le
précédait (Kane, 2013).
Sur le plan empirique, en utilisant les modèles
univariés (MSAR) et multivariés (MSVAR) pour analyser les cycles
de l'indice de la production industrielle dans six pays de l'OCDE,
Cléments et Krolzig (2003) ont abouti à la détermination
de trois régimes de cycles et à l'identification du cycle commun.
L'avantage de cette étude est qu'elle montre la synchronisation des
cycles industriels avec le cycle communautaire. Elle met aussi en exergue le
comportement des pays face à l'expansion ou à la récession
de la zone européenne. Dans la même logique, Chauvet et Piger
(2003) ont identifié les phases (croissance et décroissance) et
les probabilités de transmission de la production industrielle
américaine. Quant à Ballone et al. (2006) ils ont construit un
indicateur stochastique des régimes de récession et
d'expansion.
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